C24 - Attentat (3/3)
Le contact avait été coupé brusquement. Par un brouilleur. L'ennemi arrivait ! Un faible bruit de la porte le confirma quand elle coulissa. Kris ravala une exclamation. Avait-il cru que les meurtriers forceraient l'entrée ? Certainement. Il réalisait un point crucial : quelqu'un avait accès au cœur du système de la sécurité et aidait, de gré ou de force, les Néofeles.
Oui, nous avons beaucoup à t'expliquer.
Elle tendit l'oreille dans l'espoir de distinguer les mouvements des Astrydiens. Hélas, aucun son ne lui parvenait. Comment les repérer afin d'avertir ses amis ? Chercher les pensées lui était impossible en raison du brouilleur.
Sauf qu'ils ne bloquent pas tous pouvoirs psychiques !
Comme le monitoring, employé pour gérer l'énergie d'une personne. Elle enleva son diadème et le cacha dans la poche de sa tunique : le halo vert de la perle risquait de la trahir au moment de l'activation du kiriah.
La seconde suivante, elle projetait son esprit dans la salle. Le flux des clones se dessina sous la forme d'une onde dorée qui parcourait les silhouettes. Aussi vivante que leurs propriétaires. Elle pressa trois fois le bras de Kris, le nombre d'Astrydiens. Il effleura le dos de sa main en retour. Il avait compris.
Flore fouilla le salon. En vain. Sur les cinq assassins, il en manquait deux.
Par Kilyan, où sont-ils ?
Elle y réfléchirait plus tard. Les Astrydiens se dirigeaient vers la chambre de Kris... et eux. Une boule naquit dans sa gorge. À chaque mètre qu'effectuaient les meurtriers, son rythme cardiaque s'accélérait. La scène semblait ralentir. Un pas, un bond dans sa poitrine ; un nouveau pas, un nouveau bond.
S'ils nous découvrent, nous sommes perdus !
Comment sortir de ce traquenard ? La solution tomba d'un coup : des rayons magenta illuminèrent la pièce. Tirés par le pistolet laser de Brian. Ils désintégrèrent deux des clones. Son ami et le troisième assassin bondirent chacun derrière un sofa, avant d'échanger un feu nourri à l'aveugle. Heureusement, Kris et elle se trouvaient à bonne distance de la scène.
Les assauts de l'Astrydien cessèrent aussi vite qu'ils avaient démarré. Des secondes s'écoulèrent dans le silence, pendant lequel il se déplaça en direction de l'entrée. Sans une once d'hésitation.
Le criminel connaît autant les lieux que lui, il va le prendre à revers !
À cet instant, deux flux d'énergie supplémentaires apparurent dans le champ de son pouvoir. Les derniers clones. En provenance de la chambre. La situation du Brian se corsait. Il était piégé entre les meurtriers et les tirs redoublaient.
Je dois l'aider !
Idée que partageait Kris, il avait agrippé une manche. Il lui intima de ne pas bouger dans un murmure et sortit. Un ordre à voix haute pour l'éclairage, puis il assena :
— Pourquoi êtes-vous dans mes appartements ?
Sacré effet de surprise ! Les assassins réagirent avec trois secondes de retard. Trois petites secondes décisives. Brian exécuta le plus proche de lui d'un geste précis ; Kris, celui près de la porte d'entrée.
L'ultime clone réussit à se jeter derrière le canapé et les deux frères avancèrent dans le but de le prendre en tenaille. Flore retint son souffle, l'ennemi lui présentait son dos. Une occasion en or de le capturer. Vivant.
Surtout ne pas le tuer !
Une évidence de leur implication pour protéger Dalghar et libérer Aurora.
Elle activa sa perle, une boule d'énergie assommerait l'Astrydien. Hélas, le temps lui manqua. Le criminel avait retourné son pistolet contre sa tempe. Il s'élimina.
— NON !
Elle s'effondra à genoux là où se tenait le clone l'instant précédent. Ses mains s'emparèrent de la poussière, reste du corps. Dans un geste désespéré de le retenir. Un geste inutile. Son rêve coulait entre ses doigts raides.
Son cœur se désintégrait comme si le rayon mortel l'avait touchée.
Alors, elle serra les poings. Quand le sang perça sous ses ongles, elle accueillit la douleur volontiers. Elle se balança d'avant en arrière, le visage baigné de larmes.
— Nous... avons... échoué. Je... n'ai... pas... de... preuve.
Brian tenta de la réconforter dans ses bras. Flore le rejeta et bondit sur ses pieds. Elle ne voulait pas de son soutien ! Elle voulait que Dalghar intervienne pour chasser l'envahisseur de sa planète !
