Chapitre 5

Coucou, j'espère que vous allez bien et que vous profitez de la fin des vacances..!

Merci pour vos votes, voilà la suite sans attendre, bonne lecture! :)


- C'est un mortel, il va mettre plus de temps à guérir. Surtout que je ne peux pas lui donner d'ambroisie, il en mourrait.

- Je sais, Marco, fais de ton mieux.

Des pas qui s'éloignent. Un soupir. Un linge humide posé sur son front.

- Elle a l'air de tenir à toi la préteur, mon gars. T'as pas intérêt à me claquer entre les doigts.

***

- Je pense qu'il va s'en tirer, mais c'était tout juste. Quand même, je me demande bien ce qui lui est arrivé ...?

Le sous-entendu n'obtint aucune réponse. Encore un soupir.

- Très bien, il sera sur pieds dans quelques jours encore.

- Ça fait plus d'une semaine qu'il est là. Qu'est-ce que t'entends par « quelques jours » ?

- Quatre ou cinq, évalua la voix du garçon.

Silence.

- Ça va, ça va, me regarde pas comme ça, râla-t-il. Je peux réduire à trois ou quatre jours en me forçant un peu.

- Tu vois quand tu veux, Marco !

Les pas s'éloignèrent une nouvelle fois. Troisième soupir.

- Je me demande lequel est le plus en danger entre toi et moi, mon gars.

***

Zach remua les orteils. Puis les doigts. Il avait mal, il était courbaturé, il avait l'impression d'avoir avalé du feu et ensuite de l'avoir recraché tellement il avait la gorge irritée. Ses paupières étaient lourdes comme du plomb.

Il distingua des martèlements de bottes contre un sol en bois.

Une personne à ses côtés se précipita à son chevet et plaqua un linge mouillé sur ses joues.

- Je travaille, je travaille, il va de mieux en mieux ! Ah ! C'est toi Bobby !

La dernière phrase avait été dite dans un ton soulagé. Le linge fut écarté de son front.

Ledit Bobby rit.

- Tu as cru que c'était Reyna ?

- Tu ne comprends pas, grogna Marco. Si elle me trouve en train de ne rien faire, je me fais écorcher vif ! Mais là franchement, ça dépend que de ce gars pour se réveiller ! Je ne peux plus rien faire maintenant.

Zach tenta de se manifester, d'avertir qu'il les entendait. Mais il retomba dans l'inconscience.

***

Zach eut de la peine à ouvrir les yeux. Pour une fois, le silence régnait autour de lui. Il examina la pièce dans laquelle il se trouvait. Il semblait être dans une infirmerie. Le sol était en bois et des colonnes romaines tenaient le toit construit dans la même matière. Seuls les murs étaient différents. Il n'y en avait tout simplement pas. Quatre piliers se dressaient dans les coins, et des grandes toiles de tentes faisaient offices de murs. Étrangement, le tissu était aussi coupe-vent qu'un bon mur en béton mais la lumière parvenait à éclairer les lieux de manière agréable.

En face du lit de Zach, se tenaient un bureau rempli de paperasse. Juste derrière, il y avait une armoire dont Zach pensa qu'elle contenait des médicaments. Il n'avait jamais vu une telle infirmerie et n'avait aucune idée d'où il pouvait se trouver.

Des vêtements avaient été déposés au bord du lit. Le T-shirt pourpre au sigle doré SPQR et le jean noir n'étaient sûrement pas les siens (qui se trouvaient il ne savait où).

Ensuite, il s'examina. Il avait des bleus qui avaient commencés à virer au vert-jaune. Cela ne l'étonna pas, dans ses fréquents réveils, il avait entendu dire qu'il était arrivé ici depuis presque deux semaines.

En remuant les épaules il se rendit compte que tout son dos l'irritait. Ses mains étaient écorchées dû à la poutre dans l'usine. Il avait un bandage sur le bras droit là où Johanna l'empousa l'avait griffé, ainsi qu'à son mollet.

- Ça alors ! Tu es réveillé !

Zach sursauta. Un garçon blond bouclé s'approchait, l'air ébahi.

- Je croyais que ce jour n'allait jamais arriver ! Attends un peu que Reyna l'apprenne !

- Où ... où est-ce que je suis ? croassa Zach.

Le garçon attrapa un tabouret et s'assit.

- Tu es au Camp Jupiter, en sécurité. Je peux te dire que t'as eu du bol, quand t'es arrivé j'ai cru qu'un taureau d'airain t'avais soufflé dans le dos avant de te marcher dessus !

Zach n'avait aucune idée de ce qu'était le Camp Jupiter, ni un taureau d'airain. Il renvoya un regard vide au garçon.

- Tout ton dos était brûlé et tu as reçu des éclats de l'explosion aussi. Ton mollet a eu une vilaine entaille assez profonde et j'ai dû veiller à ce qu'elle ne s'infecte pas. Ton bras n'était pas joli à voir aussi. Il aurait fallu que tu bandes ta blessures bien avant ton arrivée, le sang s'était coagulé et de la poussière s'était incrustée. C'était pas du gâteau, je te le dis ! Tes vêtements sont partis à la poubelle, on t'en a donné d'autres. Au fait, moi c'est Marco, je suis un fils d'Apollon.

