Tome II - Chapitre 1 à 14
Chapitre I : Un été surprenant
Le mois d'août 1977 était particulièrement chaud. Une vague de chaleur s'était abattue sur l'Angleterre depuis plusieurs semaines maintenant et le soleil tapait si fort qu'on ne pouvait même plus sortir dehors quand il était à son zénith.
James avala d'une traite le verre de citronnade posé sur la table, exténué. Il avait passé la matinée à travailler dans le jardin avec Sirius pour avancer sur sa moto et il devait avouer que la mécanique n'était pas vraiment son fort. L'idée de Sirius de construire sa propre moto lui avait paru excellente en début d'été, maintenant il se demandait s'ils arriveraient au bout un jour. Malgré tout, la moto prenait forme doucement, elle serait sans doute terminée juste avant la rentrée. Il ne resterait plus à Sirius qu'à trouver le moyen de la faire voler, comme il le voulait, et ça c'était un peu plus compliqué. Peter était venu les aider plusieurs fois tandis que Remus se contentait de les observer, assis à l'ombre d'un arbre en train de lire ou d'écrire des lettres -sûrement pour Anaïs même s'il ne voulait pas l'avouer- affirmant qu'il ne voulait pas « encourager un projet illégal ». Ses amis avaient levé les yeux au ciel, se retenant de lui faire remarquer qu'ils s'étaient déjà transformés en animagus pour lui, alors une moto volante en comparaison n'était pas grand-chose.
Distraitement, James jeta un coup d'œil aux courriers que sa mère avait déposé sur le bord du comptoir avant de partir prendre le thé chez Bathilda, une voisine qui habitait à l'autre bout du village. La liste des fournitures était arrivée de Poudlard ce matin. Ça lui faisait étrange de se dire qu'il retournait au château dans deux semaines pour sa septième année... Il avait à la fois hâte de retrouver tout le monde et en même temps le simple fait que ça soit sa dernière année lui serrait le ventre.
James secoua la tête. Les vacances n'étaient pas encore terminées et ce n'était pas le moment de penser à ça. Mécaniquement, il ouvrit l'enveloppe puis grimaça aussitôt. La pile de livres à lire pour les Aspics semblait très longue ! Il faudrait qu'il aille au Chemin de Traverse demain pour tout acheter, car Remus avait sûrement prévu d'y aller le plus vite possible comme d'habitude et ils faisaient toujours leurs achats de rentrée tous ensemble. Alors qu'il allait reposer la lettre et retourner dehors, quelque chose attira son attention. Apparemment l'enveloppe n'était pas encore tout à fait vide.
Curieux, il en sortit une autre feuille de papier, plus fine et calligraphiée.
Cher Mr J. Potter,
Le corps enseignant et moi-même avons l'honneur de vous annoncer que vous avez été nommé au poste de Préfet-en-Chef cette année. Vous trouverez ci-joint le badge associé à votre nouvelle fonction, à porter dès votre montée dans le Poudlard Express le 1er septembre.
Une réunion sera organisée avec tous vos condisciples dans le premier wagon du train à 11h30 précises ainsi qu'une autre le soir même après le banquet de rentrée.
Votre fonction représente un honneur pour un élève et nous espérons tous que vous l'effectuerez avec le sérieux qu'elle requiert. Vos tâches constitueront à faire respecter le règlement avec assiduité, à faire des rondes plusieurs soirs par semaine, et à être un modèle pour vos camarades. Nous comptons sur votre sérieux tout au long de l'année.
Encore félicitations,
Nos meilleurs sentiments,
L'équipe pédagogique.
PS : Mr Potter, j'ai conscience que cette nomination doit vous surprendre. Sachez que c'est moi qui ait insisté pour que vous ayez ce poste car je vous en crois amplement capable, malgré vos antécédents. J'espère que vous ferez honneur à votre maison et que vous montrerez à tous que je ne me suis pas trompée.
Bonne fin de vacances.
Minerva McGonagall, directrice de Gryffondor.
James relu la lettre trois fois histoire d'être bien sûr. Il envisagea une seconde que ça soit une blague de Sirius mais le tampon officiel de Poudlard et la signature de Dumbledore en bas de la page ne pouvaient pas être imités.
Dire qu'il était surpris était un euphémisme. C'était confirmé, les profs avaient dû attraper une insolation à cause du soleil cuisant ou McGonagall était finalement devenu sénile (il fallait dire qu'elle n'était plus toute jeune). Ayant encore du mal à y croire, il retourna l'enveloppe. Un badge en or frappé d'un P-e-C majuscule tomba au creux de sa paume et acheva de le convaincre.
Jamais il n'aurait pu imaginer être nommé préfet. Remus oui, évidemment ! Mais lui ? Il avait enfreint le règlement à de trop nombreuses reprises pour que ça soit possible.
- Cornedrue ? Tu m'abandonnes avec la moto ?
- Hein ?
Sirius entra par la porte vitrée du salon pour venir le rejoindre. Il était torse nu et une tache d'huile de moteur s'étalait sur sa joue, ce dont il ne paraissait pas se soucier outre mesure.
- Qu'est-ce que tu fais ? Ça fait quinze minutes que j'attends dehors tout seul...
- Bah...
- Tu vas bien ? C'est une lettre d'Evans qui te déclare son amour éternel ?
James releva la tête à la simple mention du nom de Lily et cligna des yeux.
- Je pense que ça aurait été plus vraisemblable que ça !
- De quoi tu parles ?
Sans un mot, il tendit à son meilleur ami la lettre de Poudlard. Sirius la balaya du regard avant de froncer les sourcils. Il relu avec plus d'attention et sa mâchoire manqua de se décrocher quand il comprit enfin.
- Tu déconnes ? S'exclama-t-il. Préfet-en-Chef ?!
- Me regardes pas comme ça, j'y suis pour rien !
- Mais... McGo s'est cognée la tête ou quoi ?
- J'ai pensé à un Imperium, dit James, à moitié sérieux.
- Ça serait la seule explication... Et t'as eu le badge ?
James hocha la tête en lui montrant l'objet qui étincelait au soleil.
- Ah ouais carrément !
Sirius s'empara du badge, le retournant entre ses mains comme pour s'assurer que ce n'était pas une contrefaçon. Il regarda à nouveau la lettre, incapable de réaliser.
- Et Remus ?
- Comment ça ?
- Je veux dire, j'aurais parié que c'est lui qui serait Préfet-en-Chef ! Il est déjà préfet, il a des notes exemplaires et les profs l'adorent !
- On l'appelle avec le miroir ? Proposa James.
- Ouais !
James se précipita dans sa chambre pour aller chercher le miroir à double-sens. C'était une invention qu'ils avaient mis au point en cinquième année pour pouvoir communiquer même pendant les heures de colles. D'habitude, Sirius en gardait un et James avait l'autre, mais pour l'été puisqu'ils étaient ensemble chez les Potter ils avaient passé le second miroir à Remus.
Evidemment, sa chambre n'était ce qu'on pouvait qualifier de « rangée » et il dû fouiller dans le bazar qui s'étalait sur son bureau pour le retrouver. Dès qu'il eut mis la main dessus, il s'empressa de redescendre dans la cuisine où Sirius était en train de boire une citronnade, tapant des doigts en rythme sur la table.
- Tu l'as ?
- Ici, dit James en lui donnant le miroir.
Sirius se pencha et clama d'une forte voix :
- Remus Lupin !
Il y eut un moment de flottement, puis, brusquement, le visage de leur ami apparut. Si les yeux ambrés de Remus n'avaient pas changé, ses journées passées dehors avaient rendu ses cheveux châtains encore plus clair et sa peau plus bronzée. On ne voyait presque pas la cicatrice sur sa pommette ni ses habituels cernes.
- Salut les gars !
- Eh Remus ! Ça va ?
- Très bien... Pourquoi est-ce que vous m'appelez ? Je dois venir samedi !
James et Sirius échangèrent un regard.
- Oh non... Vous avez fait exploser quelque chose c'est ça ? Ou un truc illégal ?
- Quoi ? Pas du tout ! Aie un peu confiance, Lunard !
Remus sembla rester suspicieux malgré tout.
- En fait, reprit James, j'ai reçu...une lettre. De Poudlard...
- Et ?
- J'ai été nommé Préfet-en-Chef.
A leur surprise, Remus se contenta de sourire.
- Je sais, souffla-t-il.
- Hein ? Comment ça tu sais ?
- Je le sais parce que McGonagall m'a envoyé une lettre il y a deux semaines pour me soumettre son idée. Elle a dit qu'ils avaient pensé à moi pour le poste, mais que ça serait sûrement compliqué à cause des pleines lunes et des Aspics. J'ai répondu qu'elle avait parfaitement raison, que de toute façon je ne voulais pas être Préfet-en-Chef, seulement préfet ça me va très bien, et que tu serais parfait pour le rôle !
- Mais...
- Sérieusement James, je ne le voulais pas. Tu vas y arriver.
La foi dans la voix de Remus rassura soudain James. Ce n'était pas une erreur mais une décision murement réfléchit par McGonagall et approuvé par l'un de ses meilleurs amis. Alors certes ça paraissait toujours complètement fou, mais après tout pourquoi pas ?
**
*
Une heure plus tard, Mrs Potter revint à la maison. La première chose qui la frappa fut le silence, ce qui l'alerta immédiatement. Quand on vivait avec deux adolescents hyperactifs sous son toit, on apprenait vite que la tranquillité n'était pas envisageable bien longtemps. Certes, elle avait passé plus de temps que prévu chez Bathilda, n'ayant pas vu l'heure filée, mais il n'était pas si tard que ça.
Quand elle entra dans la cuisine, elle eut la surprise de voir son mari derrière les fourneaux, la table déjà dressée.
- Fleamont ?
- Ah ! Enfin là, s'exclama-t-il en la voyant. On t'attendait.
- Mais...qu'est-ce que tu fais à la maison ? Je croyais que tu ne rentrais pas pour déjeuner ce midi !
- J'ai pris mon après-midi, James m'a envoyé un message.
Mrs Potter se servit un verre d'eau et vint rejoindre son mari, intriguée.
- Pourquoi ? Ils ont encore cassé ou mis le feu à quelque chose ?
- Non, ne t'inquiète pas, rassura-t-il avec amusement. Il avait juste une nouvelle à m'annoncer.
- Oh laisse-moi deviner ! La moto est terminée ?
- Toujours pas, mais Sirius ne désespère pas de la finir avant la rentrée.
C'était un pari entre eux ; savoir si les garçons allaient réussir à fabriquer leur moto avant de repartir pour Poudlard. Ils devaient avouer qu'au début l'idée leur avait semblé un peu farfelue, mais Sirius et James ne s'étaient pas laissés abattre et travaillaient sérieusement sur ce projet à leur grande surprise.
- Hum... James sort enfin avec la fille dont Peter nous parlait ? Lily Evans c'est ça ?
Mr Potter éclata de rire.
- Non, ce n'est pas ça non plus. Crois-moi tu n'arriveras pas à trouver !
- A ce point ?
- Oh oui !
Euphemia se creusa la tête. Qu'est-ce qui avait bien pu se passer entre ce matin et ce midi pour que son mari qui croulait sous le travail rentre à la maison et soit si enthousiaste au sujet d'une nouvelle concernant leur fils ?
Brusquement, Sirius et James débarquèrent à leur tour, se poussant mutuellement pour arriver les premiers à la bouteille d'eau fraîche. Ils étaient tous les deux torses nus, ce qui n'avait rien d'étonnant compte tenu du fait qu'ils aient passé plusieurs heures sous le soleil.
- Salut m'man !
- James... tout va bien ?
- Ouais, on a bien avancé sur la moto ! Dit-il. Bathilda va bien ?
Mrs Potter hocha la tête.
- Elle te passe le bonjour. Dis-moi, tu as quelque chose à me dire ?
Son fils reposa lentement son verre d'eau et échangea un regard avec Sirius qui souriait, goguenard.
- Maman...tu ferais mieux de t'assoir.
- Arrêtez tous, vous me faites peur !
- Je vous jure que vous n'allez pas le croire, intervint Sirius. Moi-même je me demande encore si ce n'est pas une blague.
James attrapa la pile de courrier qu'elle avait laissé ce matin avant de partir et lui tendit l'enveloppe de Poudlard avec solennité.
- Quoi ? C'est la liste des fournitures et alors ?
- Ouvre la !
Avec précaution, elle ouvrit donc la lettre. La signature de McGonagall se détachait nettement en bas de page à l'encre émeraude et Euphemia parcourut son contenu du regard. Quand elle comprit enfin la raison de l'excitation de tout le monde, elle manqua de lâcher le bout de papier de surprise.
- Merlin !
- Non, moi c'est James maman. C'est toi qui a choisis le prénom, tu te souviens ?
- Tais-toi ! Merlin ! Tu...tu es Préfet-en-Chef ?
- De toute évidence, rit-il.
Euphemia releva la tête vers son fils.
- Si c'est une blague...
- C'est authentique, chérie, j'ai vérifié, lui assura son mari.
- James Charles Potter, souffla-t-elle. Viens dans mes bras !
James éclata de rire. Il semblait beaucoup s'amuser de sa surprise tandis que Sirius était en train de se moquer de l'état mental de McGonagall pour avoir pris une telle décision.
Alors qu'elle le serrait contre elle, elle réalisa soudain à quel point son petit garçon turbulent avait grandi. Elle ne s'en était même pas rendu compte. Il n'était pas souvent à la maison à cause de Poudlard et lui manquait tous les jours, mais elle n'avait pas pris conscience jusqu'ici qu'il était maintenant presque adulte.
- Je suis fière de toi, murmura-t-elle à son oreille. Tu le sais n'est-ce pas ?
- Ouais... merci maman.
Mr Potter tapa dans ses mains.
- Bon aller ! On va manger tous ensemble pour fêter ça, à table !
Ils s'installèrent dans un concert de raclement de chaise, tous de bonne humeur.
- J'ai tellement hâte de voir la tête d'Evans quand elle va apprendre la nouvelle, lança Sirius. Elle va en faire une crise cardiaque.
- Tu crois qu'elle a été nommé Préfète-en-Chef aussi ?
- A ton avis ? Est-ce que tu vois quelqu'un d'autre qui pourrait respecter le règlement aussi bien que miss-parfaite ?
- Sirius...
- Quoi ?
James leva les yeux au ciel.
Ils avaient passé tout leur temps ensemble cet été, le premier depuis l'emménagement de Sirius chez les Potter. Ça n'avait pas été facile au départ, il avait fallu que toute la famille s'adapte à être quatre désormais, pourtant James ne changerait la situation pour rien au monde. Enfant, il s'ennuyait souvent car étant fils unique il jouait tout seul. Avoir Sirius ici, c'était un peu comme avoir un frère. Les étés précédents, les Maraudeurs étaient évidemment venus régulièrement, mais seulement quelques jours. Là c'était totalement différent. Bon, il y avait bien quelques meubles cassés au début, quand ils mettaient leurs nouvelles blagues au point. Ses parents n'avaient pas été très enchantés de retrouver leur table en bois d'acajou avec un pied en moins...
- En fait, le travail s'est bien passé ce matin ?
- Pas vraiment, avoua Mr Potter. Les mangemorts n'arrêtent pas de nous échapper, ils se cachent aux quatre coins du pays et dans la haute société. Certains sont intouchables.
- Vous n'avez pas de contacts qui pourraient vous aider ?
- Ce n'est pas si simple, ils sont très prudents. Leur cercle est restreint mais s'élargit quand même toujours plus... On suspecte même des jeunes à peine sortit de Poudlard...
James pensa immédiatement à Evan Rosier, le Serpentard qui était à l'origine des agressions de l'année dernière avec tout son groupe. La plupart avait carrément participer à l'attaque de Pré-au-Lard. Rosier avait obtenu ses Aspics et il n'était pas difficile d'imaginer ce qu'il devenait maintenant. Son père était déjà suspecté d'être un partisan de Voldemort.
- Et... il y en a qui sont mineurs ? Demanda Sirius, la mâchoire crispée.
Un silence s'installa quelques secondes et Mr Potter hésita à répondre. Le sous-entendu qui impliquait Regulus était évident.
- Peut-être, on ne sait pas trop, répondit-il finalement avec sincérité.
- Hum...
- Eh Sirius, intervint James d'un ton jovial pour détourner l'attention, Dorcas m'a dit qu'avec Alex et Lily elles allaient peut-être aller à la fête du village de Carbones-les-Mines, ça te tente ? Alexia voulait te voir !
Sa tentative était certes minable mais elle eut le mérite d'apaiser la tension.
- On verra, je voudrais avancer sur la moto...
- Comme tu veux... Alors maman, Bathilda a terminé son nouveau livre d'histoire ?
- Oui, je pense que ça sera le manuel de l'année prochaine pour les BUSE. Elle en a parlé avec Dumbledore.
La conversation s'orienta donc naturellement sur leur voisine et ses lubies d'écriture. Au moment du dessert, la sonnette de la porte d'entrée retentit brusquement.
- On attend quelqu'un ?
- C'est peut-être le voisin qui a encore oublié ses clés...dit Mrs Potter. Je vais ouvrir.
James regarda à peine sa mère se diriger vers la porte, concentré sur sa tarte au citron. Il distingua une voix dans le hall, trop basse pour qu'il puisse la reconnaître ou entendre distinctement ce qui se disait. Néanmoins, il n'eut pas à attendre longtemps car sa mère revint quelques secondes plus tard.
Il sut tout de suite que quelque chose n'allait pas. Sa mère était pâle, l'air agité et mal à l'aise, ce qui ne lui arrivait jamais. Mr Potter sembla le remarquer aussi car il amorça un geste pour se lever.
- Euphemia ?
- Je... Sirius, il y a quelqu'un pour toi, souffla-t-elle.
Surpris, ils se tournèrent tous en direction du couloir en entendant des bruits de pas. Une femme pénétra dans la cuisine, sa longue robe noire frôlant le sol gracieusement. Elle avait le visage inexpressif, les lèvres pincées et ses cheveux étaient tirés en un chignon noire impeccable.
- Bonjour Sirius. Il faut qu'un parle.
James frissonna.
Walburga Black était de retour.
Chapitre II : Comme on se retrouve
La voix de sa mère fit l'effet d'une claque à Sirius. En fait, il n'arrivait même pas à croire qu'elle se tienne devant lui, dans la cuisine des Potter, comme si c'était la chose la plus naturelle au monde. Elle n'avait pas changé depuis son départ de la maison il y a plusieurs mois, toujours cette expression froide et illisible, la même robe noire austère...
Il aurait dû savoir qu'on ne pouvait pas rester éternellement hors du chemin de Walburga Black. La famille était ce qu'il y avait de plus sacrée pour elle, du moins à sa manière. Elle avait consacré sa vie à la noble famille Black, allant jusqu'à épouser son cousin pour garder son nom et la pureté du sang. Epouse modèle, elle avait donné deux héritiers à son mari et sa réputation avait toujours été impeccable...jusqu'à l'hiver dernier.
L'histoire du fils aîné des Black qui claquait la porte de chez lui s'était rependu aussi vite que si l'Angleterre avait gagné la coupe de Monde de Quidditch. Walburga avait fulminé pendant des jours, prête à aller récupérer Sirius chez les Potter, mais Orion lui avait conseillé de laisser le scandale s'apaiser.
- Mère...
- Je n'ai beaucoup de temps, coupa-t-elle. Il faut que je te parle.
- Je...
- En privée, ajouta-elle sèchement en direction des Potter, toujours présents.
Fleamont et James se levèrent de table lentement, crispés.
- Nous serons dans le salon s'il y a le moindre problème.
Walburga hocha la tête. Le message implicite était clair.
Dès qu'ils furent seuls dans la pièce, elle s'avança d'un pas raide vers son fils. Elle fut surprise de constater qu'il avait pris quelques centimètres et que ses cheveux noirs, typique des Black, étaient encore trop longs et en bataille, à son grand agacement.
- Qu'est-ce que vous faites là, mère ?
- Ne commence pas. Je veux juste te parler, Sirius.
- Je ne reviendrais pas à Square Grimmaurd, annonça-t-il d'emblée.
Walburga pinça les lèvres.
- Tu n'es qu'un ingrat... Mais on ne va pas revenir là-dessus. Tu es majeur, je ne peux plus rien faire d'un point de vue légal. Tu n'es plus à ma charge désormais.
- Comment ça ?
- Je fais juste remarquer que pour quelqu'un qui voulait son indépendance, s'échapper de la maison familiale, tu as de la chance que les Potter aient accepté de te prendre. Tu es décidément un fardeau où que tu sois...
- Ils n'ont rien à voir avec vous !
- Evidemment, dit-elle d'un ton fier.
Sirius serra les poings. Il ne supporterait pas ça encore longtemps.
- Dites-moi juste pourquoi vous êtes là mère et finissons s'en au plus vite.
- Comme tu le souhaite.
Elle posa son sac à main sur la table, et fouilla dedans une seconde avant d'en ressortir une enveloppe cachetée avec le sceau du Ministère. Sirius sentit son estomac se contracter. Malgré ce que sa mère venait de dire, avait-elle trouver un moyen judiciaire de l'obliger à rentrer ?
D'un geste brusque, elle lui tendit l'enveloppe.
- Qu'est-ce que c'est ? Demanda-t-il en la prenant prudemment.
- Un testament, répondit-elle.
- Je...je ne comprends pas...
- Le testament d'Alphard. Il est décédé il y a trois jours.
La voix de sa mère dérailla une brève seconde, comme si la mort de son frère pouvait l'attrister tel un être humain normal. Or, la harpie ne montrait jamais rien, il l'avait appris au cours des années.
Sirius posa son regard sur l'enveloppe qui paraissait soudain peser une tonne entre ses mains. Une vague de chagrin l'ébranla et une image de l'oncle Alphard s'imposa à son esprit. Il ne l'avait pas vu depuis presque quatre ans, et même enfant la présence de son oncle était assez rare aux dîners de famille à cause de ses problèmes d'alcool que sa grand-mère Irma ne supportait pas. Malgré tout, il avait toujours été gentil avec ses neveux et nièces, leur offrant des cadeaux à chaque noël. Il racontait des histoires à Cissy et Regulus, prenait des nouvelles d'Andromeda même après son départ. Il avait toujours fait preuve de clémence envers les écarts de conduite de Sirius et avait pris la peine de lui envoyer des lettres pour lui demander si tout allait bien après sa fugue.
Depuis des mois, il vivait en reclus dans sa maison du Yorkshire, sans femme ni enfant, tandis que sa santé se dégradait.
- Pourquoi...pourquoi personne ne m'a prévenu ?
- Et pourquoi est-ce qu'on l'aurait fait ? Répliqua Walburga. Tu as été assez clair sur le fait que tu ne voulais rien à avoir à faire avec nous, n'est-ce pas ?
- C'était mon oncle !
- Tu as été renié, lui rappela-t-elle. En ce qui concerne les Black, tu ne fais plus parti de la famille.
Sirius ricana.
- Evidemment ! Combien de temps il vous a fallu pour effacer mon nom de la tapisserie ?
- Aussi longtemps que toi pour t'en aller... Tu ne peux pas savoir à quel point ton père a été déçu.
- Pas vous ? S'étonna-t-il.
Walburga le dévisagea longuement.
- Contrairement à lui, je n'attendais plus rien de toi depuis déjà longtemps.
Il encaissa le coup sans broncher et tenta ce qui avait toujours fonctionné contre elle : l'impertinence.
- Oh vraiment ? Quand avez-vous compris alors ? Ma répartition à Gryffondor, mes disputes avec Bella, ou peut-être le jour même de ma naissance ?
- Non...souffla-t-elle. Tu étais un nourrisson silencieux, trop silencieux. Tu m'effrayais presque. Je voyais en toi l'arrogance de ton père, la morgue des Black... Tu n'as jamais eu besoin de moi comme ton frère et tu te mettais à pleurer dès que je voulais te prendre dans mes bras. Tu veux savoir le jour où j'ai su que tu serais une déception ? Oh je m'en souviens parfaitement, tu avais dix ans, c'était juste un peu avant ton départ pour Poudlard. Tu m'as regardé droit dans les yeux et tu m'as demandé pourquoi est-ce qu'on devrait forcément être supérieurs aux moldus, que c'était injuste.
Elle s'interrompit une seconde, le visage impassible.
- Donc tu vois, reprit-elle, je savais déjà...
- Ouais...
Sirius détourna les yeux, mal à l'aise. Il n'avait qu'une envie, que cette conversation se termine au plus vite. Le testament toujours dans les mains, il la retourna nerveusement et inspira un grand coup pour tenter de se calmer.
- Alphard te lègue sa maison et toute sa fortune, dit-elle finalement. Il faudra que tu fasses les démarches administratives mais le reste a été réglé par notre comptable.
- Bien... Je suppose que vous n'avez plus rien à faire ici dans ce cas ?
Walburga eut un mouvement de recul puis attrapa son sac à main vivement.
- Non effectivement. Adieu, Sirius.
Ils restèrent face à face un instant, incertains de la marche à suivre. Au final, sa mère se contenta de lui jeter un dernier regard glacial et quitta la cuisine comme elle était arrivée, tête haute. Sirius resta sans bouger, juste entouré par le son de ses talons claquant sur le parquet avant que le bruit de la porte d'entrée qui se referme ne lui parvienne.
Epuisé, il se laissa tomber sur sa chaise. Il détestait décidément les réunions familiales.
**
*
Alexia changea de chaîne, à moitié allongée sur son canapé dans ce qu'elle avait dorénavant baptisé « la position des vacances ». De toute façon il faisait trop chaud pour qu'elle bouge. C'est comme ça que sa mère la retrouva une heure plus tard en entrant dans le salon.
- Tu es restée devant la télé toute la journée, Alex ?
- Non c'est elle qui est restée devant moi, répliqua-t-elle.
Sa mère leva les yeux au ciel.
- Tu as prévu quelque chose au moins aujourd'hui ?
- Ouais, je dois aller chez Lily vers 16h...
- Il est 15h30 !
- Je vais transplaner, expliqua Alexia. Il y a au moins trois changements de bus jusqu'à Carbones-les-Mines et c'est hors de question par ce temps.
Alexia tenta d'avoir l'air nonchalant pour ne pas inquiéter sa mère. Parfois, le transplanage déclenchait des petites crises qui l'empêchaient de respirer, mais ça restait assez rare. Elle savait que sa mère préférerait qu'elle évite quand même et Alexia ne pouvait pas lui reprocher, seulement elle ne pouvait pas s'arrêter de vivre ou d'utiliser la magie juste comme ça. Et puis franchement, Lily habitait vraiment dans une banlieue paumée.
Ses vacances d'été avaient été plutôt calme jusqu'ici, elle n'était pas beaucoup sortie et avait passé le plus clair de son temps à regarder la télé, des rediffusions des jeux olympiques de l'année dernière, à lire et à réviser un peu. Il y avait bien eu leur journée entre amis dans un parc d'attraction début juillet, mais après tout le monde était parti chacun de son côté, soit à l'étranger soit chez de la famille.
A vrai dire, celui qui lui manquait le plus était Sirius. Ils s'étaient échangés des lettres toutes les semaines, mais ça faisait encore étrange d'être séparé de lui depuis si longtemps.
Dès que son émission fut terminée, Alexia jeta un coup d'œil à l'horloge. Il était temps de partir. Alors qu'elle s'apprêtait à transplaner, une voix dans sa tête qui ressemblait à s'y méprendre à celle de Portman, son ancien instructeur, lui rappela « détermination, décision, destination les mioches ! ». Deux secondes plus tard, la sensation familière d'un crochet à l'estomac la fit décoller du sol, les couleurs disparurent sous ses yeux puis elle manqua de trébucher sur le perron des Evans.
La maison en face d'elle était semblable à celles qui bordaient toute la rue, c'est-à-dire blanche avec un toit tuiles rouge et un petit jardin avec une jolie clôture autour de la pelouse parfaitement entretenue. Elle n'eut même pas à toquer pour que la porte s'ouvre immédiatement, révélant une Lily plus souriante que jamais.
- Alexia ! Entre vite, Dorcas est déjà là !
La rousse se précipita à nouveau à l'intérieur dans un tourbillon de cheveux. Alexia ne se fit pas prier. Dès qu'elle pénétra dans le salon, elle repéra Dorcas assise sur le canapé, un verre d'eau fraîche à la main, vêtu seulement dans short et d'un débardeur bleu nuit. Comme chaque été, elle était incroyablement bronzée et son teint hâlé contrastait avec celui de Lily, pâle.
- Ah t'es là ! Pile à l'heure ! Viens t'assoir !
Alexia sourit. Dorcas agissait comme si c'était chez elle avec enthousiasme.
- Alors tes vacances ? Raconte !
- Je suis restée en tête à tête avec télé, répondit-elle honnêtement.
Dorcas haussa un sourcil, sceptique. Elle trouvait toujours bizarre cette invention moldu et ne comprenait pas très bien pourquoi Alexia adorait tellement ça mais pourquoi pas...
- Et toi ?
- Les Seychelles étaient super !
- Etonnant, marmonna Lily. C'est vraiment un endroit affreux pourtant...
- Rigole, mais en attendant je ne suis pas restée coincé pendant trois semaines dans une maison à la campagne avec ma sœur.
- Oh ne m'en parle même pas...
Lily renversa la tête en arrière en grimaçant. Ces vacances avaient été une catastrophe pure et simple tellement la situation était devenue ingérable avec Pétunia. Au début, ça allait pourtant plutôt bien, elles jouaient aux jeux de société en famille et avaient même fait une après-midi pâtisserie ensemble. Les choses avaient commencé à se dégrader quand Lily avait utilisé la magie pour réviser un peu ses cours. Pétunia avait piqué une crise, hurlant qu'elle ne pouvait pas passer une semaine sans que son « univers de monstre » intervienne. Après cela, elle ne lui avait plus adressé la parole pendant les trois prochains jours. C'était leur mère qui avait dû aller parler à sa sœur aînée, lui demandant d'être plus compréhensive et Lily avait dû promettre de ne pas faire de magie pendant le reste de leur séjour.
Depuis leur retour à Carbone-les-mines, Pétunia ignorait Lily du mieux qu'elle pouvait, ce qui semblait être la meilleure solution au final même si la rousse en restait contrariée. Elle devait avouer qu'elle ne savait plus quoi faire avec sa sœur. Elle avait beau la défendre depuis années, tenter de toujours apaiser les choses, Pétunia ne voulait rien entendre et la situation commençait à la fatiguer.
Alexia lui adressa un sourire sympathique. Après tout, si quelqu'un comprenait les problèmes de famille, c'était bien elle. En fait, avec Sirius, ils pourraient peut-être tous former un club tiens !
- Arrête de faire ta tête déprimée, râla Dorcas en lui donnant une tape sur la jambe. C'est la dernière semaine des vacances, on vient de se retrouver ! Il faut sortir fêter ça !
- Honnêtement, je n'ai pas...
- Chut ! C'est non négociable. Ça ne va pas avec ta sœur ? Très bien, va t'amuser et ça te changera les idées ! Pas vrai Alex ?
Alexia parut s'enfoncer encore plus dans le canapé.
- Tu sais, avec mon beau-père ça pas été marrant non plus cet été... et puis je suis crevée...
- Regardez-vous ! On dirait deux petites vieilles, c'est affligeant. Il ne vous manque plus que de aiguilles et une pelote de laine pour faire du tricot !
- S'il te plaît, ne parle pas de laine par ce temps...
Dorcas soupira, exaspérée.
- Oh allez ! Il y a une fête sur la place de la ville ce soir, on pourrait y aller !
- Sans moi, répondirent Lily et Alexia en concert.
- J'ai déjà dit aux garçons qu'on irait...
- Quoi ?
- James et Sirius, précisa-t-elle. T'as pas envie de les voir, Alex ?
La mention de son petit ami sembla la faire hésiter et Dorcas s'engouffra aussitôt dans la brèche.
- Allez, dites-oui ! J'ai envie de sortir avec mes amies !
- Appelle Marlène...
- Elle est avec ses frères ce soir.
- Alice dans ce cas.
- Occupée à faire Merlin sait quoi avec Frank... Argh je ne veux même pas en parler...
- Lucinda ? Proposa Lily en désespoir de cause.
- Elle est encore au Portugal avec ses parents.
- T'as vraiment réponse à tout hein ?
- Comme toujours. Bon, on y va à cette fête ?
Alexia et Lily échangèrent un regard. Elles connaissaient leur amie, elle ne lâcherait pas l'affaire sans se battre encore une heure au moins.
- C'est d'accord, marmonna Lily. Mais on ne reste pas tard !
- Ouais ! Promis !
**
*
Jamais elle n'aurait dû accepter d'aller à cette fête. Il faisait bien trop chaud et la musique, si forte qu'elle semblait pulser jusque dans ses os, lui donnait mal de tête. La foule se pressait autour d'elle, toujours plus compacte et bruyante.
Lily repoussa avec impatience une mèche de cheveux auburn qui lui barrait le front, impatiente qu'on lui serve ses boissons pour qu'elle puisse retourner s'assoir avec Alexia. Dès qu'elles étaient arrivées, Dorcas les avait abandonnés pour aller danser, leur ordonnant d'aller chercher à boire.
- Excuse-moi, je peux t'aider ? Lança une voix sur sa droite.
Surprise, Lily se tourna vers le jeune homme qui venait de l'aborder. Il devait avoir le même âge qu'elle et était assez beau avec ses cheveux blonds parfaitement coiffés. Il tenait deux verres dans chaque main, sûrement du punch.
- Euh... On se connaît ?
- Non mais je te regarde attendre devant ce bar depuis un moment alors je me suis dit que je pouvais venir te donner ça moi-même, dit-il.
Il lui tendit le verre.
- Merci...
- Je m'appelle Carter.
- Lily.
Carter sourit d'un air charmeur.
- Tu passes une bonne soirée ?
- Honnêtement ? Mon amie m'a forcé à venir, avoua-t-elle, ce qui le fit rire.
- Toi aussi ? Si ça n'avait tenu qu'à moi, je ne serais pas venu mais ma sœur a menacé de m'enterrer vivant si je ne venais avec elle.
Lily sourit poliment. Personnellement, le jour où Pétunia la supplierait de passer une soirée ensemble serait le jour où elle briserait volontairement sa baguette, c'est-à-dire jamais.
- Tu veux danser ? Proposa soudain Carter, désignant la piste de danse d'un geste de la main.
Et voilà la question qu'elle redoutait. Gênée, elle essaya de réfléchir à une façon de refuser avec tact. Il avait l'air très sympathique mais elle détestait danser, elle s'était toujours trouvée ridicule et c'était encore pire avec un inconnu. Discrètement, elle tenta de repérer Alexia ou Dorcas pour qu'elles lui viennent en aide. Evidemment, aucune n'était dans les parages...
- Je suis désolé Carter mais...
- Elle a déjà un copain, lança une voix derrière elle.
Lily ferma les yeux brièvement. Elle aurait reconnu ce ton arrogant et joyeux n'importe où. Une seconde plus tard, James Potter en personne venait se planter à ses côtés, un verre à la main, avec un grand sourire aux lèvres. Il passa un bras autour de ses épaules avant d'hausser un sourcil en direction de Carter qui se mit à balbutier.
- Oh désolé...je...je ne savais pas...
- Maintenant tu le sais. Allez !
Carter s'excusa une fois de plus, puis s'empressa de tourner les talons. Dès qu'il fut hors de vue, Lily se dégagea d'un geste brusque.
- C'est bon, tu peux arrêter de faire semblant.
- Ah Evans, je ne fais jamais semblant avec toi...
Elle secoua la tête.
- Tu étais obligé de faire ça ?
- Quoi ? Il t'ennuyait, c'était marqué sur ton visage.
- Et alors ? Répliqua-t-elle. Il y avait d'autres moyens pour qu'il s'en aille, et en plus je n'ai pas besoin de toi, Potter.
James ne broncha pas, habitué à ce genre de commentaire.
- Qu'est-ce que tu fais là en plus ?
- Dorcas m'a dit ce matin que vous veniez...
- Ah oui c'est vrai, marmonna-t-elle. Et donc tu t'es senti obligé de venir me harceler ?
- Crois-le ou non, Evans, mais c'était plus pour distraire Sirius que pour subir ton mauvais caractère.
- Evidemment, soupira-t-elle, c'est un peu une règle mathématique pas vrai ? Si Potter est quelque part alors Black aussi...
La perplexité s'afficha sur le visage de James.
- Qu'est-ce que c'est les mathématiques ?
- Euh...Un peu comme de l'arithmancie...
Elle secoua la tête, certainement pas d'humeur à expliquer les subtilités des mathématiques auxquelles elle ne connaissait rien en vérité à un sorcier qui n'avait jamais vu de calculatrice de sa vie.
- Bref, pourquoi tu voulais distraire Black ?
James se passa une main dans cheveux. Au début, Lily pensa que c'était encore son geste coutumier de drague avant de réaliser qu'il avait juste l'air inquiet et préoccupé. Or, il n'y avait qu'une chose qui pouvait rendre James Potter sérieux : ses amis.
- Black va bien ?
- Ouais...je crois, dit-il avec hésitation. Il vient d'apprendre la mort de son oncle, sa mère a débarqué à la maison ce midi...
- Oh...
Lily se sentit soudain mal d'avoir été aussi sèche. Elle se souvenait encore des rares fois où elle avait vu Walburga Black sur le quai de la gare. Cette femme avait l'air aussi maternelle et chaleureuse qu'un dragon. D'ailleurs, ce n'était pas rare que Sirius parle d'elle en tant que « la harpie ».
- Est-ce que je peux faire quelque chose ?
- Non pas vraiment... J'ai envoyé Alexia, peut-être qu'elle réussira à le faire parler. Il est muet comme un saumon depuis des heures.
Ce fut plus fort qu'elle, Lily se mit à rire.
- Quoi ? C'est pas drôle je te ferais dire !
- Désolé, articula-t-elle entre deux éclats de rire. Mais c'est muet une carpe, James.
- Hein ?
- C'est une expression moldu !
- Je ne comprends pas...Un saumon est aussi muet qu'une carpe non ?
Lily rit encore plus.
- Laisse tomber. Allez viens, on va retrouver Dorcas et je te laisserai même m'offrir un verre si tu as de la chance, dit-elle d'une voix chantante en le traînant derrière elle au cœur de la foule.
**
*
Accoudé au bar, Sirius fit signe au serveur de lui remplir à nouveau son verre. Ce dernier lui lança un regard hésitant mais consentit à le servir pour la troisième fois. Il n'avait aucune idée de ce qu'il buvait, sûrement de l'alcool moldu, mais en tout cas ça ne valait pas du whisky pur feu. Qu'importe, ça ferait l'affaire pour le moment.
James avait disparu dès qu'ils étaient arrivés pour chercher les filles et il n'était pas revenu depuis, sûrement en train de draguer Evans. Sirius secoua la tête. Il s'était longtemps moqué de James et de ses tentatives pour sortir avec Lily Evans. Au début, il ne voyait pas ce qu'il pouvait bien lui trouver. Certes, elle était plutôt jolie mais il y avait une tonne de filles bien plus belles à Poudlard. La plupart du temps, ils se contentaient de l'embêter, elle et Servilus, mais à partir de la cinquième année quelque chose avait changé. En fait, James avait juste décrété que Lily était la femme de sa vie. Peter avait éclaté de rire à l'annonce tandis que Remus avait levé les yeux au ciel. Quant à Sirius, il s'était dit que ça passerait, que ce n'était qu'une nouvelle idée farfelue de son meilleur ami. Il avait finalement dû se rendre à l'évidence en voyant que James n'abandonnait pas, même après la dispute près du lac et les gifles magistrales de la jeune fille à chaque qu'il l'embarrassait en public avec ses demandes. Cependant, il n'avait pas compris son entêtement à l'époque. Or, la réponse était simple : James aimait Lily. Il l'aimait vraiment. La seule chose qu'il lui restait à faire était de faire prendre conscience à la rousse que la réciproque était vraie aussi.
- Sirius ?
Il soupira en entendant la voix. La voix qu'il reconnaîtrait n'importe où, même si pour l'instant il aurait préféré rester en tête à tête avec son verre.
- Salut princesse...
- Je ne savais que tu étais là, j'ai perdu Dorcas sur la piste et impossible de retrouver James. Et... ça va ? Demanda-t-elle en se rendant brusquement compte de son expression.
- Ca ne pourrait pas être pire ! Répondit-il sarcastiquement.
- Sirius...
- Mon oncle Alphard est mort.
Alexia se figea à côté de lui.
- Oh par Merlin...Je suis désolé.
- Ce n'était pas la mauvaise nouvelle.
- Quoi ?
- Ma mère a débarqué pour me l'annoncer. Il me lègue sa fortune et ses biens. D'un côté ça va me permettre de ne plus être une charge pour les Potter mais de l'autre je trouve que c'est assez ironique. Je ne voulais rien qui vienne des Black et voilà que je reçois l'héritage. Bellatrix va en faire un infarctus.
