Tome III - Chapitre 22 : Mon vieux
Hello everybody. Comment ça va cette semaine ?
Personnellement, ça a été un peu rude, mais je suis touchée de poster ce chapitre précisément cette semaine... J'appelle ça une sorte de destinée ou d'hommage, mais on va dire qu'il rejoint malheureusement la réalité aujourd'hui. J'aimerais dédié ce chapitre à mon papy qui n'a jamais cessé de me répéter, assis en bout de table à présider les tablées du dimanche, "si la vie veut bien encore de moi, alors je suis l'homme le plus heureux du monde parce que je suis entouré de ma famille".
Il avait raison. On a eu les plus belles années, la plus belle des familles... Et c'est encore une page de mon enfance que j'ai l'impression de tourner alors qu'il s'en est allé...
Le titre de ce chapitre est d'autant plus symbolique qu'il fait référence à une superbe chanson : Mon vieux de Daniel Guichard. Si vous ne la connaissez pas, je vous en supplie allez l'écouter...
Elle m'a toujours donné des frissons et est encore plus chargée d'émotions aujourd'hui car c'est cette chanson que nous avons passé à l'enterrement de mon autre grand-père, parti il y a deux ans. Quand j'ai écris ce chapitre, c'était à lui que je pensais. Aujourd'hui, je pense à l'autre. D'une certaine façon, j'aime à penser qu'ils se sont retrouvés quelque part à jouer à la belote, et peut-être que moi je peux les retrouver à travers mes mots.
Donc voilà, ce chapitre m'est doublement important même si je ne l'avais pas prévu... J'espère qu'il vous touchera et que vous l'aimerez. Il est donc dédié à mes deux grands-pères que je remercie pour leur amour et la plus belle des enfance.
Et avant de vous quitter, je voulais aussi remercier infiniment Perri, Cazo, et Clem pour leur soutien cette semaine <3
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Chapitre XXII : Mon vieux
- We wish you a Merry Christmas; We wish you a Merry Christmas; We wish you a Merry Christmas and a Happy New Year !
Les joues mouillées de larmes, Lily pressa le pas, tête rentrée dans les épaules pour éviter la neige qui lui revenait dans la figure à cause du vent glacial de décembre. Du 25 décembre pour être précis. En ce jour de fête, elle aurait aimé avoir le cœur à rire, elle aurait aimé s'arrêter devant le chœur d'enfants en train de chanter pour les passants, mais au lieu de ça elle accéléra le pas. La vitrine dissimulant Ste-Mangouste était juste en face et elle traversa, la vision brouillée. Elle n'aurait même pas dû travailler aujourd'hui. Elle avait fait une nuit cette semaine et avait donc deux jours de récupération en plus de son congé du jour de noël. Elle n'avait pas prévu de les passer ainsi...
Le lettre était arrivée ce matin avec les premières lueurs de l'aube et James était parti dans la seconde. Lily, elle, était restée en retrait pour préparer des affaires avant de partir du QG à son tour. Engourdie par le froid et par ses émotions, elle déclina l'objet de sa vitrine au mannequin rétro dans la vitrine et pénétra dans l'hôpital. Même un jour de fête comme celui-ci, le hall d'accueil était bondé. Lily eut une pensée pour ses collègues de permanence. Ils allaient avoir du travail... Elle repéra une femme, assise avec un enfant d'une dizaine d'année dont la tête était enfoncée dans un pudding glacé, et se demanda non pas pour la première fois ce qui pouvait bien se passer sous certains toits sorciers. La vision aurait presque pu l'amuser si elle n'avait pas su que ce genre d'accident engorgeait leurs services plus qu'autre chose.
Avec un soupir, Lily hésita à passer outre le protocole pour les visiteurs – après tout elle travaillait ici en tant que guérisseuse stagiaire – mais elle se résolut à faire la queue comme tout le monde. L'attente lui parut vite insupportable, elle voulait retrouver James, être là pour lui... Peut-être que Sirius était déjà là ? Elle lui avait envoyé un patronus dès que la lettre était arrivée, mais n'avait pas eu de nouvelles depuis.
Au bout de trente minutes, elle arriva enfin devant la sorcière chargée d'accueil et reconnut avec soulagement Pandora Van Houten, bientôt Lovegood comme en témoignait sa bague de fiançailles. Avec leur un an de différence, elle avait terminé son année de stagiairisation en juin dernier et Lily avait discuté quelques fois avec elle lors de ses pauses. Pandora était une sorcière douée, mais... singulière. Ses grands yeux, un peu globuleux, semblaient toujours fixer quelque chose avec curiosité et ses cheveux d'un blond très pâle, manifestation de son héritage nordique si Lily avait tout compris, n'étaient presque jamais coiffés. Pandora lui avait de toute façon confiée qu'elle ne resterait plus longtemps à son poste : elle préférait travailler les sortilèges sans le carcan strict de l'hôpital et ce n'était sûrement qu'une question de mois avant qu'elle ne présente sa démission. Cette décision avait dû revenir aux oreilles de son chef de service pour qu'elle se retrouve à l'accueil du hall, poste d'ordinaire réservée aux secrétaires et non aux guérisseurs. En la voyant pourtant, Pandora n'eut pas l'air ennuyée du tout et afficha un grand sourire.
