06 - 𝐔n nom familier
Bonne année ! On est officiellement en 2020, et ce chapitre constitue donc mon premier texte de la décennie oof-
me revoici donc avec le chapitre six, on s'enfonce toujours plus dans le mystère huhu-
je me suis rendue compte qu'on se rapproche des 2K et que je n'ai même pas fait de remerciements pour les 1K, mieux vaut tard que jamais- je compte faire des bonus comme je faisais pour 01643, mais du coup j'ai vraiment pas eu le temps de le faire après avoir passé les 1K, du coup je le garde en réserve pour plus tard !
ah, aussi, je vous conseille d'aller voir des photos sur google image du centre pénitentiaire de Tokyo, parce que le décrire était vraiment compliqué donc je pense que ça vous parlera plus-
sinon, le prochain chapitre sortira le 17 janvier ! Bonne lecture !
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𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝐒𝐢𝐱 ─ 𝐔𝐧 𝐧𝐨𝐦 𝐟𝐚𝐦𝐢𝐥𝐢𝐞𝐫
La jeune femme face à lui était l'image même du stress. Des boucles blondes s'échappaient de son chignon haut, ses doigts aux ongles rongés se liaient et se déliaient nerveusement, et ses yeux marrons essayaient de se fixer sur autre chose que lui, qui lui faisait face. Il avait à peine cillé depuis le début du repas, son regard métallique fermement ancré sur la blonde face à lui.
Assise entre eux, telle une médiatrice, sa sœur mangeait tranquillement le bol de ramens qu'elle avait commandé. Elle semblait presque désintéressée et insensible à la tension qui régnait entre les deux autres personnes, pour autant, ses gestes et œillades à leur intention témoignaient de son intérêt pour ce qui se passait autour d'elle.
Elle finit par relever le nez de son repas, et replaça une mèche de cheveux de jais derrière son épaule. Elle observa une dernière fois sans rien dire ses deux interlocuteurs aussi silencieux que des macchabées : son frère et son expression incroyablement impénétrable et sa petite amie et ses traits étirés en une moue mal à l'aise. Elle se racla ensuite la gorge, avant de déclarer, d'une voix claire, les premiers mots échangés à cette table depuis les salutations obligatoires :
Vous comptez vous adresser la parole un jour ou il faut que je vous enferme dans une pièce pour ça ?
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J – 63
17 NOVEMBRE
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Ryunosuke étouffa un bâillement et avança à tâtons sa main pour trouver son téléphone qui vibrait désagréablement sur la table de nuit. Le réveil numérique indiquait 02:07 et la première pensée de l'inspecteur à ce constat fut pour sa sœur. Le numéro qui s'affichait était celui d'Ichiyô, et ce fut effectivement sa voix lasse qui l'accueillit lorsqu'il décrocha et porta l'appareil à son oreille.
« Votre supérieur vient d'appeler. Ils ont retrouvé le pendentif. La danseuse. »
Ryunosuke voyait très bien de quoi parlait son interlocutrice. Un pendentif d'ambre représentant une danseuse en tutu, offert par Ichiyô à Gin peu de temps après leur rencontre. L'étrangère avait le même en permanence autour de son cou, et sa sœur ne s'en séparait jamais non plus.
« Rien d'autre ? demanda-t-il d'une voix neutre.
– Non. Ils vont le faire analyser.
– Où était-il ?
– Dans l'un des parcs, je n'ai pas retenu son nom. Accroché à une branche en hauteur.
– Comment l'ont-ils trouvé ?
– ... » Ichiyô marqua une hésitation qui ne lui échappa pas, et il ne fut pas aussi surpris par la réponse qu'il ne l'imaginait : « L'inspecteur Fukuzawa a reçu une photo de l'endroit, d'un numéro inconnu. »
L'inspecteur de police aux cheveux bicolores étouffa un juron peu mélodieux. La personne derrière ce numéro se jouait clairement d'eux. Elle tenait à leur faire comprendre son omniscience quant aux affaires qui les occupaient, et à tester les limites de leur patience. Entre la photo reçue par Akiko, le mail par Kôyô, les menaces par lui-même puis par Ranpo, et enfin cet indice que nul ne pouvait connaître à part celui qui avait placé le pendentif, c'était évident que le mystérieux envoyeur n'était pas innocent.
« Ils ont remonté le numéro ? finit-il par demander.
– Je l'ignore... Vous devriez voir ça avec votre supérieur. »
Ryunosuke dut admettre qu'elle avait raison, et finit par la remercier pour son appel avant de raccrocher. Il resta ensuite un long moment les yeux dans le vide, réfléchissant à toute la situation. Il savait qu'il ne se rendormirait pas de toute manière, c'était déjà un miracle qu'il ait trouvé le sommeil la veille en rentrant dans sa chambre d'hôtel, qu'ils avaient loué rapidement après avoir constaté qu'ils allaient devoir rester sur place un certain temps.
