Tome II - Chapitre 19 : James + Lily


Chapitre XIX : James + Lily

Pour la première fois depuis longtemps, James avait l'impression de perdre ses moyens. Aucun trait d'esprit ou de geste grandiose ne lui venait en tête. Il avait embrassé Lily Evans. C'était comme s'il venait de terminer un marathon, long de près de sept ans, par un sprint effréné, et qu'il était maintenant à bout de souffle, incapable de se souvenir comment respirer. Il regardait Lily, il la dévorait du regard... et ne savait pas quoi faire. Personne ne lui avait dit de réfléchir à l'après.

Il glissa un regard en direction de la jeune fille, et son cœur loupa un battement. Elle était enfoncée dans le canapé à côté de lui, les jambes repliées sur elle, les yeux résolument baissés sur ses mains qui jouaient nerveusement avec le bas de son pantalon de pyjama. Ses joues étaient colorées d'un joli rouge d'embarras et James avança vers elle pour essayer de lui faire relever la tête.

- Eh Lily... ça va ?

- Oui...Bien sûr... C'est juste que... c'est idiot, mais...

- Tu ne vas pas partir en courant et prétendre ne plus me connaître ? Demanda-t-il pour détendre l'atmosphère alors qu'elle buttait sur les mots.

Lily sourit puis cogna doucement son genou contre le sien.

- Je te l'ai promis, non ? Le rassura-t-elle. Je ne vais pas regretter.

- Mais pour toi aussi c'est ...bizarre ?

- Un peu, reconnut-elle. Je crois que j'ai passé tellement d'années à me convaincre que je te détestais... que je ne sais pas quoi faire maintenant, tu vois ?

James comprenait parfaitement.

- En plus, ajouta-t-elle timidement, je n'ai jamais... enfin contrairement à toi je ne suis pas sortie avec beaucoup de personne avant...

- « Avec beaucoup de personne », répéta-t-il, goguenard. N'exagère pas non plus.

- Tu veux qu'on fasse la liste des ex tout de suite ? S'amusa Lily. Parce que la mienne s'arrête à Jeremy Hopkrik et Wilbert Perks. D'ailleurs, je ne sais pas si Wilbert compte vraiment, on est resté ensemble seulement deux semaines en troisième année.

- Attends, attends, retour en arrière ! Jeremy Hopkrik ? Tu es sortie avec Jeremy Hopkrik de Poufsouffle ?

- Je dois avoir un faible pour les capitaines de Quidditch j'imagine...

- Il m'a envoyé sa batte en pleine figure pendant un match une fois ! S'indigna-t-il. Et comment est-ce que je ne le savais pas ?

- Il faut croire que j'ai encore des secrets pour toi, sourit-elle. Je suis sortie avec lui environ trois mois, à la fin de la cinquième année. C'est peut-être pour ça que Jeremy t'avais frappé avec sa batte, maintenant que j'y pense. C'était au moment... où on était un peu en froid tous les deux. Plus que d'habitude, je veux dire. A cause de Severus et toute l'histoire près du lac, et puis un peu avant tu t'étais disputé avec les Maraudeurs je crois. Enfin, tout ça pour dire qu'on s'était ignoré pendant des semaines.

- Les pires semaines de ma vie !

- Les plus calmes de la mienne.

- Eh ! S'exclama James, feignant d'être vexé. Tu pourrais au moins reconnaître les trésors d'inventivité que j'ai déployé toutes ces années !

- Tu n'as pas déployé de la subtilité, ça je peux te l'accorder, rit-elle.

Une lueur malicieuse dans les yeux, James se pencha sans prévenir et lui vola un baiser. Ses lèvres laissèrent un goût de sucre et de citron sur sa peau et elle se remit à sourire malgré elle.

- Je ne sais pas si j'arriverai à m'y habituer...commenta Lily.

- Attends de retourner à Poudlard ! C'est l'école entière qui va devoir s'y habituer.

- Oh Merlin, la tête que les gens vont faire !

James éclata de rire.

- La tête de McGo oui ! Je suis sûr que des paris tournent en salle des profs.

- James...

- Quoi ? Comme tu l'as dit, la subtilité n'a jamais été mon fort pendant des années. Derrière ses robes en tartan écossais se cache un cœur de romantique, j'en suis persuadé.