- Oh Evans ! Tu travailles aujourd'hui ?
- Bonjour, Pandora. Non, non je ne travaille pas. A vrai dire, je... viens voir quelqu'un. Fleamont Potter, il a dû être admis au service des virus et microbes magique. J'aurais besoin de son numéro de chambre, s'il te plait.
Le sourire de Pandora s'effrita.
- Oh... C'est de la famille de James Potter ? devina-t-elle.
- Son père, oui. Je voudrais aller les rejoindre.
Elle n'avait pas le courage d'expliquer la maladie de Fleamont alors que ce dernier vivait certainement ces derniers instants. Pandora parut comprendre et s'empressa d'ouvrir le registre magique qui se mettait automatiquement à jour dès qu'un chef de service inscrivait un nouveau patient dans la réplique qu'il possédait.
- Chambre 203, dit Pandora en relevant la tête. Deuxième étage... Enfin, tu connais...
- Merci. Et joyeux noël.
- Oh... Joyeux noël à toi aussi, Evans. Bon courage.
Lily ne fut pas sûre de réussir à vraiment sourire. Avec empressement, elle sortit de la queue pour se diriger vers les étages. Elle n'allait pas souvent au deuxième ; depuis quelques mois elle était davantage affectée au troisième étage, celui du service des empoisonnements par potions et plantes. C'est là que ses talents en potions étaient le plus utiles, ce que sa tutrice avait vite remarqué. Arrivée au deuxième étage, elle vit d'ailleurs tout de suite cette dernière. Lunettes perchées dans ses cheveux frisés, son accent irlandais résonnait dans le couloir :
- Transfère-moi ce patient pour libérer un lit, tu veux ? Et dit au directeur que j'ai besoin de passer une nouvelle commande de champiflleurs, je ne peux pas tout ramener de mon jardin !
Lily s'approcha. Judith Winger était une petite femme, mais une petite femme impressionnante à ses yeux. Elle savait que plusieurs chefs de service se moquaient d'elle allégrement car elle pouvait se montrer un peu excentrique dans ses idées et sa gestion du service. En septembre dernier, elle avait encore tenté de prouver que la branchiflore pouvait être utilisée pour traiter les maladies respiratoires dues à des infections, mais le patient test avait eu une réaction allergique... L'essai avait tout de suite été stoppé, ce que Lily trouvait encore frustrant. Elle aurait aimé étudier l'idée au regard de la mutation du dragon, la maladie d'Alexia. Penser à Alexia lui fit malheureusement penser à Fleamont et une boule se logea dans sa gorge. Petite, les dragons l'avaient fait rêver. Plus grande, en tant que sorcière, elle avait trouvé les illustrations de ses créatures fascinantes. Aujourd'hui adulte et en formation pour devenir médicomage, elle ne pouvait s'empêcher d'être en colère contre eux de manière tout à fait irrationnelle. La mutation respiration et la dragoncelle venaient toutes les deux de ces animaux dont les maladies, rares, avaient une certaine tendance à développer des variants transmettables aux sorciers. Personne ne savait bien pourquoi. Norbert Dragonneau, un magizoologiste de renom, s'était penché sur la question sans encore parvenir à trouver une explication.
- Tiens ! Ma stagiaire préférée ! lança soudain Mrs Winger en l'apercevant. Qu'est-ce que tu fais là un jour de noël ?
Lily resserra sa prise sur son sac. Elle se sentait brusquement comme une petite fille perdue et sa tutrice le remarqua car elle fit le tour du bureau pour venir vers elle. Malgré sa petite taille, Lily avait toujours trouvé impressionnant sa façon de se mouvoir avec grâce. Elle savait qu'elle était une animagus et se transformait en cygne. Peut-être que son animal intérieur se reflétait dans ses gestes... Pas que James ait particulièrement la démarche d'un cerf pourtant, mais Lily n'y connaissait pas grand-chose.
- Et bien, tu en fais une tête ! Je ne t'ai pas forcé à venir travailler pourtant, ma belle.
- Je ne suis pas là pour travailler... Je viens voir un patient. Fleamont Potter. Il a été admis cette nuit... Je voulais vous demander si vous aviez des nouvelles.
- Oh... je vois.
L'expression de Mrs Winger se fit soudain grave.
- Viens avec moi.
Elle retourna vers le bureau principal et Lily la suivit. Là, elle se saisit des derniers rapports déposés par les médicomages du service et chaussa ses lunettes.
- Alors, voyons voir... Fleamont Henry Potter, soixante-quinze ans, dragoncelle aigu depuis plusieurs mois attrapé suite à une baisse du système immunitaire et diverses blessures. Tout juste retraité... Admis cette nuit à 23h46... Inconscient... Pas d'amélioration depuis...
- Merlin...
- Comme tu dis, ma belle. Je suis désolée, mais ça ne paraît pas bon. Tu sais aussi bien que moi qu'on ne peut plus faire grand-chose au bout d'un moment...
Elle le savait, oui. Elle l'avait même vu sur quelques patients, mais il s'agissait du père de James et tout était différent. Une pierre glacée dans l'estomac, elle hocha mécaniquement la tête.
- Merci... je vais le aller voir quand même...
- Bien sûr. Tu connais le numéro de chambre ? demanda-t-elle en feuilletant à nouveau le dossier.
