Chapitre 16 : Emmy.

« L'âme est aux yeux ce que la vue est au toucher ; elle saisit ce qui échappe à tous les sens. » - Joseph Joubert

*****

- Je te dis que je ne trouve pas, je ne vois pas pourquoi je te mentirais ! m'exclamai-je en continuant tout de même de chercher.

- Tu as regardé sur le site que je t'ai donné ? insista Chris pour la troisième fois.

- Oui ! J'ai tapé le titre du livre et le nom de l'auteur mais il y a écrit " Résultat introuvable ". Et je ne le trouve sur aucun autre site.

Vingt minutes. Vingt minutes que je cherchais le livre qu'il devait lire pour ses cours en version audio et originale. Il y avait toutes les œuvres de l'auteur sauf celle que Chris voulait.

- Mais pourtant c'est le plus connu de ses bouquins ! s'exclama-t-il.

- Il y est en français seulement, dis-je en fixant l'écran d'ordinateur, cherchant pour la énième fois si je n'avais pas omis de lire une ligne, un lien, une page ou n'importe quoi d'autre.

- Mais il me le faut en anglais.

- Je commence à le savoir depuis le temps que tu me le répètes, marmonnai-je.

Je vérifiais encore une fois un autre site internet avant de capituler et de refermer l'ordinateur.

- Tu le veux en version audio et originale ? Je reviens dans pas longtemps, déclarai-je avant de quitter sa chambre d'hôtel, le laissant seul avec son incompréhension.

Je passai rapidement dans ma chambre pour enfiler une veste et prendre mon sac à main. Je pris l'ascenseur et me dirigeai vers la réception. J'attendis quelques secondes que le père de Chris termine de parler avec un jeune homme avant de m'avancer près de lui.

- Emmy, comment vas-tu ? me demanda-t-il en me faisant la bise.

- Très bien, merci. Et vous ? lui souris-je.

- Tout est parfait. Tu as besoin de quelque chose ?

Je lui demandai s'il y avait une librairie dans le coin et il m'indiqua le chemin à prendre. Selon lui, elle n'était qu'à deux rues d'ici. C'était donc inutile que je prenne ma voiture. Je le remerciai en prenant la direction de la sortie, mais me ravisai rapidement, revenant vers le père de mon ami.

- Je voulais aussi savoir combien je vous devais pour la chambre et les repas.

Il parut très surpris par ce que je venais de lui dire, mais il se reprit rapidement et m'offrit un sourire chaleureux.

- Tu ne me dois rien, ne t'en fait pas. Tu es une amie de mon fils, alors c'est comme si tu logeais chez nous.

- Oui mais je vous occupe tout de même une chambre qui pourrait être prise par n'importe quel client, protestai-je.

- Il y a encore plein de chambre de vide. Les clients ne vont pas se battre pour avoir la tienne, rit-il de bon cœur.

- Mais je...

- Tu sais que si tu continues d'insister tu vas finir par nous vexer, ma femme et moi ? me coupa-t-il en souriant.

J'ouvris la bouche pour donner un argument supplémentaire, mais rien ne me vint, alors je me ravisai et lui souris.

- D'accord. Merci beaucoup alors.

- Je t'en pris.

Évidemment, j'aurais dû m'y attendre qu'il refuserait de but en blanc. Mais je n'y pouvais rien, ça me gênait d'être logée gratuitement dans un hôtel comme celui-ci. Ç'aurait été complètement différent si j'avais occupé une chambre de leur maison durant mon séjour. Toutefois, il me semblait impossible de rivaliser là-dessus.

Je me dirigeai vers la librairie en suivant les indications qui m'avaient été données et retournai à l'hôtel. La réception était désormais vide, et je partis en direction de la chambre de Chris. Je frappai trois coups et il vint m'ouvrir. J'entrai et déposai ma veste et mon sac sur le lit, avant de m'y installer.

- Tu étais où ?

