Sirius Black
L'hiver jetait ses petits flocons blancs sur Londres, rendant rues, pavés, maisons, lampadaires, pigeons et passants porteurs d'un beau manteau blanc. La plupart des habitations étaient bordées de bonhomme de neige, chacun dotés d'une carotte ajustée par des enfants perfectionnistes.
Si beaucoup se promenait dehors afin de profiter de l'atmosphère hivernale, certains préféraient rester se reposer au cœur des foyers chauffés, une tasse de chocolat chaud fumante entre les mains, et un livre ouverts sur les genoux.
Sirius ne faisait pas parti de ces gens là. Lui avait prévu de sortir bien avant de songer à étudier.
Et dans une maison perdue entre le 11 et le 13 du Square Grimmaud, Sirius finissait de lacer ses bottes.
– Je sors ! hurla-t-il dans le vestibule tout en enfilant son manteau.
– Tu vas où, Sirius ? cria son frère depuis le sommet de l'escalier branlant.
Regulus dévala celui-ci en manquant de se rompre le cou à cause de ses chaussettes en laine. Il sauta par- dessus la dernière marche en manquant de s'écrouler et atterrit devant son grand frère en chancelant, les yeux pétillants.
– Hein ? Tu vas où ? Je peux venir avec toi ?
Sirius sourit tristement. Regulus, tout juste sorti d'une série de grippes et de rhinopharyngites, était avide de nouvelles activités autre que celle de divaguer fievreusement dans son lit et fixer le plafond d'un air absent. Les seules fois il était sorti dehors, c'était pour faire quelques bonhommes de neige sur les trottoirs avec son grand frère.
Sirius ne pouvait cependant l'emmener à l'extérieur, non seulement car il risquait de se choper une énième bactérie virale, mais en plus car il ne pouvait tout simplement pas lui révéler où il allait réellement.
– Je vais juste me balader, mentit-il avec culpabilité. Mais... Euh... Il fait très froid, donc il vaudrait mieux que tu restes bien au chaud dans la maison, Reg.
Regulus baissa la tête, un peu déçu.
– Mais tu avais dit...
– Je sais ce que j'ai dit, le coupa Sirius avec une pointe d'agacement. Mais aujourd'hui, je n'ai vraiment pas envie de faire un bonhomme de neige. D'accord ?
– D'accord, soupira Regulus en détournant les yeux. Mais... Demain...
– Demain, promis, nous sortirons ensemble pour jouer dehors, céda Sirius avec un demi-sourire.
Regulus hocha la tête, se résignant à passer une journée supplémentaire à jouer, seul dans une vaste de chambre.
– Je ne peux pas y aller avec toi ? insista-t-il.
– Euh... Non, Reg. Je préfère être seul, d'accord ?
– Bon... OK.
Sirius lui adressa un sourire contrit, et sortit dehors. Le froid lui gifla la peau de visage et il se frotta les mains l'une contre l'autre pour leur transmettre un soupçon de chaleur, tandis que ses bottes s'enfonçaient profondément dans la neige.
Il s'enfonça dans la rue, ne remarquant pas Kreattur, qui déblayait de la neige dans l'entrée. L'elfe le suivit des des yeux avec suspicion.
– Le jeune maître ne devrait pas sortir tout seul par ce temps... murmura-t-il avec hargne.
***
Sirius savait parfaitement où il allait. Ses pas le guidaient tout naturellement vers une petite maison bancale coincée entre deux immeubles londoniens. Une couronne de l'avant ornementait la porte, et un faux Père Noël en plastique gravissait une fenêtre à l'unique étage.
Sirius sourit car la maison de William regorgeait d'originalités moldues dont il ne s'était jamais douté de l'existence auparavant.
Cela faisait maintenant trois mois que William et Sirius se fréquentaient. Peu après leur première rencontre dans le parc sous une pluie torrentielle, ils s'étaient recroisés quelques jours plus tard dans un coin de rue. William avait aussitôt proposé à Sirius de venir prendre un goûter chez lui, et ce dernier avait immédiatement accepté.
Les deux jeunes garçons s'entendaient merveilleusement bien, malgré leurs centres d'intérêts différents. William aimait le hockey sur glace, regarder la télé, les kinders, les Beatles, et se disputer avec ses frères. Sirius n'avait jamais essayé toutes ces diversités, mais les découvrir avec son nouvel et premier ami le ravissait.
Il ne pensait plus que les moldus étaient inintéressants et stupides, comme le répétaient Walburga et Orion Black à tue-tête. Au début, il était vrai qu'il était méfiant, voire légèrement méprisant quelque fois, mais il se rendit peu à peu compte qu'il avait reçu une éducation trop radicale, fondée sur un tissu d'exagérations et d'idéaux racistes.
