Lily Evans


C'était l'automne.

Les derniers oiseaux migrateurs s'envolaient vers les pays lointains, fuyant des courants d'air un peu plus frais chaque jour. Les insectes disparaissaient peu à peu, et l'herbe ne bruissait plus d'une vie minuscule et chatoyante de couleurs. Seuls les cloportes, mille-partes et quelques autre xylophages subsitaient derrière les écorces humides des arbres, ou encore l'ombre de souches en décomposition. Le silence s'installait sur les campagnes, les villes, et tout le Royaume-Uni.

Mais Lily n'avait pas besoin de fond sonore pour admirer le spectacle de l'automne. Si les papillons de l'été n'étaient que manège de couleurs merveilleuses, ils ne pouvaient pas rivaliser avec la flamboyance des feuilles mortes.

C'était l'une de ces après-midi d'automne que la haine entre l'étrange garçon, Severus, et la soeur de Lily, Pétunia, prit pleinement Lily en étau.

Depuis deux ans, elle s'était fortement liée d'amitié avec le jeune sorcier vivant dans l'Impasse du Tisseur. Ils partageaient un point commun non négligeable : ils étaient des sorciers.

Issu d'une famille du même ordre, Severus avait appris à Lily tout ce dont elle avait besoin de savoir : ce qu'était Poudlard, le monde de la magie, les moldus, en quoi lui et elle, ainsi que tant d'autres personnes, étaient différents. Selon Severus, le fait qu'elle soit née dans une famille de non-magiques importait peu, ou du moins, pas trop, avait-elle cru comprendre.

Pétunia supportait mal la proximité de sa soeur avec le fils Rogue. Elle voyait d'un mauvais œil cette amitié, et affirmait ne pas croire un mot de ce qu'il racontait. En réalité, elle niait une évidence qu'elle ne souhaitait pas voir réalisée. Peut-être, pensait-t-elle, que Lily était une sorciere. Mais cette nature n'était rien d'autre qu'une pathologie bénigne dont Lily pouvait guérir très rapidement, si elle s'éloignait suffisemment des autres sorciers. Un peu comme un rhume : il suffisait de se moucher et d'attendre un peu pour s'en débarrasser. Et Pétunia n'allait surement pas laisser Lily tomber davantage malade, ça non !

C'est pour cela que la jeune moldue espionnait avec application sa soeur lorsqu'elle rendait visite au jeune Rogue. Elle se répétait sans cesse que ce n'était qu'une mesure afin de pouvoir porter secours à Lily si jamais il lui arrivait quelque chose avec ce garçon repoussant, mais en réalité, elle éprouvait une insatiable curiosité pour ce monde qui lui filait entre les doigts.

Et le samedi du weekend du vingt-deux octobre 1969, Pétunia suivit sa soeur hors de la maison lorsque celle-ci la quitta discètement, après avoir terminé une pile de devoirs particulièrement barbants.

Lily s'enfonçait dans les bois, et Pétunia la talonnait plusieurs dizaines de mètres derrière elle, se dissimulant entre les arbres. La flamboyante chevelure de sa soeur se fondait avec le décor mordoré de la saison, comme si Lily avait les capacités camouflantes d'un caméléon en suppléments de celle que lui offraient sa condition de sorcière.

Quelques instants plus tard, elle rejoignait le fils Rogue, qui l'attendait patiemment, assis sur une souche d'arbre, en-dessous d'un immense platane dont les feuilles mortes chutaient les unes après les autres, se couchant doucement sur leur tombeau d'humus. Une agréable odeur d'humidité et de végéteaux en décomposition flottait dans l'air.

Lily et Severus se rejoignaient presque toujours dans cet endroit là. Calme, tranquille, assez éloigné des habitations voisinnantes tout en y retant suffisement proche, il était parfait pour deux amis à la recherche d'un peu dintimité.

- Coucou, Sev ! s'écria la voix de Lily au loin.

- Lily !

Le fils Rogue se levait, un immense sourire éclairant son visage. Il portait un long manteau noir lui tombant jusqu'aux genoux, qui devait très certainement appartenir à quelqu'un de bien plus grand que lui. Lily ne prêta guère attention à son allure et lui donna une acolade amicale. Seule Pétunia, de loin, remarqua l'empourprement furrtif des joues de Severus, comme si l'automne s'était déposé sur ses pomettes.

Pétunia n'entendit pas distinctement le début de leur conversation, mais parvint à se dissimuler derrière un immense tronc mort, qui lui offrait tout le loisir d'écouter la suite.

