32 - 𝐂e qui se cache dans l'obscurité

hello folks!

comment allez-vous ? comme toujours j'espère que tout va bien dans vos vies et vos familles <3
j'ai eu une matinée de cours en présentiel cette semaine, c'était une révolution dans ma vie mdrrr <3 j'avais oublié ce que « parler à des personnes en vrai » voulait dire.

sinon!! ouvrez grands vos yeux, on entre officiellement dans la dernière ligne droite <3 les prochains chapitres vont tous se passer dans une ligne temporelle très serrée, et notre russe favori (hum hum) n'est plus très loin :))

ne m'en voulez pas pour la fin et notez le 06 mars dans vos agendas pour la suite ✨ bonne lecture !

ps : merci pour les 19K!

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𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝐓𝐫𝐞𝐧𝐭𝐞-𝐝𝐞𝐮𝐱 - 𝐂𝐞 𝐪𝐮𝐢 𝐬𝐞 𝐜𝐚𝐜𝐡𝐞 𝐝𝐚𝐧𝐬 𝐥'𝐨𝐛𝐬𝐜𝐮𝐫𝐢𝐭𝐞́

Le jeune homme aux cheveux bruns posa une main au creux de son coude, et observa son interlocuteur, son premier mentor, un homme qu'il respectait malgré leurs différends et leur incapacité à s'entendre sur la moitié des sujets. L'homme en question affichait une expression grave, comme tout le monde, comme tous ceux qui savaient ce qui s'était passé et comment cela l'affecterait.

Le brun lui était au moins reconnaissant d'avoir conservé son professionnalisme pour s'adresser à lui. Il n'oubliait pas que celui qui lui faisait face était un adulte, largement au fait de ce qui s'était produit. C'était au moins cela de gagné.

L'inspecteur principal énonçait les faits avec une neutralité surprenante compte tenu de ce qu'il racontait, et lui l'écoutait sans rien dire. Son esprit habituellement si rapide était fixé sur une seule pensée, ou plutôt deux. L'une étant une implacable évidence qui ne s'effacerait pas, l'autre une vérité en devenir qui n'attendait que d'être prononcée pour être actée.

Il attendit que son interlocuteur ait fini de dire ce qu'il avait à dire, avant de poser sur son bureau une enveloppe de papier kraft porteuse de cette seconde vérité. Il avait hésité avant de la remplir, et de la montrer à son supérieur ensuite, mais il sentait qu'il le fallait. Autrement, il ne serait pas capable d'aller de l'avant et de ne pas retomber dans ses vices.

Son supérieur la prit sans rien dire, lisant les mots griffonnés dessus sans rien laisser paraître de ses sentiments. Le jeune homme lui en était reconnaissant. Il ne se sentait pas prêt à affronter des reproches, même muets.

Il se leva ensuite pour quitter le bureau, puis s'inclina une dernière fois devant son supérieur. Il le lui devait bien, même s'il n'était d'ordinaire pas très amateur de ces formalités respectueuses. Il laissa ensuite derrière lui toute cette tranche de sa vie, tous les souvenirs, en même temps que son ancien mentor ouvrait l'enveloppe pour lire les mots associés à l'intitulé dessus.

Lettre de démission - Osamu Dazai.

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J+7
24 JANVIER

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Dazai souffla si profondément que les feuilles devant lui s'envolèrent, comme bousculées par le vent. Il détestait la paperasse, il ne le dirait jamais assez. C'était la seule partie de son travail qu'il détestait ― en plus de devoir prendre des gants avec les gens. Il n'était pas plus doué pour cela qu'il ne l'était pour remplir des documents officiels avec des informations dont ses lecteurs se fichaient de toute manière.

Assis en face de lui, Ango croisa les bras sur son torse et le dévisagea longuement sans ciller. Il était partiellement couvert par les mêmes papiers que Dazai avait fait voleter dans sa direction, ce qui le décrédibilisait grandement.

« Tu peux te concentrer ? » il soupira au bout d'un moment, avant de retirer les quelques feuilles de ses jambes pour les déplier.

« Non, je ne peux pas. On ne progresse pas là ! On ne fait que lire des documents !

Tu voulais un compte-rendu de l'interrogatoire de Topaz. Tiens. »

Le brun fit la moue. Certes, il en avait demandé un à son ami mais il avait oublié que le jeune homme racontait vraiment tout dans ses comptes-rendus. Ils étaient terriblement longs et ennuyeux. Or, il n'y avait que peu de choses qui intéressaient réellement l'inspecteur. Des informations subtiles, n'importe quoi qui en dirait long... Il avait trouvé l'histoire de la terre sur la veste très intéressante, surtout en apprenant que le meilleur ami de Yosano était entré en contact avec Dostoevsky ou l'un de ses complices, mais cela ne l'éclairait pas beaucoup pour le moment.