Après la confrontation des plus déroutantes avec le faux Karma Topaz – dont l'identité réelle était celle d'un étudiant aux origines américaines nommé Mark Twain, ils étaient retournés à l'étage de la brigade criminelle pour parler à leurs supérieurs et coordinateurs de la situation. Ils avaient conclu que l'interpellé resterait en garde à vue le temps de tirer cela au clair – le relâcher était courir un risque inutile, après tout, les policiers avaient pu constater par eux-mêmes que le jeune homme était psychologiquement instable.
Au fond, cette arrestation était inutile pour l'affaire qui les occupait, mais elle leur donnait une couverture pour la presse. L'évasion d'un prisonnier ne s'était pas encore ébruitée, mais le préfet de police avait planifié sa conférence de presse pour le lendemain – ou le jour même vu qu'il était trois heures du matin. Il s'agissait quand même d'un tueur en liberté, les civils devaient se montrer prudents. Il pourrait cependant arguer qu'ils avaient un suspect – et même si ce n'était pas la complète vérité, l'essentiel était d'éviter un lynchage violent de la presse, qui prenait souvent un malin plaisir à les discréditer auprès de l'opinion publique.
Il hésita ensuite à composer le numéro de Fukuzawa, qui devait être éveillé malgré l'heure indécente mais qui avait sans doute besoin de concentration pour établir les relations entre tout ce qu'il savait. De toute façon, il valait mieux qu'ils abordent en face à face les mails et messages du numéro. Ryunosuke avait déjà transmis à son supérieur le mail reçu par sa tante et ses menaces, aussi le quadragénaire pouvait déjà faire des recherches sur ce côté-là. Il pouvait aussi contacter l'expert à qui il avait confié la tâche d'analyser l'étrange logo qui figurait sur le mail, et peut-être ainsi découvrir les initiales de celui qui se cachait derrière de grandes compétences en informatique.
Il se résolut donc à ne rien faire vis-à-vis de sa sœur, et à se concentrer entièrement sur l'affaire Topaz. Même s'il aurait préféré être à Yokohama pour être au plus près de son supérieur chargé de retrouver Gin, il tenait ici l'occasion de faire ces preuves – et d'enfin rattraper son camarade de promotion qui l'avait devancé au cours de l'affaire du collectionneur d'ongles. Lui qui, la première fois qu'il l'avait vu, s'était dit que Nakajima ne tiendrait pas trois jours dans la police, il s'était nettement fourvoyé. Et l'avance prise par cet ingénu à la frange illogique l'agaçait. S'il obtenait sa promotion avant lui, le jeune homme aux cheveux bicolores le vivrait très mal.
Ils n'avaient jamais vraiment parlé durant toute leur formation, même si les deux jeunes hommes se connaissaient à cause d'une mésaventure survenue le jour de leur entrée à l'école de police, qui avait marqué leurs esprits involontairement. Ils s'étaient ensuite revus par un coup du hasard, puisqu'ils avaient tous les deux été affectés au Bureau des Enquêtes Criminelles de Yokohama, dans l'équipe de Fukuzawa.
Ryunosuke avait des pensées partagées vis-à-vis du jeune homme aux cheveux argentés. Il n'était pas désagréable, bien au contraire, mais il était exactement le genre de personne qu'il avait beaucoup de mal à supporter. Trop naïf, trop candide, pas assez égoïste et pas assez rationnel. Un mélange particulier qui plaisait à beaucoup de monde – mais pas au bicolore. Comment Nakajima pouvait-il espérer devenir un inspecteur exemplaire avec ce genre de caractère ? Il n'aurait jamais les nerfs pour, et ce n'était pas parce qu'il était parvenu à résoudre une affaire que Ryunosuke avait entièrement revu son jugement sur lui. Peut-être avait-il tenu plus de trois jours, mais il ne tiendrait sûrement pas trois ans.
Il poussa un long soupir en constatant qu'il n'était toujours que deux heures et demi. Il avait rendez-vous dans le hall de l'hôtel avec ses deux supérieurs à huit heures tapantes. Comment allait-il occuper le temps qu'il restait ? En comptant les moutons ?
Son téléphone vibra une nouvelle fois, signalant cette fois la réception d'un message. Ryunosuke hésita à le regarder, s'agissait-il encore d'une menace ou d'une provocation du numéro inconnu ? Il finit par observer l'écran, et s'aperçut que l'expéditeur était simplement Kôyô. Le message était bref, Appelle-moi.
Le jeune inspecteur en formation s'exécuta avec un soupir. Avec un peu de chance, cela l'occuperait un bon moment.
« Je présume que tu es au courant. » le salua-t-elle. Il grommela une réponse affirmative. « J'ai réfléchi à ce que Higuchi et toi avez dit. » Elle capta sa complète attention grâce à ces mots.
« Tu vas confier l'affaire à toute une équipe ?
– Oui. Mais pas immédiatement. L'inspecteur Fukuzawa m'a dit que vous aviez une affaire, j'attendrais qu'elle se termine. Je n'accepte de ne la confier qu'à votre équipe.
– L'inspecteur Ayatsuji et toute son équipe sont libres.
