C12 - Révélations (3/4)
Si la situation avait été différente, il aurait ri à cette remarque, tant il connaissait les frasques de l'adolescente. Il se contenta de hocher la tête et quitta le cabanon, après un dernier salut à Yoron. Celui-ci patienterait quelques minutes avant de sortir à son tour.
Sojeyn retrouva Kishor. Ils se changèrent, récupérèrent leurs épées, puis laissèrent les vêtements aux côtés de leurs victimes, encore évanouies. Le couple ne se plaindrait pas. Auprès de qui, sinon ?
Une fois la route principale atteinte, ils se pressèrent de rejoindre le point de ralliement. Le groupe d'Akeno devait être revenu. Toutefois, ce fut des voix d'hommes inconnues et le bruit métallique de lames que Sojeyn entendit en premier. On se battait ! Il se rua avec Kishor, le cœur battant. La scène à son arrivée le figea : ses amis contraient l'attaque de neuf Astrydiens.
Une patrouille !
Le chef, probablement, l'aperçut et fit cesser le combat. Alors que ses guerriers bloquaient les Imlayas avec leurs armes, il pointa son bras gauche dans sa direction. Des lumières s'affichaient sur un large bracelet. Les paupières de l'homme clignèrent. Il annonça :
— Si aucun de ces Auroréens dans cette carrière n'est recensé, ce n'est pas le cas de toi... Sojeyn, l'héritier sans trône !
Comment m'ont-ils identifié ?
Une sueur froide coula le long de son dos. La prudence de Yoron n'était pas exagérée ni ses propos sur la technologie ennemie.
Devant son air ébahi, les Astrydiens ricanèrent, comme s'ils partageaient la meilleure plaisanterie du mois. Leur chef reprit la parole :
— Le recensement nous permet de contrôler votre peuple. Ceux qui refusent de s'y soumettre sont exécutés sur le champ et vos épées ridicules ne vous sauveront pas.
Il indiqua d'un geste les résistants.
— Paralysez le prince déchu et tuez les autres, ils sont devenus inutiles. Cette capture enchantera Xénon !
Les gardes ne se firent pas prier. Dès qu'ils tournèrent le manche de leur électase, une flamme rouge entoura la lame, sauf chez deux parmi eux, dont l'arme s'illumina en jaune. Avec l'assurance du vainqueur, ils lancèrent l'attaque.
Brutale, rapide, puissante.
Akeno s'intercala entre les agresseurs et Merioni, moins bon combattant. Il transperça le torse de l'un après quatre mouvements précis, puis recula lorsque le corps se désintégra. Seule une poussière flottait à sa place ! Si Sojeyn écarquilla les yeux, l'étrange phénomène ne perturba pas le maître d'armes. Il se concentrait déjà sur l'ennemi suivant.
Ses propres adversaires captèrent son attention. Ils le menaçaient sans chercher à l'attraper. La présence de Kishor en défense ne justifiait pas cette attitude. Ils voulaient qu'il ait le temps de voir ses compagnons exécutés.
Pour mieux rompre ma résistance psychologique ! Il en faudra plus.
Dans cette situation d'attente, il ne pouvait qu'observer. Les Astrydiens ciblèrent soudain Linlin. Une grave erreur de jugement sur les femmes. Le Tourbillon ne le détrompa pas : sa colère transparaissait dans les coups assenés. Akeno et Yeldo, qui s'étaient débarrassés de leurs attaquants, prirent ceux de leur amie en tenaille. Elle les élimina tout aussi vite que le maître d'armes. Le rapport de force se renversait ! Kishor et lui-même fondirent sur leurs assaillants. Ils « s'évaporèrent » tous.
Excepté un : le chef.
L'homme était assis au sol, le dos à un tronc, les habits ensanglantés à plusieurs endroits. Les traits du visage blême reflétaient sa souffrance et sa poitrine lui arrachait un râle à chaque respiration. Sojeyn lui lança la question que tous se posaient :
— Pourquoi vos gardes se sont-ils désintégrés et pas vous ?
Malgré la douleur, le prisonnier lui jeta d'un air sarcastique :
— À vous... de le découvrir ! Je ne trahirai... pas Xénon.
Il mourait d'envie de poursuivre l'interrogatoire, mais il s'en abstint. Continuer ici les mettrait en danger. Il s'écarta avec Kishor, Merioni et Akeno.