- ... verras à Poudlard, il y a une grande fête pour Halloween, disait Severus. Un festin énorme !

Pétunia tendit l'oreille.

- Est-ce que l'on aura le droit de se déguiser ? demandait Lily en retour.

- Je ne sais pas... Tu te déguises, toi, pour Halloween ?

Lily haussa les épaules, et repoussa une mèche de cheveux qui lui tombait mollement devant le visage. Severus l'observait discrètement du coin de l'oeil, avec une lueur d'émerveillement dans le regard qui donnait à Pétunia l'envie de vomir.

- On aime bien le faire chaque années, avec Tunie, expliqua Lily. On se déguise en sorcières, et nous faisons le tour du quartier pour récupérer des bonbons.

Seveurs éclata de rire. Des corbeaux effarouchés s'envolèrent au loin en poussant d'éffroyables croassement, qui firent frissoner Pétunia de terreur.

- Pourquoi prends tu la peine de te déguiser en sorciere ? Tu en est déjà une !

La jeune Evans esquissa un sourire amusé.

- Je sais... Mais... C'est une tradition moldue. Et je l'aime bien.

- À Poudlard, tu verras que tu n'auras nul besoin d'enfiler un costume pour que l'on sache que tu es quelqu'un de magique.

Le sourire de Lily s'agrandit.

Quelques mètres plus loin, Pétunia observait toujours la scène. Outre son dégout et sa colère envers le fils Rogue, elle éprouvait un troisème sentiment rongeant son coeur : la jalousie.

Oui, la jalousie.

Certes, pour rien au monde Pétunia aimerait être une sorcière. Les sorcières, c'était méchant : elles complotaient contre les héros dans les contes de fée, et avaient pour réputation de rester cloitrées dans des chaumières hantées, balai en main et verrue au nez. Mais... Mais bien que Severus correspondait plus ou moins à cette image, ce n'était en aucun cas celui de Lily. Lily était belle, intelligente, elle avait de plus beaux cheveux et de meilleures notes que Pétunia. Mais en plus, Lily était magique. Pétunia ne pouvait pas le nier, ses pouvoirs réalisaient davantage de choses belles qu'épouvantables. Du moins, on ne pouvait pas affirmer que faire voler des brindilles et éclore des bourgeons était mauvais.

Mais en plus, les descriptions que Severus faisaient de Poudlard étaient absolument merveilleuses. Et si tout se passait comme le fils Rogue l'e soutenait, Lily serait inscrite dans cette école dès sa onzième année. Elle partirait donc dans cet endroit extraordinaire, en laissant derrière elle sa propre soeur, qui n'aurait rien de mieux pour se réconforter qu'un collège minable, sans baguettes magique, sans professeurs originaux, sans matières passionantes.

Pétunia se retouverait toute seule.

Mais le plus injuste, c'est que Pétunia était la soeur de Lily. Alors... pourquoi n'avait-elle pas de pouvoirs magiqes, elle aussi ? Pourquoi seule Lily possédait ces aptitudes ?

Lily et Severus s'assirent côte à côte sur la souche, leurs épaules se frôlant comme deux feuilles d'arbre sur la même branche. Ce mouvement synchrone attira l'oeil de Pétunia, l'extirpant de ses pennsées obsessionelles. Elle se concentra de nouveau sur la scène qui se passait devant elle.

- Tu as un hématome sur la joue, Sev, disait Lily d'une voix étrangement paisible.

- Oui, je sais, répondit-il en portant la main à son visage.

- C'est pas beau, Sev.

- Oui , je sais, répéta-t-il à mi-voix.

Sa main retomba sur ses genoux, ballotant comme s'il ne savait pas très bien quoi en faire. Bien que Lily se pencha imperceptiblement vers son ami, Pétunia entendit distinctement :

- Tes parents se disputent toujours ?

- Hum.. un peu.

Il y eut un petit silence. Lily prit la main de Severus, qui sembla se figer à son contact. Elle ne sembla pas remarquer cette soudaine raideur et réchauffa les doigts gelés de son ami entre ses gants de laine.

- Mais... Sev... Ton père n'aime-t-il pas ta mère ?

Le garçon poussa un long soupir, qui se noya dans la forêt tel le cri d'un oiseau.

- Mon père n'aime pas grand chose, Lily.

- Severus ?

Un petit sourire tordit les lèvres du jeune sorcier quand il entendit son nom pronnoncé par son amie. Il se fâna presque aussitôt, comme s'il ne voulait pas montrer trop explicitement ses émotions.

