Chapitre 30

Chapitre Trentième

Le lundi, quand Esmée était arrivée au lycée, elle avait vu Eduard qui accrochait son antivol à son vélo. Elle avait abandonné ses sœurs avec un signe de la main et avait été le voir.

« Hey...

— Salut Esmée, fit-il en continuant à se battre avec cet antivol qui refusait obstinément de se fermer.

— Tu veux de l'aide ?

— Non, non... Il va se fermer... Il m'a fait le même coup à la patinoire tout à l'heure... Ah ! s'exclama finalement Eduard après qu'un très léger clic se soit fait entendre. Oh !

— Quoi ?

— Qu'est-ce que t'as fait à tes cheveux ?

— T'aime pas ? C'est une idée de ma sœur... C'est moche, hein ?

— Non ! Pas du tout. C'est pas moche. Ça te va super bien. J'adore.

— T'as le droit de le dire si c'est moche. Y'a pas de soucis. Et si tu veux pas qu'on te voie avec moi vendredi, je peux...

— Tu dis que c'est ta sœur mais en vrai t'as fait ça pour ne pas venir au bal vendredi. Mais t'as dit oui, Gelderman.

— Je sais. Et en plus j'ai trouvé la robe donc ça serait vraiment mal calculé de ma part.

— T'as trouvé ?

— Mmmh.

— Tu me montre ?

— Non.

— Esmée ! C'est pas une robe de mariée là ! Montre... S'il te plait.

— Non, rit Esmée.

— Plus je te demande moins j'ai de chance de la voir, c'est ça ? devina aisément Eduard alors qu'il lui tenait la porte pour entrer dans l'établissement.

— Exactement ! ... Encore cinq petits jours à attendre.

— L'éternité tu veux dire.

— Non. Cinq jours. ... On dirait mon frère qui compte les jours avant Noël.

— Tu sais quoi ? J'ai un peu l'impression que vendredi, c'est Noël.

— N'importe quoi... fit Esmée alors que la sonnerie retentissait dans les couloirs.

— On se voit ce midi ? demanda Eduard en remettant correctement son sac sur son épaule.

Ja.

— À tout à l'heure alors, souffla-t-il avant de l'embrasser et de partir vers la salle de son premier cours de la journée. »

Il aimait bien et il voulait toujours aller au bal avec elle. Ce qui fait deux bonnes nouvelles en moins de dix minutes. Pour un lundi, on était clairement au-dessus de la moyenne.

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Vendredi 26 mai. Autrement dit, le grand jour. Le jour du bal.

Esmée était sortie du laboratoire de chimie avec Simon. Rianne et Oswald étaient engagés dans un débat bien animé quelques mètres devant. Esmée et Simon suivaient en silence et sans échanger aucun regard. C'est à ce moment-là que la voix de Silena revenait dans l'esprit d'Esmée : « Il a bien senti qu'il te plaisait et cette sensation lui allait bien parce que ça boostait un peu son égo. Et là, il s'est rendu compte que tu t'intéressais à un autre garçon et ça lui plait pas du tout de savoir qu'il est remplaçable. ». À marcher de cette façon, dans les couloirs de l'ancien bâtiment qui leur servait de lycée, juste à côté de lui, et suffisamment près pour que son parfum lui arrive. Il sentait toujours aussi bon et elle avait toujours son cœur qui battait un peu plus vite... Les escaliers s'étaient enchaînés et ils avaient fini par arriver dans la rue. Le parking à vélo du lycée se vidait doucement, et le sujet au centre de toutes les conversations des petits groupes présents était le bal, évidemment. Aussi, ils n'y échappèrent pas en se retrouvant tous les quatre :

« On se voit ce soir alors ! Notre dernier bal, soupira Rianne déjà presque nostalgique.

— Pas comme s'il y en avait eu dix-huit avant, fit remarquer Oswald. Ce n'est que le second.