Et il lui sourit. Zach le fixa, cligna de l'œil. Il n'avait rien compris, à part qu'il s'était tiré de justesse de l'explosion du feu grec. Il fixa à nouveau Marco et demanda :

- Où est Reyna ?

Marco s'indigna :

- Quoi ? Pas de merci ? Pas de « ah Marco tu es mon sauveur, je te serais éternellement reconnaissant de m'avoir sauvé la vie ! » ?

- Où est Reyna ? répéta Zach.

Marco leva les yeux au ciel en soupirant.

- Ça va, c'est bon ! Elle est à la Principia.

La Principia ? Zach secoua la tête. Mieux valait ne pas chercher à comprendre. Et où était sa mère ? Il avait besoin de savoir ce qu'il était advenu d'elle. Il rabattit ses couvertures et bascula ses jambes par dessus le lit.

- Woh, tu fais quoi au juste là ? l'arrêta Marco en appuyant sur ses épaules. Recouche toi, t'es pas encore totalement rétabli.

Zach soupira d'un air agacé et Marco se leva.

- Je reviens, je vais te chercher un verre d'eau.

Et il partit plus loin. Zach l'observa s'éloigner et dès qu'il fut assez loin, il s'extirpa du lit, enfila les vêtements offerts qui traînaient sur le bord du matelas et posa les pieds au sol.

Quand il se redressa, la tête lui tourna légèrement. Il attendit un moment avant de lacer des nouvelles chaussures (sa propre paire n'en étant plus une désormais) et de s'engager en dehors de l'infirmerie.

Une fois à l'extérieur, il entendit la voix de Marco :

- Oh non, c'est pas cool, mon gars ...

Il n'y prêta aucune attention. Il observait d'un air ébahi le décor qui s'ouvrait à lui. Il était au milieu d'une grande cour fermée par une enceinte en bois. Une porte immense lui permettait d'apercevoir un fleuve qui coulait tranquillement à l'extérieur.

Juste en face de Zach se trouvait une sorte de réfectoire militaire sur promontoire. En plus des bancs et des tables traditionnelles, étaient dispersés des genres de lits -des tricliniums- à velours pourpre.

À sa gauche, un grand bâtiment administratif écrasait les autres, qui étaient plus bas et comparables à des casernes. Le mot « Principia » était gravé en lettres romaines en haut et l'édifice comportait une multitude de colonnes en relief. Deux autres colonnes, cette fois-ci entières, encadraient un escalier de marbre qui menait à l'entrée.

Zach se concentra sur les personnes autour de lui. La plupart étaient des adolescents, certains habillés d'un T-shirt pourpre identique à celui que Reyna portait, d'autres carrément en armure, ou même encore, en toge romaine.

Deux jeunes filles passèrent à grands pas devant lui.

- Je lui avais dit à Cassie, de pas s'approcher des canons à eau, disait l'une exaspérée.

- Ils ne sont toujours pas réparés ? fit l'autre d'un ton étonné.

La première, aux cheveux châtains attachés en queue-de-cheval, secoua la tête. Soudain, ses yeux tombèrent sur Zach et elle eut un mouvement de surprise. Son amie se retourna et eut un glapissement.

- C'est lui ? chuchota-t-elle à son amie.

- Il parait, dit l'autre, il vaudrait mieux prévenir Reyna.

Et elles s'éloignèrent tout en jetant des coups d'œil furtifs dans leur dos, sous le regard interloqué de Zach. Il se rendit vite compte que la plupart des jeunes le dévisageaient étrangement. Certains le pointaient même du doigt. Aucun ne paraissait moqueur, mais cela n'empêcha pas Zach de se sentir mal à l'aise.

Un groupe voulut l'approcher, mais une voix les stoppa dans leur élan.

- Zach, espèce d'abruti !

Celui-ci se retourna. Reyna sortait de la Principia et arrivait à grands pas furieux. Elle était habillée comme une adolescente normale, excepté le fait qu'elle portait à ses hanches son épée en or.

Son expression était furibonde et ses yeux lançaient des éclairs. Le groupe s'éloigna précipitamment et Zach crut même entendre un « Bonne chance, vieux ».

Alors qu'elle se rapprochait, Zach commença :

- Reyna, je suis content que tu ...

Il fut coupé sans remords :

- Comment as-tu osé utiliser ce feu grec sans m'en parler ?

Zach ouvrit la bouche mais il ne put décrocher un mot car Reyna lui balança la gifle du siècle.

- Ouch ! compatit la masse d'adolescents qui tendait le cou pour voir ce qu'il se passait.

Zach resta ébahi quelques secondes. Sa joue le lançait affreusement, et encore, il sentait que Reyna s'était retenue.

- Tu aurais pu mourir ! reprit-elle en hurlant.

Il ne répondit rien, parce que oui, il aurait très bien pu être pulvérisé par le feu grec. Même lui ne savait trop comment il avait réussi à s'en sortir sans être totalement brûlé ou complètement aplati contre le macadam de l'usine.