William, et les autres membres des McBurry, n'étaient pas les créatures infâmes et inférieures dont il avait entendu tant de descriptions péjoratives. En tout cas, il ne retrouvait William dans aucune d'elle, et le trouvait drôle et amusant, perspicace, et tout simplement attachant.
William lui-même appréciait Sirius. C'était un jeune garçon un peu étrange, certes, qui ne portaient pas de baskets mais des vêtements sobres et ajustés. Il paraissait parfois triste, mais lorsqu'il était de bonne humeur il était doté un sens de l'humour particulièrement développé et utilisait de temps en temps des expressions rigolotes tel que : « Par le caleçon de Merlin » « Nom d'un farfadet ! »
Évidemment, Sirius dissimulait sa nature de sorcier. Pour ne pas se mettre lui même, ni William, en danger. Il n'avait jamais parlé de Quidditch ou de sa future école Poudlard. Il n'avait naturellement jamais invité William chez lui, mais ce dernier ne s'en offusquait pas.
Néanmoins, il lui avait confié de nombreux sentiments. À quel point il se sentait seul et différents de ses parents, à quel point il aimait Regulus et espérait qu'il vivrait heureux. Il avait parlé ainsi de son intimité intérieure, les flots de paroles se déversant au fur et à mesure de sa bouche alors qu'il se rendait compte à quel point ce qu'il disait était vrai. William ne semblait pas tout comprendre, mais ne serait-ce que de le voir hocher la tête consolait Sirius.
Ainsi, les deux amis se voyaient régulièrement, quand William n'avait pas école et pas trop de devoirs. Sirius n'avait rien révélé de sa relation de ses parents, redoutant leur réaction en découvrant qu'il se liait d'amitié avec un moldu.
Un moldu...
Il faisait une grosse grosse bêtise, mais c'était plus fort que lui.
Sirius sonna à la porte de la maison de William. Un agréable carrillon traversa l'habitation comme s'il s'agissait d'un oiseau gazouillant. Quelques instants plus tard, des pas dévalèrent l'escalier et se précipitent derrière la porte. La serrure se deverouilla dans un grincement familier. Le visage de Sirius se fendit en un sourire enthousiaste.
Ce fut un grand adolescent boutonneux et aux cheveux bouclés qui lui ouvrit. Il évalua Sirius du regard puis se retourna vers un petit vestibule comblé de meubles dépareillés et de bibelots brillants.
– Eh, William ! Il y a ton pote bizarre, là !
Des pas précipités dévalerèrent un escalier grinçant, et William apparu, ses bouclettes d'ébènes s'agitant dans tous les sens. Il chassa son frère d'un geste de la main et, celui-ci prenant visiblement un malin plaisir à rester au beau milieu de l'entrée, il le pressa d'un coup de pied malicieux.
– Salut, Sirius ! Tu viens regarder le nouveau film qui est sorti ?
Sirius sentit son visage se fendre en un sourire.
– Carrément !
William le prit par le bras amicalement et l'entraîna dans la cuisine. Celle-ci était enfumée par les vapeurs d'un appétissant chili con carne sur lequel était penchée une femme cinquantenaire à la poitrine généreuse. Lorsqu'elle vit Sirius, son regard s'illumina.
– Sirius, mon grand ! Cela fait tellement longtemps que l'on ne sait pas vu !
– Seulement une semaine, Maman, lui rappela William en levant les yeux au ciel.
– Bonjour, Madame McBurry, répondit le jeune sorcier avec timidité.
William ouvrit le réfrégirateur. L'aura fraîche de celui-ci fit frissonner Sirius, qui ne saisissait toujours pas par quel miracle les moldus parvenaient à contenir un minuscule pôle Nord dans une boîte aussi peu esthétique. Celle des McCartney croulait sous les pots de yaourts multicolores, les Tupperware aux contenus douteux et les jus de fruit frais.
– On peut prendre le goûter et allumer la télé, Maman ? questionna William avec le ton d'un fils exemplaire.
Madame McBurry plissa les yeux, évaluant les doigts tachés d'encre sèche de sa progéniture.
– Tu as bien terminé tes devoirs ?
– Promis juré, craché par terre et même vomi !
Mme. McBurry claqua la langue avec amusement et fit un signe du menton à William, lui indiquant qu'elle avait cèdé à sa demande. Elle reporta son attention au chili con carne, tout en ajoutant d'un ton malicieux :
– Il reste du fondant au chocolat.
– Ouais !
