Tome II - Chapitre 28 : Quatrième Epreuve
Bonjour! Voici le nouveau chapitre (beaucoup plus long que d'habitude ^^). J'espère que vous aimerez, bonne lecture!
Chapitre XXVIII : Quatrième épreuve
Les jambes dans le vide, James frissonna en regardant l'horizon. Il était adossé à la balustrade en haut de la tour d'astronomie et avait une vue imprenable sur le parc et les montagnes au loin. Il était venu se réfugier ici après une nuit à se retourner dans son lit, les yeux grands ouverts, à ressasser les paroles de Dumbledore à s'en donner mal à la tête. Dès que les rayons de l'aube avaient commencé à éclairer le dortoir, il avait attrapé son vieux pull de Quidditch, celui dont les manches lui retombaient sur le bout des doigts, et il était sorti pour prendre l'air.
Les couloirs étaient déserts. Personne n'était debout à une heure aussi matinale un mardi matin, alors que les cours ne commençaient pas avant au moins deux heures et surtout après la journée affreuse de la veille. C'était comme si le château s'était arrêté de fonctionner les heures qui avaient suivi l'annonce de la mort de Gemma.
James ne comprenait même pas pourquoi la mort de la jeune fille le touchait autant. Il ne la connaissait pas, une conversation au détour d'un couloir ne pouvait pas compter, et il n'était pas si proche de Tiberius. Un peu comme tout le monde, il lui parlait parce qu'il était le commentateur de l'école, leur mascotte au Quidditch toujours drôle et de bonne humeur ; mais ils n'étaient pas réellement amis. Pourtant, James n'arrivait pas à oublier son visage étalé en première page de la Gazette.
C'était comme si Pré-au-Lard recommençait. Il n'arrivait pas à passer à autre chose, tout simplement parce que comme d'habitude il prenait les choses trop à cœur et trop personnellement.
- Oh bon sang Cornedrue on gèle ici, t'es dingue !
James sursauta mais ne se retourna pas. Il avait reconnu la voix de Sirius en une seconde. Il aurait dû se douter qu'il viendrait le retrouver à un moment, il avait laissé la carte ouverte sur sa table de nuit pour ne pas inquiéter ses amis.
- Je vais redescendre pour le petit déj', t'inquiète, je vous rejoindrai.
- Comme si j'allais te laisser les pieds dans le vide en haut de cette foutue tour avec un air de dépressif, grommela Sirius. Pousse toi, laisse-moi de la place.
A contrecœur, James se décala et tourna la tête. Sirius portait déjà son uniforme, mais avait enroulé son écharpe aux couleurs de Gryffondor autour de son cou et avait passé le sweat de Remus par-dessus sa chemise, celui où s'étalait sur le devant « j'aime le chocolat noir comme mon âme ». Inutile de dire que le cadeau venait de Sirius lui-même et qu'il adorait le piquer à Remus dès qu'il le pouvait.
- Je pensais te retrouver sur le terrain, avoua-t-il d'une voix neutre. En train de voler.
- Même moi j'ai mes limites Patmol, on est en plein mois de février !
- Tu te fais vieux c'est tout...
James sourit.
- Le pire c'est que je crois que c'est vrai...
Sirius haussa un sourcil.
- D'où ça sort, ça ? Qu'est-ce que t'y arrives ?
- Rien... je sais pas trop...
- Cornedrue.
James soupira et repoussa ses cheveux qui lui retombaient sur le front. Il l'aurait dû les couper pendant les dernières vacances, mais il savait que Lily les aimait un peu longs, comme ça, et il n'avait pas pu se résoudre à s'en occuper.
Il continua à regarder droit devant lui, le temps de répondre et de trouver ses mots :
- T'as repensé à ce que Dumbledore a dit ? Sur l'Ordre, après Poudlard ?
- Evidemment... C'était plutôt étonnant et en même temps je me disais bien que quelque chose comme ça arriverait. Les gens, surtout Dumbledore, ne pouvaient pas juste rester les bras croisés en regardant ce qui se passe. On doit agir.
- Je sais. Je le sais bien... pourtant...
- Pourtant quoi ? C'est ce qu'on voulait, non ? Ne pas rester sans rien faire, se battre !
- Nous oui. Mais Lily ? Alexia ? Peter ou Remus ?
Il sentit Sirius le dévisager et redressa ses lunettes sur son nez, une boule nerveuse coincée dans la gorge.
- Tu te demandes vraiment s'ils vont s'engager dans l'Ordre ? Eux ?
- Honnêtement, j'en sais rien. Je ne sais pas non plus combien de temps va durer cette guerre. Combien de temps on va devoir se battre ? Un an, deux, dix ? On commence tout juste notre vie et on doit déjà la mettre entre parenthèse. Je ne veux pas imposer ça à Lily. Elle voulait faire des études de médicomagie...
- Et alors ? T'as entendu Dumbledore, elle le pourra si elle le veut. On a des projets d'avenir et ils le savent.
James se souvint brusquement de ce que Sirius avait affirmé au moment des entretiens d'orientation avant les vacances. Il voulait intégrer le Bureau des Aurors. Surpris, il se tourna finalement vers son meilleur ami pour lui face, et celui-ci planta ses yeux gris, de la même couleur que le ciel de plomb au-dessus d'eux, dans les siens.
- Tu ne veux plus... commença-t-il.