- Tu ne peux pas t'amuser à jouer au héros comme ça ! Comment a réagi ta mère à ton avis ? La Brume ne peut pas lui cacher un garçon en flammes projeté par la fenêtre.

Zach se figea. Sa mère. Comment allait-elle ? Le savait-elle en vie ? Où était-elle ?

Reyna dû percevoir son désarroi car son visage s'adoucit tout en prenant une teinte de culpabilité :

- On lui a dit qu'on s'occuperait de toi.

Zach hocha la tête, silencieux et se frottant la joue.

- Désolée pour la gifle, mais tu l'avais méritée.

En vérité, elle n'avait pas forcément l'air désolée selon Zach, mais il laissa couler avec amusement.

- Qu'est-ce qu'il s'est passé, après que je sois tombé ? demanda-t-il.

Reyna enfonça les mains dans ses poches et lui indiqua le portail de la tête.

- Viens, il faut qu'on parle de toute façon.

Ils sortirent de la cour sous les regards curieux des autres adolescents. Ils contournèrent ensuite l'enceinte en marchant dans l'herbe fraîche avant de rejoindre une route pavée. Une borne en pierre plantée dans le sol indiquait « Via Principalis, Nouvelle Rome : 1 kilomètre »

- Où sommes-nous, d'ailleurs ? s'enquit Zach en tournant sur lui-même.

- Au camp Jupiter.

- C'est ce que m'a dit Marco l'infirmier. Mais c'est quoi au juste ?

Reyna ne dit rien pendant un moment.

- C'est un camp pour les jeunes comme nous, finit-elle par dire d'un ton hésitant.

Les jeunes comme nous. Il se rappela des paroles des monstres à propos de Reyna, fille de Bellone.

- Tu veux dire ... pour les enfants de dieux ?

Reyna acquiesça tout en lui jetant un coup d'œil.

- On nous appelle des demi-dieux. Tous ceux que tu viens de voir en sont. Ce camp est un lieu sûr pour nous, où les monstres ne peuvent nous atteindre.

Il avait déjà compris que les dieux de l'Antiquité s'avéraient être réels mais jamais il n'aurait imaginé une telle étendue de ce nouveau monde. Toutes ces personnes qu'il avait vues pouvaient voir à travers la Brume également. Lui qui pensait être seul ...

Mais il était différent. Il n'était pas demi-dieu, ses parents étaient bel et bien mortels. Il n'aimait pas penser comme cela, mais il était une sorte « d'anomalie » du système. Cela ne le dérangeait plus désormais. Il avait enfin trouvé une explication à sa particularité et surtout, des personnes avec qui la partager. Il n'était pas fou, et pouvait se considérer comme faisant partie de ce nouveau monde, juste par le fait de le connaître.

Ce fut à ce moment que Reyna le contredit, semblant encore une fois lire dans ses pensées :

- Tu sais ... quand je t'ai dit que tu n'étais pas comme nous ... j'avais tort.

Zach releva la tête, surpris. Reyna triturait sa bague, le regard au loin.

- Vaincre une empousa puis un eidolon et son armée de Telchines... Peu de demi-dieu l'auraient fait.

Zach entrevit une lueur de respect dans ses prunelles ombres.

- Tu as agi comme l'un d'entre nous, continua-t-elle, même si la dernière phase était un peu trop suicidaire à mon goût.

Elle lui demanda comment il s'était débarrassé de Johanna et Zach lui conta son combat en terminant par :

- Désolé pour ton poignard, je l'ai laissé là-bas.

Reyna fit un geste de la main.

- J'irai le chercher s'il le faut. Tu as bien agi en comprenant que la force ne te serait d'aucune aide.

Ils s'engouffrèrent entre deux enceintes de bâtiments.

- Je serais mort sans l'aide de l'aigle de Mme Bolston.

- Ce n'est pas exactement le sien, objecta Reyna. Il appartient au camp, et il sert de messager souvent. C'est par lui que j'obtenais la plupart des informations sur Alderman. Mary me les faisait passer grâce à son voisin qui travaillait avec lui ...

Elle lui coula un regard amusé et Zach ouvrit de grands yeux :

- Tu veux dire que j'étais votre informateur indirect sans le savoir ?

Reyna rit.

- Crois moi, je ne pensais pas que c'était toi ! Même en investiguant sur place je ne l'avais pas réalisé. Quant au fait qu'il t'ait sauvé la vie ... eh bien peut-être t'avait-il aidé avant, mais sans lui, tu aurais fini aplati au pied de l'usine.

- Le choc que j'ai ressenti, c'était lui ?

Reyna acquiesça.

- Justement c'est lui là-bas, au champ de Mars.

Zach tourna les yeux vers la direction qu'elle indiquait. C'était un simple et grand champ sans aucune culture. Cependant, au centre, de dressait un début de forteresse et des demi-dieux s'agitaient autour, semblant le construire. Dans les airs, planait l'aigle de Mme Bolston.

- Qu'est-ce que c'est le champ de Mars ? s'enquit Zach.

- C'est notre centre d'entraînement au combat.

Devant l'air ébahi de Zach elle eut un sourire ironique.

- Il faut bien qu'on soit capables de combattre les monstres. Comment crois-tu que j'ai tenu aussi longtemps à l'usine ?

