Chapitre 12

Yuji était allongé sur le lit dur et sans couverture. Son avant-bras gauche était sur son visage, masquant ses yeux, tandis que son bras droit pendait dans le vide.

Sa cellule était assez petite, mais pas trop étroite non plus. Tout était gris, il n'y avait rien. Juste un lit, une chaise, un lavabo et des toilettes. Et c'était tout. 

Le jeune garçon aurait bien voulu retirer les bracelets qui lui entravaient l'utilisation de ses alters, mais c'était peine perdue. 

Alors, pour faire passer le temps, il se mit à penser. Avec un peu de chance, il pourrait demander à intégrer Yuei dans la filière générale, voire ne pas intégrer le lycée tout court. Il avait déjà un lycée scientifique en tête, l'un des plus brillant d'ailleurs, mais à cause de la recommandation de ses parents et de son frère, c'était quasiment certain qu'il intègre le plus prestigieux des lycées super-héroïques. 

Son frère, Nagao Rikimura, était en dernière année de lycée à Yuei. Il avait déjà commencé à travailler dans une agence à mi-temps en parallèle avec ses études. En tant qu'aspirant héros, il était normal qu'il fasse de l'alternance. Et visiblement, il s'y prenait bien.

Mais son caractère laissait clairement à désirer : impétueux, prétentieux et hautain, il n'hésitait pas à cracher sur ceux qui étaient plus faibles que lui, mais aussi sur les plus forts qui faisaient une faute. Un comportement de gamin, selon son frère cadet. 

La porte menant à sa cellule s'ouvrit, et Yuji vit du coin de l'œil l'inspecteur Strauss rentrer et refermer la porte derrière lui avant de s'asseoir sur la seule chaise située en dehors des barreaux. 

« Yo, gamin ! Salua-t-il avec un signe de la main. 

Le brun grogna puis se tourna face contre mur pour ne pas avoir à affronter son regard. 

— Qu'est-ce que vous me voulez ? 

— Te parler. 

— Maintenant que c'est fait, vous pouvez vous en aller. Vous connaissez la sortie.

— Tu devrais être plus amical, gamin. 

N'ayant pas reçu de réponse, Strauss soupira et alluma une cigarette. 

— Si vous voulez fumer, dégagez d'ici, déclara calmement l'adolescent. Je ne supporte pas cette odeur, et j'ai pas envie que ça empeste dans un endroit qui pue déjà suffisamment la mort. 

— T'inquiète, la fumée n'ira pas sur toi. »

Un silence envahit la salle. Yuji jouait avec ses cheveux, puisqu'on lui avait ordonné de retirer ses barrettes avant d'entrer en cellule. 

« Tu vas entrer à Yuei, non ? Demanda l'homme, brisant ce silence de mort. 

— Mouais. 

— T'as pas l'air convaincu. Tu ne veux pas y aller ? 

— Non. Ce sont mes parents qui m'y obligent. 

— J'ai un fils, qui va aussi tenter l'examen d'entrée de Yuei. 

Nouveau silence. 

— Tu ne cherches pas à être curieux, gamin ? 

— Pourquoi je devrais ? Je suis pris sur recommandation, pas besoin de passer l'examen d'entrée.

— Il s'appelle Mikael Strauss. Tu ne le rateras pas, on a exactement le même tempérament...

— Dites, est-ce que ce que j'ai fait va jouer sur mon dossier pour mon entrée à Yuei ? 

Strauss le toisa sévèrement pour l'avoir coupé dans son explication, mais répondit quand même : 

— Probablement. 

— Même si c'est sur recommandation ?

— Mmh... peut-être, je ne sais pas. Tout ce que je sais, c'est qu'à présent, ton casier judiciaire n'est plus vierge. »

Yuji souffla du nez, exaspéré. Mais il sentait en lui un ennui mortel entremêlé de colère, et il lâcha :

« Si vous pouviez arrêter de jouer avec mon humeur comme ça, peut-être qu'on pourra discuter normalement.

— Comment tu sais que j'utilise mon alter sur toi ? 

— Je le sens. Peut-être que d'autres personnes ne le sentiraient pas, mais moi, je le sens. »

Lassé d'être allongé du même côté, l'adolescent se tourna à contrecœur dans l'autre sens, fermant les yeux pour ne pas avoir l'inspecteur dans son champ de vision. 

« Donc, vous avez une licence de héros ? Fit-il. 

— Ouais. 

— Mais vous n'êtes pas héros.

— À moitié, je dirais. 

— Vous avez un nom de code ? 

— Tu deviens bavard, maintenant ? 