- Non. Enfin, je veux dire que j'ai compris que je pouvais être plus utile ailleurs. L'Ordre a besoin de membres à temps plein et je n'ai pas vraiment besoin d'un boulot. L'héritable d'Alphard réussira à me faire tenir au moins deux ans. Je verrai après. Vas-y, enchaîne. J'ai réponses à tout.
James sourit, amusé une seconde, puis il reprit son sérieux.
- Remus ? Sa lycanthropie est déjà assez dure à supporter, mais là il faudrait qu'il se consacre à l'Ordre et il aura du mal à trouver un travail après la guerre...
- Il fera comme moi, il sera membre à plein temps et on avisera après. On l'aidera tous. Soyons honnêtes, même aujourd'hui, sans parler du temps que demande l'Ordre, il aurait eu du mal à justifier ses absences auprès d'un employeur. Là, ça lui offre une autre voie.
- T'as sérieusement réfléchi à la question, pas vrai ?
- Comme nous tous, James. J'ai pensé aux mêmes questions que toi. Est-ce que Peter est fait pour ça, comment va faire Alexia avec sa maladie ? Mais on ne peut pas juste se poser des questions auxquelles on n'a pas les réponses. Il nous reste à peu près 4 mois pour faire notre choix, mais je pense que le mien est fait.
Comme d'habitude, la voix de Sirius vibrait d'une confiance à toute épreuve sous son air nonchalant. James laissa sa tête retomber contre la rambarde, fatigué. Son manque de sommeil se faisait brusquement sentir.
- Donc si... si je décidais de me battre, d'accepter la proposition de Dumbledore... dit James d'une voix à la fois mal assurée et déterminée, comme s'il avait lui aussi déjà pris sa décision. Tu me suivrais ?
Sirius le dévisagea encore une fois et James devina qu'il se retenait de lever les yeux au ciel. Il le regardait à travers ses cils, les ombres du soleil levant jouant sur son visage.
- Tu me demandes sérieusement si je me battrais à tes côtés ?
Sa réponse ne fit rien pour apaiser James et il se redressa pour planter son regard dans le sien, agité et plus grave que jamais.
- C'est pas juste une bagarre dans un couloir ou après un match, Sirius. C'est sérieux. Voldemort ne se contentera pas d'un sortilège sans conséquence ou de nous enlever des points !
- Tu crois que je ne le sais pas ? Que moi je ne le sais ? Après tout... Après Bella ? Après Reg ?
Les noms flottèrent entre eux, suspendus dans l'air. Les paroles de Dumbledore, prononcées la veille dans son bureau avec gravité, résonnèrent dans leur tête. Tous les deux savaient que leur décision allait changer plus que leur avenir à la sortie de l'école, elle allait changer leur relation et lui faire prendre un tournant qu'aucun d'eux n'aurait pu imaginer.
- Ça veut dire oui ? Demanda finalement James.
- Ça veut dire, James-je-pose-des-questions-idiotes-Potter, que je me battrai dans cette guerre. Et ça sera un honneur de le faire avec toi.
La tension dont James n'avait pas eu conscience jusqu'ici quitta son corps. Un sourire soulagé et reconnaissant s'étira sur son visage. Il ne savait pas ce qui l'attendait en entrant dans la résistance, mais il savait qu'avec Sirius à ses côtés il ne serait pas seul... jamais.
- Maintenant que t'as terminé ta crise existentielle, on peut aller manger ?
- La ferme, Patmol.
**
*
Lily inspira un grand coup, les épaules tendues. Derrière elle, James posa ses mains à la base de son cou pour tenter de détendre ses muscles, mais elle se crispa un peu plus, comme si le stress refusait de s'atténuer.
- Calme-toi, souffla-t-il contre son oreille. Ça va bien se passer.
- T'en sais rien...
- Lily, c'est une Epreuve, pas un saut du haut d'une falaise, lança Alexia. Au pire tu la rates et on passe à autre chose, ce n'est pas grave, pas besoin de te mettre dans des états pareils.
- Mais sache que si tu échoues, la maison Gryffondor en entier t'en voudra pendant des générations.
- Sirius !
- Je plaisante. Ils ont raison Evans, tu vas tous les battre à plat de couture.
Lily ne réussit qu'à leur adresser un mince sourire. La semaine avait été beaucoup trop intense pour elle et sa fameuse tendance à s'angoisser pour un rien dès que ça concernait les cours était revenue en force. Après le rendez-vous dans le bureau de Dumbledore, elle n'avait pas réussi à réfléchir à autre chose qu'à l'Ordre alors même qu'elle aurait dû être en train de travailler les potions. Elle avait l'impression que le peu qu'elle avait prévu pour sa vie après Poudlard était en train de se dérober sous ses pieds, que son avenir bifurquait sans qu'elle en ait conscience...
Même si Dumbledore avait dit qu'ils avaient jusqu'à la fin de l'année pour faire leur choix, Lily savait au fond d'elle que le sien était fait. Elle ne pourrait pas fermer les yeux. Pas alors que des gens innocents se faisaient tuer ou torturer tous les jours, pas alors que Tiberius n'était toujours pas revenu au château après l'annonce de la mort de sa sœur.
Pendant plusieurs jours, ils s'étaient tous demandé si l'Epreuve du Tournoi allait être maintenue en fin de semaine, mais les professeurs avaient finalement décidé que la vie au sein de Poudlard devait reprendre son cours.
- De toute façon, à part Rogue, aucun des concurrents dans les autres maisons ne seront un grand défi pour toi, non ? Demanda Marlène.
