Epilogue : L'amour est acte de courage

Here we are again... Ladies, gentlemen and non-binary people, un nouvel épilogue, une nouvelle fin de tome de ATDM ! 

Parfois, je me dis que cette histoire n'aura jamais de fin. Elle fait tellement partie de moi depuis presque 8 ans maintenant et même s'il y a eu des énormes pauses, des presque fin, des difficultés, j'y reviens toujours... Sans doute parce que les Maraudeurs ont toujours eu une place spéciale dans mon coeur et qu'ils m'ont permis de grandir, de créer des liens, de me faire tenir le coup quand j'en prenais (des coups, vous l'avez ?). 

Bref, je vous offre donc aujourd'hui l'épilogue du tome III de ATDM et on se retrouve en bas pour les infos concernant la suite ;) 

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Epilogue : L'amour est acte de courage

L'agitation n'était toujours pas entièrement retombée autour des Archives Magiques, mais l'attaque était terminée... James se laissa tomber sur un rebord de mur à moitié écroulé, le cœur battant. Ce coup avait été rapide, minutieux et bien mieux organisé que celui de Buckingham, voire celui de Ste-Mangouste, et pour cause l'Ordre n'en avait eu aucune connaissance. C'est ce que Benjy lui avait confirmé en passant près de lui avant de repartir aider les agents de la Brigade à maintenir un périmètre de sécurité anti-moldu autour du bâtiment. Toute la zone était sécurisée désormais, mais des blessés erraient encore, hagards, tout comme des sorciers et sorcières en quête d'information. A ses côtés, Marlène s'était retrouvée avec la liste des victimes entre les mains et renseignait ces derniers du mieux qu'elle pouvait, la voix tremblante.

- Où est Remus ? lui demanda-t-elle dans un moment d'accalmie.

Il haussa les épaules.

- Je crois qu'il a retransplané à Ste-Mangouste avec les Londubat pour filer un coup de main, mais ça ne fera pas grand-chose... Les Aurors gèrent le flux des blessés, je pense qu'il va être renvoyé au QG ou un truc dans le genre pour ne pas gêner.

- Hum... On ne devrait pas faire la même la chose ? Je veux dire, rentrer ? On va finir par se faire repérer, on n'est pas en uniforme ni rien...

- Non, on attend encore un peu. Personne nous remarque pour l'instant et il est hors de question que je parte sans savoir où Bathilda, ni avant que Peter soit ressorti...

- Il doit l'être maintenant, non ? Il ne nous a sans doute juste pas retrouvé...

James déglutit.

- J'espère, Marlène, j'espère.

Il baissa la tête pour échapper à son regard. Il essayait de se vider la tête depuis plusieurs minutes, sans succès. Parce que l'évidence le frappait encore et encore : si Peter était entré dans ce bâtiment, c'était à cause de lui. C'était pour lui. Il aurait voulu y aller lui-même pourtant, arracher Bathilda des flammes, mais il en avait été incapable. Du moins, il avait hésité et c'était ce moment d'hésitation qui avait servi d'interstice à Peter pour s'élancer sur un coup de tête. La gorge comprimée, il se demanda une seconde s'il aurait le courage de se rendre chez sa mère pour lui annoncer que son fils était mort... La pensée morbide lui donna la nausée et lui retourna l'estomac.

Il ne comprenait pas ce qui l'avait paralysé sur place, ni ce qui l'avait laissé regarder un de ses meilleurs amis se précipiter vers le danger sans rien faire. Malgré tout, au fond de lui, une petite voix lui soufflait qu'il savait parfaitement... Cette retenue paralysante qui lui avait saisi le corps, c'était simplement le souvenir de milliers d'aiguilles sous sa peau, d'une douleur inimaginable qui avait tordu et percé ses entrailles... Le souvenir d'un sortilège Impardonnable jeté par Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom en personne. Même des mois plus tard, il se rendait compte que cette confrontation l'avait bien plus marqué qu'il ne voulait l'admettre.

C'était différent des mangemorts ; c'était une autre échelle que l'attaque de Pré-au-Lard. Il n'en faisait pas des cauchemars explicites, mais il avait désormais une peur sourdre qui pulsait en lui et le faisait réévaluer les risques. Si son père était encore en vie, il lui dirait sûrement que ça s'appelait grandir après avoir été marqué par les coups de la vie ou quelque chose du même genre. James n'était pas certain d'apprécier.

- Et ta tête, ça va ? s'enquit soudain Marlène sans même le regarder, les yeux braqués sur les Archives encore fumantes.

- Ma... ? Oh oui, oui, rien de grave.

