Tome II - Chapitre 32: In nomine patris
Salut !Alors oui, on est vendredi, mais j'ai décidé de poster aujourd'hui parce quedemain j'aurai sûrement pas le temps et puis dans le fond c'est bientôt noël donc cadeau ^^
Chapitre XXXII : In nomine patris
- Par Salazar, murmura Orion en s'approchant d'un pas lent. Puis-je savoir ce que tu fais ici ?
Sirius recula instinctivement avant de se reprendre, le cœur battant. Il tenta de se composer une attitude désinvolte, de remettre son masque en place, mais il avait du mal à cacher sa surprise. Revoir sa famille était bien la dernière chose à laquelle il s'attendait en venant ici aujourd'hui.
Son regard glissa par-dessus l'épaule de son père et il vit le reste du clan Black entrer dans une chambre, sans remarquer que l'un des leurs s'était momentanément absenté. Lucretia referma la porte dans son dos avec un sourire amusé, certainement consciente d'avoir craqué l'étincelle qui n'allait pas tarder à se transformer en incendie.
- Toi qu'est-ce que tu fais ici ? Répliqua-t-il, la gorge sèche. Qu'est-ce que vous faites tous ici ? Quelqu'un est mort ou quoi ?
- Il se trouve que oui.
Bien que le ton de son père fût, comme toujours, parfaitement contrôlé, Sirius ne manqua pas la note de tristesse qui transperça dans cette simple affirmation.
- Oh... Qui... ?
- Callidora. La fragilité de son cœur l'a emportée hier dans la nuit.
Sirius n'eut aucun mal à garder une expression neutre. Il n'avait jamais été proche de la cousine de son grand-père Arcturus. Elle était déjà mariée à sa naissance, ce qui signifiait que sa présence aux réunions de famille n'était pas obligatoire. S'il la voyait une fois tous les deux ans, il estimait que c'était un miracle.
Il avait surtout entendu parler d'elle grâce à sa tante Lucretia qui adorait propager les histoires, et celle des sœurs Black à la fin des années 30 était l'une de ses favorites, surtout après le départ d'Andromeda qui avait soulevé tant de souvenirs.
Car les sœurs Black, avant d'être Bellatrix, Andromeda et Narcissa, étaient connues comme étant Callidora, Cedrella et Charis. Trois filles, nées chacune à deux ans d'intervalle du mariage d'Arcturus II et de Lysandra Yaley. En tant que femmes et enfants d'un dernier fils, les sœurs n'avaient pas une grande influence au sein de la famille, même si leur mariage restait une affaire d'alliance importante. Si Callidora épousa un Londubat et Charis un Croupton sans faire de vague, la sœur cadette, à laquelle personne n'avait jamais prêté attention jusqu'ici, refusa un jour d'obéir par amour. Septimus Weasley, bien que sang-pur, était depuis quelques années considéré comme traite à son sang car sa famille s'était indignée contre le Registre des Vingt-huit sacrés, déclarant même être fière d'avoir des moldus parmi leurs ancêtres. Cedrella avait dû choisir entre sa famille et l'homme qu'elle aimait. La marque de brûlure que Sirius connaissait par cœur sur la tapisserie représentait son choix encore des décennies plus tard.
L'ironie de la similitude avec l'histoire d'Andromeda n'avait jamais cessé de l'amuser. L'histoire se répétait pour les Black, incapables d'avancer, figés dans leur cercle éternel de mêmes familles et de mêmes erreurs.
- Elle avait un cœur ? Feignit-il de s'étonner.
- Je t'en prie, tu n'as peut-être aucun respect pour les vivants, mais aie au moins la décence d'en avoir pour les morts, sermonna Orion d'une voix autoritaire.
- Elle n'en a eu aucune lorsqu'il s'agissait de médire sur sa propre sœur.
- Ne me fais pas croire que le sort de Cedrella te préoccupe. Tu ne l'as même pas connu.
- Pas besoin de la connaître pour s'indigner, contra-t-il.