— Non. C'est vrai. Mais il n'empêche que ça sera le dernier. Qu'on va enfin voir Esmée en robe, ce qui est clairement à noter dans les calendriers !

— T'en avais pas mise l'année dernière ? s'étonna Oswald.

— Elle avait refusé d'y aller avec Eduard l'année dernière, lança Simon installant ainsi un blanc bien plus que gênant entre les quatre personnes.

— Faut que j'y aille, finit par dire Esmée après le long silence. Je veux prendre le temps de... De me préparer.

— Ouais, bien sûr. »

Esmée s'était éloignée sans un mot de plus. De loin, il lui avait semblé entendre Rianne faire une remarque à Simon mais elle n'en était même pas certaine. Elle était remontée au ferry à pied, pas assez de courage pour prendre le métro. Elle détestait les transports en commun quand elle se retenait de pleurer. Les larmes pouvaient sortir à n'importe quel moment et hors de question qu'un ou une inconnu avec qui elle allait potentiellement partager une banquette aux motifs plus que douteux pendant quinze petites minutes puisse voir cela : un partage silencieux de quinze minutes dans une vie, ce n'est clairement pas assez pour la voir pleurer. Au moins dans la rue, elle pouvait laisser ses larmes couler tranquillement et ne même pas remarquer les passants qui la fixait d'un air un peu étrange.

Le grand avantage du vendredi après-midi était qu'Esmée était toujours la première à rentrer à la maison. Les jumelles terminaient les cours à seize heures, sa mère à quinze heures et puis Erasme avait son cours de danse auquel Martijn allait le chercher. Alors quand elle avait ouvert la porte, il n'y avait que Gifted qui l'avait accueillie et lui, il était super heureux de la voir. Une journée doit être super long en temps de labrador parce qu'en réalité ça faisait que sept petites heures qu'il n'avait vu personne. Esmée lui avait caressé la tête avant d'enlever soigneusement ses mocassins et de les mettre à leur place dans le meuble à chaussures : deuxième case de la première ligne. Gifted l'avait suivie dans l'entrée et ne semblait pas décidé à la quitter puisqu'il marchait dans ses pas quand elle était allée dans la cuisine se servir un verre d'eau. Au début ça avait embêté Esmée et puis quand elle s'était laissée glisser jusqu'au sol en pleurant enfin à chaudes larmes et que son chien avait posé sa tête sur ses genoux comme pour lui demander ce qui n'allait pas... Ce qui n'allait pas ? C'était compliqué de mettre des mots dessus mais... Pourquoi avait-il fallu que Simon dise cela ? Pourquoi est-ce que ça la blessait toujours autant ? Elle avait Eduard maintenant. Simon, c'est fini. Simon, c'est fini depuis octobre.

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Esmée était restée un moment dans la cuisine. Elle s'était calmée en caressant Gifted qui était resté avec elle tout ce temps. Ce chien était magique, c'est Erasme qui l'avait dit et Esmée commençait à se dire qu'il avait raison. Gifted était une sorte d'éponge à mauvaises émotions. Et c'est pour ça qu'Esmée avait fini par se sentir plus légère. Ça avait durée quelques minutes puis elle s'était rappelé qu'on était vendredi, que dans quelques heures, elle serait au bal du lycée avec son petit-ami alors qu'actuellement, elle était assise sur le carrelage de la cuisine avec des yeux rouges d'avoir pleuré. Alors rapidement, elle avait cherché sur internet comment régler ce problème et, sans qu'elle comprenne réellement le pourquoi du comment, s'était retrouvée allongée sur son lit avec des cotons imbibés d'eau de rose posés sur les yeux. D'ailleurs Victorinne l'avait retrouvée exactement dans cette position.

« Qu'est-ce que tu fous ?

— Rien.

— Pourquoi ça sent la rose ?

— Ça sent pas la rose.

— Bah si. Si, ça sent la rose.

— Non, je te dis.

— T'as pleuré ?