William s'empara d'une brique de jus d'ananas et d'un reste de dessert trônant au sommet d'une montagne vacillante de conserves et de boîtes de confitures. Puis il pivota de nouveau vers Sirius, son butin en main, et s'exclama :
– On peut y aller !
– Merci beaucoup, Mme McBurry ! glissa Sirius avant de sortir dans la cuisine.
Ils suivit William dans le grand escalier, menant à l'étage, constitué d'un long couloir agrémenté de portes s'ouvrant à chaque fois sur des pièces différentes. La maison des McBurry avait des proportions étranges : bien qu'elles comportaient un minimum de cinq chambres pour loger toute la fratrie, celles-ci n'avaient pas de formes rectangulaires propres ni de tailles égales. Les toilettes étaient plus grandes que la salle de bain, et la salle de bain plus grande que la chambre de William.
Cependant, cela ne semblaient déranger personne. Des meubles comblaient comme ils pouvaient des vides flagrants tandis que à d'autres endroits, il ne semblait plus y avoir assez de place pour un grain de poussière.
– Comment vous faites pour ranger, avec une si grande maison ? questionna Sirius en avisant un bureau sur lequel traînait une paire de chaussure.
– Ben, avec mes frères, on essaie de faire le ménage, répondit William. Je m'occupe souvent de la vaisselle par exemple, quand Guillaume n'a pas envie de la faire.
Guillaume était l'adolescent sympathique qui avait ouvert la porte à Sirius quelques instants plus tôt.
– Mais... Vous n'avez... Euh... personne pour vous aider ? insista Sirius.
William haussa les sourcils.
– Non, pourquoi ? Tu as une femme de ménage chez toi ?
– Non, on a un...
Le jeune Black s'interrompit, ayant faillit révéler que sa famille possédait un elfe de maison. Il chercha à tout prix un élément convaincant pour compléter sa phrase en suspens, puis se remémora ce formidable appareil avec lequel il avait vu Mme. McBurry se promener dans le salon en aspirant les miettes de pain qui jonchaient le tapis.
– Un... Un aspire la peur, termina Sirius, les joues écarlate.
– Un aspirateur ? répéta William. Ouais, nous aussi on en a un.
Sirius se tut, trouvant les McBurry particulièrement courageux de s'occuper eux-même des tâches ménagères. Lui-même ne s'imaginait pas nettoyer les sanitaires à l'aide d'un chiffon et de vinaigre blanc, et encore moins ses propres parents.
De plus, Mme McBurry vivait seule avec ses six fils, depuis que son mari était parti en vadrouille au milieu des plages mexicaines et des jeunes femmes en maillot de bain. Elle subvenait à elle seule aux besoin de sa famille à l'aide de son salaire de caissière, aidée de temps en temps du frère aîné, Lucas, qui endossait de temps en temps le rôle de serveur dans un bistrot local.
Ce qui était donc certain, pensa Sirius amèrement, c'était que les McBurry avaient bien plus de débrouillardise et d'âme que les Black.
Ils pénétrérent dans la chambre de William, une petite pièce sombre dans laquelle des dizaines de posters décoraient les murs. Le jeune moldu démarra un téléviseur capricieux qui agonisait sur le sommet d'une commode. Il y enfonça un CD légèrement rayé et, dans un brouillard gris et blanc, le film commença enfin.
Sirius s'assit sur le lit de son ami, près de celui-ci qui entamait avec appétit le gâteau au chocolat en mâchant la bouche ouverte. Il regrettait un peu l'absence de Regulus, qui ne connaîtrait jamais cette simplicité si agréable.
– C'était trop bien. Tout est génial, ici ! murmura Sirius à la fin du visionnage.
Il posa sa tête sur l'épaule noueuse de William. Les boucles brunes de ce dernier chatouillèrent ses joues si pâles, qui avaient rarement vu le soleil.
Le jeune moldu ne répondit pas tout de suite, et se recala un peu contre un oreiller moelleux.
– Dis, Sirius ? fit-il soudain d'une voix tendue.
– Hmmm ?
– Qu'est-ce qu'il se passe, chez toi, pour que tu prennes autant de plaisir à venir dans notre baraque bondée et puante ?
Sirius se redressa et enfoui son nez dans le creux de ses genoux, qu'il ramena contre sa poitrine.
– Je sais pas trop, William, fit-il à mi-voix. C'est juste que...
Il n'avait pas les mots.
William garda le silence, ses yeux détaillant avec précision les vêtements de bonne qualité de Sirius, ses cheveux lustrés, ses doigts délicats. Puis il aperçu, derrière ces apparences, des cernes sous ses paupières, la fragilité de ses poignets étroits, et l'ombre de lointains nuages dans ses yeux orageux, dont la pluie perlait au coin de ses longs cils noirs.
