Tome I - Chapitre 22 à 38
Chapitre XXII : Quitter le diable
Avec une grimace, Sirius observa son reflet dans le miroir de la salle de bain. L'image lui renvoya la même que d'habitude, un jeune homme de dix-sept ans aux yeux gris et aux traits aristocrates, à la seule exception près du bleu qui fleurissait sur sa pommette. Doucement, il porta la main à sa joue et retint un cri de douleur. Ses doigts se crispèrent sur le bord du lavabo tandis qu'il inspirait fortement, essayant de retrouver son calme. Il ne savait même plus ce qui lui avait valu ce coup au départ, le plus probable était qu'il avait encore poussé son père à bout. Orion n'était pas connu pour sa patience. Généralement, il se contentait de faire taire son fils aîné quand le ton montait avec un coup de ce genre. Sa mère préférait utiliser la magie. A chacun son style.
Le souffle haché pendant que sa colère retombait un peu plus chaque seconde, il retourna dans sa chambre en traînant des pieds. En bas, il pouvait entendre les invités arriver les uns après les autres mais il retardait au maximum le moment de descendre les rejoindre. Foutue réunion de famille ! Ce n'était même pas encore noël, cependant sa grand-mère Irma avait décidé de réunir tout le monde pour une occasion «surprise » avec une semaine d'avance. Sirius avait ricané en entendant cela. Surprise, tu parles ! Ce n'était un secret pour personne que Bellatrix avait enfin reçu son tatouage et intégrer les rangs du Seigneur des Ténèbres.
Soupirant, le jeune homme se laissa basculer en arrière sur son lit, fixant le plafond, l'humeur maussade. Il aurait aimé pouvoir s'échapper ce soir, aller chez un de ses amis ou même chez Alexia mais sa mère avait précisé que sa présence était exigée. Tout était question d'apparence dans cette famille. Sirius apparentait plus cela à une mascarade et il était la marionnette dont ses parents tiraient les ficelles. Il pourrait toujours clamer haut et fort son indépendance, il n'en restait pas moins qu'il était prisonnier dans sa propre maison.
Soudain, une voix déchira le silence.
- Sirius ! Regulus !
- La harpie entre en jeu, murmura-t-il. C'est parti.
En roulant sur lui-même il se remit sur ses pieds avant de sortir de sa chambre. Juste en face, la porte de son frère s'ouvrit également et Regulus eu un mouvement d'arrêt en le voyant. Ils se dévisagèrent une seconde puis, sans un mot, descendirent les escaliers tandis que les têtes d'elfes décapités semblaient les suivre sur leur passage.
- Ah ! Les voilà. Asseyez-vous les garçons.
- Tu aurais pu faire un effort sur ta coiffure, marmonna son père quand il s'assit.
Il se contenta de lui adresser un sourire insolent, fixant son regard sur sa cousine Narcissa, juste en face de lui. Immédiatement, il songea à Andromeda. Merlin ce qu'il aurait aimé qu'elle soit là. Peut-être que la soirée aurait été un peu plus supportable.
Immédiatement, l'attention générale fut capturée par Bellatrix qui ne cessait de parler avec révérence de son précieux mage noir. Sirius en était écœuré. Las, il se servit un autre verre de vin, espérant que ça l'aiderait à supporter sa famille pour le reste du repas. A un moment, Orion se leva pour porter un toast et la devise familiale retentit dans la pièce.
- Toujours Pur !
Sirius ricana.
- Un problème ? Demanda sèchement la tante Druella.
- Rien...Je me demandais juste combien de temps on tiendrait sans parler de pureté du sang. On est presque au plat, bravo, vous faites des progrès !
- Sirius ! Ne commence pas !
- C'est vous qui avez insisté pour que je sois là mère.
Walburga pinça les lèvres mais ce fut Bellatrix qui répondit avec hargne, comme d'habitude.
- Espèce d'ingrat ! Tu fais partie de la famille la plus pure d'Angleterre !
- Crois-moi, je m'en passerais bien.
- Rigole Sirius, oh oui rigole. Mais quand tu n'auras plus rien, moi je marcherais fièrement aux côtés du Seigneur des Ténèbres, plus glorieuse que je ne l'aurais jamais espéré.
- Si c'est la récompense pour être une meurtrière je préfère encore...
Mais Bellatrix l'interrompit, élevant le ton pour bien se faire entendre.
- Visiblement, Sirius a envie qu'on s'intéresse à lui. Alors vas-y. Comment vont tes amis ?
Il plissa les yeux, sentant le piège dans la voix mielleuse de la jeune femme.
- Ce ne sont pas tes affaires.
- Oh allez cousin, ne sois pas timide. J'ai entendu dire que Fleamont Potter avait eu quelques ennuis ces temps-ci. Les Aurors subissent de lourdes pertes, non ?
- Je suppose que tu es plus au courant que moi, Bella. Après tout, tu as assisté aux attaques non ?
- Effectivement, répondit-elle sans prendre la peine de mentir. Ça serait dommage qu'il arrive quelque chose à ce cher Fleamont n'est-ce pas ? Il laisserait veuve et orphelin derrière lui...
Sirius crispa les poings à la menace à peine voilée. En tant que second en chef du bureau des Aurors, il savait pertinemment que le père de James risquait sa vie plus de fois qu'il ne voulait bien l'avouer.
- Tu aimes ça hein Bella ? Inspirer la peur partout où tu vas. Est-ce que les enfants s'écartent déjà sur ton passage ou tu prévois de jeter encore quelques impardonnables pour parfaire ta réputation ?
- Sirius ! Hurla sa mère.
- Quoi ? La vérité est dure à entendre ?
- Arrête, tu deviens ridicule !
Elle le fusillait du regard, tremblante de rage, tandis que tous les invités suivaient la conversation sans oser intervenir, sachant pertinemment que cette affaire se jouait entre la mère et le fils. Il y a des années, Walburga aurait eu le dessus mais aujourd'hui Sirius n'était plus un petit garçon et il n'avait plus peur.
- Regardez-vous tous avec vos idéaux, cracha-t-il. Vous vous croyez tellement supérieurs sans vous rendre compte à quel point cette famille est devenu synonyme de persécution et de magie noire.
- Je ne te laisserais pas insulter le nom de nos ancêtres ! Tu n'es qu'une honte, une trahison !
- C'est ce que vous pensez ? Une honte ? Pourtant quand vous serez tous morts, votre précieux nom gravé sur vos tombes, je serais l'héritier. Et croyez-moi mère, vous aurez de quoi vous retourner dans votre cercueil !
-Comment oses-tu ? Tu me dois tout ! Je t'ai donné la vie, je t'ai élevé. Sans moi tu ne serais rien !
- C'est vrai que vous avez été une mère parfaite, railla-t-il.
Rouge de fureur, Walburga se leva, manquant de renverser sa chaise dans le mouvement. Sirius l'imita immédiatement, la dominant de sa taille. L'enfant s'était transformé en homme sous ses yeux, repoussant toujours plus loin les limites et les faisant littéralement exploser ce soir.
- J'aurais dû t'étouffer dans ton berceau, siffla-t-elle, la voix à peine plus qu'un murmure.
- Je regrette presque que vous ne l'ayez pas fait.
- Oh Sirius... Tu crois ne pas être comme nous mais regarde-toi. L'insolence, la morgue des Black. Tu ne peux pas rejeter le sang qui coule dans tes veines.
Ce fut au tour du jeune homme de blêmir de rage en entendant ses mots.
- Vous en êtes certaine mère? Parce que je serais ravi de vous prouver le contraire !
- Vraiment ? Mais écoute-toi ! Les paroles d'un adolescent sans éducation. Qu'est-ce que tu ferais sans nous, sans moi ?
- Rien ne peut être pire que cette maison !
- Tu changeras d'avis Sirius. Un jour, tu comprendras à quel point tu as tort et que la pureté du sang est la seule cause digne d'être défendue. Le Seigneur des Ténèbres montre la voie.
- C'est aussi ce que vous aviez dit à Andromeda ?
Le teint de Walburga s'enflamma à l'évocation de sa nièce.
- On verra si tu tiens toujours tes discours grandiloquents face à Lui, répliqua-t-elle, une lueur de folie dansante dans ses yeux gris.
- Comment ça ?
- Oh allons Sirius, tu ne crois tout de même pas que Bellatrix sera la seule à rejoindre ses rangs ? Comme tu l'as si justement fait remarquer, tu es l'héritier...
Sirius vacilla sur ses jambes en comprenant le sens de ses paroles. Il eut l'impression de tomber en chute libre, incapable de s'accrocher quelque part. La pièce entière s'effaça sous ses yeux et son champ de vision se rétrécit sur sa mère, occultant tout le reste. La harpie semblait jubiler.
- Jamais ! S'écria-t-il en recouvrant sa voix. Tu m'entends ? Je refuse !
- Cesse de faire l'enfant. Tu devrais être honoré de servir une cause qui te dépasse.
- Au diable votre cause !
- Petit impertinent ! Je suis ta mère, tu me dois le respect. A moi et à cette famille !
- Vous êtes complètement folle...souffla-t-il. Dévorée par votre ambition, vos traditions. Ça vous conduira à votre perte. Et entendez mes mots, mère, parce qu'ils se réaliseront. Vous mourrez dans cette maison que vous aimez tant, entourée des portraits de vos chers ancêtres, mais vous serez seule. Seule comme vous l'avez été le reste de votre existence, rongée par votre haine et vos regrets. Et je boirais à votre mort !
La dernière phrase claqua dans la pièce, tout le monde se figeant face à l'audace du jeune homme. Walburga elle-même paraissait avoir arrêté de respirer, dévisageant son fils ainé. Elle lui avait donné naissance et l'avait tenu contre son sein alors qu'il n'était qu'un nourrisson. Cet enfant turbulent qui ressemblait tant à son père et qui aujourd'hui la haïssait plus que tout. Pourtant, malgré son rejet de sa famille, elle ne pouvait s'empêcher de voir le Black en lui. Cette conviction qui perçait dans sa voix, ce mélange de colère et de folie qui l'habitait en cet instant. Le sang ne pouvait mentir et des siècles de traditions se trouvaient en lui. Il pouvait renier son héritage autant qu'il le souhaitait, elle connaissait la vérité. On n'échappe pas à la famille.
- Tu es un Black, Sirius, dit-elle d'un ton chancelant. Que tu le veuilles ou non, tant que tu vivras sous mon toit...
- S'il ne faut que ça, coupa-t-il, alors très bien. Adieu !
Brusquement, il leva son verre comme un salut ironique et insolent puis l'avala d'une traite. Sans un mot de plus, il commença à s'éloigner et Walburga fit un pas en avant, sa baguette à la main.
- Sirius ! Claqua-t-elle. Qu'est-ce que tu fais ?
- Je m'en vais. Plutôt mourir que de rester une seconde de plus avec vous !
- Si tu fais ça... Je te jure, Sirius, que si tu passes cette porte ce n'est pas la peine de revenir. Tu seras déshérité à la minute où tu auras franchi ce seuil.
- Parfait !
Il planta une dernière fois son regard dans celui de sa mère, la défiant de le retenir et recula à nouveau. Walburga eu un sursaut d'espoir en le voyant se figer dans l'embrasure, les épaules tendues comme s'il hésitait mais Sirius se tourna vers son frère, toujours assis à table.
- Reg'... C'est ta dernière chance. Tu viens ou pas ?
- Qu...Quoi ?
- Tu m'as entendu. C'est eux ou moi.
- Regulus ! Rugit-t-elle. Reste où tu es. Ne bouge pas.
- C'est ton choix, rétorqua Sirius. On peut partir ensemble.
- Je...
- Si tu préfères être le parfait héritier, libre à toi, mais tu ne seras plus mon frère.
Regulus sembla complètement déstabilisé et resta immobile, son regard alternant entre sa mère et son aîné. La tension dans la pièce était tellement palpable que même Kreattur ne bougea pas, recroquevillé dans un coin de mur.
Face au silence de son frère, Sirius comprit. Avec un rictus désabusé, il détourna la tête.
- Evidemment. Les Black avant tout pas vrai ?
Sachant pertinemment qu'il n'avait plus rien à faire ici, il fit volte-face. Ce n'était même pas la peine d'aller chercher des affaires dans sa chambre, il avait déjà sa baguette et il ne voulait rien qui vienne de cette foutue maison. Alors qu'il passait la porte, la voix de sa mère rugit dans son dos.
- Va en Enfer !
Il ne se retourna pas.
- Je le quitte au contraire !
Enfin libre, Sirius s'enfonça dans la nuit.
**
*
Concentré, James fixa avec insistance le plateau de jeu en face de lui. Il savait que son prochain coup serait déterminant et le sourire de son père n'avait rien pour le rassurer. Sur leur gauche, sa mère le regardait elle-aussi, l'air amusé.
- Cavalier en E5, dit-il finalement.
Le sourire de Mr Potter s'agrandit. Calmement, il joua à son tour et James baissa la tête en voyant sa reine se faire éjecter de l'échiquier. Il venait de se faire battre à plat de couture. Encore.
- Désolé fiston. Echec et mat.
- T'es pire que Remus...
Sa mère éclata de rire.
- Ce n'est rien, James. Tu y arriveras la prochaine fois.
- C'est que tu avais dit hier...
- Ah... souffla-t-elle. Tu sais, on ne peut pas être bon partout. Regarde ton père, il n'arrive toujours pas à digérer sa défaite au Quidditch de cet été.
- Euphemia ! On avait dit que tu n'en parlerais pas.
- Oups !
Elle lui jeta un regard pétillant, réprimant à grande peine un sourire. Mr Potter feint d'être blessé et se pencha vers son fils, chuchotant assez fort pour être parfaitement audible.
- Ne confis jamais rien à une femme, dit-il solennellement.
- Qu'est-ce que c'est censé vouloir dire Fleamont Potter ?
James leva les mains, agitant un drapeau blanc imaginaire.
- On se calme. Présence d'enfant sur le champ de bataille.
- Tu as cessé d'être un enfant le jour où tu as commencé à te raser, rétorqua sa mère. Et dire qu'il y a encore quelques années tu étais encore mon bébé dans son petit pyjama...
- Maman !
- Excuse-moi. C'était mon moment nostalgie.
Souriant, James regarda ses parents. Parfois ils pouvaient vraiment être étranges. Et la suite de la conversation ne fit que confirmer cette affirmation.
- En fait, j'ai reçu ton bulletin du premier trimestre aujourd'hui.
- Oh, grimaça-t-il. Alors ?
- La même chose que l'année dernière ; notes excellentes sauf en Divination et un comportement déplorable. McGonagall a même ajouté en bas de la page qu'elle te voyait plus en heure de colle qu'en cours. On avait dit que tu ferais un effort James...
- Je sais mais...
- Ne te fatigue pas en excuse, j'entends les mêmes depuis tes onze ans. Je suis habitué. Par contre, ce qui m'étonne, c'est que tu as plusieurs retards le matin.
- Panne de réveil... ?
Sa mère ne parut pas dupe.
- James, je t'ai déjà vu te lever à l'aube pour jouer au Quidditch. Tu n'as pas de problème pour te réveiller d'habitude. Et n'essaye pas de me faire croire que tu te perds dans le château, tu connais cette école comme ta poche.
Mal à l'aise, James se tortilla dans son fauteuil. C'est vrai qu'il avait souvent eu du mal à sortir de son lit ces derniers temps. Les devoirs en sixième année devenaient de plus en plus compliqués, il y avait aussi les entraînements de Quidditch et surtout les nuits blanches une fois par mois à cause du loup-garou. Evidemment c'était exclu de révéler à ses parents qu'un de ses meilleur ami était un lycanthrope. Il l'avait juré à Remus, il emporterait son secret dans la tombe.
Attendant toujours une réponse, Mrs Potter reprit de façon détachée.
- Il y a quelque chose qui te tracasse ? Demanda-t-elle. Parce que tu peux nous en parler tu sais.
- Une fille ? Ajouta son père malicieusement.
James comprit soudain le tour que venait de prendre la discussion.
- Je vois... Bien tenté mais vous ne saurez rien.
- Les adolescents, soupira Mr Potter comme si le mot à lui seul était un juron affreux. Ils pensent toujours être plus malins que nous. Donc si je te parle d'une certaine Lily Evans... ?
- Co...comment ?
Avec un clin d'œil victorieux, sa mère répondit d'une voix chantante.
- Peter est un garçon adorable. Il donne énormément d'information autour d'un verre de lait et une assiette de biscuit.
- Je savais que je n'aurais pas dû l'inviter hier.
- Alors cette Lily ? C'est ta copine ?
James s'ébouriffa les cheveux dans un geste presque automatique.
- Pas vraiment non...
- Mais tu aimerais bien... ?
- Maman ! Ça suffit, on peut changer de sujet ?
Elle ouvrit la bouche pour protester, cependant on toqua soudainement à la porte. C'est ce qu'on appelait être sauvé par le gong. Fronçant les sourcils, Mr Potter jeta un coup d'œil à l'horloge posée sur le manteau de la cheminée qui indiquait 23h15 passée. Il s'éloigna dans le couloir pour aller ouvrir tandis que James et sa mère échangeaient un regard perplexe. Ils n'arrivaient pas à distinguer la conversation, uniquement des voix étouffées qui leur parvenaient depuis le perron de la maison. Quelques secondes passèrent avant que son père ne revienne, Sirius dans son sillage.
La surprise de voir son meilleur ami débarquer à cette heure-ci étonna James pourtant il sut immédiatement que quelque chose n'allait pas. Sirius était trempé, comme s'il était resté dehors sous la pluie pendant un moment et même ses mèches de cheveux noirs plaquées sur son visage n'arrivaient pas à cacher le bleu sur sa joue. Il avait l'air hagard, les mains tremblantes et les épaules voutés.
C'est bien simple, pour la première fois depuis qu'ils se connaissaient, Sirius semblait brisé.
- Je... Je me suis barré, James. C'est terminé.
- Comment ça ? Qu'est-ce qui s'est passé ?
- Je ne sais pas trop. Un peu comme d'habitude.
Sirius déglutit et ferma les yeux brièvement avant de les rouvrir.
- J'en pouvais plus James. Tu aurais dû les entendre...
- Tu devrais peut-être t'assoir, intervint Mrs Potter avec douceur, s'avançant vers lui.
Mais le jeune homme recula, secouant la tête. Le corps agité de tremblements, il se mit à faire les cents pas et sa voix se durcit quand il reprit la parole.
- Je les hais ! Tous !
- Sirius...
- Crois-moi Cornedrue, si tu avais été là...
James frissonna en l'entendant employer son surnom de Maraudeurs devant ses parents, sachant que son meilleur ami devait vraiment être perturbé pour laisser échapper cela.
- La harpie voulait que je le rejoigne, lâcha-t-il brusquement.
- Qui ?
- A ton avis ? Le Seigneur des Ténèbres comme dirait ma chère cousine. Elle aussi était complètement folle ce soir. Comme si ça devrait me surprendre...
- Et alors quoi ? Tu as juste claqué la porte ?
Avec un rire sans joie, Sirius s'arrêta pour lui faire face.
- Ouais, c'est un peu ça. J'ai marché dans Londres pendant environ une heure avant d'appeler le Magicobus. Ton adresse est la première chose qui m'est venu à l'esprit.
Il y eu un léger silence.
- Je... je ne savais pas où aller.
- C'est bon, assura James immédiatement. Tu peux rester autant que tu veux.
Mr Potter s'empressa d'approuver, regardant Sirius avec gravité.
- Tu es le bienvenu chez nous, évidemment.
- Merci. Mais...
- Quoi ?
- Regulus, murmura-t-il. J'ai essayé, James. Je jure que j'ai essayé ! Je lui ai proposé de venir !
- Il n'a pas voulu ?
Sirius serra les mâchoires, se retenant visiblement à grande peine d'envoyer son poing dans le mur.
- Il avait bien trop peur de désobéir à notre mère. Le lâche. Il aurait pu... On aurait pu partir ensemble !
- Sirius, tu n'es pas responsable des décisions de ton frère...
- Bien sûr que si ! Ce n'est qu'une question de mois avant qu'il ne soit enrôlé chez les mangemorts et je ne pourrais rien faire parce que c'était censé être moi !
- Arrête, ne dis pas ça.
- Mais c'est la vérité James. Je suis l'aîné, l'héritier.
James s'approcha de son meilleur ami, plantant ses yeux noisette dans les siens. Il était rare de le voir aussi sérieux et même ses parents ne tentèrent pas de s'interposer, comprenant que la conversation se jouait entre les deux garçons.
- Et tu n'es pas comme eux. Quoiqu'ils disent Sirius tu es différent d'eux. Le simple fait que tu sois là ce soir le prouve.
- Je ne veux pas de ta pitié...
- Je sais et c'est pour ça que tu es venu. On est frère non ?
- James...
L'expression du brun se fit encore plus déterminée.
- C'est vrai, après tout tu aurais pu aller chez Remus ou Peter mais c'est chez moi que tu es venu ! Ce n'est pas de ta faute d'accord ?
Sirius hocha lentement la tête.
- Et sinon, reprit James plus calmement, comment t'as eu ce bleu ?
- Hum ? Dit-il en portant mécaniquement la main à sa joue. Oh un excès de zèle de mon père.
- Très bien ça suffit, intervint Mrs Potter les larmes aux yeux. Je pense qu'il vaut mieux qu'on reparle de tout ça demain, une fois que tout le monde sera reposé. Allez, on va dormir.
- Je peux prendre le canapé pour ce...
- Ne sois pas ridicule Sirius, coupa-t-elle avec gentillesse. Tu dormiras dans la chambre de James cette nuit et je te préparais la chambre d'ami demain. Ta chambre en fait. Tu es chez toi, d'accord ?
Une boule dans la gorge et incapable d'articuler la moindre parole, il acquiesça, tentant de faire passer sa reconnaissance sans mots. Alors que les deux adolescents quittaient la pièce pour monter les escaliers, Mr Potter les arrêta une ultime fois.
- Sirius, appela-t-il.
- Oui ?
- Est-ce que tu es sûr de toi ?
La réponse fusa sans réfléchir.
- Certain, dit-il. J'ai choisi mon camp.
Chapitre XXIII : L'enquête avance
Tout était identique, comme si rien n'avait bougé depuis son départ. Son lit avec sa couverture lilas était parfaitement fait, une pile de livre en équilibre précaire s'entassait sur son bureau et ses vinyles s'alignaient sur son étagère. Lily tourna sur elle-même une fois de plus, englobant sa chambre du regard et ne put s'empêcher de sourire. Certes, ça n'avait rien à voir avec son dortoir à Poudlard mais c'était sa chambre d'enfance, celle où elle avait grandi. En quelques enjambées, elle alla se planter devant la fenêtre et écarta les rideaux. Même la rue n'avait pas changée.
La petite banlieue de Carbone-les-Mines, ville ouvrière dans la région des Midlands, était composée de lotissement, de maisons en briques et d'une rivière qui coupait le quartier en deux. Lily avait appris à faire du vélo dans ses rues, observant ses voisins, les pelouses bien entretenues ainsi que les demeures toutes semblables au charme typiquement britannique. C'était chez elle. En réalisant cela, un sentiment de chaleur se répandit dans sa poitrine.
- Lily ! Descends ! C'est l'heure de dîner.
- J'arrive maman !
La jeune fille repoussa sa lourde valise pas encore défaite dans un coin de la chambre et se précipita dehors. Ses pas raisonnèrent dans l'escalier puis elle entra dans le salon, haussant un sourcil en voyant que ses parents et Pétunia s'y trouvaient déjà tous ensemble assis autour de la table.
-T'aurais dû m'appeler pour aider à mettre la table...
-Mais non ! Dit Mrs Evans en souriant. Tu dois être fatiguée avec le voyage, reposes-toi.
-Ca sent bon ! Qu'est-ce qu'on mange ?
-Poulet et riz à la crème. Je sais que tu aimes ça.
Lily sourit. Etre à la maison à nouveau paraissait presque étrange. D'habitude elle mangeait entourée d'un brouhaha permanent en surveillant du coin de l'œil que Potter ne renverse pas la cruche de jus de citrouille sur la tête de quelqu'un. Pourtant, pendant deux semaines, elle allait pouvoir être une fille normale, sans magie ni baguette. Et surtout elle pourrait enfin écouter la radio ou regarder la télévision. Retour au monde moderne !
- Bon appétit.
- Merci, dit Mr Evans en se servant une aile de poulet. Alors Lily, raconte-nous. Comment ça se passe à l'école ?
- Oh bien, comme d'habitude. Les cours, les profs, les devoirs...
- Vous avez été à Pré-au-Gard ?
- Pré-au-Lard, corrigea doucement. Oui, on a eu une sortie il y a deux semaines. J'ai ramené des bonbons.
Son père eu l'air ravi. Cependant, Lily remarqua que sa sœur s'était légèrement crispée à la mention de toutes ses choses « bizarres » et elle tenta de changer de sujet.
- Et toi Tunie ? Tout va bien ?
- Hum ? Oui... J'ai obtenu un poste de secrétaire dans l'entreprise du Dr Hurtnell. Tu te souviens de lui ?
- Bien sûr. Il te donnait toujours des sucettes à la cerise après une consultation quand on était petite.
Pétunia hocha la tête, se rappelant elle aussi ce souvenir. Elle allait bientôt fêter ses dix-neuf ans et avait terminé ses études l'année dernière.
- Chérie, parle-lui de Vernon, intervint leur mère avec entrain.
Aussitôt, les joues de sa sœur s'empourprèrent et elle se mordit la lèvre en jouant nerveusement avec sa fourchette.
- Je...C'est mon nouveau petit ami. On s'est rencontré à un bal en septembre, sur la grande place. Il s'appelle Vernon, Vernon Dursley.
- Vraiment ? S'exclama Lily. C'est génial ! Je pourrais le rencontrer ?
Pétunia eu l'air paniqué.
- Ce n'est peut-être pas une bonne idée...
- Pourquoi ?
- Il pourrait te trouver étrange. Je ne veux pas qu'il pense qu'on est une famille de fou.
- Pétunia ! Cria Mrs Evans tandis que Lily se tassait sur sa chaise. Ne sois pas méchante.
- Quoi ? C'est vrai non ? Je ne veux pas que Vernon prenne peur parce qu'il y a aura une chouette dans la maison ou que la conversation dérive sur des formules magiques !
Un silence lourd de tension plana au-dessus de la table jusqu'à ce que Lily ne décide de le briser, se forçant à sourire pour masquer son malaise.
- Ce n'est pas grave, assura-t-elle, je comprends. C'est ton choix.
- Mais...
- Non maman, vraiment, ce n'est rien. Peut-être que je pourrais le voir plus tard, c'est juste encore un peu tôt.
- Exactement, approuva sa sœur. Plus tard sera mieux.
Le repas continua, chacun racontant des anecdotes pour détendre l'atmosphère mais Lily n'écoutait que d'une oreille distraite. Prétendre que l'attitude de sa sœur ne la blessait pas aurait été un mensonge sauf qu'elle refusait de le montrer. Elle n'avait pas besoin d'inquiéter ses parents. Mécaniquement, elle avala son assiette en prenant part à la conversation de temps en temps. Elle ne comprenait sincèrement pas comment sa relation avec Pétunia avait pu se détériorer à ce point. D'autant plus que ça semblait empirer chaque année. Instinctivement, elle repensa aux paroles que Potter lui avait dites quand elle avait douze ans, en haut de la volière par une journée brumeuse.
Ce jour-là elle avait reçu une lettre de sa sœur, la dernière qu'elle ne lui ait jamais envoyée au château, lui disant qu'elle n'était qu'un monstre dans une école de monstre. C'était après une violente dispute pendant les vacances et visiblement Pétunia avait encore des comptes à régler. Potter était arrivé à ce moment précis, la trouvant en larmes assise contre le mur. Ils ne s'entendaient déjà pas et c'était encore l'époque où il n'avait pas commencé à la draguer à chaque coin de couloir. Pourtant, il avait pris le temps de s'assoir près d'elle pour la réconforter. Ils ne s'étaient pratiquement rien dit, restant dans un silence paisible, mais au moment de partir il s'était arrêté juste avant de descendre les marches pour se tourner vers elle.
- Tu sais Evans, ça va s'arranger. Tu peux ne pas choisir ta famille mais tu ne peux pas non plus arrêter de l'aimer. Ta sœur s'en rendra compte un jour.
Du haut de ses douze ans, la conviction qu'il mit dans sa voix fit frissonner Lily.
- Qu'est-ce que tu en sais ? Tu es fils unique.
- C'est faux, répliqua James avec un petit sourire en coin. J'ai trois frères.
D'un signe de tête, il désigna la cours en contrebas et la rousse se pencha par-dessus la balustrade pour apercevoir les Maraudeurs qui attendaient leur ami.
Lily n'avait jamais oublié cette après-midi. Evidemment, sa guerre avec Potter avait repris le lendemain comme si de rien était mais ces mots étaient restés gravés dans son esprit en lettres de feu. Si trois amis pouvaient être aussi proches alors cela voulait bien dire qu'elle retrouverait Pétunia, sa propre sœur, un jour.
**
*
- Ah les garçons, vous êtes arrivés. Entrez !
- Bonjour madame Potter.
- Remus, combien de fois je devrais te répéter de m'appeler Euphemia ?
- Une fois de plus madame.
Mrs Potter soupira et cassa un œuf dans son saladier. Dans l'embrasure de la porte, Peter se hissa sur la pointe des pieds pour mieux voir la cuisine, curieux.
- Oui Peter, je fais mon fameux gâteau au chocolat. Promis il sera prêt pour le goûter.
- Vous êtes géniale madame !
- Hum... Allez, montez tous les deux. James et Sirius sont à l'étage.
- Merci madame.
- C'est Euphemia !
Sans répondre, les deux garçons s'élancèrent dans les escaliers.
La maison des Potter était réellement énorme et Remus se rappelait que son jeu préféré lors de ses premières visites était de parcourir le manoir de fond en comble. Généralement, James était plus que ravie de faire le guide, lui révélant toutes les cachettes secrètes. La famille possédait également une résidence secondaire, un cottage à Godric's Hollow. A vrai dire, Mr Potter avait fait fortune dans sa jeunesse en inventant la potion capillaire Lissenplis puis il avait gravit les échelons du bureau des Aurors jusqu'à en devenir le second en chef.
Alors qu'ils arrivèrent devant la porte, ils entendirent un grand bruit fracassant. Peter haussa un sourcil, hésitant à pousser la porte.
- Euh...
- Je pense qu'il faut intervenir, déclara Remus l'air grave.
Il poussa le battant, révélant lentement la chambre. James et Sirius étaient figés au milieu de la pièce, côte à côte, et une grande trace de brûlure noire s'étalait sur le mur.
- C'est moins grave que ça en a l'air, assura James tout de suite.
- Vous savez quoi ? Je crois que je ne veux même pas savoir. Mais nettoie ça avant que ta mère arrive.
- Ouais...
Penaud, James attrapa sa baguette et l'agita distraitement. La marque s'effaça, ne laissant aucun indice de l'incident.
Ils s'assirent tous sur le lit comme d'habitude. Inconsciemment, tous les regards se dirigèrent vers Sirius.
- Alors...commença Peter. Tu vis ici maintenant ?
- Ouais, je suppose. J'ai pris la chambre d'amis. C'est juste en attendant de trouver de l'argent pour avoir mon propre appart'.
- Tu restes autant que tu veux, on te l'a déjà dit.
- Et moi que je ne veux pas abuser de votre hospitalité.
Remus sourit en voyant James hausser les épaules, balayant la phrase de la main.
Il avait appris la nouvelle il y a deux jours par lettre et même s'il en avait été choqué il ne pouvait pas dire que ça le surprenait non plus. Il savait pertinemment qu'un jour Sirius ne supporterait plus les remarques de ses parents, que les disputes iraient trop loin. Ce jour était visiblement arrivé.
