Chapitre 21 : Chris.
« Une femme ne doit pas dépendre de la protection d'un homme mais doit apprendre à se protéger elle-même. » - Susan Anthon
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Comment était-ce possible de passer d'un état d'euphorie et d'extase extrême, à de la confusion et de l'agacement en seulement quelques minutes ? Ça me dépassait et plus que tout : ça m'agaçait.
N'écoutant pas les voix autour de moi, je me replongeai dans le souvenir très récent d'il y a quelques minutes. Celui où Emmy dansait contre moi, dans mes bras. Ce moment où cette demoiselle brune, châtain, ou alors aux cheveux d'ébène avait été à moi l'espèce de quelques précieuses minutes. Celui où je bougeais moi aussi au rythme de la musique alors que je détestais cela. Grâce à elle, je venais d'y prendre goût instantanément. D'ordinaire, il me fallait une bonne dose d'alcool dans le sang pour que je me décide à aller sur une piste de danse - et ça, avec des yeux en état de marche, bien entendu - alors que là, c'était presque si j'y avais couru. Et je voulais y retourner. Prendre la main de cette jolie brune à la senteur de vanille pour l'emmener loin de cette table encore une fois, nous retrouver à nouveau seuls dans cette foule.
Emmy avait essayé le chantage pour me faire lever - inconsciemment ou non, je l'ignorais - et j'étais près à la suivre à l'idée seule de l'imaginer se déhancher contre un autre gars comme elle l'avait fait avec moi. Il avait suffit qu'Andrew parle de ce mec en train de la reluquer pour que je me décide immédiatement. Je ne savais pas si je devais détester mon frère ou le remercier en ce moment.
- Chris ! m'interrompit une voix plutôt aigüe que j'avais apprécié entendre il y avait quelques mois.
- Mmh ?
- Tu viens ou pas alors ?
- Où ça ?
- Chez moi, demain soir.
Ces quelques mots suffirent à me réveiller totalement.
- Chez toi ? répétai-je incrédule. Pour quoi ?
- Tu n'as rien écouté, pas vrai ? plaisanta Ethan, un gars qui était à la fac avec moi.
- Je fais une soirée chez moi, demain soir, m'expliqua Charlotte. Tu viens ?
- Ah. Non, je ne peux pas, répondis-je sans prendre la peine de vraiment réfléchir à la question.
- Pourquoi ?
Elle semblait plutôt étonnée de ma réponse. Pourquoi l'était-elle ? Depuis notre rupture, elle n'avait quasiment pas donné signe de vie jusqu'à la semaine dernière. C'était Ethan qui m'avait appelé pour me demander de le retrouver Chez Bruce et je ne savais même pas qu'elle était avec lui. Je les avais donc rejoins avec Léo, un autre de mes potes, puisque j'étais avec lui à ce moment-là. Et ça faisait maintenant une semaine que Charlotte venait me parler à la fac, pratiquement tout les jours, et là, elle m'invitait à une soirée. Qu'est-ce qui lui prenait ? C'était depuis ce jour-là, Chez Bruce. Non. Depuis que j'avais parlé à Emmy devant elle et les gars, en fait. Serait-elle jalouse ? Ça me ferait plaisir que ce soit le cas.
- Je t'ai posé une question ! s'écria Charlotte pour couvrir le bruit de la musique. Pourquoi tu ne peux pas ?
- Pas envie de venir.
Ethan et mon frère se mirent à rire sans se cacher et je ne percevais aucune réaction chez Emmy, qui était assise à ma droite, et silencieuse depuis notre retour à la table.
- Et tu me dis ça comme ça ? Tu n'as juste pas envie de venir ? me demanda-t-elle surprise par ma réponse.
- Je peux aussi te mentir et te dire que je dois aller au cinéma mais je ne sais pas si tu vas me croire, lui souris-je hypocritement.
- Arrête de te foutre de moi ! se vexa-t-elle.
- Ça va Charlotte, soupirai-je. Tu sais que je n'aime pas sortir depuis que je suis aveugle.
- Alors qu'est-ce que tu fais là ? m'accusa-t-elle.
J'imaginais parfaitement son regard sombre et ses bras croisés sur sa poitrine, attendant de moi une réponse satisfaisante.
- C'était exceptionnel.
- Et bien fais une exception pour demain soir aussi.
- Je ne viendrai pas, n'insiste pas. Et puis ce n'est pas parce que je ne suis pas là, que ça va t'empêcher de t'amuser je crois.
- Ouais mais ça fait longtemps qu'on n'a pas fait une soirée ensemble, tenta-t-elle.