– Je n'accepte de ne la confier qu'à votre équipe, répéta-t-elle fermement. Pas de risques inutiles. »
Ryunosuke songea qu'un tel revirement de sa tante relevait du miracle. Ses prières avaient-elles fini par porter leurs fruits ? Sa tante avait-elle eu une intervention divine ? Étrangement, il avait plutôt le pressentiment que l'intervention divine avait l'apparence d'un homme, et se rapprochait plus d'un démon que d'un dieu.
« Pourquoi avoir changé d'avis ? demanda-t-il pour confirmer son intuition.
– J'ai réfléchi à ce que vous avez dit. » Le silence de Ryunosuke sembla lui faire comprendre qu'il n'en croyait pas un mot, et elle ajouta : « Et je lui ai demandé conseil, oui.
– Je t'avais dit de ne pas le faire.
– Et je t'avais dit que je ne t'écouterai pas. » Ryunosuke eut un profond soupir agacé. Puisqu'il n'avait que huit années d'écart entre lui et sa « tante », il essayait parfois de la conseiller, avec le mince espoir qu'elle l'écouterait, mais se heurtait toujours à un mur borné.
« Il n'est pas fiable.
– C'est ton opinion, pas la mienne. Et il m'a conseillé l'inspecteur Fukuzawa. »
En effet, et ce simple fait était une énigme pure aux yeux d'Akutagawa. Comment les deux hommes se connaissaient-ils ? Et quelle relation les liait ? Ils étaient pour lui aux antipodes l'un de l'autre. D'un côté, un inspecteur de renom, dont la sagesse et le talent avaient forgé une réputation qui avait traversé les frontières de leur région. De l'autre, un médecin dont la renommée n'était en rien fondée sur les valeurs et l'honneur, mais plutôt sur la roublardise et les relations.
Surtout sur les relations. Tous les gros poissons de la région le connaissaient, et il connaissait tous les gros poissons de la région. Fitzgerald et tous ses associés américains, des grands noms d'Europe, et même la famille Ôzaki. Quand on pensait que ce n'était qu'un simple médecin...
« Cela ne veut pas dire pour autant qu'il est fiable. » lâcha-t-il pour avoir le dernier mot. Il entendit son interlocutrice soupirer à l'autre bout du fil.
« Doute de lui si ça te chante. J'ai personnellement confiance en le docteur Mori. » Confiance en lui au point de plus écouter son jugement que celui de sa propre famille ? songea Ryunosuke sans pour autant formuler ses récriminations à voix haute.
« Je suppose que ta prochaine recommandation est « Terminez vite cette affaire » ? ironisa-t-il.
– Eh bien, ce serait peut-être préférable. »
Ryunosuke secoua la tête avec consternation. Il appréciait Kôyô, mais elle pouvait se montrer si agaçante et hautaine parfois. Sa mère lui avait déjà dit que c'était sa manière à elle de garder le contrôle de la situation, mais c'était extrêmement agaçant pour ses interlocuteurs.
« Oh, Ryu. » Sa tante reprit la parole – et quand retiendrait-elle qu'il haïssait ce surnom ? « Le numéro inconnu qui a envoyé la pièce jointe... La police l'a remonté.
– Non attribué ?
– Tu t'es déjà renseigné alors. » Le ton de la jeune femme aux cheveux roses s'était tendu, et il se souvint un peu tard qu'elle ne voulait pas qu'il fasse de recherches dessus.
« Je ne connais que ce détail. Mais je sais que l'inspecteur Fukuzawa devait faire analyser le logo du mail. Les résultats devraient bientôt arriver. »
Kôyô déclara quelque chose d'inaudible pour l'inspecteur en formation – elle s'adressait probablement à quelqu'un d'autre dans la pièce – et l'informa ensuite qu'elle allait le laisser se reposer, un terme qui fit sourire ironiquement le jeune homme. Ni lui ni elle ne fermeraient l'œil de la nuit. Il lui souhaita néanmoins la même chose, avant de raccrocher. Un peu de temps s'était écoulé désormais, mais il faudrait quelques heures de plus pour que le soleil perce derrière les nuages. Il se rallongea sur son lit avec un profond soupir. Peut-être que le sommeil finirait par revenir...
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« Peux-tu retirer ce sourire satisfait de ton visage ? »
Ce fut la première chose que Ryunosuke entendit lorsqu'il rejoignit ses supérieurs à la table qu'ils occupaient dans le restaurant de l'hôtel, après être resté éveillé pendant cinq heures malgré son envie grandissante de se rendormir. Yosano toisait Ranpo en touillant son café d'un air désabusé. Ce dernier avait un immense sourire narquois sur les lèvres.
« Non, répondit avec un amusement visible le jeune homme au gavroche. Je tiens à vous rappeler qu'en fin de compte, j'avais raison. »
Ryunosuke s'installa aux côtés de sa supérieure tandis que celle-ci soupirait longuement. Il balaya les deux inspecteurs du regard, essayant de prendre la conversation en cours de route.
« Tu t'étais quand même trompé sur l'inspecteur Minoura, fit observer la jeune femme aux cheveux noirs.