Cela paraissait évident, mais il était difficile pour Zach d'imaginer des ados combattre avec de vraies armes dans le but de défendre leur vie. Cela semblait surnaturel, mais après tout, n'était-ce pas un monde surnaturel ?

- En parlant de ça, reprit Reyna devenant soudainement gênée, merci de m'avoir sauvée là-bas, face aux empousai. Elles m'auraient tuée si tu n'avais pas été là.

- Et elles m'auraient tué également ainsi que ma mère si tu n'étais pas venue. On est quitte.

Reyna sembla en quelque sorte soulagée. Elle n'avait pas l'air de supporter l'idée d'avoir une dette envers quelqu'un. Zach y reconnut un esprit indépendant et habitué à se débrouiller par lui-même. Il savait qu'elle respecterait toujours ses dettes, mais elle faisait en sorte de ne pas en avoir afin de ne devoir rien à personne.

L'aigle eut l'air de les remarquer car il leur adressa un cri aigu du style « il est vivant, le microbe ? ». Zach leva le bras pour saluer son double sauveur.

Puis les deux reprirent leur route tranquillement en direction de la Nouvelle Rome. Il demanda de quoi il était question par ce lieu.

- C'est la ville, répondit Reyna. Une ville spéciale demi-dieux et descendants de demi-dieux. Une ville qui ressemble à n'importe quelle autre, mais adaptée pour nous, et de style romain aussi. Tu verras bien en arrivant.

Zach hocha la tête et changea de sujet.

- Tu ne m'as pas dit ce qu'il s'était passé après être partie avec ma mère.

Reyna ralentit son allure et Zach se calqua à son rythme. Elle commença son récit, le regard lointain :

- J'ai fait aussi vite que j'ai pu. Guido s'est posé en dehors de l'enceinte de l'usine. J'ai eu du mal à me séparer de ta mère qui voulait savoir comment tu allais. L'aigle de Mme Bolston nous a rejoints avec Aurum et Argentum entre ses serres. Aurum était vraiment mal en point, mais il est réparé aujourd'hui. J'ai envoyé l'aigle à l'usine et quelques secondes plus tard, j'ai pu monter sur Guido pour te rejoindre. J'avais à peine décollé que je t'ai vu être éjecté par la fenêtre à cause du feu grec. C'est Mme Bolston qui te l'a donné ?

Zach hocha la tête et Reyna soupira.

- C'était dangereux de faire ça. Le feu grec est extrêmement sensible à tout contact, le donner à un mortel non habitué à ce type d'armes ...

Elle fit une grimace qui en dit long sur le fond de sa pensée, avant de reprendre :

- Enfin, quoiqu'il en soit, l'aigle était assez proche pour pouvoir te rattraper au vol et te ramener à terre sain et sauf. Après ça, j'ai hissé à nouveau ta mère et Aurum sur Guido tandis que l'aigle te prenait toi et Argentum.

- Et ma mère ? Elle est à l'appartement ? Comment va-t-elle ?

Reyna se crispa et baissa les yeux. Elle évita son regard et dit :

- Allons boire quelque chose, je t'expliquerai tout.

Trop absorbé dans sa conversation, Zach ne s'était pas rendu compte qu'ils étaient arrivés à la Nouvelle Rome.

L'ensemble de la ville était entourée d'un muret en pierre blanche qui arrivait à la taille de Zach. Sur la droite, il pouvait voir que le fleuve aperçu plus tôt se jetait dans un immense lac. De là où il était, il pouvait distinguer un gigantesque Colisée ainsi qu'une arène romaine.

À gauche et bien plus loin, avait été construit un aqueduc afin d'approvisionner la ville en eau. Ville qui s'étendait juste en dessous, au cœur des collines verdoyantes, des jardins chatoyants, peuplée de maisons accueillantes et tellement romaines : de marbre blanc avec de grandes ouvertures circulaires, ainsi que des toits de tommettes rouges.

- Normalement, les mortels ne sont pas autorisés à pénétrer dans la ville. Mais je pense que Terminus m'autorisera cette exception.

- Terminus ?

- Elle parle de moi, mortel !

Zach sursauta et chercha la provenance de la voix. Reyna pointa du menton une statue d'un buste d'homme en marbre. Celui-ci portait une barbe taillée au millimètre près et des cheveux bouclés qui lui tombaient presque dans le cou. De ce que Zach pouvait voir, il était drapé dans une toge romaine.

- Alors c'est lui ? reprit-il d'un air critique. La ville ne fait qu'en parler.

- De qui ? De moi ? s'étonna Zach.

Terminus leva les yeux au ciel. Enfin, Zach l'imagina le faire.

- Pas très futé, pour un mortel qui a battu une empousa et un eidolon.

- Peu importe, coupa Reyna. Serait-il possible de passer s'il vous plaît ?

- Tu connais le règlement, prêteur Reyna. Pas d'armes dans la ville ! Julia, où es-tu ?

Une gamine d'environ six ans surgit presque de nulle part avec un plateau d'argent dans les mains. Julia était coiffée de tresses blondes et arboraient des dents qui commençaient à pousser et qu'elle montrait à tout va en souriant. Elle était également vêtue d'une robe colorée à motifs géométriques.