- Ne dis pas ça... Tu n'es une charge pour personne et ton oncle t'aimait sinon il n'aurait pas...
- Il est mort seul, coupa-t-il. Je devais aller le voir le week-end prochain, Andromeda m'avait dit qu'il était malade.
Alexia attrapa sa main dans la sienne puis repoussa le verre d'alcool devant lui. Avec résignation, il se tourna vers elle pour lui faire face. Elle n'avait pas changé pendant l'été, toujours les mêmes cheveux bruns, les mêmes yeux bleus et le corps maigre... trop pour donner l'illusion qu'elle était en bonne santé.
- Tu ne pouvais pas savoir... commença-t-elle.
- Je ne l'avais pas vu depuis mes treize ans, Alex. Ma famille ne voulait pas le voir. Il leur en faut peu pour renier quelqu'un en même temps...
- Sirius, écoute-moi...
Mais il ne la laissa pas continuer, encore une fois.
- Tu veux savoir le pire ? Je suis triste, c'est vrai, mais pas tant que ça. Je ne le connaissais pas beaucoup, c'était juste un oncle un peu étrange qu'on voyait une fois par an et qui faisait enrager ma grand-mère. Il a toujours été plus proche de mes cousines, surtout Andromeda. Pourtant il m'a envoyé une lettre après ma fugue pour me dire que si j'avais besoin de quoique ce soit, je pouvais venir le voir. Quand...quand j'ai appris sa mort tout à l'heure, j'ai réalisé que... qu'il était mort de maladie sans que je le sache. Personne ne savait à quel point il était malade, les médecins n'avaient rien prévu...
- Je...
- Quand ma mère m'a tendu le testament, je me suis juste dit que ça aurait pu être toi, murmura-t-il dans un souffle rauque. Un jour ça sera toi...
La musique en fond sonore était plus forte que jamais, se mêlant aux éclats de rire des habitants. C'était une belle journée d'été, un beau couché de soleil, où tout le monde avait l'air heureux. D'un coup, Alexia se sentit déconnecter de tout ça. Les paroles de Sirius lui avaient le même effet que si elle avait plongé dans un lac gelé et que les bruits autour avaient été étouffés. Elle était sûre que son visage avait dû se vider de ses couleurs ou qu'elle s'était mise à trembler parce qu'il parut réaliser ce qu'il venait de dire.
Brusquement, Sirius se redressa.
- Alex... Je ne voulais pas...
- Arrête. S'il te plaît.
Elle prit une profonde inspiration, histoire de se calmer.
- Ecoute Sirius, je ne prétends pas que...que je vais bien. Mais tu n'as pas à t'inquiéter...
- Comment est-ce que tu peux me demander ça ? J'y ai pensé des dizaines de fois cet été !
- Non ! Je t'en prie, non. Ne... ne change pas la façon dont tu me vois. Je ne vais pas mourir demain, ni la semaine prochaine, ni même cette année. Tu n'as pas à t'inquiéter.
- Mais...
- J'ai été faire des examens pendant l'été, la maladie est stable, elle a même reculé !
- Vraiment ?
Alexia sourit.
- Ouais, assura-t-elle. Alors voilà ce qu'on va faire : tu vas m'accorder une danse, on va se moquer des disputes de James et Lily, traîner Dorcas loin d'ici et puis tout sera parfaitement bien. Si tu veux de l'aide pour gérer la mort de ton oncle, je suis là, James est là. Ensuite il y aura notre dernière année à Poudlard où on doit traumatiser Rusard à vie avec nos blagues...et tout ira parfaitement bien, répéta-t-elle une fois de plus. D'accord ?
Sirius garda le silence plusieurs secondes, ses yeux gris la regardant intensément. Il porta une main à sa joue avant de l'embrasser sur le front avec douceur.
- Alexia Cassidy, chuchota-t-il, je t'aime.
Chapitre III : Le début de la fin
Les derniers rayons du soleil éclairaient encore faiblement par la fenêtre la chambre du deuxième étage d'une petite maison de Carbones-les-Mines. Lily tournait en rond dans la pièce, nerveuse, et le bruit de casserole qui lui parvenait du salon ne faisait rien pour l'apaiser. Sa mère l'avait chassé de la cuisine il y a une heure en lui disant qu'elle ne lui servait à rien vu l'état où elle se trouvait. Lily avait voulu protester mais quand son père lui mit sous les yeux le saladier dans lequel elle venait de mettre les navets dans la pâte à crêpes au lieu des œufs elle dû se résoudre à se rendre à l'évidence.
Pour essayer de faire passer le temps, elle parcourut une énième fois sa chambre pour s'assurer qu'elle n'avait rien oublié. Aucun parchemin qui traînait, sa baguette soigneusement rangée sous son lit dans une boîte, sa valise pour la rentrée était entassée dans le grenier avec son chaudron et enfin elle avait envoyé sa chouette chez Dorcas pour la soirée. Personne n'aurait pu trouver un seul signe de magie ici, ni rien d'anormal ou qui sorte de l'ordinaire.
Pourtant, Lily restait terrorisée. Il avait fallu plusieurs mois pour convaincre Pétunia d'inviter Vernon et de le présenter à sa sœur. Jusque-là, elle avait toujours refusé de prendre le risque de l'exposer à la magie, trop effrayée à l'idée que son fiancé la quitte. D'après les dires de ses parents qui l'avaient déjà rencontré, Vernon Dursley était quelqu'un de très...terre-à-terre. Il était commercial dans une entreprise de perceuse et ne cessait de répéter que ses chances d'évolution au sein de la boîte étaient plus que prometteuses. Quand Pétunia avait finalement accepté qu'elle le rencontre elle aussi... Lily s'était sentie bien. Acceptée comme un membre de la famille à nouveau. Alors d'où venait le sentiment de malaise qui ne la quittait pas depuis son réveil ce matin ?
Sans bien comprendre comment, une phrase qu'Alexia avait prononcé dans le Poudlard Express il y a presque un an à propos de son beau-père lui revint en mémoire : « Avoir peur de la magie, c'est ne pas accepter notre condition de sorcière. On n'est pas différent d'eux ! ». C'était ça qui la dérangeait, réalisa Lily. Ne pas pouvoir être elle-même face au propre fiancé de sa sœur lui serrait le ventre. La magie n'était plus dissociable de sa vie désormais, elle ne l'avait plus été depuis le jour où la lettre de Poudlard était arrivée. Si Pétunia pouvait voir les merveilles du monde sorcier, les commerces du Chemin de Traverse, les ruelles enneigées de Pré-au-Lard, l'architecture de Poudlard, alors peut-être qu'elle comprendrait que ce n'était pas un univers de « monstre ».
- Lily ? Tu es prête ?
Lily sursauta et se retourna. Dans l'encadrement de la porte se tenait Pétunia, le visage crispé.
- Hein ? Oh oui, oui c'est bon...
- Tu es sûre ? Tout est rangé ?
- Oui, assura-t-elle. Il ne saura rien, Tunie, je te le promets. Ça va bien se passer.
Même si elle ne paraissait pas tout à fait convaincue, Pétunia hocha la tête.
- N'oublie pas, pendant le dîner, aucune insinuation sur...sur ton école.
- Je sais. S'il demande, je suis scolarisé dans une école privée et je ne reviens que pour noël et les vacances d'été, et c'est pour ça que je suis ne pas souvent à la maison, récita Lily.
Elle n'osait pas avouer qu'elle avait répété le mensonge pendant plusieurs minutes devant son miroir. De toute façon, Pétunia eut l'air satisfaite car elle parut se détendre un peu.
- Génial... Bon, si tout est en ordre, je vais aller aider maman...
- Pétunia attends !
- Oui ?
Lily fixa obstinément les motifs du papier peint, la gorge serrée.
- Est-ce que... que tu lui diras un jour ? Que je suis une sorcière ?
- Quoi ?
- Je veux dire...tu vas lui mentir toute ta vie sur moi ?
Pétunia cligna des yeux, visiblement surprise. Elle jeta un coup d'œil par-dessus son épaule, comme pour s'assurer que leurs parents ne pouvaient pas l'entendre, puis ferma la porte dans son dos.
- Ecoute Lily...
- Tu sais quoi ? Laisse tomber, c'est pas grave...
Elle tenta de contourner sa sœur pour rouvrir la porte mais Pétunia lui attrapa le poignet avec force.
- Ce n'est pas ce que tu crois, Lily. Vernon...Je ne suis pas certaine qu'il comprendrait bien tout ça, ce que tu es...
- Mais si on lui explique ?
- Et si ça lui fait peur ? Rétorqua l'aînée.
- Je ne suis pas différente de vous ! S'il n'accepte pas que je sois une sorcière alors il ne te mérite pas, Tunie.
Cette remarque parut la contrarier d'avantage car elle eut un claquement de langue agacé et serra les dents.
- Il faut toujours que tu fasses ça, pas vrai ?
- Je ne comprends pas...
- La victime, précisa Pétunia avec hargne. Tout ça, entre nous, c'est de ta faute !
- Tunie...
- Tu ne pouvais pas être juste ma sœur, juste normale ?
- Ce n'est pas... Pétunia, je n'ai pas fait exprès...je...
Les mots s'embrouillaient dans son esprit mais la colère Pétunia ne retomba pas.
- Et alors ? Tu étais ma sœur avant d'être une sorcière non ? Cria-t-elle.
Lily eut l'impression de recevoir une gifle en voyant les yeux de Pétunia s'embuer de larmes. Incapable de soutenir son regard, elle détourna la tête. Le miroir de sa coiffeuse, juste en face de son lit, lui renvoya leur reflet et elle réalisa brusquement quelque chose. Elles ne se ressemblaient pas. Elles n'avaient jamais été pareils en même temps, ni maintenant ni pendant leur enfance. Ses cheveux auburn et ses yeux verts, elle les tenait de la famille de son père tandis que Pétunia avait hérité des longs traits de leur mère ainsi que de ses cheveux châtains. Elles n'avaient pas non plus les mêmes goûts ou les mêmes centres d'intérêts.
Elle avait toujours cru que son départ pour Poudlard avait cassé leur relation, que d'une certaine façon quelque chose s'était brisé entre elles cette année-là. Et si cela était arrivé malgré tout ? Et si ça avait été inévitable ?
Pétunia dû voir sa détresse car elle relâcha sa prise autour de son poignet pour lui prendre doucement la main.
- Lily...
- Je suis tellement désolée Tunie, s'étrangla-t-elle à travers ses larmes. Mais je suis née comme ça, je suis une sorcière et tu ne pourras rien y changer. Je n'ai pas un choix à faire entre toi et la magie, les deux peuvent très bien être dans ma vie...
- Non justement, répliqua Pétunia. Je ne sais pas ce que tu as prévu pour ton avenir, Lily, mais dans le mien il y a une belle maison, avec une pelouse et une clôture, un mari qui m'aime, un enfant blond adorable et dont je m'occuperais. Ça peut te paraître ennuyant mais c'est que je veux ; c'est une vie normale, sans histoire, dans laquelle une chouette ne débarque pas en plein milieu de la journée pour distribuer le courrier.
- Dans laquelle la magie n'a pas sa place...murmura Lily.
- Exactement.
Il y eut un long silence entre elles, durant lequel elles ne firent que se dévisager, puis Pétunia finit par reculer d'un pas en se raclant la gorge.
- Vernon ne va pas tarder à arriver.
- Tout se passera bien. Ça sera un dîner...parfaitement normal.
Même à ses propres oreilles, sa voix sonna atone. Pourtant, Pétunia fit mine de ne pas remarquer. Elle s'observa une seconde dans le miroir, histoire de reprendre contenance malgré les plaques rouges de colère qui lui marbraient le cou et se tourna à nouveau vers Lily.
- Je vais descendre aller aider maman en cuisine. Je t'appelle quand il arrive, d'accord ?
- Pas de problème...
Avant de sortir de la chambre, Pétunia s'arrêta dans l'embrasure de la porte.
- Tu sais, je ne voulais pas que ça se passe comme ça non plus...
Finalement, le dîner en compagnie de Vernon fut affreusement normal et sans accroc. Lily l'écouta parler de vis cruciforme et de perceuses pendant une heure, souriant poliment à chacune de ses blagues sur le sujet. Et oui, elle fut étonnée du nombre de blague qui comportait des perceuses.
Vernon Dursley ne ressemblait pas vraiment à ce qu'elle avait imaginé. Il était un peu enrobé et portait un début de moustache, bien que Lily aurait incapable de dire si elle lui allait bien ou non. Il parlait beaucoup de lui également mais savait se montrer polie. Elle commençait à comprendre ce que Pétunia lui trouvait... Il n'y avait pas plus banal ou normal que Vernon. Quand il consentit à arrêter de parler de lui-même pour s'intéresser à elle, Lily mentit facilement à propos de ses études et il ne chercha pas plus loin, au grand soulagement de tout le monde.
Une fois le dîner terminé, Lily s'empressa de remonter dans sa chambre. Elle se jeta sur son lit, épuisée à la fois nerveusement et mentalement.
Elle ne savait plus trop pourquoi elle avait eu si hâte de rencontrer Vernon.
**
*
Lily ne se souvint même pas de s'être endormie, pourtant quand sa mère lui secoua l'épaule un peu plus tard elle s'aperçut que c'était déjà le matin. On était le 1er septembre 1977 et le train pour Poudlard partait dans exactement trois heures. Repoussant ses couvertures d'un coup de pied, elle se força à sortir de son lit pour aller s'habiller puis descendre sa valise. C'était sa dernière rentrée scolaire et il était hors de question qu'elle soit en retard.
Dans la cuisine, ses parents étaient déjà installés autour de la table.
- Tu veux de la tarte au citron ma puce ?
Elle fut tellement surprise par la question qu'elle arrêta son mouvement, figée entre la table et le frigo. Une image de Potter fusa dans sa tête sans qu'elle puisse s'en empêcher.
- Pourquoi tu me demandes ça ? Demanda-t-elle d'une voix trop aigue.
- Euh...Parce que ton père en a acheté ce matin, c'est tout.
- Oh...
Elle se sentit soudain assez stupide d'avoir réagi comme ça.
- Tu es sûre que tout va bien ?
- Oui, oui désolé. Où...où est Pétunia ?
- Elle est partie visiter l'appartement qu'elle pensait acheter. Je t'en avais parler non ?
Lily hocha la tête. Ça lui faisait étrange que sa sœur veuille déjà partir de la maison. Personnellement, elle n'avait pas encore réfléchi à ce qu'elle ferait après Poudlard. Peut-être des études pour devenir médicomage, mais ça lui paraissait encore bien loin.
Distraitement, elle termina son petit déjeuner sans conviction puis il fut l'heure de partir. Elle aida son père à charger la voiture et embrassa sa mère qui ne pouvait pas les accompagner à cause d'un rendez-vous. Le trajet passa à toute vitesse, sans qu'elle s'en aperçoive. Quand l'immense gare de King Cross se dressa devant elle, une boule se forma dans sa gorge. Elle n'aurait jamais cru que d'être en dernière année lui ferait cet effet, pourtant le fait de se dire qu'elle ne vivrait plus jamais de rentrée, qu'elle ne reprendrait plus le train un 1er septembre comme tous les ans, lui mettait les nerfs en pelote.
- Ma chérie, qu'est-ce que qui ne va pas ?
Lily tenta d'avoir l'air courageuse en se tournant vers son père. La douceur de ses yeux verts, les mêmes que les siens, ne l'aidèrent pas vraiment.
- Je...je ne sais pas, balbutia-t-elle. C'est dur à expliquer. Je crois...je crois que je m'étais habituée à tout ça maintenant, je veux dire...les voyages entre Poudlard et la maison, les cours au château et puis mes amis...
- C'est normal voyons.
- Mais...et après ?
- Comment ça ?
- Qu'est-ce qui va se passer après ? Clarifia-t-elle. L'année prochaine ?
Son père sourit doucement.
- C'est ça qui te fait peur ?
- Hum...
- Oh Lily, regarde-toi. Tu es brillante, je ne suis absolument pas inquiet. Tu sais, parfois j'ai du mal à me dire que tu as autant grandit, que tu n'es plus une petite fille. C'est vrai, je t'ai à peine vu pendant six ans, sauf pour noël et les vacances d'été. Chaque année quand je te voyais revenir avec de nouvelles anecdotes, des nouveaux sorts que tu avais appris, de nouvelles expériences que tu avais faites aussi...ça me rendait fier. Tu as toujours su te débrouiller, même sans ta mère et moi. Ça ne veut pas dire qu'on sera plus là parce qu'on le sera toujours pour toi, tu m'entends ? Peu importe ce que tu choisiras de faire, on te soutiendra, et tes amis aussi. La fin du lycée ou des études, même chez les sorciers je suppose, ne veut pas dire que tu vas changer radicalement. Tu continueras à voir Marlène, Dorcas et tous les autres. Evidemment, il se peut que tu en perdes de vue mais c'est la vie Lily. Tu te feras de nouveaux amis, tu te créeras de nouvelles expériences. Et même si tu as peur, je te le répète, tu ne seras jamais toute seule, d'accord ?
Il essuya lentement une larme qui dévalait la joue de sa fille tandis qu'elle souriait, l'air soulagé. Lily avait presque oublié à quel point son père pouvait lui remonter le moral. Si elle avait grandi, lui n'était plus aussi jeune qu'avant, réalisa-t-elle avec nostalgie. Les cheveux de Chris Evans étaient désormais assez dégarnis au niveau des tempes et de petites rides marquaient le coin de ses yeux et de sa bouche, rendant ainsi son visage encore plus expressif.
- De toute façon, reprit-il d'un ton léger, tu peux au moins être sûre que quoi qu'il arrive, il te restera ton futur mari qui n'a pas l'air prêt à se décourager.
- Papa !
Elle tenta de cacher son visage sûrement aussi rouge qu'un souaffle tandis que son père éclatait de rire. Elle maudissait encore Potter pour son coup d'éclat en début d'été. Quel imbécile !
- Arrête de dire n'importe quoi, allez on doit se dépêcher...
- Il est seulement 10h20, Lily.
Sans répondre, elle ouvrit la portière et sortit de la voiture, ce qui fit rire son père à nouveau.
A l'intérieur de la gare, elle n'eut aucun mal à repérer certains sorciers. Ils croisèrent un homme d'une quarantaine d'année habillé d'un...rideau de douche vraisemblablement et qui faisait se retourner la foule sur son passage. Les oubliators allaient avoir du travail, comme chaque 1er septembre. Du côté sorcier, sur le quai 9 ¾ ce n'était pas encore la cohue car tout le monde n'était pas arrivé et Lily se contenta de monter sa valise dans un compartiment au hasard pour passer le temps. Son père resta avec elle quelques minutes supplémentaires avant de repartir pour être à l'heure au travail.
Cependant, elle n'eut pas à rester seul bien longtemps car en tournant la tête, elle aperçut soudain James Potter en personne qui passait la barrière magique, suivit de ses parents et de Sirius Black.
- Allez ! On va être en retard !
- James, on a au moins une demi-heure d'avance, répliqua Euphemia. Calme-toi.
Mais James ne l'écoutait pas, continuant à accélérer le rythme. Sirius lui emboîta le pas, les mains dans les poches et l'air nonchalant.
Petit à petit, le quai se remplit de famille. Lily réussit à repérer ses amis parmi la masse grouillante qui s'agitait près du train. Elles étaient toutes rassemblées sous une arcade en pierre en train de discuter et elle dû jouer des coudes pour les rejoindre. A un moment, coincée entre une grosse dame au parfum bon marché et un petit monsieur moustachu, elle crut qu'elle allait devenir folle jusqu'à ce que Dorcas ne la tire de là.
- Lily ! Oh tu m'as manqué !
Alexia et Marlène lui sautèrent dessus en même temps. Quand ce fut au tour d'Alice de lui dire bonjour, elle se stoppa net.
- Par Merlin Alice ! Tes...tes cheveux !
- Surprise ! Ça change, pas vrai ?
C'était le moins qu'on puisse dire. La jeune fille avait coupé ses cheveux très courts, au niveau de la nuque, et une frange légèrement ondulée lui retombait sur le front. Son visage avait l'air plus lunaire de cette façon, plus mature aussi.
- Elle est toujours aussi belle, lança une voix sur leur gauche.
- Frank, on t'a déjà dit que tu savais parler aux filles ? Dit Alexia.
- Quoi ? Tu veux que je te dise que t'es belle aussi ? Intervint Sirius en arrivant derrière elle.
Ils éclatèrent de rire en la voyant rouler des yeux.
Le sifflet qui indiquait le départ imminent du train retentit dans l'air. Les filles se précipitèrent dans leur wagon où les attendaient Remus et Peter alors que James embrassait ses parents une dernière fois.
- Sois sage cette année, d'accord ? Recommanda sa mère.
- On verra, répliqua-t-il en riant.
Elle prit une expression inquiète et résignée mais le laissa filer avant de se tourner vers Sirius. Il parut surpris quand elle le sera contre elle, exactement comme elle l'avait fait avec James il y a quelques secondes.
Il se figea, médusé.
- Fais attention à toi aussi, chuchota-t-elle.
Maladroitement, il lui rendit son étreinte. C'était étrange pour lui car Mrs Potter aurait beau l'aimer de tout son cœur, et même s'il était touché par son geste, elle ne serait jamais sa mère. De toute façon il n'avait jamais eu de mère.
**
*
Ce qui était bien avec Poudlard, songea Lily, c'était qu'il ne changeait pas. L'école apportait ce sentiment de familiarité et de sécurité qui lui remonta le moral dès qu'elle posa un pied dans le hall et se renforça carrément quand elle entra dans la Grande Salle. Les bougies du plafond éclairaient la pièce chaleureusement tandis que les fantômes circulaient entre les tables pour souhaiter une bonne rentrée aux élèves. Elle salua sans vraiment s'en rendre compte Nick-Quasi-Sans-Tête, trop focalisée sur la nouvelle qu'elle avait appris tout à l'heure pendant le trajet en train.
« Quand elle était arrivée dans le compartiment pour la réunion des préfets, son nouveau badge de Préfète-en-Chef sur la poitrine, elle avait été surprise de voir Potter assis à côté de Remus. Il manquait encore quelques personnes, notamment les nouveaux cinquièmes années qui mettaient généralement plus de temps à trouver le bon compartiment.
- Depuis quand tu as besoin que Potter t'accompagne, Remus ? Avait-elle plaisanté.
- Euh...c'est-à-dire...
C'est alors qu'elle avait vu le badge brillant que portait Potter. Et elle avait juste éclaté de rire.
- Oh non...C'est une blague, pas vrai ? Tu n'as pas pu...afin je veux dire pas toi !
- Si ça peut te réconforter, on a été aussi surpris que toi, avait dit Potter en s'ébouriffant les cheveux, son geste signature. »
Toujours sous le choc, elle se pencha en arrière pour avoir la table des professeurs dans son champ de vision. McGonagall était en train de se rassoir après la répartition et avait l'air en pleine santé. Le fait qu'elle soit devenu sénile aurait été la seule explication à la nomination de Potter.
- Lily, on ne fixe pas les gens comme ça, la rabroua Marlène.
- Mais...Préfet-en-Chef ! C'est...insensé !
- Pas tellement, intervint Alexia en se servant une part de gâteau. Il a d'excellentes notes dans la plupart des matières, surtout en métamorphose. Il est capitaine de Quidditch et est apprécié par ses camarades. Enfin...la plupart, se corrigea-t-elle face au regard de Lily. Donc ça ne m'étonne pas tant que ça.
- Et son dossier disciplinaire ?
- J'ai pas dit qu'il était parfait non plus.
- On parle de moi ? Lança James, quelques places plus loin. J'ai entendu le mot parfait !
- Ton ego, marmonna Remus.
James balaya la remarque de la main.
Brusquement, le bruit des conversations cessa et tous les élèves se tournèrent vers Dumbledore qui venait de se placer devant son pupitre pour son traditionnel discours.
- Bonsoir à tous ! S'exclama-t-il d'une voix forte, l'œil malicieux. Je suis ravi de vous retrouver pour cette nouvelle année scolaire, qui, j'en suis sûre, sera des plus intéressantes et je souhaite la bienvenue aux nouveaux. Commençons tout d'abord par les informations d'usages qui sont toujours bonnes à rappeler pour certains, comme le règlement intérieur notamment.
Son regard glissa imperceptiblement vers la table des Gryffondor et les Maraudeurs en particulier.
- Ce dernier sera affiché sur la porte du bureau de Mr Rusard, notre bien aimé concierge. Les cours commenceront dès demain à 9h et vos emplois du temps vous seront distribués par vos directeurs de maisons durant le petit déjeuner. Pour les sixièmes années, la liste d'inscription pour les cours de transplanage qui débuteront en janvier seront affichés dans vos salles communes respectives.
- Je leur souhaite bonne chance si Portman revient...dit Dorcas.
- Silence les mioches ! Plaisanta Sirius.
-... séances d'orientation pour les septièmes années dès le mois prochain, continua Dumbledore. Bien, j'aimerai maintenant aborder un sujet inédit. Vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a eu de nouvelles disparitions ainsi que des meurtres cet été. Les ténèbres gagnent toujours plus de terrain malgré les efforts du Ministère...
Le ton grave du Directeur sembla remplir la Grande Salle et les expressions s'en ressentirent.
- Nous devons tous rester unis en ces temps difficiles et c'est pourquoi les professeurs et moi-même avons décidé de modifier quelque peu la Coupe des Quatre Maisons cette année. En effet, nous allons organiser le Tournoi de Poudlard. Les règles seront simples, chaque maison aura une équipe de cinq élèves qui s'affronteront dans cinq épreuves : les potions, la botanique, les défenses contre les forces du mal, la métamorphose et le vol sur balais. Chaque épreuve rapportera un certain nombre de point à l'équipe représentant sa maison et ces points seront ensuite additionnés à ceux gagnés durant l'année. Comme habituellement, les points de comportement ou de bonnes réponses en cours ont donc autant d'importance que ceux des épreuves. Le but de ce Tournoi, bien qu'il oppose les maisons entre elles, a pour principal objectif de vous faire prendre conscience que l'entraide est la plus belle des forces.
Dumbledore marqua un court temps d'arrêt, observant les étudiants par-dessus ses lunettes en demi-lune. Comme souvent, on avait presque l'impression qu'il y avait plus derrière ces mots qu'il ne voulait bien le laisser paraître.
- Pour rendre ce Tournoi un peu plus festif, reprit-il en souriant, j'ai également réussi à convaincre mes chers collègues d'organiser un bal de noël en plus du traditionnel banquet. J'espère que la perspective de petits fours et de danses vous réjouira autant que moi.
Les élèves rirent, enthousiastes.
- Ce Tournoi ne sera pas facile, je tiens à le préciser. Les membres des équipes seront choisis par chaque maison, vous êtes libres d'élire qui vous semblera avoir les meilleures chances dans les épreuves citées précédemment. Le courage, l'intelligence et l'habilité magique seront les qualités nécessaires pour participer et je ne peux que recommander aux plus jeunes de ne pas tenter une aventure qui pourrait être dangereuse si on n'y prend pas garde. Cette première édition du Tournoi de Poudlard n'est qu'un essai mais si sa réussite s'avère se confirmer, il n'est impossible qu'il puisse être reconduit dans la futur, mais je m'avance ici peut-être un peu trop. Sachez que de plus amples détails sur les épreuves vous seront bientôt communiqués et que l'annonce officiel des équipes finale des maisons est prévue pour dans trois semaines exactement.
- Excusez-moi monsieur, intervint brusquement James en se levant.
- Potter, assis-toi ! Siffla Lily.
Elle tenta de le tirer par sa robe de sorcier, sans succès.
- Ah monsieur Potter, je me demandais quand est-ce que vous alliez intervenir !
Dumbledore n'avait l'air nullement perturbé, comme s'il s'attendait à ce que son élève l'interrompe en plein milieu de son discours, et il lui adressa même un sourire encourageant.
- Allez-y, allez-y exprimez-vous.
- Euh... Je voulais juste savoir...pour le Quidditch ? La Coupe n'est pas annulée, pas vrai ?
- Ne vous inquiétez, j'allais y venir. Les matchs de Quidditch seront naturellement maintenus en plus de l'épreuve de vol sur balais et les sélections seront organisés par les capitaines le week-end prochain.
James se rassit, soulagé, comme tous les autres joueurs de Quidditch.
- Bien, je crois que toutes les informations ont été dites. Il ne me reste plus qu'à vous souhaiter une bonne nuit et à demain !
Un concert de raclement de chaises suivit aussitôt. Pourtant, Lily ne bougea pas et Alexia lui secoua l'épaule.
- Tu viens ?
Mais Lily resta assise encore quelques secondes en réalisant une chose.
C'était le début de leur septième année. Le début de la fin.
Chapitre IV : Le club exceptionnel de Slug
Dans les jours qui suivirent, un air de campagne électoral flotta sur le château. Plusieurs élèves s'étaient mis en tête de convaincre leurs camarades qu'ils devaient faire partie de l'équipe qui représenterait leur maison au Tournoi de Poudlard. Chez Gryffondor, les Maraudeurs avaient la côte, ce qui n'avait rien de surprenant compte tenu de leur popularité et de leur capacité. Adrian Connelly, l'attrapeur de Quidditch, avait lancé l'idée que James fasse l'épreuve de vol sur balais tandis que Remus serait le champion de Gryffondor pour toutes les autres épreuves car qu'il était doué dans toutes les matières. Evidemment, McGonagall lui avait rappelé immédiatement que ce n'était pas réglementaire.
De toute façon, à peu près chaque maison avait leur « tête de classe » dans les différentes épreuves. On pouvait être sûr que Severus représenterait Serpentard pour les potions par exemple.
Il n'y avait d'ailleurs pas que les élèves qui étaient intéressés par les futurs équipes pour le Tournoi de Poudlard. Les professeurs aussi. Slughorn était particulièrement attentif, tentant même d'orienter les élèves dans leur choix en ventant ses élèves préférés. Lily avait piqué un fard quand il s'était exclamé devant toute la classe qu'elle avait un don inestimable pour les potions et que les autres devaient forcément s'en rendre compte.
- Je n'arrive pas à croire qu'il ait fait ça, gémit-elle, mortifiée. C'était...embarrassant !
- Oh arrête de dramatiser, répliqua Dorcas.
- Tu veux rire ? Est-ce que tu as vu le regard des Serdaigle ?
- Ils sont jaloux c'est tout ! T'es la meilleure en potion et ils savent que tu gagneras l'épreuve contre leur maison, peu importe qui est-ce qu'ils choisiront.
Lily se mordit la lèvre.
- Je ne suis pas la meilleure en potion... C'est Severus.
- Oublis Rogue, conseilla Alexia. Tu vas tous les battre ! James va gagner en vol sur balais et Remus aussi, quel que soit l'épreuve à laquelle il participera.
- Les équipes doivent avoir cinq personnes. A votre avis, ça serait qui ?
- Je pense que Sirius et Peter ont peut-être une chance, ce sont des Maraudeurs... Les autres voudront probablement voter pour eux.
- On se demande pourquoi...marmonna Lily.
Marlène lui donna une tape sur le bras.
Sans se presser, elles remontèrent les escaliers pour regagner leur salle commune et émirent des hypothèses sur la possible future équipe de Gryffondor.
Lily devait avouer qu'elle ne savait pas trop quoi penser de ce tournoi. Comme Dumbledore l'avait dit, elle ne voyait pas très bien comment ça allait pouvoir rapprocher les différentes maisons si on les mettait en compétition les unes contre les autres. Et puis, l'avertissement du directeur sur la dangerosité des épreuves lui tournait dans la tête. Elle se doutait qu'elles seraient toutes encadrées par les professeurs mais même si ça concernait des matières scolaires, c'était évident qu'elles seraient bien plus complexes et qu'elles pousseraient les élèves dans leur retranchement.
- Polynectar, lança Alexia à la Grosse Dame en guise de mot de passe.
- Je n'en ai pas besoin, je suis déjà magnifique, rétorqua celle-ci.
Le tableau pivota, révélant le trou dans le mur par lequel elles se glissèrent une par une.
A l'intérieur, les filles furent accueillies par un brouhaha immense. Il y avait une foule massée au centre de la pièce en train de parler fort et Lily remarqua que plusieurs personnes tenaient une enveloppe mauve à la main.
Perplexe, Alexia réussit à intercepter Sirius qui passait près d'elle.
- Qu'est-ce qui se passe ? Demanda-t-elle.
- Oh... C'est Slughorn qui fait encore des siennes. Il organise une réunion de son club habituel mais cette fois c'est un peu plus...spécial.
- Comment ça ? Dit Dorcas.
- Il a invité les potentiels élèves qui pourraient faire partie de l'équipe de leur maison. Ça se passera samedi soir, c'est une sorte de soirée habillée et d'après les rumeurs il a convié des invités imminents, des anciens élèves à lui qui ont réussi. James est persuadé qu'il y aura Liam Murray, l'attrapeur du Club de Flaquemare.
- Carrément ?
- Attends...Potter a été invité ?
Sirius se tourna vers Lily.
- Evidemment, c'est pratiquement sûr qu'il sera dans notre équipe. J'ai aussi reçu une invitation, si tu veux tout savoir. Je crois que c'est Remus qui a la tienne, Evans.
- Combien de personne ont eu une enveloppe ?
- Une dizaine je dirais...répondit-il. Désolé princesse, il n'y en avait pas...
- Pour moi ? Devina Alexia en souriant. Sirius, avec ma maladie, ce n'était même pas une option que je participe aux épreuves, ne t'inquiète pas. Mais c'est génial pour toi !
- Hum...
Alexia haussa un sourcil face à son manque d'enthousiasme.
- Pourquoi ça ne te fait pas plaisir ? Je croyais que tu voulais être choisis pour le Tournoi de Poudlard ? Qu'est-ce qui a changé ?
- Ce n'est pas ça. Je...J'ai toujours refusé d'aller à ce stupide Club de Slug, je ne vois pas pourquoi je devrais accepter maintenant.
- Sirius...
- Slughorn me veut juste pour mon nom de famille, donc non, je ne lui ferais pas se plaisir !
Les filles comprirent que la conversation se jouait entre le couple car elles s'éclipsèrent discrètement. Alexia saisit la main de Sirius puis l'entraîna vers une alcôve de la Salle Commune, loin des autres élèves et des oreilles indiscrètes.
- Ecoute...Je sais que tu as toujours dit que tu ne mettrais jamais les pieds à un Club de Slug, mais considère cette soirée comme une sorte de fête. Ça fera plaisir à James en plus.
- N'essaye pas de prendre James comme excuse.
- D'accord, alors dis-toi que si tu y vas il te faudra une cavalière et donc que tu pourras me voir avec une magnifique robe.
Sirius éclata de rire, l'air soudain plus joyeux.
- Et puis, ajouta-t-elle malicieusement en se penchant pour murmurer à son oreille, c'est même possible que tu me l'enlèves avant la fin de la nuit non ?
Elle ponctua sa remarqua d'un clin d'œil avant de s'éloigner, tandis qu'il restait sur place, sidéré.
**
*
Face au miroir, Lily souffla un grand coup et observa son reflet. Elle avait passé une heure à essayer de discipliner ses cheveux, sans parler de tenir en équilibre avec les chaussures que Dorcas lui avait prêté. Sa robe verte émeraude, le même que ses yeux, lui donnait l'impression de ne plus pouvoir bouger ou d'avoir l'air ridicule. Ce genre de chose n'était pas son genre. Elle n'irait pas jusqu'à dire qu'elle détestait les soirées mais celles de Slughorn finissaient souvent par de longues conférences du professeur sur ses élèves ô combien talentueux et elle n'en avait vraiment pas envie ce soir. En fait, elle se demandait même ce qui l'avait poussé à accepter vu qu'elle n'était même pas sûre de vouloir participer au Tournoi de Poudlard. Les Aspics étaient en fin d'année et il valait sûrement mieux qu'elle se concentre dessus.
- Lily ! Si tu es encore en train de penser et de débattre avec toi-même, est-ce que s'il te plaît tu pourrais le faire dans la chambre ? Je veux la salle de bain !
- Hein ? Oh oui désolé...
Elle ouvrit la porte immédiatement, révélant Dorcas qui attendait, sa serviette de douche sur l'épaule.
- Ah pas trop tôt... On n'a pas toutes la chance d'avoir été conviée à la...
Dorcas reste bouche-bée une seconde.
-... soirée. Merlin ! Lily, tu es incroyable !
- Vraiment ? J'en ai fait trop tu crois ? Je ne suis jamais allée...
- Arrête de stresser, dit Alice depuis son lit. C'est parfait pour ce genre d'évènement.
- Elle a raison, lança Alexia. Et si on ne part pas maintenant, on va être en retard. Tu viens ?
Lily hocha la tête. Elles adressèrent un signe de la main aux trois autres filles, qui n'avaient pas été invitées au Club de Slug, puis rejoignirent la Salle Commune. Les élèves de Gryffondor avaient décidé de tous se rendre à la soirée ensemble et ils étaient une dizaine à attendre.
Parmi eux, Lily reconnut les Maraudeurs évidemment, mais aussi Mary McDonald, la poursuiveuse désormais en sixième année et un garçon qui était avec elle en études des runes.
Comme Alexia l'abandonna pour rejoindre Sirius, elle se plaça à l'arrière du groupe pendant le trajet. Elle aurait dû savoir que Potter saisirait l'opportunité de l'aborder dans la seconde.
- Hey Evans ! S'exclama-t-il.
- Qu'est-ce que tu veux Potter ?
- Rien de spécial...Juste être avec toi.
Lily retint un grognement et continua à avancer, Potter à ses côtés. Ils firent le trajet en silence, les autres faisant suffisamment de bruit pour que cela passe inaperçu.
En arrivant aux abords du bureau de Slughorn, ils entendirent tous les notes de musique qui s'en échappaient et plusieurs voix entremêlées. L'intérieur était grandiose, plus que d'habitude du moins. La pièce avait été agrandit par magie et un énorme buffet trônait contre le mur de droite. Au plafond, des bandes de tissu coloré avaient été tendues, comme pour ressembler à une tente ou à un chapiteau. Dans l'air, les volutes de fumée des bâtons d'encens donnaient un aspect mystérieux aux invités déjà présents.
- Tu crois que Dumbledore est au courant que le budget de l'école passe dans des petits fours au saumon ? Interrogea James platement.
- Est-ce qu'il y a même quelque chose qui échappe à Dumbledore ?
Une image de leurs escapades lors des pleines lunes flasha dans l'esprit de James mais pour une fois il garda la bouche fermée.
- Tu as vu Alexia ?
- Avec Sirius là-bas, indiqua-t-il.
- Tu ne vas pas protester que c'est ton jour de garde ?
- Non, ça c'était l'année dernière. J'ai mûri depuis.
Lily haussa un sourcil, surprise.
- Et puis c'est son jour de garde à elle en plus... ajouta-t-il.
Leur regard se croisèrent et ils pouffèrent en même temps.
Incapable de se retenir de sourire, Lily dévisagea longuement son camarade, tentant de calquer l'image du petit garçon à lunettes agaçant qu'elle avait rencontré dans le Poudlard Express le premier jour.
- Tu es différent, Potter...
- Comment ça ?
- Je ne sais, avoua-t-elle franchement. J'ai l'impression que tu as changé cet été. Enfin je veux dire, d'habitude tu m'aurais déjà demandé de sortir avec toi à grands renforts de feux d'artifice.
- A vrai dire, mon fournisseur pyrotechnique est tombé malade.
- Potter !
Il eut un rictus amusé et se passa une main dans sa tignasse décoiffée.
- J'ai juste pris conscience que si je voulais que tu me prennes au sérieux alors je devais me montrer un peu plus... responsable, je suppose, et que je devais te laisser de l'espace.
- Ça vient de Remus, n'est-ce pas ?
- Hé ! Je suis vraiment sérieux là.
Elle le fixa avec insistance.
- Très bien, d'accord, oui c'est une idée de Remus.
- J'en étais sûre, dit-elle en riant.
- Mais le point n'est pas là, continua-t-il comme si elle ne l'avait pas interrompu. Ce que j'essaye de te dire, Evans, c'est que j'ai des sentiments pour toi. J'en ai depuis des années maintenant et je pense que tu le sais. L'école entière est au courant. Tu m'as dit plusieurs fois que tu croyais que je me moquais de toi avec mes demandes répétées, sauf que tu n'as pas l'air de te rendre compte d'à quel point tu es incroyable. Il n'y a pas vingt mille filles qui m'aurait tenu tête comme ça ou qui aurait accepté la condition de Remus sans ciller.
- C'était normal...
- De quoi ? De me tenir tête ?