- C'est Jeremy Hopkrik pour Poufsouffle, et Anaïs Dalen pour Serdaigle.
Sirius sourit, goguenard.
- Oh la copine de Remus !
- Ce n'est pas...
- Tu lui as aussi donné des cours de potions pendant vos cours particuliers ? Dit Peter en jouant des sourcils.
Les Maraudeurs éclatèrent de rire tandis que Remus rougissait et Lily donna une tape sèche sur le bras de James.
- Laissez-le tranquille, rabroua-t-elle. Les écoute pas Remus. En plus, si vous vous intéressiez à autre chose qu'à vous-même, vous sauriez qu'Anaïs est vraiment douée en potion.
- Je m'intéresse à toi, protesta James.
Elle roula des yeux, un léger sourire aux lèvres. Remus lui adressa tout de même un hochement de tête reconnaissant et elle se remit à jouer distraitement avec l'anse de sa tasse.
Sur l'estrade des professeurs, elle repéra McGonagall qui discutait avec Dumbledore, supervisant d'un œil l'installation des chaudrons par Rusard et Slughorn. Quatre énormes chaudrons en étain s'alignaient devant les tables de chaque maison, prêts à être utilisés. Lily fixa le sien avec intensité. Au moins, l'épreuve de potion avait l'air d'impliquer véritablement des potions... C'était déjà un indice réconfortant.
D'une oreille distraite, elle reporta son attention sur ses amis, les mains de James toujours sur ses épaules.
- Vous avez réussi à parler à Dorcas finalement ? Demanda brusquement Peter.
- Un peu... marmonna Marlène. Elle nous décroche quelques mots par-ci par-là.
- Question de fierté, dit Alexia, elle nous reparla comme si de rien était dans quelques jours !
- Et vous allez la laisser faire ?
- Honnêtement, je n'ai pas envie de m'embrouiller encore plus avec elle. Du moment qu'elle s'excuse et qu'elle nous reparle...
Lily ferma les yeux. Dorcas était bien le dernier de ses soucis. Elle avait passé sa semaine à tenter de lui parler, de jouer la médiatrice, mais même elle avait ses limites. Cette histoire concernait Marlène et Dorcas, personne d'autre. Elle porta les mains à ses tempes en sentant un mal de crâne commencer à arriver.
- Respire à fond, murmura James. Fais-toi confiance. Tu vas être géniale.
- Hum hum...
- Tu sais, avant mon épreuve de vol tu m'as dit que je n'avais pas à stresser parce que je maîtrisais, que je n'étais bon qu'à ça...
Lily grimaça.
- La formulation laissait peut-être un peu à désirer, admit James en souriant, mais elle vaut aussi pour toi. Enfin, presque... toi tu es douée en tout, en plus d'être vraiment douée en potion. Donc relax.
- S'il vous plait ! L'épreuve va commencer ! Clama Flitwick de sa voix haut perchée. Tout le monde regagne sa place et j'appelle les représentants en potion de chaque maison à venir ici. Merci !
- Show time, lança Alexia. Bonne chance !
Les jambes tremblantes, Lily se leva. James lui adressa un dernier sourire rassurant avant qu'elle ne remonte l'allée le long de la table de Gryffondor pour rejoindre le devant de la salle. McGonagall lui posa une main sur l'épaule et la guida à a place, juste entre Anaïs et Severus. Ce dernier tenta de croiser son regard mais elle garda les yeux fixés droit devant elle, sur la foule d'élèves qui les dévisageait, impatients.
Espérant deviner ce qui allait suivre, Lily détailla le chaudron posé à hauteur de sa taille. Il n'avait rien de particulier, il ressemblait à tous ceux qu'elle avait utilisés pendant les cours de potions. Tant pis pour la théorie du chaudron percé ou à l'épaisseur non réglementaire. Un petit tas de bois et un régulateur de flamme étaient installés en-dessous du fond en étain, encore une fois rien d'anormal. Doucement, Lily se hissa sur la pointe de ses orteils et se pencha légèrement pour regarder dans le chaudron et elle aperçut une masse liquide d'une couleur violacée. Les joues rouges, priant pour que personne n'ait remarqué son geste, elle retomba à plat sur la plante de ses pieds.
Toutes les potions qui pouvaient avoir ce genre de couleur se mirent à défiler dans son esprit et elle se mit à réciter mentalement leurs propriétés. Elle en était à la troisième lorsque Dumbledore s'avança devant son pupitre d'or en forme d'hiboux pour prendre la parole :
- Bonjour à tous. Nous sommes tous réunis aujourd'hui pour la quatrième Epreuve du Tournoi, dont je vais expliquer les règles dans quelques minutes. Avant cela, je félicite tous les participants ainsi que tous les élèves qui contribuent à faire gagner des points à leur maison durant les cours. Le classement se compose à l'heure actuelle de Serdaigle en première place, suivi respectivement par Gryffondor, Serpentard, et Poufsouffle ; même si tout peut évidemment changer dans l'heure.
Le directeur sourit d'un air espiègle et un élève sur la gauche siffla pour encourager sa maison.