- En fait, s'exclama Peter, j'ai des infos sur la bague.
- La bague ?
- La bague du traître ou de la traîtresse de Gryffondor. Je sais qu'on avait un peu laissé l'enquête de côté mais je suis tombé par hasard sur une vieille photo dans un numéro de la Gazette.
- Comment t'as eu l'idée d'aller chercher là ?
- Oh tu sais bien, ma grand-mère fait la collection des journaux. Elle en a des piles entières chez elle et comme je m'ennuie ça m'arrive d'y jeter un coup d'œil.
James frissonna à la mention de la vieille dame, se remémorant la fois où elle l'avait pratiquement menacé de coups de balais parce qu'il était mal coiffé.
- Regardez, j'ai découpé l'article.
De la poche de son pantalon, Peter sortit en petit morceau de papier froissé et jaunie. Le titre annonçait « Tournoi national de Bouchon baveux : deuxième victoire consécutive pour l'équipe de Bristol ». Juste en dessous il y avait une photo d'un groupe de personne, l'air heureux qui se prenait dans les bras. Une jeune femme se tenait au premier plan, brandissait fièrement un trophée à bout de bras. En plissant les yeux, Remus remarqua alors qu'elle avait une bague en or surmonté d'une pierre verte glissée à l'annuaire. La bague qu'ils avaient trouvé il y a un mois et qui appartenait certainement au traître ou à la traîtresse de Gryffondor.
- Vous croyez que c'est la même ?
- Sûrement, répondit Sirius. Après tout il ne doit pas y en avoir des tonnes, c'est un vieux bijou, probablement de l'art de gobelin. C'est le genre de truc qu'on se transmet de génération en génération dans une famille.
- En tout cas la photo date de 1961, c'était il y a un sacré bout de temps...
- Hum...marmonna Remus. Et on a son nom à cette fille ?
- C'est marqué dans l'article, dit James. Elle s'appelle Griselda Lynch. Mais elle porte une bague de fiançailles à l'autre main donc elle a sûrement changé de nom.
- Ça serait bien notre veine...
Alors que James parcourait une fois de plus l'article des yeux, la porte de la chambre s'ouvrit soudain sur Mrs Potter.
- Maman ! On toque avant d'entrer !
- Pourquoi ? C'est encore chez moi à ce que je sache. Et puis je venais juste vous dire que mon gâteau est prêt, c'est l'heure du goûter.
- Chouette ! Cria Peter en se levant d'un bond. On arrive.
Mrs Potter sourit, amusée. Apercevant la coupure du journal, elle se pencha avec curiosité.
- Qu'est-ce que c'est ?
- Rien, c'est pour l'Histoire. On doit trouver un vieil article de la Gazette pour le commenter.
- Oh c'est une bonne idée, dit-elle. Même si vous auriez pu prendre un évènement plus important que le tournoi national de Bouchon baveux.
- C'est très intéressant, protesta James.
- Si tu le dis... En tout cas, la fille sur la photo est enceinte.
Silence.
- Quoi ? S'exclama Sirius. Vous êtes sûre ?
- Certaine. Pas plus de trois mois je dirais mais c'est visible. J'étais un peu pareille quand j'étais enceinte de James.
- On se passera des détails...
- Pourquoi ? Tu ne veux pas un récit détaillé de ta naissance ? Parce que c'était les huit heures les plus longues de ma vie...
- Je vais manger, se contenta-t-il de dire en fuyant hors de sa chambre sous les rires de ses amis.
Un peu tard, une fois installé autour de la table pour manger, Remus repensa à leurs découvertes sur le traître de Gryffondor. Si Griselda était enceinte en 1961, son enfant devait avoir 15 ans aujourd'hui et donc être en cinquième année, ce qui réduisait considérablement la liste des suspects. Il y a avait en tout une dizaine d'élèves seulement qui pouvait correspondre à la description, filles et garçons compris.
Il mordit dans une autre part de gâteau au chocolat avant de se pencher pour attraper son sac.
- J'ai une nouvelle les gars.
- Quoi ?
- J'annonce officiellement que notre classement a changé. On n'avait pas compté les points du voyage de retour au début des vacances.
- Donc tu n'es plus premier au bavboules ?
- Ne sois pas ridicule, James, bien sûr que si.
Ils rirent.
- Mais Sirius a perdu sa deuxième place.
- Impossible !
- Désolé mais avec les deux victoires de James, il en est à trente-neuf points contre trente-sept pour toi, Patmol.
- Oh ! Je suis génial !
- Et tellement modeste, maugréa Sirius.
Mais James ne parut pas l'entendre car il bondit sur ses pieds et se mit à faire le tour de la cuisine, les mains en l'air, en chantant à tue-tête un hymne à sa gloire. Remus se demanda un instant ce qu'il aurait fait si on lui avait annoncé qu'il était premier (chose bien évidemment irréalisable puisqu'il était imbattable aux bavboules mais quand même...).
Alertée par le bruit, Mrs Potter revint dans la pièce et haussa un sourcil en voyant son fils.
- Merlin, est-ce que j'ai mis quelque chose qu'il ne fallait pas dans la pâte à gâteaux ?
- Mais maman, tu comprends pas ! Je suis deuxième aux bavboules !
- Je vois...
Elle n'eut pas le temps d'ajouter quelque chose car on sonna à la porte.
- Tiens, ton père rentre tôt aujourd'hui.
James regarda sa mère s'éloigner pour aller ouvrir et revint s'assoir à table. Il avala le reste de son gâteau avant qu'un de ses amis ne lui prenne.
- A votre avis, Griselda Lynch serait la mère du traître ou de la traîtresse de Gryffondor ?
- En tout cas elle possédait la bague. Et si c'est elle on peut être sûr que ce n'est pas un né-moldu.
- On s'en doutait un peu, dit Remus, après tout ce sont eux les cibles donc ça aurait été bizarre. Mais effectivement ça réduit le nombre de suspect. Qui est-ce qu'on connait en cinquième année dans notre maison?
- Pas grand monde, répondit James en comptant mentalement. Il y en a deux dans l'équipe de Quidditch ; Kevin Mells et Mary McDonald.
- Et les autres ?
- Aucune idée, je ne leur ai jamais vraiment parlé.
- On verra bien au retour de vacances.
- Ne parle pas de malheur, bougonna Peter.
Remus lui donna une tape réconfortante sur l'épaule au moment où Mrs Potter revenait vers eux, l'air à la fois surprise et incertaine.
- Tout va bien madame ?
- Euphemia, corrigea-t-elle machinalement. Et il y a quelqu'un pour toi Sirius.
Sirius fronça les sourcils, relevant la tête. Mrs Potter s'effaça et dans l'encadrement de la porte apparut alors Andromeda, les joues rougies par le froid hivernal, tenant sa petite fille dans ses bras. Pour l'occasion, elle avait transformé ses cheveux en un blond éclatant assortis de taches de rousseur absolument adorable.
- Remus ! Pépia-t-elle.
- Salut Dora. Tu vas bien ?
- Oui !
- Elle a insisté pour venir, expliqua Andromeda. Je passais pour te voir Sirius. Encore désolé d'arriver sans prévenir.
- Pas du tout, ce n'est rien, déclara Mrs Potter chaleureusement. Donnez-moi la petite, on va tous au salon pour vous laisser discuter. Allez les garçons !
Aussitôt, ils lui emboitèrent le pas et quittèrent la cuisine. Toujours assis, Sirius but une longue gorgée de jus de citrouille histoire de se donner une contenance.
- Je me demandais si tu viendrais...
- Evidemment que je suis venu et d'ailleurs je l'aurais fait plus tôt si tu m'avais prévenu que tu étais parti.
- J'avais autre chose à penser.
- Sirius ! Répliqua Andromeda sérieusement. Est-ce que tu te rends compte de que tu as fait ? De la décision que tu as prises ?
- A ton avis ?
- Honnêtement je ne sais pas. Je ne sais pas si tu réalises les conséquences. Je l'ai vécu avant toi. Ce ne sont pas des simples vacances, Sirius. Tu ne pourras plus revenir chez toi, ta propre maison, ni revoir ta famille.
Il bondit sur ses pieds, son calme de façade se fissurant lentement. Le cœur battant à tout rompre contre ses côtes, il eut un rire désabusé.
- Ma maison ? Ma famille ? Répéta-t-il avec hargne. Sois un peu réaliste Andy ! Ca ne l'était plus depuis longtemps ! Ils me haïssaient autant que je les haïssais ! Rien que le Square Grimmaurd me faisait horreur.
- N'exagère pas...
- Tu te moques de moi ? Est-ce que tu as oublié pourquoi t'es parti ? On n'en pouvait plus ! Ma mère, ton père, Bellatrix !
- Tu aurais pu ne pas commettre la même erreur que moi ! Tu aurais pu encore arranger les choses !
- Non...souffla-t-il. Qu'ils aillent tous au diable, j'en ai fini avec les Black !
Andromeda l'observa, la respiration haletante, essayant de calquer l'image du petit garçon qu'elle avait gardé à l'esprit à celle du jeune homme plein de rage qui se tenait en maintenant dans cette cuisine. Comment était-elle passée à côté du drame qui se jouait au sein de sa propre famille ? Son cousin avait toujours été le plus rebelle d'entre eux, certes, mais elle n'aurait jamais cru que la situation avait dégénéré à ce point. Un violent sentiment de culpabilité lui tordit le ventre en voyant le bleu sur la pommette de Sirius, sûrement le résultat d'une énième dispute avec ses parents. Quand elle avait claqué la porte il y a toutes les années elle n'avait plus cherché à prendre de leurs nouvelles. Elle avait construit sa vie avec Ted et sa fille, évoluant dans sa bulle de bonheur sans rien voir.
- Sirius... Je...
- Non, coupa-t-il, ne dis pas que tu es désolé.
- Mais je le suis ! J'aurais dû t'aider, faire quelque chose...
- Tu n'aurais pas pu.
- Peut-être que si, protesta-t-elle, peut-être que si j'avais été là, toi et Regulus vous...
- Regulus est un cas à part. Crois-moi, ça concerne mon frère et moi, personne d'autre.
La jeune femme garda le silence, comprenant au ton de sa voix qu'il valait mieux abandonner. Avec un soupir, elle se rapprocha de Sirius et le serra dans ses bras de toutes ses forces. Elle faillit fondre en larmes en constatant qu'il la dépassait désormais d'une bonne tête. Son cousin resta quant à lui figé une seconde avant de lui rendre son étreinte prudemment, comme s'il n'avait plus l'habitude.
- Tu sais que tu peux venir à la maison quand tu veux, chuchota-t-elle à son oreille. On t'accueillera la porte grande ouverte.
- Je sais...merci, Andy. Merci.
- On devient un peu pathétique, tu crois pas ?
Il rigola.
- Si mais ça me dérange pas pour une fois.
Andromeda posa sa tête sur son épaule, laissant un léger silence s'installer avant de se dégager avec douceur.
- Oh en fait ! J'allais presque oublier, si tu pouvais passer voir l'oncle Alphard. Il était malade dernièrement et il s'inquiète pour toi.
- Promis.
Ils discutèrent encore près d'une heure, savourant le simple fait de se retrouver. La dernière fois, à Pré-au-Lard, ils avaient surtout parlé de leur problème et de la nouvelle vie de la jeune femme mais aujourd'hui ils pouvaient retrouver la complicité qu'ils avaient enfants.
Au bout d'un moment, Nymphadora revint pour voir sa mère, tirant fièrement Remus dans son sillage. Sirius éclata de rire en le voyant avec des chouchous rose plein les cheveux.
- Pas. Un. Mot.
- Je n'allais rien dire... Mais bon cette couleur te va bien au teint tu sais.
- Sirius !
- Ma chérie, je t'avais dit d'être sage ! Dit Andromeda, l'air catastrophé. Oh je suis désolé Remus.
- Ce n'est rien, marmonna-t-il. James est dans un pire état.
Sirius se précipitait déjà dans le salon en hurlant :
- Je veux voir ça !
- Moi aussi, pépia la fillette en lui emboîtant le pas.
Andromeda et Remus, restés seuls dans la cuisine, échangèrent un regard consterné.
- Oui, dit-il, je les supporte depuis six ans.
- J'ai été la première victime des blagues de Sirius, rétorqua-t-elle.
- Aïe...C'est dur.
Elle rit en rejetant la tête en arrière puis plongea les yeux dans ceux ambrés du loup-garou, un sourire aux lèvres.
- Merci d'être là pour lui. Il a besoin de vous.
Remus haussa les épaules nonchalamment mais une sincère émotion pouvait se lire sur son visage.
- On a besoin de lui aussi.
Chapitre XXIV : Nouvel an sous la pleine lune
Noël passa en clin d'œil chez tout le monde mais toujours dans la bonne humeur. Les vacances faisaient vraiment du bien après la masse de travail de Poudlard. Comme chaque année, les Maraudeurs s'étaient envoyé des cadeaux, généralement le plus ridicule possible. Ainsi, Remus avait reçu un magnifique poncho de la part de James. Il s'était empressé de l'appeler via le miroir à double sens pour avoir une explication.
- Tu m'as offert un poncho ? Sérieusement ? C'est le pire crime contre la mode qui a été inventé !
- Vois le bon côté, tu ressembles à un chanteur d'un groupe de folk péruvien.
- Mon rêve effectivement...
- Te plains pas, intervint Sirius en apparaissant brusquement dans le champ, j'ai eu un bouchon de bière au beurre peint en rose pailleté de la part de Nymphadora.
- Je trouve ça mignon, dit Remus pragmatique.
La communication avait ensuite coupé. Fixant le miroir à double-sens, le jeune homme hésita un instant à rappeler mais sa mère l'appela à ce moment-là pour le petit déjeuner. Les jambes raides, il se leva de son lit en baillant. La pleine lune avait lieu ce soir et il se sentait épuisé malgré les vacances. En descendant l'escalier, il s'accrocha fermement à la rampe en bois pour éviter de trébucher, guidé par les bruits de casserole venant de la cuisine.
En entrant dans la pièce, il vit sa mère se retourner en lui souriant. Esperance Lupin était une femme d'une quarante d'année aux yeux doux, de la même couleur ambré que son fils, et à la peau marqué par l'inquiétude. Elle faisait plus âgée que son âge, notamment à cause de ses cheveux châtains striés de mèches blanches.
- Bonjour mon chéri. Ça va ?
- Un peu fatigué mais sinon oui.
Esperance hocha la tête, les lèvres pincées. Il savait que sa mère détestait quand la pleine lune tombait pendant les vacances, que ça la rendait nerveuse, pourtant il ne pouvait pas lui cacher son état.
- Où est papa ?
- Il est sorti chercher du bois au fond du jardin. Il va revenir dans quelques minutes. Des pancakes ?
- Oui s'il te plait.
Elle lui tendit une assiette pleine ainsi que le pot de sirop et Remus contempla son petit déjeuner piteusement, se demandant s'il arriverait à en avaler ne serait-ce que la moitié. En plus, son pancakes avait une ressemblance troublante avec la grand-mère de Peter, ce qui le perturba intensément.
- Quelque chose ne va pas ?
- Hein ? Oh non, dit-il en coupant un bout qu'il s'empressa d'avaler.
Par la fenêtre, il constata que la neige s'était remise à tomber. Ça avait commencé la veille de noël et le temps ne s'était pas calmé depuis, les températures descendant toujours plus bas, mais Remus ne s'en plaignait pas plus que ça. Il aimait la neige durant les fêtes, ça renforçait l'ambiance.
Brusquement, la porte derrière lui s'ouvrit en laissant entrer son père et une bourrasque de vent glacial par la même occasion. Esperance frissonna, claquant aussitôt le battant.
- Ah Remus, enfin réveillé !
- Ouais...Désolé d'avoir mis du temps à descendre, je parlais avec James et Sirius.
- J'ai appris qu'il était partit de chez lui. Pauvre gamin.
- Il habite chez les Potter pour l'instant.
- En même temps, intervint sa mère, je ne peux pas lui reprocher. J'ai déjà croisé Orion Black plusieurs fois et il n'a pas l'air d'un homme particulièrement charmant.
- Non pas vraiment...confirma Remus dans un souffle.
Il savait que Sirius avait une mauvaise relation avec sa mère et qu'il ne manquait jamais une occasion de la critiquer à voix haute mais il s'était toujours fait plus discret sur son père. Il soupçonnait que ce dernier avait d'autres types de punition sur ses fils. En effet, si Mrs Black avait un net penchant pour les sortilèges, il n'était pas rare de voir Sirius ou Regulus revenir de chez leur parent en boitant ou avec des bleus sur le corps. En deuxième année, Remus lui avait demandé ce qui s'était passé mais son ami avait seulement haussé les épaules sans répondre avant de lancer une blague pour détourner l'attention. Comme toujours au fond.
Une fois qu'il eut terminé son petit déjeuner, il remonta dans sa chambre, prétextant vouloir se reposer un peu. Ses parents le suivirent d'un regard inquiet alors qu'il quittait la cuisine.
Dans sa chambre, il hésita une seconde a effectivement dormir encore un peu avant de finalement s'installer à son bureau. Et pour une fois ce n'était même pas pour faire ses devoirs. Il attrapa la pile de lettres soigneusement rangée dans son tiroir et qui venaient toutes d'Anaïs Delan, la jeune fille de Serdaigle à qui il donnait des cours de métamorphose. Il avait été surpris quand au début des vacances elle avait installé une correspondance entre eux mais il aimait plutôt ça en fin de compte. A part les Maraudeurs, il n'avait jamais eu d'ami avec qui parler et encore moins des filles. Pourtant, il avait peur. Une petite voix dans son esprit ne pouvait pas s'empêcher de lui rappeler qu'il ne pouvait pas devenir plus proche d'elle sans lui mentir.
Avec un soupir, il finit tout de même par lui écrire une réponse, incapable de résister. Au bout d'une demi-heure à rédiger sa lettre, la fatigue commença à lui peser lourdement et il s'allongea un peu, histoire de se reposer quelques minutes. Evidemment, quand sa mère le secoua pour le réveiller, elle lui annonça que plusieurs heures avaient passé et qu'il était presque 17h.
- Remus, souffla-t-elle. La nuit ne va tarder à tomber.
- Déjà ?
- Oui, je n'ai pas voulu te déranger, tu étais épuisé et tu as dormi toute la journée.
Elle avait elle-même les traits tirés et il remarqua que ses mains tremblaient.
- Maman ? Tout va bien ?
- Bien sûr...C'est juste que...ça faisait longtemps que la pleine lune n'était pas tombé pendant les vacances. Je n'ai plus l'habitude.
- Ce n'est rien, ça sera bientôt finit, la rassurât-il.
- Je sais mon cœur, je sais.
Elle déglutit en regardant par la fenêtre. Remus suivit son regard, constatant qu'il faisait de plus en plus noir et il se leva lentement, le cœur battant à tout rompre. Si sa mère n'était plus habitué au fait qu'il soit à la maison pendant ses transformations, lui-même c'était accoutumé à la présence de ses amis et il se sentait nerveux à l'idée d'être seul ce soir.
Il se souvenait encore de leur première pleine lune ensemble. Il faisait les cents pas dans la cabane hurlante, attendant le début de la transformation avec appréhension quand il avait entendu des bruits de pas. Au début il avait cru que c'était l'infirmière qui revenait pour une raison quelconque mais il avait eu le choc de sa vie en voyant James, Sirius et Peter débarquer tout sourire, l'air fier d'eux. Les imbéciles. Ils s'étaient dit que ça serait drôle de lui faire la surprise. Inutile de préciser que Remus avait frôlé la crise cardiaque !
« - Merlin qu'est-ce que vous foutez là ?
- On vient visiter la cabane hurlante évidemment, répondit Sirius avec nonchalance.
- Ouais, c'est un monument historique après tout.
- Tu vois, tu nous as dit de nous cultiver, continua Peter. On t'écoute !
Comment ne pouvaient-ils pas prendre la situation au sérieux ?
- Les gars, sérieusement ! Ce n'est pas une blague, vous devez vous en allez. Maintenant !
James sourit, son sourire en coin qui le représentait tellement. Celui qui annonçait qu'il venait de faire quelque chose de potentiellement dangereux et interdit.
- James...
- Arrête de t'inquiéter Lunard.
- Vous êtes devenu timbré ou quoi ? La transformation ne va plus tarder, vous ne pouvez pas rester !
- C'est là que tu te trompes, répliqua Sirius.
- Bordel, sortez d'ici immédiatement !
Il attrapa le bras de Peter, commençant à le traîner vers la porte, mais James lui barra le passage.
- Attends ! Laisse-nous t'expliquer.
- On n'a pas le temps. Je vais devenir un monstre dans une minute alors barrez-vous par Merlin !
- Tu n'es pas un monstre, dit Peter d'une voix sourde.
- Si vous le croyez vraiment c'est que vous êtes encore plus fous que je ne le pensais.
- Remus !
- Non ! Je ne veux pas vous blesser ! S'il vous plait, les gars...partez...
Il sentait déjà son corps trembler, signe que la transformation arrivait. Il pouvait le sentir jusqu'au fond de son ventre.
- Remus, écoute-moi, dit James en le prenant par les épaules. On... on a réussi un truc. Un truc de dingue.
- Et en parlera demain...
- Non je...
- On est des animagi ! Cria brusquement Sirius.
Remus se figea sur place tandis que James rejeta la tête en arrière, les yeux fermés, avant de se tourner vers son meilleur ami, l'air consterné.
- Sérieusement ? Et mon super discours alors ?
- Il ne t'aurait pas écouté donc...
- Génial Patmol, vraiment. Il va nous faire une attaque.
La respiration haletante, Remus regarda ses amis un à un.
- Pitié dites-moi que c'est juste une blague.
- Euh...non, dit Peter d'une petite voix.
- Vous êtes inconscients ! C'est illégal, dangereux, risqué, illégal, vous auriez pu...
- Respire, coupa Sirius. En plus tu as dit illégal deux fois.
Il n'arrivait pas à y croire. Ses amis étaient devenus des animagi. Pour lui. Pour ne plus qu'il souffre seul durant les pleines lunes. Le loup ne s'en prendrait pas à des animaux, c'était une certitude acquise scientifiquement. Une boule se forma dans sa gorge en réalisant ce que cela signifiait, en prenant conscience que leur amitié n'avait pas de limite. En face de lui, les garçons attendaient qu'il reprenne la parole, plein d'espoir.
- Remus... ?
- Merci, murmura-t-il. Merci. »
Le souvenir s'effaça de son esprit tandis que le visage de sa mère réapparaissait devant ses yeux. Elle lui semblait encore plus pâle que ce matin.
- Je vais y aller. A demain.
Esperance hocha la tête et serra son fils contre elle, lui caressant les cheveux doucement avant de l'embrasser sur la joue.
- A demain, dit-elle.
Remus redescendit les escaliers, hésitant à aller voir son père qui devait être dans le salon mais il n'eut pas le courage de l'affronter ni de voir la pitié sur son visage. Attrapant son gilet en laine que la mère de James lui avait offert pour son anniversaire l'année dernière, il ouvrit la porte et s'enfonça dans la nuit. Heureusement qu'il connaissait son jardin par cœur sinon il se serait cassé la figure plus d'une fois. Dès que sa vision se fut accoutumé à la semi-obscurité, il discerna la cabane au bout du terrain qui lui servait pour ses transformations. Dumbledore lui-même y avait jeté des sortilèges pour la renforcer et les murs étaient recouverts de poudre d'argent au cas où.
Tremblant, il rentra à l'intérieur. Rien n'avait bougé depuis la dernière fois. Sa mère avait laissé une bougie et une boîte d'allumette étant donné qu'il n'apportait jamais sa baguette avec lui de peur de l'endommager. Conformément à son rituel familier, il se déshabilla, ne gardant que son caleçon et ses chaussettes avant de s'envelopper dans une couverture en grelottant. Ses cheveux lui retombaient sur le front et il les repoussa d'un geste impatient, le corps tendu par l'appréhension. La première vague de douleur arriva une minute plus tard. Il avait l'impression que chacun de ses muscles se nouaient, comme une dizaine de crampes à la fois. Mais le pire restait quand ses os commençaient à craquer, ce qui se produit dans les secondes qui suivirent, comme d'habitude. Il poussa un hurlement de douleur, tombant à genoux. Les visages de ses parents, de James, de Sirius, de Peter, même d'Anaïs, flottaient dans son esprit et il tenta de s'y accrocher comme un noyer à sa bouée. Il eut un haut le cœur quand sa colonne vertébrale se brisa et que des tâches noires dansèrent devant ses yeux. Il savait qu'il n'allait pas tarder à perdre connaissance puis il se réveillerait le lendemain matin sans aucun souvenir. Pourtant, pour le moment, il ne ressentait que la douleur des griffes perçant ses ongles ou des crocs qui lui coupaient les lèvres.
La gorge roque à force de crier, il s'évanouit. Enfin.
**
*
La tête lourde, Remus cligna des yeux. Il avait l'impression d'avoir mal partout mais au moins il était au chaud et vraisemblablement dans son lit. Alors qu'il tournait la tête, il vit sa mère dans l'embrasure de la porte, portant un plateau. Quand elle s'aperçut qu'il était réveillé, elle sursauta.
- Oh ! Tu te sens bien mon cœur ?
- On peut dire ça... Pourquoi est-ce que je suis ici ?
- Je me suis réveillé tôt ce matin, impossible de dormir, expliqua-t-elle. Je suis allé à la cabane et tu étais inconscient sur le sol. Je t'ai fait léviter jusqu'à ta chambre.
Remus devina tout ce qu'elle ne lui avouait pas, étant devenu assez doué avec les années pour lire entre les lignes, à savoir qu'elle l'avait sûrement rhabillé ou que si elle n'avait pas pu dormir c'était à cause des hurlements du loup. Il culpabilisa en voyant les cernes qui soulignaient ses yeux ambrées, ceux dont il avait hérité.
- Je suis désolé maman...
- Non, coupa-t-elle fermement. Tu n'as pas besoin de t'excuser.
- Mais...
- Mon petit garçon... Je suis si fier de toi tu sais ? Mon Remus.
Il sentit les larmes lui monter aux yeux et il lui saisit la main, la serrant fortement. Elle lui sourit.
- Je t'aime, mon cœur.
- Moi aussi maman. Moi aussi.
Il passa la moitié de la journée dans son lit à récupérer, avalant des fioles de potion et se goinfrant de crêpe au chocolat que son père avait préparé. En fin d'après-midi, quand il arriva à tenir sur ses pieds sans voir le monde tourner autour de lui, il rejoignit ses parents au salon. Sur la table basse trônait un exemplaire de la Gazette du sorcier qui annonçait des disparitions ou des meurtres de nés-moldu en première page. Il ravala la rage qui lui rongeait le ventre et s'assit dans le fauteuil pour enfiler ses chaussures.
Son père fronça les sourcils.
- Où est-ce que tu vas ?
- Chez James.
- Remus...Tu es encore faible, peut-être que tu devrais...
- Ne t'inquiète pas, ça ira. J'ai promis que je passerais.
Sans attendre, il fonça vers la cheminée et cria l'adresse des Potter avant d'être enveloppé dans des flammes vertes. Quand il réapparut, Mrs Potter se trouvait devant lui. Elle se retourna en l'entendant sortir de l'âtre.
- Bonjour Remus. Tu vas bien ?
- Oui madame et vous ?
- Euphemia, corrigea-t-elle. Mais oui, très bien. Je te trouve un peu pâle non ?
- C'est l'hiver.
- Hum... Les garçons sont à l'étage si tu veux.
Remus la remercia puis se précipita vers les escaliers. Il ne prit même pas la peine de toquer à la porte et rentra dans la chambre de James directement. Ce dernier était assis sur son lit en train de lire un magazine de Quidditch tandis que Sirius se trouvait près de la fenêtre en train d'écrire une lettre apparemment.
- Ah Lunard! Pas trop tôt! Ça va ?
- J'ai l'impression qu'on m'a posé cette question vingt fois aujourd'hui.
- On s'inquiétait juste pour la pleine lune...
- Vous en faites pas, je vais bien. Qu'est-ce que tu fais Sirius ?
- J'écris à Alexia.
James roula des yeux.
- Ce qu'il peut être ennuyeux quand il est amoureux.
- Dit celui qui fait une obsession sur la même fille depuis ses onze ans.
- Evans et moi on est fait l'un pour l'autre, rétorqua-t-il.
- Une évidence qu'elle ne partage pas.
- La ferme !
Sirius éclata de rire et se baissa juste à temps pour ne pas se recevoir un coussin en pleine tête. Amusé, Remus secoua la tête et se laissa tomber sur le lit.
- Et toi Remus ? Des nouvelles de... mince c'est quoi déjà son nom ?
- Anna ?
- Anaïs, dit-il en soupirant. Et oui on s'envoie des lettres.
Sa réponse fit sourire ses amis comme des idiots.
- Ne commencez pas à vous imaginer des choses.
- Oh allez Lunard ! Cette fille est faite pour toi !
- Carrément, approuva Sirius. Elle est intelligente, préfète, calme et jolie. C'est ton double au féminin !
- Tu me trouves jolie ?
- Ne fais pas celui qui n'a pas compris.
Cette conversation commençait véritablement à glisser vers un terrain dangereux. Mal à l'aise, le jeune homme se tordit les mains et essaya de changer de sujet mais James ne fut pas dupe.
- Qu'est-ce qui te dérange ? Tu n'aimes pas Anaïs ?
- Ce n'est pas ça...
- Alors qu'est-ce qui ne va pas ?
- Tout va bien...
Sirius se rapprocha pour venir s'assoir avec eux et planta son regard gris dans celui de son ami.
- C'est le même « je vais bien » que je vous sors quand ce n'est pas le cas. Allez, raconte.
- Ce n'est pas si simple.
- Remus...
- Je suis un loup-garou ! Explosa-t-il. Vous pouvez prétendre que ça ne change rien à ma vie autant que vous voulez mais on sait tous que c'est faux. Je ne peux pas lui imposer ça.
Un long silence plana dans la chambre jusqu'à ce que James reprenne la parole.
- Tu n'es pas obligé de lui dire.
- Ouais génial, une relation basé sur le mensonge. Le rêve !
- Dis-lui que tu l'aimes, elle comprendra !
- Je ne peux pas !
- Pourquoi ?
- Parce que je l'aime
Silence perplexe.
- Donc tu ne peux pas lui dire que tu l'aimes parce que...tu l'aimes ? Récapitula Sirius.
- C'est ça.
Remus se donna une claque mentale. Ça sonnait quand même dans sa tête. Parfois il fallait qu'il évite de dire ses pensées à voix haute.
- Ecoutez, soupira-t-il, je ne suis pas prêt à révéler mon secret à quelqu'un d'autre d'accord ? Je ne connais pas Anaïs depuis longtemps et c'est une décision que je ne peux pas prendre à la légère. Donc pour l'instant le sujet est clos, c'est clair ?
- C'est toi qui vois, dit James. Mais je t'interdis de penser que tu n'es pas assez bon pour elle juste à cause de ta lycanthropie.
- Ok...Oh et les gars ?
- Ouais ?
- Bonne année !
**
*
Lily fixait son plafond, comptant inlassablement les fissures qui le parcouraient. Depuis hier, elle retournait son idée dans sa tête encore et encore sans arriver à se décider. On était le 9 janvier, les cours reprenaient le lendemain. Sa valisé était déjà bouclé, attendant d'être chargée dans la voiture demain matin. Comme tous les dimanches, ses parents et sa sœur était partit à l'église mais elle avait prétexté un mal de ventre pour rester à la maison.
On était le 9 janvier et c'était l'anniversaire de Severus. Et Lily ne savait pas quoi faire. C'était la première fois qu'elle ne serait pas avec lui pour ce jour-là et elle se sentait terriblement triste pour lui. Elle savait pertinemment que ses parents, ou du moins son père, oublierait certainement de lui souhaiter. A bout de patience, elle se passa une main dans les cheveux en se redressant.