- Ne joue pas sur les mots, Potter, grommela-t-elle, gênée. Il faut toujours que tu me pousses à bout.
- Parce que tu ne peux pas t'empêcher de réagir, répliqua James.
- Tu embêtes n'importe qui, pas juste pas moi...
- C'est là tout le problème, Evans. Tu ne seras jamais « n'importe qui » à mes yeux.
Lily se sentit rougir.
Il avait le don de faire des déclarations pareilles dans des moments incongrues, comme cette fête au milieu de la foule. Pourtant, même si les conversations bourdonnaient autour d'eux, elle avait le sentiment d'être coupé du bruit.
- James...
- Est-ce que tu y repenses parfois ?
Elle resta perplexe une seconde.
- A l'attaque de Pré-au-Lard, est-ce que tu y repenses parfois ? Clarifia-t-il.
- Evidemment mais je ne vois pas...
- J'y ai pensé tout l'été, j'en ai même rêvé certaines nuits. Tu sais ce qui me revient le plus à chaque fois ? Le corps de Sirius allongé et puis ton regard, juste avant qu'on se mette à courir. Tu avais l'air terrifié, pourtant quand il a fallu affronter les mangemorts tu ne t'es pas démontée. Ce jour-là, pour la première fois, j'ai compris que je pouvais perdre les gens auxquels je tenais en une fraction de seconde...
Lily tenta d'avaler la boule qui s'était formée dans sa gorge. Bien sûr que les souvenirs de Pré-au-Lard la hantait aussi. Parfois, quand elle dormait, elle sentait encore le pouls de Potter qui battait furieusement contre son poignet alors qu'il lui serrait la main en courant et elle se réveillait, le souffle court, avant de réaliser qu'elle était en sécurité dans son lit.
- Ce n'est pas juste à cause de Remus que j'ai pris conscience que je devais changer d'approche avec toi, Evans, continua-t-il sans ciller. Je pense...je pense que je t'ai assez montré que je tenais à toi, que je voulais plus entre nous. Maintenant c'est à toi de voir. Je ne te demanderais plus de sortir avec moi chaque semaine, je vais te laisser réfléchir et je t'attendrais, promis.
Lily piétina sur place, mal à l'aise, avant de trouver le courage de murmurer doucement :
- Tu risques d'attendre longtemps...
- On verra ça, Evans.
**
*
Remus observait James qui parlait avec Evans près de la porte d'entrée et il se demanda un instant si son ami avait retenu son conseil d'être plus mature cette année ou de laisser de l'espace à la jeune fille. Pour tout dire, l'expression indéchiffrable sur le visage de Lily l'inquiétait sur ce point.
Il aimait bien Lily depuis leur première année et avait toujours tenté de refréner ses amis quand ils décidaient de lui faire une blague, à elle et à Rogue. Enfin à Rogue surtout. Les choses avaient radicalement changé entre eux tous au milieu de la cinquième année, quand Rogue avait découvert son secret après une mauvaise blague de Sirius. De mémoire, c'était sûrement la plus grande crise que les Maraudeurs avaient eu à traverser et la seule fois où James avait réellement été en colère contre Sirius. Les cris de leur dispute résonnaient encore dans sa tête aujourd'hui. Ensuite, il y avait eu la scène au bord du lac, durant laquelle l'amitié entre Lily et Rogue s'était brisée de façon irréparable. Tous ses évènements avaient peu à peu conduit à leur rapprochement l'année passée, d'abord avec le couple formé par Alexia et Sirius, puis les échanges civilisés entre James et Lily, ce qui tenait quand même du miracle.
Avec un soupir, il détourna le regard et porta la main à ses tempes. Les fumées de l'encens commençaient à lui donner la migraine, à moins que ce ne soit la voix condescendante d'Elizabeth Yaxley qui racontait les préparatifs de son futur mariage avec Evan Rosier, un Serpentard qui avait désormais quitté l'école.
Brusquement, une ombre s'abattit au-dessus de lui, et une voix suivit presque aussitôt.
- Remus ?
- Anaïs ?
Anaïs Delan, la préfète de Serdaigle, se trouvait devant lui, habillée d'une longue robe bleu ciel en accord avec ses yeux et ses cheveux blonds or. Ils s'étaient rencontrés à la fête d'anniversaire de Sirius l'année dernière mais leur relation avait été constitué de haut et de bas, surtout à cause de lui. Ce n'était pas qu'elle ne lui plaisait pas, en fait c'était même tout le contraire. Peter disait souvent qu'elle était son double au féminin.
Après l'attaque à Pré-au-Lard durant laquelle ils avaient été piégé dans un magasin ensemble pendant près d'une heure, il ne l'avait revu qu'une seule fois au détour d'un couloir. Leur échange avait vite tourné court cependant.
- Euh... Salut...Je...je ne savais pas que tu serais là...balbutia-t-il.
- Ouais, j'ai reçu l'invitation de Slughorn. Apparemment, il pense que je pourrais faire partie de l'équipe pour le Tournoi.
- En quoi ? Pas en métamorphose j'espère ?
Anaïs éclata de rire.
- Non, plutôt en potions. Je suis toujours une catastrophe pour métamorphoser des objets et mon hérisson garde encore des aiguilles sur le dos même après la quatrième tentative et tes cours particuliers.
- Tu te débrouillais déjà mieux à la fin...
- Crois-moi, les vacances m'ont fait tout oublier, affirma-t-elle. D'ailleurs...je me demandais...
- Oui ?
- Est-ce qu'on pourrait reprendre les cours ? Tous les deux ?
- Bien sûr ! S'exclama Remus avant de réfléchir.
Voilà, pensa-t-il, c'est comme ça que je m'y prends pour ne pas m'attacher à elle : accepter de rester des heures en tête à tête pour lui donner des leçons de métamorphose. Bien joué Remus ! Il espérait qu'au moins McGonagall reconnaîtrait son investissement pour sa matière.
- En fait, comment va ta cheville ? Demanda-t-il, histoire de s'éloigner du sujet glissant.
Anaïs s'était en effet cassé la cheville pendant l'attaque de Pré-au-Lard par un sort isolé et il se souvenait qu'elle pouvait à peine poser le pied par terre à ce moment-là. C'était lui qui lui avait fait une attelle de fortune avant de partir secourir James et Sirius.
Elle baissa les yeux sur sa cheville, surprise, puis haussa les épaules.
- Parfaitement bien. Pomfresh me la rafistolé en deux coups de baguettes ce jour-là. Tu sais, tu l'aurais su si tu étais passé me voir l'année dernière.
- J'en avais l'intention, assura-t-il en rougissant. Mais Sirius était blessé, après il y a eu toute l'histoire de l'enlèvement de Lily et je...
- Remus, Remus ! Je plaisantais, ce n'est pas grave.
- Bien sûr que si, ce n'était pas juste envers toi...
Anaïs se contenta de soupirer.
- Est-ce que tu te blâmes toujours pour tout et n'importe quoi ? Dit-elle, un petit sourire accroché aux lèvres. Essaye de te détendre un peu, Remus. Tu n'as pas une dette envers le monde entier...juste envers moi en fait.
- Comment ça ?
- Tu m'avais dit que tu me devais toujours un rendez-vous, lui rappela-t-elle. Tu te souviens ? Avant de te précipiter en dehors du magasin pour aller jouer au héros, tu m'as dit que tu allais revenir sain et sauf parce que tu me devais un rendez-vous.
Effectivement, Remus s'en souvenait très bien. Il se souvenait aussi parfaitement du baiser sur la joue qu'il lui avait donné sur un coup de tête. Maintenant, presque trois mois plus tard et sans l'adrénaline du danger, cette décision lui paraissait moins approprié à son plan de « mise à distance » et de « non attachement » à la jeune fille.
Malgré cela, de la même façon qu'il avait accepté de reprendre les cours particuliers, sa prochaine phrase franchit ses lèvres sans qu'il ne puisse s'en empêcher.
- T'as raison, je te l'avais promis. Donc...euh...est-ce que tu voudrais bien aller à la sortie de Pré-au-Lard en octobre avec toi ? Genre...comme un rendez-vous je veux dire ?
Bon on avait sûrement vu meilleures demandes mais c'était un début, pensa-t-il, anxieux. Anaïs, quant à elle, paraissait ne pas en croire ses oreilles.
- C'est le moment où tu réponds, glissa-t-il inutilement.
- Oh ! Oh oui...Enfin oui, ma réponse est oui...Comme dans oui, je veux bien...
- Sérieusement ?
Anaïs parut amusée de son hébétement.
Autour d'eux, l'agitation continuait et une pile de verre de champagne passa au-dessus de leur tête en lévitant sans qu'ils ne s'en aperçoivent vraiment. Slughorn était en train de remercier les élèves d'être venu et claironnait qu'il était convaincu que parmi eux se trouvait les futurs champions de leur maison.
Brusquement, Sirius arriva près d'eux, un verre à la main. Il tapa l'épaule de Remus et adressa un signe de tête polie à Anaïs.
- Salut ! Hum... Anna ? Astrid ?
- C'est Anaïs en fait.
- C'est ça ! S'exclama-t-il. Désolé. Alors de quoi vous parliez ici ?
Remus échangea un bref regard avec la Serdaigle.
- Je crois qu'on a un rendez-vous ensemble, c'est tout.
Ils éclatèrent de rire en voyant Sirius s'étrangler de surprise. Finalement, octobre avait l'air bien loin désormais.
Chapitre V : Les équipes se mettent en place
Le lendemain matin, le ciel était d'une couleur de plomb, comme s'il n'arrivait pas à se décider sur la météo, et une brume pluvieuse tombait en continu. Sirius observait le parc par la fenêtre, luttant contre le sommeil. Il faut dire qu'il n'avait pas beaucoup dormit la nuit dernière et que la voix du professeur Dextrus n'aidait pas non plus. Ça allait bientôt faire une heure qu'il s'était lancé dans un long discours sur la différence entre les feuilles de thé vert et de thé noir, ce qui ne l'intéressait absolument pas. De toute façon il préférait le café.
-...et on voit donc clairement que le thé noir permet une connaissance de l'avenir plus précise, continuait Dextrus, mais le thé vert, lui, ouvre le troisième œil vers un futur parfois lointain et surtout plus large dans le monde.
- Et à ton avis le thé aromatisé fruit rouge, ça fait quoi ? Marmonna James.
Sirius sourit. Son meilleur ami avait l'air tout aussi passionné par le sujet que lui-même. Il était à moitié affalé sur sa table, qui était en fait un guéridon comme le rappelait souvent le professeur Dextrus, et ses cheveux partaient dans tous les sens étant donné qu'il n'arrêtait pas de les ébouriffer, sans parler de ses lunettes qui pendaient au bout de son nez.
- T'endors pas, conseilla Sirius, ou il risque de te dire que ce sont des cauchemars inconscient qui t'empêchent de dormir la nuit et que ça veut sûrement dire que tu vas mourir écrasé par une branche du saule cogneur.
James ouvrit un œil pour le dévisager.
- Très réjouissant ! T'aurais au moins pu me trouver une mort héroïque.
- Comme quoi ? Etre le preux chevalier d'Evans et te sacrifier pour la sauver ?
- C'est ça, moque-toi, répliqua-t-il. Mais si tu veux parler de nuit où on ne dort pas et de filles, je te ferais remarquer que ton absence au dortoir hier soir n'est pas passée inaperçu.
Sirius haussa les épaules dans l'espoir de paraître nonchalant.
- J'étais avec Alexia...
Cette information fit se redresser James au quart de tour. Il remonta ses lunettes sur son nez et le scruta du regard attentivement.
- Avec Alex ? Toute la nuit ? Vous avez fait quoi, jouer au scrabble ? Demanda-t-il d'un ton sarcastique.
- La ferme James...
- Oh allez, parle !
- Tu sais très bien ce qu'on a fait toute une nuit, espèce d'imbécile. On a trouvé une pièce au septième étage quand on se disait qu'on était trop fatigué après le club de Slug pour retourner à la tour de Gryffondor. Même moi, je ne l'avais jamais vu. Y avait une énorme cheminée et un canapé confortable. Les choses ont un peu évolué vers une heure du matin...
- Non en fait je ne veux rien savoir, coupa James en agitant les mains. Alex est comme une petite sœur et toi un frère, les images sont trop choquantes. Mais...attends ! Une pièce au septième étage ? On a mis ça, nous, sur la carte ?
Sirius secoua la tête.
- Justement, non. Et tu veux savoir ce qui est vraiment bizarre ?
- Le fait que ce château ait visiblement encore des secrets qu'on n'a pas découvert ?
- Non, le plus bizarre c'est que quand j'ai voulu aller revoir la salle ce matin, elle avait disparu, comme si elle n'avait jamais été là. Il n'y a qu'un mur, juste en face de face de la tapisserie de , tu sais celle où il tente d'apprendre la danse classique à des .
- Ah oui, j'ai toujours trouvé que celui de droite ressemblait à Mulciber, acquiesça James. En tout cas c'est étrange ton histoire. T'avais sûrement trop bu.
- Comme si toi t'avais carburé à l'eau toute la soirée !
- C'est pourquoi vous allez tous essayer immédiatement, dit soudain la voix de Dextrus. Prenez tous une tasse de thé et lisez l'avenir de votre binôme. Bien sûr, cela sera flou pour certains d'entre vous, tout le monde n'a pas un troisième œil sensible au message de l'art des feuilles de thé, mais cet exercice vous sera sans aucun doute demandé pour vos ASPIC.
Sans enthousiasme, il y eut un concert de raclement de chaises tandis que les élèves allaient chercher leur tasse. Sirius en attrapa deux au hasard, se saisit d'une poignée de feuille sans même regarder leur couleur puis retourna s'assoir.
Quelques minutes plus tard, il fixait profondément le fond de la tasse de James et essayait de trouver un sens à la bouillie qui s'y trouvait, sans grand succès. Autour de lui, ses camarades n'avaient pas l'air plus avancé. Tessie Ryan avait sa plus belle expression de cruche sans cervelles tandis que Thomas O'Brian, le capitaine de Poufsouffle qui jouait au poste de batteur, louchait presque au-dessus de sa tasse, concentré.
- Tu vois quelque chose, Patmol ?
- Non... Oh si, il y a un truc.
- Quoi ? Mon futur mariage avec Lily ?
- Presque, dit Sirius. Le prénom de votre enfant.
James se pencha en avant pour examiner la tasse.
- Et alors ? Comment il s'appellera ?
- Bambi !
James recula, l'air consterné et amusé à la fois.
- Ce que tu peux être bête...
**
*
Le cours de Divination était le dernier de la journée et James se dépêcha de remballer ses affaires. Il devait traverser la moitié du château pour retrouver Lily, et il savait qu'elle le tuerait s'il arrivait en retard pour leur première ronde en tant que préfet et préfète-en-chef. Effectivement, il n'avait pas réalisé que son insigne impliquait que désormais il passerait deux heures chaque jeudi soir à patrouiller dans les couloirs avec Lily. Seul à seule.
Il ne savait même pas bien lui-même si cette idée le réjouissait ou l'effrayait.
En tout cas, quand il arriva dans le hall, la jeune fille se tenait déjà là. Il aurait dû savoir qu'elle aurait de l'avance mais pour sa défense, le cours d'études de runes se trouvait au rez-de-chaussée, ce qui lui donnait un léger avantage.
- Potter ! S'exclama-t-elle en l'apercevant.
- Désolé pour le retard...
- Non, non c'est bon, tu es à l'heure. On y va ?
- Euh ouais... Comment on procède exactement ?
Il devait avouer que tout cela était un peu nouveau pour lui. D'habitude, il cherchait à échapper aux préfets, pas à coincer les délinquants. Heureusement, Lily semblait être en terrain familier et lui adressa un sourire.
- C'est simple vraiment, il suffit de marcher au hasard dans les couloirs pour s'assurer que personne ne fait quelque chose de contraire au règlement. A cette heure-ci, il y a pas mal d'élèves qui cherchent à faire de la magie hors des cours donc on a du boulot. Les rondes du soir après le couvre-feu sont souvent ennuyantes.
- Ça c'est parce que les préfets ne nous attrapent jamais, rétorqua-t-il fièrement.
- C'est faux, protesta Lily, je vous ai trouvé plusieurs fois. Et maintenant que tu es toi-même préfet-en-chef et Remus toujours préfet j'ose espérer que vous allez respecter les règles.
James se garda bien de répondre.
En tout cas, il s'aperçut vite que la rousse avait raison. Ils mirent une heure de colle à une bande de deuxième année qui jouait au frisbee à dents de serpents et confisquèrent des bombabouses à Adrian Connelly qui s'en alla en grommelant. Un peu plus tard, il vit Sirius qui faisait léviter son sac pour ne pas avoir à le porter, parlant avec Peter, mais il fit mine de ne rien voir en constatant que de toute façon Lily avait le dos tourné et ne s'était rendu compte de rien.
- Alors, tu sais si tu veux participer au Tournoi de Poudlard ? Demanda James, histoire d'entamer la conversation quand le silence lui devint insupportable.
- Aucune idée... Je veux dire, il y a plein de personne dans notre maison qui serait certainement ravie d'être dans l'équipe alors que moi...
- Alors que toi tu es vraiment doué et tu pourrais réellement aider Gryffondor à gagner le trophée.
- Tu dis n'importe quoi !
- Oh allez Evans, la modestie ne te va pas.
- Tu inverses les rôles là, répliqua-t-elle.
- Mais tu sais ce que je veux dire. Tu major pratiquement tout le temps à chaque trimestre et aux examens de fin d'année.
- Remus aussi. Et tu es doué en métamorphose.
- Est-ce que c'est un compliment ?
Lily rougit.
- C'est une observation, corrigea-t-elle sans conviction.
Pas dupe, James sourit avec effronterie avant de lui ouvrir la porte de la bibliothèque. Apparemment ils devaient vérifier que plus aucun élève ne s'y trouvait avant que Mrs Pince ne ferme son antre. Cette dernière leur adressa un regard agacé par-dessus ses lunettes à monture écailles, comme si elle voulait leur faire savoir qu'ils avaient intérêt à se dépêcher pour qu'elle puisse s'en aller.
Les rayonnages avaient une allure angoissante quand il n'y avait plus personne et que le soleil n'éclairait plus la pièce, on aurait presque dit de grande silhouette fantomatique qui se découpait dans la semi-obscurité. Lily tenait sa baguette devant elle pour les éclairer même s'il était évident qu'il n'y avait plus personne ici. En même temps, James se demanda qui pouvait bien souhaiter passer la nuit enfermé dans la bibliothèque ou pire se faire réveiller au petit matin par Mrs Pince. Le cauchemar.
- On est obligé d'aller jusqu'au fond ?
- Ne me dis pas que t'as peur du noir, Potter ?
- Non mais je suis allergique à cet endroit...
Lily secoua la tête en soupirant.
Alors qu'ils tournaient dans la section Métamorphose, Lily sursauta brusquement en voyant quelqu'un. C'était une fille avec des cheveux bruns au carré, la tête posée sur un livre ouvert et visiblement endormie. Ses bras pendaient le long de son corps et pendant une horrible fraction de seconde, Lily eut la vision des personnes agressées l'année dernière. Elle resta figée sur place tandis que James s'avançait vers la fille pour la secouer par l'épaule.
- Eh, Douglas, debout, chuchota-t-il.
- Tu la connais ?
- Ouais, c'est Sarah Douglas. Elle est attrapeuse dans l'équipe de Serdaigle.
Déglutissant, Lily se décida à approcher.
- Elle devait réviser pour ses BUSE, dit James. Oh Douglas, réveille-toi !
Il la secoua un peu plus fort mais la jeune fille resta immobile.
- Sarah ! Sarah !
- James, pourquoi est-ce qu'elle ne bouge pas ? Souffla Lily, paniquée. Tu crois...tu crois que les agressions... ? Elle est née-moldu non ?
- Impossible, Rosier est parti !
- Il n'était pas seul, tu le sais bien. Kevin l'a prouvé.
James parut paniqué à son tour. Il s'agenouilla près de Sarah puis lui tapota les joues en appelant son nom, sans plus de résultat. Elle respirait correctement mais n'ouvrait pas les yeux. Sur la table, il n'y avait qu'un manuel de métamorphose, une plume, un encrier et un bout de parchemin à moitié rédigé.
- Regarde dans son sac, dit James au bout de quelques secondes, il y a peut-être quelque chose.
- Quoi ? Pourquoi moi ?
- Parce que je ne fouille pas dans le sac d'une fille, ma mère m'a appris ça figure-toi.
Lily bougonna mais s'exécuta. A l'intérieur, pas grande chose d'intéressant. Elle écarta deux livres, une trousse de maquillage et un miroir de poche quand soudain ses doigts rentrèrent en contact avec un petit objet en verre.
- Une fiole ? S'étonna-t-elle.
- Une fiole vide en tout cas. Tu crois qu'elle aurait pu être drogué ?
- Par qui ? Et pourquoi en plein après-midi à la bibliothèque quand il n'y a personne autour ?
- Pas la moindre idée, avoua James. Qu'est-ce qu'on fait ? On l'emmène à l'infirmerie ? Je veux dire, Pomfresh saura sûrement quoi faire.
- D'accord... Comment on la transporte ?
- Je vais la prendre dans mes bras, toi prends ces affaires.
Quand James souleva la jeune fille, une main dans son dos et l'autre sous ses genoux, Lily espéra la voir bouger miraculeusement mais elle resta inerte, sa tête roulant dans le vide.
Mrs Pince manqua de s'étouffer quand ils sortirent de la bibliothèque et parut vouloir leur poser des questions avant de se rétracter, probablement parce que ça lui aurait encore fait perdre plus de temps. Malheureusement, les élèves qu'ils croisèrent en chemin n'eurent pas la même réaction. Bertha Jorkins leur sauta pratiquement dessus, avide de ragot, avant que Lily ne menace de lui retirer trente points si elle continuait.
Elle ne cessait de repenser aux attaques des né-moldus, au groupe de Rosier toujours présents dans le château, et son ventre se serra à la simple idée que tout recommençait à nouveau. Au moins, quand James accéléra le pas malgré le poids qu'il portait, elle dû se mettre à courir pour rester à sa hauteur, ce qui lui permet de ne plus trop y penser.
C'est avec soulagement qu'ils arrivèrent à l'infirmerie. Madame Pomfresh haussa un sourcil en les voyant débarquer.
- Par Merlin, Potter qu'est-ce que vous avez fait à cette jeune fille ?
- Rien ! On l'a trouvé comme ça dans la bibliothèque en faisant nos rondes.
- Ah oui, marmonna-t-elle après avoir jeté un coup d'œil au badge épinglé sur le devant de sa robe de sorcier. Je n'aurais jamais imaginé vous voir Préfet-en-chef un jour, Potter.
- Moi non plus...
- Allez-y, posez-la ici.
Elle désigna un lit d'un geste de la main et se tourna vers le petit première année dont elle s'occupait juste avant.
- Tu peux y aller, mais fais attention à la tabatière mordeuse du professeur McGonagall la prochaine fois.
- Oui madame...
Dès que la porte se fut refermé sur lui, elle fit volte-face et vint se planter à côté d'eux.
- Bon alors qu'avons-nous là ?
- Elle s'appelle Sarah Douglas, expliqua Lily d'une voix mal assurée. Elle est en cinquième année à Serdaigle et elle était dans la bibliothèque, sûrement en train de réviser. On ne sait pas depuis combien de temps mais quand on a essayé de la réveiller, elle n'a pas bougé. Il y avait ça aussi dans ses affaires, ajouta-t-elle en montrant la fiole vide. Vous...vous pouvez faire quelque chose ?
- Je vais vite le savoir.
L'infirmière s'empara de la fiole et l'examina du regard avant d'agiter sa baguette au-dessus.
- Elle était là-bas pour réviser vous dites ?
- J'imagine, comme c'est l'année de ses BUSE...
- Et est-ce que cette jeune fille était particulièrement stressée ?
- C'est-à-dire qu'on ne la connait pas vraiment bien, dit James. Mais elle est aussi dans l'équipe de Quidditch, avec le match bientôt plus ses révisions elle était sans doute stressée oui...
Madame Pomfresh hocha la tête.
- Je crois savoir ce qui l'a mis dans cet état. Un mauvais dosage de potion qui a provoqué une mise en sommeil, un peu comme la Belle au bois dormants si vous me permettez la comparaison.
- Quelle potion ? Demanda Lily.
- C'est qui la Belle au bois au bois dormants ? Dit James au même moment.
Ils échangèrent un regard par-dessus le lit, amusés.
- C'est ce qui s'appelle un choc culturel, commenta Pomfresh avec un sourire. Vous vous renseignerez plus tard, Potter. En tout cas, miss Douglas a simplement bu un philtre de paix mal préparé. C'est une potion destinée à calmer l'anxiété et à apaiser l'agitation. Un dosage trop lourd entraîne pour celui ou celle qui la boit un sommeil profond, voire irréversible dans certains cas. Oh ne vous inquiétez pas, miss Douglas ira bien. Elle restera endormie encore deux ou trois jours avant que les effets ne se dissipent mais après ça elle sera sur pied très vite.
En entendant ça, l'angoisse de Lily sembla s'envoler d'un coup. Il ne s'agissait pas d'une agression mais juste d'une jeune fille stressée par ses cours et ses obligations sportives. Bien. La tension de James diminua également et il lui adressa un sourire rassurant.
Pour une fois, Lily fut heureuse qu'il ait été à ses côtés aujourd'hui.
**
*
- Oh allez Remus, avoue qu'elle était bonne ! Bambi !
- Sirius, ce n'est pas parce que tu le répète une quatrième fois que ça devient drôle. Et ce n'est pas non plus parce que c'est le seul dessin animé moldu que toi et James connaissiez que vous pouvez faire des blagues dessus.
- Moi je l'ai trouvé très drôle, glissa Peter.
- Merci Quedver !
Remus leva les yeux au ciel.
En arrivant dans le hall, ils eurent la surprise de voir James et Lily qui descendaient l'escalier pour venir à leur rencontre.
- Vous en faites une tête...dit Sirius.
- Oh rien de grave, je te raconterais. Ça a été une première ronde...comment dire...intéressante.
- Si tu le dis. On va manger ? Je meurs de faim !
- Je vais retrouver les filles, intervint Lily. A plus tard !
Alors qu'elle s'éloignait, Sirius donna un coup de coude à James.
- T'as entendu ? « A plus tard », répéta-t-il en imitant la voix de Lily. C'est un progrès, d'habitude elle espère ne pas te croiser le plus longtemps possible. Crois-moi Cornedrue, je le sens, cette année c'est la bonne !
- J'ai décidé de plus lui demander de sortir avec moi pourtant... Histoire de lui laisser de l'espace, tu vois ?
- Je sais, j'étais là quand Remus t'as exposé sa théorie. Qui aurait cru que notre petit Lunard serait un spécialiste des filles ?
Ils s'assirent tous au bout de la table de Gryffondor, pile au moment où les plats pour le repas du soir apparaissaient. Remus jeta un coup d'œil agacé en direction de son ami.
- Je ne suis pas un spécialiste des filles...
- Ah bon ? Et Anaïs alors ?
Peter releva la tête de son plat de pomme de terre au four, la bouche pleine.
- Q'esh q'a Ashnyss ?
- Hein ?
- Je disais, qu'est-ce qu'elle a Anaïs ?
- Remus l'a invité à sortir avec lui à Pré-au-Lard hier !
James s'étrangla avec son verre d'eau. Il ouvrit la bouche pour poser plus de question mais à ce moment-là, Tiberius Ackerley, le présentateur de Quidditch, entra en trombe dans la Grande Salle. Il se mit à sauter sur sa place en agitant les bras, attirant l'attention de tous les élèves présents.
- La liste des équipes pour le Tournoi de Poudlard est affichée ! Venez voir !
Il y eut un moment de flottement, le temps pour tout le monde comprenne ce que Tiberius venait de hurler à la cantonade, puis un mouvement de foule se précipita en direction du Hall. Les Maraudeurs se levèrent d'un bond, même si Peter parut abandonner ses pommes de terre à regret.
Devant le tableau d'affichage, il y avait tellement de monde que c'était dur de voir quoique ce soit et de toute façon, même si quelqu'un avait tenté de lire les résultats à voix haute ça aurait été impossible de l'entendre puisque chacun parlait à tort et à travers avec excitation.
- T'arrives à voir ? Demanda Sirius.
James secoua la tête et essaya de se mettre sur la pointe des pieds.
Finalement, au bout de quelques secondes à pousser des plus jeunes pour se frayer un passage, ils arrivèrent à atteindre le panneau d'affichage. Un long parchemin y était épinglé et l'écriture penchée de Dumbledore s'étalait à l'encore noir, ce qui faisait qu'il fallait plisser les yeux pour réussir à bien lire.
Tournoi de Poudlard
-Constitution des Equipes-
23 septembre 1977,
Les noms des champions de chaque équipe ont été désigné par les membres de leur maison respectives après un vote de trois semaines environ.
Si l'une des personnes dont le nom est inscrit ci-dessous ne souhaite pas participer au Tournoi, cette dernière est priée d'en informer son directeur ou sa directrice de maison dans les plus brefs délais afin d'être remplacé. Cependant, une fois sa candidature acceptée, il n'est plus possible de se désister.
Gryffondor :
1) James Potter - 7ème année - Vol sur balais
2) Remus Lupin - 7ème année - Métamorphose
3) Lily Evans - 7ème année - Potion
4) Mary McDonald - 6ème année - Botanique
5) Sirius Black - 7ème année - Défense contre les forces du mal
Poufsouffle :
1) Thomas O'Brian - 5ème année - Vol sur balais
2) Sabine Travers - 7éme année - Métamorphose
3) Jeremy Hopkrik - 6ème année - Potion
4) Bertha Jorkins - 6ème année - Botanique
5) Ophélia Edwards - 5ème année - Défense contre les forces du mal
Serdaigle :
1) Artemisia Meadowes - 2ème année - Vol sur balais
2) Sarah Douglas - 5ème année - Métamorphose
3) Anaïs Delan - 7ème année - Potion
4) Tiberius Ackerley - 6ème année - Botanique
5) Augustus Rookwood - 7ème année - Défense contre les forces du mal
Serpentard :
1) Regulus Black - 6ème année - Vol sur balais
2) Livia Fawley - 6ème année - Métamorphose
3) Severus Rogue - 7ème année - Potion
4) Dymphna Zabini - 6ème année - Botanique
5) Elizabeth Yaxley - 7ème année - Défense contre les forces du mal
Félicitations aux nouveaux champions et bonne chance à tous !
La première Epreuve se tiendra le samedi 8 octobre à 20h dans la Grande Salle et portera sur la métamorphose.
Et n'oubliez pas, chaque champion reflète l'image de sa maison.
Albus Dumbledore,
Directeur de Poudlard
James fixa avec insistance tous les noms sur le parchemin jusqu'à être sûr de les avoir retenu. A partir de maintenant, ils étaient ses adversaires.
Chapitre VI : Les placards de Poudlard
Remus se demandait si ce Tournoi de Poudlard n'allait pas rendre le château complétement fou à force. Depuis que les noms des équipes avaient été annoncé la semaine dernière, on ne pouvait plus faire un pas sans que quelqu'un ne tente des stratégies de déstabilisation envers une autre maison. Bertha Jorkins avait fait un vol plané après un sortilège jeté par un Serdaigle et Livia Fawley n'allait plus nulle part sans une garde rapprochée. Lui-même avait tendance à se méfier de tout le monde désormais, surtout que Sirius s'était retrouvé pas plus tard qu'hier affligé de boutons bleus sur tout le visage après avoir bu un simple verre de jus de citrouille. Madame Pomfresh avait arrangé les effets de la potion mystère, qui d'après les rumeurs venaient d'un Serpentard, en deux minutes bien sûr mais ça montrait quand même le genre de chose que les élèves pouvaient faire.
C'est peut-être à cause de ce climat de tension un peu particulier que les personnes que Remus et Anaïs croisèrent dans les couloirs leur jetèrent des regards étonnés, l'air de se demander comment deux champions adverses pouvaient se promener ensemble comme si de rien était. Mais Remus s'en fichait à vrai dire. Il avait promis à la jeune fille de l'emmener à Pré-au-Lard pour la sortie et il comptait bien tenir sa promesse.
- Tu crois qu'ils vont arrêter de nous dévisager ? Murmura-t-elle après avoir dépassé un groupe de deuxième année tout sauf discret.
- Ne fais pas attention, ça va leur passer. C'est juste que la première Epreuve est dans huit jours.
- Et ça ne te stress pas ? Je veux dire, de passer en premier ?
- Oh si ! James m'a même fait un planning de travail, comme si ce n'était pas moi qui lui faisait ses fiches de révisions depuis sept ans.
Anaïs éclata de rire.
- Je te dirais bien que si tu veux que je t'aide y'a aucun problème mais vu mon niveau en métamorphose je pense que je vais m'abstenir. Mais te je soutiens de tout cœur ! Enfin après Sarah...
- Quoi ? Tu supportes ta maison avant moi ? Dit-il en feignant l'indignation.
- Parce que quand ça sera mon tour en Potion, tu me soutiendras moi plutôt qu'Evans ?
Remus fit mine de réfléchir. Alors qu'il allait ouvrir la bouche pour répondre, ils entendirent une voix crier avec colère un peu plus loin.
- Je vais le tuer ! Qui a fait ça ?!
- Qu'est-ce que...
- C'est Dorcas, dit Remus.
Ce n'était pas dur de reconnaître sa voix, il avait entendu plus d'une fois se mettre en colère. Il fronça les sourcils puis se dirigea en direction des cris mécaniquement. Anaïs lui emboîta le pas immédiatement, curieuse. Ça devait être leur conscience de préfet qui les poussait à intervenir.
- Dorcas ? Tout va bien ?
- Ah Remus ! Viens tout de suite !
Dorcas tenait sa petite sœur par les épaules, tremblante de rage. Artemisia avait les joues barbouillées de larmes et hoquetait en pleurant. Le spectacle de la gamine serra le cœur de Remus.
- Qu'est-ce qui s'est passé ?
- Les gens se moquent de moi, balbutia-t-elle.
- Crois-moi ils ne rigoleront plus longtemps quand je les aurais sous la main, commenta Dorcas hargneuse.
- Ils disent que j'arriverais pas à gagner mon épreuve parce que...parce que je suis une naine de deuxième année...
Remus se doutait qu'ils avaient dû bien pire pour la mettre dans cet état mais qu'elle ne voulait pas énerver sa sœur davantage. La petite fille était la plus jeune du Tournoi et sa nomination pour l'Epreuve de vol avait surpris tout le monde. James lui avait raconté que d'après ce qu'il avait entendu, Artemisia s'était présentée pour les essais de Quidditch au poste de poursuiveuse et s'était révélée particulièrement douée, au point que Tiberius Ackerley, le commentateur, avait fait son éloge durant des heures. Les gens de sa maison l'avaient donc choisi dans leur l'équipe, même si ce choix ne faisait pas l'unanimité. Certains clamaient qu'à cause de son âge, elle allait faire perdre Serdaigle.
- Ne t'inquiète pas, ça va s'arranger, rassura Anaïs, émue. Ce ne sont que des idiots !
Mais la petite fille était toujours au bord des larmes, l'air misérable.
Remus se tourna vers Anaïs et la saisit par le bras pendant que Dorcas restait réconforter sa petite sœur en s'insurgeant plus qu'autre chose.
- Je m'en fiche si c'est contraire à l'éthique d'un préfet, j'enlève cinquante points au prochain élève que j'entends se moquer d'Artimisia ! S'exclama Anaïs dès qu'ils se furent éloignés.
- Tu enlèves cinquante et je lui mets une heure de colle, approuva-t-il.
Anaïs parut étonnée.
- Bien !
Elle lui attrapa la main, sourire aux lèvres. Ils auraient peut-être dû rester encore un peu réconforter la gamine mais Rusard ne resterait pas éternellement à la porte d'entrée pour aller à Pré-au-Lard.
Remus sentit son estomac se contracter en sentant la main fine d'Anaïs dans la sienne. Elle semblait avoir agi sur un coup de tête, sans réfléchir, et il pria pour qu'elle ne l'enlève pas. Il n'était pas habitué aux contacts physiques, surtout avec des filles. Si James n'avait aucun problème à enlacer Alexia ou Lily (souvent contre son gré d'ailleurs) et donnait des accolades à tour de bras, lui était plus réservé.
- Remus ?
- Ouais ?
- Je ne t'ai même demandé, où est-ce qu'on va ? Pas chez madame Pieddodu hein ?
- Certainement pas, grimaça-t-il. Sirius m'a raconté qu'il y était allé une fois avec Tessie Ryan je crois. Il n'a plus voulu voir quoique ce soit de rose pendant un mois après ça ! Non, je pensais qu'on pourrait plutôt boire quelque chose au Dragon Vert. C'est un pub près de la poste et il y aura moins de monde qu'au Trois Balais. On y allait souvent en quatrième année Peter et moi quand James et Sirius passaient des heures chez Zonko et... pourquoi est-ce que tu ris ?
- Je ne ris pas, mentit-elle.
- Je t'assure que si, c'est comme que ça s'appelle quand ta bouche sourit en faisant du bruit en même temps.
Anaïs rit encore plus et se mit à balancer leurs mains jointes entre eux.
- Rien, c'est juste que je trouve ça drôle la façon dont tu parles de tes amis tout le temps. Tu ne t'en rends pas compte et c'est pas la première fois que je me fais la remarque mais tu as toujours une anecdote. « James a dit ça... », « Sirius a fait ça... » ou « un jour Peter s'est pris un mur en pleine face ».
- Oh...Désolé, je ne...
- Ne t'excuse pas ! S'empressa-t-elle de dire. C'est rare de voir une amitié comme la vôtre, c'est tout.
- Ce ne sont pas mes amis, ils sont un peu comme de la famille, corrigea-t-il pour qu'elle comprenne. Mrs Potter nous considère presque comme ses fils parfois, je te jure qu'une fois quand j'ai débarqué chez eux avec un rhume elle a été me préparer une potion revigorante et m'a emmitouflé dans un énorme pull en laine. Et pour l'histoire de Peter et du mur, ne t'avise pas de rigoler, il s'était pratiquement cassé le nez !
Evidemment, Anaïs rigola quand même. Il réalisa alors que non, elle n'était pas son double au féminin comme le répétait souvent ses amis. Même s'ils aimaient tous les deux lire, qu'ils étaient préfets et introverties parfois, elle était beaucoup plus joyeuse que lui. Elle n'avait pas de secret à cacher et si on lui en donnait l'occasion, sa timidité s'envolait.
Elle était rayonnante en vérité, réalisa-t-il. Après les horreurs de l'année dernière, ça faisait du bien de voir des personnes qui n'avaient pas conscience de la montée de la magie noire en dehors du château, qui étaient encore insouciantes. Il voyait ça aussi chez Lily avant. Les nés-moldus n'avaient pas grandi avec toute cette idéologie que Voldemort faisait planer depuis quelques années dans la communauté sorcière.
- Remus ? Est-ce que ce placard miaule ?
- Pardon ?
Anaïs s'était arrêté de marcher et fixait la porte d'un placard d'entretien.
- Tu n'entends pas ? Je te jure que j'ai entendu un miaulement ! Ne me regarde pas comme ça, je ne suis pas folle !
- Je n'ai jamais dit ça, assura-t-il.
Et puis brusquement, il l'entendit. Un drôle de bruit, comme un miaulement plaintif effectivement.
- Ouvre la porte, souffla Anaïs.
- Pourquoi moi ?
- T'es le garçon non ? C'est ton rôle d'affronter le danger avant moi !
- Au temps pour moi, je croyais que tu luttais contre les clichés de ce genre, se moqua-t-il, amusé.
- C'est vrai, mais je fais des exceptions pour les bruits bizarres dans les placards sombres.
Remus leva les yeux au ciel. Il se rappela de l'année dernière quand Alexia s'était enfermée dans un placard sans faire exprès. Au fond, si un pauvre chat était actuellement dans la même situation, il pouvait bien l'aider.
Il pointa sa baguette sur le vieux loquet en fer.
- Alohomora !
Le battant s'ouvrit en grinçant de façon sinistre... pour révéler un simple espace de stockage de matériel. Un ballet était posé contre le mur, sur une petite étagère s'étalait de multiples produits détergents et sous celle-ci se trouvait un saut renversé.
- Il n'y a rien ici...Ahhh !
Anaïs bondit et recula, heurtant Remus qui la saisit par la taille pour l'empêcher de tomber.
- Le saut a bougé, murmura-t-elle. Remus, le saut a bougé !
- Miaou !
- Je crois que c'est le chat qui a bougé, la rassura-t-il en riant.