Reyna se plia de bonne grâce à l'ordre (ça devait bien être le seul qu'elle recevait et non qu'elle donnait, songea Zach) et déposa son épée ainsi qu'un poignard en argent sur le plateau.

- Pas d'armes, le mortel ?

Zach secoua la tête.

- À la moindre incartade, prévint Terminus, je me ferais le plaisir de te donner moi-même un coup de pied en dehors de la Nouvelle Rome !

Julia imita le mouvement avec sa jambe, un grand sourire aux lèvres. Zach ouvrit la bouche pour lui dire qu'il n'avait pas de jambes, mais Reyna l'interrompit :

- Il a compris, merci Terminus. Viens Zach.

Zach la suivit et elle souffla, une fois éloignés :

- Il est assez susceptible sur ses membres du corps ... on y serait restés des heures si tu avais parlé.

Zach se douta qu'il n'était pas le premier à réaliser l'infirmité du dieu et à en lui faire la remarque.

- Et donc, pour ma mère ? demanda une nouvelle fois Zach.

Reyna secoua la tête.

- Pas ici.

Et c'était tout. Zach n'insista pas, mais l'inquiétude commençait à monter en lui et il se demanda s'il n'était pas arrivé quelque chose à sa mère.

- Nous parlerons dans le forum, c'est derrière ce bâtiment.

Reyna pointa un immense bâtiment de marbre et de colonnes, surmonté d'un dôme rouge.

- Qu'est-ce que c'est ?

- Le Sénat, répondit Reyna. C'est ici que nous nous réunissons les sénateurs et prêteurs lors de crises majeures.

Zach se rappela Terminus avoir appelé Reyna « préteur ».

- À quoi sert un préteur ?

- Nous sommes les leaders de la légion, les chefs de l'armée qui mènent les demi-dieux au combat et qui gèrent les affaires administratives du camp. Il ne peut y en avoir que deux à la fois.

Zach la regarda longuement. Reyna était prêteur. À quoi, seize ans ? Elle paraissait en avoir tellement plus. Tout dans son attitude, ses manières, son regard, indiquait une maturité qui ne concordait pas avec son âge.

Ils passèrent devant l'entrée du Sénat dont les portes en or s'ouvraient sur deux adultes âgés de la soixantaine, habillés en toge romaine. Ils discutaient avec un visage sérieux et pensif. Dès qu'ils virent Reyna, ils l'a saluèrent d'un mouvement de tête que la jeune fille rendit.

- Je croyais qu'il n'y avait que des adolescents ici ? dit Zach, surpris.

Reyna secoua la tête.

- Tu ne trouveras que des jeunes demi-dieux dans le camp Jupiter oui. Mais la Nouvelle Rome accueille bien plus de monde : des enfants voire descendants de demi-dieux, des demi-dieux adultes ou comme tu viens de le voir, bien plus âgés. La ville est ouverte à tous les enfants de dieux qui ont servis pendant dix ans la légion. Ils peuvent ensuite prendre leur retraite de soldat, étudier, fonder une famille ... C'est un lieu sûr pour nous, une sorte de havre de paix.

Zach surprit un air nostalgique apparaître sur le visage de son amie. Malgré l'attitude de leader qu'elle affichait tout le long de la journée, peut-être voulait-elle juste en finir avec sa vie faite de danger à combattre des monstres, et rejoindre ce refuge de demi-dieux, vivre enfin une vie d'adolescente. Avait-elle même seulement eu une enfance d'innocence sans avoir à s'inquiéter pour sa vie et celle de ses proches ?

- Combien de temps te reste-t-il dans la légion ?

- Cinq ans, répondit-elle. Je sais ce que tu dois penser mais c'est le contraire. J'aime être prêteur, j'aime la légion que je considère comme ma famille, c'est juste que ... ça doit être bien tout de même, là-bas. Je veux dire, j'y vais souvent, mais y vivre, être délaissée de toutes responsabilités, étudier comme tout le monde, laisser la place à d'autres demi-dieux de sauver le monde, se reposer enfin ... oui, ça doit vraiment être bien.

Zach ne dit rien. Il sentait que Reyna ne se confiait pas ainsi à n'importe qui. Aussi, il se contenta de l'écouter. Il avait bien deviné quels étaient ses tourments, mais ce n'était pas pour autant qu'il les comprenait. Enfin, bien sûr, il était tout à fait d'accord avec ce que disait Reyna, mais il ne pouvait pas dire qu'il avait eu une vie similaire à la sienne. Il avait une mère avec lui, Reyna n'avait jamais parlé de parents. Zach imaginait peu un dieu ou une déesse débarquer pour le spectacle scolaire de fin d'année de leur enfant. Et la jeune fille n'avait jamais parlé de père. Zach avait eu une enfance, avait été à l'école. Mais Reyna ? Zach en doutait.