- C'est riche venant de toi. Je crois savoir que tu médis sur ta propre famille, dont ton frère, dès que l'occasion se présente. Tu n'es pas bien différent de cette pauvre Callidora.
A la simple mention de son petit frère, Sirius ressentit une douleur presque physique au creux de l'estomac. Il eut soudain envie de balancer son poing dans le visage dépourvu d'expression d'Orion qui le toisait de toute sa haute avec cette supériorité inhérente qu'il arborait depuis toujours.
- Je répète ma question, Sirius, reprit-il avec insistance. Que fais-tu ici ?
- Qu'est-ce que ça peut te faire ? Je suis majeur, je ne fais plus partie de la famille... ça ne te concerne pas.
Un rire désabusé échappa à son père.
- C'est ce que tu continu à vouloir croire, dit-il. Il n'en reste pas moins que tu es censé être au château, or je ne me rappelle pas avoir signé une quelconque autorisation.
Sirius ne se faisait aucune illusion. La question anodine et le ton courtois n'étaient qu'une façade aux motivations calculatrices qu'il devinait aisément. La tempête pouvait se lire dans les yeux gris d'Orion dont il avait hérité. Ce gris qui semblait viré à l'orage depuis que leur regard s'était croisé.
Comme toujours, il se contenta d'un haussement d'épaules nonchalant pour tenter de garder la main. Si McGonagall se faisait renvoyer par sa faute, il ne se le pardonnerait pas, aussi sévère et exigeante soit-elle.
- Injonction ministérielle, répondit-il après quelques secondes. Je suis convoqué par le bureau des Aurors pour témoigner, ce qui me donne le droit de sortir de l'école, même sans ta sacro-sainte approbation.
- Réellement ? Le bureau des Aurors ?
- Le second en chef des Aurors pour être précis.
A la mention de Fleamont Potter, le visage d'Orion se contracta. Ce n'était un secret pour personne que les deux hommes se méprisaient, surtout depuis que Sirius avait trouvé refuge chez les Potter.
- Intéressant, commenta-t-il néanmoins avec flegme. Je n'étais pas au courant que les Aurors avaient relocalisés leur bureau à Sainte-Mangouste. Choix étrange, tu ne trouves pas ?
- Pas plus que de te trouver ici par hasard...
L'accusation à peine voilée parut amuser son père.
- Qu'est-ce que tu sous-entends ? Que nous te suivons ? Que j'ai empoisonné ma cousine Callidora afin de te tendre un piège dans ce couloir ? Rassures-toi, tu ne vaux pas tous ces efforts.
- Non évidemment... les poisons n'ont jamais été ton truc, pas vrai ? C'était plus la spécialité de la harpie.
Orion plissa les yeux et l'air entre eux sembla crépiter à cause de la tension accumulée.
- Si tu parles de ta mère, je te prierais de faire preuve de plus de respect. A moins que tu ne veuilles que j'aille la cherche pour que tu puisses t'expliquer avec elle ?
A nouveau, le cœur de Sirius s'emballa et ébranla sa poitrine de coups sourds. Son trouble dû se lire sur son visage, car son père eut un rictus satisfait. Orion savait très bien ce qu'il faisait.
- N'est-ce pas ironique ? Au fond, tu es toujours un petit garçon effrayé par sa mère.
- Je n'ai pas peur d'elle, cracha-t-il vertement.
- Oh ce n'est pas un reproche. Quiconque peut s'accorder à dire que ce n'est pas une femme facile.
- Pas un être humain, oui...
- Et pourtant, tu lui ressembles tellement.
L'affirmation tranquille de son père mit une seconde à prendre sens dans l'esprit de Sirius. Une vague de colère et d'indignation déferla en lui devant cette insulte suprême et dans son emportement il manqua presque de donner un coup dans le mur en levant le poing.
- C'est faux, protesta-t-il d'une voix forte qui fit tourner quelques têtes dans leur direction. Je n'ai rien à voir avec elle. Ni avec vous ! Plutôt mourir !
- Mille gorgones, souffla Orion d'un ton railleur. Regarde-toi, tu n'as rien perdu de ta tendance mélodramatique.