Ils s'avancèrent à l'intérieur du placard après avoir bloqué la porte avec une bouteille de « Nettoie tout -comme par magie ! - de la Mère Grattesec ». Remus souleva le saut. Une tâche blanche manqua de lui filer entre les jambes mais Anaïs réagit plus vite que lui. Elle attrapa le chat qui se mit à se tortiller en miaulant.
- Oh ce qu'il est mignon !
- Il te faisait peur il y a dix secondes !
- Oui mais c'était avant de voir ses petites oreilles. Eh, salut mon grand, roucoula-t-elle en direction du chat.
Remus reposa le saut.
- C'est Chamallow, expliqua-t-il platement. Le chat de Marlène. Il s'échappe tout le temps du dortoir pour aller rôder un peu partout.
- Oh le pauvre, il s'est retrouvé enfermé ici tout seul. Il a dû avoir peur.
- Ce n'est qu'un chat.
Anaïs lui jeta un regard de désapprobation.
- Sois plus compatissant, Remus.
Elle caressa la tête de Chamallow qui ne paraissait toujours pas d'humeur. Il se débattit un peu plus et elle finit par le lâcher. A peine le chat eut il toucher le sol qu'il détala et manqua de tomber dans sa précipitation. Il heurta la bouteille de nettoie tout dans un feulement furieux.
- Anaïs ! La porte ! Tiens la...
La porte claqua.
- Et merde !
**
*
James se balançait sur sa chaise, fatigué. Il avait passé plus de temps à la bibliothèque en un week-end que durant les sept dernières années. En plus ses recherches n'étaient même pas pour lui mais pour Remus. On ne faisait pas pire comme inversion des rôles.
La première Epreuve était dans une semaine et Remus avait promis à Anaïs de l'emmener à Pré-au-Lard aujourd'hui, du coup James avait proposé de travailler pour lui sur la métamorphose. Mrs Pince passait devant sa table au moins trois fois toutes les dix minutes, suspicieuse, et ça ne l'étonnerait pas qu'elle ait déjà envoyé une lettre au département des Aurors pour les alerter de son attitude suspecte. James rigola intérieurement en imaginant son père débarquer pour lui demander de sortir de la bibliothèque.
- Vous avez terminé avec ce livre ?
Il releva la tête. Mrs Pince le toisait de derrière ses lunettes à monture écailles, les lèvres pincées.
- Euh...oui. Je vais aller le reposer. De toute façon je m'en vais.
Elle parut presque soulagée quand il rangea ses affaires et passa les portes pour s'en aller.
Dans la salle commune, il ne restait que les premières et les deuxièmes années qui ne pouvaient pas se rendre à Pré-au-Lard et plus étonnamment, Sirius aussi.
- Qu'est-ce que tu fais là ?
- Alex a décidé de faire une journée entre filles avec ses amies... donc je reste là à m'apitoyer sur la pluie qui ne veut pas s'arrêter et qui m'empêche de jouer au Quidditch.
James se laissa tomber sur le canapé à côté de Sirius. Il observa son visage et sourit.
- Tu n'as pratiquement plus aucun bouton bleu aujourd'hui, remarqua-t-il.
- Très drôle, marmonna-t-il. N'empêche que si j'attrape Rogue, ses cheveux gras seront le dernier de ses problèmes !
- Rogue ? Pourquoi Servilus ?
Sirius se redressa.
- Oh allez Cornedrue, réfléchis deux minutes ! Quel Serpentard pourrait me détester assez pour faire ça ?
- Euh... Tous ? Je veux dire, tu fais partie de l'équipe de Gryffondor et on a bien dû faire des blagues à toute leur maison une bonne dizaine de fois.
- Bon d'accord, concéda-t-il. Mais alors quel Serpentard pourrait me détester assez pour faire ça et être suffisamment doué en potion pour confectionner un philtre pareil ? Et qui a en plus la clé de la réserve que Slughorn lui a gentiment donné ?
James avoua qu'il marquait un point. Madame Pomfresh elle-même avait dit que cette potion ne se trouvait pas généralement dans le commerce et qu'elle nécessitait plusieurs ingrédients rares. Quant à Slughorn, il avait été tellement émerveillé par les talents de Rogue en potion qu'il l'autorisait à venir travailler en dehors des heures de cours pour préparer ses ASPIC.
- Il va le payer ! S'exclama James.
- James...
- Quoi ? Personne n'a le droit de s'en prendre aux Maraudeurs sans en subir les conséquences, surtout mon meilleur ami. Même si le bleu te va bien au teint, je le reconnais.
- Idiot !
Sirius lui donna un coup d'épaule. Malgré ça, il était touché. Il savait depuis le temps que James ne manquait jamais de monter au créneau quand l'un d'entre eux était « attaqué ». Leur petite guerre avec Mulciber et Avery avait commencé en première année quand ils s'étaient moqués de Peter et que James, avec ses lunettes et son air gringalet, s'était interposé héroïquement. Bon il avait fini à l'infirmerie avec l'arcade sourcilière ouverte mais l'intention était là.
- Patmol... Je crois que j'ai une idée pour te venger. Mais pour ça il faudrait que tu braves la pluie...
- C'est bon, j'ai compris. J'en suis. T'as besoin de quoi ?
James eu un rictus goguenard et attrapa un bout de parchemin et sa plume, puis se mit à faire une liste.
**
*
- Ça fait combien de temps ?
- Vingt minutes je dirais...répondit Remus.
Anaïs soupira.
- Au moins, notre premier rendez-vous est atypique.
- Oh oui magnifique, railla-t-il.
Ils retombèrent dans le silence, enfermés dans leur placard.
**
*
Trempé par la pluie, Sirius s'ébroua dans le hall pour essayer de sécher un peu ses cheveux. Le chemin jusqu'aux serres n'avait pas été simple, principalement à cause du sol boueux et aussi parce que le professeur Chourave s'occupait de ses plantes carnivores en chantonnant. Heureusement, James avait pris soin de lui passer la carte du Maraudeur avant de l'envoyer en mission. Il ne lui avait même pas expliqué son idée de blague/vengeance contre Rogue mais Sirius n'aurait pas aimé être à sa place au vu de ce qu'il avait récupéré dans la serre n°3. Il avait une assez bonne idée de ce que Servilus allait se prendre en pleine poire.
Alors qu'il jetait un bref coup d'œil sur la carte pour s'assurer que Rusard n'était pas dans les parages, il se figea une seconde, convaincu que ses yeux lui jouaient un tour. Mais non, c'était bien les noms de Remus Lupin et Anaïs Delan qui apparaissaient à quelques mètres dans un petit espace.
Sirius s'avança vers l'endroit indiqué par la carte, curieux. Tant pis pour la blague de James, il pouvait bien attendre.
- Remus ? Appela-t-il, arrivé devant un placard tout à fait banal.
- Sirius ? C'est toi ?
- Euh oui... Mais qu'est-ce que tu fais là-dedans ?
- On est coincé ! S'exclama une autre voix.
- Ah tiens Anaïs. Ça va vite entre vous non ? A peine un rendez-vous et déjà enfermé ensemble dans un placard ?
- Sirius !
- Non mais vraiment ! Vous êtes quand même enfermés dans un espace restreint juste tous les deux... dit-il d'un ton suggestif.
- Enlève ce sourire idiot de ton visage ! S'exclama Remus. Tout ça c'est de la faute de ce maudit chat.
- Ne l'accuse pas, répliqua Anaïs. Il était terrifié, enfermé tout seul !
- Oui et maintenant c'est nous qui sommes enfermés...
Sirius éclata de rire.
- Enfin tu prends conscience que Chamallow est une vraie plaie !
- J'ai jamais parlé de Chamallow.
- Pas besoin, y'a que lui qui peut être aussi bête pour s'enfermer dans un placard.
Il réalisa ce qu'il venait de dire et se corrigea :
- Enfin, je ne parle pas de vous hein...
- Bien sûr, rétorqua Remus. Mais je dirais quand même à Alexia que tu trouves idiots ceux qui s'enferment dans les placards, on verra ce qu'elle en pense !
- Tu n'oserais pas...
- Je le ferais si tu n'ouvres pas cette porte immédiatement !
- Mais vous me prenez pour qui dans cette école ? Un sauveur de placard ? Et puis je te trouve vraiment très peu reconnaissant envers tes amis qui ont fait des recherches de métamorphose pour toi toute la journée à la bibliothèque.
- C'est James qui a été à la bibliothèque !
- James ou moi, c'est la même chose au fond non ?
Dans son placard, Remus soupira. Cette conversation commençait sérieusement à être longue et il ne voulait qu'une chose : sortir d'ici. A côté de lui, Anaïs tapa contre la porte.
- Bon Black, ouvre-nous maintenant !
- Ah ah ah... Non je pense que je vais vous laisser encore un peu, histoire que vous puissiez... vous rapprocher. Faire connaissance en quelque sorte.
- Sirius, fais-nous sortir par Merlin !
- Tu comprends Lunard, James m'attend. Je vais lui donner ces plantes et je reviens vous délivrer après. Allez, à tout à l'heure !
- Black, je jure que je t'enlève deux cents points et que je te colle pour le reste du mois si tu n'ouvres pas cette porte !
Mais Sirius s'éloignait déjà en sifflotant.
- Remus ? Tu sais quoi, je retire ce que j'ai dit. Tes amis sont des emmerdeurs !
- Crois-moi, je sais...
**
*
C'était vraiment une chance quand les blagues et les cours se font échos à ce point, songea James. Slughorn leur avait donné un devoir à rendre pour demain, une potion simple à préparer pour s'entraîner pour les ASPIC et il fallait pour ça venir prendre les ingrédients dans la réserve réservé aux étudiants de septième d'année. James n'avait qu'à attendre que Rogue vienne chercher les siens pour déclencher sa blague.
Il était actuellement caché sous sa cape d'invisibilité au coin du couloir, guettant le moment où ce cher Servilus allait arriver. Alors certes, son plan avait des failles, comme le fait que Frank avait failli tout gâcher en venant à la réserve avant Rogue. James s'était jeté sur lui une seconde avant qu'il n'ouvre la porte. Il avait trouvé une excuse improbable, comme quoi Slughorn avait renversé une potion de sommeil dans la réserve et que personne ne devait entrer à l'intérieur avant qu'un professeur ne se soit occupé du problème. Frank n'avait pas eu l'air d'en croire un mot mais avait marmonné qu'il piquerait ses ingrédients à Alice avant de tourner les talons.
Heureusement, la prochaine personne qui arriva après Frank fut Rogue, ce qui facilitait grandement les choses.
James se plaqua contre le mur sous sa cape, observant Rogue s'approcher de la réserve. Il était seul, comme d'habitude, et son teint blafard paraissait encore plus cireux à la lueur des torches. Il posa la main sur la poignée et tira la porte. Soudain, une masse gluante et verte s'abattit sur lui, le couvrant de la tête au pied. Rogue poussa un cri. A l'aveugle, il chercha à s'éloigner de la réserve mais s'emmêla les pieds dans sa robe noire et tomba à terre tandis que James éclatait de rire. Oh il aurait dû prendre une photo.
- Qu'est-ce que...
- Bah alors Servilus, tu test un nouveau shampooing ?
- Potter ! Rugit-il.
Rogue se releva péniblement, toujours couvert de l'essence de Mimbulus Mimbletonia, une sorte de cactus étrange, que Sirius avait ramené des serres. Il était hors de lui et avait saisi sa baguette, le poing serré.
- Tu trouves ça amusant ?
- Oui beaucoup, effectivement. Si tu voyais ta tête en ce moment, tu serais amusé aussi !
James plongea la main dans sa poche pour attraper sa baguette en voyant Rogue écumé de rage, la mâchoire contractée.
- Toujours aussi arrogant, pas vrai ? Cracha-t-il. Où est ton public cette fois ?
- Je ne sais pas, je pensais que c'était toi qui aimait avoir des spectateurs, rétorqua James d'une voix à la fois goguenarde et glaciale. Après ton coup de la potion contre Sirius dans la Grande Salle, je veux dire...
- Ce n'était pas moi !
- Arrête, il n'y a que toi qui a accès à la réserve en permanence grâce à l'autorisation que Slughorn t'a donné.
- Jaloux que pour une fois tu ne sois pas le préféré d'un prof, Potter ? Lança Rogue, torve.
James plissa les yeux.
- Reconnais-le, c'était toi pour Sirius.
- Même si j'aurais adoré être l'auteur de ce petit coup qui a défiguré la précieuse figure de Black, non ce n'était pas moi. Tu devrais aller demander à ton amie Meadowes si elle sait quelque chose...
Cette phrase eu le mérite de laisser James perplexe.
- Dorcas ?
- Elle avait une clé de la réserve depuis ses travaux d'intérêt général à l'infirmerie l'année dernière qu'elle n'avait jamais rendu. J'ai entendu Mulciber en parler. Si tu lui demandes, elle te dira sûrement qu'on lui a volé il y a quelques jours... En plus, la préparation de cette potion est certes difficile mais pas impossible. Je ne suis pas le seul à savoir allumer un chaudron dans ce château !
James sentit un horrible sentiment lui serrer le ventre. Il connaissait cette clé. Dorcas la gardait au cas où, juste si elle en avait besoin un jour. Pourtant, elle n'avait jamais parlé d'un quelconque vol ou d'une disparition mais il devait avouer qu'il ne parlait pas souvent avec elle. Si Rogue disait vrai, alors le coupable était Mulciber. Mulciber qui avait toute les raisons d'en vouloir à Sirius à cause de leurs nombreuses blagues.
- C'est bon, ton cerveau commence à réfléchir ? Cingla Rogue.
- La ferme Servilus.
- Tu n'es qu'un crétin, Potter ! La prochaine fois que Black viendra se plaindre de l'injustice du monde, rappelez-vous que vous ne valez pas mieux que Mulciber !
- Je t'ai dit de la fermer, cria James.
Il se passa une main dans les cheveux, agité. Comme d'habitude, il avait foncé sans prendre la peine d'analyser la situation. Il ne savait même plus quoi penser sur la culpabilité de Rogue. La colère de ce dernier semblait grandir à mesure que les minutes s'écoulaient et il faisait tourner sa baguette entre ses doigts, se retenant visiblement à grande peine de lui jeter un sort à la figure. Cependant, aucun des deux n'eurent le temps ne serait-ce que de lever leur baguette car à ce moment précis, McGonagall tourna à l'angle.
James su immédiatement qu'elle n'était pas là par hasard. Son visage reflétait déjà son humeur massacrante et ses yeux lancèrent des éclairs quand elle engloba la scène du regard, avec Rogue couvert d'une substance visqueuse.
- Dans mon bureau, ordonna-t-elle sèchement. Tout de suite !
Chapitre VII : Première Epreuve
- Attends répètes... Qu'est-ce qui s'est passé exactement ?
Sirius soupira.
- On pensait que Rogue était derrière la blague qu'on m'avait faite, le coup de la potion aux boutons bleus. James a voulu lui rendre la mornille de sa pièce... Sauf que McGo a été prévenu par un des fantômes et a débarqué, furieuse. Elle les a emmenés dans son bureau, ils y sont encore.
- C'était grave ? Demanda Alexia. La blague de James je veux dire ?
- Non... Juste un saut d'essence de Mimbulus Mimbletonia et...
- Un saut de quoi ? S'exclama Lily. Il n'a pas osé ?
Elle avait fait un énorme effort pour rester silencieuse jusque-là seulement son masque neutre se fissurait. Marlène lui posa une main sur l'épaule mais elle se dégagea.
- Ce n'est pas le moment, Evans, claqua Sirius. On n'a pas besoin de ton discours moralisateur pour l'instant...
Lily serra les dents. Ce n'était pas nouveau. James aurait bien pu tuer quelqu'un et Sirius aurait quand même pris sa défense sans se poser de question, tout simplement parce que c'est comme ça que les deux fonctionnaient. Elle soupçonnait aussi que Sirius ressentait une sorte de dette envers James ; d'abord après qu'il lui ait pardonné en cinquième année suite à la dispute qui avait déchiré les Maraudeurs pendant plusieurs semaines et dont personne n'avait jamais connu la cause, même si elle plus ou moins deviné que ça avait quelque chose à voir avec Remus ; et ensuite parce qu'il l'avait accueilli chez lui après sa fugue. Et pour encore des tonnes de raisons, des choses qui allaient bien au-delà de sa compréhension, le lien entre James et Sirius était indescriptible. Or, si ce lien justement la touchait d'habitude, il eut le don de l'énerver dans le cas présent.
Etait-ce elle qui avait un problème ? Tout son cercle d'ami s'inquiétait pour James, pour Potter et son idiote de blague qui pouvait lui coûter chère cette année en tant que préfet, capitaine de l'équipe et membre de l'équipe de Gryffondor. Mais elle, elle pensait à Severus. Elle l'imaginait se prendre l'essence verdâtre de la plante, son visage pâle de fureur et ses yeux noirs...ses yeux noirs si profonds qu'ils lui faisaient presque peur parfois. Parce que Severus n'était pas quelqu'un de mauvais, elle le savait au fond de son cœur. Malgré tout, elle l'avait vu changer un peu plus chaque année à Poudlard à mesure que les blagues et les quolibets s'accumulaient, s'ajoutant en plus aux cris de ses parents pendant les vacances. Et Merlin ça la mettait hors d'elle. Les autres ne voyaient-ils pas ? Ne voyaient-ils pas que leurs plaisanteries qui faisaient rire les autres étaient injustes et faisaient plus de mal qu'autre chose ? Lily n'avait pas été assez forte pour lutter contre la rancœur de Severus mais parfois, une petite voix dans son esprit lui soufflait qu'il ne serait peut-être pas devenu ce qu'il était aujourd'hui si les autres lui avaient tendu la main au lieu de se moquer de son physique ou de ces habits étranges.
Son trouble dû se lire sur son visage car Remus interrompit Sirius quand il voulut reprendre le récit de la blague.
- Patmol, arrête, murmura-t-il. Je pense qu'on a tous compris...
- Mais...
Le regard de Sirius se posa sur Lily et il se tut en la voyant proche des larmes.
- Evans, c'était une simple farce...Je suis désolé...
- Tu n'as pas apprécié que quelqu'un glisse cette potion dans ton verre, pas vrai ? Tu t'es senti ridiculisé devant toute l'école hein ? Alors pourquoi est-ce que vous vous acharnez à faire la même chose aux autres ?
- Ce n'est pas nous qui avons...
- Commencé ? Compléta-t-elle. Mais tu ne vois pas que c'est un cercle sans fin, Sirius ? Aucun de vous ni les Serpentard ne voudront arrêter parce que vous êtes tous trop arrogants pour vous rendre compte que le camp le plus courageux serait celui qui abandonnerait, qui aurait la maturité de cesser les frais ? Severus a peut-être versé cette potion dans ton verre mais ça ne donnait aucun droit à James de se venger lui-même. C'est ça la différence entre justice et vengeance !
Les autres restèrent silencieux. Lily sentait qu'ils la dévisageaient tous et que Marlène se retenait véritablement de la prendre dans ses bras. Même si cette intention la touchait, elle savait qu'elle enverrait balader la première personne qui lui demanderait de se calmer. Dorcas parut le comprendre car elle ouvrit la bouche, l'air farouche, mais son expression céda la place à la surprise une seconde plus tard.
- James !
Ils firent volte-face.
James descendait l'escalier principal, les mains enfoncées dans les poches et les yeux braqués sur le sol. Il s'approcha d'eux, sans rencontrer leur regard. Derrière lui, Severus arriva aussi. Il se contenta de jeter une œillade assassine au groupe de Gryffondor rassemblé dans le hall puis continua son chemin vers la salle commune de sa maison en prenant la direction des cachots.
- Eh Cornedrue...ça va ?
- Ça ira mieux plus tard, se contenta-t-il de répondre.
Il avait l'air agité et se tourna vers les Maraudeurs.
- On peut se retrouver pour en parler au dortoir ? S'il vous plait ?
- Bien sûr, accepta Remus. On est là.
- Je t'ai pris de la tarte au citron comme tu as loupé le repas, dit Peter.
James eu un semblant de sourire.
- Merci les gars.
- Potter ? Je peux te dire un mot avant que tu remontes ?
James déglutit. L'expression de Lily était indéchiffrable mais il savait qu'il venait de faire voler en éclat le peu de maturité qu'il avait acquis à ses yeux depuis la rentrée.
Sans un mot, il hocha la tête et ils s'éloignèrent de leurs amis. Il y eut un moment de flottement, comme si aucun des deux ne savaient s'il devait commencer ou laisser l'autre parler puis Lily craqua.
- Alors ? Qu'est-ce que McGonagall a dit ?
- Oh comme d'habitude...beaucoup de cris, de déception pour l'image de la maison etc... Elle a coché toutes les cases de son discours de remontrance ! Je suis collé pendant trois semaines chaque mardi soir. Rogue s'en sort sans rien.
- Quoi ? Mais...la potion contre Sirius... ?
- C'était pas lui, marmonna James d'une voix sourde.
Lily se figea.
- Comment ça ?
- C'était Mulciber, pas Rogue. Je me suis trompé, d'accord ? J'imagine que tu es heureuse, ton précieux Servilus est un ange dans l'histoire au final...
- Si tu penses que ça me fait plaisir que Severus se soit fait humilié une fois de plus ou et que tu sois collé, tu te trompes encore, répliqua-t-elle. Bon sang Potter, ça t'arrive de réfléchir ?
- Je me suis excusé...
- Tu crois vraiment que ça suffit ?
- Ecoute Evans, je me sens suffisamment mal comme ça tout seul, je n'ai pas besoin de ton aide. De toute façon, avec lui, c'est toujours de ma faute pas vrai ?
- Non je...
Mais il ne la laissa pas finir et s'énerva d'un coup, épuisé de cette dispute qui revenait sans arrêt entre eux depuis plus d'un an.
- Bien sûr que si ! Tu persistes à me détester quand Rogue entre dans le tableau parce que ça te donne l'impression que rien n'a changé entre vous, que vous êtes toujours amis. Mais on n'a plus onze ans Evans ! Je ne suis plus comme ça et lui aussi a changé, tu le sais. Tu continus à te voiler la face parce que tu as peur du changement, tu ne veux pas reconnaître que tout est plus compliqué entre nous trois qu'avant.
- Il était mon meilleur ami, James, je...
James ne releva même pas qu'elle l'avait appelé par son prénom, trop occupé à vider son cœur, à vider ce qui lui pesait sur la conscience depuis la réalisation que Rogue était innocent dans l'affaire.
- Il t'a trahi ! Il pratique la magie noire et bientôt il ne vaudra pas mieux que Rosier ! Ne fais pas semblant d'ignorer ce qui se passe pour eux quand ils sortent de Poudlard, tu as lu la Gazette comme moi !
- Mets-toi à ma place ! Cria-t-elle brusquement. Mets-toi à ma place une seconde, James. Imagine ce que tu ressentirais si un de tes amis te trahissaient, si Sirius changeait du jour au lendemain et que tu ne pouvais rien faire à part le regarder se détruire lui-même ? Qu'est-ce que tu ferais, James ? Je te connais assez pour dire que tu ne l'abandonnerais pas...
- Sauf qu'aucun de mes amis ne me trahira... Jamais. Surtout Sirius. Première règle d'or des Maraudeurs !
La conviction qui perça dans sa voix fit sourire Lily. Elle aimait ce côté de lui, celui qui était persuadé qu'il ne pouvait pas arriver de mauvaises choses aux bonnes personnes, celui qui était persuadé qu'il était intouchable entouré de ses amis.
Elle savait qu'il avait eu tort sur ce coup avec Severus mais pour la première fois depuis des années, il en avait conscience. C'était quelque chose de rare pour lui dans sa lutte anti-Serpentard. Mais elle était persuadée qu'il ne feignait pas de regretter ni d'être bouleverser parce ce qui était arrivé aujourd'hui et qu'il s'en voulait réellement d'avoir attaqué Severus alors que celui-ci n'avait rien fait.
James parut se rendre compte que sa colère était légèrement retombée et il s'ébouriffa les cheveux avant de lui faire un petit sourire penaud.
- Tu m'en veux... ?
- Non... Peut-être... Je ne sais pas...
- Je te trouble, pas vrai ?
Il papillonna des yeux en faisant la moue. Lily éclata de rire.
- T'es un idiot Potter !
- Je croyais que c'était James maintenant ?
- Même pas en rêve !
- Je t'assure que tu m'as appelé James.
- Non.
- Si.
- Non.
- Si.
- On va pas se lancer là-dedans ?
- Tu sais que je pourrais tenir plus longtemps que toi c'est tout !
Lily lui donna un coup à l'épaule.
De l'autre côté du hall, Alexia lança assez fort pour qu'ils entendent :
- Ils se battent ou ils rigolent ? Je suis perdue !
- Bon allez les enfants il est tard, le couvre-feu est dans dix minutes et ça m'embêterait de vous coller, dit Remus. Vous venez ?
James et Lily échangèrent un dernier regard, amusés, puis rejoignirent les autres pour remonter à la tour de Gryffondor. Finalement, leur nouvelle relation étrange de pseudo amitié n'était peut-être pas si ébranlée qu'il n'y paraissait.
**
*
Une semaine plus tard, la blague de James contre Rogue avait fait le tour du château et la tension entre les maisons était à son comble, surtout que la première Epreuve avait lieu aujourd'hui. Pourtant, personne n'avait plus d'information. Aucune heure ou aucun lieu n'avait été communiqué par les professeurs pour l'Epreuve et les élèves étaient un peu perplexes. Quand James avait été posé la question au professeur McGonagall, elle s'était contenté de lui donner une réponse vague en lui disant qu'il saurait tout au moment voulu et qu'il ne fallait pas s'inquiéter. Remus n'en menait pas large depuis ce matin, se demandant quand est-ce que l'Epreuve commencerait et il n'avala pratiquement rien au petit déjeuner. Au moins, la pleine lune ne tombait pas avant une dizaine de jour, ce qui faisait qu'il était en forme. Il soupçonnait les professeurs et Dumbledore d'avoir adapté la date de l'Epreuve de métamorphose au calendrier lunaire juste pour lui.
- Remus attends-moi !
Surpris, Remus se retourna pour voir James courir dans sa direction. Il portait encore son uniforme de Quidditch et devait revenir du terrain. Toute l'équipe avait protesté quand leur capitaine avait décidé de leur imposer un entraînement le jour de la première Epreuve mais Remus savait que c'était pour calmer les nerfs de tout le monde. En fait, James était plus stressé que Remus lui-même.
- Salut Cornedrue...alors cet entraînement ?
- Ça a été... On a passé deux heures à plus se faire des passes que de la stratégie. Mary n'est pas venue.
- Pourquoi ?
- Aucune idée ! Elle ne m'a même pas prévenu...
- Elle a peut-être eu un empêchement ?
- Sans doute, marmonna James.
- Où est Sirius ? Il n'est pas revenu avec toi ?
James secoua la tête.
- On a croisé Alexia, j'ai préféré les laisser tous les deux. Et toi ? Où est Peter ?
- Déjà dans la Grande Salle.
James remonta ses lunettes sur son nez, un geste qu'il faisait quand il était nerveux. Avant même qu'il ouvre la bouche, Remus savait de quoi il allait lui parler.
- Tu te sens prêt ? Demanda-t-il avec une nonchalance apparente. Pour la métamorphose je veux dire...
- Je pense que oui.
- Et t'as lu les bouquins que j'avais trouvé à la bibliothèque ?
- James, arrête de t'inquiéter. Ça va bien se passer !
- Je ne suis pas...
- Bien sûr que si. Tu prends ce Tournoi trop au sérieux, calme-toi, je suis prêt et Gryffondor va tous les battre à plat de couture.
James rit, l'air un peu plus rassuré.
Alors qu'ils traversaient le Grand Hall et passaient devant les sabliers, ils virent Mary McDonald arrivée par leur gauche. Elle ne semblait absolument pas perturbée ni malade et James se figea.
- Mary ! Appela-t-il. Par Merlin, où est-ce que tu étais ce matin ?
- Ce matin ? Répéta-t-elle, perplexe.
- Oh tu sais, Quidditch, entraînement, futur match... énuméra James, sarcastique. On t'a attendu pendant une heure !
Elle cligna des yeux et blêmit.
- J'avais complètement oublié de te prévenir ! McGonagall m'a convoqué ce matin, je suis désolé ! T'avais programmé l'entraînement à la dernière minute et ça m'est sorti de la tête... Je suis désolé, James !
La pauvre avait l'air si catastrophé que James se contenta d'hausser les épaules. Ce n'était pas si grave au fond mais il devait avouer qu'il s'était inquiété pour elle toute la matinée. Mary avait déjà eu des ennuis avec les Serpentard, surtout Mulciber, et il avait passé l'entraînement à imaginer le pire. Même si les agressions de l'année dernière était terminée, les évènements de Pré-au-Lard le hantait encore.
Ils entrèrent tous les trois dans la Grande Salle puis se dirigèrent vers la table de Gryffondor pour rejoindre Peter. Quelques minutes plus tard, les filles et Sirius arrivèrent. Très vite, la conversation porta sur le sujet que tout le monde avait sur les lèvres : l'Epreuve.
- Vous pensez que ça sera quoi ? Dit Marlène. Juste devoir métamorphoser quelque chose ?
- Non, ça serait trop simple. Si c'est juste pour leur demander de transformer un hérisson en pelote d'épingle, on a déjà les ASPIC pour ça.
- Ils devront peut-être se métamorphoser eux-mêmes, suggéra Peter.
- Quoi ? Comme des animagi ? Dit Alice.
- C'est impossible, intervint Lily. Il faut être déclaré pour être animagi et c'est une magie trop difficile pour des étudiants. Ils auraient besoin de mois, voire des années de préparation.
Les Maraudeurs échangèrent un regard, retenant un sourire, néanmoins Remus préféra détourner l'attention sur un sujet moins glissant.
- De toute façon, je ne peux pas échouer à cette Epreuve, pas avec un coach comme James. Il peut être tyrannique quand il le veut !
- C'est faux ! Protesta-t-il.
- Tu m'as obligé à réciter une cinquantaine de sortilège plus ou moins lié à la métamorphose...
- C'est pour ton bien...
- ...à l'endroit et à l'envers !
Lily éclata de rire avec les autres.
Brusquement pourtant son rire s'étrangla dans sa gorge tandis que son regard tombait sur la table des Serpentard juste en face. Elle dû être la première à remarquer que quelque chose clochait et que les élèves commençaient à s'agiter. Vers la droite de la table, Severus était là une seconde puis la suivante il était...il était...
- Severus... Severus est un serpent... murmura-t-elle, choquée.
James haussa un sourcil, moqueur. Clairement, personne n'avait compris ce qu'elle venait de dire.
- Ravi que tu ais enfin compris la vraie nature de Rogue, Evans, mais c'est une façon étrange de l'annoncer tu ne crois pas ?
- Non...je veux dire, il est un serpent ! Vraiment !
- Lily ? Tu te sens bien ? S'inquiéta Dorcas.
Mais Lily doutait elle-même de sa santé mentale.
A ce moment, une des jumelles Zabini poussa un cri. Toutes les têtes se tournèrent en direction des Serpentard et vers le serpent qui avait été Severus une minute auparavant.
- Alors ça c'est grandiose, lança Sirius.
- Potter, si c'est encore une de tes blagues idiotes...
- Ce n'est pas moi ! S'exclama James. Je te jure qu'on n'a rien à voir avec ça !
Puis tout se passa en même temps. A côté d'eux, Mary se mit à tousser, pâle, et se transforma soudainement en...griffon. Marlène sursauta. Un peu plus loin, un aigle s'envola au plafond en poussant un cri strident et il y eu un mouvement de panique à la table de Poufsouffle quand un blaireau se mit à courir sous le banc sur lequel était assis les élèves.
Lily ne savait plus où donner de la tête tellement la situation lui paraissait surréaliste. Les quatre animaux étaient en train de se balader dans la Grande Salle sous leurs yeux et aucun professeur n'avait l'air de trouver ça étrange.
- Est-ce que...est-ce que se sont tous des élèves ? Balbutia Peter.
- Je crois bien... Mary, Rogue, Tiberius...
- Et Bertha Jorkins, compléta Sirius, sidéré. Je l'ai vu se transformer en blaireau. Merlin, c'est pas une phrase que je dis tous les jours...
- « Chaque champion reflète l'image de sa maison », cita Remus.
- Quoi ?
- C'est ce que Dumbledore avait écrit sur son parchemin en-dessous de l'annonce de la première épreuve. Ce sont tous des membres des équipes qui ont été transformé en l'animal de leur maison ! C'était un indice depuis le départ !
Ses amis le fixèrent, étonnés qu'il puisse penser à cela aussi vite avec le chaos qui les entourait. Finalement, Dumbledore se décida à se lever. Il écarta les bras comme pour englober la scène, l'œil malicieux. Il n'y aucun doute qu'il trouvait tout ça très divertissant.
- Je pense que vous l'aurez tous compris, commença-t-il, la première épreuve du Tournoi de Poudlard vient de débuter. Les quatre champions de chaque équipe en métamorphose ont une tâche à accomplir : re-transformer leur camarade victime d'un sortilège contre leur gré. Attention ! Ils ne peuvent recevoir l'aide d'autres élèves de leur maison et ne sont autorisés qu'à se servir de leur baguette. Il n'y aucune limite de temps. Les points seront accordés selon la rapidité de chacun. Bonne chance !
Et il se rassit, tout simplement.
Les élèves se rassemblèrent presque aussitôt contre les murs pour pouvoir mieux observer l'épreuve tandis que Remus, Livia, Sabine Travers et un Serdaigle que James ne connaissait pas restaient au centre, leur baguette à la main. Ils avaient l'air perdu et se tenaient à une distance prudente de leur animal, pas certains de la marche à suivre.
- Si j'avais su que ça serait ça l'épreuve, je n'aurais pas passé des heures à la bibliothèque...marmonna James.
- Tu serais plutôt aller acheter des croquettes pour griffon ? Plaisanta Sirius.
- Je comprends mieux pourquoi Mary n'était pas là ce matin. McGo a dû lui faire boire une potion ou lui jeter un sort pour qu'elle se transforme plus tard.
- Si on arrive à connaître la méthode, imagine les blagues qu'on pourrait faire !
James sourit avant de refocaliser son attention sur Remus. Il se tenait face au griffon/Mary et essayait de s'en approcher pas à pas mais l'animal prenait peur à chaque fois. A ses côtés, le garçon de Serdaigle se contentait de garder les yeux rivés au plafond sur l'aigle qui tournoyait sans avoir l'air d'avoir envie de se poser ou de se laisser attraper.
- C'est un cirque, murmura Lily.
Intérieurement, Remus pensait la même chose. Il connaissait des contre-sorts à ce genre de métamorphose mais la taille du griffon rendait la transformation compliquée. Il fallait aussi être sûr de bien viser sinon on allait vite avoir tout le mobilier de la Grande Salle qui prendrait forme humaine...
- Mary, eh, allez approche, babilla-t-il comme s'il parlait à un bébé ou à un chaton. Oui tu es un magnifique griffon... allez...
- J'ai déjà essayé de faire ça à Chamallow une fois, commenta Sirius. Et je me suis fait griffer !
- En même temps je préfère affronter dix griffons que Chamallow, dit Peter.
- Vous allez vous taire ! Leur cria Remus. Je suis un peu occupé là !
Les trois garçons se turent immédiatement, amusés.
Livia Fawlay était quant à elle en train de ramper littéralement sous une table pour tenter d'avoir le serpent/Rogue dans son champ de vision et on pouvait l'entendre jurer à voix haute dès qu'elle se cognait la tête contre le bois.
Sabine Travers n'osait même pas s'approcher du blaireau qui montrait les dents.
- Tu trouves pas qu'il a le même air que Bertha quand elle cherche des ragots ? Souffla James.
- Ah si, approuva Sirius. Elle plisse le nez exactement comme ça. Et puis elle grogne un peu aussi...
- Je l'ai !
L'exclamation de Livia fit tourner toutes les têtes vers elle. Elle venait de réussir à coincer le serpent dans une alcôve et agita sa baguette avant qu'il ne puisse s'échapper à nouveau. Une seconde plus tard, Rogue était sur ses pieds.
- Remus ! Hurla James. Dépêche un peu ! Hors de question de perdre à cause d'un griffon alors que ça fait sept ans que tu t'entraînes avec Chamallow !
- Je t'en prie, viens prendre ma place si tu penses y arriver mieux que moi, répliqua-t-il.
Lily retint James par le bras alors qu'il avançait d'un pas. Dumbledore avait bien spécifié qu'aucune aide de la part de sa propre maison n'était autorisée.
Cependant, le succès de Livia semblait avoir motivé les autres. Le Serdaigle tentait maintenant de stupéfixier son aigle pour le faire redescendre et Sabine avait consenti à avancer d'un mètre près du blaireau.
A force de cajolerie, Remus réussi à apaiser le griffon. Il serra sa baguette entre ses doigts, espérant de tout cœur ne pas se tromper de sortilège, et jeta le contre-sort. Pendant un horrible instant, rien ne se passa. Puis brusquement Mary se tenait juste en face de lui. Elle ouvrit la bouche plusieurs fois, l'air choqué, avant d'éclater de rire.
Dans le public, les Gryffondor se joignirent à elle. Ils n'étaient pas arrivés premier, certes, mais ce n'était pas catastrophique non plus.
- Tout ça c'est grâce à mon super entraînement, affirma James à qui voulait bien l'entendre.
Chapitre VIII : Le papier de la Gazette
- Tu es sûr que ça va Remus ?
Le jeune homme se frotta les yeux, appuyé contre le mur. Il était pâle mais adressa tout de même un sourire rassurant à Lily.
- Ne t'inquiète pas, ça ira pour aujourd'hui, dit-il avant de chuchoter pour que Mary, un peu plus loin, ne l'entende pas, la pleine lune ne tombe que dans trois jours.
- Si tu te sens trop mal je peux te trouver une excuse...
- Non, non ! Je peux tenir la journée, en plus McGo a bien dit qu'on ne pouvait pas échapper à cette maudite interview alors...
Lily haussa les épaules. Intérieurement, elle était d'accord avec Remus. Elle ne voyait pas en quoi leur Tournoi entre les maisons pouvait intéresser la Gazette. Elle aurait préféré aller réviser à la bibliothèque plutôt que de perdre son temps.
- McGo a aussi précisé qu'on serait collé si on loupait l'entretien, intervint Mary en s'approchant.
- Et c'est pour ça que James a intérêt à arriver fissa, grommela Sirius.
Il était en train de se tordre le cou pour tenter d'apercevoir le bout du couloir et guettait l'arrivée de James qui n'avait pas l'air pressé de ramener sa tête d'imbécile.
A l'intérieur de la salle dans laquelle la Gazette avait élu domicile pour la journée, on entendait déjà les Serdaigle qui n'allaient pas tarder à sortir.
- Si McGo apprend qu'il était en retard il va avoir des ennuis, s'inquiéta Lily. Après sa blague avec Severus, il ne peut pas se permettre d'autres problèmes.
Sirius s'agita nerveusement.
- Tu es sûr de l'avoir bien réveillé ce matin ?
- Je l'ai secoué trois fois, dit Remus, et j'ai même ensorceler son oreiller pour qu'il lui donne des coups s'il ne se levait pas !
- Tu sais bien que James pourrait dormir même pendant le Blitz, rétorqua Sirius. Mais qu'est-ce qu'il fabrique... ?
Brusquement, la porte de la salle s'ouvrit et Mary, adossée contre elle, manqua de basculer. Tiberius Ackerley la rattrapa et fut le premier à sortir. Vu son visage, Lily devina que l'interview de leur équipe avait dû être étrange. Son intuition se confirma quand les Serdaigle marmonnèrent un vague « au revoir » avant de presque partir en courant.
- A qui le tour ? Demanda une voix grave. Gryffondor ? Faites-les entrer !
Lily jeta un dernier coup d'œil au couloir avant de rentrer mais toujours aucune trace de James. Résignée, elle se décida à suivre les autres.
La journaliste qui les accueillit devait avoir une cinquantaine d'année et tentait de tenir une pile précaire de parchemin entre ses bras, sa plume à papotte bleu volant dans son dos. Cinq chaises faisaient face à un bureau, entourés par de grands éclairages aveuglants et un assistant gringalet restait planté à côté d'une cafetière. Son seul rôle semblait se résumer à garder le café ou le thé chaud pour son patron.
- Bonjour à tous, je m'appelle Théodore Scriptor, journaliste de la Gazette du Sorcier. Vous êtes les Gryffondor c'est ça ?
- Oui monsieur, répondit Lily.
- Bien... Asseyez-vous, asseyez-vous... Hum, vous n'étiez pas censé être cinq ?
Ils échangèrent un regard éloquent.
- Euh... Notre ami est en retard, il ne va tarder.
Le journaliste grommela contre ces « gamins qui ne pouvaient pas être ponctuels » puis attrapa un bout de papier d'un calepin sur sa pile de dossier.