Instinctivement, il porta la main à sa tempe. Une douleur légère se réveilla ; mais quand il ramena ses doigts devant lui, le sang avait cessé de couler, ce qui devait être bon signe. Il aurait aimé dire qu'il avait gagné cette nouvelle blessure après avoir réussi à chasser sa peur paralysante et s'être jeté sur des mangemorts en fuite, seulement la réalité était bien moins glorieuse. Il avait voulu aider les Aurors à faire évacuer les employés des Archives sortis du bâtiment, mais plusieurs courraient dans tous les sens, désorientés. Et ce qui devait arriver s'était produit : quelqu'un l'avait percuté avec force par l'arrière dans sa panique. Ses réflexes n'avaient pas réussi à le sauver et il s'était étalé au sol, sa tête heurtant le bitume violemment. Marlène s'était aussitôt précipitée pour l'aider, mais le mal était fait. Il n'était pas médicomage, mais s'il devait s'auto-diagnostiquer, il dirait qu'il avait une jolie plaie un peu profonde et une dignité bafouée. Trois fois rien en somme.

- Il faudra quand même que Lily regarde, juste au cas où, intima Marlène. Faudrait pas que ça s'infecte.

- Ouais, je lui montrerai en rentrant, t'en fais pas...

A nouveau, il détourna la tête, gêné. Il se trouvait ridicule à être blessé ainsi sans avoir rien fait. Et surtout, toujours aucune trace de Peter... L'angoisse le reprit telle une vague submergeant un barrage et il s'apprêtait à se lever pour aller faire le tour du bâtiment, juste histoire de s'occuper l'esprit et de faire quelque chose par Merlin quand une femme se planta devant Marlène, le regard affolé.

- Sage Bragnam ! lança-t-elle à brûle-pourpoint.

- Que... ?

- Bragnam avec un B. Département de l'Antiquité, il travaillait aujourd'hui ! C'est mon père, s'il vous plait ! L'Auror là-bas m'a dit de m'adresser à vous !

James tourna la tête, l'estomac lourd. L'Auror en question était Cassie Bones, présentement en train d'écouter les ordres de Maugrey s'il en croyait leur posture et il fut soulagé l'espace d'une seconde. Personne de compromettant n'avait donc encore repérer leur présence inhabituelle dans le périmètre de sécurité et il se reconcentra sur la jeune femme. Elle devait être un peu plus âgée que lui, même pas la trentaine, et l'inquiétude lui dévorait le visage. C'était un masque que James connaissait bien : il l'avait porté pendant toute la convalescence de ses parents et ce rôle était sans doute le plus dur à jouer dans la vie d'une famille car il était le plus sincère.

Les mains tremblantes, Marlène parcourut les pages de sa liste. Il comprit la réponse qu'elle s'apprêtait à donner en voyant qu'elle passait des pages et des pages, comme pour chercher un signe d'espoir... Mais l'ordre alphabétique ne trompait pas et elle n'avait pas besoin d'aller si loin pour « Bragnam ». Elle releva un regard chargé de pitié vers la jeune femme.

- Je suis désolée... murmura-t-elle. Son nom est sur la liste des victimes...

- Quoi ? Non, non. Vous devez vous tromper !

- C'est ce que les Aurors ont rapporté en première informations, rien n'est certain, mais son nom est là... je suis navrée, je...

- Non ! Non ! s'époumona la femme. Il y a erreur, il n'était pas même pas dans l'aile ouest !

Le cœur au bord des lèvres, James détourna les yeux vers les Archives. L'aile ouest avait été la plus touchée par l'attentat. C'était par là que les mangemorts étaient entrés, la préférant aux grandes portes principales gardées par un sorcier de sécurité. Ils y avaient mis le feu presque immédiatement et elle était en train de s'effondrer sur elle-même malgré les efforts des Pyromages en train de s'acharner. Il y avait des forces élémentaires contre lesquelles même la magie avait peine à lutter.

- L'Attaque a eu lieu aussi dans le reste du bâtiment... souffla Marlène en guise d'explication. Je suis vraiment désolée...

- Non, ce n'est pas possible... non... Donnez-moi ça !

D'un geste désespéré, elle arracha littéralement la liste des mains de Marlène qui la laissa faire, impuissante. Elle fit défiler les pages avant de sa figer sur la seconde où le nom de son père devait s'y étaler noir sur blanc. James se leva d'instinct au moment où un véritable sanglot s'arracha de sa gorge et que ses genoux flanchèrent. Il la rattrapa alors qu'elle s'effondrait sur le sol, le cœur si douloureux qu'il avait l'impression qu'il allait sortir de sa poitrine.