– En fin de compte, j'avais raison, bougonna Ranpo. Arrête de douter de moi ainsi, Akiko. Depuis le temps, tu devrais savoir que je suis infaillible. »
La jeune femme fit la moue, ce qui vexa encore plus son compagnon qui lui tira la langue de manière boudeuse. Ryunosuke les regarda se disputer sans rien dire. Il savait qu'ils se connaissaient depuis des années et qu'il y avait une confiance profonde entre eux. Et même s'il ne se permettrait jamais de le dire à ses deux supérieurs, il trouvait pour sa part qu'il y avait quelque chose d'ambigu entre eux.
Il se servit un café depuis la thermos commandée par les deux premiers arrivés, et attrapa une tranche de pain qu'il se mit à beurrer. Ce fut à ce moment que ses aînés semblèrent se rendre compte de sa présence.
« Ryunosuke, c'était mon pain ! » se plaignit Ranpo immédiatement.
Le jeune homme aux cheveux bicolores le regarda sans s'en émouvoir. Il se demandait parfois comment un jeune homme aussi enfantin pouvait être un inspecteur aussi efficace sur le terrain. Encore une énigme pure à ses yeux.
« Laisse-le manger, tu avais fini ton repas de toute façon, fit observer Akiko.
– Non, je faisais juste une pause ! » Ils recommencèrent à se chamailler, au grand dam de Ryunosuke qui avait de plus en plus l'impression de tenir la chandelle.
« Des nouvelles au sujet de Karma Topaz ? s'enquit-il finalement pour mettre fin à leur querelle stérile.
– Absolument rien. » lâcha sa supérieure en passant une main dans ses cheveux. Ranpo conserva sa moue boudeuse mais ajouta :
« D'ici à ce qu'ils attrapent un autre innocent... »
Ils burent leurs boissons chaudes en silence quelques instants avant de se lever. Ils avaient rendez-vous au BEC du département de la police métropolitaine à neuf heures et demi, pour une réunion au sommet avec les responsables de l'enquête afin de mettre au clair les dernières informations obtenues.
Entre le compte rendu de l'examen de la cellule de Topaz et les recherches qui avaient été effectuées sur Mark Twain, la réunion promettait d'être longue et fastidieuse. Mais ils parviendraient peut-être à revenir à Yokohama avec des informations essentielles pour expédier en vitesse cette affaire, comme Kôyô le désirait.
Cependant, le mince espoir d'Akutagawa fondit comme neige au soleil lorsqu'il entra dans la grande salle de réunion en compagnie de ses deux supérieurs. Les quelques inspecteurs présents semblaient aussi investis dans leur travail que lui dans la broderie, et l'épaisseur des documents qu'ils avaient devant eux en disait long sur la quantité d'informations qu'ils avaient récoltées.
« Si on s'avisait de venir avec aussi peu d'informations, l'inspecteur Fukuzawa nous remonterait sévèrement les bretelles. » entendit-il Yosano murmurer à Ranpo alors qu'ils s'installaient.
Celui-ci opina. Ryunosuke avait souvent trouvé qu'ils bâchaient un peu trop les tokyoïtes, mais était assez d'accord avec eux sur ce point. En plus, l'inspecteur de la division d'identification qu'ils avaient vu la veille était présent, et ne cessait de les jauger du regard. L'inspecteur Sakaguchi était venu également, peut-être mettrait-il un peu de sérieux dans la réunion malgré tout.
« Pouvons-nous commencer ? » interrogea justement ce dernier en remontant ses lunettes.
Les autres personnes présentes hochèrent la tête. Ils étaient en tout six inspecteurs de police : Ango, qui représentait la division générale des enquêtes criminelles, Minoura et une jeune femme blonde qui représentaient la division d'identification, et eux trois, inspecteurs de Yokohama. Ryunosuke s'attendait à mieux comme « réunion au sommet ».
« Notre compte-rendu sera bref, débuta Minoura, la serrure de la cellule de Topaz n'a pas été forcée. Elle a forcément été déverrouillée avec la clé.
– Donc le coupable se trouve parmi les surveillants ? » demanda Yosano. L'autre hocha lentement la tête.
« C'est l'hypothèse la plus logique. Voler la clé serait impossible.
– Donc il faut interroger les surveillants, conclut Ango.
– Ce n'est pas dans nos attributions, crut bon de faire remarquer l'homme aux cheveux noirs.
– Laissez-nous nous en charger ! » supplia presque Ranpo en sautant sur l'occasion. Après tout, ils n'étaient pas venus pour juste observer leurs collègues résoudre leur affaire.
« Bien sûr, opina Ango, c'est votre affaire. (Il s'adressa ensuite à Minoura) Vous avez trouvé des choses suspectes ?
– Rien du tout, répondit la jeune femme blonde. La cellule est remplie d'empreintes du suspect et de certains surveillants, ce qui ne sort pas de l'ordinaire. Vous pourriez peut-être comparer les témoignages et les empreintes, ajouta-t-elle à l'adresse des inspecteurs de Yokohama.
– Ce sera un bon point de départ. » approuva Yosano.
Les deux femmes se firent passer une feuille qui récapitulait probablement toutes les empreintes relevées.
