Tome II - Chapitre 10 : Confidence
Le regard perdu dans le vague, Alexia suivit des yeux les grains de poussières qui flottaient dans l'air. Le soleil éclairait l'ensemble du dortoir et soulignait les formes des vieux meubles en bois. Assise en tailleur sur le sol, elle tentait de rester concentrer sur son devoir de sortilège mais ni le beau temps dehors ni le corps de Sirius pressé contre son dos ne l'aidait réellement.
- Sirius...
- Hm ?
- Je croyais qu'on devait réviser ?
- Qui a besoin de réviser ? Dit-il en jouant avec une mèche de ses cheveux. On pourrait faire tellement de choses plus intéressantes...
Alexia sourit et tourna à moitié son visage vers lui.
- Comme quoi ?
Pour toute réponse, Sirius se pencha et l'embrassa à pleine bouche, comme pour lui faire oublier le bout de parchemin devant elle. Et sa méthode ne devait pas être si mauvaise que ça car elle se retourna complètement pour lui faire face et lui rendit son baiser. Comme à chaque fois qu'ils étaient ensemble, qu'ils s'embrassaient de la sorte, Sirius eut l'impression d'être seul au monde. Seul au monde avec elle. Qu'importe ses problèmes avec sa famille, le Tournoi, les prochaines blagues avec Maraudeurs, la guerre qui grondait dehors, ou même son frère. Il n'y avait qu'Alexia.
Il émit un bruit de gorge en sentant son corps se presser contre le sien et ses mains se perdre dans ses cheveux. Alors qu'ils déplaçaient sa bouche vers son cou, il sentit son pouls battre follement contre ses lèvres. Presque de façon erratique. Sans pouvoir s'en empêcher, il se demanda si c'était à cause de lui ou la maladie respiratoire. Ça ne lui arrivait pas souvent, mais parfois elle se reculait soudainement, à bout de souffle et les pupilles réduites à une tête d'épingle. Il s'était fait la réflexion que Remus ressemblait aussi à cela, juste avant de se transformer les soirs de pleine lune. Ils avaient tous les deux ce même regard fiévreux et un sentiment qui oscillait entre le désespoir et la haine contre soi-même inscrit sur leur visage.
Pourtant, en ce moment même Alexia paraissait aller bien. Les lèvres entre ouvertes, elle gémit quand il mordilla un point sensible juste en-dessous de son oreille et elle rejeta ses longs cheveux bruns en arrière pour lui donner un meilleur accès. Quand James avait remarqué une marque rouge sur sa gorge la première fois, il avait paru sur le point de faire une blague avant de réaliser ce que ça signifiait et de secouer la tête et de grimacer comme un enfant de six ans en imaginant son presque frère et la fille qu'il considérait comme une sorte de petite sœur dans cette situation. On pouvait toujours compter sur James pour être une drama queen.
- Sirius...
Son murmure sembla résonner dans la chambre vide. Sirius releva la tête. Elle avait les yeux fermés, le visage incliné en arrière et sa poitrine se soulevait rapidement.
- Tu vas bien ?
- Hum ? Oui... Reviens là.
Elle prit ses joues en coup entre ses mains et le ramena contre elle d'une légère pression. Dès que leurs bouches entrèrent à nouveau en contact, Sirius la souleva doucement et elle grimpa sur ses genoux dans un mouvement souple. Au moins, son entraînement de Quidditch et ses cinquante kilos à peine aidaient un peu. La sensation si familière lui noua le ventre.
Sans qu'il s'y attende, Alexia le fit basculer sur le dos et se retrouva à cheval sur ses hanches sans briser le baiser. Il gémit, ce qui lui permit de glisser sa langue entre ses lèvres. Cette fois, Sirius ressentit la même sensation que quand il volait à toute vitesse sur son balai. Son corps était saturé de sensation. Merlin, il aimait cette fille.
- Je t'aime, souffla-t-il sans s'écarter.
Ils étaient si proche que leurs fronts se touchaient et qu'ils pouvaient distinguer chaque grain de beauté sur sa peau, chaque dégradé de couleur dans ses yeux bleu. Elle avait les lèvres rouge et gonflées, mais il imaginait qu'il ne devait pas être mieux.
Alexia sourit, caressant sa joue du bout des doigts. C'était peut-être cliché ou horriblement niais et Dorcas se contenterait de soupirer si elle pouvait l'entendre, mais alors qu'elle embrassait Sirius elle se sentait vivante. Or, pour une fille qui se savait condamnée ce sentiment n'avait pas de prix.
