Tome IV - Chapitre 11 : Les travers du chemin
Hello ! C'est le grand retour d'ATDM pour son utltime ligne droite (normalement ahem) !
Bon déjà, super contente de vous retrouver ^^ L'écriture a bien avancé et j'espère pouvoir même terminer ce tome d'ici la fin de l'année ou début 2025. Vraiment, si j'arrive à le boucler dans ces eaux-là pile pour les 10 ans d'ATDM, ça sera bien symbolique haha ! De toute façon, je ne me mets plus la pression avec cette histoire, elle avancera comme elle avancera avec ses qualités et ses défauts. A vrai dire, j'en vois de plus en plus les défauts, ça me frustre de ne pas réussir à rendre hommage à une période et à des personnages de Harry Potter qui me fascinent autant mais bon... J'espère que pour vous la lecture sera toujours un plaisir. Merci encore d'être encore là, vous êtes incroyable <3
Comme ça fait un moment, je vous mets juste en dessous un récap de là où on s'était arrêté dans l'intrigue si vous en avez besoin ^^
Avant de commencer, petite info : avec Perri, nous serons comme chaque année au Salon du Livre de Montreuil le dimanche 1er décembre avec toute la team de lectrices qui viendra. Donc si vous voulez en faire partie pour discuter et partager, ça sera avec plaisir, envoyez-moi un petit message ici ou sur Insta et je vous ajouterai au groupe !
(Ah et je viens de rattraper le prime de la Star Ac', j'annonce mes chouchous : Marguerite et Charles, allez ! Même si Pierre reste dans mon coeur).
Bonne lecture !!
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PETIT RECAP :
Nous nous étions arrêté sur Marlène et Regulus qui s'embrassaient pour la première fois depuis leurs retrouvailles/rendez-vous secrets dans leur chambre du Chaudron Baveur. Reg venait même d'avouer à Marlène qu'il l'aimait. Malheureusement, le moment était coupé par les fenêtres qui explosaient et donc une attaque imminente sur le Chemin de Traverse...
Pour les autres : le groupe se fissure de plus en plus à cause de la guerre et des missions. L'Ordre est notamment affecté à la protection de Milicent Bagnold, probable future Ministre de la Magie et pour l'instant à la tête du Département des Mystères. Après que Sirius se soit infiltré à Square Grimmaurd, ils ont d'ailleurs découvert que les mangemorts finançaient ce département, ce qui parait incompréhensible : pourquoi financer le département de celle qui se pose comme leur ennemi ? Pour essayer d'obtenir des renseignements, Dorcas tente de renouer avec Lucinda, apprentie Langue-de-Plomb. De son côté, Remus s'est mis à fréquenter Ornella, une activiste loup-garou qui l'a embarqué dans un groupe de parole où se trouve notamment Greyback. Enfin, non négligeable, Alexia se bat toujours entre sa maladie, son envie de vivre une vie normale et ses missions pour l'Ordre, un peu comme Peter. Et James et Lily se sont mariés of course !
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Chapitre XI : Les travers du chemin
Quand Remus arriva sur le Chemin de Traverse, c'était déjà le chaos. Les mangemorts avaient évité jusque-là les lieux trop publics, il n'avait pas l'habitude de voir un assaut de cette ampleur en pleine ville, mais rien n'aurait pu le préparer aux vitrines explosées et au corps qui tombaient sur les pavés, bousculés de tous les côtés.
- Putain de merde... lâcha Ornella à sa droite.
Il ne la reprit même pas sur sa vulgarité. Il aurait aimé qu'elle ne soit pas avec lui, mais il était trop tard désormais. Le hasard avait fallu qu'il soit avec Ornella – juste tous les deux, il n'y avait pas eu de réunions du groupe clandestins – et qu'ils décident de passer par le Chaudron Baveur. Il serra les dents. L'Ordre avait dû envoyer une demande de renforts au QG ; demande qu'il n'avait donc évidemment pas reçu. Il était censé travailler aujourd'hui, mais il avait pris sa journée sans avertir les frères Prewett de peur qu'on le colle à une énième mission de surveillance de la maison de Bagnold.
Le corps en alerte, il chercha des visages familiers du regard. Un magasin de chaudron avait dû exploser pas loin car une épaisse fumée commençait à se répandre entre les devantures et il plissa les yeux, la gorge prise. Soudain, au loin, il crut repérer des cheveux blonds familiers.
- Ornella ! cria-t-il par-dessus les bruits assourdissants. Occupe-toi des passants, fais-les évacuer !
- Quoi ?
- Les passants ! Faut qu'ils sortent de là !
Ornella le dévisagea, baguette à la main.
- Les Aurors...
- Sont occupés ailleurs ! Vas-y, fais-le. Mais si tu vois un mangemort, hésite même pas : fuis. Tu m'entends ?
- J'allais pas faire autre chose ! Je suis pas suicidaire, Lupin ! Eh ! Où est-ce que tu vas ?
Il s'élançait déjà à travers la rue commerçante. Il prit à peine le temps de se retourner pour jeter un « je reviens » cryptique, puis laissa Ornella derrière lui. C'était la meilleure faveur qu'il puisse lui faire : plus elle serait loin d'un membre de l'Ordre, moins elle serait exposée. Il se mit à courir.
Vaguement, il se souvenait l'année dernière du récit de Gideon et Emmeline quand ils avaient cru que le Chemin de Traverse avait été pris pour cible par les mangemorts, mais que ça ne s'était révélé être qu'une farce d'un idiot de la Gazette avec des boules puantes. Là aussi, il y avait eu des mouvements de foule et une visibilité réduite. Mais Remus savait que ça n'avait rien eu à voir. Là, il pouvait presque sentir un goût de fer lui envahir la bouche et son corps se satura d'adrénaline en une minute à peine. A travers la fumée, il vit des silhouettes noires se mouvoir, des éclats de sortilèges fusés... Et les gens continuaient de hurler.
- Stupefix ! lança-t-il en se glissant derrière une figure encapuchonnée.
La baguette, tendue vers une vitrine, sauta des mains de son propriétaire et alla roula quelque part sur les pavées. Remus eut juste le temps d'apercevoir un masque d'argent avant de continuer sa course sous un cri de rage.
Ne jamais s'attarder, entraver le plus possible l'avancée des mangemorts, attendre les renforts et l'arrivée des Aurors.
C'étaient les consignes qu'on lui avait toujours données. Surtout, il voulait retrouver les mèches blondes qu'il avait aperçu de loin. Il était persuadé que c'était Marlène. Merlin, où se trouvait le magasin de Mrs Guippure où elle travaillait déjà ? Il avait l'impression de ne plus savoir dans quel sens était le Chemin de Traverse, de ne plus réussir à distinguer les directions... Le cœur tambourinant, il décida de continuer à avancer.