- Non ! hurla-t-elle comme une bête blessée. Pitié, non...

- Je suis désolé, murmura-t-il. Je suis désolé...

- Il ne peut pas... non...

- Je sais, je sais...

Et Merlin qu'il savait. Mais lui au moins avait pu dire au revoir et il n'y avait pas un jour sans qu'il en soit reconnaissant. Il n'aurait pas supporté de perdre son père sans pouvoir lui adresser ses derniers mots, ceux qui pesaient d'un poids inexorable tant il avait eu conscience qu'il n'y en aurait jamais plus aucun. Cette jeune femme en revanche n'aurait jamais ces derniers mots... Pas consciemment en tout cas et il sentit ses yeux le brûler. Et si les derniers mots qu'elle lui avait adressés était d'une banalité affligeante ? Et si elle s'était disputée avec lui ?

- Il ne peut pas... répéta-t-elle, étouffée par ses pleurs. C'est mon anniversaire la semaine prochaine, il avait promis... Non, non...

James croisa le regard de Marlène. Elle était livide et il sut qu'elle venait de ressentir le même coup à l'estomac que le sien. Aucun père n'aurait dû avoir à louper l'anniversaire de sa fille pour cette raison...

- Je suis désolée, dit Marlène comme si elle n'avait aucun autre recours que ce sentiment vide mais sincère. Venez, je vais vous accompagner vers les médicomage. Venez...

Telle une poupée de chiffon, la jeune femme se laissa passer de ses bras à ceux de Marlène. James la contempla s'éloigner, la silhouette voutée et secouée par les sanglots.

Il se sentit soudain creux, presque vidé de l'intérieur. Tout ce qui restait n'était qu'une tristesse infinie. C'était vertigineux d'une certaine façon quand il repensait à tout ce qui l'avait habité en début d'année, il n'y a pas si longtemps. L'été dernier, à peu près au même moment, il terminait Poudlard. Il avait déposé la carte du Maraudeurs dans un tiroir, mettant symboliquement fin à son adolescence, et il était entré dans l'Ordre. Il s'y était impliqué corps et âme pendant toute la durée de sa formation, la conviction chevillée au corps : il pouvait changer les choses. Il pouvait être un rouage qui ferait basculer cette guerre. Aujourd'hui, il se demandait surtout si la guerre n'était pas plutôt une machine infernale qui les broierait tous.

- James !

- Pete...

Il fit volte-face. Le visage couvert de poussière de plâtre, Peter se dirigeait droit vers lui en boîtant et il sentit son estomac faire un soubresaut sous le coup du soulagement. Il s'élança à sa rencontre, le cœur près à exploser. Merlin, Peter était là, Peter était bien vivant... Aucune blessure mortelle et bien debout sur ses deux jambes. C'était inespéré. Il ralentit à peine en arrivant face à lui et jeta ses bras autour de sa silhouette frêle. Surpris, Peter se figea, l'air incertain. Ils n'avaient jamais pratiqué de grandes démonstrations d'affection, mais cette fois il en avait besoin. Juste pour s'assurer qu'un de ses meilleurs amis était bien là.

- Hum, je vais bien... marmonna Peter en lui tapotant le dos avec maladresse. Promis, tout va bien.

- Sûr ?

- Certain. Une cheville tordue, tout au plus.

Ce qui expliquait sa démarche difficile. Soulagé, James finit par s'écarter, mais aussitôt l'expression de Peter se décomposa.

- Ton visage... ?

- Une égratignure. Rien de grave, je te raconterai, tu pourras même te foutre de moi.

- Pourquoi ?

Mais il n'eut pas le temps de lui répondre. Il cherchait ses mots pour raconter son incident quand Marlène réapparut soudain sur leur gauche, les joues mouillées de larmes, et se jeta à son tour sur Peter.

- Oh Pete ! s'exclama-t-elle en le serrant contre elle. Tu n'as rien ?

- Non, non, je vous promets, rassura-t-il avant de s'extirper de l'étreinte. (Il se tourna vers lui, défait). Mais James, je... je n'ai pas trouvé Bathilda, je suis tellement désolé...

Sa joie le quitta aussi vite qu'elle était arrivée. Glacé, il regarda pour la énième fois les Archives, comme s'il pouvait faire apparaître la célèbre historienne par la seul force de sa volonté. Tout le monde lui avait toujours dit qu'il en avait trop, que sa volonté forçait le respect... mais ça ne lui servait à rien dans le cas présent. Pourtant, Marlène lui agrippa brusquement le bras, survoltée.