- Partie chercher ton livre.

Il s'arrêta dans son élan pour s'asseoir sur le lit pendant que je sortais l'exemplaire de Gatsby le magnifique que je venais d'acheter.

- Quoi ?

- Je croyais que tu étais aveugle et pas sourd, lui rappelai-je en riant.

- Tu as été acheter un livre ? me demanda-t-il en ignorant ma remarque.

- Oui. Et je l'ai trouvé en version originale, rassure-toi.

J'ouvris le livre à la première page et il s'installa près de moi.

- Et comment veux-tu que je le lise ? A moins qu'il ne soit, en plus de cela, en braille, que je ne sais pas lire, soit dit en passant.

Je ne répondis pas et il comprit immédiatement.

- Ou alors tu t'es auto-proclamée en tant que version audio pour aujourd'hui.

- C'est ça ! affirmai-je en souriant. En plus, je ne l'ai jamais lu celui-là. J'ai seulement vu le film. Tu l'as vu toi ?

- Oui et c'est d'ailleurs le sujet du cours. Je dois comparer le livre et le film. Mais ce n'est pas la question ! se reprit-il en faisant un geste vague de la main. Tu ne vas pas me lire un roman !

- Pourquoi pas ?

- Parce que ! s'énerva-t-il.

Je ne comprenais pas d'où lui venait ce soudain élan de colère.

- Je refuse que tu me lises un bouquin, Emmy, déclara-t-il plus calmement.

- Pourquoi ? Je ne vois pas où est le problème.

- C'est ça le truc. Tu ne comprends pas... soupira-t-il en s'allongeant sur son lit, les mains ramenées derrière sa tête.

- Non je ne comprends pas. Et moi, je pensais que tu commençais à comprendre que ce que je faisais pour toi c'était seulement parce que j'en avais envie. Et puis d'abord : tu as une autre option pour le lire avant lundi ?

- Non mais...

- Donc tu te tais et tu m'écoutes, le coupai-je avant de commencer la lecture du premier chapitre.

Il soupira à nouveau en prononçant mon prénom à deux reprises pour tenter de m'interrompre, mais finit par me laisser faire en voyant que je ne comptais pas m'arrêter. Il était peut-être têtu, mais moi aussi.

Durant ma lecture, il ne m'avait pas interrompu une seule fois, me laissant parler et apprécier ce livre. Je ne lisais que très rarement, alors j'étais vraiment contente que son professeur lui ait donné quelque chose de bien à étudier et non ennuyeux à mourir.

Après une cinquantaine de page, je décidai de faire une petite pause pour boire un coup. Ça n'avait pas l'air comme ça, mais lire à voix haute asséchait vraiment la bouche ! Je pris alors la bouteille d'eau que j'avais dans mon sac et en bus une gorgée tout en regardant mon ami.

Chris n'avait pas bougé d'un millimètre depuis le début de ma lecture et j'en étais à me demander s'il ne s'était pas endormi. Il n'avait même pas esquissé un mouvement lorsque je lui avais annoncé faire une petite pause. Il était toujours allongé sur le dos.

Je ne remarquai que maintenant que son tee-shirt était un peu relevé et laissait voir une fine bande de peau sur le bas de son ventre, et en détaillant son corps pendant quelques secondes, je devinai facilement qu'il n'y avait pas un seul gramme de graisse dans chacun de ses membres. Il avait la carrure d'un athlète - mais pas un athlète professionnel, juste amateur - qui était très plaisante à regarder, je devais l'avouer.

Physiquement, il me plaisait, oui. Même sans parler de son physique finalement... J'aimais beaucoup Chris et être avec lui, ici et durant toute la semaine était parfait. Ça me permettait à la fois de m'évader un peu de la vie parisienne et d'apprendre à le connaitre un peu plus. Comme par exemple, de savoir qu'il n'aimait pas qu'on lui fasse la lecture au point de s'endormir.