Et c'est alors qu'il les vit. Près de chez Ollivander, Marlène n'était pas du tout en vue, mais deux personnes se faisaient face, figés de façon étrange dans ce moment en mouvement où tout le monde cherchait à fuir ou à atteindre quelque chose. Sirius et Regulus se tenaient en joug. A quelques mètres d'eux, il retint sa respiration, près à s'élancer, mais quelque chose le retint. Aucun d'eux ne lançait le premier sort.
- Merlin, Patmol, c'est pas vrai...
Il eut envie de le secouer. Combien de fois en avait-il parlé avec James, inquiet ? Pas tant que ça en réalité, à peine trois fois, et à chaque fois il s'était fait envoyer sur les roses. James lui affirmait : s'il fallait se battre, même contre sa famille, Sirius en était capable. Et ça, Remus n'en doutait pas non plus, mais Regulus avait toujours été l'exception. Il en avait la preuve flagrante sous les yeux. Si Maugrey voyait ça, il en ferait une syncope.
Horrifié, il se demanda combien de temps les deux frères allaient tenir, si Regulus allait finir par jeter un maléfice en premier... Mais ça n'arriva pas.
D'un coup, Sirius détacha son regard de la baguette pointée sur lui – Remus manqua de s'en étouffer – puis partit en sens inverse, disparaissant au cœur des combats, plus loin. Il cilla, perplexe. Il avait eu un mangemort à sa portée et il lui avait juste... tourné le dos. Estomaqué, il mit plusieurs secondes à sortir de sa torpeur, et sans réfléchir, se précipita dans sa direction. Regulus n'avait toujours pas bougé.
Affaissé contre un mur, il avait abaissé sa baguette maintenant que son frère n'était plus en vue et Remus arriva devant lui si vite qu'il n'eut pas le temps de réagir. Tant mieux, il commençait à en avoir marre du petit dernier des Black. Avec force, il le saisit par le devant de sa robe de sorcier et il plaqua un peu plus contre la vitrine de la devanture du magasin de baguette. Regulus eut un sursaut de surprise et se mit à se débattre immédiatement alors que sa baguette lui échappait des mains.
- Je vais le dire une fois et ne plus me répéter, gronda Remus. Ta famille et toi, vous allez laisser Sirius tranquille. Tu ne l'approches plus, tu ne lui parles plus. Parce que la prochaine fois, sinon, je te laisserai pas repartir. Est-ce que c'est clair ?
Le visage blême, Regulus eut l'audace d'avoir l'air méprisant.
- Qu'on le laisse tranquille ? s'indigna-t-il. C'est lui qui revient ! Pour votre stupide groupe de pseudo résistance qui est voué à se faire écraser, Lupin ! Personne lui avait demandé de venir à la fête de fiançailles de Cissy ni de fouiller Square Grimmaurd ! Alors lâche-moi !
Il crispa les mâchoires. Il ne savait pas ce qui le mettait le plus hors de lui : le ton hautain de Regulus ou le fait qu'il était d'accord avec lui ? Il l'avait dit lui-même à Sirius le soir de sa dispute avec Alexia où il était parti sur un coup de sang en moto volante. « Si tu n'arrives pas à te défaire des Black, c'est parce que tu retournes vers eux, encore et encore. Faut que t'arrêtes ».
Un frisson glacé lui descendit la colonne vertébrale.
- Fouiller Square Grimmaurd ? répéta-t-il d'une voix blanche.
Regulus ne parut pas relever son trouble. Enervé, il tenta encore de se dégager et cracha :
- Encore une brillante idée ! Dommage pour vous qu'il n'ait rien trouvé, pas vrai ? Parce que vous n'avez rien, vous ne savez même pas contre quoi vous vous battez réellement !
Il l'écouta à peine. Il revoyait Sirius, en train de fumer, lui affirmer qu'il n'y avait eu personne à Square Grimmaurd ce soir-là. La maison était vide. C'étaient ses mots. Il les lui avait dit droit dans les yeux avant de lui montrer sa découverte du carnet d'Orion, celui qui indiquait que les mangemorts injectaient de l'argent dans le Département des Mystères et qu'il s'y tramait sûrement quelque chose.
Ça, visiblement, Regulus n'était pas au courant. Mais il avait vu Sirius ce soir-là. Ce que Sirius avait clairement omis de lui préciser et n'avait certainement pas mis non plus dans son rapport à Maugrey. Une pierre lui tomba dans l'estomac.
- Va-t'en, ordonna-t-il à Regulus d'une voix sourde. Je te jure que si je te croise dans les prochaine minutes, je n'hésiterai plus cette fois.
Le cœur battant si fort qu'il le sentait jusque dans ses tempes, il relâcha sa prise sur Regulus et l'envoya vaciller sur ses jambes. Celui-ci lui décocha un regard noir, mais ne chercha pas à riposter. Il se contenta de ramasser sa baguette, le visage fermé, puis il prit la direction opposée à celle de Sirius quelques minutes plus tôt et disparut.
Remus exhala un souffle brûlant. Merlin ! Il poussa un cri dans le vide, les nerfs à vif. Non seulement il avait lui aussi laissé partir un mangemort notoire, mais en plus... En plus quoi ? Sirius lui avait menti ? Est-ce qu'elle était là, la vérité ? Mais sinon, comment expliquer que Regulus soit au courant pour la fouille de Sirius à Square Grimmaurd ?
La colère gonfla dans son ventre. L'esprit emmêlé de plein de questions, il serra son poing autour de sa baguette et décida de remonter un peu plus le Chemin de Traverse. Sirius avait pris cette direction de toute façon. Il fallait qu'il le retrouve.
Quelques mètres plus loin, l'air s'éclaircit un peu. La fumée était moins opaque, mais une lueur verdâtre prenait le dessus, nimbant la rue d'une couleur malsaine. Il jeta un bref regard vers le ciel et la repéra alors. La Marque des Ténèbres. Géante, elle emplit tout son champ de vision, le narguant presque avec sa bouche béante et son serpent ondulant. Il eut un frisson. Là où il y avait la Marque, il y avaient des morts... Il n'avait juste peut-être pas voulu s'attarder sur les corps tout à l'heure, espérant que ça ne soit que des gens tombés prêts à se relever. Il espéra qu'Ornella s'en sortait. Que les mangemorts étaient trop occupés ailleurs pour la remarquer.
Soudain, il repéra enfin Sirius. Il avait encore la baguette brandie, mais cette fois il était loin d'être figé. Et pour cause, à l'autre pointe se trouvait Bellatrix.