- Elle est sortie ! s'écria-t-elle. Je viens de la voir dehors, là ! Avec Maugrey. Il l'a aidé lui-même à s'exfiltrer de l'aile ouest !

- Quoi ?

Il pivota vers le point qu'elle indiquait. Et c'est alors qu'il la vit aussi. Enroulée dans une couverture, Bathilda se trouvait avec d'autres employés parmi les groupes qui devaient être transféré à Ste-Mangouste. Ses cheveux blancs, d'ordinaire ramenés sur son crâne en un élégant chignon, étaient en désordre à cet instant, signe du traumatisme qu'elle venait de traverser. Pourtant, elle avait l'air d'aller bien et, même de loin, James la vit rabrouer un homme qui semblait vouloir lui parler. Une femme de caractère que les mangemorts n'avaient pas réussi à mettre à terre. Il en expira de soulagement.

- Merci Merlin...

- Excusez-moi, mademoiselle ? fit soudain une voix derrière eux. Vous avez la liste des... victimes, c'est cela ?

James voulut hurler de frustration. A peine le temps de respirer, d'apprendre une bonne nouvelle, de retrouver Peter... et voilà que la réalité revenait le heurter. Il ne voulait pas avoir à supporter une nouvelle scène où il devrait apprendre à un proche le décès d'un membre de sa famille. Mais il n'avait pas le choix ; l'homme attendait toujours à une distance polie et Marlène se tourna vers lui. La surprise se peint sur son visage.

- Monsieur Grims ? s'étonna-t-elle.

- Oh... Bonjour, miss... Vous étiez à la soirée de fiançailles de Narcissa Malefoy, non ? Vous vous étiez sentie mal... ?

- Oui, c'est ça... Ravi de vous revoir.

Elle sortit la formule de politesse par automatisme, mais se crispa en même temps. James plissa les yeux. Il n'aimait pas l'idée que des personnes extérieures à l'Ordre se rappelle que Marlène avait été impliquée ce soir-là, mais il ne pouvait rien y faire. L'homme en face d'eux n'avait d'ailleurs pas l'air d'y prêté grande importance, visiblement plus intéressé par la liste que Marlène tenait toujours entre ses mains. Il avait un visage expressif avec une mâchoire carré et des yeux bleu profond dans lesquels se lisait la même inquiétude qui emplissait tout le monde ici.

- Une tragédie, déplora-t-il d'une voix rauque. Mais rien d'étonnant finalement, vous ne trouvez pas ?

Marlène fronça les sourcils.

- Comment ça ?

- Ils ne s'attaquent pas juste à une branche du Ministère, miss. Ils s'attaquent à l'Histoire avec un H capitale, ils s'y attaquent pour y entrer eux-mêmes. La marque qu'ils viennent de laisser dans le ciel fera partie de leur mémoire, ajouta-t-il en désignant la marque des Ténèbres qui flottait au-dessus des Archives. Quant à eux, ils ont voulu mettre le feu à la nôtre...

Mettre la mémoire en feu. Réduire l'histoire en flamme. Brûler pour reconstruire un ordre nouveau, expier le sang impure par le feu. Oui, c'était une idéologie qui correspondait bien aux mangemorts, James devait l'admettre, même si personne ne trouva rien à répondre à cette description angoissante.

- Vous cherchiez quelqu'un ? s'enquit finalement Marlène avec réluctance.

Monsieur Grims acquiesça, nerveux. Dans sa main droite, il jouait avec une cigarette éteinte.

- Oui, à vrai dire. Cassiopée m'a envoyé vers vous. C'est ma belle-sœur, elle m'a dit que je pouvais venir vous voir, se justifia-t-il après coup, comme s'il avait peur qu'on lui refuse le droit de savoir.

- Bien sûr, bien sûr... Hum, vous avez un nom ?

Monsieur Grims hocha à nouveau la tête.

- Aurelia Shelton, département d'Histoire moderne.

- Bien...

A côté de lui, James entendit Peter hoqueter, mais quand il tourna la tête vers lui, il fixait intensément Marlène, les épaules tendues. Cette dernière mit plus de temps que la dernière fois pour aller au bout de l'alphabet, puis releva la tête. La solennité se gravait sur chacun de ses traits.

- Monsieur Grims... s'étrangla-t-elle.

Elle n'eut pas besoin d'en dire plus. A nouveau, James comprit et l'homme aussi. Une masse parut s'abattre sur lui.

- Vous êtes certaine ? murmura-t-il.