- Pandora me l'a donné à l'accueil, oui.
- Parfait. Si tu as besoin, fais-moi appeler. A plus tard, ma belle.
Mrs Winger lui pressa le bras, réconfortante, puis s'éloigna toujours de cette même démarche grâcieuse. Ses cheveux frisées rebondirent sur ses épaules. Lily se concentra sur le mouvement en guise de distraction jusqu'à ce qu'elles disparaissent à l'angle et inspira pour se calmer. Elle se mit alors à remonter le couloir. C'était étrange de se retrouver entre ses murs en étant de l'autre côté de la barrière... Elle eut envie d'en pleurer, mais se retint. Si elle commençait maintenant, elle n'arrivait plus à s'arrêter et elle n'était même pas arrivée. Merlin, soixante-quinze ans. C'était à la fois jeune et vieux. Ses propres parents étaient bien plus jeunes, ça lui faisait bizarre de se dire que le père de James avait déjà cet âge-là et pourtant à bien y regarder ce n'était pas grand-chose. Il venait tout juste de prendre sa retraite après tout. Elle avait encore du mal à se dire que les sorciers vivaient bien plus longtemps que les moldus, une spécificité que la médecine n'avait pas non plus encore réussi à expliquer.
Lily repéra la chambre 203 avant même de s'en approcher : James et Sirius étaient postés devant, le regard dans le vague. Ils se tournèrent vers elle en l'entendant arriver.
- Désolée, j'ai fait aussi vite que j'ai pu... commença-t-elle.
- Oh Merlin, t'es là !
James la coupa en l'enlaçant dès qu'elle fut à sa hauteur. Elle lui rendit son étreinte en une seconde, l'estomac encore plus retourné. Il tremblait presque entre ses bras. Apaisante, elle passa sa main dans ses cheveux et le laissa enfouir son visage dans son cou. Sans bien savoir ce qu'elle disait, elle se mit à chuchoter des paroles réconfortantes. Elle savait qu'elle ne pourrait rien faire pour lui épargner la peine et le chagrin qui le rongeaient déjà, mais être là était un minimum. Par-dessus l'épaule de James, elle jeta un coup d'œil inquiet à Sirius. Elle savait pertinemment qu'il se sentait aussi mal que son meilleur ami. Fleamont était un père pour lui aussi, bien plus qu'Orion Black, et elle lui tendit la main instinctivement. Sirius eut un sourire triste avant de lui prendre. Liée ainsi aux deux garçons, elle tenta de leur insuffler son soutien en silence.
- Les médicomages disent qu'il ne se réveillera sûrement pas... murmura James d'une voix étouffée. Que les traitements ne sont plus efficaces et que la maladie attaque trop les cellules...
- Je suis désolée, James...
- Je sais que ça allait arriver... Mais pas aujourd'hui...
Elle le pressa un peu plus contre elle. Il avait raison, aujourd'hui était cruel. Si la lettre n'était pas arrivée ce matin, ils auraient dû passer voir les Potter pour déjeuner, juste quelques heures. Il ne fallait pas fatiguer Fleamont, mais ça aurait été l'occasion de célébrer un peu. Les larmes aux yeux, James lui avait avoué hier qu'il était conscient que ça serait le dernier noël avec ses parents et elle en voulut soudain à la terre entière de lui enlever ça.
- Je t'ai ramené quelques affaires, souffla-t-elle. Si tu veux rester ici avec lui... Toi aussi, Sirius. Enfin, il n'y avait pas grand-chose au QG, mais t'avais laissé quelques vêtements, je me suis permis de fouiller...
- Et alors, Evans, t'as trouvé des choses inavouables dans mes tiroirs ?
Elle sourit à travers ses émotions.
- Non, j'ai juste découvert que tu pliais comme un enfant de quatre ans. Même un sort de pliage, c'est trop pour toi ?
- J'ai toujours eu un elfe pour le faire.
- Pauvre enfant privilégié, se moqua-t-elle.
Il lâcha sa main pour la porter à sa poitrine, faussement indigné. James s'écarta d'elle en riant même si ses yeux étaient toujours emplis de larmes qui refusaient de couler.
- Privilégié ? répéta Sirius. T'as pas vu l'elfe en question, Keattur est une plaie, un monstre contre-nature, une...
- J'ai compris, c'est bon. Je te donnerai des cours de rangement quand on rentrera au QG.
- Le rêve...
La distraction parut faire du bien à James, l'espace de quelques secondes, et Lily renvoya un regard plein de gratitude à Sirius. Malheureusement, le répit fut de courte durée car la porte de la chambre s'ouvrit soudain en grinçant sur ses gonds. Elle découvrit alors Euphemia Potter et retint une exclamation étouffée de justesse. Elle n'avait plus rien à voir avec la femme qui l'avait accueilli la première fois chez elle l'année passée pendant les vacances. Amincie, son visage s'était creusé et avait pris une teinte tout sauf naturelle qui tirait vers le verdâtre, mais surtout elle avait l'air épuisé par la vie. Elle n'était pas maquillée, ni vraiment coiffée, et ses mèches se décoloraient de plus en plus. Même la flamme dans ses yeux – cette petite étincelle malicieuse et joyeuse qui ne pouvait appartenir qu'à la femme ayant élevée James Potter – s'était réduite à une cendre encore rougeoyante mais sur le point de s'éteindre.