Sirius sentit ses joues s'empourprer.
- Tu es comme ta mère, asséna-t-il. C'est bien pour ça que vous n'arrivez jamais à vous entendre. Hystériques, le tempérament colérique, convaincus tous les deux d'avoir toujours raison, incapables d'en démordre... Vous adorez faire une scène quand quelque chose vous contrarie. Vous êtes exactement pareils. Telle mère tel fils.
Un goût de centre se répandit dans sa bouche. Il fixa son père avec dédain et songea un instant à tourner les talons, à retourner dans la chambre d'Alexia pour ne plus avoir à supporter cet échange grotesque. Mais Orion aurait bien été capable de le suivre et il savait qu'il ne pouvait se dérober avant qu'il ait lui-même décidé de mettre fin à la conversation. Enfant, il ne pouvait pas quitter le bureau de son père sans être congédié, sous peine de recevoir une correction qui le hantait encore. Et puis, il se refusait de lui faire ce plaisir. Il ne plierait pas devant lui.
- Maintenant, tu vas cesser de me mentir, ordonna Orion. J'ai appris que Fleamont Potter était malade, mais je doute qu'il soit déjà en convalescence à Sainte-Mangouste. Que fais-tu réellement ici ?
- Je rends visite à quelqu'un, satisfait ? Répondit-il, agacé.
- Puis-je savoir qui ?
- Non, en réalité, tu ne peux pas. Tu n'as aucun droit de le savoir.
Orion soupira et émit un claquement de langue irrité. Malgré son attitude en apparence contrôlée, Sirius savait pertinemment comment lui faire perdre ses nerfs. Il avait eu des années de pratique.
Mains croisées derrière le dos, Orion le contourna lentement et se pencha pour lire l'inscription près du chambranle de la porte. Sirius retint l'envie de le tirer en arrière avec violence.
- Alexia Cassidy, lut-il. Ce n'est pas la sang-mêlé avec qui tu...
- Si c'est elle, coupa Sirius sèchement. Même si son statut de sang n'a aucune importance.
Orion ne prit pas la peine de commenter, mais la lueur méprisante dans ses yeux suffisait à trahir ce qu'il pensait. Ce que tous les Black au cours des siècles avaient pensé. Les sangs-purs étaient supérieurs. Sirius aurait aimé que Lily soit là pour leur prouver à quel point ils avaient tort.
- Encore une de tes belles idéologies, n'est-ce pas ? Commenta son père, toujours sans se tourner vers lui. Tu me reproches de croire en la suprématie du sang, mais c'est bien plus que cela. Tu ne l'as jamais compris parce que tu n'as jamais pris la peine d'écouter. C'est un héritage, Sirius. Les Black ont une influence au sein de notre communauté depuis des siècles non pas cause de leur sang, mais grâce à l'héritage qu'ils représentent. Que nous représentons et que nous avons bâti. Notre nom est synonyme de grandeur.
La conviction dans sa voix lui paraissait intolérable et il se retint de rouler des yeux.
- Et c'est pour ça que tu ne le supportes pas, pas vrai ? Lança-t-il. Je n'en veux pas, je ne veux pas de tout ça. De ton or, de tes propriétés, de ton héritage. Je ne veux même pas de ton nom et tu n'arrives pas à le comprendre ou à le supporter ! Tu penses que tout le monde devrait t'envier, devrait admirer notre famille, et ça te tue que ton propre fils refuse tout ça. Ça te tue que j'arrive à penser par moi-même !
- Ton insolence n'a vraiment aucune limite, gronda Orion, la mâchoire contractée. Excuse-moi de ne pas avoir compris ton désir de liberté alors que ta mère et moi t'avons tout donné. Je n'avais pas non plus l'impression que tu méprisais l'or que tu as reçu à la mort de ton oncle l'année dernière.
- C'était l'argent d'Alphard...