« C'est presque décevant. » Il commenta au bout d'un instant. Ango le foudroya du regard, agacé par son attitude puérile.

« Tu t'attendais à ce qu'il nous donne l'adresse de Dostoevsky ?

Non ! Mais la seule chose tangible qu'on a, c'est une carrière avec une activité suspecte. Sauf que ça ne nous dit rien des plans de Fyodor. Il se planque dans une carrière, ok, donc ? Ça ne coïncide même pas avec ce que Sôseki Natsume m'a dit. » L'homme mystérieux avait dit que Dostoevsky privilégiait les hauteurs. Ce qui semblait logique puisqu'il se prenait pour Dieu. Qu'est-ce qu'il pouvait fabriquer dans cette carrière ?

« J'ai bien l'impression que ce type est vraiment introuvable.

Si tu m'annonces que tu penses qu'on doit fermer l'affaire, je te jette ce stylo.

Admets au moins que vous n'avancez pas. OK, on a eu Topaz mais...

J'ai eu Topaz, corrigea Dazai, et je ne compte pas m'arrêter là. Je suis sûr que Dostoevsky va repasser à l'action. Et la dernière fois, il y a eu un mort. Qui sait ce que ce sera la prochaine fois ? »

A l'instant où il prononça ce dernier mot, un séisme ébranla soudainement le petit appartement de l'inspecteur tokyoïte, achevant de faire se mélanger les papiers du rapport de ce dernier. Les deux jeunes hommes se protégèrent sous la table le temps que la secousse s'achève, puis se redressèrent lentement une fois que les murs eurent cessé de trembler.

« Même le monde est de notre côté, ironisa Dazai. Il y avait longtemps qu'on n'avait pas eu un séisme de ce genre.

J'espère qu'il n'y a pas de blessés, commenta Ango, plus terre à terre que lui.

Espérons. On n'a pas besoin de plus de boulot. » Son ami lui jeta un regard agacé.

« Est-ce trop te demander de faire preuve de compassion ?

Oui. » rétorqua aussi sec le brun. La compassion ne l'avait jamais amené très loin, tandis que la rationalité si. Il croisa les bras sur sa poitrine, réfléchissant à toute allure. « La terre a tremblé fort. Assez pour qu'on l'ait ressenti dans un large périmètre non ?

Je suppose que oui.

Tu crois que c'est recommandé, un séisme lors qu'on travaille dans une vieille mine abandonnée et instable ? » Une lueur de compréhension passa dans le regard de son ami.

« Dazai, non.

Dazai, si. »

Les deux amis se défièrent un moment du regard, avant qu'Ango ne finisse par abdiquer en soupirant ― Dazai gagnait toujours à ce petit jeu. Contre Ango, contre Odasaku, contre Fukuzawa, peu importe. Il ne battait jamais en retraite, ce que tout le monde savait. Et peu avaient la patience nécessaire pour lui faire face quand il agissait ainsi, car tous savaient qu'il était borné et impossible à entraver.

« Je viens avec toi alors. » Le brun haussa un sourcil, surpris. Oh ? Son ancien ami voulait l'accompagner dans sa folie ?

« Tu n'es pas obligé. Je peux me débrouiller seul.

Te faire tuer seul oui. »

Dazai faillit faire une blague ironique sur ses tentatives de suicide passées, mais il savait qu'il était le seul à les trouver drôles, alors il se retint. En plus, il était sûrement complètement contre-productif de faire des blagues sur cette ancienne habitude quand il en était sorti tant bien que mal. Il se contenta donc de protester contre cette accusation, en fronçant les sourcils d'un air ennuyé.

« Ton manque de confiance en moi me blesse, Ango.

Tu parles de te rendre dans la cachette présumée de Dostoevsky.

Il est à proprement parler peu probable qu'il s'y trouve réellement.

D'accord, mais il y aura au moins ses complices. Tu ne peux pas juste débarquer avec ton grand sourire d'imbécile heureux. » Cela lui paraissait pourtant être une excellente stratégie, et Ango dut lire dans ses pensées, car il rétorqua, en remontant ses lunettes : « Ce n'est pas une stratégie. Ne fais pas ça.

C'est une opportunité sans précédent. La carrière n'est pas loin. En théorie, on peut y arriver assez vite pour qu'ils ne soient pas revenus sur leurs gardes. On ne va pas perdre de temps avec une fichue stratégie trop longue ! D'ailleurs, j'en ai une très simple : on y va, et on les arrête.

En leur demandant gentiment, tant qu'à faire ? « Excusez-nous de vous déranger, on vient juste vous arrêter pour extraction illégale, ou on ne sait pas trop quoi au juste. »

Ce sont peut-être des criminels respectueux. »

Dazai était devenu complètement ironique, et le jeune homme aux cheveux noirs face à lui semblait à deux doigts de le jeter par la fenêtre ― mais Ango était en vérité trop gentil pour cela, même avec un total de six heures de sommeil en quatre jours, il restait maître de lui-même et trop bienveillant pour défenestrer son abruti d'interlocuteur.