— Si nous le laissons derrière nous, il dévoilera l'existence de la résistance. Emmenons-le dans les environs du village et questionnons-le. Je le soignerai, ainsi que Yeldo, lorsque nous serons hors de l'influence des brouilleurs. En revanche, il doit changer de vêtements et passer pour un des nôtres sur les routes.
— Avec une cape pour le dissimuler, renchérit Akeno. Assommé, il ressemblera aux blessés ou malades qui transitent par ce trajet.
— Yoron m'a expliqué qu'ils utilisaient des machines dans le but d'espionner. Je ne serais pas surpris s'ils avaient des moyens de communication. Peut-être avec son bracelet. Détruisons-le et enfouissons-le sous terre dans la forêt.
— Dès que mon pouvoir sur la végétation sera disponible, j'effacerai les traces de notre voyage, termina le maître kiriahni. Ils ne nous retrouveront pas.
Tous approuvèrent le plan. Avec Kishor et Merioni, Sojeyn habilla le prisonnier inanimé d'une des tenues d'Akeno, le plus grand du groupe, pendant que leurs amis confectionnaient un brancard de fortune. En quelques minutes, tout était réglé. Le maître d'armes ramassa ensuite la dizaine d'électases au sol.
— Elles sont plus faciles à transporter que nos épées et plus efficaces. En récupérer d'autres nous aiderait dans nos futures batailles. Je m'étonne de les voir sans ces fameux pistolets laser dont tu m'as parlé, Sojeyn.
— Moi aussi. Nous en volerons !
Dans une grotte proche du village, il accueillit Ixli et Lorina. Ses amis surveillaient le prisonnier. Les soins l'avaient remis d'aplomb, ses blessures atténuées. Seuls les liens et le bandeau sur ses yeux trahissaient son état.
Elle sera moins gênée pour forcer le captif.
Employer un pouvoir interdit avait été difficile à faire accepter à sa tante. Fin de non-recevoir en accord avec les Principes ! Jusqu'à ce qu'il lui rappelle la réalité d'Aurora, la mort de ses parents et l'exil de Flore. Après deux jours à tergiverser, de discussion avec Merioni qui lui avait raconté dans le détail la situation des kiriahnis à l'uriah, Ixli avait cédé.
— Je m'en chargerai, parce qu'un tel acte engrange de la souffrance.
Il ne l'avait pas contredite, malgré son aveu : elle ne changerait plus d'avis. Maintenant, elle se tenait dans cette grotte, prête à effectuer la tâche demandée avec l'aide de Merioni. Le maître lui apporterait un maximum de puissance sans lui-même pâtir des conséquences. Ils s'installèrent côte à côte, face au prisonnier assis, et Ixli activa le kiriah de commandement. Quand sa perle vira au noir, Sojeyn entama l'interrogatoire :
— Expliquez-nous la différence entre vous et les gardes.
— Ce sont des clones, semblables à nous, que nous fabriquons. Leur signe distinctif est le disque doré sur leur front. Ils représentent les trois quarts de notre population et se désintègrent à leur mort ou en cas de graves blessures.
Des machines ? Nous sommes dominés par des machines !
Il avait tant du mal à y croire. Comment des machines pouvaient-elles les vaincre ? Or, le captif ne mentait pas. Il se souvenait très bien d'avoir vu ce fameux disque doré lorsque les gardes s'étaient transformés de Clorinien en Astrydien dans la salle de réception du palais. Ce rappel de la prise de pouvoir, qui avait fait basculer Aurora dans les ténèbres et causer sa destruction psychologique, remua le couteau dans ses chairs toujours à vif. Les dents crispées, il s'obligea à s'en arracher, à revenir dans la grotte.
Autour de lui, ses amis écarquillaient les yeux, ne proféraient aucun son. L'homme poursuivit les explications, comme s'il avait ressenti leur choc, alors que le contrôle de sa tante ne le lui permettait pas.
— Ils sont autonomes, doués d'intelligence, tout aussi capables que les originels d'obtenir des postes à responsabilité. Il leur est interdit de nous donner des ordres. Ce ne sont pas de vulgaires appareils électriques.
— Pourquoi existent-ils ? Vous ne les avez pas créés pour rien.
La bouche serrée, le prisonnier tenta de se dégager de ses liens. Quand l'éclat de la perle d'Ixli s'intensifia, il redevint docile et un malaise s'afficha sur le visage des résistants. Ils réalisaient le danger de ce pouvoir, l'importance des Principes.
Mais aujourd'hui, notre survie compte plus !
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