- Oh les garçons, vous êtes encore là... Ah et Lily ! s'exclama-t-elle. Tu n'étais pas obligée de venir, ce n'est pas un spectacle très joyeux... Je suis désolée, je ne suis pas vraiment présentable en plus, je suis partie précipitamment cette nuit et...
Lily leva une main pour l'interrompre, le cœur pris dans un étau.
- Ce n'est rien, Mrs Potter, s'empressa-t-elle de la rassurer. Vraiment, ce n'est pas l'important du tout. Je peux même aller vous chercher des affaires si vous voulez.
- C'est gentil, mais ça ira. Notre elfe va s'en charger. Tu es sûre que tu peux être là ? (Elle recula soudain, l'air effrayé). Je ne voudrais pas te contaminer, oh Merlin...
- Non, non ! J'ai fini de prendre le remède de Gorsemoor, je suis immunisée. Tout va bien.
- Oh... C'est bien, alors, c'est bien...
D'un air distrait, elle hocha la tête, mais Lily vit bien qu'elle était déjà retombée dans ses soucis et ses inquiétudes. Elle jeta un coup d'œil derrière elle, comme si elle pouvait voir son mari à travers la porte, puis poussa un soupir las.
- Il ne s'est toujours pas réveillé... murmura-t-elle. Je me dis que c'est pour le mieux, il ne souffre pas comme ça.
- Maman... s'étrangla James.
- Oui, je sais, pardon, mon chérie, pardon. Tu veux aller le voir un peu ? Toi aussi, Sirius ?
Sirius parut mal à l'aise et regarda James avec incertitude.
- Hum... tu devrais peut-être le voir toi d'abord, je...
- N'importe quoi, tu viens avec moi. Tu fais partie de la famille oui ou non ?
Lily sourit. Au moins, il n'avait pas perdu son esprit têtu et Euphemia eut l'air elle-même touchée. Elle encouragea Sirius en le poussant légèrement en avant, puis les deux garçons entrèrent dans la chambre. Avant que la porte ne se referme, elle vit l'expression de James : il paraissait se préparer à aller mener un combat, déterminé, et son cœur se brisa un peu plus en sachant qu'il ne pourrait pas gagner celui-ci. Restée seule dans le couloir avec Euphemia, elle essaya de ne pas trop la fixer malgré son apparence et chercha quelque chose à dire. Tout lui paraissait vain d'un coup. Elle réalisa qu'elle ne s'était jamais retrouvée toute seule avec la mère de James : il y avait toujours eu ce dernier, un des Maraudeurs, voire Fleamont lui-même. C'était étrange et inconfortable, surtout en pareilles circonstances.
- Vous voulez une chaise pour vous assoir un peu ? proposa-t-elle en laissant ses réflexes de médicomage en formation reprendre le dessus.
- Oui, bonne idée... Je me fatigue de plus en plus, c'est énervant !
- C'est normal, ce n'est pas votre faute. (Elle pointa sa baguette vers le bout du couloir). Accio chaises !
Euphemia la remercia d'un hochement de tête et se laissa tomber sur la chaise en bois qui venait d'apparaître devant elle. Lily l'imita. Assise ainsi face à face, elle ne pouvait pas échapper aux traces de la maladie qui gangrenaient l'énergie vitale d'Euphemia. Plus jeune que son mari, elle tenait mieux le choc, surtout qu'elle l'avait contracté plus tard, mais l'inévitable était déjà visible et Lily eut soudain envie de pleurer. Personne ne pourrait rien faire, mais c'était injuste de devoir voir ses parents partir à quelques mois d'intervalle : elle craignait que James ne se relève pas tout de suite de ce drame alors même que la guerre lui en demandait déjà beaucoup.
- Tu trouves que je suis égoïste, n'est-ce pas ? déclara soudain Euphemia, les yeux fixés sur le vide.
- Quoi ? Non, bien sûr que non...
- Vraiment ? Certains ne se gênent pas pour le penser pourtant. Ils doivent se demander pourquoi j'ai décidé de rester auprès de Fleamont en sachant qu'il n'y avait aucune issue possible...
- C'est votre mari, protesta Lily. Vous vouliez rester avec lui !
Euphemia eut un sourire triste et joua avec un anneau d'or à sa main droite. Son alliance.
- C'est vrai... On se l'était promis. « Dans la santé ou dans la maladie, jusqu'à ce que la mort nous sépare ». J'ai toujours cru que je serais celle qui serait laissée derrière, celle qui devrait subir son absence, confessa-t-elle. Fleamont a douze ans de plus que moi, vois-tu. Et avec sa carrière d'Auror, j'ai toujours eu peur de recevoir une funeste nouvelle un jour s'il devait ne pas rentrer de mission... Mais ça ? Non, ça je ne l'avais pas imaginé...
- Personne n'aurait pu...
- C'est vrai aussi. La seule chose qui me réconfortait dans cette idée, c'était que j'aurais été là pour James même si perdions son père. Mais même ça, ce n'est pas possible.