- Qu'est-ce qu'on fait là ?
- Ce n'est pas la même chose, bouda-t-elle. C'est...
- Je n'irai pas, la coupai-je. Le sujet est clos.
Le ton brusque de ma voix instaura un silence à la table, malgré la musique bien trop forte et insupportable de la boite. Je voulais partir, mais je ne pouvais pas le faire seul et ça m'énervait d'autant plus alors je pris mon verre et le descendis d'une traite.
Quelques instants auparavant, j'étais au paradis avec Emmy et voilà qu'en revenant à la table après notre danse, mon ex apparaissait. Andrew n'aurait pas pu la faire dégager avant que je n'arrive, non !
- Emmy, tu viens avec moi chercher à boire ? proposa mon frère.
Elle n'hésita pas une seule seconde et se leva pour le suivre, je supposais. Qu'est-ce que ce crétin était en train de manigancer ? Et pourquoi il me laissait seul avec Charlotte ? Et Ethan, accessoirement. Et pourquoi Emmy prenait la fuite comme ça ? J'avais besoin d'elle moi. Même si elle ne parlait pas, sa présence seule m'apaisait.
- C'est à cause de ta nouvelle copine que tu ne veux pas venir ? attaqua mon ex quelques secondes à peine après leur départ.
- Anthony m'a dit qu'ils n'étaient pas ensemble, ajouta Ethan.
- Et bien alors qu'est-ce qui t'en empêche ?
- Tu me gonfles Charlotte ! m'écriai-je. Si je ne veux pas venir c'est mon droit, non ?
- Oui mais j'aurais bien voulu en profiter pour qu'on discute toi et moi.
- Ce n'est pas ce qu'on est en train de faire là ?
Elle marqua un moment d'hésitation.
- Seul à seule.
Elle n'était pas sérieusement en train de me faire comprendre qu'elle voulait qu'on se remette ensemble ? Ou alors, je comprenais tout de travers, mais ça me paraissait bizarre tout de même.
- On s'est déjà tout dit Charlotte.
- Je voudrais qu'on essaie... d'arranger les choses.
Et bien si. C'était donc pour ça qu'elle s'était rapprochée de moi à nouveau depuis qu'elle avait vu Emmy ? Elle avait toujours été jalouse, alors ça ne m'étonnait que très peu qu'elle réagisse de la sorte. Pour ma part, j'avais tourné la page depuis longtemps.
- Nous deux, c'est terminé. C'est bien ce que tu m'avais dit, non ?
- Oui mais...
- Et ça me va très bien, l'interrompis-je durement.
- C'est à cause d'elle ?
Elle cracha presque le dernier mot, ce qui m'énerva un peu plus. De quel droit elle se permettait de...
- Je pense qu'Emmy s'intéresse plus au grand frère, rit Ethan qui était silencieux jusqu'à maintenant.
- En effet. On dirait qu'elle profite du fait que tu ne puisses pas la voir ! ajouta Charlotte en souriant.
Quoi ? Qu'est-ce que ça voulait dire ? Qu'est-ce qu'elle faisait avec mon frère ?
Non. Mon frère était stupide mais il ne me ferait pas ça. Il savait qu'elle m'intéressait, alors il ne s'amuserait pas à la draguer sous mon nez. Ou pire... Ou alors, c'était elle qui lui faisait du charme, ce qui ne serait, par conséquent, pas de sa faute. Mais je préférais ne rien imaginer et me contenter de croire qu'ils ne faisaient que parler. Parce que c'est ce qu'ils faisaient, pas vrai ?
- Dommage pour toi Chris, continua Ethan en souriant.
Je n'allais pas leur faire le plaisir de leur demander de me décrire ce qu'il se passait sous mes yeux, même si je mourais d'envie de le savoir. Ou peut-être pas. Je ne savais plus.
Tout ce que je savais, c'était que cette soirée me prenait la tête et que je n'avais qu'une envie c'était de déserter. Mon sang bouillonnait et mes poings se crispèrent sous la table. Jusqu'à ce que l'odeur de vanille ne refasse surface, et ne me détende un peu. La soirée était déjà bien avancée mais son parfum était toujours bien présent, à mon plus grand plaisir.
Des verres se posèrent sur la table et je m'attendais à ce qu'Emmy tire la chaise à côté de moi pour s'installer mais elle n'en fit rien. A la place, elle posa sa main sur mon épaule et se pencha pour amener sa bouche à mon oreille.
- Je vais y aller. Tu rentres avec ton frère ou...