- Oh et puis merdre ! Cria-t-elle toute seule.
Elle repoussa sa couverture d'un coup de pied, attrapa ses baskets et sa baguette puis dévala les escaliers en manquant de trébucher. Dans la cuisine, elle ouvrit le frigo à la volée pour s'emparer des cookies qu'elle avait préparé avec sa mère hier. Une fois qu'elle eut enfilé sa veste, elle se précipita dehors et enfourcha son vélo, son sac à dos lui cognant les épaules. La ville était silencieuse et paisible, aucun habitant n'ayant eu le courage de braver le froid. Lily se demandait même s'il n'allait pas neiger. Le vent lui fouettant le visage, elle arriva devant la maison de Severus en dix minutes à peine. Le quartier lui avait toujours fichu la frousse avec toutes ses petites allées obscures et les gens étranges vous observaient depuis leurs fenêtres.
- Lily ?
Surprise, elle se retourna. Severus était assis sur un muret, à une dizaine de mètre sur sa gauche. Il avait l'air tout bonnement sidéré de la voir ici aujourd'hui.
- Salut Sev'.
- Qu'est-ce que... qu'est-ce que tu fais là ?
- Je ne pouvais pas te laisser passer ton anniversaire tout seul, pas vrai ?
Severus resta interdit plusieurs secondes. Ses cheveux noirs avaient encore poussé, lui arrivant désormais presque aux épaules, et son teint était toujours aussi blafard que d'habitude. Il fixa la jeune fille puis, brusquement, se leva d'un bond pour venir la serrer dans ses bras. Lily manqua d'en faire tomber sa boîte de cookies mais se laissa faire.
- Tu me manques, Lily, chuchota-t-il contre son cou. Je veux que tu reviennes.
- Severus...
- Si tu savais à quel point je suis désolé !
- Je sais, murmura-t-elle, mais on ne peut pas revenir en arrière.
Il se raidit et se dégagea lentement.
- Pourquoi tu es là dans ce cas ?
- Je te l'ai dit. C'est ton anniversaire et tu ne dois pas être seul.
- Je ne veux pas de ta pitié Lily !
- Ce n'est pas de la pitié, contesta-t-elle, c'est juste en souvenir de mon meilleur ami.
- Il est toujours là !
- Non... Non je te l'ai déjà dit aussi, il a pris une voie où je ne peux pas le suivre. Ça ne m'empêche de m'inquiéter pour lui. Pour toi.
Doucement, elle lui tendit les cookies et il les attrapa d'une main tremblante.
- Tu aimes encore ça... ?
- Evidemment.
Lily sourit.
- Génial. Alors je vais y aller. Encore bon anniversaire Severus.
Elle se hissa sur la pointe des pieds et lui déposa un léger baiser sur le front avant de lui glisser à l'oreille, luttant contre les larmes.
- Tu me manques aussi.
- Lily...
Elle était déjà à nouveau sur son vélo, commençant à s'éloigner à toute vitesse. Planté au milieu de la rue, Severus la regarda s'éloigner, la boîte de cookies dans les mains.
- Lily ! Lily !
Chapitre XXV : Rentrée scolaire
- S'il vous plait ! S'il vous plait un peu de calme ! Miss Zabini, poussez votre valise de l'escalier ! Où sont les préfets ? Oh la la !
- Un problème Horace ?
- Ah Minerva... Euh, c'est-à-dire que...J'essaye de mettre un peu d'ordre mais...
Il laissa sa phrase en suspens, n'ayant nullement besoin de continuer au vu du vacarme qui couvrait sa voix. McGonagall pinça les lèvres et parcourut la scène du regard. Une cinquantaine d'élève s'entassait dans le Grand Hall, criant tous plus fort les uns que les autres, et elle était à peu près sûre qu'il y avait encore le double qui attendait dehors de pouvoir entrer. A chaque retour de vacances de noël c'était le même cirque. Et apparemment il était temps d'intervenir car elle crut voir James Potter commencer à escalader le sablier de Gryffondor, ce qui était une très mauvaise idée...
- Potter ! Je ne vous conseille pas d'aller plus loin ! Cria-t-elle. Et à qui diable est ce chat ?
- Chamallow ! S'exclama Marlène. Reviens ici !
McGonagall attendit que la jeune fille ait récupéré son animal et que la foule des élèves se soient rendu compte de sa présence pour sortir sa baguette. D'un geste fluide elle la pointa sur sa gorge, amplifiant sa voix par magie.
- Excusez-moi ! J'aimerais un peu de silence.
Aussitôt, toutes les conversations s'évanouirent.
- Pour éviter que vous restiez tous coincé ici au risque d'y passer la nuit, il va falloir nous organiser un peu. J'appelle tous les préfets à conduire leurs camarades dans leur salle commune respective et chacun d'entre vous doit essayer de ne pas rester dans le hall pour permettre aux autres de pouvoir entrer. Exceptionnellement, le dîner sera servi une heure plus tard pour vous laisser le temps de déposer vos bagages dans vos dortoirs. J'espère que vos vacances ont été excellentes et que vous avez révisé vos cours avec assiduité, même si je ne fais pas trop d'illusion sur ce point.
Quelques rires vinrent ponctuer la remarque.
- En dernier lieu, continua-t-elle, j'aimerais vous rappeler que les cours de Transplanage commenceront dès la première semaine de mars. Pour les élèves qui auront atteint leur majorité d'ici là ou qui les auront avant le 28 juin, date de l'examen, il faudra vous inscrire à ces cours si vous voulez passer votre permis. Ce n'est évidemment pas obligatoire mais vivement conseillé. Les listes d'inscription seront affichés sur les panneaux d'informations dans vos salles communes jusqu'à la fin de la semaine. Merci pour votre attention.... Oh et est-ce que Miss Pandora Van Houten pourrait passer me voir s'il vous plait ? Quant à vous Mr Potter, je ne vous conseille de tenter l'escalade de ce sablier !
- Oui madame ! Répondit-il en riant.
Marlène secoua la tête en voyant le sourire railleur de James. Il ne changerait jamais. Pourtant la phrase du professeur de métamorphose lui resta en tête pendant qu'elle montait l'escalier principal, traînant sa lourde valise derrière elle. Si Pandora était convoquée, c'était sûrement pour les agressions. Elle avait été la dernière victime, juste avant les vacances, et peut-être que cette fois elle arriverait à identifier les coupables. Marlène l'espérait réellement. La peur qui s'était installée dans le château devenait de plus en plus pesante.
Alors qu'elle se laissait tomber sur son lit avec soulagement, elle observa Dorcas et Alexia qui se chamaillaient comme d'habitude tandis que Lily faisait l'arbitre.
- Vos vacances se sont bien passées ? Coupa-t-elle fortement.
Dorcas tourna la tête vers elle.
- Si par bien tu entends que mes parents m'ont adressé plus de dix phrases et que ma sœur n'a pas mis la musique à fond pour une fois alors je suppose que oui.
- Tu dramatises, dit Alexia.
- Tu penses ? Et toi alors, comment va ton beau-père ?
- C'est mesquin Dorcas, lança Lily avec un regard de reproche.
- Charles et moi on fait des efforts pour se supporter. Même s'il reste un idiot qui a peur de la magie.
L'amertume dans la voix d'Alexia fit frissonner Marlène.
- Où est Alice ? Elle était derrière nous...
- Je crois que je l'ai vu partir avec Frank, répondit Lily.
- Est-ce que ça leur arrive de se décoller parfois ?
- Dorcas...
- Désolé. Je voulais dire « ah ce qu'ils sont mignons ensemble ! ».
Pas dupe, Lily lui envoya son oreiller à la figure alors que les deux autres filles éclataient de rire. Ça ne faisait même pas dix minutes qu'elles étaient revenus mais le dortoir commençait déjà à être en bordel. En soupirant, Marlène se releva pour ranger ses affaires. Elle n'avait pas pris grand-chose avec elle pendant les vacances heureusement et elle eut finit assez vite.
Alors que les filles criaient après Chamallow car il essayait d'aller dormir dans les armoires, Marlène sentit un mal de tête naître au fond de son crâne.
- Je reviens, je vais voir si je peux trouver Alice.
- Ok, à tout à l'heure !
Marlène referma la porte sur les cris de ses amies et de son chat. Elle hésita à aller frapper à la porte des garçons mais elle se ravisa en songeant que si Alice était avec Frank, ça ne serait certainement pas avec les Maraudeurs autour s'ils voulaient passer un moment calme ensemble.
Dans la salle commune, tout le monde se racontait leur vacances et il régnait un véritable vacarme. Elle chercha du regard si elle voyait la chevelure châtain d'Alice mais comme on pouvait s'y attendre elle n'était pas là. Marlène soupira et se décida à aller explorer le château. Il y avait encore énormément de personne dans les couloirs qui traînaient leur valise ou qui discutaient entre maison. Elle repéra Amelia Bones et Amos Diggory, les deux préfets-en-chef, qui tentaient de mettre un peu d'ordre dans tout cela, sans grand succès. Vers le quatrième étage, il y avait déjà un peu de moins de monde, même si Peeves s'amusaient à interpeller des élèves en se moquant d'eux.
- Je vais le tuer, déclara une voix familière dans son dos.
- Regulus !
Un immense sourire s'épanouit sur son visage et elle se précipita pour le serrer dans ses bras. Aussitôt, il se raidit, semblant ne pas savoir quoi faire de ses mains.
- On n'avait dit pas de câlin, grommela-t-il, c'était dans notre contrat d'amitié.
- Oh tais-toi et contente-toi de me dire que je t'ai manqué.
- Je croyais que tu voulais de la franchise...
- Reg' !
Elle lui donna un coup sur l'épaule.
- Tant de violence dans un si petit corps...
- Je retire ce que je pensais, tu ne m'as pas du tout manqué !
Regulus éclata de rire.
- Qu'est-ce que tu fais là McKinnon ?
- Je cherche Alice.
- J'ai l'impression que tu passes ta vie à chercher des choses.
- C'est pas faux... Mais toi ? Qu'est-ce que tu fais dans les couloirs ?
- Livia doit rendre un devoir en retard à Slughorn, j'essaye de voir si je ne peux pas le trouver.
- Ah... Je crois qu'il était là-bas, tu veux qu'on aille voir ?
- Euh...
Marlène vit immédiatement qu'il hésitait, détournant le regard. Ce fut à son tour de se raidir.
- Quoi ?
- Je ne sais pas si c'est une bonne idée qu'on nous voit ensemble...
Elle encaissa le coup, essayant d'éviter de montrer à quel point cette phrase la vexait. Elle savait pertinemment depuis le début qu'être amie avec Regulus impliquait une certaine discrétion, qu'ils ne pourraient jamais s'assoir à la même table pour déjeuner ni traîner tous les deux comme elle pourrait le faire avec les personnes de Gryffondor. Ce n'était pas tant le clivage entre les maisons qui posaient problème, ils n'étaient pas les premiers ; et ne seraient pas les derniers, à briser les « règles » en vigueur. Mais il n'était pas n'importe quel Serpentard, il était l'héritier des Black, étroitement surveillé par la bande de Rosier.
Cependant, il dû remarquer l'expression de son visage car il soupira.
- Marlène, je ne voulais pas dire que...
- Quoi ? Que tu as honte de moi ?
- Ce n'est pas ça, McKinnon tu le sais.
- Vraiment ? Répliqua-t-elle, incapable de dissimuler les tremblements dans sa voix.
Regulus la regarda profondément, une lueur d'hésitation dans ses yeux gris.
- Je ne veux pas qu'il t'arrive quelque chose, avoua-t-il doucement. Rosier pourrait...
- Je n'ai pas peur de Rosier !
- Tu devrais. J'ai l'impression que tu es de mèche avec Livia ! Vous êtes aveugles ou bien stupides ?
- Tu sais quoi ? S'exclama-t-elle après un court silence. Laisse tomber Reg' ! Je ne sais même pas pourquoi j'étais impatiente de te retrouver.
Les joues rouges, elle fit volte-face et commença à s'éloigner, le cœur battant follement dans sa poitrine. Elle avait oublié à quel point les Black pouvaient être buté. C'était presque un soulagement que les couloirs se soient légèrement vidés sinon elle était sûre qu'elle aurait pu passer sa colère sur quelqu'un. Rosier de préférence. Elle n'avait peut-être pas le caractère de Lily, Dorcas ou Alexia, étant plus calme et réservée, mais rien ne lui ferait plus plaisir en cet instant précis de balancer son poing dans le sourire parfait de ce fourbe de Serpentard.
- Marlène ! Hurla une voix. McKinnon arrête-toi deux secondes !
Regulus la rattrapa au milieu des escaliers, la forçant à se retourner en lui saisissant le bras.
- Tu cours vite pour quelqu'un avec de si petites jambes...
- Hilarant... Si tu es venu pour me narguer du haut de ton 1m78 ce n'est pas la peine.
- Déjà c'est 1m77 et ensuite je ne veux pas que partes.
- Pourquoi ? Tu as été assez clair sur le fait que...
- Marlène...
Il prononça son nom avec une touche de plaidoirie, fermant la distance entre eux si vite qu'elle dû prendre un peu de recul, trébuchant à moitié sur la marche derrière elle. Il tressaillit, ses yeux gris semblaient l'implorer de lui laisser une chance.
- Je n'ai pas honte de toi, McKinnon, assura-t-il avec douceur.
- Je sais...
Elle lui fit un petit sourire, incapable de rester en colère contre lui quand il la regardait avec une telle intensité. Elle savait que les vacances n'avaient pas dû être faciles pour lui, surtout compte tenu de la fugue de son frère. Plus que d'ordinaire le sujet était tabou et elle ne voulait pas le brusquer en lui posant des questions dessus, elle attendrait juste qu'il veuille en parler ou du moins qu'il y soit prêt.
- Ça te dit de venir réviser à la bibliothèque avec moi ? Le dîner n'est pas avant une heure.
- On ne risquerait pas de nous voir ? Rétorqua-t-elle malicieusement.
- Je doute que Rosier et sa clique ouvrent beaucoup de bouquins. Allez viens !
Son bras bouclé au sien, elle lui emboîta le pas en riant. Elle aurait pu l'envoyer balader mais n'avait aucune envie de retourner maintenant dans son dortoir et c'était tellement rare que Regulus lui fasse une proposition de ce genre qu'elle en profitait.
En arrivant à la bibliothèque, ils eurent le droit au fameux regard d'aigle de Mrs Pince et ils se dépêchèrent d'aller s'assoir à une table dans un coin du rayon « histoire de la magie » où ils étaient sûrs de ne croiser personne. Même Lily ne venait jamais ici, c'est dire.
- Je ne savais même pas que ce rayon existait, commenta Regulus en tirant une chaise.
- Je croyais que tu passais ta vie ici pour réviser ?
- Pas besoin, je suis naturellement intelligent.
Marlène rit, notant dans un coin de sa tête à quel point cette blague sonnait Siriusesque.
- Oh tiens, Alice et Frank sont là ! C'était bien la peine que je les cherche partout...
Il se retourna pour voir le couple qui se trouvait un peu plus loin, s'embrassant par-dessus leur manuel de cours.
- Et dire qu'on appelle ça travailler...
- Bah c'est Alice et Frank, ils sont presque déjà mariés.
Regulus renifla dédaigneusement.
- Quoi encore ?
- Je pense qu'on surestime le mariage
- Vraiment ?
- Le mariage est la principale cause du divorce.
Marlène secoua la tête en souriant.
- Oscar Wilde, dit-elle, impressionnée. Tu sais que c'est moldu ?
- C'est de la littérature, contesta-t-il.
- Certes. Donc tu ne crois ni en dieu ni au mariage. Tu me désespère.
- Merci McKinnon.
- Ce n'était pas un compliment.
- Je sais.
La conversation s'arrêta là et ils se mirent à réviser. Comme d'habitude, elle lui fit réciter ses fiches, des souvenirs de l'année dernière lui revenant en tête par la même occasion. Du coin de l'œil, elle l'observait à la dérobée, captant les mimiques qui n'appartenaient qu'à lui comme sa façon d'hausser les sourcils ou de faire la moue face à une question difficile. Parfois, pourtant, certains de ses mouvements nonchalants lui rappelaient ceux de Sirius. Mais ce n'était pas le moment de le faire remarquer à Regulus.
Une heure plus tard, alors qu'ils plaisantaient sur une phrase incompréhensible de potion qui devait servir à annuler la transformation en grenouille, une ombre fut soudain projetée sur leur table.
- La bibliothèque ferme, jeunes gens, informa Mrs Pince d'un ton sec.
Ils s'empressèrent de remballer leurs affaires, se faisant littéralement jeter dehors sans considération. Incapable de se retenir, Marlène éclata de rire en voyant Regulus tenter de ranger ses plumes et ses parchemins sans rien faire tomber. Il lui décocha un regard noir.
- Au lieu de te payer ma tête, aide-moi McKinnon.
- Comme tu veux Black.
Le jeune homme roula des yeux à la blague mais ne fit aucun commentaire. Une fois qu'ils furent prêts, ils se dirigèrent vers la Grande Salle puisque l'heure du repas approchait.
- Ca m'avait manqué, avoua-t-elle. Nos après-midi ensemble.
- Mouais...
- Arrête de faire l'insensible, je suis sûre que je t'ai manqué.
Regulus ne répondit pas, commençant à ralentir à mesure qu'ils approchaient. Ils ne pouvaient évidemment pas arriver tous les deux. Elle comprit que c'était le moment de se séparer et réajusta la prise sur son sac, lui adressant un sourire alors qu'elle commençait à partir.
- A la prochaine Reg' !
- Marlène !
- Hum ?
- Tu m'as manqué.
Son sourire fut éblouissant.
**
*
Elle sentait le mur de pierre froide contre son dos ainsi que les chuchotements des élèves autour d'eux mais pour l'instant Alexia s'en fichait comme de son premier devoir de divination. Sirius la tenait contre lui, l'embrassant fiévreusement. Si elle avait eu des doutes qu'elle lui avait manqué durant ces deux semaines de vacances, ce baiser lui montrait le contraire. Une de ses mains reposait sur sa hanche, jouant avec l'ourlet de son pull, tandis que l'autre venait se perdre dans ses cheveux.
Haletante, elle se recula légèrement.
- Waouh...
- Tu m'as manqué, se contenta-t-il de dire.
- Je vois ça...
Doucement, il posa son front contre le sien et elle l'embrassa à son tour, savourant ses lèvres contre les siennes. Elle ne l'avait pas revu avant aujourd'hui, chacun ayant des choses à régler. Elle avait passé pratiquement toutes ses journées à l'hôpital pour faire une batterie de test et Sirius était en plein drame familial. Du coup, ça faisait du bien d'être enfin à nouveau ensemble.
- Hum hum, intervint une voix. Nous sommes dans un lieu public.
- James, soupira Sirius en fermant brièvement les yeux.
- Oui ?
- Va-t'en ! Lancèrent-ils en cœur.
James feignit la stupeur.
- Tu entends ça Remus ?
- Ils ont raison, laisse-les tranquille.
- Tu parles d'amis, maugréa-t-il.
Toujours entourée par les bras de Sirius, Alexia rigola en entendant son ex-capitaine.
- Il est jaloux n'est-ce pas ?
- Oui et il s'ennuie surtout, précisa-t-il. Mon meilleur ami est une pile électrique.
- C'est James après tout. Et puis je dois retourner à mon dortoir avant d'aller manger donc je te laisse.
- Qu'est-ce que tu dois aller chercher ?
Son cerveau sembla se bloquer une seconde, ne sachant pas quoi inventer comme excuse. Elle devait en fait se rendre à l'infirmerie pour son traitement. C'était une des conditions que sa mère avait imposé désormais ; elle devait être suivit régulièrement par l'infirmière. Evidemment, Sirius n'avait pas besoin de le savoir.
- Oh rien, un truc dans ma valise. On se retrouve dans le hall dans dix minutes ?
Il n'eut pas le temps d'approuver qu'elle l'embrassa brusquement avant de s'enfuir à toutes jambes vers les escaliers. Sirius la suivit du regard, un sentiment de malaise dans la poitrine. Il n'avait pas pris de nouvelles de la jeune fille durant les vacances, trop occupé à gérer son pseudo déménagement chez les Potter, pourtant il avait l'impression que quelque chose avait changée chez elle.
James, Remus et Peter se rapprochèrent de lui.
- Ça va ?
- Ouais...Mais vous ne trouvez pas qu'Alex est bizarre ?
- Pas plus que d'habitude, dit Peter.
- Non, je suis sérieux. Elle cache un truc.
Levant les bras au ciel, James soupira.
- Et c'est repartit. Arrête de voir des complots partout. Pas vrai Lunard ?
- Dans un couple il faut de la communication. Parle-lui, elle te dira la vérité, répondit-il avec sagesse.
- Tu penses ?
- Ou alors, reprit James, tu engages un détective et tu l'as fait suivre 24/24h. Oh non mieux ! On verse un filtre de vérité dans son jus de citrouille pour l'interroger
Ses trois amis le dévisagèrent longuement.
- Ou tu peux aussi suivre le conseil de Remus effectivement...
- Oui voilà, c'est ce que je vais faire. Et James ?
- Hum ?
- Ne t'approche plus d'Alexia à moins d'un mètre.
**
*
Comme on pouvait s'y attendre pour un soir de rentrée, les elfes s'étaient surpassés pour le repas. Lily avait repris au moins trois fois de la tarte à la poire et elle se sentait tomber de fatigue. Pour une fois, elle n'avait pas du tout envie de reprendre les cours, elle s'était même plutôt habituée aux grasses matinées pendant les vacances. Un peu plus loin à la table, elle voyait Potter faire le pitre en tenant la cruche d'eau en équilibre précaire sur sa tête et elle se demanda où est-ce qu'il arrivait à trouver toute cette énergie. A croire qu'il ne s'arrêtait jamais. Elle faillit lui dire de se calmer mais n'en eut pas le courage en voyant le reste de la table rire de bon cœur. Après tout, ça faisait un divertissement...
- Lily ? Appela Alice.
- Oui ?
- Tu sais où est le directeur ?
Etonnée, Lily se pencha en arrière pour avoir la table des professeurs dans son champ de vision et remarqua que la place ordinairement occupé par Dumbledore était vide.
- Non aucune idée. On n'a pas encore eu de réunion de préfet...
Soudain, justement, les portes s'ouvrirent sur le directeur qui entra d'un pas ferme en faisant voler sa longue cape derrière lui. Dans son sillage, Pandora Van Houten, l'élève de septième année de Serdaigle, le suivait. Lily se rappelait qu'elle avait été convoquée plus tôt dans la soirée.
- Excusez-moi d'interrompre un si délicieux repas, commença Dumbledore avec son traditionnel sourire bienveillant, mais j'aimerais que monsieur Darren Mulciber vienne avec moi pour régler une affaire urgente.
Tous les regards glissèrent instantanément en direction de la table de Serpentard vers le groupe de Rosier. Mulciber arborait un visage fermé et inexpressif quand il se leva, rejoignant le directeur dans un silence de mort. Personne n'ignorait ce qu'il se passait, il n'y avait pas besoin d'explication pour le comprendre. Si Mulciber était emmené juste après l'entrevu de Pandora avec Dumbledore, ce n'était pas une coïncidence.
Lily remarqua Mary McDonald qui tremblait, se souvenant que la jeune fille avait été agressée l'année dernière par le Serpentard, même s'il s'en était sortie simplement avec un avertissement et des heures de colles. Potter sembla s'en apercevoir également car il se pencha vers sa coéquipière et lui chuchota quelque chose que Lily n'entendit pas mais cela suffit pour faire sourire Mary.
- Regardez la tête de Rosier, souffla Dorcas. Il est furieux.
- Cet imbécile...marmonna Alexia.
- Oh non, c'est justement le problème. Il peut être beaucoup de chose mais ce n'est certainement pas un imbécile. C'est ce qui me fait peur...
Intérieurement, Lily ne pouvait qu'approuver. Cependant, elle décida de ne pas s'en soucier ce soir. Elle était de retour à Poudlard et comptait bien en profiter.
Chapitre XXVI : Les sangs-pur triompheront
Les couloirs étaient remplis de chuchotement ce lundi matin. La rumeur s'était répandu comme une traînée de poudre mais Dorcas n'était pas étonnée, c'était Poudlard après tout. Essayez de garder un secret et vous pourrez être sûr qu'il sera sur toutes les lèvres en peu de temps. Personne ne savait qui avait annoncé la nouvelle mais au fond ça avait peu d'importance. Mulciber avait été renvoyé temporairement. La raison ? Pandora, la dernière victime des agressions, l'avait formellement reconnu. Il y avait aussi un deuxième agresseur, de Gryffondor si en croyait la rumeur, mais elle avait été incapable de l'identifier.
Au petit déjeuner, tous les regards semblaient se fixer sur une même direction : la table des Serpentard. Avery semblait bien seul sans son binôme, Rosier avait l'air de vouloir étrangler tout le monde et les jumelles Zabini ne finissaient même pas les phrases de l'autre. C'était dire que l'heure est grave.
Avalant une gorgée de café, Dorcas dévia son regard sur l'extrémité de la table où Lucinda se trouvait. Elles n'avaient pas parlé depuis le retour des vacances la veille ni même du baiser. Pourtant, Merlin seul savait à quel point ce fichu baiser la hantait. Elle avait l'impression de ne pas pouvoir le sortir de sa tête. Et ça l'agaçait au plus haut point quand elle voyait que Lucinda paraissait si sereine.
Brusquement, son attention se reporta sur ce qui se passait autour d'elle quand elle entendit la voix d'Alexia crier sur sa gauche.
- C'est de l'arnaque ! De l'arnaque pure et simple !
- Quoi ? Pas du tout. Je suis hyper généreux.
- James, on avait dit que ça devait être équitable.
- Ça l'est... affirma-t-il. Mais il faut appliquer le principe d'ancienneté.
Alexia se pencha par-dessus la table.
- Je le connais depuis aussi longtemps que toi.
- Je suis son ami depuis la première année.
- Je suis sa meilleure amie.
- Je le suis tout autant.
- Je sors avec lui.
- Je lui offre l'asile dans ma propre maison.
Pause.
- Je..je...
- Ah ah ! S'exclama James, victorieux. Quelque chose à ajouter Cassidy ?
Complètement perdue, Dorcas se tourna vers Marlène. Cette dernière suivait elle aussi l'échange tout en mangeant sa tartine beurrée, les cheveux tirés en queue de cheval, son devoir de potion posé près de son assiette.
- Qu'est-ce qu'ils font ?
- Ils tentent de déterminer un planning.
- Pour quoi ?
- Pour la garde de Sirius, répondit-elle sobrement.
Dorcas cligna des yeux.
- Pardon ?
- C'est très sérieux, dit Marlène en riant. Ils veulent se partager leur temps avec lui. Au début c'était une semaine sur deux et la moitié des vacances scolaires mais après Alexia a objecté qu'il vivait avec Sirius et qu'il partageait un dortoir avec lui donc il était avantagé. Ensuite, j'ai eu du mal à suivre les négociations mais Remus est partit à la bibliothèque chercher un livre de droit pour tenter de trouver un truc juridique et légal.
- Carrément ?
- Tu connais James, il ne fait pas les choses à moitié.
Elle ne pouvait pas lui enlever ce point.
- Et le principal intéressé, qu'est-ce qu'il en pense ?
- Sirius ? Aucune idée, il n'est pas encore arrivé.
- C'est ridicule, ils...
- Oh non ! Hurla James. C'est hors de question !
- Pourquoi pas ? Tu as peur que ça marche ?
- Tu ne peux pas faire disparaître « accidentellement » Chamallow pour amadouer Sirius. Il verra clair dans ton jeu.
- Peut-être mais au moins j'aurais fait quelque chose. Et toi ?
- Bah...je...
- Oui Potter ?
James semblait à court de mot (chose ô combien rarissime) et il se passa une main dans les cheveux devant l'air ravi d'Alexia.
- Vous faites ce que vous voulez comme idiotie mais laissez mon chat en dehors de vos plans tordus, intervint Marlène.
- Mais...
- Non. Ou j'en parle à Lily.
Face à cet argument d'autorité suprême, Alexia battit en retraite. Retour à la case départ.
Alors que le petit-déjeuner reprenait, une ombre tomba sur la table et Dorcas n'eut pas besoin de lever les yeux pour savoir que Sirius venait de débarquer, le sourire équivoque de James donnait une réponse suffisante.
- Ah ! Patmol, viens t'assoir ici.
- Non, s'empressa d'objecter Alexia. Tu peux te mettre à côté de moi.
Surpris, Sirius haussa un sourcil.
- J'ai loupé un truc ?
- J'ai trouvé !
Ils se retournèrent tous au son de la voix de Remus qui revenait vers eux, Peter sur ses talons, portant dans ses bras un énorme livre en cuir relié. Il le laissa tomber sur la table, manquant de peu de renverser les verres et d'écraser la corbeille de pain.
- Qu'est-ce que c'est ? Demanda Marlène, curieuse.
- Le volume IV du droit international sorcier dont le chapitre 5 est consacré entièrement à la Grande-Bretagne. Selon l'article 2 du code des droits sorciers, on ne peut pas obtenir la garde d'une personne majeure. Et même dans le cas contraire, les amis n'ont aucun droit de garde sur autrui.
- Je suis sa copine, précisa malgré tout la brune.
- Ca ne change rien, dit Remus. Désolé.
James et Alexia soupirèrent en s'affaissant sur le banc, croisant les bras dans un même mouvement comme s'ils avaient répété la scène des dizaines de fois au préalable. Encore plus perdu qu'il y a quelques secondes, Sirius observa ses camarades avec perplexité.
- Je suis largué, avoua-t-il.
- Ton charisme fait des ravages Black, dit Dorcas en se levant. Tu viens de lancer une guerre civile entre les deux Gryffondor les plus butés de l'histoire. Bonne chance !
- Quoi ? Dorcas ! Dorcas !
Mais elle éclata de rire en s'éloignant. Les petites histoires de ses amis l'amusaient certes énormément mais elle avait ses propres affaires à régler avant le début des cours. Une affaire qui portait le prénom Lucinda.
Traversant le hall au pas de course, elle s'élança dans les escaliers qui menaient vers les sous-sols. Elle avait vu la blonde quitter la Grande Salle au moment où Remus était revenu et elle ne voulait pas prendre le risque de la perdre. Elle ne venait pas souvent dans cette partie du château, à part pour les cours de potion, mais elle se repérait quand même assez bien au bout de toutes ces années. Le pire avait été quand elle avait onze, lors de la première semaine de cours. C'était bien simple, avec les filles elles n'étaient pas arrivées une seule fois à l'heure en classe. Lily en était catastrophée pendant qu'Alexia traînait derrière pour discuter avec les tableaux. Typique.
- Meadowes ?
Dorcas espéra ne pas avoir sursauté et se retourna lentement. En face d'elle, Lucinda se rapprochait, les sourcils froncés. Pour une fois que c'était elle qui était surprise ! Enfin, Dorcas devait quand même avoué qu'elle n'avait pas prévu que ça soit l'autre qui la trouverait en première.
- Je...je ne pensais pas te revoir...
- Pourquoi ? Tu embrasses beaucoup de personne sans les revoir ensuite ?
Lucinda haussa les épaules.
- J'avais juste peur que tu réagisses mal.
- C'est pour ça que tu es partit si vite ?
- Ouais... Je me disais que si je te laissais le temps de réfléchir...
- Tu te rends compte que c'est complètement dingue ? Coupa-t-elle. On ne se connait pas !
La voix de la brune sembla résonner contre les murs et Lucinda se mit à jouer avec une mèche de ses cheveux, piétinant sur place.
- Tu...tu ne te souviens pas alors ? Demanda-t-elle.