- Chris ? l'appelai-je doucement.

- Ouais ?

Je soupirai de soulagement.

- Tu ne m'aurais pas répondu je t'aurais probablement vidé le contenu de ma bouteille dessus, dis-je avec ironie.

- Je n'en doute pas, me sourit-il. Mais je ne me suis pas endormi.

- Je l'ai cru. Tu ne bougeais pas et tu ne parlais pas.

Il se releva en s'étirant de tout son long comme s'il émergeait d'une petite sieste.

- Tu m'as dit de me taire alors c'est ce que j'ai fait !

- Donc tu m'en veux... compris-je en grimaçant.

Il soupira et tourna la tête vers moi.

- Tu ne comprends pas que ça peut être gênant...

- Tu n'as pas à être gêné parce que je te fais la lecture. Je ne le fais pas pour me moquer de toi, déclarai-je en triturant mes doigts nerveusement.

- Je sais. Mais je suis certain que tu réagirais comme moi si tu étais à ma place.

En effet, ça se pourrait que je refuse l'aide qu'on me proposerait. Même gentiment, même sans arrière pensée de pitié. Ça m'embarrasserait que quelqu'un fasse quelque chose pour moi, que je pourrais très bien faire avec de pleines capacités physiques. Mais je n'y pouvais rien si j'étais comme ça. A vouloir l'aider chaque fois que je le pouvais. Et en plus de cela, ça me faisait plus que plaisir de le faire pour quelqu'un que j'appréciais beaucoup.

- J'aurais quelque chose à te demander, dit-il en interrompant mes pensées.

Je n'avais pas eut le temps de lui répondre, mais peu importait. Mon silence avait parlé pour moi.

- Vas-y.

- Si tu ne veux pas dis-le franchement. Je ne t'en voudrai pas.

- Pas de problème.

Il se passa une main nerveuse sur la nuque et la massa quelques secondes en silence. Je ne savais pas ce qu'il voulait me demander mais ça avait l'air important pour lui et j'avais l'impression qu'il appréhendait beaucoup ma réponse. Ou ma réaction. Ou peut-être même les deux.

- En fait...

Il hésitait à continuer sa phrase et je lui pris la main pour l'inciter à me parler. Il resserra doucement ses doigts autour des miens.

- Je voudrais te voir, lâcha-t-il finalement.

Étrangement, cette déclaration ne m'étonna pas. Je la trouvais même naturelle. Normale. En plus de cela, ça me faisait plaisir qu'il me le demande. J'ignorais pourquoi ça me plaisait autant, mais c'était le cas. Aussi, sans aucune hésitation, je me tournai de manière à être complètement face à lui, ses genoux touchant les miens. On était maintenant tout les deux assis en tailleur sur le lit, face à face.

- Alors regarde-moi.

Je n'aimais pas le regard que les gens pouvaient poser sur moi, mais le sien ne me dérangerait pas, j'en étais certaine. Parce qu'il allait me regarder, à sa façon. Et je ne pourrai rien percevoir dans son regard, ce qui me rassurait, en quelques sortes.

Après quelques secondes de réflexion, il leva ses deux mains pour les amener à mon visage. Je n'avais pas l'habitude de rougir, mais ses mains réchauffaient mes joues à tel point que je pourrais presque les sentir se colorer petit à petit. Je laissai cette sensation étrange et inconnue mais loin d'être désagréable s'imprégner de mon corps et fermai les yeux, laissant Chris me regarder avec l'aide de ses dix doigts.

Ses deux larges mains, qui encadraient parfaitement mon visage, se détachèrent de mes joues après quelques secondes d'immobilité totale, ne laissant que le bout de ses doigts sur ma peau. Il descendit ses mains symétriquement jusqu'à ma mâchoire, ne faisant que frôler chaque centimètre de mon visage. Ses index tracèrent les lignes imaginaires qui séparaient mon cou de mon visage, avant qu'il ne se rejoignent au niveau de mon menton. Puis ses huit autres doigts reprirent contact avec ma peau, en glissant le long de mon cou. Lentement.