Lily secoua la tête. Avant d'affronter Poudlard, elle devra d'abord mettre leurs amis au courant, et ce sûrement dès demain matin. Quoique, elle attendrait que Dorcas ait avalé un café et qu'Alexia ait pris ses médicaments avant pour éviter tout incident.

Brusquement, elle réalisa quelque chose et se redressa, les yeux écarquillés. James se tendit immédiatement à côté d'elle.

- Quoi ?

- Je vais devoir rencontrer tes parents !

- Tu as rencontré ma mère ce matin.... ? Lui rappela-t-il, perplexe.

- Non, je veux dire... Les rencontrer maintenant qu'on est...enfin après ce qui s'est passé ce soir... Ce n'est pas la même chose.

- Lily, ma mère t'aime déjà autant que Sirius, assura James, attendri et amusé. Quant à mon père, il a déjà hâte de te rencontrer pour pouvoir se moquer de moi. Alors détends-toi, vraiment. Tu n'auras qu'à leur sourire et ils tomberont sous ton charme, comme tout le monde !

- Tu es tombée sous mon charme grâce à mon sourire ? Releva-t-elle, espiègle.

Elle retint difficilement un regard moqueur en voyant le trouble de James sur son visage avant qu'il ne se reprenne, nerveux.

- Je suis tombé sous ton charme pour beaucoup de raisons, Lily Evans, affirma-t-il. Ton sourire a aidé oui... Mais ça va au-delà de ton...physique. C'est toi, toi tout entière avec ta gentillesse, ton intelligence et tes manières bornées.

- Bornées ? Releva-t-elle pour éviter de pense à son cœur qui s'était emballé dans sa poitrine. C'est l'hôpital qui se moque de la charité, Potter.

James fronça les sourcils.

- Qu'est-ce que la charité vient faire là-dedans ? C'est encore une de tes expressions moldus incompréhensibles ?

Avant que Lily ne puisse le répondre, toujours amusée devant sa perplexité pour les expressions moldus qu'il ne maîtrisait pas, ils entendirent le bruit d'une clé dans la serrure suivit d'une porte qui s'ouvrait doucement. James bondit sur ses pieds alors qu'un homme entrait dans le salon quelques secondes plus tard, l'air fatigué et une cape de voyage encore sur le bras.

- Papa !

- James... dit-il, surpris. Qu'est-ce que tu fais encore debout ? Il est tard.

Lily resta en retrait derrière le canapé, observant les deux hommes. James se tenait à côté de son père et ne le quittait pas des yeux, anxieux, ce qu'elle ne pouvait pas lui reprocher. L'homme avait le teint blême, même s'il veillait à garder le dos droit et se tenait solidement sur ses deux jambes. Ses cheveux, un peu plus bruns que ceux de son fils, commençaient à virer au gris au niveau de ses tempes et des petites rides craquelaient le coin de ses yeux noisettes. Ils se ressemblaient tous les deux énormément, même si James avait la silhouette plus mince et était un peu plus petit que son père.

- Je voulais t'attendre... Pour savoir. Qu'est-ce que les médicomages ont dit ?

- On en parlera demain, il est presque trois heures du matin.

- Mais...

- James, dit-il fermement. Il faut que je voie ta mère avant, d'accord ? Mais ne t'inquiète pas.

Lily aurait voulu lui dire qu'il demandait l'impossible, et d'ailleurs lui-même paraissait en être conscient car il posa une main rassurante sur l'épaule de son fils comme pour appuyer ses paroles.

- Et je vois que tu ne veilles pas seul en plus... Enchanté, mademoiselle. Veuillez excuser mon fils pour vous tenir éveillée à une heure pareille.

- Je ne l'ai pas forcé, protesta James. Elle est là de son plein gré pour la glace au citron.

Lily sourit et contourna le canapé pour s'avancer timidement vers les deux hommes.

- Bonsoir monsieur Potter...contente de voir que vous allez bien.

- Appelle-moi Fleamont, dit-il. Et merci beaucoup, j'en suis plutôt content aussi. Tu t'appelles... ?

Cette fois-ci, Lily ne laissa pas James se lancer dans le vide tout seul. Pour la première fois, elle décida de le devancer et, le cœur battant et ses émotions faisant rage dans sa poitrine, elle tendit la main vers monsieur Potter.

– Lily Evans, se présenta-t-elle avec aplomb en souriant. La petite amie de James.