Ils finirent de contourner le Sénat et débouchèrent sur une gigantesque place lumineuse, construite en marbre. Des plantes étaient disséminées un peu partout et une immense fontaine trônait au centre, des mini-cupidons de pierre crachant de l'eau. La fontaine avait été construite sur un niveau plus bas que le reste de la place. Des marches y menaient et six colonnes entouraient l'espace qui semblait surtout dédié à la prélasse, car des tricliniums bordeaux étaient disposés par groupes. Certaines plantes apportaient une touche d'ombre à l'ensemble ensoleillé. Tout autour de la place, avaient été construits des magasins, des cafés. Trois arcades s'ouvraient sur d'autres lieux. Des bornes indiquaient « Circus Maximus, 0,1 kilomètre », ou « Colisée, 0,3 kilomètre » et la dernière « Village, 0,05 kilomètre ». À travers celle-ci, Zach put voir de magnifiques maisons en marbre blanc et toits rouges, des colonnes encadrant l'entrée, voire même des portes dorées pour les maisons les plus grandes. Le sol y était dallé et l'environnement verdoyant. Deux petites filles passèrent en courant devant l'arcade, côté village tout en riant. S'il y avait un paradis pour demi-dieux sur Terre, songea Zach, c'était ici qu'il se trouvait.

Plusieurs personnes arpentaient la grande place, flânant, discutant, plaisantant. Certains saluaient Reyna sur le chemin tout en jetant un regard curieux sur Zach. D'autres mangeaient du raisin, affalés sur les tricliniums près de la fontaine. Zach aperçut quelques familles entières, des parents avec leur poussette, des couples main dans la main ...

Soudain, une foule de jeunes d'une vingtaine d'années sortit d'un bâtiment qui ressemblait à un temple. Les jeunes portaient un sac sur l'épaule et bavardaient gaiement en groupes.

- C'est l'université de la Nouvelle Rome, lui apprit Reyna. La majorité de ceux qui ont fini leur service au camp Jupiter y vont.

Zach n'eut même pas besoin de demander si elle comptait y aller. La façon dont elle fixait avec envie les autres lui indiquait la réponse. Elle finit par l'entraîner vers la terrasse d'un café.

Un des serveurs aux cheveux blond délavé la salua de la main et s'approcha.

- Salut, Reyna ! Ça faisait longtemps qu'on ne t'avait pas vue ! Ne me dis pas que tu as trouvé un meilleur café que nous ?

Il fit mine de porter la main à son cœur et Reyna secoua la tête, souriant.

- Ne t'en fais pas, ce n'était que temporaire. J'avais une mission et cet autre café était le parfait emplacement pour la mener à bien.

Zach sentit la déception l'envahir. Alors c'était ainsi que ça allait se passer ? Une fois qu'il sortirait du camp, tout se finirait ? Bien sûr, il n'espérait pas non plus obtenir un laissez-passer pour venir à la Nouvelle Rome quand il le voudrait, mais il avait espéré revoir Reyna, au moins dans le café. Était-elle en train de lui signifier que leurs deux mondes étaient trop différents pour être conciliés ? Que malgré l'aventure vécue ensemble, cela n'avait été qu'un bref moment dont il fallait se détacher ? Qu'il fallait passer à autre chose ?

- ... et voici Zach. Zach, je te présente Louis.

Zach cligna des yeux et se concentra sur la conversation. Il serra la main que le fameux Louis lui présentait.

- Alors c'est de toi dont tout le monde parle ? s'enquit Louis avec un sourire.

- Heu ... je crois, bredouilla Zach mal à l'aise.

Louis hocha la tête avec un regard impressionné.

- Vraiment pas mal pour un mortel.

Zach savait que personne ne voulait le faire sentir inférieur en l'appelant « mortel », mais il ne pouvait s'empêcher de se crisper un peu. Sûrement parce que cela accentuait le fossé entre leurs deux mondes.

- Sans lui, dit Reyna tout en le fixant, je serais morte et les dieux seuls savent ce que les monstres auraient pu faire ensuite.

Louis donna une bourrade à Zach.

- Profite, Reyna est plutôt avare de compliments, surtout envers ceux qu'elle vient de rencontrer !

Zach se sentit fier sur le moment. Reyna fusilla Louis du regard et celui-ci s'empressa de changer de sujet.

- Chocolat chaud pour la prêteur, tu veux quoi Zach ?

Zach commanda la même chose et Louis les laissa seuls. Reyna reprit un air grave et Zach se tendit. Il ne savait à quoi s'attendre par rapport à sa mère.

- Dans l'usine, débuta-t-elle, tu as vu comment ta mère avait été atteinte par son enlèvement...

Zach pinça les lèvres. Oui il s'en rappelait. Il ne l'avait jamais vue ainsi. Brisée, la voix tremblante, terrifiée et en même temps perdue.

- Il est arrivé la même chose au père d'une de mes amies, reprit-elle. Sa mère Aphrodite lui a donné une potion qui a effacé tous les souvenirs de ce qu'il a vécu.

Zach commençait à comprendre où tout cela menait. Reyna gardait les yeux baissés.

- J'ai ... demandé à la déesse de me donner une nouvelle potion. Pour ta mère.

Zach ne dit rien pendant un moment et Reyna releva précipitamment le regard.