- Son nom vient d'être ajouté... Mais ils précisent qu'elle est portée disparue pour le moment, il n'y a pas de corps... Vous devriez vous rendre à Ste-Mangouste juste au cas où. Dans la panique, les Aurors ne peuvent pas tout contrôler.

- A Ste-Mangouste ?

James se râcla la gorge. Il avait noté un accent dans la voix de l'homme, sûrement américain, et se chargea d'expliquer :

- L'hôpital sorcier. Allez là-bas, ils organisent les transferts.

- Oui, bien sûr, suis-je bête... Je le savais, excusez-moi je suis un peu...

Il laissa sa phrase en suspens, visiblement incapable d'expliquer ce qu'il était. James comprit parfaitement. Sans un mot, il laissa donc monsieur Grims s'éloigner lui aussi. Tout le périmètre était ainsi balayé par un va-et-vient incessamment qui commençait à lui donner le tournis... A moins que ça ne soit sa blessure au front.

- Et Peter ? fit soudain Marlène. Tout va bien ?

Sorti de sa torpeur, James posa les yeux sur lui. Son teint avait brusquement viré couleur cendre et il tanguait sur ses jambes. Il lui attrapa le bras pour le stabiliser avec anxiété.

- Oh Peter ? appela-t-il lui aussi. Tu... ?

- Je veux rentrer. On peut... rentrer ? On ne sert plus à rien là, non ?

- Mais...

Il leva la main pour couper Marlène. Dans le fond, Peter avait raison. Ils avaient fait leur part et les Aurors étaient en train de reprendre le contrôle des choses. Dans quelques minutes, les Oubliators ne manqueraient pas non plus d'arriver. C'était le moment pour eux de s'éclipser.

- Va rendre la liste à la femme de Bones, indiqua-t-il à Marlène. Je transplane avec Pete. On se rejoint au QG, ok ?

- D'accord... Soyez prudent. Et fais-le s'allonger quand il arrive, le transplanage ne va pas l'aider dans son état.

Il hocha la tête, puis ne perdit plus de temps pour entraîner Peter à l'écart. Il ne lui faisait pas confiance pour transplaner seul – perdre un membre était vite arrivé et c'était la dernière chose dont ils avaient besoin aujourd'hui – et il se concentra donc en inspirant une grande goulée d'air. Décision, détermination, destination. Il entendait encore presque la voix de Porter, son instructeur loufoque, dans son esprit. Seulement, il n'y avait plus de cerceau jaune à viser, juste le QG dans les landes irlandaises, bien plus loin.

- Prêt ?

Peter acquiesça et il lui attrapa le bras fermement avant de tourner sur lui-même. Comme à chaque fois, le monde se brouilla alors et il laissa derrière lui les décombres fumantes des Archives Magiques, l'agitation des survivants et des Aurors, les cris... La dernière chose qui brûla son regard fut la tête de mort de la Marque des Ténèbres flottant dans le ciel.

**

*

- James... Pourquoi il faut toujours que tu te blesses, par Merlin ?

- Mais c'était même pas de ma faute cette fois !

- Et pourtant tu te retrouves encore avec une plaie sur le visage. T'as de la chance, ça ne laissera pas de cicatrice.

- Tu m'aurais moins aimé si j'avais été défiguré, c'est ça ?

Pour toute réponse, Lily roula des yeux. Penchée au-dessus de lui pour nettoyer la plaie, elle avait la mâchoire crispée mais prenait son rôle d'infirmière personnelle très au sérieux. Il essaya de lui faciliter la tâche en restant le plus immobile possible, même si le sérum désinfectant qu'elle était en train d'appliquer piquait horriblement.

- T'es sûr que tu n'as pas une commotion, hum ? demanda-t-elle pour la troisième fois. Pas de vision floue, pas de nausée ?

- Non, promis. Je te jure que ça va !

- Hum... je vais quand même te poser quelque question, juste pour voir si tu réagis bien.

D'un geste, elle jeta le coton imbibé de sang qu'elle avait maintenu contre sa peau pendant un moment, puis recula d'un pas. Elle portait toujours son uniforme de Ste-Mangouste dont le blanc tranchait avec ses cheveux à moitié défait après une journée chargée. Malgré ça, elle s'était jetée sur lui à peine rentrée en voyant son état et il savait que ça ne servirait à rien de protester. Depuis son combat contre Tu-Sais-Qui, Lily était particulièrement attentive à sa santé et il supposait qu'il ne pouvait pas vraiment l'en blâmer.

- Vas-y, j'écoute, dit-il en se réajustant contre la tête de lit, le corps fatigué.

- Ok... Ton nom ?