- L'épreuve se déroulera donc de la façon suivante : à l'intérieur de ses chaudrons se trouvent un philtre antidote à la potion de mélange malveillant. Comme la plupart d'entre vous le savent, cette potion provoque plusieurs effets néfastes et peut même être mortel. Nous allons l'administrer à un autre membre de l'équipe du champion... Evidemment la dose que nous leur donnerons ne pourra en aucun cas provoquer la mort, elle ne fera que perturber l'organisme progressivement. Le but des champions est de trouver les trois ingrédients manquant au philtre antidote pour le remettre à leur partenaire le plus rapidement possible. Ils auront le droit d'utiliser divers moyens, le choix est libre. Des questions ?
Lily secoua la tête, comme les autres. Elle voyait à peu près de quoi était composé l'antidote pour le mélange malveillant, mais il devait bien y avoir une dizaine d'ingrédient et elle ne les connaissait pas tous au gramme près. Sa nervosité augmenta.
- Parfait, dit Dumbledore, nous allons pouvoir commencer. J'appelle donc messieurs Remus Lupin et Regulus Black ainsi que miss Artemisia Meadowes et Bertha Jorkins pour être les partenaires des champions dans cette épreuve.
Il y eu un temps de flottement avant que Regulus, à la table de Serpentard, ne se lève en premier, le visage inexpressif. Bertha Jerkins l'imita une seconde plus tard, mais son expression disait clairement que le titre de « partenaire » ne lui plaisait pas dans la mesure où elle allait devoir être empoisonnée partiellement, tandis qu'Artemisia paraissait avoir une attaque de panique interne devant ce rôle imprévu.
Quand Remus vint se poster à ses côtés, Lily vit une touche d'appréhension dans ses yeux ambrés.
- Ne me laisse pas mourir, plaisanta-t-il à mi-voix.
- Jamais... j'ai besoin de mon partenaire d'arithmancie.
Chaque directeur de maison s'approcha du partenaire et lui tendit une fiole qui contenait une potion translucide.
- Cul-sec, Lupin, conseilla McGonagall. Bonne chance, miss Evans.
- Merci professeur...
Lily ouvrit de grands yeux en voyant Remus boire le poison. Son épreuve commençait.
**
*
De la place où il se trouvait, James n'arrivait pas à voir distinctement le visage de Lily, dissimulé sous un rideau de cheveux auburn ; mais il pouvait apercevoir l'expression de Remus. Il grimaça en avalant le mélange malveillant, mais rien ne se passa immédiatement. James se souvenait vaguement de son cours de potion en troisième année sur ce poison. Il revit Slughorn, son ventre bedonnant raclant le bord de son bureau, leur expliquer que, selon la force du dosage et de la dissolution des ingrédients nuisibles pour l'homme, la potion pouvait prendre entre trois secondes et quinze minutes pour agir. Puisqu'aucun des partenaires ne s'étaient encore écroulés de douleur, James en déduit que les professeurs ne s'étaient pas trompés dans la confection du mélange.
Tendu, il observa Lily allumer son chaudron avant de prélever un échantillon du remède pour le placer à côté. Elle tapa du pied, impatiente, tandis qu'un léger frémissement agitait la surface. Elle jeta un coup d'œil à Remus, comme pour s'assurer qu'il allait toujours bien. Même si James commençait à le trouver un peu pâle, il tenta de relativiser. Remus avait souvent le teint un peu blême et l'air maladif, son esprit était en train de lui jouer des tours.
- Vous avez dit qu'on pouvait utiliser divers moyens pour l'Epreuve et que le choix était libre ? Demanda brusquement Lily d'une voix forte en se tournant vers le directeur. On peut vraiment faire ce qu'on veut ?
- Dans la limite des règles de sécurité, bien entendu... mais oui, miss Evans.
Lily hocha la tête. Elle sauta en bas de l'estrade et se mit à courir vers eux. Une vague d'étonnement parcourut la foule et les élèves se mirent à parler entre eux, confus. James la dévisagea également, perplexe, mais elle le dépassa pour se jeter sur Alexia.
- T'as ton livre de potion ? Murmura-t-elle.
- Euh... oui dans mon sac...
- Donne-le-moi !
- T'es sûre d'avoir le droit... ?
- Le choix est libre, intervint Sirius, passe-lui ! Evans, t'es un génie.
Lily sourit. Elle empoigna le manuel corné d'Alexia et, dans un mouvement qui fit voler ses cheveux, elle repartit en courant vers son chaudron. James applaudit pour l'encourager. Les autres champions parurent encore hésiter une seconde, incertains, comme s'ils s'attendaient à ce que les professeurs arrêtent Lily ; mais Dumbledore se contenta de sourire avec amusement et resta à sa place.
Anaïs Dalen fut la première à imiter Lily. Elle se précipita vers la table des Serdaigle et aussitôt des dizaines de mains lui tendirent un manuel de potion pour accélérer les choses ; tandis que du côté des Poufsouffle un élève fit carrément voler le précieux livre au-dessus des têtes des autres et Jeremy Hopkrik le rattrapa tant bien que mal. Seul Severus ne bougea pas, concentré au-dessus de son chaudron, et James espéra que c'était pour se donner un genre et pas parce qu'il connaissait parfaitement la potion.
Une fois que tous les champions eurent repris leur place sur l'estrade, il reporta son attention sur Lily. Elle feuilletait le manuel à toute vitesse, cherchant la page consacrée au mélange malveillant tout en repoussant ses cheveux. Son antidote était arrivé à ébullition.