(En plus, bonjour les relations de voisinage s'il le faisait, en sachant qu'il vivait dans un immeuble avec une dizaine d'appartements tous occupés. Il ne doutait pas que les habitants de ceux-ci n'avaient pas vraiment envie de découvrir un inspecteur de police dans leurs plates-bandes un beau matin ― même s'il pourrait justifier cette intrusion par le séisme éventuellement.)

« Allons-y alors, finit par soupirer Ango. Mais on met au point un plan dans la voiture. » Il attrapa ses clés sur la commode dans l'entrée avant d'ouvrir la porte, et de laisser son ami partir, un grand sourire goguenard aux lèvres, intérieurement ravi d'avoir convaincu son ami de le suivre. Il avait parfaitement berné son camarade pour qu'il le suive dans ses bêtises.

« Comme au bon vieux temps ~ »

Il conclut sur un ton rieur. Ango ne répondit rien et se contenta de se diriger vers sa voiture d'un pas déterminé. Dazai savait qu'il ne savait pas comment interpréter ce qu'il disait. Ango n'arrivait pas à savoir s'il se moquait de lui en prétendant revenir en de bons termes avec lui, ou s'il était sincère.

Honnêtement, même Dazai ne savait pas.

« Heureusement que Yosano nous a transmis à tous les coordonnées, soupira le tokyoïte en mettant le contact une fois qu'ils furent installés.

Exact. Même s'il n'y a pas des milliers d'adresse non loin où on peut creuser.

Je ne savais même pas qu'il y avait de cavités rocheuses permettant des extractions près de Tokyo, fit remarquer Ango. Je pensais qu'elles étaient toutes au Nord de l'archipel. »

Dazai aussi l'ignorait, et avait quand même été surpris d'apprendre qu'il y a une cavité rocheuse à quelques kilomètres des deux villes où il avait toujours vécu. C'était offensant de se faire doubler sur cette information par un russe insupportable qui se prenait pour un dieu. D'un autre côté, il voyait mal ce que cette idée lui aurait apporté au quotidien ― et Dostoevsky l'avait sans doute choisie exprès parce que personne n'en connaissait vraiment l'existence.

Ils roulèrent pendant une vingtaine de minutes, s'éloignant de la grande ville urbaine de Yokohama pour entrer dans les alentours plus verts et moins peuplés. Ango avait entré les coordonnées dans son GPS, mais ils redoutaient que l'appareil ne sache plus les guider au bout d'un moment : ils se rendaient après tout dans une cavité rocheuse sans doute inconnue de la plupart des japonais, alors d'un logiciel...

Ils redoutaient aussi de ne trouver qu'une route mal dessinée pour s'y rendre, car ils étaient quasiment certains qu'aucun travail d'extraction n'avait jamais été réalisé là-bas, pas légalement en tout cas. Mais ils devaient bien y avoir quelques engins qui avaient amené le matériel pour les criminels, alors sans doute y aurait-il un semblant de route.

Environ deux kilomètres avant l'arrivée désignée approximativement par le GPS, Ango coupa soudainement le contact et immobilisa sa voiture sur le bas-côté.

« Hors de question qu'ils nous entendent arriver, il commenta en sentant le regard interrogateur de Dazai peser sur lui.

Deux kilomètres quand même, bougonna celui-ci avec agacement. On va s'épuiser inutilement.

Ce n'est pas ma faute si tu as l'endurance d'un légume. Tu devrais faire plus de sport.

Comme si toi, qui passe ton temps à enchaîner les nuits blanches, tu avais une hygiène de vie exemplaire !

Je ne le prétends pas. Mais j'ai la décence de ne pas me plaindre. »

Dazai leva les yeux au ciel, mais ne rétorqua rien d'autre et descendit de la voiture. Il aimait se plaindre. Il aimait moins se plaindre quand il était avec Ango. L'inspecteur de Tokyo était le pire insensible qu'il connaissait. A un niveau tel que même Fyodor serait passé pour un enfant de chœur à côté ― c'était totalement faux, Dazai possédait juste la pire mauvaise foi du monde. Ils faisaient bien la paire.

Ils avancèrent prudemment entre les broussailles, vérifiant sur le téléphone d'Ango qu'ils semblaient avancer dans la bonne direction. Un rapide coup d'œil à l'heure apprit à Dazai qu'une trentaine de minutes s'étaient écoulées depuis le séisme. Avec une chance suffisante, ils parviendraient à trouver leurs suspects encore bien déroutés par cette secousse que personne, même Fyodor Dostoevsky, n'avait pu prédire.

