Prologue : Une rencontre
Un homme marchait tranquillement dans une rue sinueuse et calme. Des bruits de sable, des chants nocturnes et des manifestations de petits reptiles animaient la ruelle endormie. L'homme marchait en continu, personne ne savait qui il était. Le peu de gens qu'il rencontrait l'appelaient « le voyageur » et les gens plus cultivés de ce monde l'appelaient Solon.
Solon marchait, ses sandales grattaient le sable. Les grains se faufilaient dans ses vêtements qui bougeaient à l'air sombre.
Il jeta un regard vers le ciel. Le temple n'était plus loin.
Il est bien dommage que l'histoire se perde dans l'abîme de nos souvenirs.
Il tourne la tête brusquement, essayant de repérer la voix dans le noir.
Un homme, grand, habillé d'une tunique et pieds nus, le crâne rasé, tenant un encensoir dans la main gauche était à quelques mètres de lui. Sa tunique s'arrêtait au mollet. Il ressemblait de là où il était à un vulgaire sac de joute que l'homme aurait posé sur son épaule gauche. Mais quand l'homme se retourna, il pût voir qu'il n'en était rien. Elle était maintenue à la taille par une ceinture faite en peau d'animal. Un animal qu'il ne reconnut pas dans l'obscurité - il avait la science infuse et ses connaissances lui valurent bien des ennuis.
venez donc, faisait l'homme. Je crois avoir ce que vous voulez.
Il était étonné. D'où sortait cet homme ? Que savait il sur lui? Et que savait il de ce qu'il cherchait ?
Il n'avait rien à perdre. Et il était assez curieux de savoir ce que cet mystérieux homme pouvait avoir à lui dire.
Il s'avança vers l'homme qui prit la direction inverse, se faufilant entre ruelles et traversant routes. Il était si rapide que Solon se demanda s'il ne volait pas. Il avait du mal à le suivre. Et seule, la lumière du charbon allumé dans l'encensoir lui permettait de repérer l'homme. Il évoluait droit, birfuquait tantôt à droite, tantôt à gauche, ne s'arrêtant pas, soulevant des nuages de poussière sur son passage.
Après environ dix minutes à errer ainsi, l'homme s'arrêta et monta lentement les marches de l'imposant édifice: le temple. L'un des plus majestueux édifices qui lui avait été donné de voir. Et les dieux auxquels il croyait savaient qu'il en avait vu beaucoup. Assez pour réjouir le cœur d'un homme simple et pragmatique comme lui. Il l'avait aperçu un peu plus loin et il n'aurait jamais pensé qu'il aurait fallu tant de temps pour l'atteindre.
De loin on aurait dit une pyramide. En approchant, la forme se précisait. On révisait rapidement notre opinion en voyant à l'entrée cette sorte d'arche imposante, soutenue par des colonnes en forme de servantes de l'Égypte antique qui tendaient leurs visages et leur bras vers le ciel, en attendant quelconque miracle. Selon les racontars qu'il avait pu saisir au cours de son épopée ici, ces statues étaient inspirées de faits réels, après une sécheresse plus marquante que les autres. Les paysans- et vassaux des seigneurs- avaient pris l'habitude de lever leurs têtes et leurs bras vers le ciel à l'heure du soleil couchant pour implorer la grâce des dieux. Sept jours après, une pluie diluvienne s'abattit sur les terres égyptiennes. Cette histoire amusait beaucoup Solon.
L'intérieur était aussi majestueux et imposant que l'extérieur. Ce temple ci était essentiellement consacré à la déesse Osiris, dieu de la fertilité en Égypte antique puis dieu de la vie et de la mort. Le nombre de statues, statuettes, gravures qui lui étaient dévouées en ce lieu l'impressionnait. Ces couloirs bas qui donnaient l'impression d'évoluer dans un lablabirynthe et ces colonnes, massives, imposantes et aux formes uniques lui coupèrent le souffle.
Celui ci était éclairé par la lumière de torches posées sur des socles en métal fixés au mur. Ils étaient disposés aux quatre coins cadinaux et sur toutes les colonnes qui surmontaient le temple.
L'ensemble était assez lumineux, respirant le mystère de ce qui s'y faisait. Cet atmosphère oppressait Solon, qui s'y sentait de trop. Il resserra sa capuche autour de son cou, plus par nervosité que par frilosité et jeta un regard global à l'endroit.
L'homme continuait toujours sa marche, tout droit, toujours tout droit, ne baissant pas la cadence et secouant l'encensoir à un rythme frénétique.
Sous les lumières, Solon pouvait remarquer les inscriptions sur son poignet, le fil de rafia attaché à chacun de ses pieds nus, la couleur de la tunique qui semblait évoquer l'or ou le soleil et enfin, l'aura qui émanait de lui.
Il s'arrêta enfin, devant un petit feu allumé dans une sorte de foyer ouvert, posa son encensoir à côté d'une statut représentant un des nombreux dieux de cette Égypte où il était venu chercher des réponses à ses nombreux questionnements.
L'homme s'assit à même le sol, dans la position de celui qui va méditer longuement et lui fit signe de l'imiter. Sans discuter, Solon s'exécuta.
L'homme reprit l'encensoir et se servant de ce qui ressemblait à une cuiller en bois, versa une poudre grise dans l'encensoir qui s'emplit de fumée, dégageant un parfum exquis, entêtant, envoûtant.
Les deux inspirèrent cette fumée en synchronisation.
L'homme remua l'encensoir, encore et encore, encore et encore, avant de le poser une dernière fois.
Il approcha ses mains du feu dans le foyer et y versa un liquide sorti de nulle part.
Vous êtes venu chercher ce que les hommes ont renoncé à trouver. Vous êtes venu découvrir ce qui vous échappe, ce qui vous dépasse. Vos pas vous ont guidé jusqu'à moi, le gardien de ce que les hommes ont tort d'enterrer dans les méandres de leurs souvenirs. Car proche est l'heure où le désintéressement des uns à la quête du savoir éternel sera la source de la perte des autres. Vous êtes venu entendre l'histoire de la cité dont on ne prononcé plus le nom, parce que signifiant déchéance, opprobre, faiblesse.
- Atlantiiis, scandait l'homme, comme pris dans une transe intense.
Son corps frémossait, vibrait, ses yeux se révulsaient, ses marques s'illuminaient, et les feuilles de rafia autour de son pied, comme par magie se détachèrent sous la pression des veines de l'homme apparentes au niveau de ses pieds et de ses bras.
Il continua, toujours plus secoué et avec un rire dément, sinistre:
- Il est bien dommage que l'histoire se perde dans l'abîme de nos souvenirs, que les hommes oublient ce qu'est la gloire du passé, que l'histoire de mon peuple ne soit plus qu'une légende. Vous, Solon, êtes venus à moi, non pas par le fruit du hasard, mais parce qu'il est temps que le mythe devienne légende, que la légende devienne histoire et que vous, vous homme des sentiers battus, vous soyez témoin de la vérité que l'oubli des hommes occulte.
Il avait prononcé ces derniers mots en lui tenant fortement la main, flottant dans l'air, la tunique au vent.
Solon sut ce soir là que rien n'est hasard et qu'il avait enfin trouvé ce qu'il cherchait. Il avait toujours été convaincu que la cité perdue comme les gens aimaient l'appeler était plus qu'un mythe, une légende. Bien plus. Et il avait en face de lui quelqu'un qui s'évertuera à le lui prouver.
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