- Et d'où crois-tu qu'il venait ? Cet argent n'est pas apparu par enchantement. Il pouvait bien écrire ses articles au fin fond du Yorkshire, mais Alphard était un Black, un premier fils, et à ce titre il avait lui-même hérité de l'argent de son père, tout comme son propre père avant lui. Tu vois, tout est une affaire de famille et d'héritage. Mais je suppose que tu as toujours aimé prétendre le contraire, faire semblant d'être quelqu'un d'autre...
- Je ne prétends rien !
Sirius ne réalisa qu'il tremblait de colère que lorsque son corps, comme mû par une force indépendante, s'avança vers Orion jusqu'à ce qu'ils se retrouvent face à face. Désormais, il le dépassait de quelques centimètres, même si ça ne lui était d'aucune aide en cet instant. La prestance de son père et son calme furieux paraissaient tout écraser.
- Bien sûr que si, dit-il d'un ton implacable. Tu es prisonnier de ta propre liberté. Tu peux affirmer haut et fort le contraire, porter la montre des Potter, vivre chez eux ; mais laisse-moi rétablir, ici et maintenant, une vérité fondamentale à laquelle tu ne pourras jamais échapper...
Il marqua une pause et Sirius se sentit opprimé sous son regard glacial.
- Tu es un Black. Tu es mon fils. Tu le resteras et tu ne seras jamais rien d'autre.
De la même façon que s'il avait reçu un sortilège impardonnable, Sirius tressaillit et recula, le souffle heurté. Ce n'était plus seulement un goût de cendre qu'il avait dans la bouche, c'étaient des particules entières qui lui obstruaient la gorge, l'étouffaient de l'intérieur.
- Résigne-toi, continua Orion, imperturbable, parce que je suis ton père. J'ai été ton père depuis le jour où tu es venu au monde, et je serai encore ton père bien après avoir rendu mon dernier souffle sur cette terre.
- Pourvu qu'il vienne vite, siffla-t-il.
Cela ne parut pas atteindre son père qui se contenta de le fixer sans ciller, insensible à l'aversion qui se déployait sur son visage. Sirius prit conscience que quoiqu'il dise, rien ne pourrait l'ébranler. Orion Black était persuadé d'avoir raison, d'être littéralement dans son droit.
- Tu n'as décidément toujours pas appris quand te taire... Je ne sais pas ce que nous avons raté dans ton éducation, ton frère n'a jamais été ainsi...
- Ah Regulus... Parlons-en. Tu dois être tellement fier.
- Evidemment.
Ce simple mot fit soudain craquer quelque chose en Sirius et il écarta les bras, furieux.
- Espèce de... C'est ton fils ! C'est mon frère que vous avez envoyé se faire condamner !
- De quoi est-ce que tu parles ?
- De quoi je parle ? De quoi est-ce que je parle ? Répéta-t-il, conscient d'être au bord de l'hystérie. Je parle de la marque qu'il porte au bras, je parle des mangemorts.
Le dernier mot, réduit à un murmure pour ne pas être entendu par les gens autour d'eux, fut la première chose qui sembla percer le masque de son père. Pendant une seconde, son assurance s'effondra comme un château de carte. Un rictus aux lèvres, Sirius en profita pour avancer à nouveau, poings serrés, alors que sa vision se teintait de rouge.
- Il a seulement seize ans ! Vous l'avez poussé dans leurs rangs au nom de votre foutu honneur familial, de vos principes de grandeurs, sans penser une seconde qu'il n'avait pas les épaules pour tout ça.
- Cesse immédiatement, claqua Orion. Je ne te permets pas.
- Je n'en ai rien à faire de ta permission !
- Je n'étais même pas au courant, Sirius !
D'un mouvement agité, Orion se détourna et passa sa main dans ses cheveux grisonnants. Il se mit à faire les cent pas tandis que Sirius l'observait, sur ses gardes. Il n'arrivait pas à déterminer si les émotions de son père étaient sincères. Regulus lui-même avait affirmé dimanche dernier que leurs parents ne savaient pas encore qu'il avait passé la cérémonie d'initiation, que c'était Bellatrix qui était venu le chercher et l'avait introduit auprès du Seigneur des Ténèbres. Jusqu'à présent, il n'en avait pas été complètement certain, mais il supposait que même Orion ne pouvait pas feindre aussi bien l'inquiétude paternelle.