Les larmes aux yeux, Euphemia enfouit sa tête entre ses mains. Elles étaient grêlées par la maladie, à peine recouvertes par les manches de sa robe, et Lily eut soudain du mal à réprimer l'émotion qui lui gonflait la poitrine, comme un être vivant qui s'agitait en elle et y plantait ses griffes. C'était une douleur déstabilisante contre laquelle elle ne pouvait pas lutter.
- James ne sera pas tout seul, souffla-t-elle. Vous le savez, il est bien entouré, et je vous promets qu'on restera tous avec lui... Les Maraudeurs seront là...
- Je sais, je sais, et je remercie Merlin tous les jours depuis l'année dernière qu'il ait des amis pareils. Qu'il t'ai toi aussi, évidemment.
Même si le compliment lui réchauffa le cœur, il ne chassa pas la tristesse. Euphemia se pencha alors vers elle bien qu'elle n'eut aucun mal à l'entendre dans ce couloir désert.
- Tu sais, Lily, si j'ai pris cette décision de rester auprès de Fleamont malgré les risques, je l'ai fait aussi à cause de toi, avoua-t-elle avec douceur.
- De moi ?
- Et oui. Parce que j'y ai réfléchi, tu penses bien. Après le choc de l'annonce, je me suis posée pour me demander si c'était la bonne décision, j'aurais parfaitement pu encore reculer et me mettre en quarantaine. Fleamont aurait compris. Si je l'avais fait, ça n'aurait pas été pour moi en revanche, ça aurait été pour mon fils. (Elle eut un sourire léger, songeuse). Mais j'ai réalisé qu'il était grand maintenant et qu'il avait sa vie... Il t'avait toi, surtout. Prendre conscience de ça m'a fait moins peur, je savais que je ne le laissais pas seul.
- Oh Euphemia...
Le « Mrs Potter » n'avait pas réussi à franchir la barrière de ses lèvres pour la première fois. Le prénom, lui, était monté en elle instinctivement et le visage d'Euphemia s'illumina malgré son teint maladif. Elle avait dû être belle femme plus jeune. Touchée au-delà des mots, Lily mit de côté son malaise et sa tristesse pour lui prendre la main dans un élan spontané. La mère de James la laissa faire avec bienveillance.
- Je peux t'avouer quelque chose, Lily ? lui demanda-t-elle alors.
- Bien sûr.
- Je pense que j'ai fait partie malgré moi de ces mères qui pensaient qu'aucune fille ne serait assez bien pour leur fils. (Elle rit d'elle-même en roulant des yeux). Je m'étais promis de ne pas l'être pourtant, mais il a grandi si vite, loin de moi... Tu sais, j'ai longtemps cru que je n'aurais jamais d'enfant, ça a été très difficile, se justifia-t-elle en guise d'explication. J'ai connu Fleamont quand j'avais vingt-neuf ans, c'était tard à l'époque et mes parents se désespéraient. Ils ont retrouvé le sourire lorsque je leur ai présenté mon fiancé, certes plus âgé que moi mais qui avait fait fortune il y a plusieurs années. Je ne le savais même pas quand je l'ai rencontré pourtant, il était déjà Auror.
Lily sourit. La carrière de Fleamont Potter ne cessait jamais de l'étonner et il était la preuve vivante qu'un chemin n'était jamais tracé, voire qu'on pouvait toujours se réinventer. Il avait en commun avec elle une passion pour les potions et il s'était tourné vers cette branche à la sortie de Poudlard. A tout juste vingt-quatre ans, il avait alors inventé ce qui allait quadrupler la fortune de sa famille, sa fameuse lotion capillaire Lissenplis. Autant dire que même cette découverte pourtant prestigieuse n'avait rien pu faire pour les épis de James ! Quelques années plus trad, Fleamont s'était pourtant lassé des potions et du commerce : il avait changé de vie et avait passé le concours d'entrée au Bureau des Aurors. Travailleur acharné, il s'y était élevé jusqu'au rang de second en chef, puis chef pendant deux ans avant de prendre sa retraite à cause de sa santé déclinante.
- Tout ça pour dire qu'on a attendu longtemps avant d'avoir un enfant, reprit Euphemia avec nostalgie. J'avais quarante-quatre ans quand James est arrivé, la grossesse et l'accouchement ont été très risqués... C'était mon bébé miracle.
- Un miracle sacrément énergique.
- J'admets. Je pense qu'il a essayé de compenser le fait d'être seul dans notre grande maison. Même si j'essayais de lui tenir compagnie, je ne pouvais pas remplacer les enfants de son âge et Poudlard lui a fait beaucoup de bien. Sans que je comprenne comment, je me suis d'ailleurs vite retrouvée avec quatre garçons à chaque vacances !
- Si j'étais vous, j'aurais adopté Remus, commenta Lily, amusée.
Euphemia éclata de rire et elle ressentit immédiatement une certaine fierté de lui avoir offert cette parenthèse en ce moment.
- Remus était adorable, mais pas le dernier pour faire une bêtise, tu sais, remarqua-t-elle. Il m'a cassé mes carreaux de cuisine un jour.
- Remus a fait ça ?
- Il s'en excuse encore aujourd'hui.
Cette fois, ce fut Lily qui s'esclaffa. Elle tenta d'imaginer un jeune Remus à l'époque où sa voix n'avait pas encore mué et où il ressemblait à un botruc gringalet. L'image suffit à atténuer un peu la douleur dans sa poitrine. Euphemia balaya l'anecdote de la main.