- De quoi ?
- La fête chez les Poufsouffle l'année dernière pour fêter la fin des BUSE. On a passé la soirée ensemble...
- Non. C'est faux, je m'en souviendrais.
Pourtant, un mauvais sentiment se répandit dans sa poitrine.
- Tu avais bu. Tu étais avec deux amies et elles étaient partit avec les Maraudeurs. On s'est retrouvé à parler toutes les deux.
Des flashes de la soirée fusèrent dans la tête de Dorcas. La soirée avait eu lieu fin juin pour célébrer la fin des examens et elle y était allée avec Alexia et Alice car Lily et Marlène n'avaient pas voulu venir. Elle se souvenait d'avoir dansé et discuté avec plusieurs personnes jusqu'à ce que ces amies disparaissent pour aller préparer une blague avec les Maraudeurs et Frank. Elle se revoyait boire quelques verres de whisky pur feu...puis plus rien. Le lendemain matin, elle avait eu droit à une gueule de bois et un discours réprobateur de Lily mais elle n'y avait pas repensé depuis.
Une vague de panique la traversa violemment et elle se rapprocha du mur pour ne pas tomber.
- Qu'est-ce...qu'est-ce qui s'est passé ?
- Juste un baiser. Rien de plus, je te jure.
- Tu es sûre ?
- Certaine. J'étais lucide ce soir-là. Tu m'as embrassé et quand je t'ai demandé pourquoi tu m'as juste répondu « parce que j'en avais envie ». J'ai voulu aller te parler le lendemain mais quand on s'est croisé tu ne m'as regardé. J'ai cru que tu faisais exprès de m'ignorer.
Dorcas ferma les yeux brièvement.
- Lucinda... Je ne savais pas.
- Ouais, je m'en rends compte maintenant. Tu étais ivre, ça ne voulait rien dire, j'ai compris l'idée. Désolé de t'avoir embêté.
La blonde ramassa son sac à ses pieds et amorça un geste pour s'éloigner.
- Attends...
- Ecoute Meadowes, je pense que je me suis assez humilié pour les dix prochaines années. Donc est-ce qu'on pourrait juste oublier cette histoire ?
Dorcas se sentit mal à l'aise en la voyant rougir et détourner les yeux. Elle avait été si sûre d'elle avant les vacances quand elle l'avait embrassé qu'elle s'était imaginé une autre jeune fille dans son esprit mais Lucinda semblait aujourd'hui bien différente.
- J'ai essayé, avoua-t-elle. Je voulais tout oublier et faire comme si rien ne s'était passé mais notre baiser a tourné dans ma tête pendant trois semaines.
- Mais...
- Et j'ai aimé ça. Je ne pensais pas...je veux dire, je n'avais jamais embrassé de fille avant, ou du moins je le croyais.
C'était tellement rageant de ne pas réussir à placer des mots sur ce qu'elle ressentait. Des tonnes d'idées se bousculaient dans sa tête et elle n'arrivait pas à les exprimer. Lucinda resta pourtant sans bouger en la dévisageant.
- En fait je ne sais pas trop ce que je raconte...
- Ça se voit, confirma la blonde avec sarcasme.
Dorcas rigola. Là elle retrouvait l'humour douteux de Lucinda. D'ailleurs, cette dernière revint vers elle, envahissant son espace personnel comme la dernière fois. La situation semblait se rejouer sauf que cette fois Dorcas était prête. Quand la jeune fille se pencha pour capturer ses lèvres, elle ne sursauta pas et se laissa faire avec douceur, essayant d'analyser tout ce qu'elle ressentait. C'était la même chose que d'embrasser un garçon et à la fois pourtant radicalement différent. Lucinda s'accrochait à elle, ses mains lui serrant fortement les bras comme si elle non plus ne réalisait pas vraiment ce qui arrivait.
Légèrement essoufflée, Dorcas se détacha en souriant.
- Tu ne vas pas partir en courant cette fois, n'est-ce pas ?
- Certainement pas, affirma-t-elle. Mais je ne sais absolument pas dans quoi je m'embarque...
- Moi non plus.
Concentrée sur l'expression de Lucinda, Dorcas frémit en sentant une main prendre la sienne, entremêlant leurs doigts ensemble.
**
*
Le vent de face, James frissonna en rentrant la tête dans les épaules. Il portait son balai de Quidditch sur l'épaule tandis que son autre main peinait à tenir la boîte de matériel qu'il venait d'aller chercher dans la cabane de stockage à l'autre bout du terrain. Bien qu'il n'y ait pas de neige au sol à cet endroit (merci la magie), une fine couche de givre s'était malgré tout déposée pendant la nuit. On était mardi, seulement le deuxième jour de reprise des cours et James avait programmé le premier entraînement de l'année cet après-midi. Il espérait sincèrement que ses joueurs s'étaient un minimum exercés pendant les vacances parce qu'il comptait bien leur mettre la pression pour le prochain match le mois prochain contre Serdaigle.
- James !
Par-dessus le mugissement du vent, il entendit la voix de Sirius crier son nom et il se retourna. Son meilleur ami était déjà en tenue, s'avançant vers lui à grands pas. Il nota avec amusement que ses cheveux noirs partaient dans toutes les directions à cause des bourrasques.
- T'es pas au vestiaire ?
- Non, c'est fermé. Je ne sais pas trop ce qui se passe mais les elfes nous interdisent l'entrée.
- Quoi ? Mais j'ai réservé le terrain !
- Je sais. Tu devrais peut-être leur expliquer.
James soupira.
- Ouais, j'arrive. Tu veux bien m'aider ? Je crois que je vais perdre mon bras.
Aussitôt, Sirius vint se placer à sa gauche pour saisir la poignée de la caisse de matériel qui dodelinait maintenant entre eux.
- Alors ? Combien de temps pour la séance de torture ?
- C'est un entraînement, corrigea James.
- Pléonasme. Donc ? Deux heures ?
- Plus ou moins...
- Je suppose que c'est plus « plus » que « moins » ? Déduisit Sirius.
- Pourquoi tu me demandes ça ? Ah non laisse-moi deviner.
James regarda Sirius avec un sourire moqueur.
- Alex ?
- Peut-être bien...répondit-il avant d'avouer. Bon d'accord, on a prévu de passer la soirée ensemble.
- Je le savais !
- James...
- D'accord, d'accord, je ne me moquerais pas de toi...N'empêche que c'est marrant quand tu es amoureux.
Surpris, Sirius manqua de trébucher.
- Je n'ai jamais dit que...
- Tu n'en as pas besoin. C'est presque aussi évident que moi et Evans. Et ça veut tout dire.
- Capitaine ! Hurla soudain Adrian Connelly. Ramène-toi !
- J'arrive !
Ils accélèrent le pas et arrivèrent à destination. Massé devant les vestiaires, les joueurs tentaient d'apercevoir ce qui se passait à l'intérieur en se hissant sur la pointe des pieds. Frank avait carrément pris Olympe, la petite quatrième année, sur ses épaules pour qu'elle essaye de voir quelque chose.
- Qu'est-ce qui se passe par Merlin ?
Olympe baissa les yeux vers son capitaine, se stabilisant en appuyant fortement sur la tête de Frank qui grimaça en chancelant.
- Ah t'es là ! C'est les elfes ! Ils veulent qu'on reste dehors en attendant qu'ils finissent de nettoyer. On n'avait pas réservé le terrain ?
- Si, dit James perdu. Je ne comprends pas... Et Olympe descend de là, tu vas te faire de mal.
La petite fille bougonna mais se pencha malgré tout en avant, s'accrochant à Sirius qui la souleva dans ses bras avant de la reposer sur le sol. Au même moment, la porte des vestiaires se rouvrit, laissant sortir une brigade d'elfes de maisons. A la file indienne, ils passèrent devant l'équipe en portant des sauts, des balais et des éponges. Certains étaient couverts de mousse de produits nettoyants, ce qui fit sourire Mary McDonald qui s'amusa à souffler sur les bulles pour les envoyer dans la figure d'Adrian.
- Ils nous ont empêchés d'entrer pour...faire le ménage ? S'exclama Kevin Mells, le second batteur.
- On dirait presque les sept nains, commenta Olympe.
- Les sept quoi ?
- Laisse tomber Frank, rit-elle.
Toujours perplexe, James s'avança vers un elfe.
- Excusez-moi, qu'est-ce qui se passe ?
- Rien d'important, monsieur. Juste une simple dégradation du matériel mais Pinkle et les autres se sont occupés de tout. Désolé pour le dérangement.
- Euh...ce n'est rien. Merci.
Pinkle s'inclina aussi bas que la gravité lui permettait puis s'éloigna en trottinant sur ses petites jambes tandis que les joueurs rentrèrent prudemment dans le vestiaire. Ils virent tout de suite ce qui avait occupé les elfes. Un pan de mur, juste à côté des casiers, était plus blanc que le reste de la pièce mais même après le nettoyage intensif on devinait des traces de peinture rouge. L'écriture n'était plus lisible évidemment et les traces disparaitraient sûrement d'ici demain.
- A ton avis, qu'est-ce que c'était ? Demanda Sirius.
- Aucune idée. Je crois que je préfère ne rien savoir. Allez ! Au boulot tout le monde, on a un match à préparer !
- Et c'est repartit pour la tyrannie...
- Je t'ai entendu Adrian !
**
*
Après deux heure et huit minutes d'entrainement intensif, les joueurs se dirigèrent (rampèrent) vers les vestiaires pour aller prendre une douche bien mérité. Seul James semblait encore avoir de l'énergie.
- C'était super les gars !
- Frank, marmonna Olympe, tu me reprends sur tes épaules ? Je peux plus marcher...
- J'arrive à peine à porter mon balai...
- Oh arrêtez, ce n'était pas si terrible.
- Dis le capitaine qui est resté la moitié de la séance immobile à donner des ordres en sifflant. Je crois que mon tympan est percé.
- Et Remus dit que c'est moi qui a l'art du dramatique ?
Sirius éclata de rire franchement, donnant un coup d'épaule à son capitaine puis entra dans les vestiaires. Après sa douche, il remit son uniforme et rangea ses affaires dans son casier avant d'aller attendre James dehors. A cause de son poste de capitaine, ce dernier prenait toujours plus longtemps car il devait aller ranger tout le matériel, légère consolation pour l'équipe en comparaison de tout le travail qu'il leur imposait.
- Ah enfin je te trouve ! Lança une voix dans son dos.
- Salut princesse.
Un bonnet enfoncé sur ses cheveux bruns, Alexia arriva à sa hauteur. Elle avait le visage rougit par le froid et un petit nuage sortait de sa bouche à chaque respiration. Bienvenu en Ecosse au mois de janvier !
- Tu étais trop impatiente de me retrouver ? Railla-t-il.
- Tu aimerais pas vrai ? Mais non, désolé pour ton ego, je viens voir James. Apparemment, il avait une heure de colle à 17h. McGonagall est furieuse. Lily devait venir mais j'ai préféré éviter un meurtre en venant moi-même.
- Sage décision en effet.
Alexia sourit et vint se blottir contre lui tandis qu'il passait un bras autour de sa taille. Une seconde plus tard, ses lèvres étaient sur les siennes et ils s'embrassaient passionnément. Il avait l'impression que ces moments-là étaient trop rares, après tout il y avait toujours leurs amis autour d'eux. Il sentit les doigts de la jeune fille venir se perdre dans ses cheveux, jouant avec une mèche de sa nuque et quelque chose remua dans son ventre quand elle se pressa contre lui. Il avait horriblement conscience des moindres détails de son corps, ses hanches, ses lèvres, son parfum, sa poitrine... Il approfondit le baiser, la plaquant contre le mur du vestiaire. Alexia laissa échapper un hoquet de surprise avant qu'il ne déplace sa bouche vers son cou, juste à l'endroit où se trouvait son pouls et il sourit en sentant son cœur s'affoler.
- Sirius...souffla-t-elle.
- Hum ?
- Viens là.
Elle lui releva la tête et il quitta sa gorge à regret mais captura ses lèves à nouveau un instant plus tard. Gémissant, elle crispa ses mains sur le devant de ses vêtements en explorant sa bouche. Quand elle se détacha, elle plongea ses yeux dans les siens.
- Je pourrais m'y habituer...
- Moi aussi.
Il posa son front contre le sien, frôlant ses lèvres alors que son pouce dessinait des arabesques sur sa taille à travers son pull.
L'embrassant une dernière fois avec force, il lui prit ensuite la main quand James sortit enfin des vestiaires et ils se dirigèrent tous les trois en direction du château. En chemin, ils furent provoqués en duel par le chevalier du catogan qui s'écria « morbleu venez donc croiser le fer avec moi si vous êtes preux ! » à leur passage. James promit de revenir une fois qu'il aurait retrouvé son épée en argent préféré, ce qui fit éclater de rire les deux autres.
Après avoir donné le mot de passe à la Grosse Dame, ils entrèrent enfin dans la salle commune où de grands bruits les accueillirent.
- C'est quoi ces cris ? Alice est encore tombée sur une araignée ?
Un groupe d'élèves, dont l'équipe de Quidditch fraîchement débarquée, était massée autour du panneau d'affichage. Une rumeur inquiète agitait la foule.
- C'est une annonce de sortie à Pré-au-Lard ?
- Non, répondit Marlène en arrivant sur leur gauche. Un mot a été épinglé dans la journée.
- Qu'est-ce qu'il dit ?
- « Les sangs-pur triompheront ».
James frissonna. Ça ne pouvait venir que d'un Gryffondor puisque personne d'autre n'avait accès à la salle commune et comme tout le monde avait eu cours aujourd'hui c'était impossible de savoir à quelle heure le mot avait été mis là. Il fit immédiatement le lien avec l'écriture dans leur vestiaire. Ça ne l'étonnerait pas que ce message ait été écrit dans tout le château aujourd'hui en guise de réponse au renvoi de Mulciber.
Presque inconsciemment, plusieurs regards se tournèrent vers les sangs-purs présents.
- Un problème ? Rugit Dorcas en voyant un troisième année la fixer avec insistance.
- Euh...non...
- Il a pas tort, intervint un autre garçon un peu plus âgé. Qu'est-ce qui nous prouve que les sangs-purs de Gryffondor ne sont pas responsables ?
- Ouais !
- C'est vrai !
- Arrêtez vos conneries, répliqua Sirius. C'est ridicule.
- Tu es mal placé pour dire ça, Black.
Cette phrase fit sortir James de son silence. Il s'avança vers le garçon, l'air menaçant.
- T'as un problème avec lui ? Dit-il la voix vibrante de rage.
- James...tenta Remus en s'approchant.
- Je...
Brusquement, un hurlement résonna dans la salle commune. Tout le monde sursauta et se tourna en direction de l'escalier qui menait en direction des dortoirs des filles, surpris. Resserrant sa prise sur la main de Sirius, Alexia amorça un pas en avant.
- C'est Lily...
- Evans ! Cria James.
Des bruits de pas précipités leur parvinrent juste une seconde avant que Lily ne débarque, manquant de trébucher sur la dernière marche. Elle avait l'air terrifié et des larmes brûlantes dévalaient ses joues. Alors qu'elle continuait à courir, James la saisit par le bras pour l'immobiliser, l'arrêtant avec force.
- Evans, calme-toi.
- Je...je...
- Respire, ce n'est rien. Tu vas bien.
- La chambre...et...hoqueta-t-elle.
- Lily ?
Elle n'arriva pas à terminer et se mit à trembler. Automatiquement, James la serra contre lui et elle s'accrocha à son pull en enfouissant son visage contre sa poitrine. Elle avait conscience d'être entouré par une dizaine de personne, voire plus, mais le sentiment d'angoisse pure qui lui tordait l'estomac était trop fort.
- Là, ça va, murmura-t-il doucement. Je te tiens, Evans.
- Qu'est-ce qui se passe ? Demanda Remus.
- C'est notre dortoir, dit une voix.
Ils se retournèrent tous vers Alice qui redescendait l'escalier, le visage blême.
- Il a été saccagé. Toutes les affaires ont été retournées et les rideaux sont déchirés.
- Quoi ?
- Il...il y avait un truc sur mon lit, intervint Lily d'un ton chancelant.
James baissa les yeux vers elle, l'éloignant légèrement sans la lâcher pour autant.
- Comment ça ?
- Un bout de papier. Il était plié en deux et quand j'ai voulu le prendre un bout de verre m'a coupé la main.
Elle montra sa paume où une coupure laissait échapper du sang. Ce n'était pas bien grave mais ça restait effrayant à voir.
- C'était marqué « les sangs-de-bourbe seront les premiers ».
Une vague de fureur s'empara de James. Qu'on s'attaque à des élèves était inadmissible, qu'on s'attaque à des Gryffondor était pire, mais s'il y avait une chose à laquelle il ne fallait pas s'en prendre en sa présence c'était Lily Evans.
- Regarde-moi, dit-il fermement. Je te promets qu'on trouvera qui a fait ça, tu m'entends ?
Lily acquiesça lentement et une larme roula sur sa joue tandis que James la serrait une nouvelle fois contre lui. Il ne mentait pas. Si Rosier voulait la guerre, alors il l'aurait.
Chapitre XXVII : Moments à deux
Incapable de dormir, Lily se retourna dans son lit une fois de plus. Le dortoir était plongé dans le silence, excepté le léger ronflement d'Alice qui avait attrapé un rhume, et seul un rayon de lune éclairait faiblement la pièce. Il devait être près de minuit mais elle n'arrivait pas à se détendre, repassant les évènements de la semaine dernière. Quelqu'un s'était introduit ici, avait fouillé leur affaire, tout ça pour déposer un mot de menace contre les nés-moldus. Elle ne savait pas vraiment pourquoi ça la travaillait maintenant précisément. Evidemment, elle avait été bouleversée sur le coup, seulement le sentiment de malaise ne semblait pas vouloir s'en aller. Elle n'était pas idiote, le mot lui était destiné puisqu'elle était la seule née-moldu de leur chambre et elle avait peur. Elle n'osait pas l'avouer à voix haute mais c'était la réalité. C'était sa chambre ici, son lit, ses biens personnels...
Ayant l'impression d'étouffer dans ses couvertures, elle repoussa sa couette d'un coup de pied et se leva précipitamment. Elle avait besoin d'aller faire un tour. Aussi silencieusement que possible, elle se glissa hors de la pièce, refermant la porte dans son dos. Le couloir n'était éclairé que par des lampes à gaz qui projetaient une douce lueur tamisé et ses bruits de pas étaient étouffés par la moquette.
La première chose que Lily remarqua en entrant dans la salle commune fut...James. Il était assis sur le canapé, renversé contre le dossier. Il décrivait des cercles avec sa baguette, et s'amusait visiblement à faire voler un dragon en papier (qui était assez réussit, elle devait bien l'admettre). Il avait dû se passer la main dans les cheveux à plusieurs reprises car ses derniers partaient dans tous les sens et se dressaient en épis sur sa tête. Elle dû reconnaître qu'il avait l'air plus jeune comme ça, détendu. Ca changeait du garçon énergique qui n'arrêtait jamais de bouger.
- Potter ?
Il sursauta et se retourna vers elle, surpris de la voir à cette heure-ci en pyjama au pied des escaliers.
- Tu sais que le couvre-feu est dépassé ?
- Je ne suis pas en dehors de la salle commune, contra-t-il. Et puis tu es debout aussi.
- Ouais...impossible de dormir.
Il haussa un sourcil, s'apprêtant à demander pourquoi mais changea de tactique en voyant l'expression de la jeune fille.
- Viens, reste pas planté là.
Lily hésita une seconde puis décida qu'elle ne voulait absolument pas retourner se coucher alors elle pouvait bien passer un peu de temps avec Potter. Prudemment, elle s'assit sur le rebord du canapé, veillant à établir une « distance de sécurité ».
- Qu'est-ce que tu fais ici ?
- J'attends Remus, répondit-il. Il ne devrait pas tarder à revenir de ses rondes de préfet.
- Tu l'attends toujours aussi tard ?
- Ca dépend de l'heure à laquelle il termine mais oui. Je trouve ça étrange quand le dortoir n'est pas complet. Et puis Frank ronfle.
Lily sourit.
- Alice a dû lui refiler son rhume.
- En même temps s'ils arrêtaient de s'embrasser toutes les quatre secondes...
- On pourrait dire la même chose de Sirius et Alex.
- Pas faux. Ça te dit de former un club de célibataire ?
Elle leva les yeux au ciel.
- Le jour où tu resteras célibataire plus de deux semaines Potter...
- On en revient encore à ça ? Tu n'as toujours pas compris qu'il n'y avait qu'une fille qui m'intéressait ?
- Potter...dit-elle en rougissant.
- Laisser tomber, je suis trop fatigué pour avoir cette discussion. Mais on en reparlera.
Il la regardait avec un petit sourire en coin et elle ne douta pas une seconde qu'il disait la vérité. Ce mec était le plus buté qu'elle connaissait.
- Et toi alors ? Pourquoi tu ne dors pas ?
- Je ne sais pas...
- Evans ?
- Je n'arrive pas à trouver le sommeil c'est tout.
James n'eut pas l'air très convaincu.
- Tu es sûre ?
- Hum... C'est juste... Mon dortoir, je ne me sens pas bien, je sais que c'est ridicule mais...
- Mais tu as peur depuis que quelqu'un y est entré, termina-t-il.
- Oui, avoua Lily. Cette personne est entrée dans ma chambre pour laisser une lettre de menace. Et on sait tous qu'elle m'était adressée.
- Peut-être pas...
- Potter, je suis la seule née-moldu de notre dortoir.
James ne trouva rien à répondre, sachant pertinemment qu'elle avait raison. Comme toujours d'ailleurs. Pourtant, il détestait voir cette expression sur son visage. Elle tortillait ses mains sur ses genoux, jouant nerveusement avec l'ourlet de son pull.
- Tu veux faire une partie de bataille explosive pour te changer les idées ?
- Je... Quoi ?
- Allez Evans ! On n'arrive pas à dormir tous les deux, donc autant s'occuper.
Hésitante, elle se demanda une seconde si elle ne ferait pas mieux de remonter se coucher mais elle savait qu'elle ne pourrait pas fermer l'œil. Alors que James commençait à distribuer les cartes, elle décida qu'après tout ça pouvait être marrant et de toute façon ses cours ne débutaient qu'à 10h.
- Très bien, accepta-t-elle. Mais prépare-toi à perdre, Potter.
James sourit.
- Tu vas être surprise.
Ils jouèrent pendant une heure, abattant carte sur carte. Lily manqua de se faire griller les sourcils quand son jeu explosa pour la troisième fois (encore une défaite...) et elle décida d'attacher ses cheveux avec prudence. Quant à James, il semblait soudain plus concentré qu'en cours. Après une dizaine de partie (qu'il remporta presque toutes), ils décidèrent de changer de jeu. James se leva du canapé pour aller fouiller dans la malle contre le mur où les élèves stockaient des jeux sorciers et moldus que tout le monde pouvait emprunter à sa guise.
- C'est quoi un Monopoly ?
- Un jeu où il faut gagner des rues, expliqua Lily, mais c'est pas marrant à deux. Il y autre chose ?
- Jeu d'échec ?
- Version sorcier ?
- Ouais !
- Alors non, les pièces ne m'obéissent jamais.
James rit.
- Oh il y a des cartes pour faire des tours de magie. Incroyable pour un sorcier non ?
Lily secoua la tête en souriant malgré tout. Il faisait le pitre en sortant toutes les boîtes de jeu et elle voyait bien que c'était plus pour la distraire qu'autre chose mais qu'importe, ça lui faisait du bien.
- Potter ? Qu'est-ce que tu fais ?
- Je crois que j'ai trouvé un truc...
- Comment... Ah !
Elle recula précipitamment, les mains sur le visage tandis que James éclatait de rire à sa blague. Elle venait de recevoir un jet d'eau. Lily releva la tête pour le voir debout, un pistolet à eau jaune dans une main et un sourire en coin aux lèvres, l'air très fier de lui.
- Je vais te tuer, prévint-elle.
- Essaye d'abord de m'attraper Evans.
Il ne lui en fallut pas plus. Lily bondit sur ses pieds pour se précipiter vers la malle et attrapa un deuxième pistolet à eau qui traînait. Elle se demanda un instant qui était l'imbécile qui les avait remis encore remplit mais elle ne chercha pas à approfondir la question quand elle reçut un deuxième tir en pleine tête.
- Alors là c'est la guerre !
Elle se jeta vers lui, tirant à toute vitesse et il s'enfuit à l'autre bout de la salle commune pour tenter une retraire défensive derrière un fauteuil.
- Reviens ici, espèce de lâche, cria-t-elle.
Pour toute réponse il lui envoya un autre jet d'eau dans le cou, ce qui lui fit pousser un cri un peu trop aigue. Ils se tournèrent autour quelques secondes avant de reprendre leur course poursuite à travers la pièce, manquant de rentrer dans les meubles. La table basse ne survécu que par miracle. Essoufflé, James sauta par-dessus un canapé pour éviter de se faire rattraper.
- Déjà fatigué ? Se moqua la rousse. Je croyais que tu étais un sportif.
- C'est rare de faire une bataille d'eau pendant les matches de Quidditch...
- Tu es si sûr de ça ? Parce que je me souviens du dernier match pendant notre quatrième année où Black est revenu complètement trempé.
James éclata de rire au souvenir.
- Ce n'était pas moi ! Assura-t-il. Enfin pas tout à fait...
- Je crois que c'était le premier match qui m'avait intéressé.
- Hé ! C'est celui où je me suis pris un cognard dans le ventre aussi !
- C'est bien ce que je disais, un divertissement incroyable !
Elle lui adressa un sourire malicieux et il plissa les yeux, resserrant sa prise sur le pistolet à eau.
- Cours vite Evans !
Il se lança à sa poursuite tandis qu'elle s'enfuyait en direction de la porte. Elle jeta un coup d'œil par-dessus son épaule et s'aperçut qu'il était juste derrière elle. Ça ne manqua pas car deux secondes plus elle sentit ses pieds quitter le sol tandis qu'il l'attrapait par la taille.
- Ah ! Potter, pose-moi par terre !
- Certainement pas !
Sans ménagement, il la balança sur son épaule et elle se retrouva la tête à l'envers tout en battant des jambes pour essayer de se dégager mais il avait une poigne de fer.
- Merlin, tu t'agites plus qu'un vif d'or !
- Tu n'as qu'à me lâcher !
- Toujours non, Evans. Et fais attention avec tes pieds ou tu vas finir par me frapper.
- C'est le but ! Cria-t-elle en riant malgré tout.
James esquiva un autre coup de pied et la fit basculer sur le canapé sans ménagement.
- Merci pour tant de délicatesse...
- C'est un plaisir, dit-il en s'asseyant à côté d'elle, lui écrasant les jambes au passage.
- Aïe ! Bouge de là !
Il se décala en riant, épuisé. D'après l'horloge il était prêt de 1h du matin et James sentait qu'il commençait à fatiguer. Il se passa la main dans les cheveux, baillant à s'en décrocher la mâchoire. Lily sourit devant ce spectacle.
Soudain, le trou du portrait s'ouvrit pour révéler Remus. Il avait l'air épuisé mais content et ses yeux ambrés brillaient légèrement. Il avait dénoué sa cravate qui pendait autour de son cou et révélé les manches de son pull gris. Visiblement, il ne s'attendait pas à trouver encore du monde dans la salle commune.
- Qu'est-ce que vous faites là ?
- Insomnie, répondit James avec nonchalance. Et toi ? Pourquoi tu rentres à cette heure-ci ? Les rondes de préfet sont terminées depuis au moins trois quart d'heure !
Remus piétina sur place.
- J'ai juste traîné...
- Tu veux me faire croire que tu as juste fait le tour du château pour t'amuser ? Allez avoues !
- Tu n'es pas ma mère, James.
Lily regarda l'échange entre les deux garçons et fut amusée en constatant la totale incapacité de Remus pour mentir, surtout à un de ses meilleurs amis.
- Même moi je ne te crois pas, intervint-elle.
- Lily ! Depuis quand est-ce que tu es de son côté ?
- Depuis que je suis curieuse. Alors où est-ce que tu étais ?
En voyant les deux autres échanger un regard à la fois complice et rieur, Remus comprit qu'il ne leur échapperait pas. Ils étaient les Gryffondor les plus têtus qu'il connaissait.
- J'étais juste avec Anaïs...
- Je le savais ! S'exclama James, le poing en l'air.
- Attends attends...Qui est Anaïs ?
- La copine de Remus.
- Quoi ?!
- Non, ne l'écoute pas Lily. C'est juste une amie.
Lily sourit quand il rougit d'embarras.
- Tu ne m'as jamais parlé d'elle...
- Parce qu'il n'y a rien à dire.
Cette phrase fit lever les yeux au ciel à James.
- Et pourquoi est-ce que vous êtes trempés ? Demanda brusquement le lycanthrope.
- Oh ça ? Bataille d'eau.
- Dans la salle commune à une heure du matin ?
- En fait c'était plus à minuit et demi après mes victoires fracassantes à la bataille explosive.
- Je continu à dire que tu as triché ! Protesta Lily.
- Tu es juste mauvaise perdante, Evans.
La jeune fille se contenta de croiser les bras sur sa poitrine, l'air renfrogné. Remus secoua la tête.
- Allez les enfants, dit-il d'un ton paternel. C'est l'heure d'aller se coucher.
- Bien chef !
Fatiguée, Lily se leva du canapé au ralentit et suivit les garçons jusqu'au pied des escaliers. Alors qu'elle leurs souhaitait une bonne nuit, James la retint brièvement par les bras, l'air inquiet. Il hésita une seconde, le temps que Remus s'éclipse discrètement pour les laisser seuls avant de reprendre.
- Ca va aller ? Je veux dire dans ton dortoir...
- Ouais, murmura-t-elle, touchée par sa préoccupation. Merci beaucoup pour ton aide.
- Toujours là pour toi.
Il lui adressa un dernier sourire en coin puis fila rejoindre son ami. Lily resta un instant à fixer le vide puis l'imita, extenuée.
**
*
- Miss McKinnon, je suis sûre que l'horloge est passionnante à regarder mais le tableau l'est tout autant.
Marlène sursauta à la voix sèche du professeur McGonagall qui l'interpellait et elle fixa à nouveau son attention sur le cours, le rouge aux joues. Devant elle, Lily se retourna pour lui faire les gros yeux tandis qu'Alice lui donnait un coup de pied sous la table.
- Aïe !
- Sois un peu attentive, qu'est-ce qui t'arrives ?
- Rien, j'ai juste mal au ventre, mentit-elle.
- Tu veux que je t'emmène à l'infirmerie ?
- Non, ça ira.
Alice n'insista pas et continua à recopier la leçon en secouant la tête. Quand la sonnerie retentit enfin, Marlène hésita à partir directement mais attendit quand même ses amies. Elle avait peur que ça fasse suspect dans le cas contraire et puis sinon elle était sûre de se faire assassiner par Alexia. Cette dernière arriva d'ailleurs à sa hauteur.
- Alors ? On fait quoi pendant une heure ?
- Aucune idée. On pourrait aller se promener dans le parc ?
- Oh non ! Il gèle dehors, protesta Dorcas.
- Ca m'aurait étonné que tu ne râles pas tiens...
Avec maturité, la brune lui tira la langue. Marlène éclata de rire.
- De toute façon je vous abandonne les filles, annonça-t-elle.
- Pourquoi ?
- J'ai un truc à faire. Des recherches pour mon devoir de métamorphose. On se retrouve dans le dortoir ?
Ses amies hochèrent la tête puis reprirent leur conversation tandis qu'elle s'éloignait, son sac rebondissant contre son épaule. Dès qu'elle fut sûre d'être assez loin, elle bifurqua vers le troisième étage et veilla à faire un détour pour éviter de croiser le tableau du chevalier du Catogan, elle n'était pas vraiment d'humeur à se faire provoquer en duel. Arrivée à destination, elle ouvrit la porte de la vieille salle de classe et son regard tomba sur l'antique canapé vert défoncé qui trônait au milieu de la pièce. Assis en tailleur dessus se trouvait nul autre que Regulus.