Elle allait commencer son analyse lorsque le premier symptôme du mélange malveillant se manifesta. James vit, en périphérie de sa vision, une silhouette vacillée et il tourna la tête juste à temps pour voir Artemisia Meadowes s'effondrer. Son petit corps tomba presque sans bruit, comme si on venait de couper les fils d'une marionnette ou que ses jambes n'avaient soudain plus supporté son poids.
Quelqu'un cria. James crut reconnaître Dorcas, mais il ne détourna pas la tête pour vérifier, les yeux fixés sur Artemisia. Il sentit son cœur s'accélérer.
Lily s'était figée au-dessus de son échantillon, horrifiée, et même Rogue releva la tête. Anaïs resta tétanisée au-dessus de la petite fille jusqu'à ce qu'une voix s'élève.
- Fais quelque chose par Merlin !
Cette fois-ci, James reconnut le ton rude de Dorcas, mais il ne pouvait pas lui en vouloir. Il repensa à Artemisia, perchée sur son balai, ou lorsqu'il l'avait prise dans ses bras pour un tour d'honneur tout le long du terrain du Quidditch après leur victoire. Dans un état second, il se leva et Sirius tenta de le retenir.
- Cornedrue tu ne peux pas...
Mais James l'ignora. Il remonta l'allée et sentit quelqu'un dans son dos faire de même avant que Dorcas n'arrive à sa hauteur. Tous les deux, ils se laissèrent tomber à genoux devant la petite fille et James fit un signe rassurant à Anaïs.
- Elle va bien. Le mélange a juste eu plus d'effet sur elle à cause de son poids et de sa taille. Continues l'antidote, elle en a besoin.
Il n'attendit pas de voir si Anaïs obtempérait. Délicatement, il souleva la tête d'Artemisia et écarta une mèche sombre qui lui barrait le front avant de la poser sur les genoux de sa sœur.
- Art ? Souffla Dorcas, tremblante. Tu m'entends ?
- J'me sens pas bien...
- Je sais ma puce, ça va passer. Accroche-toi.
Dorcas caressa ses cheveux, l'air légèrement rassurée en voyant sa sœur répondre, et croisa le regard de James. Il lui fit un sourire rassurant. Ils étaient peut-être en froid depuis une semaine, mais il n'était pas sans cœur au point de la laisser seule dans sa détresse.
- Tu sais qui est là, Art ?
- Non...
- James Potter en personne.
- Salut, mini Meadowes. Je sais que c'est pas la grande forme tout de suite, mais ne t'inquiète pas. L'épreuve est bientôt terminée.
Artemisia entrouvrit les yeux pour regarder James et sourit timidement. Il repensa à la remarque de Sirius il y a quelques jours sur le béguin qu'elle avait pour lui et il s'amusa en la voyant rougir.
Quand il regarda à nouveau en direction de Lily, elle était en train d'écrire furieusement sur un bout de parchemin, les sourcils froncés. Il espérait réellement qu'elle avait réussi à trouver au moins un des ingrédients manquants à ce stade, parce que Remus s'était assis par terre, la tête dans ses bras.
- Je reviens, murmura-t-il à Dorcas. Reste avec elle.
Il se glissa jusqu'à Remus, veillant à ne pas perturber la concentration des autres, et posa une main sur son épaule. Remus sursauta.
- C'est moi... Tu vas bien ?
- Non... Tu veux savoir l'effet que ça fait ? Tu te rappelles de ta grippe en troisième année ?
- Oh...
- C'est ça, doublé avec l'impression de s'être pris le magicobus de plein fouet, décrit Remus.
- Tiens le coup... Lily ? T'en es où ?
- J'avance, dit-elle, la respiration saccadée. Il manque un œil de triton et des baies de sureau en poudre à l'antidote... mais je ne sais pas quel est le dernier ingrédient manquant...
- Et tu as un œil de triton et des baies de sureau sous la main ?
Lily pris le temps de lui jeter un coup d'œil incrédule et James leva les mains.
- Compris, question idiote. Je vais te chercher ça.
- Merci... Et ramène de l'eau pour Remus et Artemisia. Il faut qu'ils restent hydratés.
James acquiesça. A contre cœur, il s'éloigna de l'estrade pour retourner vers les autres. Du côté des Poufsouffle, deux amies de Bertha Jorkins s'étaient aussi levées pour lui apporter une chaise et rester à ses côtés ; tandis que Regulus tenait encore debout, même si la sueur collait ses cheveux noirs contre son front et qu'il avait l'air fiévreux sous la lumière des torches.
Sur la table, devant Alexia, des dizaines d'ingrédients de potion s'étalaient et il remercia Merlin intérieurement.
- Tu es incroyable, dit-il.
- Je me disais qu'il fallait mieux prévenir que guérir, expliqua-t-elle. J'ai pris tout ce que j'avais dans mon nécessaire à potion. Lily sait ce qu'il lui faut ?
- Des baies de sureau et un œil de triton.
- Triton marin ou triton d'eau douce ? Demanda Marlène en cherchant parmi les ingrédients. Ce n'est pas la même chose...
James le savait bien. Il avait fait exploser un chaudron l'année dernière en se trompant entre les deux quand il en avait jeté un dans la potion de Servilus. Dans le doute, il attrapa les deux que Marlène lui tendait, ramassa une poignée de baie de sureau, puis récupéra la cruche d'eau avant de repartir vers l'estrade.
Il déposa le tout sur le bord du plan de travail de Lily.
- Tiens... Alors, le troisième ingrédient ?