Je le laissais faire. Sans bouger.

Ses doigts vinrent se loger sur ma nuque, à la naissance de mes cheveux détachés qui retombaient sur mon dos et mes épaules, avant de repasser devant et de remonter doucement, passant par mes oreilles. Il en fit le contour à l'aide de ses pouces et de ses index, terminant sur le lobe de mes oreilles, où étaient accrochés deux faux diamants de chaque côté. Celui qui était le plus bas était légèrement plus gros que l'autre et Chris les détailla l'un après l'autre.

Il remonta ensuite trois de ses doigts le long de mes tempes et je continuais de me laisser embarquer dans ce tsunami de sensations que je n'avais jamais connu. Partout où ses doigts passaient, ma peau s'embrasait, laissant apparaitre des marques invisibles à ceux qui me regarderaient, mais visibles pour lui qui ne pouvait pas me voir. Il devait probablement sentir la chaleur accroitre sous ses doigts, mais n'en fit aucun commentaire.

Je gardais les yeux fermés pendant que ses doigts se promenaient maintenant sur mon front que je trouvais trop grand. Trop large. La totalité des ses doigts avaient la place de se promener à leur guise, me faisant comprendre que j'avais raison.

Ses pouces dessinèrent ensuite la forme de mes sourcils, puis deux de ses doigts s'aventurèrent sur mes paupières dépourvues de maquillage, avant de frôler mes cils recouverts d'une fine couche de mascara.

Mon nez, que je trouvais lui aussi trop grand, n'échappa pas à son contact, puis ses doigts finirent par rencontrer mes lèvres. Il en traça le contour à l'aide de son index avec une lenteur extrême, puis ses mains encadrèrent à nouveau mon visage, et il recommença son geste en déposant cette fois-ci ses pouces sur mes lèvres. Et il les redessina. Une seconde fois. Encore plus lentement que la première fois.

Ce n'était pas agréable. Non. Ça frôlait la perfection. Le bien-être. L'euphorie.

Ma respiration s'accélérait petit à petit. Peut-être s'en était-il aperçu, mais il n'en fit rien pour le laisser paraitre, et continua d'effectuer avec application la tâche qu'était de me regarder.

Quand ses mains quittèrent mon visage, je me surpris à réprimer un soupir de désapprobation, mais me retins de justesse quand il les reposa sur le haut de ma tête. Il les fit descendre le long de mes cheveux avec cette même lenteur dont il était maitre depuis le début.

Je ne sentais aucune hésitation dans ses gestes. Aucun tremblements. Rien qui ne pourrait me faire penser qu'il avait été nerveux au moment de me demander s'il pouvait me regarder.

Il était sûr de lui et de ce qu'il faisait.

Quand il fut arrivé à la pointe de mes cheveux qui arrivaient un peu plus bas que mes épaules, il fit glisser ses mains sur mes bras recouverts par un tee-shirt aux manches trois-quart, puis sur mes avants-bras dénudés, avant de terminer par chacun de doigts, allant même jusqu'à toucher mes ongles courts, vernis d'un rouge sombre.

Puis il ramena ses mains sur ses cuisses, rompant ainsi tout contact.

Je gardais les yeux fermés ; je ne voulais pas qu'il cesse de me regarder.

Un souffle chaud s'approcha de mon oreille lorsqu'il prononça quelques mots. Comme si c'était un secret lourd de sens.

- Tu es magnifique.

Je ne répondis pas. Non pas parce que je ne voulais pas, mais parce que je ne le pouvais pas. Je venais de perdre cette faculté de parler depuis l'instant où il avait commencé à me regarder. Depuis le moment où j'avais cessé de respirer en fait.

Jamais personne ne m'avait fait ressentir de telles choses en ne faisant pratiquement rien. C'était invraisemblable.