« Et sinon, reprit Edogawa après un petit silence, au sujet de l'interpellé ?
– Casier judiciaire vide à l'exception d'une arrestation après la participation à une manifestation anarchiste, répondit Ango. Il n'a rien dit de plus depuis que vous l'avez vu, il se contente de répéter qu'il est Karma Topaz. Cependant, les experts médicaux sont formels : il n'y croit pas lui-même. Il ne présente aucun signe de démence.
– Mais ça n'a aucun sens, laissa échapper Yosano d'un ton incrédule.
– Je sais, soupira l'autre. Difficile de dire ce qui passe par la tête de ce civil. En tout cas, il nous donne beaucoup de fil à retordre. Il est violent, et refuse d'entendre parler de remise en liberté.
– Ce qui est vraiment étrange, c'est ce comportement, intervint Minoura. Il paraît impensable qu'il connaisse Karma Topaz alors pourquoi agir ainsi ?
– Du chantage peut-être ? hasarda l'inspectrice de Yokohama. Si Topaz l'a menacé de, je ne sais pas, tuer sa famille ou même lui ?
– Vous trouvez que ça correspond au profil psychologique du suspect ? » fit remarquer le responsable de la division d'identification en fronçant les sourcils.
Ryunosuke se souvenait avoir lu ledit profil psychologique établi par les experts, et il était vrai que le jeune homme qui y était décrit n'était pas le type à faire un tel chantage. Cependant, il se décida enfin à apporter sa participation à la conversation qu'il n'avait qu'observée depuis le début.
« Topaz a passé trois ans en prison. Ça peut changer quelqu'un sans problème. » Le quadragénaire aux cheveux noirs l'observa, presque surpris de l'entendre parler, avant de marmonner quelque chose qui devait probablement compenser son manque de répartie.
« Il a raison, opina Ranpo. On ne peut faire aucune hypothèse sur ce point-là.
– Vous avez pensé à interroger les anciens amis et les parents de Topaz ?
– Une autre équipe s'en charge, répondit Yosano. On va les contacter. »
Elle nota quelque chose sur le carnet de note qu'elle avait amené avec elle, probablement un rappel pour contacter Dazai, qui ne leur avait donné aucune nouvelle depuis leur départ la veille.
« Si ça ne vous dérange pas, intervint Ranpo, et Akutagawa eut le sentiment qu'au contraire, cela allait déranger, j'aimerais bien faire un tour dans la cellule de Topaz. » Devant la grimace qui déforma le visage de Minoura, le jeune homme aux cheveux bicolores songea qu'il pourrait se reconvertir en devin.
« Vous remettez en question notre expertise ? » lâcha-t-il d'un ton incroyablement méprisant. Ranpo y répondit avec un grand sourire innocent :
« Non. C'est juste pour apporter un œil nouveau à votre expertise. »
Son aplomb eut le mérite de laisser l'autre inspecteur sans voix, et de permettre à Ango de trancher le conflit d'un ton professionnel :
« Allez-y. Vous pouvez prendre quelques policiers avec vous si vous en avez besoin pour vous aider. »
Yosano le remercia du regard avant de se lever. Ryunosuke n'avait pas remarqué à quel moment elle avait pris le contrôle de la réunion, mais cela semblait si naturel que personne ne protesta, se contentant de suivre du regard la jeune femme qui faisait claquer ses talons rouge sur le sol en quittant la pièce d'un rythme rapide, rapidement suivie par ses deux collègues presque aussi surpris que les tokyoïtes.
« Ils sont vraiment agaçants, s'exclama la jeune femme une fois qu'ils furent assez loin pour que les autres n'entendent pas. « Vous remettez en question notre expertise », « Vous pouvez prendre des policiers si vous en avez besoin », on est capables de faire du bon travail aussi ! »
C'était l'une des premières fois que Ryunosuke voyait sa supérieure aussi agacée. Ranpo posa une main sur son épaule comme pour l'apaiser, avant d'ajouter, avec un clin d'œil :
« Montrons-leur qu'on fait du meilleur travail qu'eux. » Ces mots parurent calmer quelque peu la jeune femme, qui soupira avant de se pincer l'arête du nez.
« Ryunosuke, reprit-elle d'un ton plus modéré et professionnel, tu peux contacter Dazai pour lui demander où il en est ?
– Oh, en parlant de Dazai ! » s'exclama soudainement Ranpo en tapant dans ses mains. Il ne lui manquait que l'ampoule au-dessus de la tête pour ressembler aux personnages des dessins animés. « Il m'a envoyé un mail hier, j'ai oublié de vous en parler ! »
Ryunosuke dévisagea son supérieur avec un regard épuisé. Franchement, tout le monde dans son entourage ne cessait de lui rebattre les oreilles sur le célèbre inspecteur Edogawa Ranpo, mais ils seraient bien déçus par le véritable jeune homme qui se cachait derrière ce nom. Il n'avait rien du professionnalisme qu'on lui prêtait dans tous les articles relatant les affaires qu'il résolvait – certes, en des temps records, ça il fallait bien l'admettre.