- Enfin, tout ça pour dire que j'étais assez protectrice de James. Quand il a commencé à parler d'une fille à Poudlard, je me suis inquiétée : il se confiait peu mais je comprenais bien qu'il t'aimait sans que la réciproque ne soit évidente.
Le ton n'avait rien d'accusateur et pourtant Lily s'empourpra, les joues brûlantes.
- Les choses étaient compliquées... se justifia-t-elle. Il était différent et moi aussi...
- Oh je me doute. Ça serait inquiétant si ce n'était pas le cas, tu ne crois pas ? Je pense même que t'aimer l'a poussé à changer, à prendre un peu de maturité. Ce n'était pas une mauvaise chose.
- Non, sûrement... Lui, il m'a appris à relativiser et ne pas m'angoisser sur tout, c'était aussi une bonne chose.
Euphemia lui sourit. Elle avait l'air si maternel ainsi. Lily ne doutait pas qu'elle avait été faite pour être mère et que ça aurait été un drame qu'elle passe à côté de cette facette d'elle-même.
- C'est bien, vous vous équilibrez tous les deux, approuva-t-elle. C'est important.
- Et vous étiez inquiète sur d'autres choses ? Pour James et moi ?
Maintenant qu'Euphemia avait commencé à s'ouvrir, elle devait avouer qu'elle était curieuse et ça avait le mérite de la distraire. Pour un peu, elles auraient pu se trouver dans le salon des Potter autour d'une tasse de thé et non dans un hôpital. Elle aurait tant aimé que ça soit le cas. En face d'elle, Euphemia devait partager son impression, même si elle eut un instant d'hésitation.
- Désolée, si vous ne voulez pas me le dire, je comprendrais...
- Non, non, ce n'est pas ça. Je cherche juste une façon de formuler ma réponse sans que tu ne te vexes.
- A ce point ? fit Lily, surprise et anxieuse à la fois.
Euphemia rit.
- Non, ma chère, ce n'est pas négatif. Ça ne l'a jamais été et ça ne le sera jamais, surtout rappelle-toi s'en. (Elle la regarda droit dans les yeux en poursuivant). J'avoue que ce qui m'inquiétait, c'était que... tu sois née-moldu.
Le réponse, inattendue, frappa Lily avec force et elle se tendit instinctivement. De toutes les familles sangs-purs qu'elle connaissait, les Potter lui avait paru une des plus tolérantes : James ne s'était jamais soucié du statut de sang de quiconque, il se battait contre ceux qui estimaient qu'ils valaient mieux que les autres à cause de la pureté supposé de leur sang. Elle avait cru que ses parents partageaient ses opinions et ils ne lui avaient jamais fait la moindre remarque quand elle les avait vu. Ils l'avaient même reçu avec égard chez eux. Elle ne comprenait pas la réponse d'Euphemia, si à contre-courant de sa personnalité, et cette dernière s'empressa de secouer la tête.
- Oh Lily, non, pas dans ce sens-là. Jamais !
- Mais...
- Quand je dis que le fait que tu sois née-moldu m'a inquiété, je veux dire que c'est l'époque qui a provoqué ce sentiment chez moi, la détrompa-t-elle avec bienveillance. Je connais mon fils. Et je ne suis pas naïve... Je ne sais pas exactement dans quoi vous vous êtes lancés, tous les deux, mais j'ai de bonne raison de croire que ça m'empêcherait de dormir le soir si je le savais. Et toi, plus que d'autres, est au cœur de cette guerre. Tu l'es aussi pour James. Dans son cœur, je veux dire. A partir de là, il n'est pas difficile de savoir qu'il fera tout pour te protéger.
- Je sais me défendre !
- Oh mais je n'en doute pas. Tu es une sorcière exceptionnellement douée, Lily. Ne laisse personne dire le contraire, ne les laisse jamais te diminuer ni nier ce que tu es. Ils n'ont aucun droit, ils ont uniquement de la haine dans leur cœur. Tu es plus forte que chacun d'eux. L'Histoire se souviendra de gens comme toi, ma chère, et même si je ne serai plus là pour le voir, je te le promets.
Solennelle, Euphemia se pencha à nouveau pour reprendre ses mains dans les siennes. L'intensité de son regard la fit frissonner. Cette promesse, c'était celle d'un femme mourante qui croyait en l'avenir. Et si elle pouvait encore le faire, alors Lily se devait de continuer à croire elle aussi, peu importe ce qui allait se passer.
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La neige avait recouvert une partie du cimetière de Godric's Hollow. Les tombes auraient pu paraître paisibles s'il n'y avait pas eu autant de monde rassemblé, enveloppé dans des capes d'hiver pour lutter contre le froid. James avait l'impression de ne même plus le sentir de toute façon. Glacé de l'intérieur, il essayait plutôt de lutter contre la douleur qui lui ravageait la poitrine. Il ne l'avait jamais ressenti, mais elle était sourde, réelle, et en rythme avec la descente du cercueil de son père devant ses yeux. Fleamont Potter était mort la veille, le 27 décembre, et James prit conscience que la douleur qu'il ressentait n'était pas seulement celle de la perte de son père : c'était la perte d'une partie de son enfance. Il n'était plus le « fils de » d'un coup, il était sa propre personne. L'idée le terrifiait. Il ne se sentait pas prêt, il voulait encore son père auprès de lui, il voulait pouvoir se rendre dans son bureau et avoir des dizaines de conversations, même si elles devaient toutes être sur la contraception. Il aurait tout donné pour que ça soit possible.
