15-Il me faut un antidote de l'esprit

"Aurore?" je parviens à articuler à nouveau.

"Presque."

Presque. C'est presque clair, c'est presque normal, presque Aurore, mais ça ne l'est pas, et je ne peux pas m'empêcher de me le rappeler.

"Alex? Où est-il? Alex?"

"Étienne, on t'a jeté dans quelque chose de beaucoup plus dangereux que toi. Évidemment, tu commence à apprécier Aurore, mais je t'en prie, ne lui fais pas confiance. Jamais."

A la manière d'Aurore, elle ne me répond pas. Mais elle connait mon prénom, même si je crois qu'elle ne me connait pas. Car je sais qu'à première vue, on penserait qu'il ne faut pas faire confiance à la petite fille de neige, moi aussi je le croyais. Toutefois, je continue à espérer, peut-être poussé par la fascination que j'ai pour elle, qu'il y a une part de vérité dans Aurore. Contrairement à l'inconnue. Je tente de la retrouver dans l'orage de mes souvenirs, mais je n'arrive qu'aux réminiscences d'Aurore et moi en route pour l'hôpital. Parce que je sais que j'ai déjà entendu sa voix. Et pas que dans la gorge d'Aurore. A moins que...

Non. Ce n'est pas possible.
Peu à peu, une question, une pensée empoisonnée germe dans mon esprit, au fur et à mesure que mes souvenirs me reviennent.
Je prends une bouffée d'air, m'adosse contre la paroi de la cabine téléphonique, et place ma main sur la poignée, au cas où la réponse soit celle que je redoute tant.

"Ce n'était pas Aurore dans la voiture?", je demande avec appréhension.

Un silence, fatidique, pesant.

"Non, ça ne l'était pas."

Mes yeux, mes pensées dansent furieusement, mais je ne peux voir que ses yeux, et son sourire, ses petites dents, ses petites joues, son grand esprit.

"Ce n'est pas possible, par pitié, dites-moi que ce n'est pas possible."

Mais pour seule réponse, le son de la fin de l'appel retentit dans mes oreilles. Retentit si fort que je le bruit d'une main sur la vitre en face de moi ne m'atteint pas.

Je refuse de la regarder, mes jambes ont déjà lâché, et je tombe sur le sol froid de la cabine. Tant pis si c'est la police. J'espère que c'est eux.
Je me sentirai plus libre en prison que dans les chaînes qu'Aurore est en train de construire dans mon esprit.

Une porte s'ouvre. Ma porte, celle de la cabine téléphonique. Un bras saisit une nuque endolorie, sûrement la mienne, et je sens des lèvres qui se posent sur mon visage.
Pas celles d'un enfant, non, celles dont j'ai besoin. J'ouvre les yeux, et me perd dans le bleu méditerranéen devant moi. Le bleu d'Alex. Il me regarde, attendant que je dise quelque chose. Son front est plissé, ses sourcils froncés, et je ne sais pas comment ni pourquoi il est là. Pendant un instant, j'oublie que j'étais un psychologue, mais aussi que j'étais en cavale. Pendant un moment je ne suis rien.

Je ne lui dis pas je t'aime, ni merci, ni pardon. Je lui dis la seule pensée qui me parasite l'esprit, que mêmes ses lèvres ne peuvent pas chasser. Il me faudrait un antidote de l'esprit, mais je n'en n'ai pas, propriétaire uniquement de la morsure d'un serpent venimeux, même si je ne sais pas qui l'a causée. Et même s'il ne le connait pas, j'ai besoin de le dire.

"Je crois qu'Aurore a essayé de me tuer."

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Voilà! J'espère que ce chapitre vous a plu. J'ai des informations pour vous, lecteur, dans le prochain chapitre.

Zoubis,
Et n'oubliez pas,
Nous ne sommes qu'un mélange d'atomes
:)

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