Je terminai de défaillir lorsque ses lèvres se posèrent sur ma joue, tout proche de mes lèvres, et qu'elles s'y attardèrent une seconde de plus que nécessaire. Ce n'était pourtant qu'un baiser sur la joue, mais une vague de tendresse et de chaleur me submergea immédiatement. A tel point que je ne remarquai pas tout de suite que Chris venait de se lever de son lit. Je ne m'en rendis compte que lorsqu'un un courant d'air frais pris possession de la pièce, provoquant des frissons sur mes bras nus.

Seulement à cet instant, j'ouvris les yeux pour revenir au monde réel. A la réalité. Chris était accoudé à la balustrade du petit balcon de sa chambre et avait laissé la porte vitrée grande ouverte. Ce n'était pas plus mal, j'avais vraiment chaud d'un seul coup.

Après avoir prit quelques minutes pour redescendre sur Terre avec brutalité, je me décidai enfin à le rejoindre. Il avait le visage tourné vers le paysage comme s'il pouvait voir, et ne prononça pas un mot pendant un long moment. J'aurais aimé savoir à quoi il pensait et aussi pourquoi il avait voulu me voir. Ça me paraissait presque impossible de voir le visage de quelqu'un en ne faisant que l'effleurer du bout des doigts. Seulement du bout des doigts.

- Je ne savais pas si tu allais accepter.

Ce n'était pas une question et je ne savais pas quoi lui répondre, une fois de plus. Mais il continua.

- Je te remercie.

Là encore, je me tus. Que pouvais-je dire ?

Des frissons commencèrent à prendre possession de mes bras à cause de la fraicheur du vent du Nord du pays, mais je restais là. Un coup d'œil à Chris me fit remarquer que je n'étais pas la seule à vouloir rester prendre l'air quelques temps. Les poils de ses bras étaient hérissés, et ses doigts croisés devant lui. Mon regard remonta jusqu'à son visage.

Je me demandais si j'arriverais à le voir aussi beau qu'il était en faisant comme lui. En le regardant comme lui m'avait regardée. Peut-être arriverais-je à percevoir des détails de son visage qui m'étaient invisibles à l'œil nu.

Pendant un moment, j'imaginais la sensation que pourrait avoir sa courte barbe sous le bout de mes doigts. Je m'imaginais tracer la courbure de ses fines lèvres qui étaient étirées en ce moment en un sourire amusé. Pourquoi souriait-il d'ailleurs ?

Chris mit fin à mon moment de réflexion en m'avouant quelque chose qui me fit réfléchir.

- Tu sais Emmy, commença-t-il sans se départir de son sourire, être aveugle me permet de percevoir beaucoup plus de chose. Comme je ne vois plus, mes autres sens sont beaucoup plus actifs, beaucoup plus présents. En plus de ça, je perçois d'autant plus la présence de quelqu'un dans une pièce et le regard des autres sur moi.

Je fronçai les sourcils. Pourquoi me disait-il cela d'un seul coup ?

- Ce qui m'amène à te poser une question, continua-t-il en souriant de plus belle. Pourquoi ton regard n'est pas tourné vers le paysage qui est en face de nous ?

Mes yeux s'agrandirent en un instant et mes joues, qui avaient repris leur teinte d'origine, se colorèrent à nouveau d'un joli pourpre bien prononcé.

Son sourire était présent parce qu'il se moquait de moi, voilà tout. Je mis quelques secondes à me reprendre avant de formuler la première phrase qui me vint à l'esprit.

- Je me demandais si je pourrais te regarder, moi aussi. Comme toi tu viens de le faire.

- Oui tu pourras. Mais pas aujourd'hui, ajouta-t-il en entrant dans sa chambre.

Je le suivis et fermai la porte vitrée derrière moi.

- Pourquoi ?

- Parce que je veux connaitre la suite de l'histoire.

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