Entre la buée sur ses lunettes et les larmes dans ses yeux, il ne voyait presque plus rien et il s'accrocha au bras de sa mère. Elle pleurait silencieusement. Malgré son état, elle avait tenu à être présente, droite et fière avec son voile noir et son habit de veuve. La vision lui retournait l'estomac. Autour d'eux, les personnes se recueillaient dans le silence. Elles étaient moins nombreuses que prévu : certaines n'avaient jamais eu la dragoncelle et sa mère étant toujours contagieuse, seuls ceux qui avaient déjà souffert de la maladie plus jeunes avaient pu être présents. C'était peut-être la seule chose de positive. James aurait voulu n'être qu'avec sa mère, Sirius et Lily devant ce cercueil s'il l'avait pu.
Ces derniers étaient juste derrière lui. Tête basse, Sirius avait les yeux rouges et Peter lui avait passé un bras autour des épaules. Lily et Alexia se tenaient la main. Remus, lui, aidait le mage funéraire à faire descendre le cercueil dans la terre, chacun d'un côté, leur baguette stable. Il avait aussi aidé avant cela à jeter les sorts repousse-moldu autour du cimetière. James lui en était reconnaissant, il n'aurait réussi à rien aujourd'hui. Il aurait voulu se précipiter en avant et arrêter la descente du cercueil, juste pour se donner l'illusion que le temps pouvait être arrêté. Au lieu de ça, il laissa un sanglot enfler dans sa poitrine et presser contre ses lèvres.
La mise en terre terminée, la procession présente commença à se disperser ou à se fondre en conversations et échanges de condoléances. James resta planté à sa place à serrer des mains. Il reconnut Judith Winger, la tutrice de Lily et la médicomage qui s'était occupée de son père tout au long de sa convalescence et notamment ces derniers jours. Pour elle, il se força à faire fonctionner ses cordes vocales.
- Merci pour tout... murmura-t-il d'une voix étranglée.
- Ce n'est rien... J'aurais aimé faire plus.
Avec un sourire doux, elle ne s'appesantie pas et céda sa place pour se diriger vers sa mère. Elle devait avoir l'habitude de composer avec le chagrin de ses patients. Sirius la remplaça en une seconde, grillant la priorité à plusieurs personnes qui lui tournaient autour depuis un moment.
- Tu sais que je l'ai vu chez les Malefoy ? lui apprit-il en désignant la médicomage d'un geste du menton. On a parlé... Elle me prenait pour un botaniste, ça l'intéressait, et son fils Talbott m'a traîné. Je ne pensais pas la revoir aussi vite...
- Oh... Et ça va, elle ne t'a pas reconnu ?
- Non, non... Enfin, elle a dû me voir à la fête, mais elle n'a pas fait le lien avec ma couverture sous polynectar.
James hocha la tête, rassuré. Ils parlaient à voix si basses pour éviter d'être entendu qu'il avait même du mal à distinguer les mots de Sirius sous le bruit de la neige et du vent. Il plongea les mains dans ses poches.
- Où sont les autres ? demanda-t-il, engourdi.
- Ils ont commencé à emmener les personnes qui voulaient rester chez vous... Pour la veillée...
- Ah...
La veillée... Il s'en serait bien passé, c'était une vieille tradition où les invités se ressemblaient dans la demeure du défunt pour évoquer son souvenir autour de tasses de thé et de scones. Sa mère avait insisté. Elle avait sans doute besoin de ce moment de transition, de sentir que le souvenir de son mari était bien vivant dans la mémoire de sorciers et de sorcières qui lui survivront. Rien qu'à l'idée de devoir la perdre elle aussi bientôt – car il le savait, ça allait arriver – ses genoux manquèrent de flancher. Il laissa échapper un sanglot douloureux.
- James ? Cornedrue, allez... le réconforta Sirius.
Mais il sentait bien que lui aussi était accablé par sa propre peine et qu'il ne savait pas quoi faire. Les émotions n'avaient jamais été le fort de Sirius. Ses cheveux noirs si tranchants sur le blanc alentour, il détourna la tête et déglutit, comme s'il se retenait de pleurer aussi.
- Tu sais ce que c'est le pire ? murmura James, incapable de se retenir. C'est de me dire que je pourrais plus jamais l'entendre ni lui parler... C'est tellement irrémédiable du jour au lendemain et...
Il s'étrangla à nouveau. Il savait qu'il avait eu de la chance d'une certaine façon : il avait pu dire au revoir à son père. A chacune de ses visites pendant sa maladie, ils avaient mis toutes leurs cartes sur la table et ils s'étaient dit combien ils s'aimaient. Pour un homme de la génération de son père, ça n'avait pas dû être facile, mais la perspective de la mort faisait souvent s'ouvrir aux autres. Après son hospitalisation, il ne s'était réveillé brièvement qu'une fois et il avait pu leur dire des derniers mots à chacun. James n'avait rien appris, mais ça lui avait réchauffé le cœur : son père l'aimait, son père était fier de lui. C'était l'important.