Evidemment, songea-t-il avec épuisement. Il pouvait toujours compter sur Sirius pour faire pire à chaque fois. Comme s'il se sentait observé, ce dernier jeta alors une brève œillade dans sa direction et Remus croisa son regard. Il fut rassuré d'y voir un éclat familier. Toujours cette même façade, celle du gamin de onze ans sur le seuil du dortoir de Gryffondor le soir de la répartition et qui voulait faire croire qu'il n'était pas effrayé.
Mais justement, pour une fois, il aurait aimé que Sirius le soit... Parce que s'il ne l'était pas, qu'est-ce que ça signifiait ? Et bon sang, pourquoi est-ce qu'il lui avait menti ?
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Furieux contre lui-même, Regulus se traîna le long du Chemin du Traverse. Par tous les mages, ce qu'il avait été stupide ! A se faire prendre coup sur coup par Sirius et Lupin comme un débutant ! Même perturbé, jamais ça n'aurait dû arriver. Mais il avait été trop préoccupé par Marlène, partie se battre à peine leur chambre du Chaudron Baveur quitté, pour voir son frère qui s'était glissé dans son dos. Ils n'avaient échangé que quelques mots avant que Sirius entende les cris des victimes de Bellatrix au loin et ne décide que ses efforts seraient mieux employés ailleurs. Et alors Lupin... Lui non plus il ne l'avait pas vu venir. Quand ce n'était pas Potter, c'était un autre de la stupide bande de toute façon !
Et bon sang, pourquoi est-ce qu'il n'avait pas été prévenu de l'attaque ?
Parce que tu n'es pas assez important, lui chuchota la voix chantante de Bellatrix. Et bien dans ce cas, elle n'avait qu'à se débrouiller. C'était évident que tout l'Ordre du Phénix et les Aurors allaient débarquer maintenant dans un lieu aussi sensible.
Déjà, ils percevaient les affrontements qui se formaient. Les derniers civils qui courraient autour, paniqués, étaient rares et les sorts fusaient de toute façon dans tous les sens. Il en sentit un lui siffler à l'oreille et il s'empressa de dresser un bouclier autour de lui, agacé. Au loin, il repéra Caesar Yaxley, reconnaissable malgré son masque à sa silhouette râblée, accompagné par Jugson. Ce dernier était peut-être le plus identifiable de tous à cause de sa démarche encore étrange suite à ses blessures à Ste-Mangouste en début d'année.
Regulus tourna sur lui-même. Bon sang, où pouvait être Marlène ? Il ne pouvait pas ouvertement la protéger, mais s'il pouvait au moins dévier les combats autour d'elle...
Il fouillait la rue du regard quand il la ressentit soudain. La brûlure.
- Non...
Horrifié, il baissa les yeux sur son bras et releva sa manche. L'encre de sa Marque s'agitait, comme si elle percevait que son Maître était proche. Elle lui chauffait la peau, douloureuse ; véritable rappel qu'il ne s'appartenait plus. Qu'il était là pour servir.
Et alors, au bout du Chemin de Traverse, Lord Voldemort apparut.
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*
- Bordel, il est là !
Le cœur au bord des lèvres, Lily fit volte-face en entendant le cri de Dorcas. Elle sut de qui elle parlait avant même de le voir. Ce visage pâle déformé par la magie noire qui hantait encore ses cauchemars.
- Bones ! hurla-t-elle, la voix prise par la peur.
Edgar Bones, transplané avec elles depuis le QG dès que l'appel de détresse de Benjy leur était parvenu, envoya valser le mangemort contre lequel il se battait et se tourna vers elle. Elle pointa le bout de la rue de la pointe de sa baguette.
- Il faut le retenir le plus possible ! ordonna-t-il. Le temps que les Aurors neutralisent les mangemorts !
Le plan se tenait. En principe. Lily se sentait déjà épuisée, vidée de son énergie. Si elle ne fonctionnait pas sur adrénaline, elle était sûre qu'elle se serait mise à vomir, l'estomac retourné par l'effort et drainée de ses forces magiques. Combien de sortilèges avaient-elles jeté depuis qu'elle était arrivée ? Au moins une cinquantaine, elle en était persuadée.
Surtout, elle le voyait d'ici. Voldemort n'était pas seul. Le découragement s'abattit sur ses épaules et elle contempla le Chemin de Traverse, retourné de tous les côtés à cause des combats. Comment est-ce que les mangemorts pouvaient continuer d'affluer ? Elle avait l'impression d'en avoir déjà une vingtaine, comme s'ils avaient amené toutes leurs forces pour ce coup si symbolique. Regardez-nous, semblaient-ils dire, nous vous frappons au cœur. Plus aucun endroit n'était hors limite : ni un hôpital, ni la rue commerçante la plus célèbre d'Angleterre.
- Ils ont encore recruté, c'est pas possible, pesta Dorcas en écho à ses pensées.
Bones plissa les yeux.
- Je ne crois pas que ça soit des mangemorts... dit-il d'une voix rauque.
- Quoi ? Mais alors... ?
Lily se concentra. Elle remarqua soudain ce qui aurait dû lui sauter aux yeux : les personnes qui flanquaient Voldemort ne portaient ni la tenue sombre ni le masque d'argent des mangemorts. Elles avançaient à visage découvert, les traits déformés par la colère. Elle sentit son cœur cogner follement contre ses côtes.
- Oh Merlin, réalisa Dorcas en même temps qu'elle. Ce n'est pas... ?
- Si, c'est lui, gronda Bones.
Fenrir Greyback. Elle superposa le portrait épinglé dans la cuisine du QG par Emmeline et l'homme qui fonçait désormais droit sur elle. L'image en noire et blanc ne rendait pas justice à sa haute stature, au grondement sourd qui sortit de sa gorge, ni même à ces dents, pointues et acérées, qu'il dévoila en se jetant sur elle.
Elle se jeta à terre pour l'éviter.
Son épaule frappa le sol, lui arrachant un cri, mais elle réussit à ne pas lâcher sa baguette. Au loin, elle entendit Bones et Dorcas se joindre à la mêler, sûrement aux prises avec d'autres partisans de Voldemort. D'autres loups-garous ? Impossible à dire, elle n'avait pas le temps de chercher à le savoir de toute façon. Ni même de regarder ce que Voldemort faisait. Greyback tentait à nouveau de l'attraper. Cette fois, sa large main aux ongles jaunes se referma sur sa cheville et elle rua, battant des jambes.
- Fougueuse, la petite sorcière, ricana-t-il. Alors, on a peur du grand méchant loup ?
- Tellement cliché !