- Salut ! Lança-t-elle, un grand sourire aux lèvres. T'es là depuis longtemps ?
- Un moment. J'ai commencé mes devoirs.
Elle se pencha et grimaça devant ses fiches de révision. Elle était vraiment contente de ne pas avoir d'examen à passer cette année !
- Heureusement que je suis là, tu vas pouvoir faire une pause !
- Je savais bien que je te gardais avec moi pour quelque chose.
- Hé ! S'exclama-t-elle en lui donnant un coup dans l'épaule.
Il sourit et elle se sentit très fière d'avoir réussi cet exploit.
- Alors McKinnon, qu'est-ce que tu veux faire aujourd'hui ?
- Je ne sais pas... Je suppose qu'à force de rester enfermé dans cette salle on a épuisé toutes les options.
- Tu sais bien que c'est mieux si on ne nous voit pas ensemble.
- Je sais, rassura-t-elle. Viens j'ai une idée.
- Quoi ? Marlène...
Mais elle n'écouta pas ses protestations et lui attrapa la main, le forçant à se remettre sur ses pieds. Sans le lâcher, elle le traîna dans son sillage jusqu'au mur où était accroché le vieux tableau noir qui servait autrefois pour les cours. Il menaçait visiblement de s'effondrer, bien que Marlène supposait qu'il avait dû être fixé avec de la glue perpétuelle ou un sortilège.
- Tu veux faire des dessins à la craie ?
- Non idiot. Je veux qu'on laisse notre empreinte sur ce tableau. Comme une sorte de symbole tu vois ?
- Je vois surtout que c'est ridicule...
- Regulus !
Il bougonna.
- Très bien, dit-il finalement. Vas-y, commence.
Marlène ne se fit pas prier. Elle se saisit de la craie puis plaça sa main bien à plat sur le tableau pour en tracer le contour. Elle frissonna quand la matière froide rentra en contact avec sa peau, conscience que Regulus l'observait dans son dos. Dès qu'elle eut terminée, elle écrivit son prénom avec application juste en dessous. Satisfaire, elle fit volte-face.
- Impressionnant, dit-il. Vraiment, un gamin de quatre ans n'aurait pas fait mieux !
- Arrête d'être sarcastique. A ton tour.
- Mais...
- Chut !
Sans ménagement, elle lui reprit la main pour lui faire imiter son geste.
- Ne bouge pas, ordonna-t-elle, et garde la paume posée contre le tableau. Voilà comme ça.
Elle se dépêcha de faire le dessin, sachant qu'il pouvait s'en aller en une seconde s'il jugeait que cette histoire débile durait trop longtemps. D'ailleurs, à peine eu-t-elle finit qu'il se recula comme si elle l'avait brûlé et Marlène se chargea d'écrire son nom.
Prise par une soudaine inspiration, elle continua pourtant à dessiner. Une tablette de chocolat par-là, un chat plus haut et un canapé vert avec des ressorts. Concentrée, elle attacha ses cheveux blonds pour ne pas qu'ils lui reviennent dans les yeux. A la fin, le tableau était recouvert de dessins plus ou moins réussis qui s'entremêlaient autour de leurs empreintes et prénoms.
Brusquement, le silence de la pièce la frappa. Son souffle se prit dans sa gorge tandis qu'elle n'osait pas se retourner.
- Je...Qu'est-ce que tu en penses ? Demanda-t-elle, tremblante. C'est notre histoire.
Le chat pour leur première rencontre avec Chamallow, le canapé vert qui était devenu leur refuge, le chocolat partagé avant les vacances... Elle avait l'impression que tous ses moments étaient gravés dans sa mémoire.
Regulus ne dit rien pendant plusieurs secondes puis il se rapprocha pour être à sa hauteur, contemplant son œuvre avec une expression neutre.
- Je ne savais pas que tu savais dessiner...
- Ce n'est pas de l'art non plus... Ma grand-mère était peintre, elle me donnait des cours quand j'étais petite.
Il sourit.
- Tu es une fille étonnante, McKinnon.
- Je sais, répondit-elle doucement en riant.
Sans un mot, Regulus referma les deux battants du tableau. Ainsi personne ne verrait les dessins si quelqu'un entrait dans la salle par erreur. Ça serait leur secret.
**
*
Heureuse, Marlène entreprit de retourner à son dortoir. Ils n'avaient passé qu'une heure ensemble mais ça avait suffi à lui remonter le moral. Comme d'habitude, il était partit dix minutes avant elle pour ne pas qu'on les voit. Du coup, quand elle passa dans le hall elle le repéra en compagnie de Livia et d'Antonin Dolohov en train de discuter et elle se mordit la lèvre en le voyant si proche de la jeune fille. Elle ne pouvait pas dire qu'elle était jalouse pourtant elle aurait aimé pouvoir se tenir aussi à côté de lui à rire et à parler simplement sans qu'il y ait de conséquences. Rosier n'était qu'un pauvre type.
Marlène secoua la tête. Elle savait pertinemment que ce genre de pensées ne menait nulle part et qu'elle devait déjà s'estimer contente. Quand elle entra dans la salle commune, elle faillit se faire rentrer dedans par un petit première année qui jouait avec un frisbee à dents de serpents, ce qui l'agaça légèrement. Où était Lily quand on avait besoin d'autorité ?
Pourtant, rien ne la prépara à ce qu'elle allait trouver en entrant dans son dortoir. La chambre était étonnement bruyante et les filles étaient toutes assises sur un lit en riant.
- Qu'est-ce qui se passe ?
- Oh rien, Lily a donné un défi à Alexia.
Marlène haussa un sourcil.
- Et où est-ce qu'elle est ?
- Je t'explique, dit Alice. Lily a parié qu'Alexia ne pouvait pas garder le dortoir en ordre pendant deux semaines, tu la connais elle est hyper bordélique. Alex a relevé le défi mais Dorcas a voulu pimenter le jeu en ajoutant une condition.
- Laquelle ?
- Ce n'est pas dans notre dortoir que va se dérouler le pari...
**
*
Son oreiller sous le bras, Alexia monta les escaliers quatre à quatre. Elle fonçait tête baissée par peur de changer d'avis mais les mots de Lily étaient encore trop présents pour qu'elle fasse demi-tour. Dans le couloir, elle hésita, ne sachant pas quelle porte était la bonne puis elle supposa que la configuration devait être la même chez les filles et les garçons.
Elle toqua très vite pour éviter de partir en courant et plaqua un magnifique sourire sur son visage quand le battant s'ouvrit sur James. Il eut un mouvement de surprise en la voyant sur le seuil.
- Alex ?
- Salut !
En arrière-plan, Sirius releva la tête de son magazine, Remus se balança en arrière sur sa chaise de bureau pour voir la jeune fille et Peter se jeta littéralement dans la salle de bain en poussant un cri pour cacher son magnifique caleçon bleu.
Alexia s'avança dans la chambre.
- Je viens demander l'asile politique ! Annonça-t-elle.
Chapitre XXVIII : Quand la maladie vous rattrape
Assis sur sa chaise à la bibliothèque, Remus essayait tant bien que mal de se concentrer. Ça allait faire une heure qu'il était là avec Anaïs pour l'aider sur son devoir de métamorphose mais il devait avouer qu'il commençait à vraiment être fatigué. La pleine lune devait avoir lieu ce soir.
On était déjà début février et il n'avait pas vu le temps passer depuis le retour des vacances. Il faut dire que ça avait été assez mouvementé dernièrement, surtout la semaine passée. Non, il n'y avait pas eu de nouvelle agression mais leur chambre avait accueilli une sixième personne. Alexia. La jeune fille était déterminée à remporter son pari idiot avec ses amies et avait donc investit leur dortoir (de force évidemment). C'était un miracle que l'administration n'est pas encore remarqué ce déménagement.
En tout cas, l'arrivée d'Alexia avait bouleversé un grand nombre de chose. Déjà il avait fallu lui trouver un lit, tâche assez compliquée quand on manquait déjà de place à la base. Au début, James avait proposé qu'ils dorment ensemble, puisqu'il considérait la jeune fille comme une petite sœur, ce à quoi Sirius avait protesté fortement. Puis sa seconde idée était que Peter dorme par terre pour lui laisser son lit, idée étrangement rejeté par le principal intéressé. Remus observait les négociations depuis son bureau, la tête dans les mains, et il s'était dit que franchement ses amis étaient complètement fous. Au final Alexia s'était installé avec Sirius, ce qui semblait le plus logique en fait. Et là était arrivé l'enfer. Toute la nuit, on pouvait entendre leur voix avec notamment les « tu prends toute la couverture » « rend-moi mon oreiller » « tu me donnes des coups de pied là ! » ou encore les rires qu'ils pensaient silencieux alors que pas du tout. Le pire du point de vue de Remus c'était que malgré tout ça, quand il se réveillait le matin avant les autres, ils trouvaient ces deux imbéciles qui dormaient profondément, blottis l'un contre l'autre.
Mais il n'y avait pas eu que cela comme problème, sinon ça aurait été trop simple. Parce que le but de ce défi à la base était quand même de montrer à quel point Alexia était bordélique (même si elle prétendait le contraire). Bon il fallait avouer que leur dortoir n'était déjà pas très bien rangé -quand on vivait avec Sirius et James depuis presque six ans on commençait à s'y faire- mais alors là l'état de la chambre battait des records. Surtout de la salle de bain à vrai dire. D'ailleurs la salle de bain donnait lieu à un véritable casse-tête. Remus n'oublierait jamais la fois où, mardi dernier, Frank était rentré dans la salle de bain et en était ressortit tout aussi vite, rouge pivoine en balbutiant des excuses tandis qu'Alexia le jetait dehors, serrant sa serviette contre elle. A partir de là, Sirius avait décrété qu'ils devaient bien vérifier avant d'entrer sinon il y aurait des représailles. Oh et puis le plus grand moment restait celui où Peter avait trouvé une boîte de tampon dans un tiroir en-dessous du lavabo et avait devenu aussi rouge qu'un souaffle.
Remus sourit à tous les souvenirs mouvementés quand il sentit soudain une main sur son bras.
- A quoi tu penses ? Demanda Anaïs avec douceur. Tu regardes dans le vague en souriant depuis tout à l'heure.
- Hein ? Oh désolé. Je...je pensais à mes amis.
- C'est marrant que tu dises ça parce qu'il y en un qui est venu me parler hier.
- Quoi ? Oh non, j'excuse d'avance...
Anaïs éclata de rire.
- Non, il a été très gentil. C'était James Potter. Il est assez sympa quand il ne drague pas Evans en fait.
- James... James est James, répondit-il faute de mieux. Et qu'est-ce qu'il voulait alors ?
- Ne sois pas nerveux, rit-elle. Ça s'est bien passé, vraiment. Il m'a même fait un éloge de ta personne en me disant que tu étais un ami formidable. Il m'avait demandé de ne rien te répéter mais j'ai trouvé ça tellement touchant...
Remus resta muet une seconde.
- Il a réellement fait ça ?
- Ouais.
- C'est...Il...
- Tu as de la chance Remus. Tes amis sont formidables.
- Je sais.
Elle sourit en le voyant détourner les yeux, ému. Alors qu'elle recommençait à écrire son devoir, elle le vit poser sa tête dans ses bras quelques minutes plus tard et l'inquiétude la gagna. Il n'avait pas eu l'air bien de toute l'après-midi mais ça paraissait s'aggraver à mesure que le temps passait.
- Remus ? Tu es sûr que ça va ?
- Oui oui...
- Tu es tout pâle. J'ai entendu dire qu'il y avait une épidémie de grippe en ce moment tu sais.
- Ce n'est rien, assura-t-il. De toute façon je vais passer deux jours chez moi, je vais me reposer.
Anaïs acquiesça, inquiète malgré tout. Elle savait que la mère de Remus était malade et qu'il avait une autorisation spéciale pour rentrer la voir une fois par mois pendant deux jours. C'était ses amis qui lui prenaient ses cours, on ne les voyait d'ailleurs jamais autant impliqué et assidus que pendant cette période.
- Je...Si tu as besoin de parler à propos de ta mère et tout ça...je suis là, d'accord ?
Touché par sa sollicitude, il culpabilisa immédiatement de lui mentir de la sorte. Remus se leva brusquement, chancelant sur ses pieds, et ramassa ses affaires.
- Remus ?
- Je dois y aller, dit-il précipitamment, mon portoloin ne va pas tarder. Tu connais McGonagall, si j'arrive en retard...
Il laissa la phrase en suspens, la laissant imaginer. Anaïs lui adressa un signe de la main tandis qu'il s'éloignait. Il devait se rendre à l'infirmerie dans la journée, comme d'habitude quand la fatigue était trop forte. Généralement, ça dépendait de la pleine lune. Dès fois il arrivait à tenir jusqu'à la fin des cours, aujourd'hui par exemple, même si la plupart du temps il abandonnait vers midi. Remus hésita à retourner à son dortoir pour prévenir les Maraudeurs mais il supposa qu'ils devineraient eux-mêmes et que de toute façon ils viendraient le voir ce soir avant d'aller le retrouver dans la cabane hurlante.
Arrivé devant la porte de l'infirmerie, il prit une profonde inspiration puis entra sans toquer. Mme Pomfresh sortit tout de suite de son bureau.
- Bonjour Mr Lupin, venez.
**
*
James ouvrit la porte de son placard, tentant d'enfiler sa cape en même temps. Il manqua bien évidemment de se ramasser par terre. Enervé, il termina d'abord de s'habiller et essaya ensuite de trouver son sac.
- On peut savoir pourquoi tu es si pressé ? Demanda Sirius dans son dos.
- J'ai rendez-vous avec Frank et Peter. Il faut qu'on aille bosser pour un devoir de sortilège. Tu veux venir ?
Sirius jeta un coup d'œil à Alexia qui était assise en tailleur sur le sol en train de lire un livre, adossée contre le pied du lit. Ils pourraient être tous les deux pour une fois.
- Non, c'est bon.
- Hum... D'accord. Et Alex ?
- Quoi ?
- Je crois que ça t'appartient.
Elle releva la tête pour voir James qui tenait une robe violette contre lui, sourire aux lèvres.
- Oh désolé. J'ai dû la ranger là par erreur.
- Rappelle-moi pourquoi on a accepté ce défi déjà ?
Il lui envoya la robe en pleine figure et elle éclata de rire. La colocation s'avérait être assez surprenante en fin de compte.
James boucla son sac puis se tourna vers eux.
- Bon les amoureux ! Lança-t-il sur le seuil. J'y vais.
- A tout à l'heure !
- Soyez sages !
Les sous-entendus dans sa voix étaient tellement évidents qu'Alexia se mit rougir. Dès que la porte claqua, elle sentit quelque chose lui frôler l'épaule et elle sursauta en se tournant vers la droite. Ce n'était que Sirius, allongé à l'envers de tout son long sur le lit, la tête renversé en arrière. Ses cheveux noirs formaient un halo autour de son visage fin et il souriait avec amusement.
- Viens là au lieu de rester par terre, dit-il.
La respiration d'Alexia se bloqua dans sa gorge et pour une fois ça n'avait rien à voir avec sa maladie. Elle réalisait à cet instant qu'elle n'avait jamais été réellement seule avec Sirius, encore moins dans une chambre. Priant pour avoir l'air décontracté, elle vint le rejoindre, la main crispée sur son livre. Après tout, ils avaient commencé à sortir ensemble quelques jours avant les vacances puis ils ne s'étaient plus vus pendant deux semaines. La rentrée datait peut-être d'un mois mais ça ne changeait pas grand-chose. Elle avait l'impression qu'ils n'avaient jamais eu de moment rien que pour eux, ni de retrouvailles, sans les amis autour.
- Pousse-toi, tu prends toute la place.
- Tant de délicatesse pour une fille, railla-t-il.
- Si tu sors avec moi pour ma délicatesse ou ma féminité, tu vas être déçu. Mais je peux toujours aller chercher Tessie Ryan si tu veux.
Sirius retint un frisson d'horreur à la mention de la Poufsouffle.
- Ses gloussements me hantent encore.
- Je ne comprends toujours pas ce que tu avais pu lui trouver...
- Jalouse ?
- Moi ? S'exclama-t-elle. Non !
Il haussa un sourcil en souriant.
- Peut-être un peu, mais avoue qu'elle était idiote. James ne la supportait pas non plus. Même Remus ! Et tu sais qu'il faut y aller fort pour que Remus n'aime pas quelqu'un.
- C'est vrai, consentit-il.
Lentement, il leva une main et remit une mèche de ses cheveux derrière son oreille, s'attardant sur sa joue.
- Tu m'as vraiment manqué...murmura-t-il. Pendant les vacances.
- Réellement ?
- Ouais. J'ai pensé à venir chez toi ce soir-là...mais...
Alexia ne demanda pas de quel soir il parlait, ce n'était pas la peine. Elle serra sa main dans la sienne et reprit doucement :
- Mais ?
- Je...je ne voulais pas t'impliquer dans tout ça...
- Sirius...
- Je ne voulais que tu sois exposé à eux, à leur haine, à tout ce qu'ils représentent.
- Ca m'est égal. Sirius, je suis là si tu en as besoin. Ne cherche pas à me protéger, je peux très bien le faire toute seule. Fais-moi juste confiance.
Il eut un sourire en coin mais hocha quand même la tête, lui montrant qu'il comprenait. C'était nouveau pour lui. Depuis toujours, il refusait de parler de sa famille, à part avec James peut-être. Certes, il était ami avec Alexia depuis leurs douze ans mais ils n'en avaient jamais vraiment discuté ensemble. Il estimait que les autres n'avaient pas à subir ses problèmes. Seulement, Alexia ne se laisserait pas mettre à l'écart comme ça.
Sous une impulsion, il l'attira contre lui, un bras autour de sa taille. Elle se laissa faire, le visage enfouit dans son cou et il se raidit en sentant son souffle sur sa peau.
- Je suis sérieuse, reprit-elle. Tu n'as pas à supporter ça tout seul.
- Princesse... Tu dis ça mais tu n'as jamais rencontré ma mère. De toute façon c'est terminé maintenant.
- Il n'y a pas qu'eux. Regulus...
- Non ! Coupa-t-il. Arrête.
- Sirius...
Il planta son regard dans le sien.
- Comment est-ce que tu peux vouloir parler de ça ? Dit-il avec force. Après tout ce qu'ils ont pu dire sur les nés-moldu ou les sangs-mêlés ?
- Sur des gens comme moi en somme ? Tu crois que je ne sais pas que ta famille mépriserait sûrement la mienne si elles se rencontraient ? Evidemment que j'en suis consciente. Mais je pensais que James te l'avait assez répété, tu es différent. Et personne ne te tient responsable pour ta famille ou pour ses propos.
Sirius déglutit. Il n'avait jamais vraiment eu conscience de cette peur. Il réalisa à cet instant que la fille dans ses bras était incroyable. Sans réfléchir, il écrasa sa bouche contre la sienne et elle ferma les yeux. Son baiser était à la fois dur et désespéré et elle se demanda depuis combien temps il s'inquiétait à cause de ça. Elle essaya de le rassurer en l'embrassant en retour avec ferveur, passant sa main dans ses cheveux. Il resserra sa prise sur sa hanche puis la tira contre lui. Pendant un instant, Alexia repensa à leur premier baiser quand il l'avait délivré du placard. A ce moment-là, c'était elle qui était terrifié, par la maladie bien sûr mais aussi par son enfermement. Elle voulait lui faire oublier ses peurs comme il l'avait fait avec elle.
- Alex...
Il passa sa main dans son dos et elle s'accrocha à ses épaules, pressant son corps contre le sien. Il gémit avant de se dégager. Alexia pouvait voir ses lèvres entre-ouvertes ainsi que sa respiration laborieuse mais elle devait après tout être dans le même état. Ils se regardèrent durant de longues secondes en silence.
- Est-ce que je peux... ? Souffla-t-il.
Elle hocha la tête et attrapa sa nuque, ramenant bouche contre la sienne. Cette fois le baiser était plus passionné, moins brutal, et Alexia sentit son sang chauffé dans ses veines. Sirius la fit basculer sur le dos, s'appuyant sur ses coudes pour ne pas peser sur elle. Il émit le même bruit de gorge que la dernière fois et elle ressentit une certaine fierté à en être la cause. Ils avaient sûrement des choses à faire, James ou Remus pouvaient revenir pour n'importe quelle raison, mais pour l'instant il n'y avait qu'eux. Alexia et Sirius. Accentuant le baiser, il joua une seconde avec l'ourlet de pull avant que sa main ne remonte vers sa poitrine. Il l'embrassa dans le cou puis revint s'emparer de ses lèvres.
Jamais Alexia n'aurait pu se douter qu'elle arrêterait l'action si quelque chose comme ça se passait avec Sirius. Pourtant, avec le contact de peau contre peau, elle eut brusquement l'impression d'avoir une prise de consciente. Il y avait encore trop de non-dits entre eux et surtout trop de mensonge. Elle savait qu'elle devrait lui parler de sa maladie tandis que lui devrait sans doute lui révéler ses secrets aussi un jour mais ils n'étaient visiblement pas prêts, du moins elle savait qu'elle ne l'était pas.
Elle ne pouvait pas le faire. Elle voulait mais pas comme ça, pas sur tous ses non-dits.
Alexia détourna la tête, brisant le baiser. Cependant, Sirius sembla mal interpréter son geste car il détourna à nouveau sa bouche vers son cou et son souffle se bloqua dans sa gorge tandis qu'elle gémissait en fermant les yeux. Elle faillit changer d'avis mais en sentant sa main frôler son ventre, elle le repoussa doucement quoiqu'avec assez de fermeté pour le faire reculer.
Sirius s'écarta légèrement en relevant la tête, la respiration haletante.
- Alex qu'est-ce que... ?
- Je...je ne peux pas...je...
Sa main quitta sa hanche comme s'il venait se brûler et il détourna les yeux.
- Ouais, désolé... Je ne voulais pas...désolé, balbutia-t-il avant de rouler sur lui-même, se remettant sur ses pieds.
Avant qu'elle ne puisse ajouter quelque chose, il était déjà au milieu de la pièce et elle se redressa rapidement.
- Non Sirius attends ! Laisse-moi t'expli...
- Rien à expliquer, dit-il sèchement, le regard fixé n'importe où sauf sur elle. C'est normal. Je vais juste...je vais y aller, rejoindre James. A plus tard.
- Non ne...
Mais il était déjà à la porte.
-...pars pas, termina-t-elle, seule.
Elle regarda le battant et le couloir, espérant qu'il reviendrait. Pourtant, après deux minutes, elle dû se rendre à l'évidence. Alexia se passa une main dans les cheveux, le ventre noué et cligna des yeux. Elle n'aurait jamais cru que ça allait se terminer si brusquement. Les mains de Sirius semblaient encore parcourir ses courbes tandis que son cœur battait furieusement dans sa poitrine.
Rageusement, Alexia se releva et se précipita à son tour hors du dortoir. Dans la salle commune, elle chercha son petit ami mais il devait effectivement être partit retrouver les garçons car il n'était nulle part en vue.
- Alex ? Appela Marlène, assise avec les autres près de la cheminée. Tout va bien ?
- On vient de voir Sirius passer. Tu... ça va ?
Lily l'observait, l'air inquiet, et elle devina qu'elle devait être dans un piètre état avec ses cheveux en bataille, les larmes aux yeux ou encore ses vêtements froissés.
- Sans commentaires.
- Mais...commença Alice.
- Ce n'est rien, juste une dispute idiote.
- Qu'est-ce qu'il a encore fait ? Dit Dorcas.
- Rien c'est...c'est de ma faute. Je vous laisse, faut que je le rattrape.
Elle s'empressa de tourner les talons, passant le trou du passage sans prêter attention à la Grosse Dame qui discutait et buvait de l'hydromel avec son amie Violette. Le couloir contenait plusieurs élèves mais Alexia ne s'arrêta pas. Elle tenta de se rappeler si James avait précisé l'endroit où il était censé rejoindre Peter et Frank, sans succès. Le premier lieu logique qui lui vint pourtant à l'esprit fut la bibliothèque et elle se mit à courir vers le passage secret caché derrière une tapisserie qui y menait en quelques minutes.
Alors qu'elle dégringolait les marches de l'escalier principal, elle se demanda soudainement ce qu'elle pourrait bien dire à Sirius. Il était hors de question qu'elle lui révèle pour sa maladie, du moins pas pour l'instant. Ce n'était pas le bon moment. Dire qu'elle n'était pas prête ? Ça pourrait passer, même si elle n'était plus vierge depuis cet été, elle savait pertinemment qu'il lui laisserait le temps qu'elle voudrait. Après tout ils ne sortaient ensemble que depuis un peu plus d'un mois, c'était encore tôt.
Au troisième étage, elle croisa Adrian Connelly et Mary McDonald qui passaient en riant. Elle avait toujours soupçonné qu'ils finiraient ensemble un jour même si pour l'instant ils semblaient plus occupés à se moquer de tout le monde (particulièrement de leur capitaine, à savoir James). Ses pensées repartirent vers Sirius. Elle avait l'impression que tout était à la fois simple et compliqué avec lui. Elle le connaissait par cœur mais il était parfois tellement renfermé, tellement inaccessible, que c'était difficile de gérer.
Brusquement, alors qu'Alexia allait tourner à l'angle, elle chancela sur ses pieds. Une main sur le mur pour se stabiliser, elle cligna des yeux et inspira. La sensation familière d'une vive douleur dans la poitrine se rependit dans son corps. Non, pensa-t-elle, pas maintenant s'il vous plait. Elle avait oublié de prendre sa fiole ce midi et ce n'était visiblement pas la meilleure idée qui soit. La tête lui tourna tandis que sa vue se brouillait brusquement, et elle se laissa glisser au sol, incapable de tenir sur ses jambes.
- Cassidy ? Héla une voix. Tu te sens bien ?
- Non...
Elle bascula en position allongé, les yeux fermés pour éviter de voir le couloir bouger et tourner autour d'elle. Aussitôt, une main se posa sur son épaule.
- Cassidy ?
- ...
- Alexia, c'est Adrian. Allez accroche-toi, ça va aller. Je t'emmène à l'infirmerie, ok ?
Il passa un bras sous ses genoux et l'autre dans son dos avant de la soulever comme si elle ne pesait rien. C'était légèrement vexant compte tenu du fait qu'Adrian n'avait même pas encore quinze ans. La lumière des torches fut la dernière chose qu'elle distingua avant de sombrer dans l'inconscience.
**
*
Quand Alexia se réveilla, elle reconnut immédiatement l'infirmerie. Elle était couchée dans un lit entre les draps blancs et la première chose qu'elle ressentit fut sa gorge sèche. Difficilement, elle tenta de se redresser mais son corps protesta de prime abord. Alors qu'elle allait faire une seconde tentative, Mme Pomfresh arriva en courant.
- Ah Miss Cassidy, enfin réveillée !
- Je... Qu'est-ce qui s'est passé ?
- Une crise, comme d'habitude, répondit-elle. Vous avez pris une fiole ce matin et ce midi ?
- Pas ce midi...
- Evidemment. Vous avez de la chance que votre ami ait été là.
Alexia se souvint vaguement de la voix d'Adrian et se fit une note mentale pour aller le remercier plus tard.
- Quelle heure est-il ?
- Bientôt 17h, vous êtes resté inconsciente pendant deux heures. Vos amies sont passées.
- Quoi ? Paniqua-t-elle. Mais...
- Je leur ai dit que vous aviez la grippe et que vous sortirez demain.
Un immense soulagement l'envahit puis elle comprit la deuxième information de la phrase.
- Demain ?
- Oui, je préfère vous garder encore un peu, on ne sait jamais. Et ne vous plaigniez pas !
- Bien madame, dit-elle, amusée.
- Hum... Bon restez là, je vais chercher une fiole de médicament dans la réserve. Ça ira ?
Alexia hocha la tête. Tandis que la porte claquait derrière l'infirmière, elle s'adossa contre ses oreillers, énervée. Il fallait que ça lui arrive précisément aujourd'hui ! Elle supposait qu'elle devrait aller parler à Sirius demain et peut-être que ce n'était pas si mal, la tension serait retombée d'ici là.
Elle parcourut la pièce du regard, même si elle la connaissait par cœur. Des dizaines de lit s'alignaient le long des murs, tous vides. Pourtant l'un d'entre eux était entouré par des rideaux et attira son attention. C'était rare qu'un lit soit caché ainsi. Cependant, un détail lui sauta aux yeux. Au pied du lit se trouvait un sac familier et sur la table de nuit elle repéra une baguette. Elle dû creuser dans sa mémoire pour se souvenir pourquoi tout ça lui évoquait ce sentiment de déjà-vu.
- Remus ?
Un bruit paniqué lui parvint et elle fronça les sourcils. Elle était persuadée que les affaires près du lit lui appartenaient.
- Remus c'est toi ?
Curieuse, elle se leva puis s'avança vers le lit. Elle hésita une seconde avant de tendre la main pour écarter les rideaux. Assis sur le lit se trouvait bien Remus, l'air terrifié, et son incompréhension redoubla.
- Mais... Qu'est-ce que tu fais là ? Je croyais que tu devais rentrer chez toi pour aller voir ta mère ?
- Et moi je croyais que tu avais la grippe pourtant d'après ce que j'ai entendu ça n'y ressemble pas...
Alexia écarquilla les yeux. Elle ne pensait pas qu'il avait entendu la conversation et Pomfresh avait dû penser qu'il dormait, sinon elle n'en aurait jamais parlé à voix haute.
- Je...Je... C'est compliqué...
- Toi aussi hein ?
- Ne retourna pas la situation Remus ! Est-ce que les autres savent que tu es là ?
- Les Maraudeurs le savent, oui, murmura-t-il. Tu n'étais pas censé le savoir par contre.
- Désolé...
Remus regarda la jeune fille, le ventre noué. Il ne voyait absolument pas comment se sortir de cette situation mais de toute évidence, Alexia avait l'air d'avoir aussi peur que lui. Elle inspira profondément et s'assit à côté de lui, jouant avec ses mains nerveusement.
- J'ai un secret, avoua-t-elle doucement.
- Tiens, ça nous fait un point commun.
Sa tentative d'humour tomba à plat. Ils gardèrent le silence durant de longues secondes et une connexion sembla passer entre eux, comme une promesse tacite.
- Tu promets que tu ne diras rien à Sirius ?
- Oui, si tu me jure de ne rien révéler au reste de l'école
- Ok, alors en même temps ?
Remus acquiesça et inspira fortement pour se donner du courage. Il n'arrivait pas à croire qu'il s'apprêtait à faire ça. Il avait l'impression qu'il pouvait lui révéler sa lycanthropie justement parce qu'elle cachait également un secret qui lui pesait et qu'ils pouvaient s'aider mutuellement.
- Je suis un loup-garou.
- Je suis atteinte d'une maladie mortelle
Alexia resta bouche-bée.
- Bien, on peut dire qu'on n'est pas les personnes les plus chanceuses du monde alors..., dit-elle finalement.
- Ouais... Attends, tu... Une maladie ?
- Une maladie, confirma-t-elle. Les médicomages disent qu'elle est d'origine magique mais il n'y a pas de remède définitif. Ma santé se dégrade juste avec le temps.
- Alex...
- Non, ne me dis que tu es désolé. Ça m'énerve quand les gens font ça.
Remus comprit.
- Un loup-garou hein ?
- Oui. Je suis un monstre.
- Je ne prétends pas être une experte, Remus, mais si tu es un monstre alors je n'en ai plus peur.
- Tu ne sais pas...