Ce fut plus fort que lui, James éclata de rire.

- Sérieusement ?

- Oui ! le tança Lily. Une commotion peut entraîner des troubles de mémoire. Alors allez, réponds.

Il se mordit la lèvre pour ne pas rire à nouveau, mais obtempéra tout en se sentant ridicule.

- James Potter, déclara-t-il.

- Bien. Où est-ce qu'on est ?

- Au QG de l'Ordre.

- La forme de ton patronus ?

- Un cerf. Tu sais que c'est l'examen le plus simple de ma vie ? Je vais avoir un O, c'est sûr et certain.

Lily ne se laissa pas déconcentrer. Avec un simple regard agacé, elle poursuivit :

- Bon d'accord, une dernière, céda-t-elle. En quelle année on est ?

- 1492. J'étais au milieu de la découverte du nouveau monde quand je me suis réveillé ici. C'est incroyable ce que le monde a changé et...

- James !

Dans un mélange d'irritation et d'amusement, Lily le repoussa d'un coup sur le torse et il se laissa tomber en travers du lit, hilare. Elle le rejoignit d'un bond et se plaça à genoux à côté de lui en soupirant. De sa position, il pouvait voir son teint pâle sur lequel ressortait ses tâches de rousseur plus qu'à l'accoutumé, signe de sa fatigue après cette journée harassante. Doucement, il leva la main pour les tracer du bout des doigts et elle se laissa faire un sourire presque mélancolique.

- 1979, souffla-t-il. On est en 1979 et je te jure que mon cerveau n'est pas plus abîmé que d'habitude, promis. (Il se redressa sur un coude, sa main descendant jusqu'au genou de Lily pour s'y poser et maintenir le contact). C'est plus Peter qui m'inquiète...

- Sa cheville n'avait presque rien, il ne sentira plus rien demain, rassura immédiatement Lily. Il faut juste qu'il évite de mettre trop de poids dessus ces prochains jours.

- Non, je parle pas de ça... Enfin tant mieux pour sa cheville, mais...

Hésitant, il chercha ses mots.

- On a un peu parlé quand on est revenu des Archives. Il avait l'air vraiment mal alors je lui ai demandé ce qui s'était passé quand il était à l'intérieur.

- Et qu'est-ce qu'il t'a dit ?

- Qu'il n'avait pas trouvé Bathilda, mais qu'il avait aidé une femme à fuir. Seulement, Bellatrix Lestrange les a repéré et il a dû s'enfuir lui aussi, il l'a laissé sur le bord d'une fenêtre, mais elle était presque dehors... C'était bon, en tout cas il le croyait...

Les yeux de Lily s'écarquillèrent.

- Ce n'était pas le cas ?

- Non... dit-il d'une voix sourde. Ou en tout cas, le nom de la femme était dans la liste des victimes que Marlène avait. Ça a fichu un coup à Peter. Il pense que Bellatrix a mis la main sur elle au moment il fuyait.

- Merlin...

- Je sais... Et je sais pas, ça doit être le choc, parce qu'il a vidé son sac d'un coup en rentrant. Il a eu des mots assez... durs. Je m'inquiète pour lui.

Le regard alerte, Lily emprisonné sa main dans la sienne, celle qui reposait toujours sur son genou, et il s'y ancra avec reconnaissance.

- Quel genre de mots ? murmura-t-elle.

- Qu'il avait trouvé le courage d'agir et de se rendre dans un bâtiment en flammes, qu'il avait fourni tous les efforts possibles pour aider cette femme... Tout ça au final pour ne pas aller au bout de son acte et que Bellatrix les rattrape au dernier moment... Que finalement, ça n'avait servi à rien.

Découragé, James se frotta les yeux. Il pouvait encore entendre en écho le ton défait et brisé de Peter lorsque les mots étaient tombés de ses lèvres, comme s'il n'avait pas réussi à les retenir. Son visage hanté. Il n'avait pas su quoi lui répondre à part des phrases certainement creuses, voire banales et vides de sens ; le genre de phrase qu'on sortait dans ces moments-là. Non, ça n'avait pas été de sa faute ; il ne devait pas s'en vouloir... Tellement plus simple à énoncer qu'à mettre en pratique, lui-même en savait quelque chose. Peter avait fini par s'excuser en prétextant que c'était le contre-coup et la fatigue qui le plombaient, mais que ça irait mieux demain. James l'espérait vraiment sans trop y croire.

- Il a fait de son mieux, soupira Lily. C'était déjà tellement. Et cette notion de courage, là ! Je pense vraiment que la pression de Gryffondor peut être malsaine parfois, tu sais...