- Comment est-ce que toi tu es au courant ? Demanda-t-il brusquement.
- J'ai vu sa marque au château.
- Tu veux dire qu'il... ?
- Non, les autres ne le savent pas. Ils ne sont pas supposés exhiber leur allégeance à la vue de tous, surtout pas sous le nez de Dumbledore. C'était un accident.
- Et tu n'as rien dit à personne ?
- C'est Reg... se contenta-t-il de dire, la gorge serrée.
Orion plissa les yeux.
- Pas même à tes amis ? Au fils des Potter ?
- Si tu parles de James, non, il ne sait pas non plus... Tu vois, j'ai quand même un sens de la famille. Réjouis-toi.
Le sarcasme flagrant dans sa voix n'eut aucun effet sur son père. Le premier choc passé, il était en train de retrouver son sang-froid et sa façade impassible.
- Bien... Je verrai tout cela avec ton frère, les choses ne sont pas encore dramatiques et...
- Pas dramatiques ? Interrompit-il, incrédule. Qu'est-ce qu'il te faut, qu'il saute d'une falaise ? Vous êtes responsables, la harpie et toi ! C'est à cause de vous qu'il a fait ça !
Orion le dévisagea.
- Comment oses-tu ? Espèce de misérable impertinent, tu oses...
- Oui j'ose ! J'ose parce que vous ne lui avez jamais accordé d'attention, il n'était pas l'héritier, il n'était pas assez flamboyant, mais il était là à boire toutes vos paroles. Quelle ironie, tu ne trouves pas ? Tu as passé des années à essayer de faire de moi le fils respectable, alors que tu en avais un qui ne demandait que ta reconnaissance ! Mais tu l'as ignoré et il voulait vous rendre fiers, toi et mère. Il voulait sauver la dignité des Black.
Orion secoua la tête, une lueur proche de la pitié dans le regard, comme s'il détenait une vérité éprouvante.
- Oh Sirius... Je peux t'accorder qu'il voulait sans doute restaurer la dignité de la famille et assurer son prestige, mais ce n'est pas après ma reconnaissance ou celle de ta mère qu'il a toujours couru. C'est la tienne.
- Et alors quoi ? Il pensait l'obtenir en suivant l'exemple de Bellatrix ?
- Non, répondit-il calmement, une main glissée dans la poche. Tu avais fait comprendre assez clairement que tu nous détestais tous, y compris ton frère. Si je devais faire une supposition, je dirais que ce qu'il recherchait ce n'était plus ta reconnaissance, mais ton attention.
Sirius sentit son visage se vider de ses couleurs. Livide, il fusilla son père du regard et seul le fait qu'ils se trouvent actuellement dans un hôpital le retint de sortir sa baguette.
- Je t'interdis, dit-il, vibrant de rage. Je t'interdis de me rendre responsable.
- Ce n'était pas mon intention...
- Si quelqu'un est responsable ici, c'est toi. Toi et la harpie. Arcturus. Bellatrix et son mari de Lestrange ! Pas moi ! Tu m'entends ?!
- Je crois que tout le bâtiment peut t'entendre...
Comme en accord avec les mots de son père, la porte sur leur droite s'ouvrit soudain. Euphemia se glissa hors de la chambre, l'air contrarié. Elle se figea une seconde en découvrant la scène devant elle. Sirius et Orion se tenaient face à face, bien qu'un gouffre aurait pu les séparer tant la tension entre eux était forte. Une fureur enflammée se peignait sur le visage de l'un tandis que l'autre était l'incarnation de la colère glaciale.
Derrière Euphemia, par l'entrebâillement de la porte, Sirius distingua la silhouette de Marlène et il pria intérieurement pour qu'elle reste en dehors de tout cela, tout comme Alexia. Heureusement, la mère de James parut deviner sa crainte car elle s'empressa de refermer le battant avant de venir à leur rencontre.