Des voix humaines finirent par leur parvenir, et ils ralentirent en arrivant à hauteur d'une zone non-boisée. Devant eux se dessina soudainement une immense paroi rocheuse, devant laquelle deux engins de chantier attendaient patiemment. Dazai n'avait pas les plaques d'immatriculation en tête, mais il était presque certain qu'ils faisaient partie des véhicules qui disparaissaient et réapparaissaient fréquemment à Yokohama. Dans tout ce chaos, ils avaient du mal à garder un compte clair des voitures et autres véhicules qui se déplaçaient mystérieusement.

« On dirait que cette hypothèse était bonne. » commenta Ango. Ils étaient les premiers des inspecteurs à venir vérifier qu'il s'agissait bien de leurs suspects ― et, à en juger par les voix aux accents étrangers qu'ils percevaient, c'était bien le cas.

« Il y avait peu de chances que ce ne soit pas notre cher Fyodor ici. » répliqua Dazai en balayant les environs du regard.

Les deux véhicules étaient vides d'hommes, et personne n'était en vue. Les voix devaient venir de plus loin, sans toute réverbérées par la roche. Difficile de déterminer ainsi combien de personnes s'y trouvaient, et l'organisation des « lieux ». Ils ne voyaient qu'une seule paroi ― il y en avait normalement plusieurs autres ― et les voix étaient affaiblies malgré tout.

« De ce qu'on peut voir, il n'y a qu'une seule entrée et sortie, observa Ango. C'est un véritable trou à rats.

Tu crois que c'est le moment de faire de l'esprit ? se moqua Dazai, même s'il se doutait que le jeu de mot de son ami avec le surnom qu'il avait donné à Dostoevsky était involontaire.

Je cherche juste à te faire comprendre que c'est du suicide. En plus, ils ne semblent même pas désorganisés. » Dazai fit la moue, et lui désigna de la main les traces de pneu visibles dans la poussière qui recouvrait l'entrée de la cavité.

« Ces traces sont récentes, regarde. Ces véhicules sont arrivés après le séisme.

Et donc ?

Et donc, ils sont encore en train de travailler à l'intérieur, sans doute pour déblayer les choses tombées lors des secousses. Ces engins sont faits pour déplacer des gros objets. Pas vraiment ce qu'il faut pour travailler dans cette carrière.

Ce qui signifie qu'ils sont en train de s'affairer pour remettre la carrière en bon état. J'ai compris. » soupira Ango. Il marqua une pause de quelques minutes, remonta ses lunettes avec son tic habituel, puis reprit : « Et s'ils sont armés ?

Pourquoi le seraient-ils ?

Oh, je ne sais pas, peut-être parce que ce sont des criminels ? ironisa son ami.

Peu probable. Je pense que ce ne sont que des amateurs que Dostoevsky a payé pour faire le sale boulot. » Le tokyoïte cligna des yeux quelques secondes avant de le regarder fixement.

« Si c'est le cas, qu'est-ce qu'on fiche ici ? Ces types ne sauront rien d'intéressant s'ils ne sont que des amateurs. Ils ne t'apprendront rien.

Je ne compte pas sur eux pour m'apprendre des choses, mais sur l'environnement dans lequel ils travaillent. C'est en l'étudiant qu'on comprendra ce que cherche Fyodor dans cette carrière. »

Et puis, s'ils pouvaient arrêter tous ces types, ce serait tout aussi bien. Cela handicaperait Fyodor dans... il ne savait pas trop ce qu'il faisait, mais cela le ralentirait de perdre ses hommes à tout faire. Et cela l'agacerait d'avoir été pris de court par Dazai encore une fois. Donc, c'était tout bénéfice pour eux.

« Tu as ton arme, toi ? » Il demanda à Ango. Lui-même ne la transportait pas ; il travaillait hors des ordres reçus au BEC, alors si quelque chose se passait mal, il risquait de devoir tout prendre sur lui. Et puis, il n'avait jamais aimé les armes à feu. Il préférait amplement les lames ― et gare à celui qui dirait que c'était l'influence de son père adoptif qui parlait.

« Oui. Mais notre descente n'est pas autorisée, alors je préfèrerai éviter de m'en servir.

Tu n'en auras pas besoin. Mets-les juste en joue pour leur faire peur. On va se placer dans l'entrée et la bloquer ce qui les empêchera en même temps de fuir. Normalement, ils vont flipper et se rendre.

Et s'ils ne le font pas ? S'ils sont lourdement armés et qu'ils ne comptent pas se laisser faire ? » Dazai adressa un éclatant sourire à son ami.

« Alors, on est morts mon cher Ango. C'est un plaisir de t'avoir connu. »

Il se redressa sur ces mots, avançant jusqu'à l'entrée sans prêter attention au soupir de son ami qui avait suivi sa déclaration optimiste. D'un point de vue stratégique, Dazai estimait que les chances que cela se passe ainsi étaient quasiment nulles. Certes, il n'avait pas assez d'informations pour faire un bon profilage complet et analyser tous les cas de figure, mais cela paraissait très peu probable que les choses tournent mal à ce point.