- Peut-être pas mais tu es mon ami et ce que je viens d'apprendre n'y change rien. Mais j'ai quand même une question...
- Laquelle ? Demanda-t-il, anxieux.
- T'as changé de nom après pour coller au personnage ou bien... ?
Il éclata de rire.
- Non le destin a juste un drôle d'humour.
Liés par leur secret, ils restèrent à parler toute la soirée.
Chapitre XXIX : Balade qui tourne mal
- Je viens de me faire menacer juste pour venir te voir, tu réalises la chance que tu as ?
Alexia se retourna dans son lit au son de la voix de Lily. Elle soupira de soulagement. Ce n'était pas qu'elle s'ennuyait toute seule, séquestrée à l'infirmerie, mais un peu quand même. Remus était partit récupérer quelques affaires dans son dortoir ainsi que pour bouger un peu elle soupçonnait, et il n'était pas encore revenu étant donné qu'il était encore très tôt, à peine 8h30. Même les cours n'avaient pas commencé mais elle savait que ce n'était pas ça qui aurait empêché Lily de venir la voir.
- Des menaces ?
- Ouais, Pomfresh m'a dit qu'elle me jetterait dehors si je faisais trop de bruit. Mais on s'en fiche. Comment tu te sens ?
- Fatiguée, c'est tout. Je devrais sortir dans la journée, ce n'est qu'une simple grippe.
Le mensonge lui montait aux lèvres si facilement désormais qu'Alexia se demanda quand est-ce que c'était devenu une habitude si simple...
- C'est vrai ? Génial ! Tu manques à tout le monde.
- Vraiment ?
- Oui, même si Dorcas ne veut pas l'avouer.
Alexia éclata de rire.
- Je reviendrais vous embêter assez vite. Il ne me reste qu'une semaine chez les garçons pour le défi.
- Ah c'est vrai... Je continu à dire que tu vas perdre, affirma Lily. hésitant à poursuivre. Et en fait...avec Sirius ? C'est réglé votre dispute ?
- Oh... Non, pas vraiment. On n'a pas eu le temps de parler et il n'est pas venu me voir...
Elle sentit son estomac se tordre à ces mots. James et Peter étaient passés hier après le dîner pour prendre des nouvelles de Remus, ils devraient sans doute revenir dans la journée, mais aucune trace de Sirius. Elle se doutait qu'il avait voulu l'éviter ou bien qu'il était sûrement encore en colère. A vrai dire, cette situation la dépassait un peu et elle ne savait pas quoi faire pour la résoudre, la scène de leur dispute étant déjà assez gênante comme ça.
Lily dû remarquer son expression car elle posa une main réconfortante sur son bras.
- Ca va s'arranger tu verras, dit-elle.
- Tu ne connais pas Sirius, il peut être très buté quand il le veut.
- Je te rappelle que je peux l'être encore plus. Si je dois le forcer à venir te parler, crois-moi je le ferais.
Alexia sourit. Elle ne doutait pas une seule seconde que ça soit vrai, surtout si Dorcas venait lui donner un coup de main. Quiconque s'enfuirait en courant.
- Je sais bien, soupira-t-elle, mais c'est tellement compliqué parfois avec lui. Quand il se referme sur lui-même, j'ai l'impression de parler à un mur. Je le connais, je l'aime, seulement on manque cruellement de communication.
- Bon...Je ne prétends pas connaître Black, honnêtement, mais je pense qu'il faut juste que tu lui laisse du temps. Sirius ne sait pas aimer parce qu'il ne l'a jamais été.
- Comment ça ?
- Disons seulement que son enfance n'a pas dû être des plus joyeuses, répondit Lily sobrement.
Un souvenir jaillit dans l'esprit d'Alexia. Le premier jour des vacances, à la descente du train, elle avait vu Walburga Black sur le quai de la gare. Un frisson lui parcourut le dos en repensant à cette femme horrible, habillée entièrement en noir et l'air austère, qui avait hurlé le nom de ses fils. Elle n'imaginait l'enfer que ça pouvait être de vivre avec une mère pareille. Certes, la sienne n'était pas parfaite, sa famille avait explosée au divorce de ses parents, mais ils s'aimaient tous sincèrement.
- Le cours de métamorphose ne va pas tarder, il faut que j'y aille. On se retrouve dans la salle commune en fin d'après-midi quand Pomfreh te laisse sortir ?
- Ouais, à tout à l'heure.
Lily la serra dans ses bras une dernière fois puis s'en alla rapidement.
L'heure suivante lui parut interminable jusqu'au retour de Remus. Il était soutenu par l'infirmière et tenait à peine sur ses jambes, le visage excessivement pâle. Alexia bondit sur ses pieds.
- Vous voulez de l'aide ?
- Ce n'est pas de refus, ce garçon est de plus en plus lourd chaque année.
- Merlin, il n'a vraiment pas l'air bien, s'inquiéta Alexia en passant son bras par-dessus son épaule pour le soutenir.
- C'est normal, il lui faudra une journée de repos pour s'en remettre. J'ai quelques potions en guise de vitamines également. Voilà, posez-le sur le lit, doucement.
Remus émit un gémissement fatigué alors que sa tête retombait contre l'oreiller et l'infirmière s'empressa de tirer les rideaux autour de son lit au cas où un élève rentrerait inopinément. Alexia resta une bonne heure à ses côtés, incapable de s'éloigner tant qu'il était encore endormi. Elle le trouvait plus jeune ainsi. Pour une fois, il avait l'air détendu et calme. Malgré tout, elle repéra de nombreuses griffures le long de ses bras et une sur sa joue. Il avait dû se les infliger lui-même durant la nuit.
- Alex ?
Elle sursauta.
- Hé Remus, murmura-t-elle. Enfin réveillé ?
- Ouais... Mais qu'est-ce que tu fais encore là ?
- Je voulais te voir avant de partir, m'assurer que tu allais bien. Les garçons devraient passer après les cours.
Remus hocha la tête. Ses amis passaient toujours, ce n'était pas une nouveauté.
- Il y a quelque chose d'autre ?
- En fait oui. Je... Tu me promets que tu ne diras rien pour ma maladie, pas vrai ?
- Je te le jure, dit-il. Et je serais mal placé de révéler ton secret alors que tu connais le mien.
Elle souffla de soulagement.
- Merci... Vraiment, merci.
- Pas de quoi, souffla-t-il, les yeux fermés.
- Tu veux que j'aille chercher Pomfresh ? Ou un médicament... ?
- Non, c'est bon, je vais juste dormir un peu.
Alexia lui serra la main.
- Bien sûr. Je reviendrais ce soir.
Sans faire de bruit, elle se leva et commença à rassembler ses affaires. Elle avait eu l'autorisation de partir depuis déjà une heure, il était temps qu'elle retourne dans la salle commune. Dans les couloirs, elle croisa plusieurs premières ou deuxièmes années qui avaient déjà terminé les cours et elle se demanda ce qu'elle allait bien pouvoir faire en attendant que ses amis la rejoignent.
A contre cœur, elle s'installa à une table pour faire son devoir de divination qui portait sur l'interprétation des rêves. Etant donné que ça faisait une semaine qu'elle dormait avec Sirius, ses rêves n'étaient pas vraiment appropriés pour un projet scolaire. Elle finit par adopter la technique de tous bons élèves : l'invention. Généralement, la professeure aimait les choses qui finissaient bien et elle inventa plusieurs symboles idiots comme le soleil et les licornes en disant qu'elle vivrait heureuse et aurait beaucoup d'enfants, ce qui ne pouvait pas plus être éloigné de la réalité. Elle espérait sincèrement que leur prof ne connaissait pas les contes de fées moldus.
- Alexia !
Elle n'eut pas le temps de se retourner que Marlène lui sauta dans les bras et elle fut aveuglée par des mèches de cheveux blonds. Alice éclata de rire avant de se joindre au câlin tandis que Lily et Dorcas arrivèrent plus sobrement.
- Alors cette grippe ? Tu vas mieux ?
- En pleine forme ! Tout va bien !
- Alex ! Hurla James, arrivant à son tour. Tu étais à l'infirmerie ?
- C'est maintenant que tu le remarques ? Je n'étais pas dans le dortoir hier soir tu sais...
James se figea. Il avait oublié que même si Remus lui avait avoué sa lycanthropie, elle n'était pas au courant pour les animagus et donc qu'il n'avait pas passé la nuit dans le dortoir. Quand son ami lui avait annoncé qu'il avait avoué son secret à la jeune fille, il en était presque tombé par terre et Sirius avait presque voulu se précipiter à l'infirmerie. Remus leur avait expliqué qu'il n'avait pas eu le choix quand elle l'avait surpris et lui avait posé des questions, bien qu'il soit resté assez vague sur les circonstances de cette révélation.
- Bien sûr que si je l'avais remarqué, c'était nettement plus silencieux et presque rangé ce matin !
- Hé ! Protesta Alexia. Je ne suis pas bordélique.
- Si ! Répliqua Lily. Et tu vas perdre ton pari.
- N'importe quoi...
A peine sa phrase achevée, James et Lily se lancèrent dans une liste de tous ses défauts en ce qui concernait le rangement. C'était un comble que pour une fois que ces deux-là étaient d'accord sur quelque chose, ça devait être sur ce sujet.
Soudain, elle sentit une main se poser sur son épaule et elle se retourna, sachant déjà qui se trouvait derrière elle. Sirius.
- On peut parler ? Demanda-t-il.
- Je...oui...
Alexia lui emboita le pas. Elle était sûre d'avoir rougit en repensant à ce qu'il s'était passé la veille mais il fit semblant de ne pas le remarquer. Ils s'éloignèrent dans un coin de la salle commune, près d'une fenêtre qui formait une alcôve et donnait une vue imparable sur le côté ouest du parc.
La brune inspira avant de lever les yeux pour croiser son regard gris et sa gorge se noua une seconde tandis que les mots se bousculaient dans sa tête.
- Excuse-moi, s'exclama-t-elle. Pour hier je veux dire...
- Non, c'est moi, coupa Sirius. Je n'aurais pas dû m'énerver. Alex, c'était complètement idiot, je ne veux pas que tu te sentes mal à l'aise ou forcé de le faire. Je suis désolé.
- Je t'ai encouragé à continuer et...
- Et tu as voulu arrêter. Je comprends. C'est de ma faute, je me suis mis en colère contre toi alors qu'il n'y avait aucune raison. En plus tu étais malade. Adrian m'a raconté comment il t'avait trouvé dans le couloir.
Sirius déglutit, pâle.
- Imagine s'il n'avait pas été là. J'aurais dû être...
Elle le prit dans ses bras pour le faire taire. Elle ne supportait pas qu'il culpabilise pour ça alors qu'il n'y était pour rien, qu'elle n'avait même pas vraiment eu de grippe. Ils restèrent dans les bras l'un de l'autre un moment jusqu'à ce James vienne vers eux, un sourire en coin aux lèvres et les mains dans les poches.
- Réconciliés ?
- Oui !
- Génial, je peux récupérer Sirius maintenant ? On a des trucs à faire.
Alexia haussa un sourcil.
- Certainement pas, c'est mon jour de garde.
- Quoi ? Non, c'est le mien.
- Tu l'as eu hier puisque j'étais à l'infirmerie !
- Tu n'avais qu'à te couvrir au lieu de tomber malade, répliqua James.
Sirius faillit leur faire remarquer qu'il n'était pas un ours en peluche dont on se partageait la possession mais il laissa tomber. Ils étaient vraiment timbrés.
**
*
Il était presque 22h30 quand James sortit de la salle de bain, une serviette dans la main pour s'essuyer les cheveux qui devaient se dresser en épis sur sa tête. En fait il ressemblait sûrement à un hérisson géant. Près de son lit, il manqua de trébucher puisqu'il voyait toute la chambre floue et une main secourable apparue devant son visage pour lui tendre ses lunettes.
- Merci Patmol...
- De rien. J'avais peur que tu te fasses mal tout seul en te prenant la porte du placard.
- Très drôle... marmonna-t-il.
James se laissa tomber sur son lit, la tête dans son oreiller. Il aurait pu s'endormir sur place si la voix de Peter ne s'était pas manifestée.
- Les gars... Est-ce qu'on va parler de ce qui s'est passé hier soir ou pas ?
- Je ne vois pas de quoi tu veux parler.
- James !
- Laissez tomber. On n'a pas besoin d'aborder le sujet.
- Il n'a pas tort, intervint Sirius, les yeux dans le vague. Ça a vraiment dégénéré hier soir. C'est un miracle que Lily n'est pas dit un mot.
- Elle est bonne actrice, répondit James. Et je sens qu'elle m'a laissé souffler aujourd'hui mais que je vais avoir le droit à une longue conversation demain.
Les souvenirs de la nuit dernière lui revinrent en mémoire et il frissonna. Ses amis avaient raisons, bien entendu. Tout aurait pu être bien pire. Il s'était demandé toute la journée pourquoi les choses étaient partit en vrille et il était arrivé à la conclusion que le loup devait s'ennuyer dans l'espace restreint de la bordure de la forêt. Ils ne pouvaient pas le laisser librement dans le parc, c'était trop dangereux et quelqu'un pourrait les voir.
- Il faudrait aller repérer une clairière pour la prochaine pleine lune. On pourra mieux maîtriser le loup. Je crois qu'il y en a une à une dizaine de minute dans la Forêt Interdite, on avait été cherché des champignons en quatrième année, tu te souviens ?
- Je me souviens surtout que tu étais tombé dans un buisson d'orties, répliqua Sirius en riant.
Peter éclata de rire.
- Je ne prendrais même pas la peine de répondre à ça. Bref, il faudra aller faire du repérage.
- Ça ne va pas plaire à Remus.
- Mince, j'y avais pas pensé. Déjà qu'il n'aime pas quand on va dans la forêt, si en plus il sait qu'on y va pour lui...
- On n'est pas obligé de lui dire.
- Ouais, dit James, regardant le plafond. Et n'oubliez pas, vous ne lui dites rien sur ce qui s'est passé hier soir. Pas besoin de le culpabiliser.
Ses amis hochèrent la tête.
- Comment va ta jambe ? Demanda Sirius malgré tout.
- Bien. Evans a fait du bon boulot.
James se pencha pour observer sa blessure de la veille. Elle n'était même pas douloureuse. Presque inconsciemment, il repensa à comment tout ça était arrivé.
« Ils étaient tous dans le parc, près de l'entrée du saule cogneur quand l'accident s'était produit. Le loup était plus agité que d'habitude et James avait essayé de le calmer en tournant autour de lui pour le faire retourner dans la cabane hurlante. Le cerf était celui qui pouvait le mieux le maîtriser grâce à sa taille mais James n'avait pas dû faire attention et une seconde plus tard une douleur fulgurante fusa dans sa jambe (ou sa patte en fait). Il ne savait pas vraiment ce qui s'était passé ensuite, juste que Sirius avait réussi à faire rentrer le loup et qu'il était ensuite revenu avec Peter. Ils s'étaient tous alors retransformés et James se serait effondré si ses amis ne l'avaient pas soutenu.
- Merde ! Tu vas bien ?
- Franchement ? Non !
- Qu'est-ce qui s'est passé ? Glapit Peter, les yeux écarquillés.
James serra les dents.
- Une griffure, c'est tout.
- Ce n'est pas... enfin je veux dire...
- Non, il faudrait une morsure pour qu'il y ait contamination, répondit Sirius. En plus il était sous forme animal, ça ne marche pas dans ce cas-là. C'est une juste une griffure normale.
- Juste une griffure ? Répéta James. Bah ça fait sacrément mal !
Ses amis échangèrent un regard, visiblement inquiets. Son pantalon commençait à être imbibé de sang et la douleur devenait de plus en plus forte. Finalement, Sirius prit la décision en le voyant pâlir.
- Il faut qu'on te ramène au château. Tu peux marcher ?
- A cloche-pied sans doute.
- Bon d'accord... Passe tes bras autour de nos épaules, on va te soutenir, ok ?
- Ouais. On a juste à espérer que Rusard dorme profondément.
Peter regarda sa montre.
- Il est 2h du matin, il doit dormir comme tout le monde. Il faut juste qu'on fasse attention. Quelqu'un a la carte ?
- Elle est restée au dortoir.
- On fera sans alors, décida Sirius. Allez on y va.
James manqua de tomber à plusieurs reprises et il dû se mordre la lèvre jusqu'au sang pour éviter de crier dans les escaliers tant la douleur devenait insupportable. Sirius essayait de le réconforter en lui disant de tenir, qu'ils étaient presque arrivés, mais James voyait bien qu'il n'en menait pas large non plus.
Il crut qu'ils n'allaient jamais réussir à réveiller la Grosse Dame qui ronchonna pendant plusieurs minutes avant de leur accorder l'entrée à la salle commune, mécontente d'avoir été dérangé à une heure pareille.
Cependant, dès qu'ils entrèrent dans la pièce, un cri de surprise s'éleva et James sentit son cœur s'arrêter en constatant que la salle commune n'était pas vide. Lily Evans se tenait devant eux, bouge-bée.
- Evans ?
- Merlin ! Cria-t-elle. James, qu'est-ce que... ?
Elle devait être hautement perturbée pour l'appeler par son prénom, pensa-t-il. Elle écarquilla les yeux en voyant les garçons porter James jusqu'au canapé où il se laissa tomber avec un grognement de douleur.
- Qu'est-ce qui se passe ?
- Une balade dans la Forêt Interdite qui a mal tourné c'est tout... C'est une griffure d'une bestiole non-identifiée, mentit Sirius.
- Quoi ? Ça pourrait être dangereux ! Il faut aller à l'infirmerie ou demander de l'aide à un professeur !
Lily commençait déjà à s'éloigner quand Peter lui barra brusquement le passage et elle manqua de lui rentrer dedans. Il semblait ne pas revenir lui-même de sa propre audace.
- Tu ne peux pas faire ça...
- Pardon ?
- Ils ne doivent pas savoir qu'on était dehors cette nuit, dit James.
Les professeurs n'étaient pas idiots, ça serait trop suspect que le soir de la pleine lune les Maraudeurs soient dehors. Dumbledore avait placé sa confiance en Remus et sa tolérance avait des limites. Personne ne devait savoir pour les animagus.
- On ne peut pas laisser Potter dans cet état ! Il lui faut des soins !
- Elle a raison...marmonna Sirius, la main dans les cheveux. Evans, tu avais fait un stage chez un médicomage l'été dernier, non ?
Lily se mordit la lèvre.
- Oui mais...je ne sais pas si je saurais...
- S'il te plait ! Il perd du sang...
Elle sembla hésiter une seconde mais la note de supplice dans la voix de Sirius acheva de la convaincre. Respirant un bon coup, elle hocha la tête.
- Très bien, dit-elle. Il me faut du matériel.
- On t'écoute.
- Black, tu t'occupes de trouver des bandages et du désinfectant et toi Pettigrow du fil et une aiguille. Peut-être aussi des compresses et un bol d'eau pour nettoyer la plaie...
- Tu as tout ça dans dix minutes. Par chance, on sait exactement comment forcer la réserve de Pomfresh !
- Je ferais semblant de ne pas avoir entendu... Allez, dépêchez-vous !
Ils ne le se firent pas dire deux fois et décollèrent de la salle commune en courant. Lily se tourna vers James toujours assis sur le canapé, la tête renversée en arrière contre le dossier. Il était excessivement pâle.
- Tu tiens le coup ?
- Hum hum...
- Comment tu t'es fait ça, Potter ?
- On n'a juste pas fait attention, la bête est arrivée de nulle part.
Elle aurait aimé poser plus de question mais il paraissait tellement fatigué qu'elle abandonna le sujet. James lui jeta un coup d'œil en biais.
- Et toi ? Pourquoi est-ce que tu es debout à 2h du matin ?
- Comme la dernière fois, je n'arrivais pas à dormir... Je ne m'attendais pas à tomber sur vous en descendant ici.
- On est toujours plein de surprise, plaisanta-t-il.
- Un peu trop...
James décida de prendre ça pour un compliment.
- Tu veux faire une bataille d'eau ?
- La première m'a suffi, et puis je ne crois pas que tu sois en état cette fois. Bien que pour le coup j'aurais enfin une chance de te battre.
- Même blessé je te battrai à plat de couture, Evans.
- Tiens, ton égo est revenu.
- Ce n'était pas mon égo mais la pure vérité.
Lily rit malgré elle. Ce gars allait la rendre folle. Heureusement, comme promis, Sirius et Peter revinrent au bout d'une dizaine de minute, les bras chargés de fourniture médicale. Ils installèrent tout près de la jeune fille qui sentit soudain son cœur s'accélérer en prenant conscience de ce qu'elle allait devoir faire.
- Ça va ? Demanda Sirius.
- Hein ? Oh oui... Je...
- Quoi ?
- Je ne suis vraiment pas sûre de pouvoir y arriver. Et où est Remus ? Peut-être qu'il...
- Il est rentré chez lui voir sa mère.
- J'avais oublié... Tu parles d'un timing !
Sirius s'agenouilla en face d'elle, une main sur son bras.
- Ecoute Evans, je sais que la situation n'est pas vraiment réjouissante mais on ne peut pas aller prévenir les professeurs. S'il te plait, on a besoin de toi.
- Et si je le blesse encore plus ?
- Ça n'arrivera pas.
- Je te fais confiance, ajouta James. Juste, ne me fais par perdre ma jambe.
Lily s'étrangla de rire, à mi-chemin entre la panique et l'amusement.
Elle aligna toutes les fournitures, essayant de ne pas trembler. Certes, son stage avait été très intéressant mais elle n'avait pas pratiqué énormément non plus et avait passé la majorité de son temps à regarder ainsi qu'à prendre des notes. Terriblement consciente du regard des deux autres, elle commença par passer de l'eau sur la griffure pour enlever le sang autour puis elle appliqua le désinfectant avec précaution. James siffla de douleur et recula par réflexe.
- Arrête de gigoter ou je demande à Black de te tenir.
- Ça fait mal...
- Tu auras un bonbon à la fin comme les enfants si tu es courageux, répliqua Sirius goguenard.
Une fois que la plaie fut propre, Lily hésita. Elle avait demandé du fil et une aiguille au cas où elle aurait eu besoin de recoudre mais la blessure ne paraissait pas si profonde que ça. Alors qu'elle allait mettre le bandage, Peter l'arrêta.
- Je ne sais pas si ça peut t'aider mais on a trouvé ça dans la réserve...
Elle attrapa le petit pot qu'il lui tendait et plissa les yeux pour déchiffrer l'étiquette. « Crème pour les coupures, griffures ou piqûres d'origine magique ». Son visage s'éclaira.
- C'est parfait ! Merci !
Lily dévissa le bouchon et étala la crème aussi doucement qu'elle le put. Une odeur d'eucalyptus flottait dans l'air quand elle banda finalement la jambe de James, faisant bien attention à ne pas trop le serrer.
- Et voilà !
- Evans, tu es parfaite...
Elle rougit.
- Bon ce n'est pas du travail de professionnel non plus... Si tu sens que ça s'infecte ou que ça devient bizarre, tu vas à l'infirmerie, d'accord ? Je ne veux pas avoir ta mort sur ma conscience !
- Je savais que tu te souciais de moi au fond...
- Non, c'est juste que je ne veux pas finir en prison pour meurtre seulement à cause de toi.
James sourit et se remit debout, chancelant. Il testa sa jambe en mettant son poids dessus mais pas plus de quelques secondes. Ça ne servait à rien d'aggraver la situation après tous les efforts de la jeune fille pour le soigner.
- Tu n'as qu'à refaire le bandage demain, voire une fois par jour pendant une semaine on ne sait jamais. Et applique la crème, elle aidera la plaie à cicatriser plus vite.
- Bien docteur !
- Oh ! Une dernière chose... Je te jure que si j'apprends que vous êtes retournés dans cette maudite forêt McGonagall fera pâle figure en comparaison de ce que je vous ferai subir. C'est clair ?
Les garçons déglutirent et s'empressèrent d'acquiescer. Mettre Lily Evans en colère n'était jamais une bonne idée.
- Bon, je retourne me coucher. Bonne nuit.
- Bonne nuit Evans.
Lily fit un pas en avant puis se ravisa. Rapidement, elle se hissa sur la pointe des pieds et déposa un léger baiser sur joue de James qui fit un bruit étranglé. Quand elle se recula, elle faillit éclater de rire en le voyant la bouche entre-ouverte, l'air sidéré.
- C'est pour te féliciter de ton courage... même si tu restes un imbécile imprudent.
- Tu ne pouvais pas me faire de plus beau compliment !
Chapitre XXX : Découverte et match de Quidditch
Lily se demanda quand est-ce qu'elle allait enfin réussir à s'endormir. Elle était remontée dans son dortoir depuis maintenant une heure mais sa rencontre avec les Maraudeurs tournait dans son esprit. La vision de James, la jambe ensanglantée, et de la panique de Sirius quand ils avaient débarqué lui serrait encore le ventre. Elle ne pouvait pas s'empêcher d'imaginer ce qui aurait pu arriver si elle n'avait pas réussi à le soigner ou si la blessure avait été plus grave.
Mais, après tout, c'était eux qui étaient complètement abrutis pour aller faire un tour dans la Forêt Interdite à cette heure-ci, surtout un soir de pleine de lune. Le professeur d'Astronomie l'avait mentionné hier et Lily venait de se souvenir de ce détail. Elle ne savait pas exactement quels étaient les animaux qui peuplaient les bois, sûrement des bestioles plus dangereuses les unes que les autres que seul Hagrid appréciait vraiment, mais il devait y avoir des loups garous pendant la pleine lune. Ou peut-être pas quand même... Lily se dit que Dumbledore n'était pas fou à ce point-là. Elle se souvenait de son cours sur les loups garous en troisième année. Ces pauvres personnes n'étaient absolument pas dangereuses le reste du temps sauf évidemment lors de la pleine lune et leur professeur avait veillé à leur enseigner la différence entre les deux. D'ailleurs James avait manqué de mettre son poing dans la figure de Mulciber quand ce dernier avait remis cette affirmation en cause.
Elle pouvait reprocher beaucoup de chose à Potter mais certainement pas de ne pas se battre contre les injustices. Il avait été le premier à s'énerver après l'attaque de Mary McDonald l'année passée et même pour des choses banales, comme la pénurie de tarte au citron le mercredi au déjeuner, il allait protester auprès de McGonagall qui se contentait de secouer la tête en soupirant.
Lily se retourna une fois de plus et ses cheveux auburn lui revinrent en pleine face. Ses yeux commençaient à piquer à cause du manque de sommeil, pourtant elle était certaine de ne pas pouvoir dormir cette nuit. Merlin, elle allait étrangler Potter pour être si idiot ! Quand Remus serait de retour de chez sa visite à sa mère, elle se promit de le dénoncer au préfet pour qu'il lui sonne les cloches. S'il y avait bien une personne que James écoutait, c'était Remus Lupin. Il faudrait aussi qu'elle lui demande si sa mère allait mieux, elle ne l'avait pas fait depuis un moment et elle culpabilisa immédiatement. Depuis sa première année, Remus rentrait souvent chez lui, ce qui le fatiguait souvent quand il revenait.
Finalement, Lily rumina la question de l'idiotie de Potter et ses amis pendant une heure avant de sombrer dans les bras de Morphée sans s'en rendre compte...
**
*
Lily n'eut pas le temps d'aller parler à James le lendemain, décidant de le laisser souffler après la soirée mouvementée de la veille et elle passa voir Alexia avant sa sortie de l'infirmerie. Elles parlèrent ensemble de sa relation avec Sirius, même si la rousse garda sous silence l'accident de la forêt qui n'avait pas grand intérêt. Elle sourit en les voyants se réconcilier dans l'après-midi et monta se coucher de bonne heure après sa dernière courte nuit.
**
*
Le lendemain matin, après le petit déjeuner, le couloir qui menait au dortoir des filles étaient dans un désordre incroyable.
- Attention c'est fragile !
- C'est ton fer à lisser, répliqua Dorcas.
- Et alors ? C'est fragile...
Dorcas roula des yeux, réajustant sa prise sur le carton.
- Tu as été avec les garçons pendant seulement deux semaines. Comment est-ce que tu as fait pour emmener autant d'affaires ?
- Il fallait bien que je m'installe, dit Alexia.
- Qu'elle s'étale oui ! Hurla James depuis le bas des escaliers.
- On ne t'a pas demandé ton avis !
Lily passa la tête par le chambranle de leur chambre, attirée par le bruit. Aujourd'hui, ça faisait deux semaines que le pari d'Alexia avait été lancé et elle revenait donc occuper son dortoir. L'opération avait alors pris des allures de déménagement ! Elle ne s'était pas rendu compte du nombre de chose qu'Alexia avait emporté avec elle lors de son installation chez les garçons mais ça équivalait à peu près à sa garde-robe en entier, la moitié de ses affaires scolaires, ainsi que quelques babioles. D'ailleurs, les Maraudeurs et Frank avaient été mis à contribution pour descendre les cartons tandis que les filles remontaient le tout dans leur dortoir, sous l'œil vigilant d'Alexia. Au moins, ça amusait le reste de leurs camarades qui les regardaient passer en tapant dans leur main pour les encourager.
- Les filles, je vous rappelle qu'on a cours dans une heure donc il faut accélérer.
- Va dire ça à Frank et Alice, bougonna Marlène. Ils passent plus de temps à parler qu'à porter des cartons. Et James et Sirius essayent de jongler avec tout ce qu'ils trouvent...
- Bon sang... Heureusement que Remus revient ce soir, il faut les encadrer ces deux là !
- Va leur parler, peut-être que ton autorité de préfète agira.
- J'ai abandonné cet espoir depuis longtemps, Marlène, soupira-elle.
Malgré tout, elle se décida à descendre pour aller voir comment ils s'en sortaient réellement. Dès qu'elle arriva, elle comprit pourquoi le « déménagement » prenait autant de temps. Potter et Black semblaient jouer au volley dans le couloir avec le vieux souaffle qu'Alexia avait gardé de son premier match (pourquoi diable s'était-elle sentit obligée de le prendre avec elle, c'était un mystère) tandis que Peter croulait sous le poids de trois cartons, essayant d'avancer à l'aveugle pour ne pas trébucher.
- Je peux savoir ce que vous faites ?
- Oh tiens Evans...
- Ne me fais pas le coup du « tiens Evans ».
James tenta d'avoir l'air penaud, sans succès évidemment.
- Vous me désespérez, dit-elle. Mais au moins j'ai gagné mon pari.
- Tu m'étonnes... Je n'ai jamais vu une fille aussi bordélique qu'Alexia.
- T'exagères, protesta Sirius.
- Ah bon ?
- Non d'accord t'as raison.
Lily sourit face à cet aveu. Rapidement, elle s'empara d'un carton en voyant Peter tanguer avec précarité puis elle se tourna à nouveau vers Potter.
- En fait, comment va ta jambe ?
- Oh mieux, la blessure a presque disparu. Merci encore pour l'autre nuit.
- Ce n'est rien... Même si je continu à dire que vous êtes complètement inconscients. Quand est-ce que Remus revient pour remettre un peu d'ordre ?
- Ce soir normalement, répondit James.
Habituellement, Remus sortait de l'infirmerie le lendemain de la pleine lune mais cette fois-ci il avait dû rester une journée de plus à cause de la fatigue et des griffures que le loup s'était auto-infligé, sûrement à cause du fait qu'il était resté seul une partie de la nuit quand les autres avaient dû partir pour soigner James.
- Bien, approuva Lily, vous avez besoin de quelqu'un pour vous surveiller.
Les garçons ne prirent même pas la peine de la contredire. Ils terminèrent tous de ranger les affaires d'Alexia puis il fallut manger en dix minutes pour ne pas être en retard en cours. McGonagall leur décocha un regard suspicieux en les voyant tous arriver en courant mais elle ne fit aucun commentaire.