— Non. »

Victorinne l'avait fixée avec ses yeux verts grand ouvert comme si ça allait lui permettre d'avoir la vérité plus rapidement, alors que pas du tout.

« Bon. Par quoi on commence ? demanda Esmée en brassant soudainement de l'air autour d'elle.

— T'es sûre que ça va ?

— Vic' arrête de discuter s'il te plaît. Je ne veux pas être en retard.

— Okay... Bon, bah on commence par un goûter avec maman et Max en bas. Ensuite on commencera par le maquillage.

— Oh. D'accord. »

Victorinne était sortie après Esmée et l'avait suivie dans l'escalier jusqu'à la cuisine où Magdalena et Maxellende terminaient de sortir à manger des placards. Des tartines au son d'avoine parce qu'Esmée adorait ça. Du Nutella parce que Martijn adorait ça et qu'il ne devrait plus trop tarder - ce matin, il avait dit qu'il serait là plus tôt. Des bananes parce que... Parce que c'est trop bon selon toute la famille. Esmée et Victorinne avaient opté pour un goûter toutes options : tartine avec du Nutella et des morceaux de bananes par dessus. Martijn était rentré peu de temps après et il avait lui aussi, opté pour la tartine toutes options qui lui paraissait vraiment succulente.

Après cette pause goûter en famille qu'Esmée avait adoré et qui avait soulevé en elle un début de doute : pourquoi ne pas passer sa soirée ici ? Avec ses parents, ses sœurs et son petit frère d'amour. Elle avait mal au ventre en remontant l'escalier pour aller prendre une douche avant de s'habiller pour le bal.

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Victorinne s'était occupée de la maquiller de façon assez naturelle, Esmée s'était dit ça en fixant son regard dans le petit miroir du pare-soleil de la voiture de son père. Elle avait utilisé des nuances de bronze et rose qui s'accordaient avec les fleurs de la couronne qui retenait ses cheveux bruns et bien peignés légèrement en arrière.

« Tout va bien, Esmée ?

— Mmmh.

— Sûre ?

— Oui. Ça va. ... C'est juste que... Ça me stresse un peu... Je me demande si je suis assez bien habillée ? Si c'est assez ?

— C'est assez. Tu es très jolie Esmée. Ce soir comme tous les autres jours d'ailleurs. Vraiment. Ne t'inquiète pas pour ça. Profite juste de ta soirée avec tes amis. C'est le plus important.

— C'est ce que maman m'a dit.

— Et les mamans ont toujours raison. C'est bien connu... »

Esmée avait souri légèrement puis avait de nouveau regardé les immeubles du centre-ville défiler devant ses yeux. Elle se décida à envoyer un message à Eduard pour savoir où il était quand la stature de l'imposant bâtiment qui abritait leur lycée se dessinait un peu plus loin.

De EDUARD :
On arrive !!

De ESMÉE:
On ?

De EDUARD :
Je me suis changé chez Vivian en rentrant de la patinoire finalement.

Effectivement, il avait peut-être évoqué cette hypothèse quelques jours auparavant mais Esmée n'avait pas imaginé que cette hypothèse devienne réalité. Elle n'avait pas du tout envie que Vivian soit là quand tout le monde la verrait dans cette robe parce que ça serait moins bien et que tout le monde allait soudainement s'en rendre compte. L'enfer.

La voiture de Martijn avait fini par s'arrêter presque devant le lycée. Esmée l'avait embrassé et avait vérifié l'heure une dernière fois sur son téléphone avant de sortir de la voiture. Elle avait fait quelques pas jusqu'à la porte principale non sans répondre au signe de la main que lui adressait son père. Elle avait alors attendu patiemment que ses amis arrivent.

« Vous ne rentrez pas Mlle. Gelderman ? lui avait demandé le gardien du lycée qui vérifiait les entrées dans l'établissement pour la soirée.

— J'attends quelqu'un, lui avait-elle répondu en souriant. Il ne devrait pas tarder.