Il avança prudemment vers l'entrée de la cavité, prêtant une oreille attentive aux hommes qui travaillaient. Il se demandait en même temps s'il serait possible de retrouver leur identité aisément en cherchant les passagers d'origine russe qui étaient arrivés au Japon deux mois plus tôt et n'étaient pas encore repartis. Si c'était possible, cela leur permettrait d'identifier ces types, même dans le cas où ils leur échapperaient.

Ango le suivait, une main posée dans son dos, sans doute sur la crosse de son arme. Dazai savait qu'il pouvait compter sur lui pour assurer leurs arrières. L'avantage de compter un ami insensible dans son entourage : il ne tergiversait pas en cas de danger. Il tirerait sans hésiter si la situation le nécessitait.

Les deux hommes atteignirent rapidement l'entrée et s'y faufilèrent à pas légers, essayant de ne pas gâcher leur effet de surprise avec un mouvement trop brusque ou un coup de pied donné dans l'un des cailloux qui recouvrait le sol. Le bruit d'hommes qui faisaient des efforts physiques leur parvint de loin, et ils ralentirent pour se plaquer contre la roche et observer le spectacle qui se proposait à eux.

Une dizaine d'hommes environ travaillaient dans la carrière, déblayant avec une rapidité surprenante les fragments de roche tombés au sol. Dazai devina un petit attroupement dans un coin, sans en distinguer l'origine ― un blessé peut-être ? Il avait beau se dévisser le cou, il ne parvenait pas à apercevoir l'objet de leur attention. Les autres en tout cas, n'y prêtaient aucun intérêt, essayant presque d'éviter ce coin. Il devinait à leurs gestes raides qu'ils devaient se retenir de faire cela, mais jamais leur regard ne dérivait vers le petit groupe.

Comme l'avait initialement supposé Dazai, le séisme avait fait quelques dégâts : il distinguait des outils abandonnés sur le sol, apparemment brisés en plusieurs morceaux ou simplement hors d'usage. Impossible cependant de dire ce que les « ouvriers » trafiquaient ici. De leur point de vue, les deux inspecteurs de brigade criminelle ne distinguaient que de la roche, même pas un quelconque minéral précieux.

« Je ne comprends pas ce qu'ils fabriquent, siffla Ango.

Moi non plus. Mais ils n'ont pas l'air armés, sauf si tu considères leurs pelles comme des armes dangereuses pour ton intégrité. » Ango lui adressa un regard ennuyé.

« Je suppose qu'on ne devrait pas mourir aujourd'hui alors. On y va ? »

Le brun attendit quelques secondes, balayant les environs du regard une dernière fois pour les scanner et en tirer le plus d'information possible avant de passer à l'action. Une fois qu'il fut absolument certain que les ouvriers n'avaient aucune porte de sortie, si ce n'était celle qu'ils bloquaient, il hocha la tête, et laissa Ango passer devant lui.

« Police ! » Son cri fut réverbéré par la roche autour d'eux, et le brouhaha qui l'emplissait jusqu'alors se tut net. Tous les regards convergèrent vers les deux individus qui venaient d'apparaître, dont l'un agitant une arme dans leur direction. « Lâchez vos outils. » appuya ensuite Ango d'un ton ferme ― Dazai était certain qu'il avait failli dire armes au lieu d'outils.

Il y eut une petite seconde de flottement, puis le bruit caractéristique du métal tombant au sol résonna. Au moins, leurs interlocuteurs ne semblaient pas opposer de résistance. Dazai les regarda s'approcher lentement d'eux, mains en l'air pour inciter Ango à ne pas tirer. Celui-ci semblait soulagé de les voir se plier à ses ordres sans combattre.

« Peut-on savoir ce que vous fabriquez ici ? s'enquit ensuite Dazai avec un grand sourire innocent. Je ne savais pas que la mairie la plus proche vous avez donné l'autorisation de creuser. Ça m'a l'air pourtant instable, non ? » Ses interlocuteurs lui opposèrent un silence net et froid. Il ne se laissa cependant pas déstabiliser, et reprit, en anglais cette fois-ci : « Vous parlez une autre langue que le russe ? » Nouveau silence qui lui fit lever les yeux au ciel. « Bon, je suppose qu'on va devoir se débrouiller comme ça. »

Il eut la satisfaction de constater enfin une réaction chez ses interlocuteurs ; il regrettait d'avoir dû sortir ses maigres connaissances de russe pour les faire ainsi réagir. Même Ango lui jeta un regard surpris, et lui murmura en japonais :

« Depuis quand parles-tu russe ?