- Je crois que c'est du moly, tu sais cette fleur avec une tige noire et des pétales blancs qui sert à neutraliser les enchantements ? Mais elle est très rare, on en utilise pas en cours... Je ne sais pas où je peux en trouver...
- T'es sûre que c'est ça ?
- C'est le seul ingrédient qui manque dans l'antidote, tout le reste est dedans, je...
Lily soupira et parcourut à nouveau ses notes, frustrée, et James l'arrêta en prenant sa main dans la sienne par-dessus le chaudron.
- Calme-toi, tu te débrouilles très bien. Continu à faire l'antidote, écrase les baies en poudre, et je m'occupe de la fleur, d'accord ?
- Oui... oui, faisons ça. Et donne de l'eau à Remus.
James se baissa immédiatement et tendit la cruche à son ami. Les mains tremblantes, Remus la porta à sa bouche avec avidité. Son visage paraissait soudain fiévreux à lui aussi, mais il repoussa la cruche au bout de quelques secondes.
- Pour Artemisia, articula-t-il.
- Je reviens t'en redonner dans une minute, promit James.
A force de courir partout, des coups sourds ébranlaient sa poitrine, mais il ne s'arrêta pas. Quand il revint auprès de la petite fille, Dorcas l'avait redressée en position assise et ils s'y mirent à deux pour l'aider à avaler sans s'étrangler.
- C'est ça, c'est bien, Art. Bois.
Entendre Dorcas parler avec tant de douceur lui faisait presque étrange. Il avait plus l'habitude de l'entendre râler et être sarcastique.
James osa jeter un coup d'œil à Anaïs pour voir où elle en était et il fut rassurée de voir qu'elle avait elle aussi trouvé un des trois ingrédients manquants et qu'elle était actuellement en train de verser la poudre de baies dans son chaudron.
- Triche pas, croassa Artemisia en souriant.
James porta la main à sa poitrine, l'air faussement offensé.
- Moi ? Tricher ? Je t'apporte de l'eau je te ferais dire, mini Meadowes. En plus, je regardais juste pour toi. Plus vite l'antidote est terminé, plus vite tu seras sur pied. Même si je suis sûr que Gryffondor va gagner.
- Mais Poufsouffle a l'ingrédient qu'on n'a pas...
- Quoi ?
Par réflexe, il tourna la tête vers le chaudron des Poufsouffle, sur sa gauche. Jeremy Hopkrik tenait une fleur dans sa main. Une fleur à la tige noire et aux pétales blancs.
- Où... où est-ce qu'il l'a trouvé ?
- Je n'ai rien vu, dit Dorcas, agacée.
- Anaïs, appela James. Tu sais quelque chose ?
La jeune fille blonde se mordit la lèvre. Elle évita son regard, et James comprit pourquoi en entendant les élèves de Serdaigle s'agiter dans son dos en le voyant parler à leur championne.
- Je ne peux pas...
- Anaïs, s'il te plait... Remus ne va pas bien, Artemisia non plus !
- Je...
- Tu me dis où est-ce qu'il a trouvé le moly et je te donne le deuxième ingrédient manquant. Deal ?
Anaïs parut hésiter une seconde, mais les noms de Remus et d'Artemisia semblèrent la faire flancher car elle contourna son chaudron pour venir s'agenouiller avec eux. Quelqu'un cria, comme s'il venait d'assister à un complot international, mais Anaïs l'ignora et planta ses yeux bleus dans ceux de James, imperturbable.
- Tu te souviens de la deuxième épreuve ? Le labyrinthe végétal ? Les champions devaient ramasser les plantes et les fleurs qu'ils croisaient. Le moly inclus. Jeremy vient juste de le récupérer parce que Bertha était celle qui participait à cette épreuve. Demande à Mary McDonald si elle a ramassé du moly dans le labyrinthe...
- Et toi ? Qu'est-ce que tu attends pour... ?
Il s'interrompit tout seul. Serdaigle allait avoir un problème. La personne qui avait participé à l'épreuve de botanique pour eux n'était autre que Tiberius Ackerley, toujours absent du château. Il déglutit, la gorge sèche.
- Oui, ça va être compliqué pour moi... dit Anaïs d'un ton cynique qui lui ressemblait peu.
- Ecoute, je vais voir Mary, et si elle en a, je t'en passe un peu...
- Pourquoi tu ferais ça ?
- Parce que le but de ce Tournoi, c'est de promouvoir l'entente entre les maisons, répondit-il en citant Lily. Et parce que je sais que Remus t'aime bien.
Il se releva, les genoux douloureux, un sourire espiègle aux lèvres en voyant Anaïs rougir. Comme promis, il déposa un œil de triton sur sa table de travail avant de courir à nouveau en direction de la table des Gryffondor. Cette fois-ci, il dépassa ses amis pour se diriger tout droit vers son équipe de Quidditch, assise un peu plus loin.
Mary McDonald et Adrian Connelly se levèrent à demi dès qu'il arriva à leur hauteur, prêts à intervenir.
- T'as besoin de quoi capitaine, dis-nous tout !
- Mary, est-ce que t'as ramassé du moly dans le labyrinthe pendant ton épreuve ?
- Du quoi ?
- Une fleur blanche à la tige noire.
Mary secoua la tête, défaite.
- Non... J'allais ramasser des plantes quand j'ai entendu Zabini crier et après je n'ai pas eu le temps... désolée...
- Pas grave... c'est pas grave, merci quand même.