— Comme vous souhaitez. »

Esmée avait de nouveau regardé à gauche puis à droite, jusqu'à voir un gros point jaune poussin apparaitre au coin de la rue. Elle était maintenant certaine qu'avec sa robe grise, elle allait paraître bien fade à côté de Vivian qu'elle pouvait littéralement voir arriver à cent mètres. Trois silhouettes s'approchaient petit à petit et Esmée pouvait voir de plus en plus de détails. Eduard était un peu devant Vivian qui tenait le bras de Simon.

Eduard était bien habillé du costume qu'il lui avait envoyé en photo. Un costume rouge bordeaux avec un double boutonnage et des revers noirs. En dessous, il portait une chemise blanche et aux pieds, il avait des derbys noires qui venaient probablement d'être juste vernies. Un peu derrière, il y avait donc Vivian qui avait opté pour une impressionnante robe jaune poussin qui semblait être faite d'un seule même bout de tissu. Ses bras paraissaient si fragiles sortant de très grosses manches bouffantes et ses épaules dénudées si fines. Esmée trouvait qu'ainsi elle ressemblait à un modèle photo. Elle la trouvait si belle. Et à son bras Simon qui avait un costume de la même couleur que celui d'Eduard. À la différence que pour le sien, les revers étaient bordeaux eux aussi ; qu'il avait préféré un t-shirt de la même couleur que le reste du costume qui laissait deviner les muscles de son torse à une simple chemise blanche et des mocassins noirs à des derbys. Elle le trouvait tellement beau à ce moment précis que tout ce qui s'était endormi en elle ces derniers mois se réveillait soudainement ; qu'elle oubliait facilement qu'il y a encore trois ou quatre heures de cela elle pleurait sur le sol de sa cuisine à cause de lui. Elle avait tout oublié, elle avait juste envie de l'embrasser. Elle l'aurait fait si elle était courageuse.

Son regard avait croisé celui de Simon pendant quelques secondes et elle avait compris. Tout. Enfin presque tout. Elle avait compris que Silena avait raison quand elle disait qu'il savait. Il savait qu'il lui plaisait, il savait qu'elle n'oserait jamais prendre les devants, et ça lui plaisait comme situation. Parce qu'il avait tout. Esmée était même persuadée d'avoir trouvé dans ses yeux une pointe de jalousie en la regardant de la tête aux pieds et cette fois-ci, c'est à elle que ça plaisait.

Eduard l'avait appelée par son prénom une fois qu'il était assez près d'elle. Il lui avait fait un compliment lui semblait-il mais elle n'avait pas écouté. Parce qu'Esmée comprenait soudainement que malgré tout l'attachement qu'elle portait à Eduard, elle n'arriverait pas à ressentir les mêmes choses qu'avec Simon. Jamais. Parce qu'elle était amoureuse de Simon mais pas d'Eduard. Et que même avec toute la volonté du monde, ça ne changerait jamais. Elle savait au fond d'elle-même que tous ces bébés papillons qu'elle pouvait avoir dans le ventre quand il était là ne grandiraient jamais ; ça n'atteindrait jamais le ballet de lepitodptères qui se réveillait avec Simon.

Tout ça, Esmée l'avait compris parce qu'avec le regard qu'ils avaient échangé avec Simon, elle avait réussi à lire en lui comme dans un livre déjà ouvert, parce que cette situation aussi peu satisfaisante soit-elle était devenue claire et simple pour elle. C'était une histoire d'âme sœur. Elle le savait et lui aussi.



--- NDA ---

🐣❤️

J'adore ce chapitre ! J'espère que vous aussi !! 

Dîtes moi même ce que vous pensez de ces derniers chapitres, ça fait un moment que je vous ai pas demandé...


Je vous souhaite un bon weekend !!!


Uthopie qui a encore quelques modifications à faire sur ce texte et qui y retourne maintenant. 🐥❤️✏️ 

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