Depuis deux semaines. Environ. Et « parler » est un bien grand terme. J'ai appris des phrases utiles.

J'espère que tu es sûr de ton coup. Ne leur dis pas n'importe quoi parce que tu prononces mal. » Le brun leva les yeux au ciel devant ce cruel manque de confiance, puis reprit en russe pour leurs interlocuteurs.

« Qu'est-ce que vous fabriquez ici ?

On creuse. » Dazai était parvenu à comprendre cette réponse, qui le fit malgré tout grimacer.

« Sans blague, murmura-t-il en japonais avant de revenir au russe, pourquoi faire ?

On cherche des pierres. Pour devenir riches ! »

Le dernier mot échappa légèrement à Dazai, mais il le devina approximativement en voyant leurs visages soudainement enthousiastes, et à la mention de pierres. Cependant, il était quasiment certain qu'il n'y avait aucune pierre précieuse ici. D'ailleurs, il n'en voyait aucune aux alentours, donc il supposait qu'ils n'avaient rien trouvé.

« Quel type de pierre ?

On ne sait pas encore, mais il a parlé de choses comme le rubis, le saphir, etc. » Le « il » fit tiquer Dazai, et il le répéta en russe, curieux ― mais il se doutait déjà de la réponse sur l'identité de cet homme. « Il, c'est... Celui qui nous a dit de venir travailler ici.

Il n'a pas de nom ? Il ironisa, même s'il n'était pas sûre que son ironie ressorte alors qu'il avait déjà des difficultés à formuler convenablement ses phrases.

On ne le connaît pas. » un autre homme intervint, et Dazai retint un soupir agacé. Evidemment. Fyodor Dostoevsky ne se présentait jamais aux autres. Ou alors ils mentaient. Encore une fois, il avait déjà assez de mal à comprendre ce qu'ils disaient pour être efficaces dans son profilage ― ce qui l'ennuyait grandement.

« Que disent-ils ? » souffla finalement Ango.

Dazai lui répéta leur échange en japonais, tandis que les autres ouvriers se mettaient à murmurer entre eux. Le brun ne pouvait pas saisir assez bien leurs conversations pour les comprendre, à son grand malheur. Il détestait se sentir « exclu » ― et ce, même si à proprement parler il n'avait rien à faire dans cette conversation. Ango hocha la tête une fois qu'il eut tout répété, avant de reprendre :

« Ils ne doivent vraiment être au courant de rien. Mais cela ne nous dit pas ce que Dostoevsky trafique ici.

Je vais leur dire de nous accompagner au BEC. Ensuite, je vais aller fouiller un peu.

Sois prudent. On ne sait pas ce qu'ils mijotent exactement. » l'avertit son ami.

Dazai opina avant de répéter ses ordres en russe ― les autres essayèrent de protester, mais le canon d'une arme était un argument plutôt convainquant semblait-il, car leurs protestations moururent lorsque l'inspecteur de Tokyo agita son arme de service dans leur direction. Ango les fit s'aligner le long d'un mur, tout en les gardant en joue, tandis que Dazai se mettait en mouvement pour inspecter la « carrière ». Beaucoup d'outils et de morceaux de roche tombés gisaient encore sur le sol, et il dut faire des écarts pour les éviter, mais il essaya de longer le plus possible les parois.

Il n'avait aucune connaissance en géologie honnêtement, et aurait bien incapable de deviner quoi que ce soit au sujet de la roche qui s'étendait devant lui. Il ne voyait pas ce qu'elle pouvait avoir de précieux en tout cas, et s'il distinguait parfois de petits éclats dans la roche, il ne s'agissait à première vue que de minéraux communs qui reflétaient vaguement la lumière du soleil.

Il s'intéressa également aux outils abandonnés sur le sol. La plupart semblaient en bon état, presque récents. Sans doute avaient-ils été acquis ― ou volés ― peu de temps avant le début des travaux. Il prit mentalement note de rechercher quoi que ce soit au sujet de vols d'outils de ce type ― Tsujimura savait peut-être quelque chose, il lui laisserait un message énigmatique à son retour.

A part ces quelques observations, il ne devina rien de spécial dans cette cavité. Le sol portait les traces visibles de tous les allers-retours qui avaient été effectués depuis le début des « travaux ». Des monticules de roches coupés en petits morceaux étaient visibles dans un coin, mais rien d'extraordinaire n'en émergeait. Il vérifia même que rien ne se cachait derrière, sans plus de succès.

Il s'intéressa ensuite à l'endroit où les ouvriers étaient d'abord attroupés. Il n'y avait plus personne à cette place désormais, mais il avait mémorisé son emplacement, aussi il s'en approcha doucement. Il gardait la conviction qu'il y avait quelque chose par-là, parce que rien d'autre n'aurait justifié un tel intérêt.