- Oui ?

- Parles-moi encore des créatures magiques, changea-t-elle de sujet. Comment s'apelle déjà les espèces de taupes attirée par tout ce qui brille, comme les pies ?

- Les niffleurs, mais il n'y en a pas ici, ils...

Severus cessa soudain de parler, et fixa un point droit devant lui. Pétunia se pencha davantage, se demandant ce qui pouvait bien attirer ainsi l'attention du sorcier. Puis elle eut une effroyable sueur glaçée lorsqu'elle réalisa qu'il la regardait droit dans les yeux.

- Sev ? demanda Lily.

Elle regarda dans la même direction, puis s'exclama :

- Tunie !

La jeune moldue déglutit. Elle n'avait pas réalisé que, les arbres perdant leur feuillage, sa cachette était bien plus visible qu'auparavant.

Se sachant démasquée, elle émerga de la forêt, et se dirigea d'un pas chevaleresque vers sa soeur. Elle ne ressentait nullement le courage qu'elle feignait, mais ne voulait pas se laisser démonter par le fils Rogue. Il lui faisait peur, mais pas assez pour qu'elle s'enfuit sans dire un mot.

- Tu ne devrais pas rester ici avec lui ! cracha-t-elle en pointant un doigt accusateur vers Rogue. Il va te faire du mal, te retourner le cerveau !

Le jeune sorcier bondit aussitôt sur ses pieds, l'air fulminant. Lily l'imita aussitôt et posa une main prévenante sur son épaule, comme pour l'empêcher de se jeter sur sa soeur si l'envie lui prenait.

-Toi, éructa-t-il. Tu nous espionnais ! Depuis combien de temps ?

Pétunia ricana, bien que son rire fut sans joie et remplie d'amertume. Le jeune Rogue venait sans doute de réaliser que ses moments passés avec Lily n'étaient peut-être pas aussi intimes qu'ils en avaient l'air.

- Severus, c'est pas grave, intervint la jeune sorcière en jetant un coup d'oeil désapprobateur vers sa soeur. Elle ne faisait rien de mal. Pas vraie, Tunie ?

- Elle nous espionnait !

Pétunia esquissa un sourire provoquateur confirmant la véracité des accusations de Severus.

Soudain, sans nul doute au comble de la colère, Severus fit mine de se jeter sur Pétunia. Lily cria de surprise et d'indignation, mais cela n'arrêta nullement le geste de son ami. Soudainemetn consciente que Severus voulait s'en prendre à elle physiquement, Pétunia s'enfuit à travers la forêt.

Seulement, à quelques dizaines de mètres, sa jambe heurta brutalement un obstacle. Pétunia s'écroula au sol, tout en sentant son tibia se briser en deux sous le choc. Aveuglée de douleur, elle resta par terre, hurlant et sanglotant. Lily se précipita vers elle, paniquée.

- Tunie ! Tunie !

Mais Pétunia pleurait beaucoup trop pour pouvoir parler. Au loin, Severus regardait la jeune moldue s'égosiller, ne lachant pas une seule seconde son regard d'elle. Il la fixait beaucoup trop intensémment pour que cela soit naturel.

Lily s'écria soudainement :

- C'est toi ? C''est toi Sev qui lui a fait ça ? Comment as-tu pu !

- Quoi ? Non, fit-il, une lueur de défi mêlée de peur brillant au fond des prunelles.

- Si c'est toi ! Menteur !

Pétunia continuait à sangloter. Lily tenta de porter sa main à sa jambe mais Pétunia la repoussa bruquement, et hurla :

- M'approche pas Lily ! Je te deteste ! Je vous hais tous les deux, toi, et lui, ce-ce monstre !

Et elle ajouta :

- Et t-toi aussi tu e-es un monstre ! Un monstre !

***

Pétunia ne s'excusa jamais d'avoir traité sa sœur de monstre, même si cette dernière rennonça à toute ses sorties avec Severus les semaines qui suivirent afin de s'occuper d'elle, lorsqu'elle fut obligée de conserver une paire de béquilles et un encombrant plâtre blanc durant deux mois entiers.

Mais Pétunia demeura glaciale face à toutes ces chaleureuses attentions. Et Lily, lassée de son agressivité, finit par abandonner, non seulement car elle avait compris que Pétunia trouvait sa présence insupportable, mais en plus car Lily s'était rendue compte qu'elle en souffrait, elle aussi.

Quitte à ne plus entretenir une amitié fraternelle avec sa sœur, il lui restait au moins celle de Severus.

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