Elle leur adressa un sourire poli et crispé à la fois.
- Monsieur Black, salua-t-elle. Ravie de vous voir. Je suis désolée de vous interrompre mais des patients essayent de se reposer, nous sommes dans un lieu dédié à la santé et au calme. Il serait sans doute avisé de continuer cette conversation un autre jour.
- Mrs Potter... Avec tout mon respect, cela ne vous concerne en rien. Il s'agit d'une affaire de famille.
L'emphase sur le terme de « famille » n'échappa pas à Sirius et il allait à nouveau s'en prendre à son père quand Euphemia répondit la première :
- Vous et moi savons pertinemment que je n'ai ni votre respect, ni votre considération. Néanmoins, puisque vous parlez d'une affaire de famille, j'estime avoir tous les droits depuis que Sirius est arrivé chez moi, un soir d'orage, un bleu sur la joue et tenant à peine debout. Je vous suggère donc, monsieur Black, avec tout mon respect bien évidemment, que vous laissiez mon fils tranquille.
Peu de personne pouvait se vanter de laisser Orion Black sans voix. Pourtant, à cet instant, Sirius vit son père incapable de trouver quoi répondre. Les yeux écarquillés, il dévisagea Euphemia qui n'avait jamais élevé la voix contre quiconque, à part peut-être son fils trop turbulent, et dont la philosophie était d'éviter au mieux les conflits. Cette même femme qui avait consacré sa vie à son foyer, qui n'avait jamais siégé à un poste important ou obtenu de reconnaissance autre que celle de sa famille, se tenait aujourd'hui face au patriarche de la maison Black, droite et inflexible.
Au bout de quelques secondes d'un long silence pesant, Orion se tourna finalement vers son fils sans accorder plus d'attention à Euphemia.
- Dans ce cas, murmura-t-il, je pense que cette conversation est effectivement terminée. Sirius...
- Père...
Orion lui adressa un hochement de tête et, le dos droit, s'éloigna. Aussitôt, Euphemia s'approcha de Sirius et entoura son visage de ses mains pour le forcer à rencontrer son regard noisette, le même que son fils. Le contact de sa peau parut l'ancrer à la réalité, comme s'il se réveillait d'un long cauchemar.
- Tu vas bien, mon cœur ?
- Oui... oui...
- Tu es sûr ? Qu'est-ce qu'il voulait ?
- Rien d'important... souffla-t-il. Qu'est-ce... qu'est-ce que vous avez entendu ?
- Un ou deux éclats de voix, c'est tout, rassura-t-elle. On n'entendait pas ce que vous disiez depuis l'intérieur de la chambre, ne t'en fais pas...
Soulagé, Sirius expira un grand coup. Il avait l'impression d'être complètement vidé de ses forces.
Au moment où il pensait que tout cela était terminé, la porte d'en face, celle où devait se trouver le corps de Callidora, s'ouvrit une nouvelle fois. Le clan Black en ressortit et entoura Orion immédiatement, lui demandant visiblement où il était. Sirius se tendit violemment lorsque son père le désigna d'un geste sec et que tous les regards se braquèrent sur lui. Arcturus frappa le sol de sa canne en bronze comme si c'était son petit-fils qu'il atteignait ainsi, grand-mère Irma l'observa d'un air froid, et sa tante Lucretia lui envoya un clin d'œil cynique. Euphemia tenta bien de faire barrage, comme si elle pouvait le rendre invisible, mais si quelqu'un avait des yeux plus perçants que son paternel, c'était bien sa mère.
Walburga eut la réaction la plus forte en le voyant. Son teint passa de blême à écarlate en une seconde et elle lui décocha une œillade assassine. Elle allait faire un pas vers lui quand Orion la retint par le bras. Elle voulut se dégager, mais il se pencha pour lui murmurer quelque chose à l'oreille et elle parut renoncer.
- Viens Sirius, dit Euphemia avec douceur. Ne restons pas là.