James tenta de masquer sa panique. Pour une fois, et presque ironiquement, il se rappela des mots de Dumbledore juste avant l'épreuve de botanique fin novembre. Il leur avait conseillé de faire attention aux différentes plantes, car elles pourraient « leur servir de plus d'une façon ». Evidemment. Il ne savait pas s'il avait envie de faire une remarque bien placée au directeur ou le féliciter pour ses énigmes toujours si créatives.
En panne d'idées, James retourna auprès de Sirius, Peter, Alexia et Marlène.
- Qu'est-ce qui passe ? Demanda cette dernière.
- On a un problème... Le dernier ingrédient manquant est une plante rare. L'élève qui passait l'épreuve de botanique était censé la fournir, mais Mary ne l'a pas ramassé. C'est encore pire pour les Serdaigle, Tiberius n'est même pas là. Je n'ai pas vu pour les autres, mais Hopkrik a le moly et...
- Et rien d'autre, le rassura Peter. Il n'arrive pas à analyser le reste de l'antidote, on a encore un peu de temps. C'est Rogue qui m'inquiète. Dymphna Zabini vient de lui passer un truc, ça doit être la plante. Et Phyllida vient de courir chercher autre chose, sûrement les autres ingrédients...
- Alors qu'est-ce qu'on fait ?
- On pourrait... commença Sirius avant de s'interrompre brusquement.
James fronça les sourcils et était sur le point de lui demander de continuer quand il entendit un nouveau cri. Un cri qui venait de la table des Serpentard, poussé par Livia Fawley, qui avait la main plaquée contre la bouche. Il fit volte-face juste à temps pour voir Regulus, à moitié soutenu par un Severus décontenancé, s'effondrer au sol.
Même sa chute parut gracieuse. Le visage blême, il porta la main à sa gorge et desserra sa cravate, comme s'il avait du mal à respirer. Agité de tremblements, il détourna la tête tandis que toute l'école le dévisageait et James ressentit un élan de pitié envers lui qui d'habitude avait toujours l'air maître de ses gestes.
Préférant éviter d'être une énième paire d'yeux indiscrète, il se retourna à nouveau et se crispa. Sirius ne lâchait pas son frère du regard, le corps tendu. Il serrait la main d'Alexia tellement fort dans la sienne que le sang commençait à refluer au bout de ses doigts. Il semblait hésiter à se lever, à faire quelque chose, mais James savait que sa foutue fierté l'empêchait d'agir.
- Allez Reg', relève-toi... marmonna-t-il entre ses dents.
- C'est déjà étonnant qu'il ait tenu si longtemps, commenta Peter, les autres sont tombés il y a plusieurs minutes.
Sirius lui décocha une œillade noire et Peter battit en retraite, les joues rouges. Sa remarqua était pourtant pertinente. James se souvint d'une nuit, peu après sa fugue, où Sirius lui avait raconté que ses parents lui faisaient parfois prendre du poison en dose infime, trop infime pour véritablement avoir des effets, afin d'habituer son corps en cas de tentative d'empoisonnement. Une pratique qui remontait au Moyen-Age chez certaines familles de sangs-purs qui avaient peur de voir leurs héritiers ou leurs membres se faire assassiner. La résistance de Regulus n'était peut-être pas due au hasard.
- Il a vraiment du mal à respirer... souffla Alexia. Pourquoi personne ne fait rien ?
James osa se retourner et constata qu'elle avait raison. Regulus se tenait toujours la gorge, la respiration erratique.
- James... plaida Sirius.
- J'y vais.
Il se releva. D'un pas déterminé, sans oser se préoccuper des Serpentard, il ramassa la cruche d'eau qu'il avait laissé tout à l'heure et s'approcha de Regulus.
- Qu'est-ce que tu fiches, Potter ? Siffla Rogue.
- Je l'aide. Retourne à ton antidote, Servilus.
Rogue serra les poings mais se détourna vers son chaudron, ne voulant pas perdre de temps. Soulagé d'avoir évité un premier obstacle, James se baissa pour croiser le regard de Regulus.
- Laisse-moi, ordonna-t-il d'une voix rauque.
- Je ne vais pas te laisser t'étouffer tout seul. Bois.
- Quelle grandeur d'âme...
- La ferme Black, bois et c'est tout, soupira-t-il.
Les yeux de Regulus se perdirent par-dessus son épaule pendant une brève seconde, comme s'il cherchait quelque chose, et James supposa que Marlène ou Sirius avait dû faire un signe, car il s'empara de la cruche d'un geste avide. L'eau sembla lui redonner des couleurs.
Soulagé, James resta tout de même à sa place, juste au cas où, comme il l'avait fait pour Artemisia. Brusquement, une fiole apparut dans son champ de vision, juste entre lui et Regulus. Ils levèrent la tête tous les deux. Severus se tenait devant eux, inexpressif, mais une lueur de triomphe brillait au fond de ses yeux noirs.
- Terminer, annonça-t-il. Voilà ton antidote.
- Déjà ? Dit James, surpris.
- Phyllida est revenue avec l'œil de triton pendant que tu jouais au bon samaritain, Potter. Maintenant, bouge de là. J'ai une épreuve à gagner.
S'il l'avait pu, James aurait adoré énerver Servilus en restant où il était, mais il y avait trop de témoins et il n'avait plus quinze ans. Tendu, il s'écarta. Regulus porta la fiole à ses lèvres tandis qu'un silence presque religieux s'abattait sur la Grande Salle. Contrairement au mélange malveillant, l'effet fut immédiat. Il perdit son air maladif et sa posture se redressa, comme si un poids invisible venait d'être enlevé de ses épaules.