- Combien de temps on a ? Demanda-t-elle en jetant un coup d'œil au lit sur leur gauche. Avant de descendre rejoindre les autres pour le déjeuner ?
Sirius soupira.
- Dix minutes. Et Peter risque de repasser ici pour prendre ses affaires.
- Arg ! Tu sais quoi ? S'il y a juste une chose qui ne me manquera pas après Poudlard, ce sont les dortoirs collectifs.
- Parce que tu crois que James prendra la peine des respecter notre vie privée et notre intimité quand on habitera ensemble ?
- Non, reconnut-elle avant de se relever péniblement. Le connaissant, il sera notre colloc officieux.
- Sauf qu'il ne payera pas de loyer...
- Exact. Il faut vraiment qu'on arrive à le faire sortir avec Lily sinon on n'aura aucun moment à deux. Imagine ça, il faudra lui préparer des tartes au citron et le divertir dès qu'il s'ennuie, c'est-à-dire toutes les deux minutes.
Sirius rit.
- James n'est pas ni un gamin ni un chien tu sais.
Alexia haussa les épaules. En vérité, elle savait qu'elle aimerait avoir James, les filles et les Maraudeurs traîner autour d'eux après Poudlard. Elle essayait de ne pas trop y penser, parce que la simple idée de ne plus passer des mois dans le château lui faisait étrange, mais elle savait qu'ils ne se sépareraient pas. Elle ne savait pas ce qu'ils feraient tous l'année prochaine, mais il n'y avait aucune raison pour qu'ils se perdent de vue.
Alors qu'elle enjambait Sirius, toujours allongé sur le sol et ses cheveux formant un halo sombre autour de son visage, pour pouvoir ranger ses affaires, une de cas phrases la frappa brusquement.
- Qu'est-ce que tu entends exactement par « quand on habitera ensemble » ?
- Quoi ? Dit-il, même s'il avait très bien compris sa question.
- Tu viens de dire ça il y a une minute. Tu...tu le penses vraiment ?
Sirius baissa les yeux, ses mains jouant nerveusement avec la plume qui traînait à côté de lui.
- C'était juste une façon de parler...enfin je veux dire, poursuivit-il en voyant l'expression d'Alexia, j'y pense peut-être depuis quelques temps. Je ne voulais pas en parler, à toi ou à personne, et si tu ne veux pas ou que tu as d'autres projets...
- Sirius, eh, moins vite, coupa-t-elle avec un rire.
Elle revint s'assoir près de lui, curieuse, et Sirius se redressa pour la regarder correctement. Il avait l'air plus confiant maintenant qu'elle paraissait intéressée. Il ne mentait pas, il réfléchissait à leur vie ensemble après l'école depuis deux ou trois semaines, mais il ne voulait pas l'effrayer en abordant une question aussi importante de but en blanc. Evidemment, c'était elle qui amenait le sujet entre eux aujourd'hui. Rien de surprenant. Il avait toujours eu un certain talent pour l'esquive tandis qu'elle aimait être directe.
- C'est juste... En fait, j'ai une idée dans la tête depuis la rentrée, expliqua-t-il. Ironiquement, c'est la harpie qui me la donner.
Alexia haussa un sourcil.
- Pardon ? Ta mère ?
- Le diable en personne ! Elle a dit... quels mots elle a employé déjà ? Ah oui, elle a dit que pour « quelqu'un qui voulait son indépendance », j'avais de la chance que les Potter aient accepté de me prendre chez eux et que j'étais « décidément un fardeau où que je sois ».
- Sirius...
- Je sais, je sais... Ne t'en fais pas, ça fait longtemps que j'ai appris à ne plus l'écouter. Mais ça m'a fait réaliser que je ne pouvais pas rester éternellement chez Fleamont et Euphemia. Ils ont déjà eu la gentillesse de m'héberger pendant un an. Mais j'ai besoin d'avoir un endroit à moi, véritablement, un endroit où... je serais réellement indépendant et où je ne dépendrais ni des Black ni des parents de James. L'héritage de mon oncle Alphard sera largement suffisant pour m'acheter un appartement et Andromeda a dit qu'elle pourrait m'aider à m'installer.
- Attends attends, ralentis ! S'exclama-t-elle. Tu en as parlé avec ta cousine ?
Sirius hocha la tête.
- Par lettre, quelques jours après avoir reçu le testament. Et je me disais que si j'avais un appart', il n'y avait aucune raison pour qu'on ne vive pas ensemble si tu le voulais. Mais on a encore toute l'année scolaire, ce n'est pas pour toute suite.