Ils eurent la même réaction : le père et le fils haussèrent les sourcils, surpris. Elle ne comprenait pas bien d'où venait la surprise de Fleamont (elle pria pour qu'il n'ait pas entendu parler d'elle jusqu'à aujourd'hui, imaginant bien ce que ce les Maraudeurs avaient pu dire pour plaisanter), mais elle déchiffra l'expression de James plus aisément. Il ne s'attendait visiblement pas à ce que ça soit elle qui annonce la nouvelle et pose les mots sur leur nouvelle relation la première.

- Pas trop tôt, lâcha Fleamont en lui serrant la main. Peter me doit une mornille.

- Tu as parié avec mes amis ? S'exclama James, horrifié.

- Seulement avec Peter et Sirius. Remus a déclaré qu'il était « au-dessus de tout ça ».

Fleamont souriait, l'air de trouver cette situation très divertissante après une journée entière à l'hôpital.

- Remus est quelqu'un de bien....marmonna James.

- On parlera du compas moral de tes amis une autre fois. Allez, il est vraiment tard et si on ne lève pas avant midi demain, ta mère ne va pas être contente.

- Comme si elle aussi ne t'attendait pas les yeux grands ouverts dans sa chambre...

- James, dit monsieur Potter d'un ton qui ne soufflait aucune réplique. Demain. Je te le promets, on parlera demain, tu pourras même lire mon bulletin de santé certifié par mon médicomage. Mais pour l'instant, au lit.

James tenta de soutenir le regard de son père une seconde avant d'abandonner. Ses épaules s'affaissèrent, et, résigné, il hocha la tête. Lily aurait voulu s'approcher de lui pour le réconforter, mais elle resta clouée sur place. Ce n'était pas sa place de s'interposer au sein d'une affaire familiale qui ne la regardait absolument pas.

- On remonte dans dix minutes, promit James. Laisse-moi juste ranger tout ça...

- D'accord. Oh et Lily ? Dit-il en s'adressant brusquement à elle. Thé ou café pour le petit déjeuner ?

Lily cligna des yeux, prise au dépourvu.

- Thé, répondit-elle spontanément.

- Ça c'est une fille bien, approuva Fleamont.

- N'importe quoi, bougonna James. Tout le monde sait que le café est meilleur !

- Pas quand tu le noies sous une tonne de sucre, rétorqua-t-elle, les joues toujours rouge du compliment de monsieur Potter. Tu me donnes envie de t'arracher le pot de sucre tous les matins à Poudlard...

Fleamont éclata de rire puis ébouriffa affectueusement les cheveux de son fils.

- Toujours écouter ces dames, James. Bon je vais me coucher. Ne laisse rien trainer et à demain.

- A demain papa...

- Bonne nuit monsieur...

- Et chacun dans sa chambre, n'est-ce pas ?

- Papa ! S'indigna James, mortifié.

Il fusilla son père du regard par-dessus ses lunettes tandis que ce dernier quittait la pièce en riant.

Dès qu'ils se retrouvèrent à nouveau seuls, une étrange tension parut apparaître entre eux et Lily s'empressa de se baisser pour ramasser les bouts de parchemin afin d'éviter de croiser le regard de James. Celui-ci hésita, piétinant sur place, avant de soupirer et de la rejoindre.

- Attends, souffla-t-il, laisse-moi t'aider.

- Merci... dit-elle avant d'ajouter pour ne pas retomber dans le silence. Tu...tu es soulagé ? Il a l'air d'aller bien...

- Un peu, oui. Mais je le connais aussi, il est très doué pour cacher qu'il va mal ou quand il est blessé.

- La génétique a échoué à ce niveau alors...

James se retourna, les deux bols de glace au citron vide dans ses mains, et haussa un sourcil.

- Qu'est-ce que c'est censé vouloir dire ?

- Rien, dit-elle d'un ton badin. Juste que sur un terrain de Quidditch, tu peux être pire qu'un footballer.

- Hein ?

- C'est un cliché... un sport moldu où les joueurs se roulent de douleur au premier coup de vent venu.

- Moi ? Moi ? S'exclama-t-il exagérément. Je prends des cognards en pleine tête, Lily, pas de simple petit ballon.

Elle s'adossa au chambranle de la cuisine alors qu'ils entraient dans la pièce et lui lança un regard appuyé, un rictus aux lèvres.