- Je te jure que si je n'avais pas jugé cela essentiel, je ne l'aurais pas fait ! Je ne suis pas en bons termes avec Aphrodite, et je m'en veux déjà assez d'avoir effacé les souvenirs de ta mère sans ton accord ... Mais elle en avait besoin. Tu n'allais pas te réveiller avant longtemps et elle n'aurait pas pu tenir sans que des conséquences irréversibles n'interviennent.

Elle se tut et l'observa. Jamais Zach n'avait vu un tel regard apparaître sur son visage. Elle se sentait coupable même si elle pensait avoir fait ce qu'il fallait. Elle montrait toujours une détermination, une confiance à toute épreuve. Elle semblait tout le temps savoir ce qu'elle faisait. Mais elle devait également prendre des décisions en pesant le pour et le contre, au risque de blesser quelqu'un. C'était peut-être cela, être chef, être préteur.

- Je suis désolée, Zach, murmura-t-elle tout en faisant tourner sa bague autour du doigt. J'aurais préféré attendre ta décision plutôt que de la prendre à ta place ...

Impulsivement, Zach lui prit la main. Reyna sursauta et fixa leurs mains avec surprise. Étrangement, elle ne se dégagea pas, et Zach en fut soulagé.

- Merci.

Reyna lui jeta un regard interloqué.

- Je sais que tu as fait ce qui te paraissait juste, reprit Zach. Tout ce qui m'importe, c'est qu'on soit tous sains et saufs. Je n'aurais pas supporté de voir ma mère dans cet état pour toujours. Elle est forte mais ... ce qu'elle a vécu était trop.

Zach se tut un moment. Louis revint avec les boissons, un sourcil levé en direction de leurs mains. Reyna les retira en se raclant la gorge, et Louis coula un regard amusé à Zach.

Reyna fouilla dans ses poches et ressortit des pièces en or que Zach reconnut comme étant celles qu'elle avait faillit lui donner quelques jours plus tôt. Cela lui semblait à une éternité de cela.

Louis secoua la tête.

- Cadeau de la maison. On est contents que tu ne te sois pas fait embrocher, tu représentes le quart de notre chiffre d'affaire annuel à toi toute seule ! Et c'est pour remercier Zach d'avoir ainsi sauvé notre café.

Il fit un clin d'œil et Reyna et Zach éclatèrent de rire. Louis s'éloigna et le rire de Reyna s'éteignit. Elle reprit la parole :

- Là, ta mère pense que tu es en vacances avec moi, je lui ai dit pendant qu'elle était encore groggy que l'on partait quelques jours.

Zach songea qu'il devrait peut-être l'appeler pour lui dire que ses « vacances » se déroulaient très bien, avant de se souvenir que son téléphone se trouvait dans son sac. Qui avait explosé avec l'eidolon.

- Tu sais, reprit Reyna, ta mère ne saura jamais que tu avais raison à propos des monstres.

Zach sourit.

- Il y eut une époque où j'aurais tout donné pour que ma mère se rende compte que je ne suis pas cinglé. Mais tu vois, si un jour elle l'a pensé, ce n'est plus le cas aujourd'hui. Je sais qu'elle m'aime comme je suis. Et puis, ajouta-t-il en la regardant, moi, je sais que je ne suis pas fou. Je viens de découvrir un tout nouveau monde auquel je n'appartiens certes pas autant que toi, mais que je peux au minimum comprendre.

Il réfléchit un instant avant de reprendre.

- Quand tu m'as appris que je faisais partie des rares mortels à pouvoir voir à travers la Brume, je me suis considéré comme une anomalie. Désormais, j'aime à penser que je suis plus spécial que je ne suis une erreur. Et peut-être, étant donné que la Brume peut être manipulée, que notre rencontre et notre combat n'étaient pas dus au hasard ?

D'accord, il n'avait balancé ça qu'au hasard, il ne pensait pas réellement que quelqu'un avait manipulé la Brume pour les faire se rencontrer. Apparemment, ce n'était pas le cas de Reyna dont les yeux s'étaient écarquillés.

- Mais bien sûr ..., murmura-t-elle. Comme est-ce que j'ai pu louper tout ça ?

Elle ne dit rien et Zach pouvait limite voir les rouages de son cerveau fonctionner.

- Ça t'ennuierait de m'expliquer ? demanda-t-il.

Reyna releva les yeux sur lui.

- Tu m'as dit qu'Alderman avait débarqué dans votre café il y a de çà trois mois ?

Zach acquiesça.

- Il m'a embauché très peu de temps après. Gabrielle m'a dit que leur patron précédent avait eu des soucis familiaux. Elle n'avait pas l'air très sûre d'elle ...

- C'est qui Gabrielle ? demanda Reyna d'un ton neutre.

Mais Zach perçut une certaine tension dans sa voix, sans comprendre pourquoi.

- C'est mon amie au café.

Reyna hocha la tête en faisant un « ah » silencieux.

- Donc, reprit Zach sentant instinctivement que le sujet Gabrielle n'était pas à creuser, tu penses que l'arrivée d'Alderman puis la mienne juste après sont louches ?

Reyna se pencha en avant, tout en croisant ses mains.

- Je trouve surtout étrange que comme par hasard, l'ancien patron soit parti et que ta collègue en soit extrêmement vague, qu'Alderman débarque dans ce café et qu'il t'embauche toi. Un eidolon qui embauche un mortel qui voit à travers la Brume, quelles étaient les chances ?

