C17 - La mer d'Edena (1/4)

Une avalanche électrique se rua dans son corps, la dévastant de la tête aux pieds. La puissance de l'onde contracta son cœur éteint, et une souffrance brutale la transperça.

Qui cessa aussi vite qu'elle était venue.

Des tiraillements demeurèrent l'unique témoin de ce choc fugace, l'organe de la vie battait à nouveau dans sa cage.

Et la nuit revint sur son esprit.

Quand Flore rouvrit les yeux, elle soupira d'aise. Le voyage dans le monde des Morts était terminé. Sans dommages. Du moins, le croyait-elle avant de se figer.

Un paysage inconnu avait remplacé la salle médicale de l'université des pouvoirs psychiques. Le son des herbes hautes jaunies qui crissaient au moindre mouvement écorcha ses oreilles, l'air sec chauffé par le soleil lui brûla la gorge et le nez. Un frisson la parcourut face aux rares arbres tordus au feuillage gris aplati. Sous l'effet d'une étrange brume, ils ressemblaient à des fantômes tentant de s'échapper de leur prison en terre.

Flore essuya la sueur de son front avec une grimace. Où se trouvait-elle ? Aucun être vivant ni habitation à l'horizon. Elle n'avait jamais visité un tel endroit. Le seul objet connu restait son lit et, instinctivement, elle voulut s'y raccrocher. Un besoin de se conforter de la réalité du moment, des lieux. Un besoin de se rassurer.

Sa main ne rencontra que le vide. Son dernier repère familier s'était volatilisé.

Le silence la frappa. Lourd, terrible, effrayant. Celui annonciateur d'une catastrophe. Laquelle ? Son pouls s'accéléra et son regard mû par un instinct de survie partit à la recherche d'un abri. Il accrocha les silhouettes fantomatiques en bois. Seraient-ils suffisants ?

Je n'ai pas d'autre choix.

Alors qu'elle se dirigeait vers eux, un rugissement s'éleva derrière elle. Puissant, écrasant. Flore se retourna, choquée... et les battements de son cœur explosèrent.

Une pantigra la menaçait !

Elle activa sa perle pour se téléporter. En vain. Des sueurs froides glissèrent sur son échine, ses jambes flageolèrent et un blanc visqueux envahit son cerveau.

Que faire ? parvint-elle enfin à se demander après des secondes interminables de paralysie.

Des lettres de feu s'imprimèrent aussitôt dans sa tête : courir ! Ce mot déclencha une réaction en chaîne. Une énergie se rassembla dans ses muscles, et l'adrénaline coula à flots. Elle s'élança à l'opposé des sons émis par le félin, que cette nature singulière amplifiait à ses oreilles.

Tout son être se focalisait sur sa fuite. Même si elle tombait. Le corps dominait l'esprit dans cette tentative désespérée de sauver sa vie. Il lui donnait les ordres primaires.

Se relever, repartir, courir encore plus vite.

Encore plus loin.

Mais le prédateur se rapprochait. Inexorablement. Chaque pas, chaque seconde, au point de s'imaginer le souffle fétide dans son cou. Elle refusa de s'avouer vaincue. Persista en direction de son abri.

Jusqu'au moment ou une ombre la survola et atterrit face à elle.

Flore s'arrêta net. Elle ignora sa respiration saccadée, la sueur qui dégoulinait, et son cœur malmené. Seul comptait le félin aux babines retroussées. La pantigra avait disparu au profit d'un animal inconnu ! Plus trapu, des rayures verticales noires brillaient sur le pelage roux et ses longues canines du haut dépassaient de la gueule.

Prêtes à la crocheter, à la dévorer.

Pourtant, au lieu de se jeter sur elle, le fauve se métamorphosa en un homme, ou une femme, dissimulé par une cape sombre. Ornée, au niveau du torse, de la tête rugissante du félin elle-même surmontée d'une couronne.

La peau claire du visage sous la capuche l'étonna. Un Dalgharien ? La question resterait en suspens. L'inconnu déployait une électase, à la flamme rouge de la mort activée, tandis que sa bouche se tordait. Flore ne se laissa pas impressionner par ses ricanements. Ses réflexes de combattante imlaya ressurgirent. Elle adopta une position de défense, malgré la peur au fond de son ventre.

Tu ne me tueras pas aussi facilement !

L'ennemi demeura ainsi à l'observer telle une proie. Qu'attendait-il pour l'attaquer ? Comme s'il l'avait entendue, il éclata d'un rire de vainqueur qui la fit grincer des dents, puis tendit sa main libre.

Un corps inanimé apparut, lévitant à l'horizontale juste au-dessus du sol : celui d'un jeune homme dans une tenue d'apparat. La ceinture bleue était brodée d'une comète dorée. Les armoiries de Dalghar ! Son sang se frigorifia dans ses veines quand elle scruta le visage. Entouré de cheveux blonds disciplinés, à l'instar de ceux de...

Kris !

L'inconnu effectua un geste vers le haut et le roi s'éleva dans les airs sur un mètre avant de s'immobiliser. Après un ultime rire, l'ennemi déclara d'une voix sarcastique :

— J'éliminerai toute personne qui se dressera sur le chemin de la gloire.

À deux mains, il souleva l'électase enflammée à la verticale. Lorsqu'il l'enfonça dans le cœur de Kris, un hurlement frappa les tympans de Flore :

— Non !

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