Elle roula sur elle-même et se remit à genoux. Il n'eut pas le temps d'en faire de même qu'un sort rouge le frappait en pleine poitrine, le projetant à nouveau à terre dans un cri de rage. Lily bondit sur ses pieds, perplexe. Elle n'avait pas jeté ce sort.
Elle leva la tête.
Du haut d'une fenêtre, un commerçant brandissait sa baguette et il lui fit signe de courir. Elle le remercia d'un geste tremblant, mais hurla en retour :
- Baissez-vous, cachez-vous ! Restez à l'abris !
Elle ne savait même si l'homme arrivait à entendre sa voix par-dessus le bruit des explosions qui pleuvent un peu partout. Elle ne chercha pas à lé vérifier. Ils étaient devant une boutique d'apothicaire et tout y était extrêmement inflammable. La dernière chose dont il avait besoin, c'était qu'un incendie se déclenche et avale le Chemin de Traverses dans les flammes.
- Attention !
La voix la percuta avant l'impact. Elle l'aurait reconnu n'importe où.
- James...
Brusquement, un pan de mur vola en éclat à quelques mètres. Elle ne comprit même pas ce qui l'avait provoqué – un sortilège mal dosé sûrement – et ne put que lever les bras au-dessus de sa tête pour se protéger. Elle entendit plus qu'elle ne sentit les jets de pierre voler autour d'elle, mais James avait dû déployer un bouclier à temps car aucun ne la toucha. La poussière de plâtre, en revanche, lui obstrua la gorge. Prise d'une quinte de toux, elle vacilla à l'aveugle pour sortir du nuage opaque et deux bras l'agrippèrent soudain.
Elle se mit à se débattre par instinct.
- Lily, c'est moi, c'est moi ! se récria la voix de James.
- Oh Merlin...
Elle retrouva ses sens doucement et son cœur se calma. Les mains qui la maintenaient debout n'avaient rien des paumes immenses et brusques de Greyback, elles étaient plus tendres et surtout elle sentait l'alliance de James qui s'enfonçait dans son bras.
Et c'est alors que le hurlement déchira l'air.
Il fut si horrible qu'elle en sursauta, glacée. James blêmit derrière ses lunettes et elle remarqua qu'un des verres étaient cassées. Juste son œil, une coupure saignait abondement. Elle aurait sûrement prit le temps de s'en inquiéter si le hurlement ne continuait pas, porté par ce qui semblait être une douleur horrible. Ponctué de sanglots, la voix de déformait, alternant entre bruits gutturaux et jurons.
Ils s'élancèrent d'un même mouvement. Heureusement, ni Voldemort ni aucun loup-garou n'étaient en vue et ils foncèrent vers un petit attroupement qui s'était formé devant la devanture d'en face... ou ce qu'il en restait. Un pan de mur entier avait été éventré et formait désormais un tas de gravas au sol. Le nuage de poussière retombait encore, mais Lily réussit à distinguer le profil rond d'Alice Londubat et d'un autre homme qui semblait être un de ses collègues vu son uniforme.
Si proche, le hurlement était encore plus glaçant... et appartenait définitivement à une femme.
- Il faut la sortir de là ! était en train d'hurler Alice. Abbot, un sort de lévitation pourrait...
- Elle n'arrivera pas à se dégager seule ! Il faut que tu la tire !
- Oh Merlin...
Lily manqua de rendre le thé qu'elle avait bu au QG ici et maintenant. Car sous les gravats, la jambe prise au piège, se trouvait Dorcas...
Même avec sa vision réduite, elle distingua l'amas de chair et de sang qui dépassait des pierres effondrées. Elles recouvraient sa jambe droite, la retenant prisonnière. Affalée sur le dos en train de se tordre de douleur, Dorcas rejeta la tête en arrière et se déchira la gorge :
- Sortez-moi de là ! Pitié... Merlin... rah !
- Eh, eh, ça va allez, Dorcas, on est là, se précipita James en tombant à genoux à côté d'elle. Tiens le coup.
- Je m'en tape que tu sois là ! Putain, enlève le mur, enlève le mur !
Ses yeux roulèrent dans leurs orbites et un râle passa ses lèvres exsangues. Lily se tourna vers les deux Aurors.
- Si vous jetez le sort de lévitation à deux, on peut la tirer de là. Maintenant !
- Mais qu'est-ce que vous foutez là ? Les civils auraient dû être...
- Aloyssius, on verra ça plus tard, coupa Alice avec fermeté. On fait ce qu'elle a dit, prêt ? 1, 2, 3.
Le décompte ancra Lily dans l'urgence. Elle paniquerait plus tard, c'était ce que les frères Prewett lui avaient toujours dit : restez en vie, battez-vous, et vous pourrez vous écrouler ensuite. Pour l'instant, Dorcas avait besoin d'elle.
D'un coup, les pierres commencèrent à s'élever. Côte à côte avec James, ils attrapèrent chacun Dorcas sous un bras et la tirèrent alors. Elle hurla de plus belle. Avec horreur, Lily vit la peau de sa jambe râclée les pierres les plus basses et le collègue d'Alice Londubat s'empressa de renforcer son sortilège de lévitation. En quelques secondes, ils réussirent à dégager Dorcas.
Seulement, maintenant libérée du poids qui pesait sur elle, sa jambe sembla dans un pire état que prime abord. Du sang s'écoulait de la plaie à gros bouillons, formant une tâche sombre sur le sol maculé de poussière et d'éclats de verre des vitrines explosés. En traînant Dorcas, peut-être qu'ils lui avaient même causé d'autres coupures, mais celle de sa jambe devait le masquer. James eut un haut le cœur dégouté.
- Il faut la sortir de là ! s'affola-t-il.
En tant qu'apprentie médicomage, elle ne pouvait qu'approuver. Les cris avaient cessé et elle se rendit compte que Dorcas avait perdu connaissance. D'une pâleur extrême, ses mèches sombres lui collaient à la peau et le sang ne paraissait pas vouloir s'arrêter de s'écouler.
- Elle a besoin d'aller à Ste-Mangouste ! Mais il faut lui faire un garrot avant de la transporter ! Je suis médicomage, ajouta-t-elle en direction de l'Auror qui la toisait toujours avec scepticisme.
Ou presque, mais il n'avait pas besoin de le savoir. Voyant qu'Alice ne cherchait pas à la remettre en cause, il parut céder. Pragmatique, il lui laissa la place d'évoluer autour de Dorcas et coupa même le bas de son uniforme d'Auror avant de lui tendre la bande de tissue. Elle s'en saisit avec reconnaissance.
Elle était en train de la passer autour de la jambe de Dorcas, James penché par-dessus son épaule en guise de soutien, quand soudain l'homme de ses cauchemars sembla surgir de nulle part.