Je ne la laissai pas terminer sa phrase que j'étais déjà sur mes pieds, prêt à quitter les lieux au pas de course s'il le fallait. Charlotte essaya de me retenir mais je ne pris pas la peine de lui répondre et attrapai ma canne blanche repliée sur la table d'une main et la main d'Emmy dans l'autre. On traversa rapidement la foule de danseurs après avoir salué les autres et je soupirai de soulagement lorsque l'air frais de l'extérieur me frappa de plein fouet au visage. Je respirais enfin !
- Merci, soupirai-je. Je n'en pouvais plus là-dedans.
- Tu aurais pu rester, tu sais.
- Je n'en avais pas la moindre envie, répondis-je en souriant. Je voulais partir alors t'es un ange de m'avoir sorti de cette galère.
Je lâchai sa main pour déplier ma canne mais elle m'en empêcha en me prenant soudainement dans ses bras. J'étais tellement surpris que je ne réagis pas. Pas que j'étais contre, bien au contraire ! Mais quand elle ouvrit la bouche pour me parler, je compris que ce que je croyais être un élan d'affection soudain n'était qu'un simple mais étrange stratagème.
- Il y a des types qui nous regarde un peu plus loin, chuchota-t-elle contre mon oreille. Tu pourrais faire comme si tu n'étais pas aveugle juste le temps qu'on passe devant eux ?
- Pourq...
Elle m'interrompit en prenant mon visage entre ses mains, le sien étant tellement proche de moi que je pouvais sentir la chaleur de son souffle contre mes lèvres et constater par la même occasion qu'elle avait bu un gin tonic récemment.
- S'il te plait.
Son ton suppliant ne me fit pas réfléchir et je rangeai immédiatement ma canne dans la poche de mon manteau, avant de lui prendre la main pour avancer. Elle entrecroisa nos doigts, ce qui me surpris un peu. Qu'est-ce qui lui prenait ? Est-ce qu'elle considérait que nous étions ensemble après ce second baiser ? Étrangement, ça ne me dérangeait pas du tout. Mais pourquoi avait-elle voulu que je range ma canne ?
Mais malheureusement pour moi, ce n'était pas ça. Je le compris en passant devant les types en question. J'entendis quelques réflexions faites à voix basse sur le fait que je portais des lunettes de soleil en plein milieu de la nuit et quelques rires avant que l'un d'eux ne parle à haute voix.
- Il y en a qui sont tellement bourrés qu'ils ne savent même plus faire la différence entre le jour et la nuit !
- Ou alors, il est simplement con, rétorqua un autre en riant. Eh ma jolie ! Tu ne veux pas rester avec nous ?
- Ça, pour être jolie, elle l'est, marmonna le premier alors qu'on venait de les dépasser. En plus d'une belle gueule, elle a un beau cul.
Il croyait vraiment être discret avec sa remarque ? Mes muscles se contractèrent et je n'avais qu'une envie, c'était de lui péter le nez. Alors que je n'en avais aucun droit, ce qui me frustrait à un point inimaginable. En plus de cela, je savais que je ne pourrais rien faire sans craindre de me manger un mur que je n'aurais pas pu voir. Emmy dû ressentir ma colère puisqu'elle serra mes doigts dans les siens tout en continuant d'avancer, comme pour me rassurer.
Quelques mètres plus loin, elle ouvrit enfin la bouche pour s'expliquer.
- Désolée. C'est juste que quand on est sorti, ils m'ont regardé bizarrement en souriant alors j'ai voulu faire comme si on était ensemble. Je suis désolée, s'excusa-t-elle à nouveau en retirant sa main de la mienne.
- Ça ne m'a pas dérangé, dis-je en ressortant ma canne pour la déplier, avant de reprendre possession de sa main.
J'aimais le contact de sa peau contre la mienne, et le fait qu'elle ne se dégage pas me plaisait d'autant plus et me fit oublié les mecs de tout à l'heure. Et Charlotte.
- Pourquoi tu as voulu que je fasse le mec voyant ? la questionnai-je intrigué.
Çane l'avait jamais dérangée d'être vue avec moi alors je voulais savoir. Sa réponse fut spontanée.
- Pour qu'ils ne s'en prenne pas à toi.
Je m'arrêtai de marcher.
- Quoi ?
- Ils ont déjà fait des réflexions comme quoi tu portais des lunettes de soleil de nuit, alors imagine ce qu'ils auraient dit si tu avais eu ta canne.
- Tu as fait ça pour... Pour me protéger ? dis-je un peu vexé.
Elle tira doucement sur mon bras pour me faire comprendre qu'elle voulait avancer et je repris ma marche.
- Pas vraiment.