- Je vais devoir en informer le professeur McGonagall, dit-il. Son nom ?
- Sirius Black, lança Sirius sans réfléchir.
- Merci.
Remus haussa un sourcil et se tourna vers Sirius pour lui faire les gros yeux. Il ne comprit le plan de son ami qu'une minute plus tard quand ils donnèrent chacun leur nom et que Sirius se présenta comme James Potter. Magnifique, pensa-t-il. Si l'idée était bonne, elle allait très vite avoir des limites quand James arriverait vraiment, même s'il n'avait pas l'air pressé.
- Bien, tant pis pour le cinquième, on a des horaires à respecter. Commençons ! Donc Gryffondor, après la première épreuve, se retrouve à la deuxième place derrière Serpentard avec 300 points. Quelles sont vos réactions ?
- C'est grâce à Remus, répondit aussitôt Lily, souriante. Il a été formidable !
- Je...Non, je n'ai pas...
- Bien sûr que si Remus, sans toi je serais resté un griffon pour le reste de ma vie. Tu as été super...moins rapide que cette peste de Serpentard mais super quand même !
Le commentaire de Mary lui arracha un sourire. Il ne s'était pas encore habitué aux félicitations que les élèves lui adressaient en passant dans les couloirs ou à l'enthousiasme des Gryffondor après sa pseudo victoire à son Epreuve.
Théodore Scriptor ne parut toutefois pas remarquer son trouble et se contenta de griffonner leur réponse sur son calepin, l'air de s'ennuyer ferme.
- Apparemment, on va commencer par Remus donc. Remus Lupin c'est ça ?
- Oui...
- Pourquoi avoir choisis la métamorphose ?
- Je ne sais pas, c'est une matière qui m'intéresse...
- Je m'en doute bien mais pourquoi ? Pourquoi la métamorphose plutôt qu'une autre ? Tu as des prédispositions dans l'art de la transformation ?
Remus entendit Sirius tousser pour dissimuler un rire et il donna un coup de pied dans sa chaise pour le faire taire.
- Pas plus que quelqu'un d'autre, répondit-il d'une voix neutre.
- Ne fais pas le modeste, protesta Mary. Tu es le premier de votre classe !
- James aussi.
- Vraiment ? Releva Théodore. Pourquoi n'as-tu pas pris la métamorphose dans ce cas, James ?
Remus redonna un coup dans la chaise de Sirius. Son ami cligna des yeux, réalisant que c'était à lui qu'on s'adressait. Mécaniquement, sans en avoir conscience, il se passa une main dans les cheveux comme l'aurait fait James, et Remus secoua la tête.
- Euh...parce que je préférais la Défense contre les forces du mal tout simplement...
- Je croyais tu participais à l'épreuve de vol ? S'étonna le journaliste.
- Ah oui c'est vrai... Je préférais le vol, c'est ce que je voulais dire !
Lily se retint de glisser au sol, désespérée. On avait vu mieux comme jeu d'acteur.
- Remus, revenons à toi, continua Théodore Scriptor sans chercher plus loin. Nous parlions de ton talent pour la métamorphose. Est-ce que tu dirais que les professeurs ont fait un bon choix en transformant un autre membre de l'équipe en animal ? Trouvais-tu l'épreuve intéressante ?
- Oui...
Il se rendait bien compte que ses réponses monosyllabiques agaçaient le reporter mais se livrer sur soi-même, donner son opinion à un journal national à vrai dire, le mettait mal à l'aise. Sirius parut deviner que ça n'allait pas, comme il le faisait toujours, et il vola à son secours.
- Excusez-moi, est-ce qu'on pourrait parler de quelque chose de vraiment important ?
- Je vous demande pardon ?
- Je veux dire, il y a une pénurie de tarte au citron depuis une semaine à Poudlard et la Gazette persiste à ignorer ce fait !
Théodore Scriptor haussa un sourcil.
- Monsieur Potter, je ne sais pas si...
- Enfin rendez-vous compte ! Plus de tarte au citron, insista-t-il comme si son interlocuteur était décidément très lent et ne réalisait pas la gravité de la situation.
- Quel rapport avec le Tournoi ?
- Quel rapport ? Quel rapport ? Mais vous croyez qu'on peut se préparer mentalement et physiquement dans de bonnes conditions sans tartes au citron ?
Remus se mordit la lèvre pour éviter d'éclater de rire. Il avait l'impression d'entendre une des envolées lyriques de James quand il était en forme le matin au petit déjeuner. Il savait qu'il n'y avait que Sirius pour l'imiter aussi bien, tout simplement parce que c'était lui qui l'encourageait à chaque fois.
Désemparé, le journaliste leur jeta à tous un regard perdu, cherchant un quelconque soutien mais Remus, Lily et Mary se contentèrent d'avoir l'air sérieux.
- Il a raison, approuva Lily en rentrant dans le jeu.
- Merci Evans ! Je savais que je pouvais compter sur toi... On sort ensemble ?
Cette fois Remus laissa échapper un rire qu'il tenta de dissimuler en quinte de toux. C'était tellement James de demander à Lily de sortir avec lui à tout bout de champ.
- Tiens, mettez ça dans votre article, dit Sirius sans laisser le temps à la jeune fille de répondre. Je suis fou amoureux de Lily Evans, il faut que le monde le sache !
- Merlin, marmonna Lily, rouge d'embarras.
C'est ce moment-là que choisit James pour enfin arriver. Ils se tournèrent tous en direction de la porte qui venait de s'ouvrir, révélant un James essoufflé aux lunettes de travers.
- Désolé d'être en retard, commença-t-il, j'étais bloqué dans les escaliers au deuxième étage. Les marches ne voulaient pas tourner dans le bon sens !
- Entrez monsieur Black, entrez.
Alors que James allait refermer la porte derrière lui, il s'arrêta, perplexe.
- Euh... Je ne suis pas...
- Sirius ! Tu te tais et tu viens t'installer, t'es déjà en retard je te ferais dire ! S'exclama Sirius. McGonagall le saura.
Il appuya sa remarque d'un regard éloquent. Remus vit une étincelle de compréhension passer sur le visage de James et comme d'habitude, la capacité qu'avait ces deux amis à communiquer une idée en une fraction de seconde juste à demi-mot ou avec un regard le fascinait.
Sans attendre, James se laissa tomber sur une chaise et se tourna vers Sirius.
- Alors ? Qu'est-ce que j'ai manqué ?
- On parlait de mon amour infini pour Evans.
James manqua de s'étrangler.
- Quoi ?
- Oui, tu sais James Potter et Lily Evans, les âmes sœurs de Poudlard etc... J'en parle tout le temps et je me suis dit que les lecteurs de la Gazette avait le droit de savoir.
Il ponctua sa phrase d'un sourire moqueur tandis que James le fusillait du regard, surtout quand Sirius se passa à nouveau une main dans les cheveux, cette fois clairement pour le parodier. A côté de lui, Mary pouffa.
Evidemment, James étant James, il releva le défi en un quart de seconde et s'adressa au journaliste.
- Je ne me suis pas présenté, dit-il sur ton d'excuse feint. Sirius Orion Black, enchanté. Désolé pour mon retard, mon chien a mangé mon devoir.
- Votre chien ?
- Oui, c'est pour ça que j'ai toujours préféré les chats franchement...
Sirius se retenait visiblement à grande peine de se lever pour faire taire James. Trop déboussolé le journaliste ne releva même pas qu'il était impossible d'avoir un chien à l'école, ni que James avait dit il y a à peine quelques secondes qu'il s'était retrouvé coincé dans les escaliers.
- Ravi de le savoir...je suppose, dit Scriptor lentement. Donc vous avez tous été choisis par vos camarades pour représenter votre maison. A votre avis, pourquoi vous spécifiquement ? En quoi êtes-vous qualifiés pour gagner les épreuves ?
- On est la meilleure maison ? Proposa James, goguenard.
- On est plus intelligents que les autres ? Embraya Sirius. Surtout les Serpentard.
- Ils plaisantent hein, précisa Remus.
Scriptor les dévisagea.
- Je parlais de vous par rapport aux autres Gryffondor, pas en général. Qu'est-ce qui fait que vos camarades vous ont choisis pour les représenter à votre avis ?
- Je suis incroyablement sexy ? Lança James.
- Oh par Merlin, sois sérieux deux minutes, le rabroua Lily.
- Quoi tu ne trouves pas qu'il a raison ? Demanda Sirius, en se penchant en avant, les coudes sur les genoux comme s'il s'apprêtait à démontrer une théorie particulièrement complexe. Enfin Evans, regarde-le. D'accord, je t'accorde que ses cheveux ressemblent à un hérisson et qu'il pourrait louper Hagrid déguisé en père noël s'il passait devant lui sans ses lunettes, et qu'il peut être très agaçant quand il n'a pas de tarte au citron le matin, et qu'il est un tyran au Quidditch, et qu'il est arrogant, égocentrique, qu'il n'est qu'un gamin particulièrement pour son anniversaire et...
- C'est bon, c'est bon, je crois qu'elle a compris !
Sirius s'interrompit et sourit face à l'air renfrogné de James. Il s'éclaircit la gorge puis reprit.
- Mais en même temps il est... loyal, attachant -parfois un peu trop, ses câlins sont pires que ceux d'une pieuvre- il se souci de ses amis, il ferait n'importe quoi pour eux... C'est un partenaire génial pour faire équipe à la bataille explosive, crois-moi c'est non négligeable quand tu joues contre Remus ! Et puis il peut te faire rire, te remonter le moral même dans les pires moments. Franchement Evans si tu n'es pas capable de voir ça, je ne sais pas ce que je peux faire pour toi.
- Et sexy, ajouta James, n'oublie pas ça !
- Ah oui et il est sexy.
A cet instant, Mary paraissait hésiter entre éclater de rire et entamer une chorégraphie de fangirl, ce qui était une étrange combinaison. Lily elle-même en avait perdu sa capacité à répondre. Elle était aussi rouge que ses cheveux, derrières lesquels elle tentait d'ailleurs de se cacher sans grand succès tandis que James la dévisageait de ses grands yeux bruns, ses sentiments écrit sur son visage.
Scriptor était figé, sa plume suspendue à quelques centimètres de son calepin. Il ouvrit la bouche plusieurs fois, histoire de reprendre constance, et dit sans prévenir :
- Je croyais que c'était vous qui étiez amoureux de Lily Evans ?
Sirius se tourna vers lui.
- Pardon ?
- Vous m'avez dit que c'était vous qui étiez amoureux d'elle, que vous vouliez que les lecteurs de la Gazette le sachent...
- Oh...
- Elle fait des ravages, vous savez, dit Remus en guise d'explication.
Lily s'enfonça sur sa chaise, désespérée.
- Je. Vais. Vous. Tuer, articula-t-elle. Tous !
**
*
Quand ils sortirent de la pièce d'interview, il ne fallut pas deux secondes à James et Sirius pour partir dans un fou rire incontrôlable. Lily était sûre que sans le mur, ils se seraient effondrés par terre. La fin de l'entrevu avec la Gazette avait été aussi étrange que le début, les deux Maraudeurs se renvoyant la balle et prétendant être l'autre à chaque question. Elle avait même été étonné de voir à quel point et combien de temps ils avaient réussi à maintenir leur petit numéro. Remus les regardait, comme si lui-même hésitait entre les rejoindre dans leur hilarité ou aller s'exiler en Norvège pour ne plus avoir à supporter de tels gamins.
Lily remarqua à ce moment-là qu'il avait les traits encore plus tirés que tout à l'heure et que son teint pâle faisait ressortir la cicatrice sur sa pommette. Même si la pleine lune ne tombait que dans trois jours, ça aurait très bien pu être aujourd'hui au vu de son état. James lui avait raconté lors d'une de leur ronde de préfet que selon les mois, l'intensité des effets de la lune pouvait varier sur Remus. Parfois, il se sentait bien jusqu'au moment de sa métamorphose alors que d'autres fois, il pouvait à peine tenir debout quelques heures avant. Elle supposait que ce mois-ci allait être un des pires s'il se sentait déjà malade trois jours avant.
Malgré tout, il prenait soin de garder la face, remarqua-t-elle. Bien que Sirius et James étaient sans doute trop occupés à rire pour s'apercevoir de l'état de Remus pour l'instant, il veillait à se tenir droit et à sourire pour ne pas éveiller leurs soupçons. Cependant, Lily savait que si elle, qui ne connaissait la lycanthropie de Remus que depuis à peine un an pouvait voir les signes, alors il ne faudrait pas trois secondes à ses meilleurs amis pour les voir aussi quand ils se calmeraient.
Ce qui n'était visiblement pas près d'arriver. James était maintenant appuyé contre Sirius, hilare, et imitait la tête de Scriptor à leurs réponses farfelues. Sirius, quant à lui, rejouait ses meilleures répliques en répétant « les tartres au citron voyons ! » avec un accent irlandais. Lily ne savait pas très bien pourquoi et elle préféra ne même pas demander.
- Je suis sérieuse, dit-elle, je vais les tuer.
- Si t'as besoin d'une pelle pour aller les enterrer discrètement dans la forêt interdite, surtout fais-moi signe, répondit Remus.
- Je n'y manquerais pas...
Elle croisa les bras sur sa poitrine.
- Et Remus...reprit-elle en baissant la voix. Tu te sens bien ?
- Pourquoi tu... ?
- Honnêtement ? Tu as une sale tête...
- Je vais bien, assura-t-il.
Lily n'en crut pas un mot.
- Ecoute, je peux t'accompagner à l'infirmerie si tu veux. Tu sais, juste pour prendre une potion revigorante.
- Non je...vraiment ça va...
- On n'est pas obligé de le dire à James et Sirius. Ils sont trop occupés à s'étouffer de rire ensemble, de toute façon. Si on s'éclipse discrètement ils ne se rendront compte de rien et on sera de retour dans la Salle de Commune en dix minutes. Je te le promets.
Remus passa son poids sur sa jambe gauche, hésitant. Son regard dériva une seconde sur ses amis puis il parut considérer la proposition de la jeune fille.
- D'accord, accepta-t-il. Dépêchons-nous.
Lily retint un sourire victorieux. Elle se tourna vers Mary pour lui dire qu'ils allaient à la bibliothèque et qu'ils les rejoindraient plus tard puis attrapa Remus par le bras pour le trainer derrière elle avant qu'il n'ait le temps de changer d'avis.
Quand ils arrivèrent à l'infirmerie, Madame Pomfresh ne parut pas étonnée et il ne lui fallut qu'un coup d'œil sur le teint pâle de Remus pour comprendre. Elle désigna simplement un lit vide d'un mouvement de tête et se dirigea vers l'armoire remplit de potion qui jouxtait son bureau.
- Tenez, monsieur Lupin. Comme d'habitude, pas plus que quelques gorgées. Vous pourrez repartir quand vous vous sentirez mieux.
- Merci...
- Et n'hésitez pas à venir me voir si les symptômes empirent d'ici la pleine lune, ajouta-t-elle fermement.
Sans un mot de plus, elle retourna dans son bureau, les laissant tous les deux. Lily s'affala sur une chaise près du lit, fatiguée. Si Remus n'avait pas eu tant besoin de sa potion revigorante, elle lui en aurait bien piqué un peu. Il remarqua son expression épuisée et lui sourit chaleureusement.
- Longue journée hein ?
- C'est plus...émotionnel. Potter va finir par me rendre dingue. Il ne peut vraiment pas s'en empêcher n'est-ce pas ? Il faut toujours qu'il fasse n'importe quoi !
- C'est James, se contenta-t-il de répondre. Tu as entendu Sirius, il a plein de qualités aussi.
- Son arrogance démesuré doit les masquer, répliqua-t-elle un peu mesquinement.
Remus haussa un sourcil.
- Je ne penses pas... Ce que tu prends pour de l'arrogance, ce que tout le monde prend pour de l'arrogance, c'est juste un optimiste incroyable.
- Comment ça ?
- Tu veux vraiment avoir mon point de vue ?
- Bien sûr !
- Très bien...Euh... Comment t'expliquer ? Sirius, Peter, moi, aucun de nous n'aurions réussi à nous en sortir sans lui. James a cette chance de croire qu'il peut tout faire et tout réussir. Il est James Potter, c'est une raison suffisante... Ce n'était pas vraiment le cas pour nous trois quand on est arrivé à Poudlard. Notre avenir était soit lié à un nom de famille ancestral, la lycanthropie, un manque de confiance en soi...James était juste tellement sûr de lui et il croyait en nous malgré tout. Il croyait en nous...pour nous en fait. Et on a fini par le croire. Tu comprends ?
L'innocence dans la voix de Remus toucha Lily. Il voulait réellement lui faire comprendre sa vision de James, sa conviction inébranlable que son ami était plus que ce qu'il ne laissait paraître au quotidien. Elle connaissait bien ce sentiment pour l'avoir ressenti à de nombreuses reprises quand elle aurait voulu que les gens voient Severus et ou même Remus à travers ses yeux.
Comme elle ne répondait pas, Remus reprit, désireux de lui faire comprendre la complexité de James Potter.
- Réfléchis, Lily. James vient d'une vieille famille de Sang-Pur, il est riche, doué au Quidditch, drôle... Honnêtement, il aurait pu avoir Poudlard à ses pieds.
- Il a Poudlard à ses pieds ! Souligna-t-elle sans pouvoir se retenir.
- Et il aurait pu choisir n'importe qui comme ami, continua-t-il comme si elle ne l'avait pas interrompu. Il aurait pu s'entourer d'autres enfants sang-purs de familles puissantes du monde sorcier et au lieu de ça regarde-nous. Je suis un loup-garou, Sirius s'est barré de chez lui et la plupart des gens ne voit pas le potentiel de Peter derrière sa timidité. Tu veux savoir pourquoi James a décidé ça ? Parce qu'il placé la loyauté et l'amitié au-dessus de tout, au-dessus du pouvoir ou de l'influence. Tu pourras toujours m'énumérer ses défauts, Merlin seul sait qu'il en a, mais tu ne pourras pas me convaincre que James n'est pas quelqu'un de bien. Et je pense qu'au fond de toi tu le sais aussi...
Lily resta silencieuse. Elle sentait les yeux ambrés de Remus sur elle, bienveillants.
- Et bah, souffla-t-elle. C'est toi qui aurait dû faire le portrait de James tout à l'heure au lieu de Sirius pour me convaincre... C'est assez impressionnant.
- Merci, dit-il d'un air faussement fier. Je saurais quoi faire comme future carrière si mon orientation tourne mal.
- Le métier de rêve : l'homme qui déclamait la magnificence du grand James Potter lui-même.
Remus éclata de rire et elle se joignit à lui, toute fatiguée oubliée ! Ils riaient tellement qu'ils n'entendirent pas la porte de l'infirmerie s'ouvrirent. Ce n'est que quand Dumbledore arriva à leur hauteur qu'ils le remarquèrent.
Le directeur arborait son habituel sourire amusé sous sa longue barbe blanche et ne paraissait pas étonné de les trouver ici.
- Ah miss Evans, monsieur Lupin. Tout va bien ?
- Très bien professeur...Nous allions repartir.
- Bien sûr, bien sûr... A vrai dire je pensais trouver messieurs Potter et Black avec vous, c'est pour ça que je suis ici. Savez-vous où ils sont ?
- Sûrement dans la salle commune, répondit Remus avant d'ajouter inquiet : est-ce qu'ils ont des ennuis ? Qu'est-ce qu'ils ont encore faire ?
- Rien de grave, ne vous en faites pas. Il se trouve seulement que je viens de croiser Théodore Scriptor et que je me suis aperçu d'un... petit problème concernant l'entretien avec les Gryffondor.
- Vraiment ? Dit Remus avec innocence.
Le regard de Dumbledore pétilla derrière ses lunettes en demi-lune. Lily savait qu'il n'était pas dupe.
- Et bien oui, vous comprendrez que j'ai été assez surpris de lire que monsieur Black portait soudainement des lunettes et avait des cheveux, je cite l'article, « aussi décoiffé qu'un balai après un match de Quidditch ».
- Scriptor a écrit ça ? S'exclama Lily, hilare.
- Je vous accorde que le style journaliste de la Gazette est assez contestable. Mais je ne vais pas vous retenir plus longtemps, vous avez sans doute des choses à faire.
- Oh on parlait juste de mon avenir, lança Remus, désinvolte. Même si je crois que le métier dont on parlait ne sera pas idéal pour moi.
Il échangea un coup d'œil complice et amusé avec Lily qui retint difficilement un éclat de rire. Dumbledore sourit.
- Je suis sûr que vous trouverez quelque chose d'autre, après tout vous savez ce qu'ont dit : Le phénix renait toujours de ces cendres.
Il marqua un temps d'arrêt sans se départir de son fameux sourire et regard insistant qui paraissait vous passer aux rayons X. Puis, sans rien ajouter il s'en alla après leur avoir souhaité une bonne fin de journée, le pas léger.
Pourtant, Lily eut l'impression qu'il y avait plus derrière ses mots qu'une simple métaphore.
Chapitre IX : Amitié
Ce furent les rayons du soleil sur son visage qui tirèrent Remus de son sommeil. Il mit plusieurs secondes à ouvrir les yeux, le corps encore douloureux de sa métamorphose de la nuit dernière. Comme son état l'avait laissé présager, la pleine lune de ce mois-ci avait été particulièrement difficile. Dès le matin, il n'avait pas réussi à se lever pour aller en cours et ses amis l'avaient presque porté jusqu'à l'infirmerie. Madame Pomfresh avait juste eu le temps de l'attraper avant que ses jambes tremblantes ne se dérobent sous lui et il avait passé le reste de la journée à moitié endormi dans un lit.
Plus les heures passaient et plus son état empirait. Il avait l'impression d'avoir la grippe et la dragoncelle à la fois. Vers la fin d'après-midi, Lily était venu lui tenir compagnie mais il était trop faible pour vraiment tenir une conversation et elle était repartie, le cœur serré.
Au moment de se rendre dans la cabane hurlante, le trajet lui avait paru insupportable. Il avait été assailli de crampes et de spasmes pendant au moins une heure avant de se transformer. Brûlant de fièvre, il n'avait à vrai dire pas eu conscience de grand-chose, à part des mots rassurant que James lui chuchotait pour le calmer ou du chiffon d'eau fraîche que Peter lui passait sur le front.
Ce matin, même s'il était encore faible, au moins la douleur était partie.
- Ah Lunard ! Réveillé ?
- Hum...
- Attends, doucement. Ne bouge pas, Pomfresh a dit que tu te sentirais peut-être un peu patraque au début...
Malgré l'avertissement de Sirius, Remus tenta de se redresser contre son oreiller et une vague de nausée le força à se rallonger immédiatement. Il sentit un picotement juste en-dessous de son coude, et mécaniquement il porta la main au bandage qui entourait son bras gauche.
- Tu t'es griffé pendant la nuit, expliqua Peter. Ce n'est pas trop profond, ne t'inquiète pas. Tu veux quelque chose ? De l'eau ? Du chocolat ?
Même si l'idée d'avaler quoique ce soit lui soulevait l'estomac, il se contenta d'hocher la tête. Il savait que s'hydrater et manger un peu de sucre lui rendraient des forces.
- Merci... J'ai dormi combien de temps ?
- Presque toute la matinée, répondit James en s'asseyant à ses pieds au bout du lit. Il est presque 11h30. La nuit a été plutôt...longue. Comment tu te sens ?
- Mal, dit-il honnêtement. Je ne me souviens pas trop de ce qui s'est passé dans la cabane hurlante.
- Tu étais assez mal en point. L'une des pires pleines lunes.
Remus ferma les yeux tandis que de vagues images lui revenaient en mémoire. Brusquement, il se tourna vers James alors qu'un souvenir flou flashait dans son esprit.
- Est-ce que tu m'as chanté une berceuse ? Demanda-t-il, amusé.
- Quoi ?
Mais James se trahit en rougissant.
- Merlin, tu m'as vraiment chanté une berceuse !
- Tu étais malade ! Se défendit-il. Ma mère faisait ça quand j'étais petit...
- Ta voix est loin d'être aussi mélodieuse, lança Sirius, goguenard.
- Eh ! Vous adoriez tous ma chanson hier soir, bande d'hypocrites.
Ils éclatèrent de rire.
Au bout de plusieurs minutes, Remus se sentit assez bien pour pouvoir s'assoir et manger -ou dévorer- des chocogrenouilles. Dès qu'il tombait sur une nouvelle carte, il la passait à Peter pour sa collection et s'empressait d'attraper une nouvelle boîte. Parfois, il se demandait comment il n'avait jamais eu de crise de foi avec tous le chocolat qu'il engloutissait.
Madame Pomfresh passa à un moment pour s'assurer de son état et changer son bandage.
- Je pense que vous allez rester la journée ici, monsieur Lupin, dit-elle avec regret. Peut-être même demain aussi pour que vous repreniez des forces.
- Mais c'est Halloween demain ! Protesta-t-il.
- Je sais bien, mais je ne pense pas que ça soit très prudent que vous quittiez l'infirmerie avant que votre état ne s'améliore totalement. Il y aura d'autres banquets...
Remus eut l'impression que son cœur tombait au fond de son ventre. Ce n'était pas vraiment pour le banquet qu'il était déçu mais pour la soirée d'Halloween qu'ils avaient tous prévus ensemble avec les filles, comme l'année dernière lorsque qu'ils avaient fait une virée en cuisine qui s'était terminée par une course poursuite avec Rusard. Savoir que ses amis repasseraient une soirée comme ça alors que lui serait coincé dans son lit à l'infirmerie le déprimait un peu.
Ses sentiments devaient se lire sur son visage car Madame Pomfresh lui adressa un sourire.
- Je suis désolé, monsieur Lupin. C'est pour votre bien.
- Oui...oui je sais...
**
*
Quand Marlène se laissa tomber sur le banc à la table des Gryffondor, elle se rendit vite compte que ses amis ne l'avaient pas attendu pour commencer à manger et qu'ils étaient lancés dans un débat animé.
-...tu aurais vu sa tête, Alex, il avait l'air tellement déçu !
- Je m'en doute ! Mais si Pomfresh dit qu'il...
- Oui je sais, il doit se reposer. Mais on pourrait le faire sortir, juste pour une heure ? Il dormira le reste du temps et personne ne se rendra compte de rien.
- Et s'il se passe quelque chose ? Opposa Alexia, soucieuse. S'il se sent mal et qu'il a besoin d'une aide médicale ?
- Il n'aura pas besoin d'aide médicale, c'est juste de la fatigue, rien de plus...
Marlène donna un coup de pied à Dorcas sous la table.
- De quoi est-ce qu'ils parlent ?
- De Remus.
Elle prit conscience que le préfet n'était pas avec eux autour de la table. Pourtant, ça n'avait rien d'inhabituel, Remus partait chaque mois rendre visite à sa mère malade et loupait souvent une ou deux journées de cours.
- Il n'est pas retourné chez lui comme d'habitude ?
- Non, répondit Dorcas en se servant un bol de céréales. Pas ce mois-ci. Il a attrapé une espèce de mauvaise grippe d'après James. Il doit rester à l'infirmerie jusqu'à ce qu'il aille mieux.
- Le pauvre...
- Ouais. Sauf que du coup il va rater notre soirée d'Halloween. Sirius et James essayent de nous convaincre de le faire sortir au moins une heure pour le réconforter mais Alex et Lily sont inquiètes qu'il ne soit pas assez bien pour ça.
Marlène haussa un sourcil.
- C'est à Remus de voir s'il te sent suffisamment en forme, non ? Dit-elle.
- Depuis quand est-ce que James et Sirius demandent l'avis de quelqu'un avant de monter un mauvais coup ? Surtout le principal intéressé et surtout Remus ?
- Tu n'as pas tort...
Dorcas eu un petit sourire suffisant, l'air de dire que c'était évident. Elles reportèrent leur attention sur la conversation à côté d'elle qui continuait, même si les deux garçons et les filles se ressortaient les mêmes arguments sans s'écouter. Ils étaient vraiment les quatre Gryffondor les plus butés...
- Juste...intervint Marlène en pensant à voix haute, comment vous allez faire pour le faire sortir de l'infirmerie sans que Pomfresh ou les professeurs ne le remarquent ?
Elle regretta presque d'avoir posé la question quand James et Sirius échangèrent un sourire complice qui n'annonçait généralement rien de bon.
D'ailleurs, elle ne resta pas avec eux pour assister à l'évasion de Remus qu'ils avaient échafaudé, à la consternation des autres filles. Elle réussit à prétexter une vague histoire de livre à rendre à la bibliothèque et d'une dissertation a terminé avant de filer en quatrième vitesse. Ses excuses devenaient de plus en plus redondantes... Ça allait faire la troisième fois depuis la rentrée que la dissertation lui servait de couverture et heureusement que les Aspics rendaient ça à peu près vraisemblable, sinon elle aurait eu moins de chance.
Quand elle entra dans la salle de classe vide, alias le repère, Regulus était déjà installé dans le vieux canapé vert défoncé et lisait tranquillement un livre. Il ne releva même pas la tête alors qu'elle s'asseyait à côté de lui.
- Tu es de mauvaise humeur, devina-t-elle immédiatement.
- Non.
- Ah... Tu es de très mauvaise humeur.
Regulus lui jeta une œillade noire.
- Tu n'as pas des devoirs à faire au lieu de me parler ?
- Si c'est pour être accueillit comme ça alors qu'on ne s'est pas vu depuis septembre je peux toujours repartir.
- La porte est là-bas, dit-il froidement. Je ne te retiens pas.
Marlène ne bougea pas. Elle savait qu'après l'été, il lui faudrait du temps pour que Regulus soit à nouveau à l'aise avec elle, le temps de reprendre leur habitude. Pourtant, elle voyait bien que quelque chose n'allait pas. Il avait toujours eu ce côté distant et vexant parfois, mais elle avait pensé que leurs retrouvailles auraient été un peu plus chaleureuses.
- Reg'...
- Ne m'appelles pas comme ça.
- Qu'est-ce que tu as ?
- Rien.
- Il s'est passé quelque chose ?
- McKinnon !
- Les cours ? Les profs ? Sirius ? Livia ?
Le coin de sa bouche tressaillit et Marlène su qu'elle avait vu juste.
- Livia... murmura-t-elle.
- Tu ne laisses jamais tomber, pas vrai ?
- Dis celui qui est plus buté qu'un hippogriffe.
Regulus émit un bruit de dédain avant de se concentrer à nouveau sur le livre entre ses mains comme si elle n'existait pas. Sauf qu'à ce petit jeu, il oubliait une chose : Marlène était la patience incarnée. Sans se départir de son calme, elle s'enfonça un peu plus dans le canapé et sortit son devoir de métamorphose de son sac.
Il ne fallut pas plus de cinq minutes au jeune homme pour perdre son masque d'indifférence.
- Bon, s'exclama-t-il. Très bien. Oui, c'est Livia. Et non, ça ne te regarde pas.
- Oh allez, je croyais qu'on avait dépassé ce stade. Qu'est-ce qui s'est passé avec Livia ? Je te jure que tout ce que tu diras restera dans cette pièce.
- Tu te prends pour qui ? Ma psychomage ?
- Non, pour ton amie, dit-elle avec gentillesse.
Regulus soupira. D'un claquement sec, il referma son livre et le jeta sur la table basse devant eux pour lui faire face sans toutefois rencontrer son regard. Il se passa une main sur la nuque et il fallut une seconde à Marlène pour comprendre qu'il était...nerveux. Véritablement nerveux.
- J'ai eu une conversation avec elle, hier soir, commença-t-il maladroitement. On était en train de se disputer parce que Rosier m'a envoyé des lettres dernièrement, et avant que tu ne commences à protester : non je ne lui ai pas encore répondu et de toute façon ça ne te concerne pas. Bref, on se disputait, j'étais énervé contre elle et puis brusquement la conversation a fini par dériver sur...nous. Elle m'a dit qu'elle en avait marre d'être juste mon amie. C'était très dans son style comme confession, je dois lui accorder ça. Elle s'est plantée devant moi et m'a dit que ça faisait depuis l'année dernière qu'elle voulait que notre relation avance...tu sais, dans ce sens-là.
Marlène écarquilla les yeux.
- Elle a quoi ?
- Et puis d'un coup elle m'a embrassé !
- Elle t'a quoi ?
- C'est sorti de nulle part. Je ne sais pas trop comment on en est arrivé là mais je l'ai embrassé aussi et puis je suis...parti.
- Tu es quoi ?
- Je suis remonté dans mon dortoir. Ce matin au petit déjeuner elle n'a pas arrêté de me dévisager mais je me suis arrangé pour avoir l'air occupé avec les jumelles Zabini avant de m'enfuir ici. C'est pour ça que j'étais en avance.
- Je...tu...quoi ?
- Merlin McKinnon, tu es la pire confidente au monde !
- Hein ? Oh désolé, balbutia-t-elle. Je suis juste...étonnée.
- De l'aveu de Livia ou du mien ?
- Aucune idée, les deux sûrement.
- Remets-toi, dit Regulus de son ton cassant plus coutumier. Je te rappelle que tu m'as aussi embrassé un jour sans prévenir, tu dois être bien placée pour donner des conseils.
Marlène sentit ses joues s'enflammer. Ils n'avaient plus reparler de cette histoire entre eux depuis ce fameux jour. Ça avait mis du temps, plusieurs mois même, mais elle avait réussi à surmonter son béguin pour le Serpentard et leur relation était retournée là où elle avait toujours été : une profonde et surprenante amitié que ni l'un ni l'autre ne comprenait réellement.
- Tu veux mes conseils ? D'accord. Tu ne sais pas ce que tu ressens pour elle c'est ça ? Ni si tu veux qu'elle soit ton amie ou plus ?
- Si tu veux le formuler en des termes aussi niais alors oui...
- Je le formule en tant que personne normale, Reg'. Et si tu veux des conseils, j'ai ce qu'il te faut !
Elle se pencha pour attraper son sac au pied du canapé et dû écarter tout le bazar qu'elle trimbalait partout avec elle avant de trouver ce qu'elle cherchait. Avec un air victorieux, elle brandit un magazine à la couverture fuchsia sur laquelle une sorcière blonde agitait la main avec un enthousiasme qui pouvait concurrencer James quand il apercevait une tarte au citron (ou Lily) dans son champ de vision.
Les sourcils de Regulus s'envolèrent littéralement sous sa mèche de cheveux noirs.
- C'est une blague ?
- Non, on va faire le test de personnalité dans les relations amoureuses de la page 18 de Sorcière Hebdo pour « savoir si elle ou il est fait pour moi ».
- Regarde-moi. Lis sur mes lèvres. Deviens legilimens. Je. Ne. Ferais. Pas. Ça, articula-t-il.
Marlène balaya sa remarque de la main et ouvrit le magazine.
- Question n°1, déclara-t-elle d'une voix claire. Quelle est ta couleur préférée ? a) bleu b) rouge c) vert ou d) jaune ?
- En quoi est-ce que ça a un rapport avec Livia et moi ?
- Répond.
- Non. Et puis c'est réducteur tes choix, si j'ai envie de choisir le violet ?
- Regulus, une couleur, allez !
Regulus leva les yeux au ciel et répondit en soupirant :
- Vert.
- C'est noté. Question n°2 : en matière de goût et d'idée, vous êtes plutôt a) différents mais c'est très bien comme ça, b) nous avons chacun nos préférences et cela donne lieu à des débats animés, c) nous avons exactement les mêmes, ou d) nous avons des points communs mais nous n'en parlons pas ?
- C'est idiot, Marlène !
- Réponse b) je présume ?
- Mais...
- Vous vous êtes disputés encore hier je te rappelle.
Tapotant sa plume sur le magazine, elle lui lança un regard équivoque.
- D'accord, d'accord...la réponse b) alors, dit-il.
- Question n°3 : les mots qui résument le mieux les objectifs de votre couple sont a) sécurité et stabilité, b) tendresse et soutien, c) motivation et entraide, ou d) amitié et confiance ?
- Réponse d).
- Eh, c'était rapide !
- Autant en finir au plus vite...
- Comme tu veux ! Question n°4...
Regulus la coupa, l'air concerné.
- Juste pour savoir, combien est-ce qu'il y a de question ?
- 24.
- Merlin !
- Je disais donc, question n°4 : quelle est le sortilège préféré de votre partenaire ? a) protego, b) expelliarmus, c) lumos, ou d) sonorus ?
- Comment est-ce que je suis censé savoir ça ?
- Si tu ne sais pas, dis juste ce qui te paraît à tes yeux coller à sa personnalité, suggéra Marlène.
- Sonorus dans ce cas.
Elle cocha la case et haussa un sourcil.
- Pourquoi celui-là en particulier ?
- Parce que quand elle cri j'ai l'impression que sa voix est déjà amplifiée par magie.
Le test de personnalité continua pendant encore plus de trente minutes, le temps que Regulus râle entre chaque question, mais finalement Marlène releva la tête du magazine après avoir calculé ses répondes. Elle brandit sa plume, triomphante.
- Je t'annonce, mon cher Regulus, que tu as une majorité de d) !
- Et c'est grave docteur ?
- Reg' !
- Désolé...alors, est-ce que d'après Sorcière Hebdo Livia est la femme de ma vie ou non ?
- Apparemment, je cite, « vous pouvez avoir des différents avec votre partenaire en raison de vos deux forts caractères respectifs et des difficultés peuvent apparaître au sein de votre couple. Cependant, pas d'inquiétude. La communication, l'amour, et un respect mutuel de l'autre renforcera votre relation. Ne baissez pas les bras et n'ayez pas peur de vos sentiments, vous êtes fait l'un pour l'autre ! »
Regulus se redressa, la trace de l'oreiller sur lequel il s'était allongé en attendant s'étalant sur sa joue. Il paraissait toujours aussi sceptique.
- Tu m'as fait perdre une heure de ma vie pour ça ? Lança-t-il.
**
*
Marlène ne put s'empêcher de sourire en repensant à l'air indigné de Regulus après le résultat du magazine. Il s'était levé en grommelant avant de partir en disant qu'il se débrouillerait seul avec Livia, mais elle avait bien vu qu'il était déjà plus détendu qu'en début de journée. Même s'il ne l'avouerait pour rien au monde, ce moment d'insouciance lui avait au moins changé les idées. Il pouvait bien jouer au jeune homme sans cœur s'il le voulait mais Marlène savait qu'il appréciait leur rendez-vous, juste tous les deux, histoire de ne plus avoir à faire face aux autres.
Elle avait passé le reste de la journée à la bibliothèque pour réviser et n'avait pas vu les Maraudeurs à l'heure du déjeuner. Elle espérait qu'ils limiteraient les risques en sortant Remus de l'infirmerie...
Son intuition se révéla exact car dès qu'elle donna le mot de passe à la Grosse Dame, plusieurs voix lui parvint et elle reconnut celle de Remus en premier.
- Je suis un loup-garou, était-t-il en train de dire.
Marlène se figea sur le seuil de la salle commune, bouche entre-ouverte. Tous ses amis étaient rassemblés au centre de la pièce, assis par terre en rond dans un large cercle et ils avaient dû commencer la soirée d'Halloween sans elle. Chacun avait une carte retournée devant lui.
- Et moi une sorcière, dit Dorcas.
- Bon sang, s'exclama Lily. Vous n'êtes pas censé le dire ! Le but du loup-garou est que les autres ne connaissent pas votre carte !
- Je comprends rien au jeu moldu, marmonna Peter.
- Mais qu'est-ce que vous faites ?
D'un même mouvement ils se tournèrent tous vers elle, surpris.
- Marlène ! Où est-ce que tu étais ? J'ai fait tous les rayons de la bibliothèque sans te trouver !
- Oh...hum...j'étais dans une salle de classe vide, tu sais, histoire de réviser au calme. Désolé.
Ce n'était même pas totalement un mensonge, songea-t-elle alors que son cœur battait à tout rompre dans sa poitrine. Elle espérait qu'il faisait trop sombre pour que les autres remarquent le rouge qui lui était monté aux joues et elle changea de sujet elle-même.
- Remus ! Tu as réussi à sortir ?
- On l'a fait s'évader, répondit James immédiatement. Tu aurais dû voir ça, un plan maitrisé de A à Z.
Aussi subtile que la chute d'un arbre, Peter toussa pour dissimuler un rire. Marlène avait presque peur de demander.
- Comment vous avez fait ?
- Une catastrophe, s'exclama Alexia. Sirius et James ont voulu s'occuper de la « diversion », du coup ils se sont plantés devant le bureau de Pomfresh et ont fait semblant de se disputer. Tu aurais dû entendre leurs arguments, du n'importe quoi !
- Peut-être bien, intervint Sirius en posant son menton sur le dessus de tête alors qu'il l'enlaçait par la taille, mais ça a suffi pour distraire Pomfresh assez longtemps pour que Peter aide Remus à sortir.