- Potter, siffla-t-il, nos chemins étaient voués à se recroiser.
- Attention, il est là ! prévint Alice.
Lily rentra la tête dans les épaules, impuissante. Ses deux mains étaient prises par le garrot qu'elle était en train de faire et elle ne put que contempler Voldemort surgir de derrière le tas de gravats, baguette au clair. Les sortilèges fusèrent aussitôt et reprirent de plus belle. James, Alice et son collègue – comment l'avait-elle appelé déjà ? Abbot ? – se jetèrent ensemble face à lui.
Paniquée, elle ne chercha pas à voir ce qui se passait. Elle perçut simplement du coin de l'œil Voldemort faire un large geste et ressentit la vibration de la puissance de son sort jusque là où elle se trouvait, mais elle ne pouvait pas faire plus. Il fallait qu'elle garde la tête froide. Sous ses doigts, le bout de cape que lui avait donné l'Auror était déjà imbibé de sang. La matière, poisseuse, chaude et épaisse, lui coulait sur les poignets et imprégnait ses propres manches. Tant pis, elle devait faire avec les moyens du bord. Déterminée, elle serra le garrot, forçant ses mains à nouer les deux extrémités sans trembler.
- Lily ! Lily !
Une seconde, elle crut qu'on l'appelait en renfort, que les choses tournaient mal... Mais elle entendait toujours James se battre en arrière-plan en narguant Voldemort ce crétin – tant qu'il parlait, il était vivant – et elle releva la tête pour voir Marlène déraper près d'elle.
- Oh par tous les mages, Dorcas ! s'épouvanta-t-elle en découvrant leur amie. J'ai vu la scène de loin, je me battais contre les Carrow je crois. Sirius se battait en duel avec Bellatrix Lestrange, Remus est venu l'aider en renfort. Mais à un moment, elle a voulu les toucher et le mur a juste explosé, on ne voyait plus rien...
Mais Lily n'avait pas le temps de comprendre le pourquoi du comment. Elle leva une main, habitée d'une énergie nerveuse.
- Marlène ! Parfait, il faut que tu transplanes avec elle ! Va à Ste-Mangouste, elle a besoin de soin, tout de suite !
- Quoi ?
Prise au dépourvu, Marlène se tourna plus franchement vers elle. Elle retint un hoquet de stupeur : la moitié de son visage présentait des coupures et son bras gauche pendant étrangement contre son corps.
- Epaule déboîtée, rassura Marlène en interceptant son regard, même si une grimace de douleur déformait ses lèvres. Et une vitrine explosée juste devant moi. Ca va, je pense que c'est superficiel. Mais Lily, je ne peux pas vous laisser...
- Si t'as vraiment une épaule déboîtée, t'arriveras pas à te battre ! coupa-t-elle sans pitié. Et il faut vraiment que Dorcas soit emmenée loin d'ici, il ne faut pas que sa jambe s'infecte ou se reprenne un coup. Je ne peux pas laisser James, alors toi vas-y ! Demande Mrs Winger, c'est ma tutrice ! Elle saura quoi faire.
- Mrs Winger, d'accord...
Lily remercia le ciel que Marlène ne soit pas aussi têtue qu'un Sirius Black ou une Dorcas Meadowes. Dans les cas comme ceux-là, il n'y avait pas le temps de parlementer. Chaque seconde comptait. Avec soulagement, elle resta le temps de s'assurer que Marlène arrivait à avoir une bonne prise sur le corps inconscient de Dorcas, puis cette dernière tourna sur elle-même et ses deux amies s'évanouirent dans les airs.
Une chose de faite. Ne restait plus que Voldemort, ses mangemorts, et ses loups-garous...Une bouchée de pain en somme !
Mais quand elle s'élança à nouveau au milieu de la rue, les choses lui parurent... silencieuses. Sur le qui-vive, elle avança de quelques pas, sa baguette fermement brandie devant elle. Des éclats de voix lui parvinrent, plus loin.
- Lâchez-moi ! Je vous dis que je n'ai rien fait, lâchez-moi !
Elle se mit à courir et suivit le bruit, les genoux flageolants. Le Chemin de Traverse décrivait une courbe à cet endroit. Dès qu'elle passa de l'autre côté, elle se retrouva avec une baguette pointée entre les deux yeux.
- Elle est avec nous ! s'écria James quelque part sur sa gauche. Arrêtez, elle est avec nous !
D'un coup, il s'interposa entre la baguette et elle, les mains tendues. Elle relâcha un souffle tremblant. En face d'eux, un homme brun en tenue d'Auror abaissa sa garde et lui jeta une œillade méfiante.
- Avec nous ? Avec nous qui, bordel ? s'exaspéra-t-il.
Alice Londubat se matérialisa à leur côté.
- Des civils. Elle est médicomage, elle nous a aidé avec des blessés. Tu peux la laisser passer, Bellchant, je m'en porte garante.
L'homme eut un instant de doute. Mais face à l'assurance d'Alice, il plia et se détourna d'eux sans un mot.
- Et la chienne ? Elle s'est calmée ?
- Ne l'appelle pas comme ça, claqua Alice immédiatement. Aloyssius est en train de l'embarquer, Frank rassemble les autres. Greyback s'est échappé avec Tu-Sais-Qui.
- Sérieusement ? Et merde !
De frustration, il donna un coup de pied dans un bout de pavé déchaussé. Il eut l'air de se faire mal, mais serra les dents pour garder la face. Lily s'accrocha à James pour lui souffler à voix basse :
- Qu'est-ce qui se passe ?
- Ils arrêtent les loups-garous qui ont participé à l'attaque. Bagnold est là, elle a dit que c'était la priorité...
- Quoi ? Mais les mangemorts ?
Incrédule, elle suivit du regard la direction que James lui indiquait. Déjà sur le terrain, Millicent Bagnold évoluait parmi les décombres, vêtue d'une cape bleu roi. Elle passait de boutiques en boutiques pour serrer les mains des commerçants avec un air compatissant. La plupart semblait profondément choqué – voire légèrement amoché – mais ils s'accrochaient à cette représentante du Ministère comme une bouée de sauvetage au milieu du chaos.
- Il faut un coupable un peu plus original, je suppose, commenta James avec colère. Ça donnera plus l'impression aux gens qui liront le journal demain que Bagnold a réussi un gros coup.
- Mais... Tu-Sais-Qui ?
- Il en a emmené plusieurs avec lui dès qu'il a vu que les forces des Aurors étaient arrivées au complet. Ça a pris plusieurs minutes, mais on a réussi à le maintenir à distance en attendant...