Zach voyait où elle voulait en venir.

- Et comme par hasard, dit-il, tu débarques juste après, à la recherche de l'eidolon. Comment savais-tu d'ailleurs que tu devais te rendre au café d'Alderman ?

- C'est bien simple, je ...

Reyna se tut d'un seul coup, le regard troublé.

- Quoi ? Qu'est-ce qu'il y a ? la pressa Zach.

Reyna fronça les sourcils.

- Je crois que ... je sentais que je devais y aller, je ... je ne sais pas, ça me paraissait être la chose à faire.

Zach comprit que c'était la Brume qui l'avait guidée vers lui et Alderman. Reyna en vint à la même conclusion, et plongea la tête entre ses mains. Avoir été manipulé semblait la rendre malade.

- Pourtant, dit-elle, en me rendant à ce café, j'étais persuadée de le faire de mon plein gré.

Elle frissonna et but une gorgée de son chocolat. Elle grimaça en constatant qu'il avait refroidi.

- Nous y reviendrons plus tard, décida-t-elle, as-tu essayé de postuler dans d'autres endroits avant celui d'Alderman ?

Zach secoua la tête.

- Je n'en ai pas eu le temps. On a aménagé dans notre appartement et juste après, Alderman m'a embauché, sans même que je postule. L'histoire de dette, tu te rappelles ?

Au moment où il termina sa phrase, il réalisa pleinement ses paroles, ainsi que Reyna.

- La dette ! s'exclamèrent-ils ensemble.

Quelques clients leur jetèrent un coup d'œil avant de retourner à leur café.

- Tu te rappelles ce que l'eidolon a dit à propos de ta mère ? fit Reyna d'un ton empressé. Qu'elle n'était pas dans son état normal lorsqu'elle avait promis de ne rien dire sur le meurtre tant qu'il te prenait en tant que serveur !

- Ma mère a aussi été manipulée alors, murmura Zach. Voilà pourquoi cela ne la dérangeait pas de me faire travailler chez un assassin, parce qu'elle n'en avait pas réellement conscience à cause de la Brume !

Reyna hocha la tête d'un air excité.

- Et à cela s'ajoute le fait que ta mère ait trouvé un appartement voisin à celui de Mme Bolston, une demi-déesse !

Zach cligna des yeux.

- Attends, Mme Bolston est une demi-déesse ?

Reyna le fixa, surprise.

- Tu ne l'avais pas deviné ? C'est une fille de Mercure.

- Le dieu des Voleurs ? l'interrompit Zach.

Reyna jeta un coup d'œil inquiet vers le ciel.

- Heu oui, mais c'est mieux de dire « dieux des voyageurs » ou « messager des Dieux ».

Zach se rappela sa voisine lui dire qu'elle aimait les voyages, et qu'elle avait cela dans le sang. Il se souvint du nombre de fois où elle « remerciait les dieux ».

- Tu n'as jamais vu son tatouage ? demanda Reyna en tournant son propre avant bras.

Zach se pencha sur le tatouage qu'elle lui montrait. Il l'avait déjà entr'aperçu au café, le jour où sa mère avait disparue. Il représentait une épée et une torche entrecroisées, identiques à celles sur sa bague. En dessous, il y avait cinq barres tatouées et au dessus le sigle « SPQR ».

- Chaque demi-dieu en a un, expliqua Reyna, il indique notre côté divin, si l'on peut dire, le symbole de notre parent immortel. Celui de ma mère représente une épée et une torche. Les barres indiquent le nombre d'années que tu as passées au service de la légion, cinq pour moi.

- Et SPQR ?

- Senatus Populusque Romanus, le Sénat et peuple de Rome. C'est la devise du camp.

Un flash de souvenir apparut dans l'esprit de Zach. Il se rappelait que Mme Bolston gardait toujours des pulls qui recouvraient ses avant-bras et la dernière fois qu'il l'avais vue, elle était en train d'ajuster consciencieusement sa manche. Était-elle en train d'essayer de cacher son tatouage ? Il aurait quelques mots à lui adresser, songea-t-il avec amusement.

Reyna revint sur leur principal sujet de conversation.

- Je trouve aussi suspicieux que parmi tous les habitants de San Francisco, ce fut ta mère qui vit le meurtre commis par l'eidolon.

- Et pas qu'une fois, rappela Zach. Elle est tombée deux fois sur lui.

Reyna acquiesça.

- Donc tu penses que quelqu'un a manipulé la Brume pour qu'Alderman choisisse un café précis, que ma mère trouve un appartement précis, proche d'une demi-déesse, que je sois embauché et que tu sois attirée par ce café ?

- Tu ne penses pas ? demanda Reyna en haussant les sourcils.

- J'imagine que si, réfléchit Zach, mais qui pourrait faire ça ? Et dans quel intérêt ?

Reyna resta silencieuse un moment. Son regard se perdit parmi les passants avant de se bloquer sur une personne en particulier. Ses yeux s'assombrirent et elle marmonna entre ses dents.

- Je crois que j'ai ma petite idée ... 

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