- Et vous allez me dire qu'elle n'a pas compris que c'était vous quand elle s'est rendue compte que son patient avait disparu mystérieusement ?
James haussa les épaules.
- On n'est pas resté pour le savoir. Le principal c'est qu'il soit là, pas vrai Lunard ?
Remus sourit timidement et hocha la tête. Il avait l'air encore affreusement pâle et fatigué, mais une lueur enthousiaste éclairait tout son visage, comme si le simple fait d'être là avec eux était le plus beau cadeau au monde. Il n'avait pas pu être là il y a deux jours pour l'anniversaire de Dorcas et jusqu'à ce qu'il entende le terrible jeu d'acteur de ses amis en fin d'après-midi il avait été persuadé de aussi rater Halloween.
- Eh, où sont les bonbons et les bières au beurre ? Demanda Alice depuis son fauteuil près de la cheminée. Qui a organisé cette soirée ?
- Ne critique pas, dit James, indigné. Le cas de Remus nous a occupé depuis ce matin, on n'a pas eu le temps de tout prévoir.
- Tu te fais vieux, James. Je t'ai connu capable de vandaliser le bureau de Rusard, jouer un match de Quidditch et organiser une fête surprise dans la même journée !
James bondit sur ses pieds, faisant voler les cartes de loup-garou autour de ses chevilles.
- Je ne peux pas laisser passer ça ! Mon honneur de Maraudeur est en jeu ! Je vais aller te les chercher, tes bonbons.
- Merci, sourit Alice. Et n'oublie pas les tartelettes à la citrouille !
Il agita la main pour lui dire qu'il l'avait entendu, et attrapa Marlène, toujours figée dans l'entrée, pour qu'elle l'accompagne. Après tout, James avait toujours besoin d'un public.
Trébuchant sur ses pieds, la blonde lui emboîta le pas bon gré mal gré. Sur le chemin vers les cuisines, il lui raconta plus en détail l'évasion de Remus et cela la conforta dans sa décision de ne pas être restée. Alors qu'ils descendaient vers le troisième étage, ils croisèrent le professeur McGonagall qui remontait, une pile de parchemin sous le bras.
- Oh monsieur Potter, l'interpella-t-elle, je voulais vous voir.
- Ce n'était pas moi, dit-il par réflexe.
Leur directrice de maison lui jeta un regard perçant.
- Ça concerne le match de mardi contre Serpentard, expliqua-t-elle. Je devais vous prévenir que Darren Mulciber est toujours suspendu de l'équipe suite aux évènements de l'année dernière et que par conséquent Serpentard a sélectionné Antonin Dolohov pour le remplacer.
- Oui je le sais, professeur, Lucinda m'avait prévenu. J'ai adapté notre stratégie.
- Bien, c'est parfait. Je compte sur vous, Potter. Il serait contrariant pour moi de voir la coupe dans le bureau du professeur Slughorn cette année.
- Ne vous inquiétez pas, ils n'ont aucune chance.
McGonagall sourit légèrement.
- Heureuse de l'entendre, dit-elle fermement. Oh et Potter ?
- Oui ?
- Vous me ferez le plaisir de ramener monsieur Lupin à l'infirmerie, ajouta-t-elle d'un ton entendu.
Chapitre X : Confidence
Le regard perdu dans le vague, Alexia suivit des yeux les grains de poussières qui flottaient dans l'air. Le soleil éclairait l'ensemble du dortoir et soulignait les formes des vieux meubles en bois. Assise en tailleur sur le sol, elle tentait de rester concentrer sur son devoir de sortilège mais ni le beau temps dehors ni le corps de Sirius pressé contre son dos ne l'aidait réellement.
- Sirius...
- Hm ?
- Je croyais qu'on devait réviser ?
- Qui a besoin de réviser ? Dit-il en jouant avec une mèche de ses cheveux. On pourrait faire tellement de choses plus intéressantes...
Alexia sourit et tourna à moitié son visage vers lui.
- Comme quoi ?
Pour toute réponse, Sirius se pencha et l'embrassa à pleine bouche, comme pour lui faire oublier le bout de parchemin devant elle. Et sa méthode ne devait pas être si mauvaise que ça car elle se retourna complètement pour lui faire face et lui rendit son baiser. Comme à chaque fois qu'ils étaient ensemble, qu'ils s'embrassaient de la sorte, Sirius eut l'impression d'être seul au monde. Seul au monde avec elle. Qu'importe ses problèmes avec sa famille, le Tournoi, les prochaines blagues avec Maraudeurs, la guerre qui grondait dehors, ou même son frère. Il n'y avait qu'Alexia.
Il émit un bruit de gorge en sentant son corps se presser contre le sien et ses mains se perdre dans ses cheveux. Alors qu'ils déplaçaient sa bouche vers son cou, il sentit son pouls battre follement contre ses lèvres. Presque de façon erratique. Sans pouvoir s'en empêcher, il se demanda si c'était à cause de lui ou la maladie respiratoire. Ça ne lui arrivait pas souvent, mais parfois elle se reculait soudainement, à bout de souffle et les pupilles réduites à une tête d'épingle. Il s'était fait la réflexion que Remus ressemblait aussi à cela, juste avant de se transformer les soirs de pleine lune. Ils avaient tous les deux ce même regard fiévreux et un sentiment qui oscillait entre le désespoir et la haine contre soi-même inscrit sur leur visage.
Pourtant, en ce moment même Alexia paraissait aller bien. Les lèvres entre ouvertes, elle gémit quand il mordilla un point sensible juste en-dessous de son oreille et elle rejeta ses longs cheveux bruns en arrière pour lui donner un meilleur accès. Quand James avait remarqué une marque rouge sur sa gorge la première fois, il avait paru sur le point de faire une blague avant de réaliser ce que ça signifiait et de secouer la tête et de grimacer comme un enfant de six ans en imaginant son presque frère et la fille qu'il considérait comme une sorte de petite sœur dans cette situation. On pouvait toujours compter sur James pour être une drama queen.
- Sirius...
Son murmure sembla résonner dans la chambre vide. Sirius releva la tête. Elle avait les yeux fermés, le visage incliné en arrière et sa poitrine se soulevait rapidement.
- Tu vas bien ?
- Hum ? Oui... Reviens là.
Elle prit ses joues en coup entre ses mains et le ramena contre elle d'une légère pression. Dès que leurs bouches entrèrent à nouveau en contact, Sirius la souleva doucement et elle grimpa sur ses genoux dans un mouvement souple. Au moins, son entraînement de Quidditch et ses cinquante kilos à peine aidaient un peu. La sensation si familière lui noua le ventre.
Sans qu'il s'y attende, Alexia le fit basculer sur le dos et se retrouva à cheval sur ses hanches sans briser le baiser. Il gémit, ce qui lui permit de glisser sa langue entre ses lèvres. Cette fois, Sirius ressentit la même sensation que quand il volait à toute vitesse sur son balai. Son corps était saturé de sensation. Merlin, il aimait cette fille.
- Je t'aime, souffla-t-il sans s'écarter.
Ils étaient si proche que leurs fronts se touchaient et qu'ils pouvaient distinguer chaque grain de beauté sur sa peau, chaque dégradé de couleur dans ses yeux bleu. Elle avait les lèvres rouge et gonflées, mais il imaginait qu'il ne devait pas être mieux.
Alexia sourit, caressant sa joue du bout des doigts. C'était peut-être cliché ou horriblement niais et Dorcas se contenterait de soupirer si elle pouvait l'entendre, mais alors qu'elle embrassait Sirius elle se sentait vivante. Or, pour une fille qui se savait condamnée ce sentiment n'avait pas de prix.
- Combien de temps on a ? Demanda-t-elle en jetant un coup d'œil au lit sur leur gauche. Avant de descendre rejoindre les autres pour le déjeuner ?
Sirius soupira.
- Dix minutes. Et Frank risque de repasser ici pour prendre ses affaires.
- Arg ! Tu sais quoi ? S'il y a juste une chose qui ne me manquera pas après Poudlard, ce sont les dortoirs collectifs.
- Parce que tu crois que James prendra la peine des respecter notre vie privée et notre intimité quand on habitera ensemble ?
- Non, reconnut-elle avant de se relever péniblement. Le connaissant, il sera notre colloc officieux.
- Sauf qu'il ne payera pas de loyer...
- Exact. Il faut vraiment qu'on arrive à le faire sortir avec Lily sinon on n'aura aucun moment à deux. Imagine ça, il faudra lui préparer des tartes au citron et le divertir dès qu'il s'ennuie, c'est-à-dire toutes les deux minutes.
Sirius rit.
- James n'est pas ni un gamin ni un chien tu sais.
Alexia haussa les épaules. En vérité, elle savait qu'elle aimerait avoir James, les filles et les Maraudeurs traîner autour d'eux après Poudlard. Elle essayait de ne pas trop y penser, parce que la simple idée de ne plus passer des mois dans le château lui faisait étrange, mais elle savait qu'ils ne se sépareraient pas. Elle ne savait pas ce qu'ils feraient tous l'année prochaine, mais il n'y avait aucune raison pour qu'ils se perdent de vue.
Alors qu'elle enjambait Sirius, toujours allongé sur le sol et ses cheveux formant un halo sombre autour de son visage, pour pouvoir ranger ses affaires, une de cas phrases la frappa brusquement.
- Qu'est-ce que tu entends exactement par « quand on habitera ensemble » ?
- Quoi ? Dit-il, même s'il avait très bien compris sa question.
- Tu viens de dire ça il y a une minute. Tu...tu le penses vraiment ?
Sirius baissa les yeux, ses mains jouant nerveusement avec la plume qui traînait à côté de lui.
- C'était juste une façon de parler...enfin je veux dire, poursuivit-il en voyant l'expression d'Alexia, j'y pense peut-être depuis quelques temps. Je ne voulais pas en parler, à toi ou à personne, et si tu ne veux pas ou que tu as d'autres projets...
- Sirius, eh, moins vite, coupa-t-elle avec un rire.
Elle revint s'assoir près de lui, curieuse, et Sirius se redressa pour la regarder correctement. Il avait l'air plus confiant maintenant qu'elle paraissait intéressée. Il ne mentait pas, il réfléchissait à leur vie ensemble après l'école depuis deux ou trois semaines, mais il ne voulait pas l'effrayer en abordant une question aussi importante de but en blanc. Evidemment, c'était elle qui amenait le sujet entre eux aujourd'hui. Rien de surprenant. Il avait toujours eu un certain talent pour l'esquive tandis qu'elle aimait être directe.
- C'est juste... En fait, j'ai une idée dans la tête depuis la rentrée, expliqua-t-il. Ironiquement, c'est la harpie qui me la donner.
Alexia haussa un sourcil.
- Pardon ? Ta mère ?
- Le diable en personne ! Elle a dit... quels mots elle a employé déjà ? Ah oui, elle a dit que pour « quelqu'un qui voulait son indépendance », j'avais de la chance que les Potter aient accepté de me prendre chez eux et que j'étais « décidément un fardeau où que je sois ».
- Sirius...
- Je sais, je sais... Ne t'en fais pas, ça fait longtemps que j'ai appris à ne plus l'écouter. Mais ça m'a fait réaliser que je ne pouvais pas rester éternellement chez Fleamont et Euphemia. Ils ont déjà eu la gentillesse de m'héberger pendant un an. Mais j'ai besoin d'avoir un endroit à moi, véritablement, un endroit où... je serais réellement indépendant et où je ne dépendrais ni des Black ni des parents de James. L'héritage de mon oncle Alphard sera largement suffisant pour m'acheter un appartement et Andromeda a dit qu'elle pourrait m'aider à m'installer.
- Attends attends, ralentis ! S'exclama-t-elle. Tu en as parlé avec ta cousine ?
Sirius hocha la tête.
- Par lettre, quelques jours après avoir reçu le testament. Et je me disais que si j'avais un appart', il n'y avait aucune raison pour qu'on ne vive pas ensemble si tu le voulais. Mais on a encore toute l'année scolaire, ce n'est pas pour toute suite.
- Je comprends... Il faudra que j'y réfléchisse. Mais si nous deux ce n'est pas pour tout de suite, tu as l'air plutôt décidé pour l'appartement en lui-même, non ? Quand est-ce que tu penses t'en occuper ?
- Sûrement à noël ou aux vacances d'avril au plus tard. Andromeda et Teddy chercheront des appartements pour moi et j'irai en visiter. Tu pourras venir avec moi.
Alexia sourit, enthousiaste. L'idée avait vraiment l'air de tenir à cœur à Sirius et elle se demanda pourquoi il ne lui en avait pas parlé plus tôt. Ils étaient déjà début novembre après tout. Une image d'un appartement chaleureux, un peu en désordre, aux alentours du chemin de traverse, s'imposa à son esprit.
- Et les autres ? Ils sont au courant ? Les garçons je veux dire ?
Une fois encore, une drôle d'expression passa sur le visage de Sirius et il détourna le regard.
- Je suppose que non... dit-elle d'une voix traînante et curieuse.
- C'est-à-dire que... il y a un problème à mon idée.
- Lequel ?
Sirius inspira profondément.
- James.
- Je ne te suis pas...
- Je ne veux pas faire de peine à Fleamont et Euphemia mais je sais qu'ils comprendront, expliqua-t-il. Mais James... Tu aurais dû le voir Alex la nuit où j'ai débarqué chez eux. J'étais... j'étais mal, perdu, je n'avais nulle part où aller. Et je m'en voulais tellement pour Regulus que j'en étais malade. James a été là pour moi. Il est resté éveillé toute la nuit pour me parler et me rassurer, à me répéter que tout irait bien, que je n'avais pas besoin d'eux et qu'il serait ma famille à partir de maintenant. Il m'a même chanté cette stupide berceuse qu'il fredonne à Remus quand la pleine lune est difficile. La première semaine, il se levait chaque matin à 6h30 pour intercepter les lettres ou les beuglantes que mon père envoyait pour que je rentre à Square Grimmaud. Sans lui, je ne sais même pas ce que je serais devenu. Et je ne parle pas juste de ma fugue. Parfois je me demande ce qui serait arrivé si je n'avais pas rencontré James dans ce compartiment pendant notre premier voyage en train. J'aurai pu être réparti à Serpentard, suivre la tradition familiale et...
Sa voix craqua et Alexia sentit sa gorge se serrer. Elle serra la main dans la sienne de toute ses forces.
- Tu sais, si James est aussi expansif, tactile ou exubérant avec les autres c'est qu'il s'est longtemps senti seul durant son enfance. Un gamin énergique qui aime les blagues, seul dans cet immense manoir. Même si tout n'était pas parfait, j'avais mon frère au moins avant que tout...avant que tout ne s'écroule. Il était tellement content quand je suis venu habiter chez eux, il m'a dit « maintenant on est vraiment frère pas vrai ? ».
Alexia n'avait aucun mal à s'imaginer la scène, James regardant Sirius avec son fameux sourire. Pas celui qu'il utilisait pour draguer ou frimer devant toute l'école, non celui qu'il avait quand il était vraiment heureux ou de bonne humeur et qui illuminait son visage d'une oreille à l'autre. Il en avait un aussi pour Lily, un sourire spécial plus tendre et rêveur.
- Donc je ne veux pas... je ne veux pas le blesser en lui annonçant que je veux déménager, dit Sirius.
- Je comprends, répéta-t-elle. Mais ça ira, il se fera à l'idée. Tu devrais en parler à Remus, il pourra peut-être t'aider. C'est son truc ce genre de dilemme, il sait gérer les crises émotionnelles Jamesnesque.
- Et pas toi ?
- Moi ? J'ai abandonné l'espoir de comprendre James il y a un moment, je me laisse porter c'est tout.
Sirius éclata de rire. Maintenant qu'il avait avoué à Alexia ce qu'il pesait depuis un ou deux mois, la situation prenait d'un coup un aspect plus concret.
Plus léger, il se remit sur ses pieds et la tira par la main.
- Allez viens ! Si on arrive en retard au déjeuner, on loupera le début du match !
**
*
- Merlin ! Je n'ai jamais vu ça en quinze ans de carrière !
- Ackerley, vous présentez les matchs depuis à peine trois ans...
- Oui mais ça faisait moins classe, professeur, répondit Tiberius sans quitter le terrain du regard. Et cette chute méritait l'hyperbole !
Dorcas ne pouvait qu'approuver, la main crispée autour du poignet de Lily qui lui laissait son bras comme défouloir telle la merveilleuse amie qu'elle était. Le match avait pourtant bien commencé malgré le froid et Gryffondor menait même de dix points grâce au but qu'avait marqué James. Comme d'habitude, la foule vibrait d'énergie tandis que Tiberius, fidèle à lui-même, commentait les actions sur le terrain à sa façon, ce qui faisait pincer les lèvres à McGonagall.
C'était sans doute à cause du Tournoi qui était dans tous les esprits, et surtout du classement avec Serpentard en première place suivit de Gryffondor juste derrière, mais Dorcas avait l'impression que la tension était encore plus forte qu'en temps normal. Même les élèves de Poufsouffle et de Serdaigle avaient l'air de prendre parti.
Elle gardait les yeux rivés sur Lucinda, suivant ses moindres mouvements, et c'est pour cela qu'elle n'avait pas loupé le moment fatidique il y a une minute lorsque Adrian Connelly, l'attrapeur de Gryffondor, lui était rentré dedans à pleine vitesse. A sa décharge, il ne l'avait vraiment pas vu, trop focalisé sur le vif d'or qui filait devant lui pour se concentrer sur sa vision périphérique. Lucinda non plus ne l'avait pas vu arriver. La capitaine était occupée à donner des indications à Dolohov, son nouveau joueur qui remplaçait cet idiot de Mulciber, et n'avait rien pu faire pour éviter la collision.
Un énorme bruit avait éclaté dans le stade quand les deux étaient entrés en contact, immédiatement suivi par les cris du public. Dorcas en était resté sans voix. Si Adrian, avec son poids léger, avait fait un vol plané et n'avait évité la chute vingt mètre plus bas que grâce au sauvetage in extremis de Sirius, Lucinda avait eu la présence d'esprit de s'accrocher fermement à son balai. Manque de chance, la force du choc l'avait malgré tout propulsé violemment en avant et son visage avait heurté le manche.
Cette fois, Dorcas n'avait pas réussi à retenir une exclamation de surprise en découvrant son nez en sang. Alors que James se chargeait d'aider la jeune fille à descendre vers la terre ferme et madame Pomfresh, elle poussa Lily d'un coup de genoux.
- Lève-toi, laisse-moi passer.
- Quoi ?
- Je vais la rejoindre.
- Dorcas...
- Bouge !
Lily obtempéra et Dorcas s'empressa de dévaler les marches sous les regards curieux des élèves qui bordaient l'allée.
Quand elle arriva sur le bord du terrain, James tenait Lucinda par les épaules et Pomfresh se dirigeait droit vers eux, les pans de sa cape claquant au vent.
- Potter ! Je croyais vous avoir demandé de limiter les contacts entre vos joueurs et Serpentard par Merlin !
- Adrian ne l'a pas fait exprès, on est désolé !
- Oh taisez-vous un peu, le rabroua l'infirmière. Vous allez bien, miss Talkalot ?
Dorcas n'avait pas vu avec la distance mais la blonde avait aussi une coupure sur le front, juste au-dessus de l'arcade sourcilière, qui saignait abondamment.
- A votre avis ? Articula-t-elle. Faites votre boulot, j'ai un match à gagner et une équipe adverse à exterminer !
- Eh ! Protesta James.
- Je n'ai ni les potions ni les crèmes pour vous soigner avec moi, il faut que vous alliez à l'infirmerie.
- Quoi ? Non ! Le match...
- ...n'est qu'un match, coupa Pomfresh. Votre santé importe plus.
- Ce n'est qu'une égratignure !
- Vous aurez de la chance si votre nez n'est pas cassé, miss.
- Alors jetez-moi un sort pour le réparer.
- Ça n'arrêtera pas les saignements, objecta-t-elle avec fermeté. Vous allez devoir venir avec moi, il est hors de question que je vous laisse voler dans cet état. Vous seriez un danger aussi bien pour vous que pour les autres.
D'après le regard de Lucinda, ça ne l'aurait pas dérangé de rentrer dans quelques Gryffondor pour passer ses nerfs.
- D'accord, céda-t-elle. Mais je tiens à dire que je le fais à contre ma volonté !
- J'en prends bonne note, dit Pomfresh sans paraître plus émue que nécessaire. Suivez-moi. Ah et je vois que miss Meadowes est là aussi. Ça tombe bien, vous l'aiderez à marcher.
Lucinda se retourna, surprise, et son expression paru s'adoucir. Dorcas lui sourit.
- Retour à l'infirmerie ensemble ? Plaisanta-t-elle. C'est un peu un voyage romantique vers le passé, non ?
- Une rencontre épique, approuva Lucinda, la main toujours plaquée sur son nez en sang. Quant à toi Potter je te souhaite de tomber de ton balai avant la fin du match et tu diras à Connelly qu'il n'a pas intérêt à me croiser pendant au moins les trois prochains mois !
- J'en prends bonne note, dit James en imitant la voix haut perchée de Pomfresh.
Il leur fit un petit signe de la main avant de remonter sur son balai et de s'envoler. Dorcas le suivit des yeux alors que le stade éclatait en applaudissement en le voyant revenir et comme d'habitude elle secoua la tête en constatant son aisance dans les airs.
L'infirmerie n'avait pas changé depuis l'année dernière quand elle y avait fait ses travaux d'intérêt général pour avoir balancer un coup de poing à Mulciber. Sûrement l'acte dont elle était le plus fier durant ses dix-huit ans d'existence sur cette terre. Elle n'arrivait toujours pas à comprendre comment il avait réussi à s'en sortir avec une simple suspension temporaire après avoir participé aux agressions des nés-moldus du groupe de Rosier.
- Meadowes, au lieu de rester plantée là venez m'aider, appela Pomfresh.
Dorcas reporta son attention sur ce qui passait. Lucinda était assise sur un des lits le long du mur et l'infirmière appuyait une compresse contre la coupure sur son front pour essayer d'arrêter le sang.
- Je vais devoir aller chercher une potion, dit-elle. Meadowes, vous pouvez maintenir ça le temps que j'aille à la réserve ? Je pense avoir donné le dernier flacon à une élève de deuxième année qui s'était planté sa plume dans la paume. Je reviens dans une minute.
Elle ne lui laissa pas le temps de répondre et sorti de la pièce d'un pas pressé. Dorcas s'approcha de Lucinda et se glissa entre ses jambes, ses genoux cognant contre ses hanches, et posa délicatement la compresse contre sa peau. Lucinda serra les dents. Le balai ne l'avait vraiment pas loupé mais c'était peut-être pour le mieux. Seul Sirius avait été près d'eux lors de la collision et il n'aurait pas pu les rattraper tous les deux si Lucinda était aussi tombée.
- Tu sais, souffla Lucinda, je devrais t'engager comme mon infirmière personnelle.
- Si tu faisais plus attention au Quidditch ça n'arriverait pas... Qu'est-ce que c'était l'année dernière ? Une commotion à cause d'un cognard ?
- Ce n'était pas de ma faute non plus ! Mulciber me l'avait envoyé !
- Quel imbécile... Il aurait dû se faire expulser définitivement.
- Pour un simple cognard ?
Dorcas suspendit son geste et dévisagea sa petite amie.
- Luce, ne fais pas l'idiote.
- Je sais, je sais... soupira-t-elle dramatiquement. Tu détestes tous les Serpentard, si tu le pouvais tu aurais déjà frappé Rosier et jeté un sort à Mulciber, Avery, Black, Elizabeth et toute leur clique.
- Ne le dis pas sur ce ton !
- Quel ton ?
- Comme si j'avais tort d'être en colère contre eux tous, comme s'ils étaient du bon côté !
Lucinda expira profondément. En vérité, elles n'avaient jamais eu cette conversation ensemble, ou elles avaient évité de l'avoir. Quand elles se retrouvaient toutes les deux les rares fois où leurs emplois du temps coïncidaient ou quand elles n'étaient pas occupées avec leurs amies respectives, elles parlaient de leurs goûts, de leurs envies pour l'année prochaine, de leurs familles parfois (surtout Dorcas et ses parents) et s'embrassaient beaucoup. Mais elles ne parlaient pas ni de politique ni de la guerre dehors et encore mois de ceux qui la faisaient, quel que soit leur camp.
- Dorcas, honnêtement tu ne les connais même pas...
- Parce que j'ai besoin de les connaître pour savoir qu'ils sont abjects ?
- Eh ! Je suis amie avec Sabine Travers et Elizabeth, j'ai fréquenté Rosier pendant plus d'un an et demi ! Avery et Black font partie de mon équipe !
- Et tu vas me dire qu'aucun d'entre eux ne soutient Tu-Sais-Qui ? Qu'aucun d'entre eux n'entrera chez les mangemorts après Poudlard ou ne considère les nés-moldus, comme Lily, inférieurs à eux ?
- Tu généralises !
- Tu ne réponds pas...
- Ecoute Dorcas, je vais te parler franchement et ne te mets pas en colère d'accord ? Je suis absolument contre toutes ces conneries de suprématie du sang, tu le sais, mais tu ne connais pas ces personnes, tu ne sais pas ce qu'elles ont vécue pour en arriver là.
- Alors quoi ? Rosier est un con parce que son père ne lui accordait pas assez d'attention et sa mère buvait quelques verres en trop ? Ce n'est pas une excuse. James est la preuve qu'on peut venir d'une vieille famille de sang-pur sans être raciste, Sirius est la preuve qu'on peut s'émanciper des idéaux de sa famille et je suis la preuve que des problèmes avec ses parents ne suffisent pas à justifier d'entrer dans les rangs d'un mage noir !
- Non, je dis juste que c'est facile de prendre les bons et les mauvais exemples. Je suis la preuve que tous les Serpentard de leur groupe ne partage pas leur opinion, Livia Fawlay est la preuve que les élèves de ma maison peuvent tenir tête à Rosier. On entend plus les personnes comme Rosier mais il y en a plein qui ne pensent pas comme ça.
Dorcas secoua la tête, butée.
- Mulciber est un con et Rosier est pire ! Sérieusement, Luce, tu ne peux pas les défendre...
- Je ne les défends pas, je les comprends et j'essaye de faire en sorte que tu comprennes aussi, objecta-t-elle. Et donnes-moi cette compresse, j'ai du sang dans les yeux.
- Oh désolé !
Elle tamponna doucement le visage de Lucinda pour essuyer le sang, coupable. Un court silence passa entre elles jusqu'à ce que Dorcas prenne sa main dans la sienne et entrelace leurs doigts, mettant sa fierté de côté.
- Très bien, dit-elle. Vas-y je t'écoute. Explique-moi la psychologie tordue de tes amis.
Un sourire amusé étira les lèvres de Lucinda.
- Je ne sais pas, je ne suis non plus dans leurs têtes, mais ils ne s'allient pas à Tu-Sais-Qui juste parce qu'ils aiment martyriser des gens innocents. A part Mulciber peut-être, ajouta-t-elle devant l'expression sceptique de la brune. Les vieilles familles perdent de leur influence, de leur importance, et Tu-Sais-Qui leur fait miroiter la puissance en affirmant que c'est la faute des nés-moldus qui ne sont pas de « vrais » sorciers. Il joue sur les peurs des gens ou menacent les proches et les familles. Et puis tous les élèves qui veulent rejoindre les mangemorts, et qui ne sont pas que des Serpentard je te rappelle Kevin Mells l'année dernière, c'est juste une façon de se sentir accepter. Ils trouvent un sentiment d'appartenance au sein des mangemorts, alors que le Ministère fait la sourde oreille depuis des années. Ils veulent utiliser leur magie comme bon leur semble aussi. Prends une personne comme Rogue qui est rejeté par tout monde, qui subit des moqueries tous les jours. Pourquoi il se tourne vers la magie noire, vers les mangemorts ? Parce qu'ils lui disent ce qu'il veut entendre, qu'il appartient enfin à un groupe et que ses talents seront mis en valeur. Ils emploient la mauvaise solution mais je dis juste que je cherche à les comprendre parce que sans ça tu ne pourras jamais essayer de les faire changer d'avis.
Dorcas se mordit la lèvre. Elle entendait bien ce que Lucinda lui expliquait mais elle n'arrivait pas à faire taire cette petite voix au fond de son esprit qui lui soufflait que les personnes comme Rosier et Mulciber n'avaient aucune excuse.
- Luce ?
- Hum ?
- Tu peux être amie avec qui tu veux, ça ne changera pas ce que je ressens pour toi. Je t'aime.
Le sourire de Lucinda s'agrandit.
- Ça, ça veut dire que je ne t'ai pas convaincu mais que tu ne veux pas me blesser en me le disant ?
- Peut-être bien, rit Dorcas.
Elle se pencha en avant et l'embrassa avec passion. Lucinda ouvrit un peu plus les jambes pour lui permettre de se rapprocher mais se recula brusquement en portant la main à son front.
- Aïe !
Dorcas éclata de rire.
- Balai 1 - Luce 0 ! Dit-elle.
- Oh va te faire voir...
Chapitre XI : Mauvaise journée
Un coude posé sur le coin de la table, Remus joua distraitement avec sa fourchette sans toucher à son petit déjeuner. Ce n'était pas qu'il n'avait pas faim, après tout il était un adolescent de dix-sept ans en pleine croissance donc par définition il avait toujours faim, mais la conversation qu'il avait eu avec Sirius hier soir lui restait dans la tête. Ça, et le fait qu'Anaïs était dans son champ vision, assise à la table des Serdaigle.
Remus détourna les yeux. Ce n'était pas le moment de se laisser distraire. Il voulait sincèrement prendre le temps de réfléchir à la confession que Sirius lui avait faite hier. C'était un peu avant minuit et James, Peter et Frank étaient encore dans la salle commune en train de terminer un devoir pour le cours d'option Soin aux Créatures Magiques qu'il avait lui-même terminé et que Sirius n'avait évidemment pas à faire puisqu'il faisait Etudes des Moldus et Divination. Ils étaient donc tous les deux seuls dans le dortoir pour une fois. Remus avait bien vu que quelque chose perturbait Sirius et il l'observait du coin de l'œil par-dessus son livre, sans dire un mot. Au bout d'une demi-heure, Sirius avait paru enfin mettre fin à son débat intérieur pour lui demander de l'aide.
Il ne pouvait pas dire qu'il était réellement surpris. Il savait pertinemment que Sirius éprouverait bientôt le besoin de partir de chez les Potter, d'avoir un appartement à lui. Il n'avait, par contre, pas venu venir ses doutes concernant James. Pourtant, il aurait dû y penser lui-même plus tôt. La lettre que James lui avait envoyé le lendemain de la fugue de Sirius et son arrivée à Godric's Hollow était encore cachée dans le tiroir de son bureau, chez lui. Il se rappelait parfaitement de son contenu, de la rage de James envers les Black et sa façon de répéter que désormais sa maison était aussi celle de Sirius. Connaissant James, il allait avoir une assez forte réaction en apprenant la nouvelle.
Malgré tout, il voulait aider Sirius avec ses doutes et son conflit entre son envie d'indépendance et sa volonté de ne pas blesser James. D'habitude, Sirius se tournait automatiquement vers ce dernier quand il avait un problème et il était plutôt content qu'il lui fasse confiance.
- Remus ?
La voix de Lily le tira de ses pensées.
- Pardon ?
- Remus, fais quelque chose toi !
Remus observa les autres une seconde, histoire de comprendre ce qui passait avant que la lumière ne s'allume dans son esprit. Il soupira puis se tourna vers James qui arborait une tête de boursouflet battu.
- Bon, écoute-moi, tu dois rester fort, déclara-t-il de sa plus belle voix de préfet. Quand de mauvaises choses arrivent, il faut savoir en tirer le meilleur parti pour s'améliorer dans la vie, d'accord ?
- Mais il n'y pas plus de tarte au citron, y'a rien de positif là-dedans. Rien !
Remus se tourna vers Lily.
- J'ai essayé, dit-il avec lassitude.
- C'était une belle tentative, reconnut-elle. Tu vas manger ce muffin au chocolat ou pas ?
- Euh...oui.
- C'est ton troisième ! Comment est-ce que tu fais ?
- J'aime le chocolat, répondit-il avec évidence.
James éclata de rire.
- Lunard, tu es chocoholic !
- Ce mot n'existe pas...
- Et alors ?
Il n'eut pas le temps de répondre. Son attention fut détournée par un mouvement à la table des professeurs et il se rendit compte avec une seconde de retard que Dumbledore s'était levé, attendant le silence paisiblement.
Dès que les murmures se furent évanouie dans la Grande Salle, il prit la parole.
- Je suis désolé de vous interrompre au milieu de votre repas, commença-t-il d'un ton léger, j'ai quelques informations à vous communiquer sur le Tournoi de Poudlard. Tout d'abord, je tiens à féliciter une nouvelle fois les quatre élèves qui ont participé à la première épreuve de métamorphose, ils s'en sont tous sorti brillamment. Serpentard est actuellement en tête du classement avec 150 points, suivi de Gryffondor avec 120 points, Serdaigle prend la troisième place avec 80 points et enfin en dernière position, provisoirement je n'en doute pas, Poufsouffle avec 50 points. N'oubliez pas que les points gagnés par les maisons tout au long de l'année seront ajouté à ceux du Tournoi afin de déterminer le gagnant.
Les élèves hochèrent la tête de concert.
- Bien, reprit le directeur. Après ces rappels importants, je vous informe que la date pour la deuxième épreuve a été choisi. L'épreuve de botanique aura donc lieu dans deux semaines, le 16 novembre. J'espère que les quatre élèves participants seront prêts d'ici là, il est facile de se perdre mais je suis certain que chacun d'entre eux arrivera à trouver le chemin vers la réussite. Sur ces bonnes paroles, je vous souhaite un bon appétit et vous recommande chaudement les petites tartelettes à la fraise qui sont délicieuses.
- Elles le seraient encore plus si elles étaient au citron, grommela James. Aïe ! Tu viens de me frapper ?
- Non, mentit Lily l'air de rien. Mon pied a juste dérapé...
Un battement d'aile empêcha Lily de se justifier plus amplement. Elle leva la tête juste à temps pour se décaler et ne pas se faire heurter par une chouette aux plumes blanches mouchetées de tâches marrons.
Remus avait presque oublié que c'était déjà l'heure du courrier. Il savait qu'il ne recevrait rien cette semaine, sa mère lui avait envoyé un colis remplis de chocolat mardi dernier (même s'il n'en restait plus beaucoup après que Peter y ait pioché « une ou deux chocogrenouilles ») et il regarda avec envie Alexia déballer un paquet de bonbon moldu.
- T'en veux un ? Demanda-t-elle en remarquant son regard.
- Je vais d'abord terminer mon muffin au chocolat, sourit-il. Eh James, c'est pas ton hibou ?
Surpris, James se retourna. C'était effectivement le hibou de sa mère qui venait de s'engouffrer par la fenêtre et descendait vers eux. Il se posa en douceur sur la table devant James avant de lui tendre la patte d'un air digne.
- Remus, file-lui un bout de muffin, il sera content.
- Quoi ? Mais c'est mon muffin !
- Il ne repartira pas si je ne lui donne rien.
- Tu m'énerves, Cornedrue, marmonna-t-il en donnant le reste de son petit déjeuner au hibou.
James rigola en ouvrant la lettre alors que le volatile repartait en direction de la volière, satisfait. Il la parcourut du regard une dizaine de seconde et son sourire s'effaça lentement de son visage. Fronçant les sourcils, il la relu une fois de plus. Remus, qui ne l'avait pas quitté des yeux, su que quelque chose n'allait pas en voyant ses épaules se tendre. Discrètement, il donna un coup de coude à Sirius et lui indiqua leur ami d'un mouvement de menton.
- C'est Euphemia ? Interrogea ce dernier.
- Oui...
Cette fois, même les filles arrêtèrent leur discussion. La voix de James avait tremblé sur ce simple mot et il paraissait plus pâle qu'il y a une minute.
- James ? Appela Lily. Tout va bien ?
- Je...
- James ?
- Mon père...je ne sais pas, il y a eu une attaque...
Sirius se redressa.
- Quoi ?
- Ma mère ne dit pas grand-chose, juste qu'il était en mission depuis hier soir et qu'elle a reçu un patronus ce matin très tôt. Il est à St-Mangouste, mais elle ne sait pas grand-chose de plus. Elle voulait me prévenir avant que je le lise dans la Gazette.
Effectivement, les quelques élèves qui avaient déjà reçu leur exemplaire du journal commençaient à chuchoter en jetant des regards peu discrets dans leur direction et Remus se pencha par-dessus la table pour se saisir de la lettre sans que James ne fasse un geste pour l'en empêcher. Aussitôt, Sirius et Peter vinrent lire par-dessus son épaule.
James,
Je dois me dépêcher de me rendre à l'hôpital et je suis désolée d'être aussi brusque mais je préfère que tu apprennes la nouvelle par moi plutôt que par la Gazette. Ton père a été blessé après être parti en mission hier avec plusieurs de ses collègues. Ne t'inquiète pas pour le moment, je ne connais pas la gravité de son état et je te promets de te donner des nouvelles quand les médecins m'en auront dit plus.
Le patronus qui m'a prévenu a été assez lapidaire et je ne sais pas ce qui s'est passé à l'heure actuelle. Surtout ne fais rien d'idiot et ne crois rien de ce que tu pourrais lire ou entendre jusqu'à ce que je recontacte.
Je t'aime fort,
Maman
Après avoir relu avec attention les mots d'Euphemia Potter, Remus reposa la lettre dont s'empressa de s'emparer Alexia pour que les filles puissent la lire à leur tour. James n'en paraissait pas gêné et regardait dans le vague, l'air déconnecté.
- Est-ce que ça pourrait être les mangemorts ? Se demanda Peter à voix-haute.
- Peut-être, répondit Remus prudemment, mais comme elle le dit, on ne connaît rien de la mission. Ça pourrait tout autre chose.
- Il y a quand même de fortes chances pour que le second en chef du Bureau des Aurors travaille sur la question de Tu-Sais-Qui, intervint Marlène avec douceur. La Gazette annonçait encore une disparition il y a deux jours.
Lily leva les mains.
- Et elle a aussi dit de ne pas écouter la Gazette tant qu'on n'aura pas plus d'informations...
- Je sais bien mais...
Brusquement, James bondit sur ses pieds. Ils levèrent tous la tête vers lui pour le dévisager.
- James...
- Je... J'ai juste besoin... s'étrangla-t-il.
Mais les mots moururent dans sa gorge et il tourna les talons, livide. Alors qu'il dépassait les tables des autres maisons, des murmures le suivirent jusqu'à ce qu'il quitte la Grande Salle, la tête basse et les mains fermement enfoncées dans ses poches. Remus était sûr qu'autrement elles auraient tremblé.
Un long silence s'abattit sur leur petit groupe.
- Je ne voulais pas... commença Marlène, coupable.
- Il vient d'apprendre que son père est blessé, possiblement dans un état grave, coupa Dorcas avec sa brusquerie habituelle mais bienveillante malgré tout. Tu n'y es pour rien, Marlène. Il avait juste besoin d'être seul.
- James n'a jamais besoin d'être seul, répliqua Lily. Ces deux mots sont même des oxymores ! Quelqu'un devrait aller le voir, non ?
Remus soupira.
- Il ne parlera qu'à une seule personne, déclara-t-il, fataliste.
Il y eut un moment de flottement puis à côté de lui, Sirius se leva, le regard dur, tandis que les autres le regardaient. Il embrassa doucement Alexia sur le front avant donner une tape dans le dos à Remus et il s'éloigna à son tour.
Comme James, le reste de la Grande Salle sembla le suivre des yeux mais il ne leur accorda aucune attention, passant les lourdes portes avec sa nonchalance coutumière.
**
*
Lorsque James atteignit la salle commune de Gryffondor, il s'étonna d'être essoufflé. En tant que sportif, il pouvait monter jusqu'en haut de la tour d'astronomie sans en être particulièrement affecté, mais il réalisa avec un temps de retard qu'il avait juste du mal à respirer depuis qu'il avait ouvert la lettre de sa mère, le ventre et la gorge noués par un sentiment indescriptible.
Ce n'était pas la première fois que son père était blessé. Petit, il l'avait vu revenir plus d'une fois de sa journée de travail avec des cicatrices ou des blessures qui mettaient toujours sa mère dans tous ses états. Pourtant, Fleamont la rassurait immédiatement, affirmant que ce n'était pas grand-chose. En grandissant, il avait compris que c'était un peu plus compliqué que ça.