La tête lui tourna. Par Merlin, qui pouvait affirmer avoir affronté Voldemort deux fois et être encore là pour en parler ? James et elle l'avaient fait. Sûrement quelques Aurors, comme les Londubat qui étaient aussi présents pour le coup à Ste-Mangouste... Mais peu de monde en définitive.
James passa un bras autour de sa taille, le corps frissonnant. La douleur de ses blessures devaient commencer à le rattraper, même s'il était en moins mauvais état que la dernière fois qu'il avait dû affronter Vous-Savez-Qui.
- Dorcas ? demanda-t-il, inquiet.
- Marlène a transplané avec elle à Ste-Mangouste. Elle va être prise en charge... Mais elle risque d'être hors-jeu un moment, sa jambe est...
- Pour la dernière fois, lâchez-moi ! Espèce de connard, lâchez-moi ! J'étais pas avec eux !
Elle reporta son attention sur les Aurors. Aloyssius Abbot, celui qui les avait aidés avec Dorcas, était en train de maintenir au sol une jeune femme qui se débattait avec furie. Les cheveux afro et bouclés, elle se cabrait pour lui échapper, dévoilant une large marque au niveau de sa gorge. Alertée par le bruit, Milicent Bagnold revint vers eux. Elle engloba la scène d'un œil critique.
- Je n'arrive pas à entendre ces pauvres commerçants ! Un sort de silence serait le bienvenu ?
- Pauvre garce ! rugit la loup-garou, faisant ressortir un vif accent écossais. Tu veux que ça nous réduire au silence ! J'aurais dû les laisser crever, tes commerçants ! Vous n'avez pas le droit de m'arrêter, j'ai simplement aidé, vous n'avez rien contre moi !
L'air excédé, l'Auror Abbot ne lâcha pas prise, mais soupira :
- Qu'est-ce qu'on fait ? On attend Maugrey ?
- Il pourra trancher... convint Alice, hésitante.
- Certainement pas, rétorqua Bagnold d'un ton sans appel. Ma politique ne s'aligne pas toujours avec la sienne, mais Croupton a donné le droit aux arrestations par mesure préventive par décret du Département de la Justice. Et la situation l'exige. Nous avons une lycanthrope précisément sur les lieux d'une attaque de loups-garous ! Je ne vais pas vous apprendre votre métier en vous disant qu'il est nécessaire de l'interroger, tout de même ?
Lily vit Alice et son collègue se crisper. Pourtant, aucun d'eux ne trouva à répondre et la jeune folle au sol, comprenant que son sort était quasiment joué, se remit à se débattre.
- Immobulus !
Soudain immobilisée, elle arrêta enfin de s'invectiver.
- Bellchant !
- Oh ça va, Londubat, on va pas subir son cirque pendant trente ans ! se défendit le troisième Auror qui s'était tenu éloigné jusque-là. T'as entendu la consigne ? On les embarque tous !
Le ventre en vrac, Lily se retint de protester. A aucun moment dans l'affrontement, elle n'avait vu la jeune femme se battre aux côtés des mangemorts... Mais dans le fond, elle n'avait pas tout vu non plus, pas même le départ des forces de Voldemort. Elle ne pouvait pas se permettre d'attirer l'attention sur elle et James qui n'auraient même pas dû être ici à se battre pour une inconnue dont elle ne savait rien.
- Ornella !
Ils se retournèrent. D'une rue parallèle surgirent soudain Remus et Sirius. Le premier, sa chemise déchirée, soutenait le second et James émit un bruit étranglé près de son oreille. Elle n'en fut pas loin non plus. Visiblement, Dorcas n'avait pas été la seule à avoir la jambe touchée. Celle de Sirius était tordue au niveau de la cheville, il avait une belle balafre sur le front, ses cheveux noirs étaient couverts de poussière et il semblait à deux doigts de vomir. Elle pria pour qu'il ne le fasse pas. Elle était à peu près sûre que si elle voyait Sirius vomir maintenant, elle suivrait dans la seconde.
- Eh, qu'est-ce que vous faites ? hurla Remus, traînant pratiquement Sirius derrière lui.
Il ignora les baguettes des Aurors soudain braqués sur lui et tenta d'atteindre la jeune femme toujours retenue au sol.
- Vous restez où vous êtes ! rugit Bellchant.
- Mais elle n'a rien fait, elle aidait les passants à se mettre en sécurité. Qu'est-ce que vous lui reprochez ?
- J'ai dit, vous restez où vous êtes bordel !
Lily fronça les sourcils.
- Remus la connait ? murmura-t-elle. Tu la connais ?
- Jamais entendu parler de ma vie, non, fit James, perplexe.
Ignorant les ordres des Aurors, ils s'élancèrent vers leurs amis et saisissent chacun Sirius par un bras. Il s'affaissa presque en avant avec un grognement de douleur.
- Eh, doucement Patmol...
- Merci pour ta clairvoyance, j'allais me mettre à courir un marathon, rétorqua-t-il, sardonique. Putain, elle m'a pas loupée, cette tarée.
- Qui ça ?
- A ton avis ?
James grimaça. Du coin de l'œil, elle le vit lui mimer « Bellatrix » du bout des lèvres et elle comprit soudain mieux l'état de Sirius. Libéré de son fardeau, Remus s'était encore avancé à la rencontre du groupe d'Aurors et était en train de parlementer avec Alice, visiblement tendu. Lily entendit à peine ce qu'il disait. Elle était plutôt concentrée sur Milicent Bagnold sur le côté qui venait de faire signe à Aloyssius Abbot de s'approcher. D'un doigt, elle lui pointa Remus. Ou plutôt son épaule.
Sa chemise déchirée laissait entrevoir sa peau, pile à l'endroit où une longue cicatrice courrait. Une cicatrice reconnaissable facilement car elle marquait la peau de tous les autres suspects, alignés contre le mur un peu plus loin et qui attendaient d'être emmenés au Ministère.
Lily sentit une chappe de plomb lui tomber un peu plus au creux de l'estomac.
- James... prévint-elle.
Mais trop tard. L'Auror se dirigeait déjà vers Remus et leva sa baguette.
- Immobulus !
- Eh ! rugit Sirius.
James voulut faire un bon en avant, mais son meilleur ami se mit à tanguer et elle n'était pas assez forte pour le maintenir debout toute seule. Touché, Remus bascula à côté de la dénommée Ornella. Alice Londubat tenta de s'interposer.
- Abbot, mille gargouilles, qu'est-ce que tu fiches ?
- C'en est un aussi. Un loup-garou. Regarde, là.