« Et qu'est-ce qu'il disait ? s'enquit Yosano, visiblement habituée.
– Il veut qu'on inspecte la prison de fond en comble. » La jeune femme cligna des yeux plusieurs fois avant de s'offusquer :
« Pardon ? Il ne te parle pas des interrogatoires ?
– Il n'a rien dit à ce sujet. Je crois qu'il n'a pas abandonné son hypothèse. » Akiko soupira longuement et réfléchit quelques instants.
« Pourquoi y tient-il à ce point ? C'est parfaitement impensable que Topaz soit toujours à l'intérieur de la prison.
– Il a rarement tort. » fit remarquer Ranpo. Ses yeux couleur émeraude étincelèrent derrière ses lunettes. « Et je pense que ça vaut le coup d'enquêter.
– ... Qu'est-ce que tu en penses ? demanda finalement l'inspectrice à son subordonné, qui s'accorda quelques secondes de réflexion avant de répondre :
– On devrait peut-être suivre son instinct. »
A vrai dire, il s'en fichait un peu. Il connaissait à peine l'inspecteur Dazai, et vu ses soucis personnels, il avait d'autres choses à faire que de sociabiliser avec lui. Mais de ce qu'il avait entendu – et lu – le jeune homme aux cheveux bruns était assez talentueux, alors peut-être ne se trompait-il pas entièrement.
« OK, finit par conclure Akiko. Dans ce cas, on fera un tour. »
Trois vibrations différentes ponctuèrent sa phrase. Les trois inspecteurs s'entre-regardèrent, surpris, avant de sortir leurs téléphones. La notification qui s'afficha sur l'écran de Ryunosuke provenait du numéro inconnu, et il déduisit qu'il en allait de même pour ses supérieurs en entendant le soupir agacé de Yosano.
Il ouvrit le message envoyé par leur mystérieux interlocuteur, et découvrit une nouvelle pièce jointe, une carte de la prison apparemment. Une pièce – et il sembla à Ryunosuke qu'il s'agissait de la cellule de Topaz – était entourée grossièrement d'un épais trait rouge tracé par ordinateur. Un point d'interrogation avait été tracé à côté, visiblement à la main. C'était une vraie invitation à se rendre là-bas.
« Quand on aura trouvé le petit malin qui s'amuse avec nous, laissa échapper la seule femme du groupe, je lui collerais mon poing dans la tête. Je le promets. »
La seule chose qui lui répondit fut une nouvelle vibration de son téléphone, mais Ryunosuke ne put déceler sur son visage un indice sur ce que l'autre lui avait répondu. Elle se contenta de ranger son appareil et de leur faire signe de la suivre.
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Le centre de détention de Tokyo était l'un de ces bâtiments dont la logique de l'architecture était incompréhensible pour le commun des mortels, songea Ryunosuke en posant un pied hors de la voiture et en faisant face à l'immense bâtisse grise qui abritait les criminels de la métropole et de ses alentours.
Vue depuis les photographies satellites, le centre ressemblait vaguement à un papillon, avec un grand bâtiment central auxquelles étaient reliées quatre ailes de cellules, dont les extrémités étaient elles-mêmes reliées par d'autres quartiers. Mais de face, au sol, le bâtiment ne ressemblait à rien de compréhensible. Ryunosuke, habitué aux architectures traditionnelles du temple Sôji et des maisons de sa famille, trouvait cela particulièrement étrange.
Il se retint cependant de faire le moindre commentaire, estimant que ses supérieurs se fichaient probablement de son avis sur la prison qu'ils venaient inspecter. Il se contenta donc de les suivre à l'intérieur de l'édifice, dont les murs auraient bien mérité quelques coups de pinceau, et de saluer respectueusement l'homme venu à leur rencontre, le directeur du centre de détention.
Il les conduisit jusqu'à la cellule de Topaz sans qu'ils n'aient à expliquer quoi que ce soit, mais sembla assez réticent à les laisser étendre leurs recherches à toute la prison.
« C'est que, on ne peut pas dire que vous soyez très appréciés ici, expliqua-t-il avec une gêne palpable. Pas vous personnellement, mais les policiers en général ne sont pas les bienvenus dans les quartiers pénitentiaires. »
L'homme craignait visiblement une émeute, observa intérieurement Akutagawa, qui s'ennuyait de plus en plus. Pour le moment, cette affaire n'avait rien de l'affaire excitante qu'on lui avait promis lorsque la nouvelle de l'évasion de Karma Topaz s'était ébruitée. Les choses allaient-elles finir par bouger un peu ?
Akiko et Ranpo finirent par obtenir du directeur de la prison une visite rapide avec les surveillants lors de l'une de leur ronde, et ils chargèrent Ryunosuke d'inspecter la cellule de Topaz. Enfin une responsabilité confiée à lui seul.
Il appliqua tout d'abord à la lettre les méthodes vues en formation : la police scientifique était déjà passée mais il enfila quand même des gants pour ne pas détruire par inadvertance une potentielle piste. La cellule n'était pas grande, et moins minimaliste que sa chambre dans la demeure Ôzaki. On y trouvait quand même un meuble en bois pour poser des objets, un futon replié dans un coin, et, dans le fond, de quoi conserver une hygiène respectable.