Le sol était cependant semblable au reste de la carrière, même à cet endroit précis : peut-être un peu plus tassé, sans doute à cause d'allers-retours incessants pour transporter les blocs de pierre. L'inspecteur s'agenouilla pour observer de près et s'assurer qu'il n'y avait rien vraiment rien de suspect ― son instinct lui soufflait que quelque chose se cachait là, sans qu'il ne sache vraiment d'où lui venait cette conviction.

Mais il dut se rendre à l'évidence : il n'y avait rien du tout. Pas la moindre trace suspecte, pas le moindre objet, même minuscule, perdu. Quelque chose clochait, il le sentait, mais en l'absence de preuves, il ne voyait pas ce qui titillait son instinct ainsi. Tout semblait en ordre.

Il reprit son inspection, sentant sur lui le regard curieux des autres ― et il en était de plus en plus certain, une partie des ouvriers avait retenu son souffle pendant qu'il inspectait ce coin. Il ne savait pas à côté de quoi il passait, mais il y avait quelque chose qui lui échappait ― et il détestait cela.

Il reprit son inspection minutieuse du reste de la carrière, et découvrit alors un petit local, sans doute pour permettre aux ouvriers de prendre quelques pauses. Il était préfabriqué ― peut-être encore volé ― et sa porte était fermée. Faisant la moue, et faisant fi de la prudence qu'on réservait habituellement à ce genre de situation, il enfonça la porte d'un coup de pied ferme, et pénétra à l'intérieur, sourd aux interpellations d'Ango.

L'endroit était vide d'Hommes, mais rempli d'objets qui témoignaient de son usage fréquent. Café en sachets, paquets de biscuits entamés, vestes abandonnées sur des chaises en fer de mauvaise facture, rien ne semblait louche. Il prit le temps d'inspecter le moindre recoin, n'hésitant pas à enfiler des gants pour manipuler les objets, et à en glisser quelques-uns dans sa poche de manteau pour des analyses plus poussées.

Il convint au bout d'une dizaine de minutes qu'aucun indice important ne semblait se trouver là non plus. La seule chose de valeur qu'il découvrit dans une boîte en fer étaient des passeports, appartenant sans aucun doute aux ouvriers qui attendaient dehors. Il les observa tous, essayant de lire les noms inscrits en cyrillique dessus, et emporta finalement la boîte avec lui. Ils allaient en avoir besoin.

Il ressortit ensuite de la cabine préfabriquée, et son regard accrocha alors un éclat lumineux en provenance d'un recoin de l'autre côté de la carrière. Il avait déjà inspecté cet endroit, mais y retourna d'un pas rapide, curieux de voir ce qui produisait cet éclat, bien trop fort pour être produit par les simples minéraux présents dans la roche.

Il découvrit alors, dissimulée par des jeux d'ombres, une ouverture de petite taille. Il ne l'avait pas remarquée avant, car son accès était instable, et de nombreux outils étaient amoncelés devant. Maintenant, il se demandait si cela n'avait pas été fait exprès ; rien dans la roche n'expliquait l'éclat qui avait attiré son regard, ce qui signifiait que ce n'était pas un objet mais une personne qui en était à l'origine.

La prudence soufflait à Dazai d'être méfiant, mais sa curiosité et son envie de plus en plus pressante d'arrêter Dostoevsky lui disait de ne pas laisser cette piste lui échapper. S'il partait avec Ango et les autres ouvriers, la personne qui se cachait là aurait le champ libre pour prendre la fuite. Or, le brun refusait de laisser s'échapper quelqu'un qui en savait sûrement beaucoup si elle prenait la peine de se cacher.

Cependant, il ne pouvait pas exclure l'hypothèse que, peut-être, il s'agissait d'un piège. Peut-être que cette personne avait intentionnellement placé un objet en métal sur la trajectoire des rayons de soleil pour attirer son attention. Peut-être qu'elle cherchait à l'entraîner dans un piège grossier. Et, s'il y avait quelque chose que Dazai détestait plus que la défaite, c'était tomber dans les pièges.

La curiosité finit par l'emporter, et il s'avança vers la cavité sombre ― en attrapant cependant un outil pour se défendre éventuellement. C'était toujours mieux que d'entrer les mains vides. Il entendit Ango l'interpeller avec curiosité, mais il lui adressa un signe de main pour lui dire d'attendre un peu. Il avança ensuite prudemment dans l'obscurité totale, retenant son souffle et écoutant avec attention les bruits alentours.

Les parois autour de lui ne semblaient réverbérer que les battements de son propre cœur, et il avança de plusieurs pas sans entendre quoi que ce soit d'autre. Avait-il halluciné ? La paranoïa était-elle réellement en train de le gagner ? Il poussa son exploration encore quelques mètres plus loin, mais finit par heurter la roche.