Elle lui renvoya un regard incrédule, puisse observa l'épaule de Remus. Elle blêmit. De là où elle se trouvait, coincée à soutenir Sirius avec James, Lily eut envie de pleurer. Le secret de Remus au sein de l'Ordre avait tenu plus d'un an, c'était déjà miraculeux en soit, mais elle refusait qu'il soit exposé comme ça. Elle s'apprêtait à protester, indignée, quand Alice capta soudain leur présence et secoua imperceptiblement la tête.
Lily serra les mâchoires. Ne pas l'attirer l'attention sur eux, toujours la même rengaine. Mais là, il s'agissait de Remus...
- Ils peuvent pas faire ça, gronda James. Faut qu'on fasse quelque chose.
- Et quoi ? Attaquer le Bureau des Aurors au complet ? répliqua-t-elle, aussi frustrée que lui. Souvenez-vous des consignes, si on se fait prendre, quelqu'un nous fera sortir. Bones, Benjy, les Londubat...
- En attendant, c'est eux qui l'embarquent ! siffla Sirius, furieux.
Il avait raison. Frank, revenu de son tour sur le Chemin de Traverse, était en train de relever la fameuse Ornella avec Aloyssius Abbot alors qu'Alice et une de ses collègues s'occupaient de Remus. Elle crut reconnaître la femme de Bones, elle aussi Auror. L'ironie lui donna envie de pleurer.
Restée en retrait, Milicent Bagnold eut un hochement de tête approbateur.
- Très bien, félicita-t-elle. N'oubliez pas : vous les prenez, tous. Pas d'exception.
**
*
Le QG était plongé dans le calme et pour cause, Lily était rentrée seule. Sirius avait eu besoin d'aller à Ste-Mangouste lui aussi et James, après s'être assurée quatre fois qu'elle n'avait rien, l'avait accompagné, trop remonté de toute façon par l'arrestation de Remus pour retourner sagement au QG.
A peine avait-elle passé la porte que la fatigue était tombée sur ses os, faisant souffrir son corps mis à mal, mais elle n'avait pas eu le loisir de s'effondrer. Emmeline et les frères Prewett étaient là et attendaient des nouvelles. Sidéré, elle les avait dévisagés.
- Mais pourquoi vous n'êtes pas venu en renforts ? s'était-elle récriée, rongée par l'épuisement et l'angoisse. Vous-Savez-Qui était là avec une bande de loups-garous et de mangemorts, on s'est fait prendre par tous les côtés !
Emmeline s'était montrée pragmatique, mais apaisante. Ils étaient tous au travail au moment de l'assaut, une bonne partie de l'Ordre était déjà sur place, ça n'aurait pas eu de sens qu'ils débarquent à leur tour. Il y avait des choses que même Maugrey, les Londubat et Benjy ne pouvaient pas expliquer si d'un coup tous les membres de l'Ordre venaient se battre avec la Brigade et les Aurors. Ste-Mangouste avait déjà suffisamment éveillé les soupçons. Lily n'avait pas aimé cette explication. Mais elle avait dû l'accepter.
Plus calmement, ils s'étaient donc rassemblés autour de la table de la cuisine et Gideon avait allumé une bouilloire – son maximum en capacité culinaire – puis lui avait tendu une tasse de thé.
- Donc attends... t'es sûre de toi ? lui demanda-t-il pour la énième fois. Lupin est aussi un... ?
- Un loup-garou, oui, s'énerva-t-elle en lui arrachant presque la tasse des mains. Et il t'a aussi sauvé les fesses une paire de fois, il a fait les mêmes missions de surveillance que toi, alors c'est bon. Passe à autre chose.
Mais elle vit bien que son injonction fut reçue avec un regard sceptique. De l'autre côté de la table, même Fabian fit une moue qui voulait tout et rien dire.
- Je vous préviens, gronda-t-elle, on va faire sortir Remus de là et vous n'aurez pas intérêt à dire quoique ce soit. Parce que là, c'est facile, c'est juste moi. Mais essayez la même chose en face de James, Sirius et Peter et vous allez voir si vous vous en sortez sur vos deux jambes !
Elle pouvait reprocher beaucoup de choses aux Maraudeurs – leurs neurones qui semblaient d'un coup se diviser par quatre si on les mettait dans la même pièce notamment – mais elle avait toujours apprécié leur côté protecteur envers Remus, le premier parmi les quatre à avoir été son ami.
- Calme-toi, Ev... Potter, se rattrapa Fabian. Mais on a le droit de s'interroger sur un profil pareil dans l'Ordre. Tu dis que Dumbledore était au courant ?
- Oh bon sang, oui ! Dumbledore et Maugrey. Qu'est-ce que tu veux de plus comme caution ?
- Je sais pas... C'est juste que je trouve ça bizarre. La fille, là, sur le Chemin de Traverse. T'as dit qu'il la connaissait ? Ornella ? Ca vous dit pas quelque chose...
- Si, répondit Gideon. Je crois que son nom circule dans les cercles de lycanthropes radicaux.
Emmeline haussa un sourcil, visiblement contrariée par l'information. Lily se leva d'un bond et sa tasse de thé manqua de se renverser, chancelante.
- Ca suffit, si c'est pour entendre ça, je préfère aller me reposer. Ou prendre une douche, j'ai encore le sang d'une de mes meilleures sur les mains.
Avec un regard noir, elle quitta la cuisine d'un pas ferme, non sans capter au passage l'air coupable d'Emmeline et celui contrit de Fabian. Gideon, lui, fut fidèle à lui-même :
- Elle a ses règles ou quoi ?
- Oh imbécile ! le fustigea Emmeline.
Ce fut le dernier bout de conversation qu'elle entendit avant de monter l'escalier et elle mit un point d'honneur à taper ses pieds le plus fort possible sur les marches.
Arrivée en haut, elle expira jusqu'à vider l'air de ses poumons. Rationnellement, elle savait que ça ne servait à rien de diffuser ses émotions de la journée sur les frères Prewett, mais force était de constater que ça faisait du bien. Et elle n'avait pas menti, elle avait vraiment besoin d'une douche. Le sang à moitié séché de Dorcas lui couvrait presque tous les avant-bras et maintenant que l'adrénaline était retombée, elle sentait des petites douleurs partout, signe qu'elle avait dû se couper sur du verre quand Greyback l'avait envoyé à terre.
Sans toucher la poignée de porte, elle ouvrit le battant de la salle de bain d'un coup d'épaule. Immédiatement, le petit miroir craquelé juste en face lui renvoya son visage, pâle à faire peur. Elle ne parlait même pas de ses cheveux, emmêlés et plein de poussière, ni de sa robe déchirée. Pas étonnant qu'elle passe pour une hystérique. Pour une fois, elle ressemblait vraiment à une sorcière.