- Gryffondor ? Pourquoi ?

- Réfléchis, James. Il l'a dit lui-même : il a eu assez de courage pour rentrer dans un bâtiment en flammes, pratiquement en train de s'écrouler, mais pas pour affronter Bellatrix Lestrange. Et tu veux savoir ? Il a eu raison ! Tout le monde ne le verra pas comme ça, mais j'en suis persuadée. Le courage, ça n'est pas agir en oubliant son intégrité physique, en se sacrifiant systématiquement... Parfois, la meilleure chose à faire est justement de ne rien faire, même si c'est plus difficile. Quelque chose dont certains feraient mieux de se rappeler.

D'un air entendu, elle lui jeta un regard appuyé. Immédiatement, une vague de protestation monta en lui, mais il la réfréna pour prendre le temps de méditer. L'idée était tellement contre-intuitive pour lui... Et pourtant, il la comprenait d'une certaine façon. Lorsqu'il était resté en arrière avec Rodulphus Lestrange dans la petite pièce exiguë des soignants de Ste-Mangouste pendant que Lily avait été emmenée dans la réserve voisine, il aurait dû ne rien faire. Se taire. Au lieu de ça, il s'était mis à provoquer Lestrange parce que s'il y avait bien une chose qu'il ne savait pas faire, c'était cela : la fermer. Il avait laissé ses émotions et son sens du courage typiquement Gryffondor prendre le dessus jusqu'à se mettre en danger... jusqu'à mettre Lily en danger. Il se souvenait de Lestrange qui la menaçait et de l'image qui s'était imposé à lui à ce moment-là : une Lily en robe de mariée maculée de sang, pleurant au-dessus d'une tombe. De sa tombe.

Avec le recul, ce n'était pas quelque chose dont il était fier. Seulement, « ne rien faire » revenait à laisser gagner Lestrange et il refusait. La situation était différente de celle de Peter. Voilà, elle était là leur différence : il avait agi pour Lily. Pas pour lui. Ce jour-là, lors du Coup de Ste-Mangouste, elle avait été dans chacune de ses pensées, dans chacun de ses gestes... S'il s'était battu avec Regulus, Lestrange et Tu-Sais-Qui en personne, ça avait été pour elle. Parce qu'il avait refusé de la laisser seule, parce qu'il avait refusé qu'elle soit la victime de cette guerre à cause de son statut de sang. Lily Evans était devenue sa raison et sa motivation première.

Il aimait cette fille depuis ses quatorze ans et encore... A l'époque, il n'avait pas su ce que voulait dire aimer. Il avait juste eu une sorte de fascination pour elle qui s'était ensuite muée en quelque chose de plus fort. Quelque chose qu'il n'aurait jamais pu décrire, mais qui se logeait là, au creux de sa poitrine. C'était ce sentiment qui lui avait permis de tenir cette année entre la guerre et la mort de ses parents. Tant qu'il aurait Lily à ses côtés, il se devait d'avancer, aussi forte soit la douleur. Ce n'était pas une promesse comme Sirius avait pu le faire à Alexia, ni même un acte manqué comme Emmeline et Gideon... Pour lui, Lily incarnait tous les actes qu'il menait depuis qu'il s'était engagé dans la résistance à ses côtés et il refusait que quiconque lui enlève cela.

- James ? Eh, à quoi tu penses ?

Eperdu, il releva les yeux vers Lily. Elle le regardait intensément de ses prunelles vertes, celles dont il connaissait désormais chaque nuance, et il eut plus que jamais conscience du poids dans sa poitrine, de cette émotion indicible.

- Tu sais que je t'aime, pas vrai ? lança-t-il sur un coup de tête.

Elle eut un mouvement de recul, surprise par l'intensité de son ton, mais resserra sa prise autour de leurs mains jointes.

- Evidemment, rit-elle. James, t'es sûr que ça va ?

Peut-être qu'il avait bien une commotion finalement. Une idée folle venait de fuser dans son esprit et il n'était qu'un Gryffondor avide d'acte et de courage, n'est-ce pas ? A bien y réfléchir, il ne savait pas comment fonctionner autrement : agir, c'était une seconde nature chez lui, même lorsqu'il s'agissait de sentiment. Et l'amour appelait à un acte majestueux, au-delà du symbole ou d'une promesse.

Oui, l'amour était acte de courage. Alors, habité par une infinie certitude, James se jeta dans le vide :

- Lily Evans... murmura-t-il. Est-ce que tu veux bien me faire l'honneur et la joie de m'épouser ?