— Ne désespère pas, lui murmura Kris, peiné. Nous trouverons un moyen de sauver Aurora.
— Serais-tu enfin prêt à violer les lois d'Aequalis ?
Les épaules du roi se crispèrent. Elle avait conscience de la virulence de ses mots, pourtant elle ne parvenait pas à contenir sa souffrance. Celle-ci la submergeait, l'étouffait. Plutôt que d'accabler plus ses amis, elle se téléporta dans sa chambre.
Brian se releva, une boule de tristesse dans le ventre. Non d'avoir été repoussé, compréhensible dans l'état de choc de Flore, mais par son cri de désespoir. Un terrible appel au secours qu'elle conservait au fond d'elle depuis tant d'années !
Il passa une main dans ses cheveux en bataille avant de questionner Kris avec calme. Du moins en apparence. Le tumulte s'agitait dans son esprit. Il désirait effacer les tourments dans les yeux de son ange bleu qui s'était enfui afin de panser ses blessures en solitaire.
— Quand te décideras-tu à agir pour elle ?
— Crois-tu que je n'y pense pas ? se défendit son aîné. Que je ne regrette pas d'avoir quitté Aurora sans intervenir, comme tu me le demandais dans les coursives du vaisseau ?
— Dans ce cas, allons-y !
— Impossible avant mon couronnement, et Flore a raison. Il nous faut obtenir une preuve de l'implication des Astrydiens dans le meurtre de nos parents.
— Comment sais-tu qui ils...
— Parce que leurs clones se désintègrent à leur décès, le coupa Kris. Ils sont les seuls parmi les peuples répertoriés, un fait remarquable et remarqué.
Brian réprima une grimace de dépit, lui ne l'avait appris que grâce à l'interrogatoire du prisonnier par Flore. Son frère connaissait trop bien Aequalis... et les dangers à l'extérieur.
— Tu es donc au courant du but de Xénon avec Aurora. Tu... tu ne le lui as jamais dit. Elle était choquée quand je lui ai rapporté les rumeurs au sujet des Astrydiens. Leur extinction, leur volonté de descendance.
— En effet, je désirais la préserver de cette souffrance, et je préfère annoncer des informations avérées.
— Chez des guerriers, avouer un point faible ne se fait pas !
— Ils ont choisi la voie de la violence au lieu d'appeler au secours Aequalis.
Le commentaire de son aîné le rendit mutique : il n'avait pas imaginé une telle approche. Pourtant, Kris parlait avec sagesse. Les Astrydiens auraient pu se mélanger avec des peuples d'Aequalis de façon pacifique afin de résoudre leur problème. L'interdiction à la Confédération de coopérer avec les planètes extérieures, même en cas de détresse, n'aidait pas non plus. L'exemple d'Aurora le démontrait.
Quel gâchis !
Comme s'il avait suivi le cours de ses pensées, Kris enchaîna en écho :
— Nous devons vivre avec la situation actuelle, que l'on soit d'accord ou non. Ainsi qu'avec les lois. En attendant de parvenir à obtenir une preuve suffisante, protège-toi. Je ne voudrais pas te récupérer en mille morceaux.
— Pardon ? De quoi parles-tu ?
— Tu ne m'as jamais trompé. Toutes tes aventures avec les femmes ne sont qu'une façade. Avec Flore, tu as trouvé ton âme sœur.
Un silence s'établit. Brian se passa à nouveau les doigts dans ses cheveux, puis grommela :
— Je ne te remercie pas de m'obliger à l'affronter.
— En revanche, elle refusera quiconque tant qu'Aurora ne sera pas libérée.
Il acquiesça à la mise en garde de Kris. Maintenant qu'il partageait le poids de ce secret, il n'éprouvait plus d'hésitation à se confier.
— Nos parents pensaient la même chose.
— Ils te l'ont déjà dit ? s'étonna son aîné.
Ceux-ci demeuraient toujours à l'écart de leurs histoires de cœur, de quoi provoquer les yeux ronds de son frère. Si rare chez lui. Expression comique, accentuée par la chevelure blonde ébouriffée, la robe de chambre et le pistolet laser en main. Dans d'autres circonstances, Brian l'aurait taquiné.
— J'avais prévu de tout t'expliquer demain, pardon ce matin, indiqua-t-il plutôt. Il faut arrêter le chef des Néofeles avant qu'il n'apprenne l'échec de ses meurtriers. Chaque minute compte. Attends-toi à une surprise, installe-toi !
Kris s'assit dans un des sofas, le dos droit, le front plissé. Il avait retrouvé sa dignité. Brian l'imita et se lança dans un récit dépouillé, suffisant pour appréhender les tenants et les aboutissants.
Le jour qui se lèverait bientôt s'annonçait long.
Très long.
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