A côté de lui, Sirius leva les yeux vers le ciel gris et plombé. Il se demanda s'il y cherchait quelque chose.
- Je n'ai jamais pu le remercier correctement... souffla-t-il. Pour m'avoir accueilli chez lui...
- Tu n'avais pas à le remercier, Patmol.
- C'est ce qu'il m'a dit aussi quand je suis allé le voir... Mais si, j'aurais quand même voulu. Il m'a toujours traité comme si j'étais de la famille...
James se retint de dire qu'il était de la famille, lien du sang ou non. En un sens, il comprenait. Même si Sirius n'arrivait pas à l'exprimer, il savait ce que Fleamont avait représenté pour lui qui n'avait connu qu'Orion Black comme figure paternelle avant sa fugue.
- On devrait rentrer, non ? lui dit-il soudain. Ta mère va t'attendre.
- Tu peux y aller, toi ? Je vous rejoins bientôt, je veux juste... quelques minutes.
- Pas de problème.
Le cimetière s'était considérablement vidé et Sirius remonta l'allée centrale en faisant crisser la neige sous son poids. De là où il se tenait, James repéra un des derniers groupes qui s'était attardé : il s'agissait des anciens collègues Aurors de son père. Ils n'étaient pas nombreux puisqu'ils n'avaient pas tous pu se libérer, mais il en reconnut certains. Alastor Maugrey, évidemment. Avec son visage couturé de cicatrice, il ne passait pas inaperçu et James était de plus en plus familier avec lui depuis son entrée dans l'Ordre, même si le petit garçon de huit ans qu'il était continuait d'avoir peur de lui. Derrière lui se tenaient Cassiopée Bones, son insigne d'Auror sur la poitrine, Edgar Bones et leur fils Matthew. James ressentit une pointe de nostalgie en voyant son ancien gardien, il avait encore grandi depuis les dernières vacances de la Toussaint. C'était un rappel de plus que le temps passait. Le cœur serré, il leur adressa un signe de la main, et Edgar inclina la tête vers lui. Il avait eu seulement quelques entraînements avec l'homme de justice, mais il s'était révélé un bon pédagogue. Face à Gideon, ce n'était de toute façon pas difficile. Le dernier Auror présent était un homme au visage carré que James avait aperçu une ou deux fois. Aloyssius Abbot s'il se souvenait bien.
Pendant une seconde, il hésita à aller les saluer. Ça aurait été la moindre des choses pour ces hommes et cette femme qui s'étaient battus avec son père pour défendre ce en quoi il croyait profondément : un monde plus juste, sans magie noire. Mais James n'eut pas la force. L'homme auquel ils venaient rendre hommage n'était le même que celui dont l'absence faisait saigner son cœur. C'était un Auror, un homme fort, leur chef. Lui avait perdu son père.
Tête basse, il se détourna donc pour s'approcher de la nouvelle tombe du cimetière de Godric's Hollow. Le granit commençait déjà à être recouvert de neige.
Fleamont Henry Potter
9 mai 1904 – 26 décembre 1978
J'ai cueilli ce brin de bruyère
L'automne est morte souviens-t'en
Nous ne nous verrons plus sur terre
Odeur du temps, brin de bruyère
Souviens-toi que je t'attends
James se remit à pleurer et tomba à genoux. Le froid pénétra ses vêtements en un étau humide et glacé, mais il se contenta de fixer les mots gravés sur la pierre, éternels contrairement à la vie. « Souviens-toi que je t'attends ». Il entendait presque la voix de son père prononcer cette phrase avec sa voix grave et tendre en direction de sa mère. Il n'y trouva aucun réconfort. Il aurait aimé arracher sa mère aux griffes de cette promesse, faire en sorte qu'elle ne se réalise que des années plus tard. Il avait l'impression d'être suspendu à un compte à rebours. La gorge nouée, il essuya ses yeux d'un revers de manche.
- Papa...
Sa voix flancha. Il toussa une seconde et la douleur redescendit vers sa poitrine comprimée.
- Papa, tu me manques déjà, murmura-t-il face à la tombe. Je crois que tu me manqueras tous les jours... Tout va me manquer. Mais je te promets que ça va me servir à faire ce que tu m'as appris. Ne pas baisser les bras. Être un Gryffondor jusqu'au bout.
D'une main tremblante, il plongea la main dans sa poche et en sortit un brin de bruyère, celle qui poussait dans la lande irlandaise autour du QG de l'Ordre. Il l'avait cueilli avant de partir ce matin.
- C'est ma promesse, dit-il en déposant le brin de bruyère devant la tombe. Je vais voir la fin de cette guerre, papa. Et je reviendrai te voir ce jour-là, pas avant, pour te dire qu'on a réussi... Alors...
La voix lui manqua, obstruée par un sanglot, et il se força à terminer dans un souffle, les yeux plantés sur le nom gravé de son père :
-... alors attends-moi.
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Verdict ?
En espérant que vous avez aimé malgré le ton et le sujet lourds... A dans deux semaines et pensez à dire à vos proches que vous les aimez !
Edit : le magnifique poème gravé sur la tombe de Fleamont est d'Apollinaire !
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