Heureusement, tous les cours s'arrêtaient à 14h aujourd'hui à cause du match de Quidditch entre Gryffondor et Serdaigle. James sautillait presque nerveusement dans les vestiaires, incapable de rester en place. Tous les membres de l'équipe discutaient plus ou moins sereinement pour essayer de se rassurer et Olympe tentait de détendre l'atmosphère en racontant la dernière gaffe de son grand-père.
- Il a voulu prendre la poudre de cheminette pour rendre visite à sa voisine mais il s'est trompé d'adresse et devinez où est-ce qu'il a débarqué !
- Aucune idée...
- Chez un vendeur de chaudron au fin fond de la campagne ! On s'est inquiété pendant des heures pour le voir finalement revenir avec trois chaudrons en étain grâce à la super promotion du magasin !
Tout le monde éclata de rire et Kevin Mells enchaîna lui aussi sur une histoire de famille, avec son oncle en vedette. Il vivait chez ce dernier depuis la mort de sa mère quand il était enfant et il avait toujours une tonne d'anecdotes amusantes à partager. En plein milieu d'une histoire qui impliquait un hérisson et une savonnette, James s'avança pour l'interrompre.
- Ok, c'est l'heure d'y aller. Chacun sait ce qu'il a à faire ?
- Oui capitaine ! Répondirent-ils en cœur.
Dès leur entrée sur le terrain une clameur s'éleva des supporteurs qui agitèrent leurs drapeaux et leurs banderoles. Tiberius se joignit à eux avec enthousiasme sauf que sa voix résonna un peu trop fortement à cause de son micro magique. Lily plaignait franchement les pauvres élèves assit à côté de lui qui ne devaient plus avoir de tympan à l'heure actuelle.
- Bonjour à tous !!!! Les équipes entrent sur le terrain avec à leur tête les capitaines James Potter et Amelia Bones ! D'ailleurs cette dernière m'a mis une heure de colle hier, je dénonce de l'abus de pouvoir ! A bas les préfets !
- Ackerley, on ne vous demande pas de lancer une révolution. Contentez-vous de commenter le match.
- Oui professeur. Je disais donc que la rencontre va commencer, les joueurs se mettent en place... Et ça commence ! Serdaigle attrape le souaffle et s'élance vers les buts mais un cognard lui coupe la trajectoire et c'est Gryffondor qui s'en empare. Mary McDonald évite les poursuiveurs adverses, fait la passe à Potter qui prend de la hauteur... Il doit faire froid là-haut. En plus, je trouve que les températures ont baissé dernièrement. Bon on est mi-février d'accord mais tout de même. Je ne comprends pas pourquoi ils ont construit ce château en Ecosse, il y avait sûrement des endroits un peu plus ensoleillés. Non parce que, je ne sais pas pour vous chers spectateurs, mais je gèle pendant les cours de soins aux créatures magiques...
- Ackerley, je ne pense que ces propos soient vraiment pertinents.
Tiberius ne parut pas l'entendre.
- J'ai bien proposé qu'on fasse ces cours à l'intérieur mais la prof a dit que ça serait dur de faire rentrer les licornes dans des salles de classe.
- Voilà quelque chose de véritablement passionnant mais je crois qu'un but vient d'être marqué !
- Vraiment ? 10-0 pour Gryffondor !
- Pour Serdaigle...
- Oh oui ! Enfin je veux dire...je ne fais pas de favoritisme pour ma maison, ça ne serait pas professionnel de ma part.
McGonagall pinça les lèvres mais ne dit rien sur cette affirmation douteuse. Sur le terrain, James gardait un œil sur son attrapeur même si le vif d'or n'avait pas encore fait son apparition. Il n'avait pas trop à s'inquiéter cependant, Adrian semblait parfaitement maîtriser la situation. Un cognard le frôla et il se reconcentra sur son poste à lui, ce n'était pas le moment d'avoir la tête ailleurs.
- En fait, reprit Tiberius avec nonchalance, pourquoi est-ce que la météo est le sujet préféré des gens ? Quand il fait beau encore je comprends mais parler de pluie ça devient vite déprimant.
- Le match, Ackerley, focalisez-vous sur le match !
- Oui professeur. Alors Amelia Bones s'empare du souaffle, fonce vers les buts, elle tire... Oh magnifique arrêt de Frank Londubat ! Rien de surprenant, il est décidément un gardien hors pair. On se souvient tous de ses essais l'année dernière quand il avait postulé pour être batteur. Le résultat avait été catastrophique, Black manquant de perdre un bras dans le processus !
Sirius grimaça sur son balai.
- Heureusement que Potter a eu le bon sens de le mettre en gardien et je rappelle qu'un nouvel article avait été ajouté dans le règlement de l'école, à savoir ne pas laisser Londubat s'approcher d'une batte ou d'un cognard à moins de dix mètres.
- Quand même pas...bougonna Frank tandis que la foule éclatait de rire.
Lily sourit à la blague. Si elle venait encore assister aux matchs de Quidditch c'était vraiment grâce au commentateur. Et puis pour celui d'aujourd'hui elle voulait aussi s'assurer que Potter allait bien malgré sa blessure à la jambe. Ce n'était pas comme si son sort la préoccupait énormément mais...bon d'accord elle se souciait lui. Dès que Remus rentrerait ce soit de toute façon elle irait lui parler pour qu'il remettre les idées au clair à ses amis et peut-être qu'il arriverait même à les culpabiliser un minimum. Non parce qu'il fallait réellement être inconscient pour aller se promener dans la forêt une nuit de pleine lune. Elle ne savait pas trop pourquoi ce détail en particulier lui restait en tête depuis hier mais elle avait l'impression qu'elle passait à côté de quelque chose...
- Oh ! But pour Gryffondor ! 30 à 50 ! Hurla Tiberius, la sortant de ses pensées.
Elle tenta de suivre à nouveau le match mais impossible. Son cerveau restait bloqué sur ce sentiment étrange et les cris d'encouragements d'Alexia devant elle ne l'aidait pas à se concentrer. Lily avait toujours eu une bonne capacité pour le calcul mental, c'est pour ça qu'elle avait pris l'option runes. Elle commença alors à repenser aux pleines lunes des derniers mois. Peut-être que le déclic s'effectua car elle pensait à Remus juste avant mais elle remarqua soudain que ses absences, ou du moins les visites à sa mère, correspondaient aux dates des pleines lunes. Elle dû fouiller dans sa mémoire pour en être sûre et elle réussit à se rappeler de la plupart. Tout sembla s'assembler comme un puzzle, presque comme quand elle était enfant et que la dernière pièce formait le dessin annoncé par la boîte. Des signes qu'elle avait toujours vu sans vraiment les remarquer lui sautèrent aux yeux brusquement. Remus avait souvent des cernes, des traces de griffures sur les bras, le teint pâle et l'air fatigué. Il y avait aussi les chuchotements entre les garçons, cette façon qu'ils avaient de se comporter comme s'ils partageaient quelque chose qui les liait ensemble.
Sans s'en rendre compte, Lily bondit sur ses pieds, la respiration haletante.
- Lily ? Appela Marlène, surprise.
- Je dois y aller...
- Mais c'est pas terminé...
Elle ne répondit même pas et bouscula les personnes dans sa rangée pour sortir des gradins. En fond sonore, Tiberius continuait à babiller sur le score et la météo.
- ...il paraît qu'on aura du soleil demain, disait-il, mais bon les prévisions c'est comme mes devoirs de potion, imprévisible !
- Ackerley par Merlin ! Taisez-vous !
- Me taire ? Mais je dois commenter le match...
- Alors gardez cette idée en tête !
Lily dévala les marches jusqu'à la pelouse au moment où un nouveau but venait d'être marqué au vu des hurlements du public. Elle ne se retourna pas pour savoir quelle équipe gagnait les points et se mit à courir aussi vite qu'elle le pouvait. Sa théorie tournait en boucle dans sa tête, même si elle essayait de la réfuter par tous les moyens possibles. Elle avait dû se tromper quelque part. C'était obligé.
Elle entra dans le château sans prendre le temps de ralentir, ce qui lui valut en feulement de la part de Miss Teigne qui était couchée dans le hall. Comme toujours dans les cas où elle doutait de quelque chose, Lily se précipita à la bibliothèque et se jeta littéralement sur un vieux libre d'Astronomie avant de le refermer avec rage en constatant qu'il n'était pas assez récent dans les dates.
- Excusez-moi, dit-elle, est-ce que vous auriez un document qui répertorie les dernières pleines lunes ? Cette année par exemple ?
Mrs Pince la regarda par-dessus ses lunettes à monture écaille, visiblement surprise.
- Oui, je dois avoir ça. C'est pour un devoir ?
- C'est ça.
La bibliothécaire ne posa pas plus de question, il faut dire que Lily était devenu son élève préféré depuis son arrivée à l'école. Elle revint quelques secondes plus tard avec des feuilles liées par un trombone.
- Tenez, ça devrait vous aider.
- Merci beaucoup.
Lily alla s'installer à une table et commença à feuilleter le calendrier. Elle se souvenait à peu près de toutes les fois où Remus n'avait pas été là ces derniers mois puisqu'elle était chargé de lui prendre et de lui recopier les cours de runes, leur option commune que ses amis ne suivaient pas. Tout correspondait. La gorge sèche, elle resta assise sans savoir quoi faire. Finalement, elle prit sa décision. Si Remus ne rentrait pas chez lui pour voir sa mère et si ses suppositions étaient exactes, il ne pouvait être qu'à un seul endroit.
- Miss Evans ? S'exclama Pomfresh en l'accueillant à la porte de l'infirmerie. Qu'est-ce que vous faites là ?
- Je...je...
- Oui ?
- Je viens voir Remus.
Pomfresh se figea.
- Il n'est pas ici, monsieur Lupin est rentré chez lui pour quelques jours, vous savez que...
- Que les dates de pleine lune correspondent toujours à ces absences ? Qu'il présente tous les symptômes de la lycanthropie ? Oui je le sais.
Lily se demanda un instant si elle ne s'était pas trompée ou si elle n'allait pas se faire rembarrer sèchement mais l'infirmière s'effaça soudain pour la laisser passer.
- Venez, dit-elle avec un signe sec du menton. Nous devons parler.
Inspirant fortement, la rousse lui emboîta le pas. Son regard tomba tout de suite sur Remus, assis sur un lit et au visage aussi pâle que les draps.
- Remus...
- Quelqu'un a mis une banderole cette semaine pour tout dévoiler ? Cria-t-il.
- Qu...Quoi ?
Remus souffla pour se calmer. Elle n'était évidemment pas au courant pour la découverte d'Alexia, ce n'était pas la peine de l'en blâmer. Pourtant, il avait l'impression que son monde s'effondrait en trois jours et que son secret n'en était plus un.
- Je vous laisse discuter, lança Pomfresh.
Dès que la porte se ferma dans son dos, Remus reprit la parole.
- Comment tu as deviné, Lily ?
- Les dates... les dates correspondaient. Et je suis tombée sur les Maraudeurs avant-hier qui revenaient de la forêt interdite. Je suppose qu'ils profitaient que tu ne sois pas là pour ne pas respecter les règles.
- Sûrement, mentit-il.
- Je...je ne sais pas quoi dire Remus.
- On peut commencer par le fait que je suis un monstre...
- Non ! S'exclama-t-elle. J'ai lu beaucoup d'essais sur la lycanthropie, c'est une maladie qui n'a pas d'incidence sur la personne quand elle est sous forme humaine. Il y a eu de nombreux débats et procès sur la question pendant des siècles et...
Remus sourit, amusé par sa tendance à réciter ce qu'elle avait appris par cœur dans les manuels. Elle parut s'en rendre compte également car elle s'arrêta d'elle-même puis vint s'assoir à côté de lui, le visage resplendissant.
- Tu n'as pas à t'excuser d'être ce que tu es, Remus. Ça ne change rien.
Les mots de la jeune fille ressemblaient tellement à ceux d'Alexia la veille qu'il sentit ses inquiétudes s'envoler comme par miracle.
- Pourquoi est-ce que tu as si peur que ça se sache ?
- Lily, tout le monde n'est pas toi. Les gens auraient peur, et je ne peux leur en vouloir. Non, franchement, assura-t-il, ça va. J'ai l'habitude.
- Depuis...depuis combien...
- J'avais presque cinq ans. Je ne me souviens même pas de la morsure, à part que ça faisait très mal.
Lily eut du mal à contenir ses larmes.
- Ce n'est pas juste.
- Tu parles comme James, sourit-il.
- Tu me vexes là...
Ils éclatèrent de rire ensemble.
- Tu es une personne incroyable, dit Lily avec douceur. Et ce n'est pas grave si tu ne le vois pas toi-même, compte sur moi pour te le rappeler.
- James t'a vraiment passé ces fiches bristol sur le sujet...
- Très bien je retire tout ce que je viens de dire !
Elle lui donna un coup d'épaule et jeta un coup d'œil à l'horloge. Elle devait y aller, le match devait être sur le point de se terminer. Alors qu'elle allait se lever, elle se tourna vers lui.
- N'oublie pas, il faut toujours être sincère. On t'aime pour toi, Remus.
Doucement, elle lui déposa un baiser sur la joue en faisant semblant de ne pas remarquer son émotion et sortit de la pièce le cœur plus léger qu'en arrivant. Elle n'en revenait toujours pas pourtant les choses prenaient d'un coup tout leur sens. Elle se demanda même comment elle avait fait pour ne pas deviner plus tôt.
Alors que Lily allait quitter le couloir de l'infirmerie, elle manqua de rentrer dans Peter qui arrivait en courant, les bras chargés de...chocolat.
- Oh Evans...désolé.
- Ce n'est rien. Tu vas voir Remus ?
- Oui...Attends non. Non, il est chez ses parents, balbutia-t-il.
- Tu n'as pas besoin de mentir. Je sais.
Peter écarquilla les yeux.
- Tu sais quoi ?
- Pour le truc du loup-garou.
- Mais...mais...
- Ne t'inquiète pas, j'en ai discuté avec Remus. Tout va bien. En fait qui a gagné ?
- Euh...Egalité. Les Serdaigle ont été déclaré vainqueur car ils ont marqué le premier but. James est quand même content.
- Génial. Bon j'y vais, a plus tard.
Elle commençait tout juste à s'éloigner quand Peter la héla brusquement. Surprise, elle se retourna pour le voir arriver vers à grands pas, l'air déterminé.
- J'ai quelque chose à dire aussi, déclara-t-il très sérieusement. Remus est mon meilleur ami. Il a été le premier à m'accepter. Je n'étais qu'un garçon mal dans sa peau, petit, effacé... James et Sirius ne m'auraient jamais remarqué si Remus ne m'avait pas offert son amitié. Il m'aide toujours quand j'ai besoin de lui et il est la meilleure personne que je connaisse. Sa lycanthropie ne veut rien dire mais il refuse que les autres soient au courant. Donc tu dois garder le secret, Evans. Tu m'entends ? S'il lui arrive quelque chose, tu auras affaire à moi.
Lily cligna des yeux, bouge-bée. Elle n'avait jamais pris le temps de parler avec Peter mais elle découvrait là une nouvelle facette de sa personnalité. Il se tenait droit, sans faiblir et sûr de lui.
Aujourd'hui, pour la première fois, elle comprit pourquoi Peter Pettigrow faisait partie des Maraudeurs.
**
*
Son écharpe de Gryffondor encore autour du cou, Alexia était adossée au mur face à l'infirmerie à attendre. Une minute plus tard, la lourde porte s'ouvrit et Remus eu un mouvement d'arrêt en la voyant.
- Hé ! Enfin libre ?
- Ouais, je me sens mieux. Qu'est-ce que tu fais là ?
- J'échappe au récapitulatif du match par James. Il a encore planté un tableau au milieu de la salle commune. J'ai décroché quand il a commencé à tracer des flèches et des croix partout.
Remus sourit en imaginant la scène. Ils marchaient tous les deux côte à côte pour retourner à la tour de Gryffondor et presque mécaniquement il se mit à repenser à sa conversation avec Lily. Elle lui avait dit qu'on devait privilégier la sincérité. C'était typique de Lily évidemment. Il hésita puis commença prudemment :
- Tu sais... Peut-être que tu ne devrais pas tout garder pour toi.
- Qu'est-ce que tu veux dire ?
- Ta maladie. Je pense que tu devrais en parler à quelqu'un, à tes amies.
- Je t'en ai parlé à toi, répliqua Alexia.
- C'était différent. Tu ne peux pas garder tout pour toi et je ne crois pas que les autres...
- Remus, c'est non. Ma maladie, mon problème. C'est tout.
- Mais...
- Ecoute, coupa-t-elle en se stoppant brusquement. Je trouve que tu n'as pas de conseil à donner sur la question.
- Mes amis savent pour ma lycanthropie. Lily aussi.
Alexia haussa un sourcil.
- Lily ? Depuis quand ?
- Il y a deux heures.
- D'accord. Et c'est toi qui leur a avoué ? Ou ils ont tous deviné ?
-...
- C'est bien ce que je pensais...
- Alex...
- Les gens changent quand ils savent, Remus ! Ma mère manque de fondre en larme dès que je rentre dans une pièce, mon frère fait comme si j'allais mourir dès que j'éternue !
- La famille et les amis sont des choses différentes. Je suis le mieux placé pour le savoir. Et Sirius est mon meilleur ami, je ne peux pas lui cacher ça indéfiniment...
- Je t'ai tout avoué hier ! S'écria-t-elle. Ne me dis pas que la culpabilité t'étouffe au bout d'une journée !
- Tu ne comprends pas...Il t'aime, il mérite de savoir.
- Non... Non je t'en supplie. Tu m'as promis !
- Il a besoin de connaître la vérité.
Il tenta de reprendre sa route mais elle l'en empêcha.
- Non, dit-elle d'une voix sourde en l'attrapant par le poignet. Tu ne vas rien lui dire.
- Alex...Je ne peux pas lui mentir, c'est mon meilleur ami !
- Désolé Remus mais je ne te laisserais pas faire. Si tu fais ça...Je...je dirais à Anaïs que tu es un loup-garou.
Une expression de trahison passa sur le visage du jeune homme et Alexia sentit son cœur se serrer douloureusement dans sa poitrine. Sans rien ajouter, elle continua sa route sans attendre. L'enfer est pavé de bonnes intentions.
Chapitre XXXI : Cours de Transplanage
- Bon sang on va être en retard !
- La faute à qui ?
- L'eau chaude ne marchait pas, répliqua James.
Sirius leva les yeux au ciel.
Ils étaient tous en retard pour le cours de Transplanage qui devait commencer dans une dizaine de minute et le professeur McGonagall avait bien précisé qu'il fallait y être en avance. Remus marchait en tête de groupe, comme s'il avait l'espoir de les faire accélérer.
On était déjà début mars, trois semaines s'étaient écoulés depuis sa conversation avec Alexia à la sortie de l'infirmerie. Remus revoyait encore le regard déterminé de la jeune fille quand elle lui avait jeté son ultimatum au visage. Il comprenait sa peur, bien sûr. Il avait vécu la même pendant des années et il continuait d'ailleurs à la ressentir, sinon il n'aurait pas accepté de se taire. Les secrets pesaient bien souvent trop lourds pour que les personnes puissent s'en détacher. C'était son cas. Il s'était fait à l'idée que les Maraudeurs soient au courants, c'était en quelque sorte inévitable. Même pour Alexia et Lily il acceptait. Mais il ne pouvait pas prendre le risque qu'Anaïs apprenne la vérité sur sa condition.
Pourtant, le secret de la maladie d'Alexia commençait vraiment à lui peser et il savait que Sirius voyait que quelque chose n'allait pas. Remus ne savait plus quoi faire en ce qui concernait son meilleur ami. Ce dernier n'était pas idiot, il voyait bien que Remus l'évitait et il finirait inévitablement par poser des questions.
Soudain, il remarqua que ses amis s'étaient arrêtés quelques mètres derrière lui.
- Les gars, qu'est-ce que...
Il s'interrompit lui-même. James était en train de parler avec une jeune fille blonde à l'air hagard qui portait une dizaine de collier autour de son cou et qui tintait à chaque fois qu'elle bougeait. Remus dû faire un effort pour se rappeler de son nom avant de réaliser qu'il s'agissait de Pandora Van Houten de Serdaigle. Elle s'était faite agresser juste avant les vacances et avait réussi à faire exclure temporairement Mulciber.
Remus n'eut même pas besoin de se rapprocher pour savoir de quoi James voulait lui parler. Elle avait dit qu'un Gryffondor faisait partie de ses agresseurs mais elle n'avait pas pu l'identifier sur le coup, or James faisait du traître de sa maison une affaire personnelle. Rien d'étonnant à ce qu'il saisisse donc cette occasion pour l'interroger. En jetant un regard à sa montre, Remus soupira. Quitte à être en retard, autant l'être pour de bonnes raisons.
Les mains dans les poches, il se rapprocha.
-...pas vu grand-chose, était en train de dire Pandora, il faisait sombre. J'ai reconnu Mulciber à sa voix surtout.
- Son air d'imbécile a dû aider aussi, se moqua Peter.
- Pas pendant l'agression, ils portaient tous des masques. Je n'ai pu voir que les écussons sur leur uniforme et il n'y en avait aucun de Serdaigle.
Remus repensa au témoignage de Bertha Jorkins en début d'année qui déclarait exactement la même chose. Si les agresseurs prenaient soins de masquer leur visage, ce n'était pas le cas pour leur maison, dans le but d'inquiéter tout le monde et d'attiser les soupçons sur chaque élève. Ils n'envoyaient jamais non plus de personne appartenant à la maison des personnes agressées pour éviter que ces dernières ne puissent les reconnaître.
- Et celui de Gryffondor ? Demanda James. Tu n'as vraiment rien vu de particulier ?
- Je dirais que c'est un garçon, j'en suis pratiquement sûre. Il était plutôt grand, avec de larges épaules. Mais j'avoue que je n'étais pas très concentrée...
Chose assez compréhensible de l'avis de Remus. N'empêche que ces informations aidaient déjà énormément. Ils avaient déjà déduit que l'agresseur devait être âgé de quinze ans si sa mère était bien Griselda Lynch, la femme de la photo à qui appartenait la bague trouvée sur les lieux de l'agression de Bertha. Apparemment l'enfant serait donc un garçon. Bien, la liste des suspects étaient désormais considérablement réduites puisque seulement cinq ou six élèves pouvaient correspondre à la description.
- Merci beaucoup Pandora, ça nous aide vraiment.
- De rien, j'espère qu'on les trouvera...
Elle leur adressa un sourire puis repartit d'une démarche sautillante tout en sifflotant. Remus commençait à comprendre pourquoi est-ce qu'elle sortait avec Lovegood...
- Bon, je ne veux pas vous presser, dit Sirius, mais il reste 2 minutes avant le début du cours de transplanage...
- Alors tu ferais mieux de courir Patmol, répliqua James.
Sans attendre de réponse, il s'élança dans le couloir. Remus lui aurait bien dit que c'était interdit mais il avait abandonné l'idée depuis longtemps (donc il l'imita).
Quand ils arrivèrent devant la Grande Salle, le professeur McGonagall allait fermer la porte et elle leur adressa un regard de reproche, ce qui ne parut perturber ni James ni Sirius. En entrant, ils constatèrent que la pièce avait été vidé de ses tables et de ses chaises, ce qui faisait qu'elle paraissait beaucoup plus grande qu'à l'accoutumée. Le plafond magique au-dessus de leur tête ressemblait à un ciel d'hiver avec de gros nuages gris et bas, ce qui n'était d'ailleurs pas si différent du véritable temps qu'on pouvait apercevoir par les fenêtres.
Tous les directeurs de maisons étaient présents, ainsi que deux autres personnes qui devaient être les moniteurs de transplanage envoyés par le ministère. L'un d'eux était un petit homme aux cheveux blancs, aux cils transparent et à l'air frêle malgré le fait qu'il ne devait pas être si vieux, peut-être la mi- quarantaine ; tandis que l'autre était un homme robuste à la chevelure brune qui semblait se demander ce qu'il avait bien pu faire pour que son administration l'envoie enseigner à une bande d'adolescent.
- Bien, nous allons commencer ! Annonça le petit homme. Bonjour à tous, je m'appelle Wilkie Tycross et voici mon collègue Mr Portman. C'est moi qui suis en charge chaque année des classes de transplanage, malheureusement je ne pourrais pas être présent à chaque fois durant les douze semaines d'apprentissage qui viennent. C'est pour cela que Mr Portman sera chargé de mon remplacement mais je serais là en juin pour vous faire passer l'examen final. Je tiens à rappeler pour ceux d'entre vous qui sont concernés que les élèves ayant atteints la majorité avant le 15 juin uniquement pourront se présenter à cet examen, pour les autres il faudra le passer l'année prochaine ou pendant l'été. Cela n'empêche pas malgré tout à tout le monde d'assister à ces cours, ils seront, je l'espère, instructifs pour tous.
Remus jeta un coup d'œil à Peter, dont l'anniversaire n'était qu'en juillet et qui par conséquent ne pourrait pas passer le permis de transplanage avec eux à la fin de l'année mais ça ne paraissait pas le déranger outre-mesure.
- Avant de m'en aller, j'ajouterais une dernière précision. Le directeur Dumbledore a enchanté la Grande Salle pour que l'on puisse transplaner dans l'enceinte de Poudlard. Cette suspension n'est valable qu'une heure et uniquement dans cette pièce donc n'essayez pas de transplaner au-delà si vous ne voulez pas perdre quelques membres au passage...
Les élèves grimacèrent.
- Au revoir et bonne chance ! Nous nous reverrons en juin !
Sur ces mots, il quitta la salle d'une démarche aérienne et James se demanda si à force de transplaner il n'en était pas venu à défier la gravité...
Mr Portman se planta devant eux et sembla évaluer le groupe du regard, tout ça dans un grand silence. Tout le monde attendait qu'il se passe quelque chose.
- Bon ! On y va, les mioches ! Cria-t-il soudain en faisant sursauter plusieurs personnes. Placez-vous tous en ligne à une distance d'un mètre cinquante. Allez ! Vite !
Alexia se pencha vers Sirius et chuchota à voix basse :
- C'est qui lui ?
- Notre cauchemar, répondit-il.
Ils se placèrent tous debout bien droit dans leur espace assigné, n'osant pas bouger un muscle.
- Le transplanage c'est avant tout de la discipline. Il faut de la concentration et surtout les trois D ! Qui peut me dire ce que sont les trois D ? Alors ? Oui, la Citrouille au deuxième rang.
- Pardon ? S'exclama Lily.
- Les trois D !
- Mais...
- Le Binoclard, au lieu de rire tu ferais mieux de donner la réponse !
James arrêta aussitôt de rire face à son surnom. Ce prof était complètement fou. Derrière, une Serdaigle leva la main avec hésitation.
- La fille aux boutons, vas-y.
- Je m'appelle Clara Wints...
- Aucune importance. Les trois D ?
- Destination, Détermination, Décision, énuméra-t-elle de mauvaise grâce.
- Et bien voilà ! C'était pas si compliqué !
Les élèves clignèrent des yeux, abasourdis. McGonagall s'avança soudainement et au vu de son expression la méthode d'enseignement du représentant du ministère ne lui plaisait pas beaucoup.
- Mr Portman, est-ce que je pourrais vous parler ?
- Bien sûr. Les mioches, ajouta-t-il plus fort, mettez-vous en binôme et commencez l'exercice.
- Euh...quel exercice monsieur ? Demanda Sabine Travers, de Poufsouffle.
- Ah oui... Essayez de mettre en application les trois D, ce que vous pensez qu'ils peuvent signifier. On fait un point dans dix minutes.
Aussitôt, les élèves se dispersèrent. Sirius n'eut pas le temps de faire un pas avant d'être encerclé par James et Alexia qui se regardèrent en chiens de faïence. Leur numéro de cirque était reparti.
- C'est mon jour de garde, dit-elle.
- N'importe quoi c'est le mien.
- Tu ne respectes pas le calendrier !
- C'est toi qui...
- Vous êtes ridicules, intervint Dorcas.
- On s'en fiche, répliquèrent-ils tous les deux à l'unisson.
Finalement, après plusieurs débats enflammés, Sirius alla se mettre avec Peter (l'alternative neutre). James se mit en binôme avec Lily (personne ne savait vraiment comment on en était arrivé à ce duo mais ça donnait une idée du bordel qu'avait été la conversation), Alexia avec Remus, Alice avec Frank et Marlène avec Dorcas.
Dans toute la salle, les élèves essayaient de se concentrer pour transplaner. Chacun semblait avoir sa propre méthode. Certains avaient les yeux fermés, l'air concentré, et d'autres murmuraient à voix basse comme si les trois D étaient une incantation ou une formule magique. Cependant, la plupart des personnes se regardaient en biais sans trop savoir quoi faire. Même Lily était perdue pour une fois.
- Qu'est-ce qu'on doit faire ? Demanda-t-elle à voix haute.
James haussa les épaules.
- Visualise-toi à l'autre bout de la pièce, ça marchera peut-être.
- Avec la chance que j'ai, je risque de me prendre le mur.
- Ne t'inquiète pas, je te porterais à l'infirmerie en chevalier servant !
- Je ne suis pas une princesse en détresse.
- C'est sûr, tu frappes trop fort pour l'être, dit-il.
Pour toute réponse, Lily lui donna un coup sur le bras.
- Aïe !
- Un problème ? Intervint soudain une voix derrière eux.
Ils sursautèrent ensemble et se retournèrent pour voir Mr Portman.
- Non monsieur...
- Y a intérêt. Je vous tiens à l'œil, tous les deux. La Citrouille et le Binoclard !
- Mais...
Lily écrasa le pied de James pour le faire taire. Il étouffa un cri tandis que l'enseignant s'éloignait vers un autre groupe, traitant au passage Elizabeth Yaxley d'écervelée.
Quelques minutes plus tard, Portman leur avait distribué à tous des cerceaux en plastique jaune et les adolescents se sentirent encore plus idiots qu'avant si possible. Ils fixaient tous leur cercle comme s'il allait soudainement se mettre à bouger ou à faire des claquettes.
- Bon les mioches, écoutez-moi ! Vous voyez ce cerceau ? Il va devenir votre but, votre objectif, pendant les prochains mois. Je veux que vous pensiez cerceau, dormiez cerceau, mangiez cerceau ! C'est clair ?
- ...oui...
- Magnifique ! Alors commençons. Vous vous placez à quelques mètres de votre cerceau, vous le fixez, vous pensez au trois D et vous transplanez ! Des questions ? Oui l'Intello là-bas !
Remus se retourna, pas certain que c'était lui qui était désigné, mais il dû se rendre à l'évidence en ne voyant personne derrière lui.
- Euh... Il n'y a pas de méthode ? Une vraie méthode je veux dire ?
- Comment ça « vraie » méthode ? Je viens de l'expliquer, vous n'écoutez rien ? Allez au boulot !
Il tapa dans ses mains pour donner le signal de départ et il y eu un mouvement de flottement encore plus grand que tout à l'heure tellement la perplexité était grande.
Remus resta sans bouger une seconde, fixant le cercle jaune de la même façon qu'il aurait fixé un problème de runes anciennes particulièrement complexes. Alexia se rapprocha.
- Dis-moi que tu as compris quelque chose...
- J'ai lu la théorie du transplanage dans les livres, concéda-t-il, mais là j'avoue que je suis perdu. Si ça peut te rassurer je pense que Sirius est encore plus perdu donc tu n'as pas à regretter de ne pas l'avoir comme partenaire.
Elle jeta un coup d'œil sur la droite pour voir qu'effectivement Sirius et Peter ne faisaient que sauter à cloche pied dans le cerceau en l'éloignant un peu plus à chaque essai pour tester leur compétence en saut.
- Effectivement, rit-elle. On essaye ?
- Je t'en prie, commence.