- Très bien, céda-t-il, j'avoue ! Mais une larme et un cri de douleur attendrissent plus facilement l'arbitre, et je ne le fais pas pour moi.....je le fais pour l'équipe, affirma-t-il avec grandiloquence.

James ne se reçut qu'un coup de torchon en réponse. Il éclata de rire et commença à laver les bols et les cuillères, les passant un par un à Lily pour qu'elle les essuie, perchée sur le plan de travail à côté de l'évier. Elle balançait ses jambes dans le vide au rythme des aiguilles de la vieille horloge qui marquaient les secondes et James se laissa porter par le son régulier.

- James ?

- Hum ?

- Est-ce que je peux te poser une question...étrange ?

- J'ai peur...Qu'est-ce que ton cerveau bizarre a encore été chercher, Evans ?

Dans un tintement cristallin, Lily déposa la dernière cuillère puis se pencha légèrement en avant, les mains crispées autour du bord du plan de travail.

- La première chose que tu as pensé de moi, quand on s'est rencontré, qu'est-ce que c'était ?

- Ce sentiment que tu as quand une nouvelle personne entre dans ta vie et que tu sais qu'elle va tout bouleverser...mais tu ne sais pas encore comment, répondit James sans réfléchir.

Lily rougit et se mordit la lèvre, incapable de réprimer un sourire. Si elle était condamnée à réagir ainsi à chaque fois qu'elle était en sa présence, elle avait l'impression qu'elle ne cesserait jamais d'avoir l'air d'une adolescente amoureuse.

- A onze ans ? Tu as pensé ça en première année ?

- Peut-être pas aussi précisément, non, reconnut-il en s'ébouriffant les cheveux pour la énième fois de la soirée. Tu m'agaçais aussi peut-être un peu au début, mais je n'ai réussi à me défaire du sentiment que tu...me fascinais.

Une boule se forma dans la gorge de Lily. Le désir longtemps contenu en elle sembla se réveiller, sauf qu'elle réalisa qu'elle n'avait plus à l'endiguer désormais.

- James... murmura-t-elle d'une voix rauque. Viens là...

Il se glissa entre ses jambes et posa une main tremblante au-dessus de son genou, ses prunelles noisette plantées dans les siennes. D'un geste encore hésitant, Lily l'attira contre elle. Tout son corps lui paraissait trop étroit, comme s'il n'arrivait plus à contenir ses émotions qui déchiraient son ventre et sa poitrine, qui lui faisaient tourner la tête, des émotions qui l'attiraient vers James presque physiquement... Leurs bouches se rencontrèrent une fois plus et Lily ferma les yeux, se laissant emporter par la vague de sensation qui déferla sur elle.

Elle ne savait pas si c'était parce que tout était encore nouveau entre eux, ou si parce que James lui faisait cet effet-là de toute manière, mais elle ne voulait en aucun cas que ça s'arrête.

**

*

La pâle lumière hivernale qui filtrait entre l'interstice des rideaux réveilla Lily lentement. Elle cligna des yeux, enfouissant sa tête dans son oreiller alors qu'elle roulait sur elle-même. Au vu de l'heure à laquelle elle s'était véritablement couchée, les quelques heures de sommeil qu'elle avait pu avoir n'avaient pas été suffisantes et elle sentait déjà naître le mal de crâne familier qui apparaissaient quand elle n'avait pas assez dormi. Elle bougonna en s'asseyant, la gorge sèche et un arrière-goût de citron sur la langue.

Brusquement, un shot d'adrénaline parut se diffuser dans ses veines alors que les souvenirs de la veille lui revenaient en mémoire. James. Elle avait embrassé James et il l'avait embrassé... Un éclat de rire nerveux gonfla dans sa poitrine alors qu'elle se passait la main dans les cheveux. Elle tenta de se rappeler des choses dans les moindres détails : les lunettes de James perchée sur le bout de son nez, son écriture à la fois brouillonne et élégante, la sincérité dans son regard, la sensation de sa main sur sa joue.

- Pourquoi tu souris comme une idiote ?

Lily sursauta violemment. Au pied du lit, elle vit apparaître la tête de Dorcas. Son amie, assise à côté d'Alexia, était encore en pyjama et ses lourds cheveux bruns épais étaient rassemblés en un chignon désordonné.