– Tu sais quoi, je m'en fiche, déclara William. J'aime bien quand tu passes tu temps avec moi, peu importe d'où tu viens.
Il contempla quelques instants une affiche de football accrochée au-dessus de son lit et poursuivit :
– J'ai plein d'amis à l'école. On passe énormément de temps à jouer à la récréation et à se raconter des blagues même pas drôles. Nous deux aussi, on s'amuse, mais quand on se parle c'est pas pareil. Je sais pas trop comment l'expliquer, mais moi j'aime bien cette sensation, pas toi ? T'es pas comme les autres, Sirius. T'es bizarre et tu empeste l'eau de Cologne, mais je t'adore ! Tu sais toujours sortir la bonne connerie qu' il faut, même si parfois je ne comprends pas tout ce que tu dis.
Sirius resta muet de stupeur, un mélange incompréhensible d'affection, de reconnaissance et de mélancolie s'emparant de lui.
– Merci, dit-il enfin avec un sourire renaissant. Moi aussi, je t'adore, William. Même si tes blagues ne sont même pas drôles.
Ce dernier lui adressa un sourire éclatant, la blancheur de son email contrastant avec la couleur caramel de son teint.
– Bon, tu veux la dernière part de gâteau ou je peux la prendre ? demanda-t-il en désignant l'assiette posée entre leurs deux corps serrés l'un contre l'autre.
***
Lorsque Sirius s'engagea dans la rue le ramenant au Square Grimmaud, une inexplicable angoisse tiraillait son estomac.
L'idée de manger à table ce soir là un plat cuisiné par Kreattur, joliment déposé dans une vaisselle en porcelaine, sous l'œil sévère d'Orion et Walburga Black lui semblait aussi terrible que de dormir avec un troll durant deux nuits d'affilée.
Il imagina quelques instants la fin de journée qui devait être celle de William : une famille avec six garçons bruyants s'asseyant autour d'un Chili con carne fait maison, sautant sur le plat comme des vautours sur une carcasse. Ensuite, ils essuieraient probablement le plat avec des morceaux de pain en sachet, si ce n'est en mettant directement les doigts, puis lècheraient celui-ci avec délices.
Puis les pensées de Sirius convergèrent vers Regulus. Son petit frère n'avait jamais eu d'amis à proprement parlé, mis à part lui-même, son frère. Sirius avait une folle envie d'emmener Reg faire un tour chez les McBurry, rien que pour lui faire goûter un kinder ou lui partager ses impressions sur les films à la télévision.
Mais si Regulus venait, ses parents seraient forcément au courant un jour où l'autre, réalisa Sirius avec amertume. Regulus en parlerait, ou bien Kreattur les démasquerait quand ils essaieraient tous les deux de s'échapper de Square Grimlaud.
Bref, c'était peine perdue.
Sirius butta dans un tat de neige traînant sur le côté d'un trottoir puis, avec une lenteur délibérée, il traversa les derniers mètres qui le séparaient de chez lui.
Quand il ouvrit la porte, Regulus lui sauta au cou. Il était étrangement chaud, brûlant de fièvre même, en contraste avec la température glaciale de l'extérieur.
– Salut, Reg, tu te sens mieux ?
– Ça va ! C'était bien, ta balade ?
– J'ai les pieds trempés, mais ça va.
– Dis, tu joueras aux échecs avec moi ce soir ?
– Ouais, bien sûr, Reg.
Son petit frère se fendit en un large sourire, et il essuya son front moite de sueur d'un revers de la main. Il adressa un pouce levé en l'air à son frère et répartit dans les étages, sans doute pour se débarbouiller un peu.
Sirius retira lentement son manteau et le suspendit sur l'ideuse pataire en forme de pied de troll. Il ne remarqua pas, dans l'ombre d'une cape de velour appartenant à sa mère, l'ombre filiforme de Kreattur.
– Kreattur à bien fait de suivre le petit maître, murmura l'efle de maison pour lui-même. Kreattur a découvert un sombre de secret qui aurait pu dévaster la noble maison des Black. Mais grâce à Kreattur, l'honneur de la maison sera sauvé, pour sûr !
Toutes mes excuses pour ces derniers chapitres non publiés, j'ai été littéralement ensevelie sous le travail à faire, et j'ai mis du temps à rayer les cases de mon agenda,
Je purgerai volontiers ma peine à Azkaban, mais malheureusement, je suis déjà incarcérée dans une salle de cours remplis de professeurs tout aussi voraces que les détraqueurs. :3
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