FIN

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Verdict ? ^^ Quelle autre manière que de terminer ce tome avec cette demande ? Une demande signée James dans le pur style Maraudeur haha ! 

Je sais que je ne leur accorde pas la même attention que Cazolie parce que mon but est ailleurs : décrire une époque, décrire une génération, décrire un groupe. Mais Lily et James en restent une pierre angulaire et j'espère que j'arrive à leur rendre justice à mon niveau. 

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Mot de la fin

En tout cas, cet épilogue marquait une bascule : le prochain tome couvrira désormais les années 1979-1980 et nous serons au coeur de la guerre ! D'ailleurs, parlons-en de ce tome 4. Il ne devait jamais voir le jour et pourtant il va avoir lieu... Ah comme quoi, ne jamais dire jamais comme disait Justin Bieber (on a les refs qu'on peut). Pour vous donner des infos, ce tome ne sera pas pour tout de suite : je n'ai pas encore commencé à l'écrire, pas du tout, mais j'ai des idées. J'ai juste besoin de souffler et de mettre de l'ordre dans les dites idées avant de me lancer donc il ne sera pas posté avant au moins septembre 2023. Minimum ! Je vais essayer de viser le 31 octobre symboliquement mais sans me mettre la pression. J'ai bien remarqué que ce tome avait eu du mal à totalement décoller, sûrement parce que les fanfics sur les Maraudeurs se consomment différemment, donc je considère que j'y vais à mon rythme. C'est ce qui a réussi pour cette histoire jusqu'à présent. 

Concernant ce tome, j'en suis assez contente dans l'écriture : je trouve qu'elle est mieux que le tome 1 (obviously) et même mieux que le tome 2. Il était juste un peu décousu et manquait d'un fil rouge tant j'avais à coeur de décrire la guerre dans tous ses aspects. J'essayerai d'améliorer ce point dans le tome 4. Avant de se quitter, n'hésitez d'ailleurs pas à me donner votre avis sur les points suivants, ça m'aidera et ça sera avec plaisir que je lierai vos avis ! ^^ 

- Comment jugez-vous ce tome ? De façon globale ? (Le bon comme le moins bon comme le mauvais s'il y en a). 

- Avez-vous un passage qui vous a marqué ?

- Avez-vous été sensible à l'évolution des personnages hors Poudlard ou trouvez-vous que c'était trop léger ?

- Des envies, des demandes, des prédictions pour le tome 4 ? 

Voilà, je fais vraiment un petit questionnaire cette fois pour ne pas vous ensevelir sous des questions haha ! Mais avant de conclure, j'aimerais terminer sur des remerciements. 

Remerciements 

Merci à vous déjà. C'est si évident, mais si fondamental. Certain.es sont là depuis le tome 1, voire avant. Iels sont rares mais ils sont là et je ne sais pas comment j'ai fait pour vous mériter. Quant aux autres - qui votent, commentent, lisent - vous êtes ma raison d'écrire. Merci mille fois, au-delà des mots. Peu importe où l'écriture me portera, vous resterez mes premiers soutiens et j'ai tellement hâte de vous retrouver pour la dernière ligne droite. Une idée de titre pour le tome 4 au passage ? (Je l'ai déjà trouvé, mais je suis curieuse d'avoir vos avis). 

Ensuite, merci à Ophélie. Moins présente sur la fin, cette histoire lui appartiendra toujours d'une certaine façon et étant une éternelle nostalgique, ça compte à mes yeux. La vie dramatique de Sirius lui doit beaucoup (et sans doute que moi aussi). 

Enfin, merci à mes autres têtes pensantes, à l'hydre. A Cazo et PtiteCitrouille pour leur soutien au quotidien, leur humour, leurs messages... J'ai mes amies dans ma poche, toujours là pour moi. Et si elles sont toutes égales en amitié; en ce qui concerne l'écriture, je me dois de reconnaitre que Perri a une place spéciale. Perri, mon âme soeur de plume; Perri et nos brainstorming ; nos vocaux-citation ; nos encouragements permanents. Perri dont je peux dire "parce qu'elle était là au début et qu'elle sera là à la fin" sans aucun doute (si vous avez la réf, vous êtes des vrai.es!). Merci à toutes les trois, infiniment. 

Sur ces mots larmoyants, je vous souhaite à tous.tes de belles lectures, de belles expériences, de beaux moments dans les mois à venir... Et j'espère vous retrouver bientôt ! De toute façon, L'héritage d'Ilvermorny continue, n'hésitez pas à venir lire si ce n'est pas déjà fait, ça me fera très plaisir ! 

A bientôt,

Anna'

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