- Merlin Dorcas !

- Désolée, j'interromps une rêverie agréable ? Se moqua-t-elle.

- Non ! Je suis fatiguée, c'est tout... Alex, qu'est-ce que tu fiches ?

Alexia, dont la bretelle de débardeur glissait le long de son épaule, se redressa pour pouvoir mieux voir la rousse.

- Tu dormais encore quand je me suis réveillée, expliqua-t-elle. Je devais prendre mon médicament à 7h pile, mais tu dormais profondément et Dorcas était aussi debout alors je me suis installée avec elle.

- 7h ? Quelle heure il est... ?

- Presque 10h, ne t'inquiète pas. On allait te réveiller dans quelques minutes. Tu as mal dormi ?

- Pas exactement...peu dormi plutôt...

Dorcas haussa un sourcil.

- Est-ce que ça ne revient pas au même ?

Les mains sur les genoux, Lily baissa les yeux et sentit naître un sourire impossible à réprimer sur ses lèvres.

- Oh oh ! Chantonna Alexia immédiatement. Tu as quelque chose à nous dire ?

- Non...

- Allez, ne te fais pas désirer, protesta Dorcas. J'ai faim, le petit-déjeuner est pour bientôt, alors dépêche-toi !

- Je sors avec James.... On s'est embrassé la nuit dernière.

- Ok, stop, moins vite en fait ! S'écria Alexia.

Les jambes à moitié empêtrées dans sa couverture, elle se leva pour venir à côté de Lily et la dévisagea, les yeux écarquillés. Toujours figée à sa place, Dorcas siffla longuement.

- Si je m'attendais à ça... James a enfin réussi faut croire.

- Oui, sourit Lily. Faut croire. Merlin, je ne sais même pas quoi faire, ni comment on fait !

- Comment on fait quoi ? Comment on sort avec quelqu'un ? Lily, il n'y a pas de leçon dans un livre pour ça... Tu dois juste avancer et voir ce qui se passe. Mais on parlera de ça plus tard, déjà je veux tout en détails. Qu'est-ce qui t'as enfin décidé ?

- Je ne sais pas. Ce n'était pas quelque chose de spécial, c'est juste arrivé petit à petit je pense. Depuis le début de l'année, il n'est plus seulement le garçon arrogant que j'avais l'habitude de voir. Et il me fait rire. Vous auriez dû l'écouter hier soir quand on faisait le programme pour les rondes : il m'a fait un monologue sur les tableaux magiques qui pourraient très bien assurer le rôle des préfets pour nous éviter de tourner en rond jusqu'à minuit dans les couloirs mais qui ne le faisaient pas car ils étaient juste trop paresseux ou car Dumbledore n'avaient pas encore trouvé de rémunération en peinture à l'huile. Enfin, bref... On est resté ensemble à attendre que son père rentre de l'hôpital et on a parlé. Beaucoup. On a mangé de la glace au citron aussi...

- En décembre ?

- Ne juge pas, ça semblait être une bonne idée sur le coup. A un moment il s'est mis à parler de mes cheveux....et la seconde d'après il m'embrassait.

- Et alors ? Dit Dorcas, son éternel air effronté sur le visage. Il embrasse aussi bien que la légende le prétend ?

- La légende ? Répéta Lily, amusée.

- Celle que les filles de Poudlard font circuler depuis qu'il n'a plus le physique d'un gringalet à lunettes mais d'un joueur de Quidditch sexy.

- Tu trouves mon copain sexy ?

- Je sors peut-être avec une fille, mais j'ai encore des yeux.

Un coussin vola malencontreusement dans la tête de Dorcas.

- « Copain », cita Alexia, toujours abasourdie. J'ai l'impression d'avoir basculé dans une réalité parallèle. Il faut que je le dise à Sirius !

- Il le sait probablement déjà... Alex ! Alex, où tu vas ? Reviens !

Pour quelqu'un atteint d'une maladie respiratoire mortelle et qui avait dû arrêter le sport à cause de cela, Alexia avait encore de belles foulées. Lily tenta de tendre le bras pour la retenir mais Alexia avait déjà ouvert la porte, qui vint claquer contre le mur, et se précipitait dans le couloir. Sans réfléchir, elle se lança à sa poursuite par réflexe. Le tapis rouge brodé d'or qui recouvrait les marches étouffa le bruit de ses pas tandis qu'elle dévalait les escaliers, s'accrochant à la rampe en bois sombre pour ne pas tomber et manœuvrer son virage in extremis en direction de la cuisine.