D'une main aimante, elle le guida vers la chambre d'Alexia. La dernière chose que Sirius vit avant que la porte ne se referme fut la douleur sur le visage de sa mère alors qu'elle réalisait qu'elle avait perdu son premier né au profit d'une autre femme...
**
*
Epuisé, Sirius remonta lentement les escaliers qui menaient à son dortoir. Il venait de laisser Marlène au pied des marches après leur retour au château. McGonagall les avait attendu à dix-huit heures tapantes devant les grandes portes et avait remercié Euphemia de les avoir accompagnés. Après le départ des Black, le reste de leur visite s'était déroulée sans encombre. Ils avaient passé leur journée à parler avec Alexia, à rire en jouant aux cartes, mais les aiguilles de l'horloge accrochée au mur avaient fini par leur rappeler la réalité bien vite.
Il allait ouvrir la porte et foncer s'écrouler sur son lit lorsqu'il entendit brusquement la voix de Remus s'élever, à peine étouffée par l'épaisseur du bois.
- Merlin, réponds-moi ! Où est-ce qu'il est encore allé ?
Sirius haussa un sourcil. Il n'arriva qu'à distinguer la réponse inaudible de Peter avant que Remus ne reprenne la parole.
- Je m'en fiche qu'il t'ait demandé de ne rien me dire ! C'est précisément ce qui m'inquiète. Parles, Pete, sérieusement !
- Mais... mais...
- Qu'est-ce qui se passe bordel ? Demanda-t-il en entrant sans cérémonie.
Son entrée brusque fit sursauter ses amis et Peter émit un couinement apeuré en portant la main à sa poitrine, ce qui l'aurait fait éclater de rire en d'autres circonstances, mais l'expression sérieuse de Remus l'arrêta.
- Sirius... t'es déjà revenu ?
- Comme tu peux le voir, Lunard. Ravi de vous revoir aussi. Alors, qu'est-ce qui se passe ? Une crise majeure ? Servilus s'est enfin lavé les cheveux ?
- Ce n'est pas drôle, protesta Remus, bras croisés. Je viens de revenir de ma ronde et James aurait dû être là... J'ai demandé à Peter où il était et il m'a répondu « dans la salle d'étude pour mettre au point la stratégie du prochain match ».
- Et ? On joue contre Serdaigle le week-end prochain, ça ne me paraît pas...
- J'ai trouvé ça, posé sur la table de chevet de Cornedrue, coupa-t-il.
D'un geste précis, Remus lui envoya un objet qui traversa le dortoir. Sirius leva les mains et le rattrapa juste à temps pour ne pas se le prendre en pleine figure. Décidément, il avait besoin de dormir.
Lorsqu'il baissa les yeux, il réalisa ce qu'il tenait. Le Quidditch à travers les âges. Mais ce n'était pas n'importe quel exemplaire, c'était celui de James, celui qu'il avait consciencieusement annoté au fil des années et qu'il trimballait partout avec lui quand il élaborait ses stratégies. Il ne le faisait jamais sans.
Un mauvais pressentiment germa au creux de son ventre.
- Peter, dit-il d'une voix sourde. Où est-ce qu'il est ?
- Je... il l'a juste oublié, il...
- Arrête, coupa Remus. Il ne l'oublie jamais. Et même si c'était le cas, il serait venu le rechercher maintenant. La carte n'est plus là, la cape non plus... Crache-le morceau.
- Les gars... soupira Peter d'un ton plaintif. Il m'a vraiment dit de ne rien dire... pour ne pas vous inquiétez...
- Et encore une fois c'est justement ce qui m'inquiète.
Sirius jeta le livre sur son lit avant de venir se planter devant Peter, épaule contre épaule avec Remus. Ils devaient paraître assez intimidants comme ça, tous les deux de front, car Peter se recroquevilla. Il se mit à jouer nerveusement avec ses mains, posées sur ses genoux.
- Allez, Queudver. Dis-nous.
- Je ne veux pas trahir sa confiance...
- Ce n'est pas trahir sa confiance, objecta Sirius en roulant des yeux. C'est juste nous.