- Je comprends... Il faudra que j'y réfléchisse. Mais si nous deux ce n'est pas pour tout de suite, tu as l'air plutôt décidé pour l'appartement en lui-même, non ? Quand est-ce que tu penses t'en occuper ?
- Sûrement à noël ou aux vacances d'avril au plus tard. Andromeda et Teddy chercheront des appartements pour moi et j'irai en visiter. Tu pourras venir avec moi.
Alexia sourit, enthousiaste. L'idée avait vraiment l'air de tenir à cœur à Sirius et elle se demanda pourquoi il ne lui en avait pas parlé plus tôt. Ils étaient déjà début novembre après tout. Une image d'un appartement chaleureux, un peu en désordre, aux alentours du chemin de traverse, s'imposa à son esprit.
- Et les autres ? Ils sont au courant ? Les garçons je veux dire ?
Une fois encore, une drôle d'expression passa sur le visage de Sirius et il détourna le regard.
- Je suppose que non... dit-elle d'une voix traînante et curieuse.
- C'est-à-dire que... il y a un problème à mon idée.
- Lequel ?
Sirius inspira profondément.
- James.
- Je ne te suis pas...
- Je ne veux pas faire de peine à Fleamont et Euphemia mais je sais qu'ils comprendront, expliqua-t-il. Mais James... Tu aurais dû le voir Alex la nuit où j'ai débarqué chez eux. J'étais... j'étais mal, perdu, je n'avais nulle part où aller. Et je m'en voulais tellement pour Regulus que j'en étais malade. James a été là pour moi. Il est resté éveillé toute la nuit pour me parler et me rassurer, à me répéter que tout irait bien, que je n'avais pas besoin d'eux et qu'il serait ma famille à partir de maintenant. Il m'a même chanté cette stupide berceuse qu'il fredonne à Remus quand la pleine lune est difficile. La première semaine, il se levait chaque matin à 6h30 pour intercepter les lettres ou les beuglantes que mon père envoyait pour que je rentre à Square Grimmaud. Sans lui, je ne sais même pas ce que je serais devenu. Et je ne parle pas juste de ma fugue. Parfois je me demande ce qui serait arrivé si je n'avais pas rencontré James dans ce compartiment pendant notre premier voyage en train. J'aurai pu être réparti à Serpentard, suivre la tradition familiale et...
Sa voix craqua et Alexia sentit sa gorge se serrer. Elle serra la main dans la sienne de toute ses forces.
- Tu sais, si James est aussi expansif, tactile ou exubérant avec les autres c'est qu'il s'est longtemps senti seul durant son enfance. Un gamin énergique qui aime les blagues, seul dans cet immense manoir. Même si tout n'était pas parfait, j'avais mon frère au moins avant que tout...avant que tout ne s'écroule. Il était tellement content quand je suis venu habiter chez eux, il m'a dit « maintenant on est vraiment frère pas vrai ? ».
Alexia n'avait aucun mal à s'imaginer la scène, James regardant Sirius avec son fameux sourire. Pas celui qu'il utilisait pour draguer ou frimer devant toute l'école, non celui qu'il avait quand il était vraiment heureux ou de bonne humeur et qui illuminait son visage d'une oreille à l'autre. Il en avait un aussi pour Lily, un sourire spécial plus tendre et rêveur.
- Donc je ne veux pas... je ne veux pas le blesser en lui annonçant que je veux déménager, dit Sirius.
- Je comprends, répéta-t-elle. Mais ça ira, il se fera à l'idée. Tu devrais en parler à Remus, il pourra peut-être t'aider. C'est son truc ce genre de dilemme, il sait gérer les crises émotionnelles Jamesnesque.
- Et pas toi ?
- Moi ? J'ai abandonné l'espoir de comprendre James il y a un moment, je me laisse porter c'est tout.
Sirius éclata de rire. Maintenant qu'il avait avoué à Alexia ce qu'il pesait depuis un ou deux mois, la situation prenait d'un coup un aspect plus concret.
Plus léger, il se remit sur ses pieds et la tira par la main.
- Allez viens ! Si on arrive en retard au déjeuner, on loupera le début du match !
**
*
- Merlin ! Je n'ai jamais vu ça en quinze ans de carrière !
- Ackerley, vous présentez les matchs depuis à peine trois ans...