Rikimura se redressa, retira ses lunettes, leva sa main gauche et s'infligea une gifle assez grande avant de se rallonger en remettant ses lunettes, frottant sa joue douloureuse. 

— T'es pas obligé de te frapper à chaque fois, gamin. 

— À chaque provocation que vous me faites, je sens la colère grandir en moi. Et je sais très bien que je regretterais mes actes une fois sous l'emprise de la colère. Alors, non, je continuerais à me frapper autant de fois qu'il le faudra, si ça me permet de ne pas être sous votre contrôle. 

— T'es déjà sous mon contrôle. Je peux te faire ressentir tout ce que je veux. Comme ça...

Yuji sentit une joie immense prendre place dans son cœur, et sans comprendre pourquoi, il avait juste envie de danser de bonheur. 

« Il est chiant. » songea-t-il, sans connaître la conséquence de sa pensée. 

— Ou même ça...

Le brun ouvrit immédiatement les yeux, sentant son corps chauffer anormalement. Posant ses deux mains sur son entrejambe pour cacher un début d'érection, il se redressa et lui hurla, les joues rouges : 

— Putain, mais arrêtez ça ! »

Strauss se mit à rire à gorge déployée, se frappant la cuisse de sa main libre. Mais il le calma tout de même malgré son amusement.

Avec un grognement, Yuji se rallongea, croisant ses jambes. Il en avait marre de cet homme, et il se doutait bien que son fils serait pareil, voire pire que lui.

« Je sais à quoi tu penses, je te rappelle, déclara l'homme en prenant une bouffée de sa cigarette.

— Et ce que je pense est la stricte vérité, répliqua l'adolescent en passant ses bras derrière sa tête.

Strauss finit sa cigarette et la jeta dans un coin de la cellule. Puis il approcha sa chaise des barreaux, et, croisant ses bras sur sa poitrine, il lui dit :

— Je t'aiderai à sortir de là.

— Je n'ai pas besoin de votre aide, merci.

— Ce n'était pas une question.

Posant son avant-bras sur ses yeux en ayant eut le soin de retirer ses lunettes avant, Rikimura souffla, et se remit à songer, ayant marre puisque, de toute façon, l'inspecteur lisait dans ses pensées, quoiqu'il arrive.

Y avait-il une possibilité qu'il demande à échanger sa place pour aller en filière générale ?

— Pourquoi tu veux échanger ta place, gamin ? Questionna Keith.

— Je ne peux pas vous arrêtez de lire dans mes pensées pendant que je réfléchis, mais cessez de m'importuner avec vos questions, répondit froidement Yuji.

— Je veux juste t'aider, c'est pas si compliqué à comprendre, si ?

— Et moi, je ne veux pas de votre aide, c'est pas si compliqué à comprendre, non ?

De toute façon, derrière les barreaux, Strauss ne pouvait rien faire, donc Yuji avait tout le loisir pour le provoquer. Mais là n'était pas la question : il ne devait pas se détourner de ses priorités.

Il reprit alors ses pensées : peut-être pouvait-il demander au directeur une affectation au meilleur lycée scientifique du Japon ? Ce serait bien.

— La science, c'est compliqué ! Reste en filière héroïque, c'est bien. En plus, ça t'apprend plein de choses...

— Arrêtez de me poser des questions !

Cette fois, Yuji s'était redressé en plantant son regard colérique dans celui amusé de l'inspecteur. Puis il revint à sa position initiale, las.

A peine deux secondes après avoir repris le fil de ses pensées, il se redressa à nouveau, ouvrant la bouche pour parler, mais il se stoppa net. Strauss semblait amusé, même s'il ne le montrait pas, et déclara :

— Qu'est-ce qu'il y a, cette fois-ci ? J'ai rien fait.

Yuji fronça les sourcils, puis se recoucha. Il sut alors que l'alter de cet homme était encore une fois actif sur lui. Probablement une forme de vengeance.

— Okay ! Déclara-t-il en s'asseyant. J'accepte de répondre à vos questions si vous arrêtez d'utiliser votre alter sur moi ! Et si je veux échanger ma place, c'est parce que je veux faire de la science. Être un héros ne m'intéresse pas.

— Enfin ! S'exclama l'homme aux cheveux ocre avec entrain. »

Ce dernier eut alors le loisir de lui poser toutes les questions possibles et inimaginables qui lui passaient par la tête, autant des choses intéressantes que des choses très inutiles, comme son genre de filles, son site pornographique préféré, ses revues cochonnes favorites, etc. Bref, que des demandes à la fois perverses et déplacées. Auxquels Yuji faisait en sorte de ne pas répondre, sauf sous l'emprise de l'alter de l'adulte.

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