L'inspecteur en formation fut surpris par la propreté clinique de l'endroit. La police scientifique avait tout laissé en état, se contentant de relever toutes les empreintes et autres petites choses comme des cheveux ou des minons de vêtements, et tous les objets de la pièce étaient parfaitement ordonnés. Le futon était plié impeccablement, et pas une seule chose n'était de travers. Rien ne laissait suggérer une évasion rapide, faite dans la précipitation. Aucune trace d'effraction non plus : mis à part les fissures naturelles causées par le temps, les murs et les fenêtres ne portaient aucune trace d'impact.
Ryunosuke pesta et s'accorda un instant de réflexion, essayant d'établir des liens logiques entre les différents éléments qu'il pouvait observer dans la pièce. Il s'intéressa alors à la table basse collée contre un mur et recouverte de quelques objets qui devaient être des affaires personnelles de Karma Topaz : un bloc de papier, un stylo bleu, un collier ras de cou orné d'une pierre rouge et un cadre photo.
Les quatre objets étaient de potentielles pièces à conviction et, malgré ses gants, l'inspecteur préféra ne pas y toucher et se contenta de les observer. Le bloc de papier était vierge, et il ne semblait pas possible d'en tirer des informations sur la dernière lettre écrite par le prisonnier : le papier était immaculé.
Il laissa de côté le stylo et le collier, et s'intéressa au cadre photo – s'il y avait bien un objet susceptible de lui apprendre des choses utiles, c'était sûrement celui-ci. Il approcha au maximum son visage du cadre pour observer les silhouettes visibles sur la photographie, des silhouettes assez petites car elles se trouvaient assez loin de la personne qui avait pris la photo.
Après une longue observation qui se voulait minutieuse, il identifia cinq personnes : quatre garçons et une fille, vêtus d'uniformes variés. Ils posaient devant la Tokyo Tower, et souriaient à pleine dents. Ryunosuke avait du mal à saisir leurs traits distinctifs cependant. Il prit néanmoins le cadre en photo avec son téléphone – ainsi que le numéro de pièce à conviction inscrit dessus – et l'envoya à l'inspecteur Dazai. Peut-être pourrait-il demander à obtenir le cadre et ainsi vérifier les identités de ceux qui figuraient dessus.
Un détail attira soudainement son attention sur la photographie affichée dans le cadre : une partie de la tour rouge et blanche semblait un peu... bombée, comme si il y avait quelque chose derrière. Il hésita, puis finit par attraper l'objet, déchirer l'emballage de la police scientifique, et ainsi pouvoir observer le cadre. Le surveillant qui était resté en retrait laissa échapper une exclamation de surprise devant son geste.
Il ne regarda pas vraiment la photo en elle-même – mais il remarqua quand même que les quatre garçons avaient une chevelure rousse ou auburn – et ouvrit le cadre pour en tirer ce qu'il contenait : la photographie que tout le monde pouvait voir et en-dessous, un petit bout de papier plié. Le garde laissa échapper un sifflement admiratif lorsque Ryunosuke tira le papier dissimulé.
Il écarquilla les yeux en reconnaissant le motif qu'il y avait dessus. C'était le même que celui sur le mail de « chantage » reçu par Kôyô, celui que Fukuzawa devait envoyer à un expert pour analyser les lettres arrondies.
Sous le logo, les deux lettres avaient été reproduites, et tracées de façon à ce qu'elles soient un peu plus lisibles. Et encore en-dessous, un nom avait été inscrit, correspondant aux initiales : Sakunosuke Oda.
Il fallut quelques secondes au jeune inspecteur pour comprendre d'où venait son malaise : il connaissait ce nom, et pour cause : il s'agissait de celui qui figurait sur le plus récent portrait en hommage accroché dans leur bâtiment. Un ancien inspecteur de l'équipe de Fukuzawa. Supposément mort et enterré depuis six mois.
Ryunosuke réfléchit longuement à ce que tout cela impliquait, et il y avait beaucoup de choses dans la liste. Sakunosuke Oda était-il celui qui se cachait derrière les messages mystérieux ? Non, c'était impossible, il était normalement mort... Ou alors il avait simulé sa mort...
Akutagawa ne connaissait pas les circonstances exactes de la mort de l'inspecteur Oda, le sujet étant plutôt tabou à la brigade, surtout depuis que Dazai était revenu. Il savait juste qu'il s'agissait du second mentor du brun, qu'ils étaient très proches, et que l'homme était décédé après une mission qui avait mal tourné. Mais quant à savoir s'il était possible qu'il ait simulé son décès...
Pour comprendre, Ryunosuke devait interroger ses supérieurs à ce sujet. Et espérer avoir une réponse, quand bien même le sujet semblait être épineux. Il se redressa, et tendit au surveillant le cadre, la photo et le bout de papier en ordonnant qu'ils soient renvoyés à la police scientifique immédiatement. Les empreintes sur le papier serviraient peut-être.