Malgré tout, et c'était sans doute enfantin de sa part, son père lui avait toujours paru invincible. Il était celui qui allait arrêter les méchants, qui le protégeait... Ces derniers temps, il avait bien remarqué qu'il rentrait toutefois plus fatigué, les traits tirés, grimaçait lorsqu'il pliait le genou gauche à cause du sortilège qu'il avait reçu l'année précédente. Son père n'était pas techniquement vieux, mais il n'était pas tout jeune non plus. Ses parents l'avaient eu sur le tard alors même qu'ils s'étaient résignés à ne pas avoir d'enfant. C'était sans doute pour cela qu'il avait été autant aimé, autant gâté.
Avec l'envie de vomir, James se laissa tomber dans le canapé. Au moins il était seul, tout le monde étant en train de terminer le petit déjeuner. L'écriture de sa mère, désordonnée sûrement à cause de sa précipitation, jouait dans son esprit tandis qu'il se répétait la lettre pour essayer d'y chercher un indice. Rien. Comme sa mère l'avait dit, ils ne savaient rien pour l'instant. Son père pouvait soit être légèrement blessé soit proche de la mort.
James sentit les larmes lui monter aux yeux et il enfouit sa tête entre ses bras, les mains dans les cheveux et les jambes ramenées contre lui. Il resta dans cette position un long moment, même s'il ne savait pas combien de temps exactement, perdu dans ses pensées. A vrai dire il n'arrivait pas vraiment à « penser », c'était plutôt une angoisse sourde qui pulsait dans tout son corps et lui oppressait la poitrine.
- Cornedrue ?
Il reconnut la voix sans relever la tête. Trois personnes seulement l'appelaient ainsi et une seule d'entre elle aurait osé venir le chercher.
- Eh James...
Il sentit une main sur son épaule.
- Va-t'en, Patmol.
- Ne me dis pas que tu crois vraiment que je vais t'écouter ! Dit-il d'un ton faussement léger.
- Sérieusement, laisse-moi...
- James... Tu n'as pas à faire ça, pas avec moi. Ça va aller. Je suis sûr que ton père va bien.
- Comment tu pourrais le savoir ?
Un rictus se dessina sur le visage de Sirius.
- Quoi ? Tu n'as jamais entendu parler de mon don pour la divination ?
- Si, le jour où j'ai entendu parler du don de Lily pour le Quidditch.
- Touché.
James soupira et tourna la tête vers son meilleur ami.
- J'ai juste besoin d'être un peu seul...
- C'est faux. Ne t'isole pas comme ça, ça ne t'apportera rien.
- Tu es bien placé pour donner ce conseil, répliqua-t-il.
Il ne comptait plus les fois où il avait dû forcer l'armure que Sirius se construisait à chaque fois qu'il avait un problème avec sa mère, son frère, sa cousine...sa famille en générale, voire Alexia ou le monde entier.
- Et tu es bien placé pour savoir que comme toi je ne laisserais pas tomber. James, ajouta-t-il après un temps d'arrêt pour rassembler ses idées, ce n'est pas la première fois que ça arrive. Ton père n'a pas le métier le moins risqué qui soit...
- Il n'avait jamais été à St-Mangouste.
- Vraiment ?
- Bon si peut-être deux ou trois fois, mais jamais au point que ça inquiète ma mère et qu'elle m'envoie carrément une lettre.
- Elle-même a dit qu'on ne savait rien, il va sans doute parfaitement bien. Pas de nouvelles, bonnes nouvelles non ?
James ne paraissait pas convaincu. Agité, il se releva en s'ébouriffant les cheveux. « Rien ». Ce mot commençait à l'agacer. C'était justement le fait de ne rien savoir qui l'inquiétait et pourtant ces amis semblaient croire que c'était une bonne chose.
- Vous allez le répéter combien de fois ?
- Jusqu'à ce que tu te calmes...
- Je ne veux pas rester calme !
- Cornedrue, crois-moi, je comprends ce que tu ressens mais...
- Tu ne sais pas ce que c'est, coupa James dans un filet de voix.
Sirius le dévisagea.
- Je connais ton père depuis sept ans, je vis avec vous ! Evidemment que je me soucie de ce qui peut lui arriver.
- Non... Tu ne sais pas ce que c'est de s'inquiéter pour ces parents !
Ses mots parurent se suspendre au-dessous d'eux et résonner dans la pièce vide. Sirius encaissa le coup mais il ne put empêcher une légère tristesse de transparaître sur ses traits.
- Désolé...Je ne voulais pas dire ça. Patmol...
James regarda Sirius se lever à son tour, une expression indéchiffrable plaquée sur le visage tandis qu'il secouait la tête.
- Je vais te laisser tout seul dans ce cas, murmura-t-il. Si un hibou arrive je viendrais te chercher.
- Sirius !
A nouveau seul, James resta planté où il était, frustré. Cette fois-ci la solitude n'avait rien de réconfortant. Comme souvent, il avait parlé avant de réfléchir. Il n'était pas habitué à ce renversement des rôles entre lui et Sirius, et toute la situation le rendait irritable. Il avait aussi du mal à dormir depuis plusieurs nuits, stressé aussi bien par la Tournoi que par des sortes d'images de l'attaque de Pré-au-Lard qui lui revenaient en rêve. Ce n'était pas rare qu'il se réveille à trois heures du matin et mette une seconde à se rappeler que Sirius était bien vivant ou que Lily n'avait pas été touché par un sortilège.
En parlant de Lily, elle franchit le trou du portrait comme si elle savait qu'il venait de penser à elle. Elle hésita avant de s'arrêter là où elle était et de le regarder droit dans les yeux. James lui en fut reconnaissant, elle lui laissait son espace, mais en même temps il savait qu'il ne s'en sortirait pas avec une blague ou autre.
- Tu ne vas pas bien... souffla-t-elle.
- Toi aussi tu as un don pour la divination ?
- Non, j'ai juste croisé Black qui avait l'air d'un chien battu.
Sans pouvoir s'en empêcher James éclata de rire.
- Qu'est-ce que j'ai dit ? S'étonna Lily, confuse.
- Rien... Désolé...
- Ok... Tu viens avec moi ?
- Où ça ?
- Quelque part où tu iras mieux !
**
*
- La cuisine ? S'exclama James une fois devant le portrait de la fameuse coupelle de fruit. Tu m'as emmené en cuisine ?
- Tu as accepté de me suivre, souligna-t-elle en souriant. Allez viens !
James lui emboîta le pas. Il ne savait pas trop pourquoi il avait décidé de la suivre hors de la salle commune, sûrement parce que les élèves allaient revenir bientôt après le petit déjeuner, parce qu'il avait peur d'affronter les Maraudeurs et les filles, parce que c'était tout simplement Lily et qu'il n'allait pas louper une occasion d'être ensemble.
Dix minutes plus tard, il se retrouva donc en face d'elle, une tasse de chocolat chaud dans les mains et une part de tarte entre eux.
- Tu m'as amené ici pour me faire manger du chocolat ?
Lily sourit.
- Le meilleur remède !
- Ça fait grossir, objecta-t-il en entrant dans son jeu.
- Je suis une Gryffondor. Je ne recule pas devant le danger, je l'affronte, dit-elle avant de mordre à pleine dent dans la tarte.
- La belle excuse pour ne pas culpabiliser.
Il attrapa une fourchette malgré tout et se força à manger un peu. Avec l'arrivée du hibou ce matin, il n'avait pas réellement pris de petit déjeuner.
- Lily ?
- Oui ?
- Pourquoi tu fais ça ? Pour moi je veux dire ?
Lily garda les yeux rivés sur sa tasse, jouant avec l'anse sans s'en rendre compte. Elle se renfonça un peu plus dans son siège, mal à l'aise, et se servit une nouvelle part de tarte avant de répondre :
- Parce que j'ai vu ton expression tout à l'heure quand tu as reçu la lettre. Tu... Je ne t'avais jamais vu perdre tes moyens avant, même à Pré-au-Lard. Je ne sais même pas ce que tu peux ressentir tous les jours en sachant que ton père doit les affronter. Quand mes parents me demandent des détails sur la politique ou la situation du monde des sorciers, je... je ne leurs mens pas, je...
- Tu ne dis juste pas la vérité, compléta-t-il.
- On peut dire ça. Et puis, tu as été là pour moi l'année dernière pendant l'attaque et après toute l'histoire avec Kevin Mells. Tu n'étais pas obligée de rester avec moi pendant les interrogatoires mais tu l'as fait. Je suppose que je peux bien faire pareil aujourd'hui si tu as besoin de quelqu'un.
James ressentit une fois de plus sa gorge se serrer et une envie de vomir. Il avait repoussé Sirius tout à l'heure mais laissait Lily rester. Lily et sa douceur, Lily et son sourire, Lily et sa compréhension. Lily qui n'était pas brisée, pas encore. Il avait l'impression qu'il allait se mettre à pleurer d'une seconde à l'autre et il posa la question qui le hantait depuis l'ouverture de la lettre :
- Et s'il meurt ?
- Ne dis pas ça...
- Mais...
Brusquement, ils entendirent un bruit de course précipité juste avant que Remus entre en fracas, Sirius et Peter dans son dos. Tous les trois avaient la respiration haletante comme s'ils venaient de courir jusqu'à la cuisine.
- James ! Ta mère vient d'envoyer une nouvelle lettre !
Chapitre XII : Deuxième Epreuve
James arracha presque la lettre des mains des Sirius, le cœur au bord des lèvres.
- Qu'est-ce qu'elle dit ? Mon père va bien ?
- On ne l'a pas lu... répondit Peter, nerveux. On est venu dès que le hibou l'a apporté.
La lettre paraissait peser une tonne dans sa main et il hésita à l'ouvrir. Par-dessus son épaule, il sentit la présence de Lily qui s'était levé pour venir à ses côtés. Inspirant profondément, il déplia le parchemin. La première chose qui lui sauta aux yeux fut l'écriture de sa mère, bien plus soignée que la première fois. Visiblement, elle ne l'avait pas écrite dans la précipitation.
James,
Désolé si je t'ai inquiété avec ma première lettre. Il fallait que j'aille le plus vite possible à l'hôpital et je n'ai pas pris le temps de te rassurer.
Ne t'inquiète pas, ton père va bien. Les médicomages ont dit qu'il avait subi quelques sortilèges de combat mais qu'ils seraient en mesure de le soigner, il pourra sortir demain ou après-demain si tout se passe bien. D'après lui, ils menaient une mission de reconnaissance pour suivre une piste, des informations anonymes que les Aurors avaient réussi à obtenir, mais son équipe et lui ont attaqué une fois arrivé sur les lieux. Heureusement personne n'a été grièvement blessé.
Il t'enverra une lettre lui-même quand il rentrera à la maison, je te le promets. Nous avons tous les deux hâtes de te revoir à Noël. Embrasse Sirius, Remus et Peter de notre part.
On t'embrasse fort,
Maman.
Ce fut comme si le poids qui lui écrasait la poitrine s'allégeait soudainement. Son père allait bien. Son père était vivant.
- Il va bien, annonça-t-il. Les médicomages disent qu'il pourra rentrer à la maison demain.
- Merlin... lâcha Sirius, soulagé.
James ressentit un élan d'affection sans borne pour ses amis dont les visages avaient l'air aussi heureux que le sien devait l'être. Peter sourit et tapa dans la main de Lily en riant tandis que Remus lui donna une grande tape dans le dos.
- Eh... C'est une tarte au chocolat ?
Lily parut fière d'elle.
- Le meilleur remède, dit-elle. Un ami m'a dit ça un jour.
- Il devait être très intelligent.
- Tu viens de t'auto-complimenter ? Intervint Peter.
Même la cuisine paraissait plus lumineuse à James, ce qui n'avait pas vraiment de sens mais qu'importe. Alors même que la tension quittait son corps, la fatigue lui tomba dessus, comme un rappel de ses nuits trop courtes ces derniers temps.
- Vous savez quoi ? Ça mérite une fête ! Je vais aller préparer la salle commune !
- Quoi ? Peter ! Non ! Tu ne peux... commença Lily avant de lever les mains au ciel, exaspérée. Remus, viens avec moi, on ne peut pas le laisser faire.
Ils se précipitèrent à la suite de Peter, hors de la cuisine. James trouvait amusant que Lily se soit instinctivement tourné vers Remus, oubliant au passage que lui-même était préfet en chef. Apparemment, les habitudes étaient dures à perdre.
Il ne restait plus que Sirius avec lui, assis tranquillement à la table et terminant la part de tarte laissée par Lily. Son meilleur ami lui jeta un regard significatif. James déglutit en se souvenant de ses paroles il y a à peine une heure et il se passa une main nerveuse dans les cheveux. Même si Sirius avait tenté de paraître désinvolte, il savait qu'il l'avait blessé en le repoussant, tout simplement parce que ce n'était pas comme ça entre eux. Pas depuis leur violente dispute en cinquième année après toute l'histoire avec Rogue et la pleine lune.
- Patmol... dit-il maladroitement.
- Tu n'as pas besoin de le faire, coupa Sirius.
- Faire quoi ?
- T'excuser. Je comprends, tu t'inquiétais pour ton père...c'est bon.
James vint s'assoir en face de lui, l'air sérieux.
- Non. Justement ce n'est pas bon. Je n'aurais pas dû dire ça.
- James...
- A quoi ça sert que je te répète qu'on est frère ou qu'on est une famille si dans un moment comme celui-là j'agis comme je l'ai fait ?
- James, tu dramatises.
- Non, je le pense vraiment. Tu te souviens en cinquième année ? Après l'incident avec le saule cogneur et Rogue ? On s'était juré de se parler, de ne plus garder nos problèmes pour nous, de ne plus se repousser... Et j'ai fait exactement le contraire.
Frustré, Sirius secoua la tête avant même qu'il n'ait fini de parler. Evidemment qu'il se souvenait de leur cinquième année. Les pires semaines de sa vie. Ce qui avait commencé comme une simple blague contre Rogue s'était transformé en une des plus violentes disputes entre les Maraudeurs.
- Sérieusement, James, tu ne me dois rien. Tu n'avais juste pas envie de parler à ce moment-là c'est tout, et puis ce n'était même pas faux. Mes parents pourraient mourir, je m'en ficherais totalement. Je ferais même peut-être une fête pour célébrer ça !
- Avec des banderoles ?
- Et des confettis !
James secoua la tête. Il savait au fond de lui que les sentiments de Sirius à l'égard de ses parents étaient plus complexes qu'il tentait de le faire croire mais il laissa couler.
- Ça n'enlève rien au fait que je n'aurais pas dû...
- Ok, écoute-moi, coupa Sirius faussement exaspéré. Tu ne comprends pas ce que je voulais dire. Tu as fait déjà tant de choses pour moi, tes parents aussi... Merlin, Godrics Hollow est plus devenu une maison pour moi en un an que Square Grimmaurd le reste de ma vie ! Alors si juste pour cette fois tu avais besoin de t'inquiéter pour tes parents, parce que ce sont les tiens soyons réalistes, ça me va. Je suis là pour toi aussi. Et je vais m'arrêter là, notre conversation devient vraiment trop niaise à mon goût. Merlin, on est les Maraudeurs oui ou non ?
James sourit et se contenta de continuer à manger sa tarte. Si Sirius ne voulait pas entendre ses excuses directement, très bien, il n'allait pas le forcer. Son meilleur ami n'avait jamais aimé les discussions larmoyantes, surtout lorsqu'il en était le centre. C'était un paradoxe de Sirius : il adorait se mettre en avant, un peu trop pour son ego -mais James n'allait pas être celui qui ferait de commentaire sur ce point- sans jamais en révéler plus sur lui que nécessaire.
Ils repartirent quelques minutes plus tard vers la tour de Gryffondor pour découvrir que malheureusement Lily et Remus avaient réussi à dissuader Peter d'organiser une fête.
**
*
Deux semaines plus tard, les Maraudeurs descendirent prendre leur petit déjeuner en traînant des pieds. James avait passé une partie de la nuit à écrire à ses parents pour s'assurer que son père allait vraiment bien et les autres, par pure solidarité, l'avaient attendu avant d'aller se coucher. Son père avait beau être sorti de l'hôpital depuis plus d'une dizaine de jour, il n'avait toujours pas repris le travail, ce qui faisait que James ne passait pas une journée sans prendre de ses nouvelles.
Les filles étaient déjà attablées en bout de table, près des petits pains au beurre, et plus étonnement à côté de Mary McDonald. En face d'elles, Adrian Connelly, l'attrapeur de l'équipe, n'avait pas d'assiette devant lui mais trois tasses de thé dépareillées et un énorme grimoire, soutenu par la cruche de lait vers laquelle lorgnait Dorcas.
- Qu'est-ce qui se passe ici ? Demanda Remus.
- La seconde épreuve est prévue pour aujourd'hui, expliqua Mary. C'est à mon tour de passer en Botanique...
- Ah...J'avais complétement oublié... avoua James. Désolé Mary, on ne t'a pas beaucoup aidé...
- C'est pas grave. J'ai entendu ce qui était arrivé à ton père, la Gazette en a encore parlé ce matin. Je comprends que tu n'aies pas pu assurer ton rôle de coach, dit-elle en souriant. Adrian t'a remplacé.
- Merci, Connelly. Même si je suis irremplaçable, j'apprécie le geste !
Adrian releva les yeux de l'une de ses tasse de thé.
- Tu me connais, je ferais tout pour mon cher capitaine.
- Je ne comprends toujours pas pourquoi vous avez besoin d'un grimoire et de tasse de thé pour l'épreuve, commenta Peter.
- Adrian essaye, et je dis bien essaye, de deviner en quoi va consister l'épreuve et comment je pourrais la gagner grâce à la divination.
- Tu n'avais pas arrêté la divination cette année ?
- Si, reconnut Adrian. Mais je me souviens encore un peu de mes cours de troisième année donc ça ne devrait pas être bien compliqué...Black, qu'est-ce que tu vois là ? Un agneau ou des caches-oreilles ?
Sirius vint se placer derrière lui et observa par-dessus son épaule.
- Personnellement je pencherais plus pour un pull à trois manches...
- Génial, s'exclama Mary. Je sens que cette épreuve va être géniale.
- Tu vas sûrement devoir affronter un agneau qui porte des caches-oreilles tout en tricotant un pull à trois manches, résuma Alexia. Rien d'insurmontable franchement.
- Pourquoi est-ce qu'un agneau aurait plusieurs caches-oreilles ? Répliqua Alice. Il n'a qu'une paire d'oreille !
- Est-ce que tu te rends compte que ça n'a aucun sens ? Intervint Marlène en avalant une cuillère de céréales. Je suis sûre que de toute façon Dumbledore a encore laissé un indice quelque part, comme la dernière fois, et qu'on n'a rien capté !
James tenta de se repasser dans la tête le discours du directeur quand il avait annoncé la deuxième épreuve, mais sa mémoire lui fit défaut. De toute façon, il était persuadé que même s'il s'en était rappelé il n'aurait pas compris l'énigme concocté par Dumbledore.
- Tu dois affronter qui déjà ?
- Tiberius Ackerley, Dymphna Zabini et Bertha Jorkins, cita Mary en comptant sur ses doigts. Vous en pensez quoi ? Ils sont bons en botanique ?
- En tout cas, ils sont nuls en divination, décréta Adrian qui était passé au chapitre suivant du grimoire et à sa troisième tasse.
Lily se tourna vers Mary, rassurante.
- Je ne connais pas trop leur niveau, ils sont tous en sixième année. Par contre je sais que toi, tu es la meilleure de notre maison. Tu n'as pas à t'en faire. Tu pourrais aller voir les membres du club de Botanique sinon, juste pour avoir un ou deux conseils ?
- On a un club de Botanique nous ? S'étonna James, stupéfait. Ça existe ?
- Merlin, Potter... Est-ce que tu t'intéresses à autre chose qu'au Quidditch ?
James eut envie de répondre « oui, à toi », mais il se mordit la langue au dernier moment. Il s'était promis d'être plus mature cette année, et surtout il avait affirmé à Lily qu'il ne la draguerait plus à chaque occasion, qu'il lui laisserait « de l'espace » comme disait Remus. Et jusqu'ici, sa technique avait l'air de plutôt bien fonctionner. Certes, elle n'était pas exactement sous son charme mais ils arrivaient à tenir une conversation sans se disputer, ce qui était en soi un large progrès.
Ils terminèrent leur petit-déjeuner tous ensemble, alternant entre les suppositions pour l'épreuve et les prédictions farfelues d'Adrian qui commençait à avoir le teint verdâtre à force de boire du thé depuis une heure, à moins que ça ne soit à force de faire tourner ses tasses dans le sens inverse des aiguilles d'une montre puis de de fixer intensément la bouillie de feuilles ramollies, lesquelles produisaient une douce vapeur à l'odeur douçâtre et écœurante.
- C'est un berret ça ? Non ?
- Si tu fermes l'œil gauche et que tu le regardes la tête à l'envers, oui sans doute, se moqua Sirius.
**
*
Il s'avéra, deux heures plus tard, que l'épreuve ne comportait ni agneau, ni berret, et encore moins de pull à trois manches.
Toute l'école avait reçu comme consigne de se rassembler dans les gradins du terrain de Quidditch...dont le terrain n'était plus vraiment un terrain, à la grande horreur de James. Un labyrinthe végétal se dressait désormais sur la pelouse soigneusement entretenue par les elfes et les élèves pouvaient voir l'intérieur grâce à leurs places en hauteur. Les quatre membres des équipes de chaque maison se tenaient en ligne devant l'entrée, près de Dumbledore. Ils portaient tous leur uniforme ainsi qu'un sac à dos, attendant fébrilement les instructions.
Ces dernières ne tardèrent pas à arriver car la voix de Dumbledore s'éleva brusquement :
- Bonjour à tous ! Je suis ravie de vous retrouver aujourd'hui pour cette deuxième Epreuve du Tournoi de Poudlard. L'épreuve de Botanique sera très simple...
Mary eut envie de lui dire que si l'épreuve était si simple que ça, alors ses paumes n'auraient pas dû être si moites d'appréhension.
-... Comme vous pouvez le voir, les professeurs et moi-même avons conçu ce labyrinthe végétal. Le but est de le traverser, ni plus ni moins. Qu'importe le chemin que vous emprunter, le premier à ressortir se verra attribuer les 150 points. Dans votre sac à dos se trouve quelques objets qui pourront vous aider face aux différentes plantes qui peuplent le labyrinthe. Certaines vous aideront, certaines seront des obstacles. Pour réussir cette épreuve, vous devrez faire preuve d'une grande connaissance en botanique afin de connaître et d'analyser les différentes propriétés des plantes. N'oubliez pas, chacune d'entre elles pourraient vous servir de plus d'une façon... Ah ! Et j'allais presque oublier : vous devrez traverser le labyrinthe sans baguette.
- Sans baguette ? Répéta Dymphna d'une voix aigüe. Vous voulez dire...sans magie ?
- C'est exact, miss Zabini. Comme je l'ai dit, ce ne sont pas vos aptitudes magiques qui sont testées ici, mais votre connaissance des plantes ainsi que votre capacité à vous en sortir sans avoir recours à la magie.
Il promena son regard bleu sur chacun d'entre eux et Mary resserra instinctivement ses doigts autour de sa baguette, comme si une liane ou une branche d'arbre allait surgir pour la lui arracher des mains.
- Bien, maintenant que toutes les règles ont été exposé, veillez donner votre baguette à votre directeur de maison. Vous les récupérez à la fin de l'Epreuve.
McGonagall se contenta d'un hochement de tête qui devait être pour elle un encouragement en récupérant sa baguette, et Mary vit du coin de l'œil le professeur Slughorn tapoter la joue de Dymphna qui paraissait vouloir lui mordre la main (ou lui casser le poignet).
Finalement, ils se mirent tous en ligne devant l'entrée du labyrinthe. Mary inspira un grand coup, puis, au signal du directeur avança avec les autres. Quand ils entrèrent à l'intérieur, la luminosité se réduisit fortement et un courant d'air s'engouffra autour d'eux. Ce n'était pas vraiment angoissant à proprement parler, la végétation qui les entourait était...chaleureuse ? Mary ne savait pas si on pouvait réellement qualifier des buissons d'amicale, mais c'est ce qu'elle ressentait au sein du labyrinthe. L'épreuve serait sans doute difficile, mais pas au point de mettre leur vie en danger. De l'autre côté des hautes haies, elle pouvait entendre les élèves dans les gradins qui criaient des encouragements et elle crut même reconnaître la voix de James dans le lot.
- Bon, commenta Tiberius Ackerley en regardant tournant sur lui-même pour observer. On ne va rester planter là hein ?
- On ne voudrait pas prendre racines, plaisanta Mary, tendue.
- Oh ! J'aime tes jeux de mots, McDonald ! Si on n'était pas en compétition je te donnerais un coup de pouce rien que pour ça !
Mary sourit.
- Ce n'est pas vos blagues qui vont nous faire avancer, dit Dymphna. On ferait mieux de se séparer, chacun de notre côté.
- Vous êtes sûrs ? Marmonna Bertha, l'air inquiet.
- Certaine. La dernière chose dont j'ai envie c'est de rester coincée dans un labyrinthe avec toi.
Sur ces bons mots, elle balança son sac à dos sur son épaule et partit vers la gauche, ses longs cheveux sombres battant ses épaules. Les autres s'attardèrent encore une seconde, gênés, avant de l'imiter.
Dès que Mary se retrouva seule, elle s'agenouilla et prit le temps de fouiller dans le sac qu'on lui avait donné. Une bouteille d'eau, une boîte d'allumette (étant née-moldue elle fut heureuse de savoir s'en servir, elle se demanda comment les trois autres issus de familles de sorcières allaient s'en sortir), et... une paire de cache-oreille ? Elle retint un éclat de rire et se jura de proclamer Adrian grand Divin du Siècle. Elle ne savait pas à quoi tout ça allait bien pouvoir lui servir, mais elle supposait qu'elle le découvrirait assez vite.
Mary avança de plusieurs pas sur le chemin qu'elle avait emprunté avant de bifurquer sur sa gauche. Les bruits de la foule s'accentuèrent. Bien. C'était déjà une bonne chose, elle avait remarqué que la sortie du labyrinthe se situait juste au pied des gradins. Plus elle entendait la foule et plus elle se rapprochait de la sortie.
Malgré tout, il n'y avait pas que les cris des élèves qui étaient perceptibles. Tout autour d'elle, des bruits étranges s'élevaient, comme des feuilles qui bruissaient ou encore des branches qui craquaient. Au loin, un cri retentit. Mary se figea. C'était Bertha Jorkins, impossible de confondre ce cri hystérique avec quelqu'un autre. Sur quoi avait-elle pu tomber ?
Cependant, alors qu'elle tournait à l'angle, Bertha Jorkins devint le dernier de ses soucis. Au milieu de l'allée, un pot en terre cuite barrait la route, avec dedans une drôle de plante à la face de bébé qui s'agitait en tous sens. D'une extrême laideur, elle avait d'épaisses feuilles qui lui sortaient du crâne et un teint vert pâle couvert de terre. Sa bouche ne cessait de s'ouvrir, comme si elle voulait crier mais en était incapable. Enfin, ça c'était jusqu'à ce qu'elle aperçoive Mary. Aussitôt la mandragore se mit à hurler.
Mary trébucha, étourdie. Elle avait l'impression d'avoir reçu un coup sur la tête et elle chancela, reculant instinctivement. Dès qu'elle fut hors de vue de la plante, l'effet maladif cessa. Le souffle court, elle se laissa tomber à genoux, le cœur battant à tout rompre dans sa poitrine. Sans savoir comment ils avaient bien pu faire, elle comprit que les professeurs avaient dû ensorceler cette jeune mandragore afin qu'elle ne se mette à crier qu'en voyant quelqu'un. Astucieux. On ne se rendait compte de sa présence que quand elle s'attaquait à vous.
La voix d'Adrian lui traversa l'esprit : « Black, qu'est-ce que tu vois là ? Un agneau ou des caches-oreilles ? ». Sirius s'était trompé. C'était bien un cache-oreille qu'il lui fallait, et justement il y en avait un dans son sac à dos ! Est-ce que ça voulait dire que tous les autres membres d'équipe allaient tomber sur une mandragore ? Possible. Si ça trouve, Bertha Jorkins s'était mise à hurler juste pour crier plus fort que la plante et pouvoir passer cet obstacle. La connaissant, elle avait dû être trop occupé en deuxième année à colporter des ragots pour écouter le cours sur la question.
Ses caches-oreilles en fourrure rose fermement en place sur sa tête -et l'air sûrement ridicule-, Mary s'engagea à nouveau dans l'allée. La mandragore se remit à crier dès qu'elle entra dans son champ de vision, ou du moins c'est ce que Mary supposa. Elle ne la voyait que s'égosiller sans rien entendre, ce qui avait un certain aspect comique.
Ravie, elle continua sa route vers la gauche. Par précaution, elle garda ses caches-oreilles. Pour tout ce qu'elle en savait, d'autres mandragores pouvaient très bien encore se cacher plus loin, et même si elle n'entendait plus les bruits du public avec, elle avait une vague idée de vers où elle devait se diriger pour trouver la sortie. Par terre, elle distinguait plusieurs plantes et fleurs qui tapissaient le sol. Certaines brillaient, presque fluorescente, tandis que d'autres avaient l'air parfaitement normales. Elle hésita. Qu'avait dit Dumbledore ? Que chaque plante pouvait servir ? Elle commença à se baisser pour un cueillir quelques-unes, faisant glisser son cache-oreille dans son cou, quand un nouveau cri déchira le silence. Or, cette fois ce n'était ni une mandragore ni Bertha Jorkins.
- Non ! Hurla la voix. Non, lâche-moi ! Ah !
Mary se releva et sans réfléchir se précipita en direction des cris. En face d'elle, Dymphna Zabini était étendue de tout son long, les jambes prises par d'énormes racines qui ressemblaient de loin à des tentacules qui ne cessaient de s'enrouler autour d'elle comme un gros serpent. Paniquée, la Serpentard tentait vainement d'allumer ses allumettes, les mains tremblantes tandis que son sac à dos gisait un peu plus loin.
- McDonald ! Cria-t-elle en se rendant compte de sa présence. Par Merlin, aide-moi !
- Mais...
- Tout de suite !
Mary jura. Le temps qu'elle atteigne son adversaire, le filet du Diable entourait presque la taille de Dymphna. Du moins, Mary espérait que ça soit un filet du Diable, sinon les allumettes ne leur serait d'aucun secours.
Dès que la première s'enflamma, la planta sembla se retracter sur elle-même, apeurée, mais ne lâcha pas Dymphna pour autant.
- Il en faut plusieurs, dit Mary. Il faut plus de lumière !
- Et bah qu'est-ce que t'attends ? Allume tes trucs moldus, elle va m'étouffer !
Mary déglutit et fit un pas de côté pour éviter une des branches du filet qui tenait de lui saisir la cheville. Elle craqua une nouvelle allumette et la planta dans le sol. Puis une autre. Et encore un autre...jusqu'à vider sa boîte. Le halo des flammes projetait une douce lumière qui irradiait assez pour illuminer toute l'allée, comme si quelqu'un avait créer un gâteau d'anniversaire géant avec plein de bougies. Le filet du Diable parut vouloir luter, mais quand Mary commença à allumer les allumettes du paquet de Dymphna, la plante battit en retraite.
La Serpentard se releva lentement à genoux, secouée. Mary remarqua alors que ses manches étaient déchirées ainsi que des griffures tout le long de ses bras.
- Tu vas bien ?
- Je crois...
- Qu'est-ce que c'est ? C'est le filet du Diable qui a fait ça ?
Dymphna baissa les yeux.
- Non... C'était un Snargalouf. Il m'a eu par surprise à l'entrée du labyrinthe.
Le Snargalouf, si la mémoire de Mary était bonne, était une dangereuse plante carnivore qui ressemblait à une souche d'arbre morte dans son état passif avant de passer à l'action en projetant sur sa proie des vignes pleines d'épines.
- Comment...comment tu t'en es sorti ?
- Je me débattu et j'ai couru. Un peu plus loin j'ai vu Tiberius au prise avec une plante à Pipaillon.
- A papillon ?
Dymphna lui lança un regard noir.
- A Pipaillon, idiote. Tu sais, elle produit une fleur tous les cent ans dont le parfum attire les imprudents ? Elle égare les gens dans la forêt. Tiberius a dû partir dans la mauvaise direction.
- Et tu ne l'as pas aidé ? S'indigna-t-elle.
- Pourquoi je l'aurais fait ? Le but c'est de gagner !
- Si je ne t'avais pas aidé, tu serais toujours à essayer d'allumer une pauvre allumette, Zabini !
- J'avais à peine besoin de toi...
- C'est ça.
Mary secoua la tête. Que faire maintenant ? Repartir chacune de son côté ? Au vu des coups d'œil que Dymphna jetait vers la gauche, elle avait elle aussi remarquer que la sortie était dans cette direction. Nerveusement, elle jouait avec un bracelet à son poignet, étalant sans le faire exprès un filet de sang qui coulait de ses égratignures. Un bracelet qu'elle avait déjà vu sur une autre personne.
- Ça te fait étrange ?
- Quoi ?
- Ça te fait étrange de faire quelque chose sans ta sœur pour une fois ? Explicita Mary.
Cette fois, le regard de Dymphna était carrément glacial.
- A ton avis, McDonald ? Phyllida et moi, on n'a pas passé un jour séparé depuis notre naissance, on est dans le même dortoir depuis cinq ans, et là je me retrouve toute seule dans un labyrinthe plein de plantes monstrueuses qui viennent de manquer de me tuer. Alors oui, si tu veux savoir, je préfèrerais avoir Phyllida avec moi plutôt que...eh bien toi.
Au moins, ça avait le mérite d'être honnête. Mary piétina sur place, gênée. Au bout de quelques secondes, Dymphna soupira.
- Allez viens, il faut continuer. La sortie est par là, autant y aller toutes les deux. Où est mon sac ?
- Juste là...
- Ah ! Dit-elle en le ramassant avant de fouiller dedans. J'ai cru que j'avais perdu mes plantes !
- Quelles plantes ?
- Tu n'en as pas ramassé ?
- J'allais le faire mais...tu as crié alors...
- Hum... Tu veux retourner en chercher ?
- Et te laisser sortir du labyrinthe avant moi ? Hors de question. Je passe devant, tu me dois bien ça.
Dymphna parut sur le point de protester puis hocha la tête à contre cœur. Elles continuèrent leur chemin l'une derrière l'autre, en silence. Mary s'attendait à tout moment à retomber sur une plante carnivore ou un brugnon dévoreur, mais quand elles tournèrent à nouveau, elles furent aveuglées par un carrée de lumière. Les haies s'arrêtaient là, découpant la sortie à quelques mètres à peine.
Le bruit de la foule était assourdissant et Mary comprit pourquoi quand elle vit...Tiberius et Bertha qui se trouvaient déjà sur la pelouse aux côtés de Dumbledore. Son estomac se contracta. Apparemment, le Serdaigle ne s'était pas tant perdu de ça, et si Dymphna avait été l'aider, peut-être serait-elle sortie du labyrinthe bien plus tôt. Mais ce n'était pas le temps de refaire la journée avec des si. La dernière qui franchirait la ligne perdrait l'épreuve. Dymphna parut s'en apercevoir en même temps qu'elle.
Elles partirent au quart de tour. Sauf qu'à la course, Mary avait un avantage : les entraînements de Quidditch. Jamais elle n'avait autant remercié James de leur imposer de courir vingt minutes chaque semaine. Elle dépassa Dymphna en deux foulées et sortit du labyrinthe sous un tonnerre d'applaudissement de la part des Gryffondor.
- Après Serdaigle et Poufsouffle, Gryffondor se place troisième et Serpentard quatrième, annonça Dumbledore. Félicitations à tous !
Mary se précipita en direction des gradins et brandit sa paire de cache-oreille devant le visage d'Adrian, extatique. Il cligna des yeux.
- Tu es un génie ! S'exclama-t-elle.
- Je...J'ai vraiment prédit quelque chose de bon ?
- Oui ! Enfin, il n'y avait pas d'agneau ni rien mais...
Adrian se mit à sautiller sur place.
- Vite ! Donnez-moi une tasse de thé ! Je sens mon troisième œil s'agiter ! Et je prédis une super fête pour Mary McDonald, ce soir !
Chapitre XIII : Retour à Pré-au-Lard
La deuxième Epreuve du Tournoi semblait avoir galvanisé l'école toute entière. Sur toutes les lèvres, le même sujet revenait sans cesse, particulièrement à l'heure du déjeuner. Sauf aujourd'hui. Parce qu'aujourd'hui, c'était jour de sortie à Pré-au-Lard et tout le monde avait juste envie de souffler, de ne plus penser au Tournoi pendant au moins quelques heures.
Et puis c'était aussi accessoirement l'anniversaire de Sirius.
- Donc, si je résume bien, dit Dorcas en pointant sa fourchette vers Alexia, tu nous abandonnes aujourd'hui pour passer ta journée avec Sirius, c'est ça ?
- Ouais !
- Comment t'as fait ?
- Comment j'ai fait quoi ?
- Le persuader de lâcher les Maraudeurs pour son anniversaire ? Ils n'ont pas fait un pacte avec du sang ou autre chose dans ce genre-là qui stipule que les amis passent toujours avant les filles ?
Avant qu'Alexia ne puisse lui faire remarquer que c'était complètement ridicule, les quatre Maraudeurs se laissèrent tomber sur le banc à côté d'elle. Sirius devait avoir entendu la dernière phrase de Dorcas parce qu'il lui envoya une boulette de mie de pain dans le front.
- Premièrement, dit-il, on ne fait pas de pacte avec du sang. Tu nous prends pour qui, un gang de vampire ? Et deuxièmement, si j'y vais avec Alex c'est parce que James refuse de venir à Pré-au-Lard -sous prétexte qu'il doit bosser pour l'épreuve de vol comme s'il ne savait pas déjà tenir parfaitement sur un balai-, que Peter ici présent est tellement malade qu'il n'arriverait pas en vie au village et que Remus, dans son altruisme légendaire, a décidé de rester lui tenir compagnie à l'infirmerie.
Alexia haussa un sourcil et se râcla la gorge.
- Ah oui, et aussi parce que je t'aime et que j'adore passer mon anniversaire avec toi...C'était évident, c'est pour ça que je ne l'ai pas dit immédiatement, princesse.
- Bien sûr...
Dorcas ne parut nullement impressionnée. Au de lieu de ça, elle se tourna vers Peter. Le pauvre portait un pull trop grand pour lui, sûrement un vieux sweat de Frank ou de James vu la taille, et avait le teint pâle et le nez tout rouge à force de se moucher.
- Tu as une sale tête, commenta-t-elle avec sa franchise habituelle.
- Dorcas, réprimanda Lily.
- C'est pas grave, marmonna Peter. Vous allez à Pré-au-Lard ?
- J'y vais avec Lucinda, oui. Alice va sûrement passer la journée avec Frank, Marlène et Lily.
- Hum non... Je reste au château en fait.
- Ah bon ?
Lily hocha la tête. Ça faisait plusieurs semaines que ça la perturbait, mais Potter n'avait vraiment pas l'air dans son chaudron depuis la rentrée. Hormis le fait qu'il ne lui demande plus de sortir ensemble à tout bout de champ, il semblait... fatigué ? D'habitude, James donnait l'impression de carburer au sucre et au café, il était toujours plein d'énergie, parlait à mille à l'heure, sautillait presque sur place quand il devait rester sans rien faire. Et là il refusait une journée à Pré-au-Lard ? Pour réviser l'épreuve de vol ? Ce garçon tenait mieux sur un balai que sur ses propres pieds, par Merlin ! Non, définitivement quelque chose clochait, et même si Lily ne savait pas trop pourquoi elle s'en souciait elle tenait à rester également.
- Marlène va être ravie de tenir la chandelle...
- Où est-ce qu'elle est d'ailleurs ? Demanda Alexia.
- A la volière pour envoyer une lettre à ses frères et ses parents.
- C'est pas sa troisième lettre cette semaine ?
- J'sais pas, marmonna Dorcas la bouche pleine. Ça va Pettigrow ?
Peter frissonna et enfouit ses mains dans les manches de son pull.
- Moyen, admit-il. Il fait hyper froid, non ?
A sa droite, James fronça les sourcils et se pencha. Il posa la main sur son front brûlant, d'abord avec sa paume puis le dos de ses doigts comme sa mère avait l'habitude de faire quand il était enfant.
- Alors ? Je vais mourir, docteur ?
- Docteur qui ? Se moqua Alexia.
Les quatre garçons lui jetèrent un regard perplexe.
- Laissez tomber, ajouta-t-elle.
- J'ai compris la référence moi, dit Lily pour la réconforter.
- En tout cas j'ai bien peur que tu n'en aies plus pour longtemps Quedver, lança James.
- Des derniers mots ? Demanda Remus, lui donnant une tape sur l'épaule.
Peter toussa et réussit à articuler :
- Si je meurs vraiment, trouvez-moi une copine et dites-lui que je l'aime.
- On n'y manquera pas, promit Sirius.