- Tu sais, je m'en fiche des remarques qu'ils peuvent me faire.
- Pas moi. Je n'aime pas entendre quelqu'un se moquer de toi.
- Ça fait longtemps que je ne me préoccupe plus des moqueries, lui assurai-je en souriant.
Même si j'étais un peu contrarié et touché dans mon égo qu'elle ait fait ça pour me protéger, je ne pouvais m'empêcher de sourire comme un idiot. Si ça l'a touchait que quelqu'un se moque de moi, c'était qu'elle se préoccupait un minimum de moi, non ?
Ou alors, c'était plus pour se protéger elle, que moi, ce qui était plus plausible. Déjà en faisant comme si j'étais voyant, ces imbéciles n'avaient pas pu s'empêcher de sortir un commentaire déplacé à Emmy. Si j'avais été non-voyant, ils auraient insisté ? Sachant que je ne pouvais pas la défendre, ils s'en seraient peut-être pris à elle, sans que je ne puisse rien faire.
Il fallait que j'arrête de faire défiler de tels scénarios dans ma tête, ça allait finir par me mettre hors de moi. Rien que le fait de ne pas avoir pu leur répondre m'énervait !
- En revanche, repris-je sérieusement, la façon dont ils parlent de toi, ça me dérange.
- Ils étaient bourrés. Ce qu'ils disent n'est pas à prendre en compte.
- Peut-être, mais je n'aime pas ça.
- Ce n'est pas toi qui vient de dire que tu passais outre les réflexions de ce genre ? me taquina-t-elle.
- Pas ce genre de réflexion, souris-je.
- Pourquoi ça ?
- Parce que je ne peux pas savoir si ce qu'ils ont dit est vrai.
Elle me bousculant légèrement ce qui me fit rire. Maintenant qu'on n'était plus que tout les deux, j'étais beaucoup plus détendu.
- Ce genre de mecs disent ça à tout le monde.
- Non, seulement aux jolies filles.
- Ils avaient bu, alors ça ne compte pas ! répéta-t-elle fièrement.
- Je t'ai déjà regardée, alors je sais qu'ils disaient vrai. Enfin, pour une partie, ajoutai-je en marmonnant.
Je savais qu'elle avait un joli visage, mais pour le reste, je laissais faire mon imagination...
***
En arrivant chez moi, je proposai à boire à Emmy mais elle refusa.
- Je prends seulement mes affaires, et j'y vais. Je ne vais pas te déranger plus longtemps.
- Tu ne me déranges pas, au contraire. Juste un café, insistai-je. Ou autre chose, comme tu veux.
Je n'avais pas envie qu'elle parte.
- Un café alors, capitula-t-elle en souriant. Mais pas longtemps, je travaille demain soir et il est déjà plus d'une heure.
Déjà ? Je ne m'étais pas rendu compte de l'heure.
Elle me suivit dans la cuisine et je fis couler deux cafés. Je n'avais pas spécialement soif, mais j'avais besoin de réchauffer mes mains. On retourna ensuite au salon.
- Est-ce que tu sais quand tu vas revoir ? me demanda-t-elle en s'asseyant.
- Non. J'ai rendez-vous mercredi matin pour un examen, mais je pense que j'en ai encore pour quelques semaines.
- Et tu...
La sonnerie de mon téléphone la coupa dans son élan, m'annonçant que j'avais un message. Je le sortis de ma poche et le tendis à Emmy.
- C'est Andrew, m'informa-t-elle. Il demande si on est bien rentré.
- Tu peux lui répondre s'il te plait ?
Elle tapa rapidement la réponse et la sonnerie de mon téléphone retentit à nouveau lorsqu'elle me le rendit. C'était un appel cette fois-ci.
- C'est encore lui ?
- Non. C'est Charlotte.
Qu'est-ce qu'elle me voulait ? En fait, je m'en fichais. Je laissai le portable sonner et le posai sur la table basse.
- Tu ne réponds pas ? s'étonna-t-elle.
- Non. C'est surement pour insister une nouvelle fois pour que je vienne à cette soirée demain.
- Pourquoi tu n'y vas pas ?
- Je n'aime plus vraiment les soirées de ce genre depuis que je ne vois plus rien.
- Pourquoi tu es venu aujourd'hui alors ?
- Parce que tu étais là, dis-je avec sincérité.
Elle ne répondit rien et j'aurais vraiment aimé voir son visage à cet instant. Pouvoir lire dans ses yeux pour analyser son silence. Réussir à rester captivé par ses prunelles que je n'arrivais pas à imaginer autrement que brunes. Mais pas un brun foncé et terne comme mes cheveux, non. Un brun clair qui recèlerait toutes ses émotions, tout ses sentiments que je réussirais à comprendre grâce à un seul regard de sa part.