Lorsqu'elles entrèrent avec fracas dans la pièce, une bonne odeur de bacon et de toasts grillés flottaient dans l'air. A la table, les Maraudeurs et les Potter étaient déjà installés et ils se tournèrent vers elles, surpris.

- Oh...souffla Lily en piquant un fard.

Dans son dos, elle sentit Dorcas se glisser près d'elle. Elle courrait visiblement moins vite.

- Bonjour les filles, salua Mrs Potter avec enthousiasme après un silence gênant. Nous allions venir vous chercher. Asseyez-vous, James va vous servir du jus d'orange. Vous avez bien dormi ?

- Tout est parfait, madame, merci, assura-t-elle.

Elle s'installa à côté de Remus qui lui jeta un regard en coin appuyé. Ça ne faisait aucun doute qu'il savait ce qui s'était passé la veille et Lily se demanda si James avait réveillé ses trois amis en pleine nuit, incapable d'attendre, ce qui lui ressemblait bien dans le fond. En parlant de James, elle croisa son regard à lui aussi alors qu'il lui tendait un verre de jus d'orange. Il lui adressa un sourire à la fois euphorique et embarrassé, soit exactement les émotions que Lily ressentait depuis son réveil.

- Il y a également du lait chaud au miel et à la verveine, reprit Mrs Potter qui s'agitait au-dessus de sa poêle à frire. J'en sers à tout le monde ?

- Euh... non, désolée, répondit Alexia. Je...

- Tu n'aimes pas ça ? Je peux faire autre chose...

- Non, non ! Ne vous dérangez pas, c'est juste que je ne peux pas boire de lactose pur à cause de mon traitement. Les médicomages disent que ça pourrait créer une réaction allergique. Je suis désolée...

Lily ressentit un élan de compassion envers son amie qui avait l'air véritablement gêné, ce qu'elle comprenait parfaitement. A Poudlard, Alexia s'organisait toujours seule, et maintenant qu'elle y pensait elle ne l'avait jamais vu boire de lait durant les repas. Des yaourts parfois, mais pas de bol de lait avec des céréales par exemple. Ici, la situation était différente. Elle était invitée et ne voulait pas faire de vague ni déranger.

- Voyons, ne t'excuse pas, rassura Mrs Potter comme si ce n'était rien. Il y a plein d'autres choses, sers-toi. Et s'il y a d'autres contre-indications avec tes médicaments, n'hésite pas à me le dire. Je dirai aux elfes d'adapter le déjeuner.

Si Lily doutait encore qu'Euphemia Potter était la femme la plus gentille au monde, elle en avait désormais la certitude. De l'autre côté de la table, elle remarqua Sirius qui souffla un « merci » silencieux en direction de la mère de James, un sourire fier aux lèvres. Il fit ensuite glisser une tasse de thé et un toast à la confiture vers Alexia, et Lily était à peu près sûre qu'il lui tenait la main une seconde plus tôt.

Rassurée, Alexia reprit contenance avant de se pencher légèrement, une expression conspiratrice sur le visage.

- Bon, est-ce qu'on va continuer à faire comme si personne ne savait ?

- Alex...

Peter craqua le premier.

- Bon sang, j'ai cru que je ne verrais jamais ça de mon vivant !

- Ne te réjouis pas trop, lui rappela Mr Potter, concentré sur son journal. Je crois me souvenir que tu me dois une mornille.

- Papa ! On avait dit que...

La voix de James fut couverte par l'éclat de rire de Sirius, si semblable à un aboiement de chien.

- J'ai loupé quelque chose ? Interrogea Mrs Potter, perplexe, en revenant à sa place.

- James est enfin parvenu à glisser un philtre d'amour à Lily, plaisanta Sirius. Ça a l'air de fonctionner, vu sa tête plus rouge qu'un souaffle et leur air béat !

- Espèce de faux frère...et je n'ai pas un air béat....

- Alors tu louches toujours comme ça ?

Pour toute réponse, Sirius se reçut un quartier de pomme en pleine face, et Lily n'osa pas regarder directement Mrs Potter dans les yeux quand celle-ci lui servit une double dose de bacon en lui souriant, l'air approbateur.


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