Ils se sourirent tous, amusés, puis James aida Peter à se mettre sur ses pieds.
- Allez viens mon pote, tu viens de gagner un séjour à l'infirmerie
- Je te ramènerais du chocolat Peter !
- Merci Alex...A plus tard.
S'appuyant toujours sur James tandis que Remus lui prenait son sac à dos, Peter s'en alla. Sirius se leva à son tour et attrapa la main d'Alexia dans la sienne.
- On y va ? Prêtre ?
- Toujours !
**
*
S'il y avait bien une constance dans la vie de James, c'était la sensation qu'il éprouvait à chaque fois qu'il montait sur un balai. Dès qu'il était dans les airs, le bruit du vent couvrait tout le reste et il avait l'impression d'être coupé du reste du monde. Plus besoin de réfléchir, le simple fait de voler nécessitait toute son attention.
Quand il était petit et qu'il s'ennuyait, ce qui arrivait souvent en tant que fils unique, il courrait partout pour évacuer son trop plein d'énergie. Sa mère en avait eu marre au bout du troisième vase cassé et lui avait proposé de lui apprendre à voler. Pas sur son balai-jouet qu'il adorait déjà, non, un vrai balai, un balai pour les grands. James avait six ans. Il avait adoré. Littéralement. Euphemia l'avait placé devant elle, ses bras autour de lui pour l'empêcher de tomber, et elle les avait fait décoller en donnant un coup de pied énergique au sol. Il se souvenait encore de la sensation, des émotions qu'il avait ressenti alors que le balai montait toujours plus haut (en vérité seulement quatre mètres, mais du haut de ses six ans ça lui avait bien paru le triple) : son cœur avait dégringolé dans son ventre, comme quand on loupe une marche, le vent lui avait soufflé au visage, une douce chaleur émanait du corps de sa mère pressé contre son dos qui lui donnait une impression de sécurité infaillible, et plus que tout la gravité avait cessé d'exercer son pouvoir sur lui. Bien sûr, ce n'était pas vraiment lui qui était en charge, sa mère avait gardé le contrôle durant tout le vol, mais James était déjà mordu.
Dès que son père était rentré du travail le soir, il s'était jeté sur lui pour lui raconter son aventure. Fleamont avait échangé un coup d'œil amusé avec sa femme et lui avait promis de l'emmener voler encore une fois le week-end prochain. Evidemment, James n'avait pas eu la patience d'attendre tout une semaine.
Même si Euphemia s'était arrêté de travailler à la naissance de son fils, elle avait des journées bien remplies car elle s'occupait de la maison et rendait souvent visite aux voisins pour les aider, notamment Bathilda Tourdesac ou la maison de retraite deux rues plus loin. Ce jour-là, elle avait dû s'absenter une petite heure, comme d'habitude, laissant à leur elfe de maison la charge de garder la maison et de surveiller James. Mais James avait déjà un don quand il s'agissait de ne pas se faire prendre et avait réussi à fausser compagnie à l'elfe, ou du moins réussi à se faufiler dans le jardin quand celui-ci avait eu le dos tourné. Avec ses petites jambes, il était monté sur le balai que ses parents gardaient dans la remise, simplement appuyé contre mur, et s'était agrippé au manche en bois avec détermination avant de décoller.
Il avait retrouvé les mêmes sensations de liberté et de légèreté enivrante que la première fois...du moins avant qu'il ne se rende compte qu'il pouvait voir les arbres. Du dessus. Là, il avait paniqué. Monter avait été facile, descendre semblait bien plus compliqué et sans sa mère pour le guider il ne savait absolument pas comment faire. Il s'était alors mis à pleurer.
Ses cris de panique avaient dû être assez forts pour alerter leur elfe car ce dernier déboula aussitôt, l'air catastrophé, et avait claqué des doigts. Le balai avait alors entamé une lente descente avant de se poser sur l'herbe en douceur. C'était à ce moment-là qu'Euphemia était rentré. James s'était précipité vers elle, encerclant ses jambes avec ses petits bras, les joues encore barbouillées de larmes, et lui avait fait un grand sourire, ravi.
Depuis ce jour, ces parents lui avaient réellement appris à voler, et en peu de temps James était aussi à l'aise sur un balai que sur ses deux pieds. Quand il était triste, qu'il s'ennuyait, ou qu'il voulait juste se vider la tête, il partait faire un tour. C'était aussi simple que ça.
Il ne lui avait ensuite pas fallu longtemps pour tomber amoureux du Quidditch ou pour entrer dans l'équipe dès sa deuxième année à Poudlard. Mathieu Cassidy, le grand frère d'Alexia, était capitaine à l'époque. C'était lui qui avait donné à James sa place dans l'équipe. Sûrement un des plus beaux jours de sa vie !
C'est pour tout cela, et bien plus encore, qu'il avait décidé de venir voler tout seul aujourd'hui, juste pour se changer les idées.
- Potter ? James ? Eh !
Sous le coup de la surprise, James manqua de se prendre un des buts du terrain en pleine face avant de virer à gauche à la dernière seconde. En baissant les yeux, il vit Lily qui se tenait sur la dernière rangée des gradins, la tête rejetée en arrière pour le voir. Visiblement, ce n'était pas la première fois qu'elle appelait son nom.
Aussitôt, il piqua vers elle et se posa à terre.
- Lily ! T'es pas à Pré-au-Lard ?
- Si, j'ai juste envoyé mon hologramme pour te parler, répliqua-t-elle.
James grimaça en réalisant la stupidité de sa question. Il ne savait pas trop ce qu'était un hologramme, mais il se doutait que Lily se moquait de lui.
- Oui désolé...c'était évident...
- Pas grave, sourit-elle. J'ai juste décidé ça ce matin en fait.
- Pourquoi ?
- Pour toi.
James la dévisagea et il était sûr que son estomac venait de faire un looping.
- Moi ? Répéta-t-il, surpris.
- Ouais ! Ne te monte pas la tête, je ne préoccupe pas tant de toi que ça mais... je voulais juste savoir si tu...si tu allais bien ?
- Si j'allais bien ?
Lily acquiesça. Certes, elle n'était pas très subtile, mais elle avait appris que James l'était rarement et qu'une technique franche et frontale fonctionnait généralement mieux avec lui.
- Pourquoi est-ce que ça n'irait pas ? Et puis je suis James Potter, je vais toujours bien ! S'exclama-t-il avec un grand sourire.
Sourire qui sonnait faux, même s'il y mettait du cœur. Le problème était sans doute là, réalisa Lily. Il était James Potter et tout le monde présumait de facto qu'il allait bien. C'était Sirius qui avait des problèmes avec sa famille, Remus avec sa lycanthropie, Peter avec sa confiance en soi... mais James ? Non James allait toujours bien, il était celui qui amusait la galerie et réconfortait les autres. Sauf que qui le réconfortait, lui, quand ça n'allait pas ?
- Je ne sais pas, je trouvais juste que tu avais l'air...ailleurs, ces temps-ci, expliqua-t-elle avec délicatesse. Tu es venu voler ici tout seul alors que c'est l'anniversaire de Sirius aujourd'hui et...
- Il est avec Alex, intervint-il.
- Je sais bien mais...si tu as envie de parler, je suis là c'est tout. Juste toi et moi.
James se contenta d'hocher la tête en la dévisageant. Un silence confortable s'installa entre eux tandis qu'ils regardaient les collines au loin, derrière le terrain de Quidditch. Le vent soufflait fort et le ciel était bas et lourd, comme un couvercle, signe qu'il allait certainement se mettre à neiger dans les prochains jours.
Sans s'en rendre compte, Lily se mit à fredonner doucement, son genou rencontrant celui de James alors qu'elle se détendait.
- Qu'est-ce que tu chantes ? Demanda-t-il après quelques minutes.
- Help, c'est une chanson moldue. Les Beatles, tu sais ? J'avais offert l'un de leur album à Dorcas, l'année dernière ?
- Ah si... Sirius aime bien je crois.
- Il a bon goût.
- Tu viens de lui faire un compliment ?
- Seulement si tu ne le lui répètes pas, dit-elle en souriant.
James rit. Tout lui paraissait facile avec Lily. Il avait l'impression qu'il pouvait parler de tout ensemble, même de musique moldue qu'il ne connaissait absolument pas. Réalisant cela, il hésita encore une seconde avant de lâcher finalement :
- Pré-au-Lard.
- Pardon ?
- Tu m'as demandé si j'allais bien... A vrai dire, je ne suis pas sûr et je pense que c'est à cause de... de Pré-au-Lard. De ce qui s'est passé l'année dernière...
- L'attaque des mangemorts ?
- Non, la danse flamenco de Slughorn avec Hagrid, essaye de suivre !
Lily lui donna une tape sur l'épaule en roulant des yeux. Chacun ses questions stupides visiblement... Malgré tout, sa réponse résonna dans son esprit. Pré-au-Lard. Evidemment, quoi d'autre ? Si elle-même avait été plus affecté sur le moment, elle avait réussi à passer à autre chose, tout simplement parce que c'était dans sa nature. Rationnelle. Elle ne pouvait pas changer ce qui s'était passé, ni comment elle avait réagi, ni penser au « et si » qui avait inévitablement suivi l'attaque. Il fallait qu'elle veille désormais à ce que ça ne se reproduise plus, qu'un monde où les mangemorts auraient le pouvoir ne puisse jamais exister. Elle ne savait pas bien encore comment, mais ça viendrait.
Pourtant, James était différent. Il ne pensait pas comme elle. Et elle était bien décidée à l'aider.
- Parle-moi, souffla-t-elle. On m'a déjà dit que j'étais douée pour écouter. Ou du moins Remus l'a dit, donc je vais sûrement le mettre sur mon CV, ajouta-t-elle avec un petit rire amusé en voyant James sourire aussi. Parle-moi de ce qui ne va pas.
- Par quoi je commence ?
- Ce que tu veux. Je suis là, on a tout le temps qu'on veut...
James inspira profondément. Les épaules tendues, il pressa un peu plus son genou contre le sien et se mit à parler, comme si un barrage cédait enfin au fond de lui.
- J'en fait des cauchemars depuis des mois, avoua-t-il sans la regarder. Ce ne sont jamais tout à fait les mêmes, mais il y a toujours une constance : ça se passe à Pré-au-Lard. Je ne sais même pas si ce sont mes souvenirs ou juste des choses que mon esprit imagine. Un peu des deux je suppose. La plupart du temps je revois Sirius qui est étendu dans la neige à cause de moi. Sauf que dans mes rêves il ne se réveille pas et j'hurle, j'hurle pour qu'il ouvre les yeux...mais... mais il reste juste immobile. Tu es là aussi, souvent. Je te tiens la main en courant et j'ai l'impression que mon cœur va exploser ou que je vais vomir et tout tourne au ralenti autour de nous. Je vois le mangemort arriver vers nous mais je ne peux rien faire. Il te jette un sort et je ne peux pas bouger.
Il marqua une pause, le souffle bloqué dans sa gorge avant de reprendre.
- Il y a une semaine j'ai rêvé de mon père aussi. C'est idiot parce que j'étais tellement choqué ce jour-là que je ne m'étais même pas aperçu qu'il était à Pré-au-Lard. Sauf que là il se retrouve entouré de mangemorts masqués, tous habillés en noir comme des sortes de spectres. Ils encerclent mon père en se rapprochant toujours plus jusqu'à ce que je le perde de vue, qu'il se retrouve...avaler presque par les mangemorts...
Il se mordit la lèvre, les yeux brûlants.
- Merlin, Lily, je suis complément paumé.
Lily glissa une main tremblante dans la sienne et l'observa attentivement. Il avait cessé de fixer l'horizon et avait la tête baissée. Ses cheveux châtains en épis décidément un peu trop longs lui retombaient sur le front et elle se retint de les écarter avec douceur. Comment n'avait-elle pas pu voir plus tôt que quelque chose clochait ? Comment les Maraudeurs n'avaient-ils pas pu le voir ? Est-ce qu'ils étaient tous tellement habitué à un James survolté et souriant qu'ils n'avaient pas cherché au-delà ?
- James...
- Tu sais ce qui me fait le plus peur là-dedans ?
- Non...
- Ils ont réussi à envahir Pré-au-Lard, le seul village entièrement sorcier en Angleterre, et personne n'a rien pu faire. On ne le sait pas forcément, je le sais par mon père à vrai dire, mais il y a des sortilèges de protection tout autour du village, et souvent des patrouilles de brigade magique pour assurer la sécurité. Pourtant ils ont réussi à terroriser tout le monde. C'est peut-être ça d'ailleurs le pire, ils n'étaient là que pour faire peur, pas tuer ou faire un carnage. Les dégâts étaient plus matériels qu'autre chose. Qu'est-ce que ça veut dire, Lily ? Qu'est-ce que ça va donner quand ils décideront de ne plus faire juste de simple manifestation de force mais de réellement attaquer ? Je me suis senti démuni. Je n'ai fait que courir dans tous les sens pour retrouver mes amis en me disant à chaque pas qu'ils pouvaient être morts avant que j'arrive. Les mangemorts ont joué avec nous comme des hippogriffes avec des furets.
- On sera prêts, dit-elle. On n'est pas sans défense, James. Les Aurors les traquent, ils savent comment...
- Mais ils sont invisibles ! Coupa-t-il brusquement, comme s'il ne pouvait pas retenir les mots qui se bousculaient contre ses lèvres. Les partisans de Tu-Sais-Qui ne sont plus seulement des vieilles familles attachées à la magie noire, il y aussi des gens normaux qui le rejoignent ou des gens au sein même du Ministère. On ne sait qui ils sont, ni qui Il est. Soyons réalistes, on ne connait pas son nom, la Gazette persiste à l'appeler « Tu-Sais-Qui ». Or c'est ça le problème, on ne sait pas qui il est.
- Peut-être pas, reconnu-t-elle. Mais je n'ai pas besoin de savoir qui il est pour me battre contre ce qu'il représente ou contre ses idéaux. Je ne sais pas encore comment, ni quand, mais je sais que comme moi tu ne resteras pas les bras croisés à attendre qu'il prenne le pouvoir. Tu n'es pas seul et tu n'es pas démuni, James. Et plus que tout, tu ne peux pas t'inquiéter pour tout le monde sans laisser les autres s'inquiéter pour toi. Je comprends ce dont tu as peur, tu as raison et je ne peux pas te dire le contraire, mais il y a une chose que je peux te promettre : tu n'es pas seul pour affronter tes cauchemars et tes angoisses. On a tous les mêmes. Les Maraudeurs sont là pour toi, les filles aussi, et...je suis là pour toi, d'accord ?
Elle pressa sa main un peu plus pour accentuer sa promesse et James releva finalement le regard de ses genoux. Il avait toujours l'air fatigué, mais une détermination qu'elle n'avait pas vue depuis un moment irradiait sur son visage.
- Merci Lily. Vraiment.
- C'est normal.
Ils restèrent encore quelques minutes tous les deux à contempler le paysage tandis que le vent les faisait frissonner.
- Tu veux rentrer au château... ?
- Pourquoi ? Tu avais une autre idée ? Dit Lily.
Il sourit, de ce fameux sourire sincère qu'elle aimait sans l'avouer à voix haute.
- Ça te dirait d'apprendre à voler ? Demanda-t-il en désignant son balai du menton.
- Je sais voler !
- A vraiment voler, Evans, se moqua James.
- Hors de question, asséna-t-elle avant qu'il ne se lève et la tire par la main. Non, Potter, non...
Evidemment, il se contenta d'éclater de rire.
**
*
Assis à une table isolée aux Trois Balais, Regulus jouait distraitement avec son verre tout en regardant les clients. Jusqu'au dernier moment, il n'avait pas été sûr de venir. Il avait passé la matinée avec Marlène, juste à parler de tout et de rien comme d'habitude, puis il avait rejoint Livia une petite heure. Ça lui faisait encore étrange de se dire...qu'ils sortaient ensemble. Livia était le type de fille intimidante qui vous donnait l'impression de vous juger dès qu'elle posait ses grands yeux vert eau sur vous et il s'en retrouvait parfois déstabilisé. Mais comme souvent entre eux, lui aussi pouvait jouer à ce jeu, et ils se retrouvaient dans le genre de situation où ils se défiaient du regard pendant plusieurs minutes avant de reprendre leur activité normale.
De toute façon, Livia n'avait pas voulu venir aujourd'hui, ce qui l'arrangeait bien. Au moins, il n'avait eu à lui mentir ni à elle, ni à Marlène à propos de son rendez-vous du jour. Rendez-vous qui justement venait de franchir la porte.
- Black ! Je savais qu'on se reverrait tôt ou tard.
En un an, Evan Rosier n'avait pas tant changé que ça. Il avait toujours cet air suffisant qu'il arborait quand il était encore élève à Poudlard, ainsi que les mêmes cheveux blonds or et ses yeux noirs encre. Même si Regulus ne le côtoyait plus au quotidien, il avait eu de ses nouvelles par Elizabeth Yaxley, sa fiancée toujours en septième année à Serpentard. De toute façon, même sans ça, les rumeurs sur son compte étaient nombreuses depuis qu'il avait rejoint les rangs des mangemorts.
- Rosier, salua Regulus d'un hochement de tête.
- J'avoue que je n'étais pas sûr que tu viendrais, mais évidemment un Black ne déçoit jamais. Enfin, presque jamais, ajouta-t-il sardonique. Il y a bien quelques moutons noirs...
- Bon, écoute, je n'ai pas toute la journée. Qu'est-ce que tu veux ?
Le rictus de Rosier disparu et il s'assit en face de lui, lentement, comme pour ménager son effet.
- Toi, dit-il sans ciller.
Regulus retint un mouvement de recul mais Rosier se pencha par-dessus la table, réduisant sa voix à un murmure.
- J'estime avoir assez attendu, Black. Je t'ai fait une proposition l'année dernière et tu m'as demandé un délai, ce que j'ai gracieusement accepté. Mais le Seigneur des Ténèbres s'impatiente et il n'attendra pas indéfiniment. Si tu crois que ta pseudo participation à l'attaque de Pré-au-Lard a suffi, détrompe-toi. Il faudra que tu fasses plus pour prouver ta valeur et rejoindre nos rangs. Les mangemorts sont dévoués à la cause. Comme je le disais, tu es un Black, n'est-ce pas ? Les idéaux de ta famille, ainsi que les valeurs qu'elle soutient, sont connues et il se trouve que tu es l'héritier désormais depuis...le départ de ton frère dirons-nous. Alors je te le demande une dernière fois, est-ce que tu vas fuir comme lui ou prendre tes responsabilités et faire honneur à ton nom ?
Regulus sentit son cœur s'emballer dans sa poitrine et il espérait que Rosier ne pouvait pas percevoir son désarroi. L'année dernière, quand Rosier l'avait approché une première fois, il avait prétendu avoir besoin de temps pour réfléchir, ce qui en soi n'était pas faux. Il y avait réfléchi. Beaucoup. Ses débats intérieurs opposaient souvent la voix de sa mère et de Bellatrix d'un côté, et celles de Livia et Marlène de l'autre.
Aujourd'hui, il était temps de prendre une décision. « Est-ce que tu vas fuir comme lui » venait de lui demander Rosier. Il se rappela des mots qu'il avait jeté à la figure de Marlène, quelques jours après l'attaque de Pré-au-Lard : « Sirius n'a fait que se sauver, fuir, moi je suis resté. Alors Marlène ? Qui a été le plus courageux de nous deux au final ? ». Ce n'était maintenant qu'il réalisait à quel point ce sentiment était ancré en lui.
Regulus redressa le menton et planta son regard dans celui de Rosier. Prends ça, Sirius, pensa-t-il, regarde-moi devenir tout ce que tu m'éprises... Penses à ce qui aurait différent si tu ne m'avais pas abandonné.
- J'en suis.
Un sourire satisfait se dessina sur les lèvres de Rosier.
- Merveilleux Black, susurra-t-il. Le Seigneur des Ténèbres sera ravi de l'apprendre.
Chapitre XIV : Une danse dans la cabane
- Noisette, noir, au lait ou blanc ?
- Hum ?
- Le chocolat pour Peter, précisa Alexia. Je lui ai promis de lui en ramener vu qu'il est coincé à l'infirmerie.
- Oh... au lait. Prends-lui des chocogrenouilles, il adore ça. Et il arrêtera de me piquer les miennes !
Alexia se hissa sur la pointe des pieds, bras tendus, pour attraper les bonbons de l'étagère d'Honeydukes. Elle sentit Sirius se glisser derrière elle et la soulever par les hanches pour l'aider.
- Ah merci ! Je savais bien que je sortais avec toi pour quelque chose.
- Très drôle, dit-il en la reposant au sol. T'aurais pas pris du poids toi ?
- Si ! Deux kilos cet été !
« Je suis sûrement la seule fille à annoncer ça avec enthousiasme », songea-t-elle, moitié amusée moitié embarrassée quand une cliente à côté d'elle la détailla du regard étrangement. Sirius ne parut pas le remarquer, ou du moins fit exprès de l'ignorer, et la déchargea de toutes ses friandises pour se diriger vers la caisse. Elle le rattrapa aussitôt.
- Certainement pas, s'exclama-t-elle en le voyant sortir des pièces de sa poche. C'est moi qui paye.
- Je peux très bien...
- Non, tu ne peux pas. C'est ton anniversaire et c'est moi qui ai dit à Peter que je lui ramènerais des bonbons. Donc je paye.
- « Je », « moi » ... On t'a déjà dit que t'étais égocentrique, princesse ?
- Dit le mec le plus égocentrique que je connaisse, répliqua-t-elle en riant.
- James sera ravi de savoir qu'il n'est plus premier en quelque chose.
Alexia détourna la tête pour qu'il ne la voit pas rire mais au vu de son sourire goguenard une seconde plus tard, elle avait lamentablement échoué.
En face d'eux, la gérante du magasin haussa un sourcil, clairement amusée elle aussi.
- Vous savez, du moment que je suis rémunérée, peu m'importe qui paye pour tout ça, mais il serait plus galant pour ce jeune homme de s'en charger. Croyez-moi, ma petite, il faut savoir se battre pour ses droits et être féministe en toutes occasions sauf quand vous pouvez économiser une mornille.
La vieille femme lui adressa un clin d'œil.
- J'y penserais pour la prochaine fois, promit-elle, juste pas aujourd'hui. C'est vraiment son anniversaire.
- Dans ce cas, remballez-moi ça. Tenez, cadeau de la maison.
- Quoi ? Non, madame, on...
- J'insiste, dit la gérante en tendant le sac à Sirius. Disons que c'est pour vous remercier de nous dévaliser à chaque sortie de Poudlard. Ça représente toujours un quart de notre chiffre d'affaire.
Alexia dû bien la remercier une bonne dizaine de fois avant de se faire jeter dehors. Ils remontèrent ensuite l'avenue principale jusqu'au bout du village, main dans la main. Rosemerta les salua depuis le perron des Trois Balais et finalement ils s'arrêtèrent pour s'assoir sur la barrière qui délimitait le terrain de la Cabane Hurlante qui se dressait sur une colline à quelques mètres d'eux.
- Vous rentrez vraiment tous là-dedans ?
- Dans quoi ? La cabane ? Evidemment, elle est plus grande qu'elle en a l'air.
- Tu veux dire...qu'elle est plus grande à l'intérieur qu'à l'extérieur ?
- Hum ? Ouais, c'est ça.
Alexia roula des yeux et mordit dans la tête de sa chocogrenouille.
- Ok, j'ai compris, j'arrête avec les blagues sur Doctor Who.
- Désolé...J'ai encore loupé une référence moldue ?
- T'inquiète, je m'en remettrais, assura-t-elle. Donc tu disais ? Il y a un tunnel qui part du saule cogneur jusqu'ici c'est ça ?
- Exactement. Ça permet à Remus d'arriver dans un endroit sûr chaque soir de pleine lune sans se faire remarquer.
- Ingénieux ! Qui a eu l'idée ?
- Nous évidemment, dit Sirius d'un air important.
- Sérieusement ?
- Non, c'était Dumbledore...
Alexia éclata de rire et tendit la main pour piocher dans le paquet de dragées surprise de Berthie Crochue qu'il avait posé sur ses genoux.
- Eh ! Protesta-t-il. Termine déjà ton chocolat avant de me vandaliser.
- On a eu ce paquet gratuitement, je peux bien en manger tant que je veux, argua-t-elle.
Elle ponctua sa remarqua en lançant une poignée de dragées dans sa bouche et grimaça en sentant tous les goûts se mélanger. Elle reporta son regard sur la cabane. Même en sachant qu'elle n'était pas hantée pour de vrai, elle ne blâmait pas les habitants de Pré-au-Lard de la craindre car elle n'avait vraiment rien d'engageant.
A l'écart et solitaire sur sa colline, la maison avait un aspect intimidant. Entièrement condamnée, les fenêtres étaient obstruées avec des larges planches de bois et les tuiles de la toiture paraissaient pouvoir s'effondrer à tout instant. Un jardin sinistre entourait la demeure, des hautes herbes commençaient à ronger les murs et à envahir le petit chemin de terre qui menait à l'entrée.
Si l'extérieur était dans cet état, Alexia se demandait à quoi ressemblait l'intérieur. Comme d'habitude, Sirius parut deviner ce à quoi elle pensait.
- Tu veux aller faire un tour dedans ?
- On peut ?
- Tu es avec un Maraudeur, princesse, lança-t-il. Tout est possible !
Il sauta du muret et lui tendit la main, comme une invitation. Alexia n'hésita pas une seconde. Elle entrelaça ses doigts entre les siens et se laissa entraîner en direction de la cabane. C'était peut-être idiot, mais elle avait l'impression qu'il invitait à pénétrer un lieu privé, quelque chose qui jusque-là avait été hors de sa portée. Ça allait bientôt faire un an qu'ils sortaient ensemble, pourtant il y avait toujours eu une partie de Sirius à laquelle elle n'avait jamais eu accès, quelque chose qu'il ne semblait partager qu'avec James, Remus et Peter. Comme une sorte d'exclusivité de Maraudeur. La Cabane Hurlante représentait bien cette idée.
Elle crut une seconde qu'il allait la faire simplement passer par la porte d'entrée, mais elle s'aperçut que cette dernière, tout comme les fenêtres, était condamnée par des panneaux de bois (et sûrement par des sortilèges mis en place par le directeur lui-même, elle ne se faisait pas d'illusion). Sirius se contenta de continuer pour contourner la maison, avant de la conduire devant... l'entrée d'un tunnel sombre ?
- C'est la deuxième entrée du tunnel qu'on utilise sous le saule cogneur, dit-il en avançant sans marquer de pause. On ne passe jamais par ici, Dumbledore la juste crée au cas où Remus devrait sortir précipitamment de la cabane, pour qu'il n'ait pas à refaire tout le chemin jusqu'à Poudlard.
Effectivement, ils ne prirent pas plus de deux minutes pour sortir du tunnel. Une centaine de mètres plus loin, Alexia sentit le sol de terre se changer en parquet grinçant. Si elle avait cru que la cabane avait l'air lugubre de l'extérieur, l'intérieur n'était franchement pas mieux. De la poussière s'était incrustée un peu partout et les marches des escaliers émirent des bruits inquiétant sous son poids. En entrant dans la pièce principale, ou du moins celle qui paraissait avoir été utilisée ces derniers mois, Alexia resta clouée sur place.
Une vieille commode à la peinture écaillée était poussée contre le mur près de la porte, un grand lit à baldaquin aux draps rongés par les doxys occupait le côté droit et les vitres ébréchées des fenêtres laissait passer un faible rayon de lumière dans lequel se dessinait des grains de poussières en suspension dans l'air. Comment Remus faisait pour supporter cet endroit une fois par mois ?
- Ce n'est pas si terrible, dit Sirius en remarquant son expression. Je sais que ça peut paraître... délabré au premier regard, mais la cabane n'est pas en si mauvais état que ça. Dumbledore a pris des mesures quand il a décidé d'en faire le repère du loup. On a essayé de donner des trucs à Remus pour rendre l'endroit plus sympa aussi...
Alexia reprit son analyse de la pièce. Une couverture était soigneusement pliée au pied du lit, juste à côté d'une petite pile de livre. Sur la commode trônait un verre d'eau vide, un paquet de biscuit au chocolat (visiblement bien entamé), et un tourne disque à l'air incongru dans ce décor.
- Un tourne disque ? S'amusa-t-elle.
- Ouais, Remus aime bien écouter de la musique parfois pour se détendre apparemment. On a trouvé celui-là dans le grenier chez les Potter, c'est un tourne disque sorcier.
- Et vous venez souvent ici ? Tu as l'air de tout connaître !
- De temps en temps, Remus nous montre la cabane, c'est tout, répondit-il d'un ton étrange.
Alexia ne s'attarda pas sur son hésitation. Encore une fois, elle était consciente de ne pas tout savoir sur les secrets des Maraudeurs et elle était déjà contente de visiter la cabane qui avait une signification si forte pour Remus.
- Tu veux danser ?
- Quoi ? Demanda-t-elle, hilare.
- Danser, répéta Sirius, un petit rictus aux lèvres. Au temps que ce tourne disque serve !
- Est-ce que tu as au moins un vinyle ?
- Tu crois vraiment qu'on est idiot au point d'installer un tourne disque ici mais d'oublier d'amener des disques ?
- Avec vous ? Je m'attends à tout ! « Tout est possible avec un Maraudeur », non ?
Sirius se contenta de sourire un peu plus, et, sans la quitter du regard, marcha à reculons jusqu'au tourne disque. D'un coup de baguette, le bras mécanique se déplaça et se posa sur la platine... Les notes de musique emplirent la pièce, lentes et entraînantes.
Alexia rejeta la tête en arrière et éclata de rire en reconnaissant le morceau.
- Tu as ensorcelé mon cœur ! Ne me dis pas que Remus est fan de Celestina Moldubec ?
- Je ne dénoncerais personne, dit-il.
Il lui prit la main et l'attira contre lui, incapable de se retenir de sourire, ce qui n'avait pas grande importante puisqu'Alexia était dans le même état. Ils tournèrent lentement sur place au rythme de la voix rauque de la chanteuse.
Si Alexia se contentait de danser sans grande cohérence, elle s'aperçut vite que Sirius semblait maîtriser chaque pas à la perfection.
- Tu as appris à danser ? S'étonna-t-elle en posant sa tête contre son épaule.
- Laborieusement mais oui, murmura-t-il. Ma mère tenait à ce que Reg et moi ne ridiculisions pas la famille pendant les bals de sangs-purs. Je peux te dire que Dymphna Zabini est une terrible partenaire, elle me marchait sur les pieds tout le temps.
Evidemment, pile à ce moment-là, Alexia sentit son pied écraser celui de Sirius. Elle rougit et Sirius pouffa.
- Désolée...
- Avec toi ce n'est pas grave, princesse.
Il entremêla leurs mains ensemble et caressa l'intérieur de son poignet, traçant des motifs alambiqués du bout du doigt. Il sentit son pouls battre à travers. Elle lui sembla plus vivante que jamais à cet instant.
**
*
La lettre était arrivée en fin d'après-midi, un peu après son retour du terrain de Quidditch avec James. Ce dernier avait eu l'air de bien meilleure humeur après leur discussion, plus léger, comme si un poids lui avait été soulevé des épaules, et il ressemblait déjà bien plus à lui-même quand il sautillait sur place ou souriait de ce sourire malicieux qui n'appartenait qu'à lui. Pas que Lily remarque le type de sourire de James, pas du tout.
A vrai dire, elle n'avait plus pensé à cette lettre depuis un moment. Il y a quelques semaines, James avait proposé à tout leur petit groupe de venir passer le dernier week-end des vacances de noël chez lui, au manoir Potter. Il avait assuré que ses parents étaient d'accord, que ça leur ferait même plaisir d'avoir du monde, et Remus et Peter s'étaient empressés d'accepter. Dorcas avait elle aussi dit oui sans même concerter ses parents.
Dans son cas, Lily avait envoyé une lettre, tout comme Marlène et Alexia qui avaient reçu toutes les deux l'autorisation hier. Le problème : Lily avait reçu deux lettres. Et si celle de ses parents lui souhaitait de bien s'amuser avec ses amis, celle de sa sœur était beaucoup plus acerbe.
Lily,
Maman m'a appris ce matin que tu ne serais pas là le week-end après noël. Apparemment tu seras chez un garçon, un ami, ...comme toi. J'ai toujours su qu'un jour tu ne reviendrais pas de ton monde. Ne t'avise plus jamais de dire que c'est moi qui te repousse.
Tu te souviens quand on passait le lendemain de noël toutes les deux, petites ? C'était notre tradition juste à nous. Je t'enveloppais dans une couverture et je te lisais une histoire. Un jour tu m'as demandé une histoire avec une sorcière. Mais avec « une gentille sorcière ». Je crois que j'ai compris ce jour-là que tu ne serais plus jamais comme moi.
On ne sera jamais pareilles Lily. Je ne veux pas être bizarre comme toi. Tu peux continuer à prétendre le contraire, à prétendre que rien a changé, mais c'est faux. Restes dans ton école de monstre avec les personnes qui te comprennent et que tu aimes visiblement plus que ta propre famille.
Tu n'es pas comme nous, tu ne le seras plus jamais et peut-être que tu ne l'as jamais été. Rends-nous les choses plus facile à toutes les deux, Lily, et ne reviens pas vers moi en prétendant être normale parce que tu ne l'es pas. Tu es un monstre.
Ta sœur il y a longtemps,
Pétunia
Le morceau de papier blanc et fin, qui n'avait rien à voir avec le parchemin sur lequel elle avait écrit sa demande, glissa entre ses mains alors que les mots se brouillaient à cause des larmes. La dernière fois qu'elle avait vu Pétunia, la veille de la rentrée en septembre, c'était pour le dîner où elle avait rencontré le petit ami de sa sœur, Vernon. Déjà il y a deux mois, la fissure entre elle lui avait paru être un gouffre...mais pas un gouffre insurmontable. Visiblement, elle s'était trompée.
Un sanglot coincé dans la gorge, ses doigts se crispèrent autour de la lettre.
- Lily ? Murmura James à côté d'elle. Ça va ?
- Hum ? Oui...oui...Ce sont mes parents, ils disent que je peux venir chez toi à noël.
- Génial...Alors pourquoi tu as l'air d'avoir avalé un bocal de couleuvre ? Tu espérais qu'ils te donnent une excuse pour m'éviter ?
Lily gloussa.
- Non, dit-elle en secouant la tête. Ma sœur n'est juste pas très contente, comme d'habitude.
Sans un mot, elle tendit la lettre à James. Ses sourcils se froncèrent à mesure qu'il parcourait les phrases à l'écriture penchée que Pétunia lui jetait au visage.
Ils étaient tous les deux assis dans le hall principal, sur le banc près des sabliers, là où ils avaient fait une pause sur le chemin du retour à la salle commune pour que Lily puisse lire ses lettres.
- Elle est idiote, déclara James après une minute. Elle est...
- Ma sœur donc évite de l'insulter.
- Parce qu'elle s'en prive, elle, peut-être ? Répliqua-t-il d'une voix tranchante. « Un monstre ». C'est ce qu'elle pense de toi ?
- C'est ce qu'elle pense de nous, plutôt. Des sorciers en général.
- On appelle ça du racisme, Lily.
- Non, elle...
- Tu appelles ça comment alors ? Sérieusement, c'est révoltant ! Tu devrais...je ne sais pas... je veux dire, toi plus qu'aucune autre personne que je connais devrait...
- Devrait quoi, James ? Qu'est-ce que tu veux que je fasse ? Elle reste ma sœur ! Et je te ferais dire que je reçois les mêmes réactions dans le monde sorcier parce que je suis née-moldue. Apparemment, je ne suis pas normale pour tout le monde, quoique ça veuille dire.
- Tout le monde ne pense pas ça, dit-il vertement. Et ceux qui le pensent...ce sont eux les monstres. Tu es autant une sorcière que moi, que Rosier ou n'importe qui dans ce château, peu importe ce qu'ils disent. Tu es même meilleure que la plupart !
- Je ne sais pas si je dois me sentir flatter par tes compliments ou révulser que tu me compares à Rosier.
James sourit et se tourna vers elle. Elle ne l'avait pas vu aussi détendu et calme depuis un moment.
- Je suis là pour toi, souffla-t-il sans cesser de lui sourire.
Les mots qu'elle avait prononcés il y a une à peine une heure se suspendirent entre eux. A nouveau, les larmes lui montèrent aux yeux.
- On fait une drôle d'équipe, non ? Marmonna-t-elle, une chaleur étrange au creux du ventre.
- La meilleure équipe, corrigea-t-il.
- Cornedrue, tu fais pleurer les filles maintenant ? Lança une voix.
Lily sursauta. Sur leur droite, Sirius et Alexia arrivaient vers eux, main dans la main. Ils avaient l'air radieux...et amoureux, songea-t-elle avec tendresse. Sans même demander, ils s'assirent sur le banc avec eux.
- Et je croyais que c'était toi et moi la meilleure équipe ? Ajouta Sirius en prenant un air vexé.
- Ça dépend des jours, dit James, badin. Alors Pré-au-Lard ? C'était bien ? Qu'est-ce que vous avez fait, à part vous désoler sur mon absence ?
- On a dansé, dit Alexia. Mais tu n'en sauras pas plus... fallait venir !
- Pour danser avec Sirius ? Non merci !
Sirius lui donna un coup dans l'épaule et ignora son meilleur ami pour se concentrer sur Lily, dont les yeux étaient encore rougis.
- Eh Evans ? Qu'est-ce qu'il a encore fait pour te faire pleurer ?
- Ce n'était pas lui cette fois, avoua-t-elle, touchée par l'inquiétude évidente de Sirius pour elle, même s'il tentait de le cacher. Pétunia m'a juste envoyé une lettre...un peu imagée si on peut dire.
- Ah... Le fameux « tu n'es pas comme nous donc je te déteste » ?
- Quelque chose comme ça, oui...
- Ne fais pas attention à ces gens-là, Evans. Même si c'est ta sœur ou ta famille. Ne change pas qui tu es pour leur faire plaisir. Ils n'en valent pas la peine. Crois-moi, je connais tout ça par cœur depuis que je suis en âge de comprendre. Les sang-purs qui clament que les nés-moldus valent moins qu'eux ont juste peur, n'oublie jamais ça. Ils ont peur de toi. Ils ont peur que tu sois meilleure sorcière qu'eux alors même que la magie est un don qu'ils ont depuis des siècles, tu remets en cause leur pouvoir, leur influence, leur importance dans la communauté sorcière. Qu'est-ce qu'ils leur restent si des « imposteurs », d'après leurs mots, peuvent rivaliser avec eux ? En quoi est-ce qu'ils sont légitimes pour continuer à exercer leur pouvoir ? Tu leur fais peur, Evans, pas le contraire. Ta sœur, mes parents... Ils ont peur de quelque chose qu'ils ne connaissent même pas. J'ai choisi d'apprendre, de me délivrer de tout ça. Ça ne tient qu'à toi de faire la même chose. Montre-leur que tu es capable de faire de grandes choses sans eux, sans leurs valeurs à deux noises. Tu verras, ils vont regretter de t'avoir sous-estimé.
- Et si je ne veux pas réussir sans eux ? Contesta-t-elle d'une petite voix. Si je ne veux pas perdre ma sœur ?
- Ce n'est pas toi qui y perd, Evans, répondit-il immédiatement. Ce n'est pas toi qui part, ce sont eux qui t'ont abandonné il y a longtemps. Choisis juste d'autres personnes pour avancer, des personnes qui seront là, peu importe qui tu décides d'être.
Lily dévisagea Sirius, qui continuait à lui sourire avec assurance, sans savoir exactement s'il parlait encore d'elle ou de lui. Elle prit soudain conscience de quelque chose. Sirius Black ne souriait que pour tromper son monde. Il avait appris à se cacher derrière ses blagues, son air nonchalant et son ton arrogant. Son bouclier ne tombait qu'en présence de ses véritables amis, ceux qu'il considérait comme sa vraie famille. Car au fond il n'était qu'un petit garçon rejeté par ses parents.
Elle regarda tour à tourSirius, James, et Alexia, qui l'observaient tous avec une confiance sans borne.Une confiance qu'elle ne se rappelait même pas avoir jamais vu sur le visage dePétunia. Sirius avait raison. Elle n'avait pas besoin de sa sœur si cettedernière ne pouvait pas voir au-delà de ses peurs et ses préjugés, elle avaitbesoin des personnes qui la soutenait. Ça ne voulait pas dire que ça ne faisaitpas mal, ni qu'elle abandonnait tout à fait l'espoir qu'un jour les chosesiraient mieux, mais pour l'instant elle pouvait s'en sortir. Elle ne pouvaitpas rester éternellement tiraillée entre deux mondes, il était temps qu'elletrouve sa place.
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