Il partit ensuite à la recherche de ses deux supérieurs pour leur faire part de ses découvertes. Yosano et Ranpo semblaient rendre à moitié fous les deux surveillants qu'ils accompagnaient, en demandant à inspecter le moindre recoin de la prison. Ils avaient à peine avancé depuis qu'ils s'étaient séparés, probablement à cause des arrêts incessants des deux inspecteurs. Ils étaient actuellement en train de s'intéresser à un pan de mur fissuré – et honnêtement, Ryunosuke avait plutôt l'impression qu'ils s'amusaient à faire tourner en bourrique les surveillants au lieu de chercher de réelles preuves.
« On a vérifié que rien n'était caché dedans ? demandait Yosano avec un amusement palpable lorsqu'il les rejoignit.
– Tu crois qu'on devrait faire tomber le mur ? ajouta Ranpo.
– Inspecteurs ? les interrompit Ryunosuke, au grand soulagement des deux surveillants apparemment.
– Oh, Ryunosuke ! le salua l'inspecteur au gavroche en agitant les mains tel un enfant. Tu as trouvé quelque chose ? » Le jeune homme aux cheveux bicolores hocha la tête et gagna ainsi l'attention de ses deux supérieurs.
« Un bout de papier dissimulé dans un cadre. Je l'ai donné aux surveillants pour qu'il soit transféré à la police scientifique.
– Il y avait des choses dessus ? s'enquit Yosano.
– Un logo, des initiales et un nom en-dessous.
– Lequel ? Ne tourne pas autour du pot ! gémit Ranpo.
– Sakunosuke Oda. »
Il s'attendait à ce que sa nouvelle information jette un froid, mais pas une tempête de neige : les visages de ses interlocuteurs pâlirent violemment et ils échangèrent un regard stupéfait.
« ... Pourquoi ? » lâcha Akiko, probablement plus pour Ranpo que pour Ryunosuke. Celui-ci secoua la tête sans plus comprendre visiblement.
« C'est très étrange. Il paraît peu probable qu'ils se connaissaient. Le logo, tu sais ce qu'il représentait ?
– Il est très abstrait, mais je sais de source assez sûre qu'il est lié au numéro inconnu. » Nouvel échange de regards interloqués, et le jeune homme aux cheveux bicolores se dépêcha d'asséner sa dernière question : « Est-il possible que l'inspecteur Oda ait simulé sa mort ?
– Non. » répondirent-ils tous les deux d'un ton sans appel.
Tant de ferveur surprit Ryunosuke, d'autant plus qu'elle réduisait son hypothèse en cendres. Il espérait que ses deux supérieurs n'allaient pas se contenter de cette simple négation, et rentrer un peu plus dans les détails.
« Tu n'étais pas encore à la brigade alors tu ne peux pas savoir, reprit Akiko, son regard magenta soudainement voilé par une tristesse poignante, mais il est impossible qu'Oda ait survécu d'une manière ou d'une autre. »
Le jeune homme aux cheveux bicolores crut qu'elle allait expliquer un peu plus, mais elle n'ajouta rien d'autre sur ce sujet et se dirigea vers un autre pan de couloir qu'elle n'avait pas encore inspecté. Ranpo parut remarquer sa contrariété puisqu'il ajouta quelques mots avant de suivre sa collègue :
« Le logo reste une piste importante à exploiter. On s'en occupera dès que notre visite sera terminée. »
Ryunosuke le regarda s'éloigner avec une amertume grandissante. Ses deux responsables ne s'étaient pas contentés de balayer son hypothèse de la fausse mort de Sakunosuke Oda, ils avaient aussi complètement écarté la piste de l'inspecteur décédé. Pourtant, il était évident qu'il y avait un lien, quel qu'il soit. Karma Topaz n'aurait pas possédé un papier avec son nom autrement.
La difficulté résidait dans la découverte de ce lien. Si les inspecteurs de l'équipe de Fukuzawa, pourtant les mieux placés pour parler du défunt, se montraient aussi réticents à aborder ce sujet, cela n'allait pas être une mince affaire. Il pouvait d'ores et déjà écarter Yosano et Ranpo de la liste de ceux qu'il pouvait questionner. Nakajima était arrivé en même temps que lui et ne devait donc pas en savoir beaucoup plus ; quant à Dazai, il ne se voyait pas lui poser de question sur un sujet visiblement sensible avec lui, d'autant plus qu'ils ne s'étaient jamais réellement parlé. Le même problème se posait pour Kunikida qu'il connaissait à peine.
Il ne lui restait donc que Fukuzawa. Au fond, c'était la piste la plus faisable pour lui, et celle qui avait le plus de chances de réussite. Il doutait que le sage inspecteur principal se montre aussi évasif. Il sortit son téléphone pour contacter son supérieur, et constata alors qu'il avait reçu un message.
Il crut un instant que le numéro inconnu avait recommencé son petit manège, mais l'expéditeur était recensé dans son répertoire.
Et ce n'était pas Kôyô.
Ni Ichiyô.
Mais Gin.
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