- Oui mais ça faisait moins classe, professeur, répondit Tiberius sans quitter le terrain du regard. Et cette chute méritait l'hyperbole !
Dorcas ne pouvait qu'approuver, la main crispée autour du poignet de Lily qui lui laissait son bras comme défouloir telle la merveilleuse amie qu'elle était. Le match avait pourtant bien commencé malgré le froid et Gryffondor menait même de dix points grâce au but qu'avait marqué James. Comme d'habitude, la foule vibrait d'énergie tandis que Tiberius, fidèle à lui-même, commentait les actions sur le terrain à sa façon, ce qui faisait pincer les lèvres à McGonagall.
C'était sans doute à cause du Tournoi qui était dans tous les esprits, et surtout du classement avec Serpentard en première place suivit de Gryffondor juste derrière, mais Dorcas avait l'impression que la tension était encore plus forte qu'en temps normal. Même les élèves de Poufsouffle et de Serdaigle avaient l'air de prendre parti.
Elle gardait les yeux rivés sur Lucinda, suivant ses moindres mouvements, et c'est pour cela qu'elle n'avait pas loupé le moment fatidique il y a une minute lorsque Adrian Connelly, l'attrapeur de Gryffondor, lui était rentré dedans à pleine vitesse. A sa décharge, il ne l'avait vraiment pas vu, trop focalisé sur le vif d'or qui filait devant lui pour se concentrer sur sa vision périphérique. Lucinda non plus ne l'avait pas vu arriver. La capitaine était occupée à donner des indications à Dolohov, son nouveau joueur qui remplaçait cet idiot de Mulciber, et n'avait rien pu faire pour éviter la collision.
Un énorme bruit avait éclaté dans le stade quand les deux étaient entrés en contact, immédiatement suivi par les cris du public. Dorcas en était resté sans voix. Si Adrian, avec son poids léger, avait fait un vol plané et n'avait évité la chute vingt mètre plus bas que grâce au sauvetage in extremis de Sirius, Lucinda avait eu la présence d'esprit de s'accrocher fermement à son balai. Manque de chance, la force du choc l'avait malgré tout propulsé violemment en avant et son visage avait heurté le manche.
Cette fois, Dorcas n'avait pas réussi à retenir une exclamation de surprise en découvrant son nez en sang. Alors que James se chargeait d'aider la jeune fille à descendre vers la terre ferme et madame Pomfresh, elle poussa Lily d'un coup de genoux.
- Lève-toi, laisse-moi passer.
- Quoi ?
- Je vais la rejoindre.
- Dorcas...
- Bouge !
Lily obtempéra et Dorcas s'empressa de dévaler les marches sous les regards curieux des élèves qui bordaient l'allée.
Quand elle arriva sur le bord du terrain, James tenait Lucinda par les épaules et Pomfresh se dirigeait droit vers eux, les pans de sa cape claquant au vent.
- Potter ! Je croyais vous avoir demandé de limiter les contacts entre vos joueurs et Serpentard par Merlin !
- Adrian ne l'a pas fait exprès, on est désolé !
- Oh taisez-vous un peu, le rabroua l'infirmière. Vous allez bien, miss Talkalot ?
Dorcas n'avait pas vu avec la distance mais la blonde avait aussi une coupure sur le front, juste au-dessus de l'arcade sourcilière, qui saignait abondamment.
- A votre avis ? Articula-t-elle. Faites votre boulot, j'ai un match à gagner et une équipe adverse à exterminer !
- Eh ! Protesta James.
- Je n'ai ni les potions ni les crèmes pour vous soigner avec moi, il faut que vous alliez à l'infirmerie.
- Quoi ? Non ! Le match...
- ...n'est qu'un match, coupa Pomfresh. Votre santé importe plus.
- Ce n'est qu'une égratignure !
- Vous aurez de la chance si votre nez n'est pas cassé, miss.
- Alors jetez-moi un sort pour le réparer.
- Ça n'arrêtera pas les saignements, objecta-t-elle avec fermeté. Vous allez devoir venir avec moi, il est hors de question que je vous laisse voler dans cet état. Vous seriez un danger aussi bien pour vous que pour les autres.
D'après le regard de Lucinda, ça ne l'aurait pas dérangé de rentrer dans quelques Gryffondor pour passer ses nerfs.
- D'accord, céda-t-elle. Mais je tiens à dire que je le fais à contre ma volonté !
- J'en prends bonne note, dit Pomfresh sans paraître plus émue que nécessaire. Suivez-moi. Ah et je vois que miss Meadowes est là aussi. Ça tombe bien, vous l'aiderez à marcher.