Même si Gryffondor n'était pas premier, James se surprit à applaudir avec les autres, étrangement rassuré. Il se remit sur ses pieds en même temps que Regulus. Au loin, il vit Sirius qui avait repris son air nonchalant, comme s'il n'avait pas eu une quasi attaque de panique il y a quelques minutes.
- James ! Hurla soudain Lily. James !
Son euphorie passagère s'envola aussitôt.
- C'est Remus !
James se précipita vers eux. Le chaudron lui cachait en partie son ami et ce qu'il découvrit le figea sur place. Remus était appuyé contre Lily, le teint livide, les lèvres presque bleues. Ses yeux ambrés étaient flous et il se tenait la gorge, comme Regulus quelques instants auparavant.
- On déclare forfait, décréta-t-il immédiatement. Il a besoin de l'antidote. Maintenant.
- Non... protesta Remus faiblement.
- N'essaye même pas Lunard, tu...
- Laisse-moi essayer quelque chose, intervint Lily. Si ça ne marche pas, on abandonne.
- Lily...
- Fais-moi confiance. Artemisia va encore à peu près bien alors qu'il pèse deux fois son poids. Le mélange malveillant est plus impressionnant qu'il n'y paraît.
James se passa une main dans les cheveux, nerveux, avant de s'avouer vaincu en croisant ses prunelles vertes émeraude qu'il aimait tant.
- Deux minutes, concéda-t-il, pas plus.
**
*
Les pieds de Lily parurent décoller. La vision brouillée par les larmes, elle accourut vers Severus, en train d'éteindre son chaudron. Une myriade d'émotions traversa son visage lorsqu'il la vit.
- Lily...
- Sev', s'il te plaît...
La réalisation de ce qu'elle lui demandait silencieusement se peignit sur ses traits. Il se referma sur lui-même immédiatement.
- Non, dit-il avec dureté. Tu n'as pas le droit...
- C'est un tournoi d'entraide, Sev'. Remus ne va pas bien, Artemisia non plus, et Bertha va sûrement s'évanouir d'une seconde à l'autre. Je t'en prie, aide-nous.
- Un tournoi d'entraide ? Répéta-t-il, incrédule. Un tournoi d'entraide quand ça t'arrange, oui ! Tu ne m'as pas décroché un mot depuis des mois, et là tu viens me demander de l'aide pour ne pas déclarer forfait à ta stupide épreuve ?
Face à face, ils parlaient trop bas pour que les autres entendent, pourtant le cœur de Lily se mit à cogner contre sa cage thoracique. Elle sentit sa peau s'embraser jusqu'à sa clavicule et son ventre se serra honteusement.
- Je ne le fais pas au nom de notre amitié, je le fais parce que personne ne mérite ce qui est en train d'arriver. Montre-moi le garçon que je connais capable d'aider les autres...
- Ils vont me tailler en pièce... rétorqua-t-il en désignant d'un coup de menton ses camarades.
- Vous avez déjà gagné la première place, personne ne pourra vous la prendre. Sev'...
- Donne-lui, Rogue, intervint une voix.
Lily manqua de sursauter. Elle avait complétement oublié Regulus, toujours sur l'estrade. Etonnée, elle le dévisagea et il sembla amusé de sa surprise.
- Les Serpentard ne sont pas totalement ingrats, Evans. Considère ça comme une dette. Si un jour on a besoin de quelque chose, tu te souviendras que Rogue et moi t'avons aidé aujourd'hui.
- Sérieusement ? Lâcha Rogue.
- Donne-lui l'antidote.
Severus secoua la tête, mais obtempéra. Alors qu'il lui tendait plusieurs fioles provenant de son propre chaudron, Lily frissonna au contact de sa peau et du regard lourd de sens de Regulus. Sans demander son reste, elle rejoignit James et Remus d'une démarche mal assurée.
- Comment t'as fait ? Demanda James, incrédule.
- Peu importe, c'est fait. Bois Remus, vas-y.
Elle alla ensuite donner une fiole à Artemisia et Bertha. Dès que les antidotes furent avalés, Dumbledore s'avança et d'un mouvement de baguette, les chaudrons se vidèrent.
- Félicitations à tous, la quatrième Epreuve du Tournoi est à présent terminée ! Avec nos plus vifs compliments, nous accordons donc 150 points à Serpentard pour sa maîtrise du noble art des potions et une solidarité remarquable. Gryffondor, pour son ingéniosité et sa camaraderie, remporte la seconde place avec 120 points. Serdaigle et Poufsouffle ont loin d'avoir démérité et ils obtiennent magnifiquement 80 et 50 points respectivement. Nous pouvons tous les applaudir. L'entraide a été, aujourd'hui, la plus belle des forces.
Lily émit un rire étranglé et applaudit à tout rompre, exténuée. En sentant des bras l'enlacer par derrière, elle se laissa aller d'instinct.
- Merci, souffla-t-elle. Je n'aurais pas pu faire ça sans toi...
- Evidemment que tu aurais pu, contra James, un sourire dans la voix. Pas avec autant de style, certes, mais...
- Oh tais-toi.
Elle se retourna et posa sa main sur nuque pour l'attirer contre elle. Ils s'embrassèrent avec le bruit de la foule autour d'eux.
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