Il étouffa un juron et frotta son nez endolori après la collision désagréable ; il avait vraisemblablement atteint le bout de la petite « grotte ». Sans croiser personne. Mais aussi sans trouver ce qui avait produit l'éclat aperçu initialement.

Il se tourna lentement pour revenir sur ses pas, au moins pour apercevoir l'entrée qu'il avait empruntée. Il s'attendait presque à la découvrir refermée derrière lui, mais non, rien n'avait bougé. Ce constat, étonnamment, ne le rassura pas. Tous ses sens étaient en alerte, et il sentait au plus profond de lui que quelque chose clochait. Il y avait quelqu'un ici, il en était certain. Soit il était passé à côté d'un autre embranchement emprunté par l'individu... soit celui-ci profitait de la pénombre pour se dissimuler à sa vue, et l'attendait bien dans ce petit espace clos.

La deuxième hypothèse aurait signifié qu'il aurait entendu une respiration cependant. Et il avait confiance en son ouïe, certain qu'elle ne le trompait pas. Si quelqu'un était présent, il aurait dû entendre son souffle. L'autre ne pouvait pas se retenir d'expirer indéfiniment.

Il décida de frôler les parois de la roche à la recherche d'un embranchement qu'il aurait pu manquer. Et, alors qu'il était prêt à perdre espoir, il trouva un espace vide, étroit mais pas assez pour qu'il ne puisse pas s'y faufiler. Il prit une légère inspiration avant d'avancer dans l'inconnu. Ses sens étaient en alerte, l'avertissant de l'immense bêtise qu'il était en train de faire. Mais peu lui importait, il sentait aussi qu'il tenait la meilleure piste qu'il avait jamais eue.

Il avança pendant une durée difficile à déterminer en frôlant la roche pour anticiper les mouvements du tunnel dans lequel il semblait s'être aventuré. Était-ce pour cela que ces ouvriers travaillaient depuis le début ? Avaient-ils creusé eux-mêmes ce tunnel ? Plus il y pensait, plus il songeait que c'était peu probable. Il paraissait trop stable pour avoir été creusé récemment, comme si plusieurs années s'étaient déjà écoulées depuis qu'il avait été créé des mains de l'Homme.

Le brun progressa lentement, puis finit par déboucher sur une pièce étonnamment bien aménagée : plusieurs ordinateurs avaient été installés, apparemment alimentés en électricité par il ne savait quelle sorcellerie. Il ignorait à quoi ce tunnel était raccordé, et il comprenait de moins en moins où il se trouvait.

En s'approchant d'un des ordinateurs, il observa l'écran avec insistance, voyant qu'il était allumé. L'image était sombre, aussi il dut s'en approcher pour bien distinguer ce qu'il voyait : un parking rempli de voitures. L'entrée d'un bâtiment était visible à l'écran, et il écarquilla les yeux en lisant sans mal ce qui était inscrit sur la façade : Bureau des Enquêtes Criminelles de Yokohama.

Il passa en revue les autres écrans, et arriva à la conclusion que c'était exactement ce qu'il pensait : un poste de surveillance. Les différents écrans montraient des caméras de la ville, toutes choisies sans doute pour leur position avantageuse : il distinguait leur BEC, son immeuble, celui de Yosano, l'hôpital, entre autres. Il aperçut aussi la maison des Nakahara ― l'image était mal cadrée, sans doute parce que la caméra était mal installée, mais il reconnaissait les lieux.

« Qu'est-ce que ça signifie... »

Il murmura, cherchant à additionner deux et deux. Était-ce ici que Dostoevsky surveillait tout le monde ? Était-ce de là qu'il leur avait envoyé les messages ? Natsume avait émis l'hypothèse initiale qu'il se plaçait en hauteur, mais cela semblait le détromper. A moins que la planque de Dostoevsky ne soit réellement surélevée, et que cet endroit ne lui serve que de base pour surveiller les inspecteurs.

Il resta quelques secondes immobiles devant ces écrans, avant de poser une main sur les câbles pour les débrancher un à un. S'il les abîmait assez, il pourrait handicaper Dostoevsky... Mais alors qu'il s'apprêtait à écraser de tout son poids un des câbles qui partait de l'ordinateur le plus proche de lui, il entendit le clic caractéristique d'un cran de sécurité que l'on enlève.

Il se tourna d'un geste vif, et se trouva alors nez à nez avec le canon d'une arme. Comme surgi de derrière la roche, un homme lui faisait face, un homme aux orbes violets presque surnaturels et aux cheveux foncés qui tombaient négligemment sur ses épaules.

« Je crois que c'est la première fois qu'on se rencontre vraiment. » Sa voix mielleuse était reconnaissable entre mille, et Dazai grimaça alors que l'homme tapotait la détente de son doigt, avant de souffler l'évidence face à lui.

« Fyodor Dostoevsky. »

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