Lucinda se retourna, surprise, et son expression paru s'adoucir. Dorcas lui sourit.
- Retour à l'infirmerie ensemble ? Plaisanta-t-elle. C'est un peu un voyage romantique vers le passé, non ?
- Une rencontre épique, approuva Lucinda, la main toujours plaquée sur son nez en sang. Quant à toi Potter je te souhaite de tomber de ton balai avant la fin du match et tu diras à Connelly qu'il n'a pas intérêt à me croiser pendant au moins les trois prochains mois !
- J'en prends bonne note, dit James en imitant la voix haut perchée de Pomfresh.
Il leur fit un petit signe de la main avant de remonter sur son balai et de s'envoler. Dorcas le suivit des yeux alors que le stade éclatait en applaudissement en le voyant revenir et comme d'habitude elle secoua la tête en constatant son aisance dans les airs.
L'infirmerie n'avait pas changé depuis l'année dernière quand elle y avait fait ses travaux d'intérêt général pour avoir balancer un coup de poing à Mulciber. Sûrement l'acte dont elle était le plus fier durant ses dix-huit ans d'existence sur cette terre. Elle n'arrivait toujours pas à comprendre comment il avait réussi à s'en sortir avec une simple suspension temporaire après avoir participé aux agressions des nés-moldus du groupe de Rosier.
- Meadowes, au lieu de rester plantée là venez m'aider, appela Pomfresh.
Dorcas reporta son attention sur ce qui passait. Lucinda était assise sur un des lits le long du mur et l'infirmière appuyait une compresse contre la coupure sur son front pour essayer d'arrêter le sang.
- Je vais devoir aller chercher une potion, dit-elle. Meadowes, vous pouvez maintenir ça le temps que j'aille à la réserve ? Je pense avoir donné le dernier flacon à une élève de deuxième année qui s'était planté sa plume dans la paume. Je reviens dans une minute.
Elle ne lui laissa pas le temps de répondre et sorti de la pièce d'un pas pressé. Dorcas s'approcha de Lucinda et se glissa entre ses jambes, ses genoux cognant contre ses hanches, et posa délicatement la compresse contre sa peau. Lucinda serra les dents. Le balai ne l'avait vraiment pas loupé mais c'était peut-être pour le mieux. Seul Sirius avait été près d'eux lors de la collision et il n'aurait pas pu les rattraper tous les deux si Lucinda était aussi tombée.
- Tu sais, souffla Lucinda, je devrais t'engager comme mon infirmière personnelle.
- Si tu faisais plus attention au Quidditch ça n'arriverait pas... Qu'est-ce que c'était l'année dernière ? Une commotion à cause d'un cognard ?
- Ce n'était pas de ma faute non plus ! Mulciber me l'avait envoyé !
- Quel imbécile... Il aurait dû se faire expulser définitivement.
- Pour un simple cognard ?
Dorcas suspendit son geste et dévisagea sa petite amie.
- Luce, ne fais pas l'idiote.
- Je sais, je sais... soupira-t-elle dramatiquement. Tu détestes tous les Serpentard, si tu le pouvais tu aurais déjà frappé Rosier et jeté un sort à Mulciber, Avery, Black, Elizabeth et toute leur clique.
- Ne le dis pas sur ce ton !
- Quel ton ?
- Comme si j'avais tort d'être en colère contre eux tous, comme s'ils étaient du bon côté !
Lucinda expira profondément. En vérité, elles n'avaient jamais eu cette conversation ensemble, ou elles avaient évité de l'avoir. Quand elles se retrouvaient toutes les deux les rares fois où leurs emplois du temps coïncidaient ou quand elles n'étaient pas occupées avec leurs amies respectives, elles parlaient de leurs goûts, de leurs envies pour l'année prochaine, de leurs familles parfois (surtout Dorcas et ses parents) et s'embrassaient beaucoup. Mais elles ne parlaient pas ni de politique ni de la guerre dehors et encore mois de ceux qui la faisaient, quel que soit leur camp.
- Dorcas, honnêtement tu ne les connais même pas...
- Parce que j'ai besoin de les connaître pour savoir qu'ils sont abjects ?
- Eh ! Je suis amie avec Sabine Travers et Elizabeth, j'ai fréquenté Rosier pendant plus d'un an et demi ! Avery et Black font partie de mon équipe !