Défaite, elle entreprit d'abord de passer ses mains sous l'eau. Aussitôt, le lavabo se colora d'une teinte rosée qui s'écoula dans les canalisations au fur et à mesure qu'elle frottait avec le savon. Les mains à peu près propres – ou en tout cas qui ne laisseraient plus de traces digne d'un mauvais film d'horreur derrière elles – elle enleva ensuite sa robe et la laissa glisser au sol sans cérémonie.
Là encore, son corps n'était pas fameux. Elle avait perdu du poids depuis son entrée dans l'Ordre, mais là, ses hanches s'étaient considérablement rétrécies, à tel point qu'elle pouvait distinguer la forme de ses os pelviens qui tendaient sa peau. Elle n'était pas non plus bien épilée. Dorcas en aurait été horrifiée, elle qui lui disait toujours de mettre de la crème hydratante et de prendre soin d'elle, même en temps de guerre. Elle soupira, résignée. James ne lui avait fait aucune remarque de toute façon. Et même si elle lui aurait sûrement envoyé un sortilège cuisant s'il avait osé, elle lui en était toute de même reconnaissante.
Décidant qu'il valait mieux ne pas s'attarder sur son reflet, elle se détourna et commença à tirer le rideau de douche. Mais alors qu'elle s'apprêtait à y mettre un pied, la remarque de Gideon raisonna en écho avec l'observation de son corps.
Elle a ses règles ou quoi ?
Elle se figea. Combien de fois avait-elle pesté contre le rappel mensuel de sa féminité cette année ? A croire que Dame Nature s'amusait à lui envoyer toujours au mauvais moment, comme les jours chargées à Ste-Mangouste à courir après Mrs Winger à faire la tournée des patients, ou lors de ses longues heures de surveillance à rester planter devant la maison de Millicent Bagnold ? Ah ça, c'était un problème auquel Maugrey ne pensait jamais en faisant ses planning de missions !
Mais là, ça faisait un moment qu'elle ne s'était pas plaint... Dorcas et Marlène aimaient bien en parlé avec elle – Alexia n'avait pratiquement jamais les siennes à cause de sa maladie – et là aussi leurs dernières conversations devaient dater... d'avant le mariage ? Soit cet été ? Le mois de novembre venait maintenant de commencer, Halloween était tout juste passé...
Une vague de panique la submergea.
- Oh Merlin, non, non... Respire, Lily, allez.
Se parler à elle-même n'était sûrement pas la meilleure chose à faire, mais ça l'aidait à rester concentrée. Ce n'était pas la première fois qu'elle se faisait une frayeur : quelle fille n'avait angoissée face à un retard ? Mais là, ce n'était pas quelques jours... C'était deux mois et demi, presque trois !
Evidemment, son estomac choisit ce moment pour se retourner et elle retint la nausée qui fleurissait en elle. Ça ne voulait rien dire. C'était psychosomatique. Elle avait envie de vomir depuis ce matin, mais c'était à cause de la fatigue, du choc constant, du combat de la journée... Son corps arrivait à bout, il lui faisait ressentir depuis des semaines.
Les mains tremblantes, elle s'enroula dans une serviette et ne vérifia même pas que Gideon et Fabian étaient toujours en bas. Elle ouvrit la porte de la salle de bain, puis traversa le couloir au pas de course, frissonnante à cause des courants d'air. La chambre d'Alexia et Dorcas était juste là, à côté de la sienne et James. Elle savait qu'elles avaient des potions-test. Juste pour être sûre d'en avoir sur la main. Alexia avait été assez traumatisée par toutes les histoires d'héritier de Sirius et des Black pour ne pas prendre ses précautions. Sans scrupule, elle ouvrit donc plusieurs tiroirs, écartant les petites fioles bleues qui contenait le remède d'Alexia. Dans le deuxième, elle les trouva enfin. Celles avec un élixir transparent. Elle en attrapa deux en se promettant de les remplacer ou de rembourser Alexia, puis courut à nouveau s'enfermer dans la salle de bain.
- Lily ? appela Emmeline depuis le rez-de-chaussée. Ça va ?
- Quoi ?
Son cri étranglé résonna un peu trop fort contre les murs carrelés.
- Je disais, ça va ? Je t'entends courir partout. T'as besoin d'aide médicale ? T'as été blessée finalement ?
- Oh... Hum, non, non ! détrompa-t-elle avec un temps de retard, ses deux fioles pressées contre elle. J'avais juste... oublié mon shampoing dans ma chambre. Tout va bien !
- D'accord... Dis-moi si t'as besoin, je reste dîner au QG.
- Pas de problème !
La respiration haletante, elle attendit, figée, jusqu'à entendre Emmeline s'éloigner. Elle s'affaissa ensuite à même le sol, tremblante.
- Allez, tu peux le faire... s'encouragea-t-elle. Tu pourras même arracher les yeux de Potter si... si...
Elle n'osa pas émettre l'hypothèse à voix haute. Avec fébrilité, elle ouvrit et une des deux fioles, puis se releva pour entrer sous la douche. Merlin, elle n'avait jamais fait ça... Mais elle se rappelait encore Dorcas lui expliquant patiemment la méthode sorcière : si la potion se colorait en violet, c'était positif. Si la coloration ne changeait pas, c'était négatif. Rien de bien sorcier en somme. Et ça tombait bien, elle n'avait pas pu aller aux toilettes de la journée.
Elle se servit donc des deux fioles successivement – deux test valaient mieux qu'un – avant de les déposer sur le bord du lavabo et d'allumer la douche. Il fallait quelques minutes pour que la potion réagisse ou non. Autant enlever toute la poussière et le sang de son corps entre temps.
L'esprit embrumé, elle se lava mécaniquement, puis ramassa la serviette qu'elle l'avait laissé traîner. Son corps s'hérissa de chair de poule alors qu'elle attendait, les yeux fixés sur les deux petites fioles en équilibre.
- Pitié, pitié... marmonna-t-elle dans un souffle.
Elle ne savait même pas pourquoi elle suppliait. Pour enlever la panique soudainement apparue dans son ventre ? Ou pour la transformer en autre chose ? Elle n'eut pas le temps de se décider. Devant elle, les deux fioles changèrent quasiment au même moment et elle fondit en larmes, seule, dans sa salle de bain.
Le monde de Lily venait de se colorer de violet.
***********************************
Et voilà ! On avance, on avance. Deuxième confrontation avec Voldemort, arrestation de Remus, et un test de grossesse positif. Let's go !
Il est possible que je poste directement samedi prochain et que je n'attende pas deux semaines comme j'ai repris de l'avance. Donc on se revoit très vite ;)
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