- Il... Tu sais ce qu'on avait dit ? Le matin après la dernière pleine lune, dimanche ? Enfin il était lundi vu l'heure mais...
- Je sais, Pete, je sais... Et donc ?
- Eh ! Eh ! Intervint Remus. Moi je ne sais pas... de quoi on parle là ?
Sirius se tendit, nerveux et impatient. Il jeta un coup d'œil à Remus et vit la perplexité dans ses prunelles ambrées. Il soupira.
- Rien d'important, Lunard. Juste le loup qui était un peu agité. Mais c'est de ma faute, j'étais pas concentré. On pense aussi qu'il en a marre de tourner en rond dans le fond du parc, on se disait que ça serait peut-être bien de lui trouver une clairière plus profond dans la forêt pour qu'il puisse se déplacer sans risque et...
Il s'interrompit lui-même, frappé par une réalisation soudaine. Ils avaient effectivement tous eu cette conversation en revenant à l'aube vers le château, avant de l'évoquer à nouveau en se réveillant brièvement. Mais le départ d'Alexia à l'hôpital et les cours avaient peu à peu éclipsé l'idée. Du moins dans son esprit. James en revanche...
- Pitié, ne me dis pas qu'il est allé chercher la clairière tout seul dans la Forêt Interdite ?
L'expression penaude de Peter lui donna la réponse.
- Merlin, jura-t-il. Je peux pas avoir une pause ?
- Mais pourquoi est-ce qu'il est parti tout seul ? S'indigna Remus.
- Il ne voulait pas que tu culpabilises, avoua Peter. Il devait y aller avec Sirius, mais t'étais à Saint-Mangouste, et ça aurait été suspect si on y allait tous les deux donc il m'a dit de rester ici pour faire diversion. Il a dit qu'il serait là pour le dîner.
Remus jeta un regard agacé à sa montre.
- Techniquement, il a encore quinze minutes pour revenir... On fait quoi?
- On se dirige vers le parc, proposa Sirius. On l'attend à la lisière de la Forêt. S'il n'est pas ressorti à dix-neuf heures, on va le chercher. Normalement, ça devrait aller. Il y a quelques clairières pas trop profondément dans les bois, il ne risque rien, il a l'habitude...
- Je vais sincèrement le coller pour le reste de l'année, rétorqua Remus.
Amusé, Sirius enfila son écharpe et remit sa cape qu'il venait d'enlever. Sa sieste devrait attendre. Tous les trois, ils descendirent dans la salle commune d'un pas pressé, enveloppés dans leurs vêtements d'hiver pour affronter le froid des soirées écossaises au mois de mars. Ils avaient presque atteint le tableau de la Grosse Dame lorsqu'une voix fusa dans leur dos :
- Les garçons ! Deux secondes !
Ils se retournèrent d'un même mouvement vers Marlène.
- On n'a pas vraiment le temps là...
- Je voulais juste vous demander si vous aviez vu Lily ?
- Non, répondit Remus. Pourquoi ?
- Elle devait revenir de sa séance de tutorat il y a plus d'une heure, mais elle n'est toujours pas remontée au dortoir... Vous pensez qu'elle est avec James ?
Sirius sentit son estomac se contracter. Il espérait véritablement que ça ne soit pas le cas, mais alors qu'il croisait le regard entendu de Remus et Peter, il sut qu'ils pensaient la même chose que lui.
Dans quoi est-ce que James était encore allé se fourrer ? Et surtout, dans quoi avait-il embarqué Lily ?
Et voilà !!
J'avoue, j'ai des sentiments mitigés sur la confrontation Orion/Sirius... Parfois je l'aime bien, parfois je la trouve too much, vous me direz. En tout cas, je voulais vraiment explorer leur dynamique parce qu'il est souvent question de Walburga mais assez peu d'Orion dans le fond.
Le titre du chapitre est en latin, ça veut dire « au nom du Père » et je crois que c'est tiré de la Bible donc ^^
J'attends vos commentaires avec impatience, joyeux noël à tout le monde, bonnes fêtes et gros bisous !!!
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