- Il se fait tard, Chris. Je devrais vraiment y aller, conclut-elle en se levant.
Quoi ? Non ! Avais-je dit quelque chose qu'il ne fallait pas ? Visiblement, mon commentaire n'avait pas dû provoquer ce sourire sublime que j'avais imaginé sur ses lèvres.
Je me levai à mon tour.
- Je te raccompagne, lui proposai-je en ultime recours désespéré pour rester encore un peu avec elle.
- Non ça va aller, ne t'en fait pas.
- Il fait nuit Emmy. Je n'aime pas quand tu rentres toute seule, tentai-je vainement.
- J'ai l'habitude avec le travail, me sourit-elle en s'emparant de son sac pour pouvoir y ranger ses affaires. Je t'appelle quand j'arrive.
Troisième rejet en quelques secondes. Le troisième ! Ça devrait me faire comprendre qu'elle ne voulait pas rester, mais je n'y pouvais rien. J'éprouvais ce besoin qu'elle reste. Encore un peu. Juste un peu.
Je l'écoutais rassembler ses affaires en réfléchissant à un autre argument pour qu'elle ne parte pas mais je ne trouvais rien à dire.
Elle m'embrassa sur la joue avec une délicatesse sans nom et j'entendis la porte s'ouvrir juste après.
Je ne voulait pas qu'elle parte. Elle ne pouvait tout simplement pas partir.
Je tendis le bras pour poser ma main sur son épaule et la retourner face à moi. Mon autre main se plaqua contre la porte pour la refermer, pendant que ma bouche trouva sans hésitation la sienne. Emmy ne mit qu'une infime seconde avant de suivre mon mouvement avec empressement, laissant son sac tomber à terre dans un bruit inexistant. C'était comme si elle avait attendu ce moment depuis que nous avions quitté la piste de danse. Ce qui était mon cas. Assurément. Ce baiser était à l'opposé des deux précédents. Moins doux, plus déterminé, plus précipité, et définitivement plus désireux de tout. Plus envieux et plus désespéré pour ma part.
Ses mains s'agrippèrent à mes cheveux et je tentai de me rapprocher encore plus près d'elle en collant mes hanches aux siennes. Cette proximité n'était pas suffisante. Rien n'était suffisant ce soir. Pas même ce baiser langoureux pendant notre danse. Ni ce déhanchement que j'aurais aimé admirer. Et encore moins un simple baiser sur la joue en guise d'au revoir, comme elle avait prévu de faire.
Elle ne pouvait pas partir. Elle devait rester.
Je ne la forçais pas à rester, ni même à m'embrasser en retour. Je ne l'obligeais pas à balader ses mains dans mes cheveux, ce qui me rendait totalement fou et incohérent dans mes pensées. Je ne lui avais pas mit un couteau sous la gorge afin de sentir ses lèvres empressées bouger contre les miennes. Ce qu'elle faisait elle le voulait. Presque autant que moi. Presque. Parce qu'elle avait tenter de sortir de mon appartement mais sa capitulation avait été totale quand ma bouche s'était appropriée la sienne avec ferveur, alors que moi, ma capitulation avait eut lieu depuis longtemps. Depuis bien trop longtemps.
Ma bouche quitta ses lèvres pour que je puisse faire entrer un peu d'air dans mes poumons l'espace de quelques secondes et je dénouai l'écharpe qu'elle n'avait pas ôtée pour avoir un libre accès afin de semer quelques baisers sur sa mâchoire, et rejoindre son cou.
Ce parfum allait me rendre dingue. Cet odeur s'appropriait chaque cellule de mon corps, provoquant une combustion spontanée à l'intérieur de moi. Mon sang était en ébullition complète.
Ma main droite descendit le long de son corps, me délectant de chacune de ses courbes délicieuses. Même par dessus ses vêtements, je savais que son corps était sublime. Mes mains sur elle me le faisaient savoir.
Seule sa respiration frénétique et le bruit que mes baisers faisaient sur sa peau emplissaient la pièce avant que je ne prononce le seul mot que je pouvais dire. Le seul qui ne quittait pas mon esprit depuis qu'elle avait voulu partir. Le seul mot capable de fanchir la barrière de mes lèvres à cet instant sans paraitre incohérent et désordonné. Pas de phrase, bien trop compliquée à formuler pour moi en ce moment. Juste un mot qui sonnait presque comme une supplication à mes oreilles.
- Reste.
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