- Et tu vas me dire qu'aucun d'entre eux ne soutient Tu-Sais-Qui ? Qu'aucun d'entre eux n'entrera chez les mangemorts après Poudlard ou ne considère les nés-moldus, comme Lily, inférieurs à eux ?
- Tu généralises !
- Tu ne réponds pas...
- Ecoute Dorcas, je vais te parler franchement et ne te mets pas en colère d'accord ? Je suis absolument contre toutes ces conneries de suprématie du sang, tu le sais, mais tu ne connais pas ces personnes, tu ne sais pas ce qu'elles ont vécue pour en arriver là.
- Alors quoi ? Rosier est un con parce que son père ne lui accordait pas assez d'attention et sa mère buvait quelques verres en trop ? Ce n'est pas une excuse. James est la preuve qu'on peut venir d'une vieille famille de sang-pur sans être raciste, Sirius est la preuve qu'on peut s'émanciper des idéaux de sa famille et je suis la preuve que des problèmes avec ses parents ne suffisent pas à justifier d'entrer dans les rangs d'un mage noir !
- Non, je dis juste que c'est facile de prendre les bons et les mauvais exemples. Je suis la preuve que tous les Serpentard de leur groupe ne partage pas leur opinion, Livia Fawlay est la preuve que les élèves de ma maison peuvent tenir tête à Rosier. On entend plus les personnes comme Rosier mais il y en a plein qui ne pensent pas comme ça.
Dorcas secoua la tête, butée.
- Mulciber est un con et Rosier est pire ! Sérieusement, Luce, tu ne peux pas les défendre...
- Je ne les défends pas, je les comprends et j'essaye de faire en sorte que tu comprennes aussi, objecta-t-elle. Et donnes-moi cette compresse, j'ai du sang dans les yeux.
- Oh désolé !
Elle tamponna doucement le visage de Lucinda pour essuyer le sang, coupable. Un court silence passa entre elles jusqu'à ce que Dorcas prenne sa main dans la sienne et entrelace leurs doigts, mettant sa fierté de côté.
- Très bien, dit-elle. Vas-y je t'écoute. Explique-moi la psychologie tordue de tes amis.
Un sourire amusé étira les lèvres de Lucinda.
- Je ne sais pas, je ne suis non plus dans leurs têtes, mais ils ne s'allient pas à Tu-Sais-Qui juste parce qu'ils aiment martyriser des gens innocents. A part Mulciber peut-être, ajouta-t-elle devant l'expression sceptique de la brune. Les vieilles familles perdent de leur influence, de leur importance, et Tu-Sais-Qui leur fait miroiter la puissance en affirmant que c'est la faute des nés-moldus qui ne sont pas de « vrais » sorciers. Il joue sur les peurs des gens ou menacent les proches et les familles. Et puis tous les élèves qui veulent rejoindre les mangemorts, et qui ne sont pas que des Serpentard je te rappelle Kevin Mells l'année dernière, c'est juste une façon de se sentir accepter. Ils trouvent un sentiment d'appartenance au sein des mangemorts, alors que le Ministère fait la sourde oreille depuis des années. Ils veulent utiliser leur magie comme bon leur semble aussi. Prends une personne comme Rogue qui est rejeté par tout monde, qui subit des moqueries tous les jours. Pourquoi il se tourne vers la magie noire, vers les mangemorts ? Parce qu'ils lui disent ce qu'il veut entendre, qu'il appartient enfin à un groupe et que ses talents seront mis en valeur. Ils emploient la mauvaise solution mais je dis juste que je cherche à les comprendre parce que sans ça tu ne pourras jamais essayer de les faire changer d'avis.
Dorcas se mordit la lèvre. Elle entendait bien ce que Lucinda lui expliquait mais elle n'arrivait pas à faire taire cette petite voix au fond de son esprit qui lui soufflait que les personnes comme Rosier et Mulciber n'avaient aucune excuse.
- Luce ?
- Hum ?
- Tu peux être amie avec qui tu veux, ça ne changera pas ce que je ressens pour toi. Je t'aime.
Le sourire de Lucinda s'agrandit.
- Ça, ça veut dire que je ne t'ai pas convaincu mais que tu ne veux pas me blesser en me le disant ?
- Peut-être bien, rit Dorcas.
Elle se pencha en avant et l'embrassa avec passion. Lucinda ouvrit un peu plus les jambes pour lui permettre de se rapprocher mais se recula brusquement en portant la main à son front.
- Aïe !
Dorcas éclata de rire.
- Balai 1 – Luce 0 ! Dit-elle.
- Oh va te faire voir...
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