- Les garçons, la galanterie ne vous arrange que dans certaines situations.
Remus sourit et s'adossa contre le mur, les mains dans les poches pour l'observer. La jeune fille se posta en face de son cerceau puis ferma les yeux. Destination, Détermination, Décision, pensa-t-elle. Destination, bon c'était assez simple : le cerceau. Après pour la détermination et la décision, elle doutait un peu d'elle-même.
- Tu deviens rouge à force de réfléchir, lui cria James.
- J'essaye de me concentrer, espèce de binoclard !
- Ah non pas toi aussi...
- Potter, viens t'entraîner, intervint Lily en le tirant par le bras sous l'œil goguenard des autres.
Alexia se tourna vers Remus.
- A toi d'essayer, dit-elle. Je ne sens trop stupide.
-Tu n'as même pas tenté, allez vas-y.
Elle soupira mais recommença son exercice de concentration. Alors qu'elle fermait les yeux, elle sentit brusquement son corps tanguer et une légère douleur dans la poitrine. Non. Elle avait pris sa fiole ce matin, comme d'habitude. Elle aurait dû être parfaitement bien jusqu'à midi. Paniquée, elle alla s'adosser contre un mur, les jambes tremblantes. Sirius et Peter se trouvaient à l'autre bout de la Grande Salle et personne ne semblait remarquer que quelque chose n'allait pas. Du moins personne sauf Remus. En une seconde il fut à côté d'elle, la main sur son bras.
- Alex ?
- Ce n'est rien...
- Tu te sens mal ?
- Non, je...ça va passer, affirma-t-elle.
Remus serra les lèvres, inquiet.
- Ce n'est rien, répéta Alexia. Ça doit être les tentatives de transplanage qui ont provoqué la crise...
- Attends, j'ai un truc...
- Quoi ?
Il fouilla dans sa poche et en ressortit une fiole avec un liquide bleu familier. Elle haleta, surprise.
- Comment tu as eu ça ?
- J'ai discuté avec Pomfresh et on s'est mis d'accord pour que je garde toujours ton médicament avec moi, au cas où. Tu sais, avec ce qui s'est passé le mois dernier...
- Qui a eu l'idée ?
- Moi... Je m'inquiétais et comme tu ne voulais le dire à personne...Je suis désolé si tu...
- Merci Remus.
Il sourit puis il tendit la fiole qu'elle avala d'un coup. Le goût amer qu'elle connaissait par cœur lui resta en bouche et elle regretta de ne pas avoir de bouteille d'eau sur elle.
- Tu te sens mieux ?
- Ouais...
- Tu ne penses pas que ça serait plus facile si les autres...
- Toujours pas ! Coupa-t-elle. Je ne le redirais pas, Remus. Ma maladie restera mon secret ou sinon j'irais parler à Anaïs.
- Tu ne le ferais pas vraiment...
Bien sûr que non, songea-t-elle. Elle n'était pas réellement sérieuse en disant ça, du moins elle espérait ne pas en arriver là, mais Remus n'avait pas besoin de le savoir. Sa maladie était devenu avec le temps la chose qu'elle voulait à tout prix évité de dévoiler, ça la terrifiait que ses amis soient au courant, et encore plus Sirius. Il la considérait comme une fille forte, il n'avait jamais hésité à la laisser se débrouiller ou à se sortir de situation précaire et elle avait vu ce que la révélation de sa maladie faisait à ses proches. Sa mère ne la quittait plus des yeux dès qu'elle montait un escalier, comme si elle allait s'effondrer au moindre effort, son frère en faisait de même et son beau-père la voyait déjà sûrement morte. Elle ferait tout pour ne pas subir la même chose à Poudlard.
- Tu ne veux pas tenter, Remus...
Il soupira.
A ce moment-là, ils entendirent soudain un hurlement et tout le monde sursauta. James poussa Lily derrière lui par réflexe mais elle repoussa, baguette déjà à la main. Sauf que ce n'était pas un mangemort ni une créature maléfique qui venait d'entrer, mais seulement Lucinda Talkabot, la capitaine de Serpentard, qui venait de transplaner dans son cerceau jaune. Elle avait le visage excessivement pâle, et fixait son bras avec horreur. Pour cause, il lui manquait sa main.
Personne ne bougea pendant une seconde avant que Dorcas ne réagisse la première, paniquée :
- Mais faites quelque chose bon sang !
Immédiatement, les professeurs se précipitèrent vers Lucinda. Un nuage de fumée violette l'entoura puis elle réapparu, parfaitement normale. Portman s'avança et prit un air satisfait.
- Voilà ce qu'on appelle le désartibulement ! La Blondinette n'était pas assez déterminée et sa main en a fait les frais. N'oubliez pas, les mioches, les trois D !
Il ne parut pas remarquer les haussements de sourcil sceptiques des élèves et encore moins Lucinda qui avait l'air de vouloir le frapper en entendant son surnom. Heureusement, la sonnerie retentit à cet instant.
- A la semaine prochaine, les mioches !
Ils fuirent tous hors de la salle.
Remus se retourna, pensant qu'Alexia l'avait suivi, mais elle était de l'autre côté du hall en train de rire avec Sirius. Il sentit à nouveau ce sentiment de culpabilité lui serrer le ventre en les regardant dans les bras l'un de l'autre. Il comprenait les craintes de la jeune fille mais en même temps Sirius était son ami qui avait fait tellement pour lui.
- Pourquoi cette tête si grave ? Lança une voix. Portman t'a traumatisé à ce point ?
- Salut Anaïs, dit-il. Non, je pensais à autre chose...
Elle arriva à sa hauteur, un grand sourire aux lèvres, et sa queue de cheval rebondissant dans son dos.
- Et disons que le cours de transplanage était...particulier...
- C'est l'Intello qui dit ça ? Se moqua-t-elle.
- Tu peux parler, il ne t'a pas donné de surnom à toi !
- Encore heureux...
Elle rit. Remus aimait son rire, ça lui faisait oublier ses problèmes.
- Tu sais...il y a une sortie à Pré-au-Lard prévue dans une semaine.
- Ah...
- Je...ça te dirait qu'on y aille ensemble ?
- Ensemble ? Répéta-t-il d'une voix un peu trop aigue. Tu veux dire comme...
- Comme un rendez-vous oui, dit Anaïs.
Il remarqua qu'elle avait rougit mais elle ne détourna pas le regard, attendant fébrilement sa réponse. Il ne savait pourtant pas quoi dire. Les mots s'étranglèrent dans sa gorge et il déglutit difficilement. Anaïs était la fille parfaite, comme l'avait souligné Sirius et James il y a quelque temps. Elle était gentille, intelligente, douce et drôle. Cependant, il n'était pas Alexia. Il se refusait d'entamer une relation alors qu'il cachait son plus grand secret à la jeune fille. Elle ne méritait pas ça.
- Je suis désolé, souffla-t-il, mais...
Elle eut un mouvement de recul et son sourire s'effaça.
- Oh...
- Ce n'est pas contre toi, Anaïs, vraiment.
- S'il te plait, ne me sors pas une phrase banale dans ce genre-là.
- Non, je suis sincère. Tu es incroyable, j'adore te donner des cours et parler avec toi. Tu es une amie géniale.
- Une amie, ouais...murmura-t-elle en fixant ses mains.
- Je...Je ne suis pas quelqu'un...Tu pourrais trouver tellement mieux...tenta-t-il d'expliquer.
- Je comprends. Ce n'est pas grave, Remus.
Elle releva la tête avec dignité puis remit son sac sur son épaule.
- Je dois y aller, à plus tard.
- Anaïs...
Mais elle ne se retourna pas.
Remus resta planté dans le hall, hagard. Un peu plus loin, il vit Sirius qui amorçait un pas pour le rejoindre et il supposa que son ami devait avoir assisté à la scène de loin. Malheureusement, Remus n'avait pas la force de l'affronter maintenant, surtout compte-tenu du secret d'Alexia. Sans attendre, il s'enfuit en direction de la bibliothèque.
Chapitre XXXII : Révélations
La bibliothèque de Poudlard était étonnement calme pour un mardi après-midi. Il était encore tôt, à peine 16h, mais les élèves qui avaient fini les cours se trouvaient pour la plupart dans le parc à cause de la rumeur qui avait circulé au déjeuner. En effet, Tiberius Ackerley, le commentateur de Quidditch, avait parié qu'il pouvait nourrir le calmar géant et des dizaines de personnes avaient misé de l'argent dessus. Si ça remontait aux oreilles des professeurs, il risquait d'avoir des ennuis...
Toujours est-il que la bibliothèque était donc assez vide. Les chaises et les tables s'alignaient au travers des différents rayonnages vides, et seul les coups de tampons intensifs de Mrs Pince venaient troubler le calme du lieu. Ah...et les Maraudeurs aussi accessoirement. Les quatre garçons étaient au fond de la section Histoire Générale, l'air concentré.
Remus avait la tête plongé dans un énorme manuel, les coudes sur la table et les manches relevées tandis que ses yeux ambrés parcouraient les pages à grande vitesse, comme d'habitude. A côté de lui, Sirius épluchait avec assiduité une pile de journaux et les classait un par un selon leurs informations. Juste en face, James, la cravate dénouée, s'ébouriffait les cheveux en soupirant comme si rester inactif lui était insupportable. Enfin, Peter était debout et parcourait les étagères afin de trouver de nouvelles ressources de travail. Chacun semblait absorber par sa tâche malgré la fatigue qu'on pouvait lire sur leur visage, preuve de leur temps long passé ici, juste assis à lire.
- Alors ? Demanda James, mal à l'aise du long silence qui régnait. Quelqu'un a trouvé quelque chose ?
- Rien de plus qu'il y a dix minutes, Cornedrue.
- Mais ça fait des heures qu'on est là !
- Seulement 45 minutes, rétorqua Remus. Et je te signale que Griselda Lynch n'est pas la personne la plus connue de l'univers. A part sa victoire au tournoi de Bouchon Baveux en 1961, elle n'a pas fait grand-chose.
- C'est déjà pas mal...
- Je t'en prie, si tu as envie d'abandonner le Quidditch pour te lancer dans une carrière de joueur de Bouchon Baveux, réalise ton rêve ! Ironisa Sirius.
James prit un air horrifié à la simple idée. Alors qu'il allait répondre, ils entendirent soudain un bruit sourd et un glapissement de douleur. Ce n'était que Peter qui avait visiblement fait tomber un énorme ouvrage intitulé La guerre des gobelins entre 1678 et 1743, la corrélation des empires face au destin, tome I, nouvelle édition.
- Peter...
- Désolé, marmonna-t-il.
- Evans serait choquée si elle te voyait traiter un livre comme ça, dit James avec un sourire.
Il se balançait sur sa chaise qui tenait en équilibre précaire sur deux pieds, les mains derrière la tête telle une incarnation parfaite de la nonchalance. Peter grommela en reposant le bouquin :
- C'est lui qui me maltraite plutôt que le contraire...
- Ne te victimise pas ainsi, je suis sûr qu'un jour tu arriveras à le battre !
- Oui et un jour Evans te trouvera supportable, lança Sirius goguenard.
La chaise retomba normalement sur le sol.
- Hé ! Je te ferais remarquer qu'Alexia et toi...commença James avant de s'interrompre.
- Oui ? Qu'est-ce que tu voulais dire ?
- Bah...
- Tout va bien entre moi et Alex, mais vas-y trouve autre chose.
Remus crispa ses doigts autour sur le bord de la table à cette affirmation et intervint en sentant la conversation partir sur un terrain glissant.
- Déjà on dit Alex et moi, c'est plus correct d'un point de vue grammatical ; et ensuite arrêtez de vous comporter en enfant, on a du travail à faire.
- Oui papa ! Dirent-ils en cœur.
- Bande d'idiot...
Ils éclatèrent de rire ensemble. Tandis qu'ils retournaient tous au travail, Remus les observa à la dérobée. Un rayon de soleil éclaira la pièce au même moment, soulignant les traits fins de Sirius, l'expression espiègle de James et les cheveux blonds pailles de Peter. Ils étaient tous ses amis, voire plus, il n'aurait jamais imaginé qu'une telle amitié soit possible, surtout pour lui au vu de sa condition mais ils n'avaient pas cessé de lui prouver le contraire depuis toutes ces années. Ça allait au-delà des mots.
Au bout de quelques minutes, James se leva d'un bond frénétiquement. Ils sursautèrent et se tournèrent vers lui, perplexes.
- Bon sang ! S'exclama Sirius. Qu'est-ce qui se passe ? Tu viens de...
- J'ai trouvé !
- Trouvé quoi ?
- Griselda Lynch !
Il leur tendit une coupure de journal tandis que ses amis se rassemblaient autour de Sirius pour pouvoir lire par-dessus son épaule. C'était un petit article en page 8 de la Gazette du Sorcier qui datait de 1964, soit sûrement trois ans après la naissance de l'enfant de Griselda, le traître de Gryffondor. Il était sous forme d'un paragraphe et ne faisait qu'une dizaine de ligne dans un encadré au bas de la page, coincé entre une publicité pour du savon à bulle magique et une promotion de -10% chez Ollivander. C'était un miracle que James l'ait repéré...
- Qu'est-ce que ça dit ?
- Lisez ! Ordonna-t-il.
Remus se pencha et commença sa lecture.
L'histoire tragique de Griselda Lynch
Il y a trois ans, nous vous faisions part les fiançailles de Gridelda Lynch, championne en titre de Bouchons Baveux avec son équipe lors du championnat national. Aujourd'hui, c'est avec tristesse que nous apprenions son décès la semaine passée et nos condoléances vont naturellement à sa famille.
L'histoire avait pourtant bien commencée jusqu'à ce que l'époux de Griselda Lynch, un moldu, ne découvre sa condition de sorcière alors qu'elle attendait leur deuxième enfant. D'après les témoignages, elle refusait de mentir plus longtemps à son mari à la suite de cette seconde grossesse mais ce dernier la visiblement quitté après sa révélation. Eperdue de chagrin, Griselda a alors mis fin à ses jours dans la nuit du samedi à dimanche. Le petit garçon de Griselda a été placé chez son oncle jusqu'à nouvel ordre.
Hier, nous avons rencontré le père de la jeune femme, Wilfred Lynch, qui a accepté notre interview pour nous livrer son ressentie. Il s'avoue très affecté, naturellement, par la perte de sa fille unique et rejette la faute sur son gendre en expliquant que cette situation n'est pas inédite dans le monde sorcier.
En effet, on se rappelle d'un cas similaire l'an passé. Le débat sur le secret magique et la perception des moldus sont à nouveau au cœur des négociations, n'hésitez pas à nous envoyer vos opinions.
Thomas Sander, reporter à la Gazette du Sorcier
L'article terminé, Remus releva la tête, bouleversé. Il n'aurait jamais imaginé que l'histoire de Griselda se terminerait ainsi. Une photo d'elle accompagnait le bas de page et la jeune femme souriait à l'objectif, portant dans ses bras un trophée. A sa main, on pouvait toujours voir la fameuse bague ancienne surmontée d'une pierre verte ainsi qu'une alliance. Elle avait dû être prise un peu plus tard que celle du tournoi national de Bouchon Baveux. Il n'arrivait pas à croire qu'elle se soit suicidée enceinte après une rupture quand elle avait avoué la vérité à son mari...
Un long silence s'installa pendant plusieurs secondes puis Peter reprit la parole :
- Au moins, on sait que son enfant était bien un garçon. Ça confirme le témoignage de Pandora.
- C'est vrai, acquiesça James. Il faut vraiment qu'on se renseigne sur les garçons en cinquième année, parce qu'à part Kevin Mells on n'en connait aucun...
- Ça ne devrait pas être trop compliqué. Par contre de savoir qui parmi eux est le traître...
Remus laissa sa phrase en suspens puis regarda l'horloge. La bibliothèque n'allait pas tarder à fermer et ils allaient devoir partir s'ils ne voulaient pas se faire jeter dehors par Mrs Pince à coup d'encyclopédie. Oui c'était déjà arrivé...
Alors qu'il allait ranger les livres et les journaux dont ils avaient eu besoin tandis que les autres commençaient à avancer, Remus sentit soudain une présence derrière lui. Ce n'était que Sirius qui l'avait visiblement attendu, adossé contre une étagère avec son éternel air nonchalant et ses cheveux noirs qui encadraient son visage.
- T'es pas partit avec...
- Qu'est-ce qui s'est passé avec Anaïs hier ?
- Qu...quoi ?
- Je vous ai vu discuter à la fin du cours de Transplanage et elle est partit avec une tête de six pied de long pendant que toi tu t'enfuyais à toute jambe.
- Ce n'est pas ça, tenta-t-il de protester.
L'expression de Sirius se fit concerné et il fronça les sourcils.
- Alors qu'est-ce que c'est ?
- Elle m'a juste proposé qu'on aille à Pré-au-Lard ensemble, avoua Remus en soupirant. J'ai dit non.
- Quoi ?! Mais pourquoi ?
- Parce que...parce que...Oh tu sais très bien pourquoi Patmol.
- Justement, non. Et si tu me sors ta...enfin je veux dire « ton problème de fourrure » je te jure que je vais tout raconter à James pour qu'il te fasse la morale.
- Sirius...
- Tu sais que j'ai raison !
- Silence ! Cria Mrs Pince. Nous sommes dans une bibliothèque, jeunes gens. De toute façon, ça ferme, allez dehors !
Ils grimacèrent. Remus s'empressa de ramasser ses affaires, attrapa son sac puis ils sortirent de la salle en adressant un au revoir pressé à la bibliothécaire. Pourtant, Sirius ne laissa pas tomber et dès qu'ils se furent un peu éloigné dans le couloir il s'arrêta pour poursuivre leur conversation.
- Sérieusement, tu ne peux pas repousser Anaïs juste à cause de ça...
- Juste ? Répéta-t-il avec un rire sans joie. C'est plutôt important quand même !
- Et alors ? Ça ne peut pas t'empêcher de vivre !
- Tu ne comprends pas...
- Explique-moi dans ce cas !
La voix de Sirius avait pris de l'ampleur tandis qu'il s'énervait un peu plus à chaque seconde. Ce n'était pas nouveau, que ça soit pour lui, Peter ou James. Remus ne comptait plus les fois où ses amis lui avaient rabâchés les mêmes arguments contre les siens, qui étaient d'ailleurs toujours pareils également. Cependant, cette fois Remus fit volte-face et répliqua fortement :
- Je ne veux pas Sirius, d'accord ? Je ne veux pas avoir de relation avec elle, sortir avec elle, même être ami avec elle me coûte ! Tu sais pourquoi, ça ne sert à rien de le nier ! Je ne suis pas normal et je ne le serais jamais, ma vie ne sera jamais normale !
- Mais...
- Mais quoi ? Coupa-t-il, les bras écartés. Qu'est-ce que tu veux que je fasse ? Que j'accepte de sortir avec Anaïs pour lui mentir tout le temps ? Que je lui serve la même excuse de ma mère malade chaque mois, que je ne sois pas sincère avec elle pour qu'un beau jour elle découvre tout en tombant sur moi à l'infirmerie par hasard ou en regardant les calendriers de pleine lune ? J'ai assez de respect pour elle pour ne pas lui faire ça.
- Tu n'as jamais pensé qu'elle pourrait aussi t'accepter comme tu es, si tu lui avouais ? La franchise ça peut être bien aussi !
- Honnêtement, tu es bien la dernière personne dont j'ai envie d'entendre parler de franchise, surtout dans un couple !
Silence perplexe.
- Comment ça ?
Remus savait qu'il aurait dû s'arrêter là, faire marche arrière, mais maintenant qu'il était lancé il avait l'impression qu'il ne pouvait plus interrompre le flot de parole qui se bousculait contre ses lèvres.
- Disons que tu n'es pas la personne la plus communicative au monde. Je dois rappeler le nombre de fois où tu t'es contenté de garder le silence sur ta famille, même avec James ? Le nombre de fois où tu nous as dit « ça va, je suis juste tombé » alors que tu avais des bleus partout sur le corps ?
Aussi pâle qu'un cachet d'aspirine, Sirius ne répondit rien et fixa le sol obstinément.
- Donc franchement, je pense que je n'ai pas de conseil à recevoir de ta part Patmol.
Remus réajusta sa prise sur son sac avant de se remettre en marche, le corps tremblant. Alors qu'il pensait en avoir terminé, Sirius reprit :
- Qu'est-ce que tu voulais dire « surtout dans un couple » ?
- Hein ?
- Ne fais pas l'innocent, tu viens de dire ça il y a deux minutes...
- Je...je...bégaya-t-il.
- Oui ?
- Tu devrais parler avec Alexia, se contenta de dire Remus, fatigué.
- Alex ? Qu'est-ce qu'elle vient faire là-dedans ?
Voilà, on y était, songea-t-il. Il avait réussi à tenir sa langue pendant un mois mais il ne pouvait plus. Tout comme il se refusait de mentir à Anaïs sur sa lycanthropie, il ne voulait pas avoir à regarder son meilleur ami dans les yeux et à lui cacher la vérité continuellement.
- Je pense que c'est à elle de te le dire, Patmol.
- Non, visiblement tu sais quelque chose alors vas-y. Elle est...elle est encore en colère contre moi pour la dernière fois ?
Sirius ne voyait réellement pas ce qu'elle pouvait lui cacher, mais il savait qu'elle s'était rapproché de Remus depuis qu'elle avait appris pour son « problème de fourrure » et qu'ainsi elle lui avait peut-être confié quelque chose.
- Allez Lunard, dis-moi ! S'il te plait...
Une main sur le visage, Remus soupira. Ça ne devrait pas être à lui de faire mais en même temps il devait prendre ses responsabilités. Inspirant un grand coup, il commença, la voix tremblante :
- Je...Je ne t'ai pas vraiment tout dit quand je t'ai raconté la façon dont elle a découvert que j'étais un loup-garou... Elle ne m'a pas juste surpris à l'infirmerie, il y avait plus. Elle n'avait pas vraiment pas la grippe...
- Qu'est-ce que...comment ça ?
Alors Remus lui avoua tout. Comment Alexia l'avait trouvé, leur pacte de se révéler chacun leur secret du moment qu'ils gardaient le silence. La maladie de la jeune fille, les fioles de potion qu'il gardait désormais sur lui pour éviter un accident, la dissimulation à tout le monde même à ses amies. Puis vînt la question un peu plus délicate...
- Je voulais te le dire, assura-t-il. Dès le lendemain...
- Pourquoi est-ce que tu ne l'as pas fait ?!
Sirius était appuyé contre le mur comme s'il n'était plus très sûr de pouvoir tenir debout et ses yeux jetaient des éclairs, la colère et l'abasourdissement inscrit sur ses traits.
- Alexia ne voulait pas...
- Et alors ? Tu es mon ami non ?
- Evidemment ! Je voulais te le dire, Sirius, je te le jure, mais elle...
- Elle quoi ? Cria-t-il.
- Elle m'a dit que si je faisais ça, elle irait révéler ma lycanthropie à Anaïs, murmura Remus.
Il y eu un moment de flottement pendant lequel ils se regardèrent l'un l'autre, face à face.
- Alex n'aurait jamais fait ça...
- Elle...elle était vraiment terrifiée que tu le saches, il faut la comprendre et...
Mais Sirius ne paraissait plus l'écouter. Il avait besoin de trouver Alexia, de lui parler, de mettre les choses au clair. Ça devait être un malentendu, ça ne pouvait être que ça. L'expression désolé de Remus lui retournait l'estomac, c'était celle qu'il détestait et que son ami avait quand il parlait de lui-même, quand il pensait être un monstre.
Toutes les informations tournaient à toute vitesse dans son esprit et il avait l'impression d'être immergé sous l'eau, les oreilles bourdonnantes.
- Les gars ! Lança soudain une voix toute proche. Vous êtes là ?
D'un coup, James débarqua, le pas léger et l'air de bonne humeur. Il ne parut pas se rendre compte immédiatement du problème.
- Où est-ce que vous étiez ? Peter est déjà retourné à la salle commune et... Sirius ? Tu vas bien ?
- Il faut que j'y aille, dit-il brusquement.
- Quoi ? Où ça ?
Sirius ne répondit pas et lui passa devant sans un regard, courant presque vers la tour de Gryffondor.
- Mais... Qu'est-ce qu'il a ? Remus ?
- Je crois que je viens de faire une connerie, James...
**
*
- Dorcas...
- Hum ?
- C'est à toi ce pull ?
Dorcas releva la tête à la question de Marlène. Elle tenait un pull bleu dans sa main, perplexe. Il faut dire qu'après presque six ans à partager une chambre, les filles connaissaient les affaires des autres sur le bout des doigts et ce pull était bien trop petit pour appartenir à Dorcas.
- Oh...euh, une amie me la prêté...
- Une amie ? Quelle amie ?
- On est tes seules amies ! Lança Alexia depuis son lit.
- Hé !
- Il en faut de la patience pour supporter son sale caractère, renchérit Alice.
Les filles éclatèrent de rire à l'expression outrée de Dorcas.
- Non sérieusement, qui te l'a prêté ? Il est sympa !
- Bah...
- Oui ?
Dorcas savait qu'elle pourrait mentir, là maintenant. Elle pourrait inventer une histoire simple, ses amies ne poseraient pas plus de question et on ne reparlerait plus jamais de ce satané pull. Pourtant, elle se dit que c'était peut-être l'occasion qu'elle attendait depuis plusieurs semaines.
- Dorcas ? Appela Lily. Ici la terre ! Tu vas bien ?
- J'ai quelque chose à vous dire.
- Si c'est pour nous avouer que tu as triché au test de Sortilège, on est déjà au courant tu sais, intervint Marlène.
- Non, rit-elle, ce n'est pas ça. Venez là !
Elles échangèrent toutes un regard perplexe mais obtempérèrent et une seconde plus tard, elles furent toutes assises sur le même lit. C'était d'ailleurs un miracle qu'elles arrivent toutes à tenir dessus...
- Je... Je sors avec quelqu'un.
- Quoi ?
- Depuis plusieurs semaines, j'attendais juste le bon moment pour vous le dire.
- C'est génial Dorcas ! S'exclama Lily. Alors comment est-ce qu'il s'appelle ?
- Pitié, dis-moi que ce n'est pas encore Amos Diggory !
- Il était très gentil !
- Trop gentil, son sourire à fossettes m'exaspérait à la fin.
Dorcas secoua la tête.
- De toute façon Alex, ce n'est pas « il » mais « elle ».
Grand silence, le temps que l'information leur monte au cerveau. Les réactions furent différentes selon les filles. Marlène et Alice restèrent bouge-bée, bouche entre ouverte, tandis que Lily affichait un grand sourire et qu'Alexia bondit sur ses pieds en criant « Oh par Merlin ! ».
- Attends...elle ? Comme...une fille ?
- Ouais...
- Mais c'est...c'est...
- Trop bien ! Hurla Alice brusquement.
Elle serra Dorcas de toutes ses forces.
- Et c'est qui alors ?
- Lucinda, Lucinda Talkabot.
- La capitaine de Serpentard ?
- Elle-même...
- Alor ça si je m'y attendais, souffla Marlène. Je ne sais même plus quoi dire !
- On est juste trop contente pour toi, Dorcas !
Dorcas sentit son cœur battre follement dans sa poitrine tandis qu'elles plongèrent toutes dans un câlin collectif. Ça n'avait pas été si difficile que ça en fin de compte et elle était heureuse que les autres soient au courant désormais. Lucinda en avait marre de se cacher aussi. Maintenant qu'elles étaient sûres que leur couple fonctionnait, elles pourraient se montrer en public sans craindre les conséquences et ceux qui auraient quelque chose à y redire auront à faire ça au mauvais caractère de Dorcas !
- Elle embrasse bien ?
- Alexia !
- Quoi ? Je veux des détails !
Lily leva les yeux au ciel.
Brusquement, la porte de leur dortoir s'ouvrit à la volée, ce qui els firent sursauter. Ce n'était que Sirius qui venait de débarquer.
- Black ? Qu'est-ce que tu fais dans notre chambre ?
- Je dois parler à Alex.
- Tout de suite ? Demanda Dorcas. Ça ne pouvait pas attendre que...
- Non, ça ne peut pas !
Marlène fronça les sourcils en entendant le ton de sa voix, accompagné d'un air sérieux qui ne lui ressemblait pas. Doucement, elles descendirent du lit et se dirigèrent vers le couloir.
- On va vous laisser alors... On sera dans la salle commune, Alex.
- Pas de problème, dit-elle.
Elle referma la porte dans le dos de ses amies puis se tourna vers Sirius, inquiète. Il avait l'air extrêmement agité et regardait obstinément le mur en face de lui comme s'il refusait de croiser son regard.
- Sirius ? Ça va ?
- Non !
Alexia sursauta.
- Calme-toi, je...
- A vrai dire j'ai assez de mal à rester calme, princesse !
- Je ne comprends pas...
- Remus et moi, on a eu une petite conversation ensemble.
Un sentiment de terreur pur s'empara du corps de la jeune fille.
- Qu'est-ce que...
- Pourquoi est-ce que tu ne me l'as pas dit, Alex ?!
- Je...
- Pourquoi ?!
- J'avais peur, dit-elle précipitamment, je ne voulais pas que les gens sachent...
- Tu es ma meilleure amie, on sort ensemble ! Ça ne t'ai jamais venu à l'esprit que j'avais le droit de savoir !
Alexia déglutit, les larmes aux yeux.
- Les gens changent de comportement quand ils savent...
- Arrête tes conneries, coupa-t-il. « Les gens » par-ci, « les gens » par-là ! Je ne suis pas tout le monde, Alex ! Un de mes meilleurs amis est un loup-garou, je ne l'ai jamais traité différemment !
- Il se transforme une fois par mois et le reste de sa vie sera à peu près normale ! Je vais mourir dans quelques années ! Répliqua-t-elle.
- Ne dis pas ça...
- Il n'y a pas de traitement ! J'ai dû arrêter le Quiddicth parce que je n'arrive plus à respirer !
Sirius pensa une seconde qu'il avait finalement eu raison sur le fait qu'elle mentait à propos de son départ de l'équipe, mais sa colère reprit le dessus bien vite.
- J'aurais quand même voulu la vérité...
- Sirius...
Elle fit un pas en avant et tendit la main vers lui. Il recula instinctivement.
- On peut en parler, murmura-t-elle, s'il te plait calme-toi.
- Je crois au contraire qu'on n'a plus rien à se dire.
Il commença à avancer vers la porte mais elle lui bloqua le passage, les larmes dévalant ses joues.
- Tu ne peux pas...
- Pousse toi.
- Je t'aime ! Cria-t-elle.
Sirius se figea. Il avait l'impression que son corps entier tremblait et que sortir de ce dortoir était encore plus dur que de quitter Square Grimmaurd il y a tous ces mois. Pourtant, l'image de Remus, culpabilisant, s'imposa dans son esprit
- S'il y a bien une ligne à ne pas franchir, ce sont mes amis, dit-il d'une voix dure. Tu as fait la plus grande erreur que tu pouvais faire en t'en prenant à lui.
- Sirius je suis désolé...
- Non. C'est fini Alex. Parce qu'entre mes amis et une fille, je les choisirais. Ils sont ma famille.
Alexia regarda Sirius s'éloigner, les sanglots l'empêchant de respirer. Elle resta plusieurs minutes à fixer la chambre vide puis se laissa glisser contre le mur, les genoux contre la poitrine.
Chapitre XXXIII : Tension entre amis, partie 1
C'était Lily qui l'avait trouvé, une demi-heure plus tard, effondrée en larmes dans leur dortoir. Alexia avait d'abord été incapable d'expliquer ce qu'il s'était passé et la rousse était tellement en colère contre Sirius pour l'avoir mis dans cet état qu'elle avait failli se précipiter à sa recherche pour lui lancer des sorts.
Heureusement, les autres filles étaient arrivées. Les questions s'enchaînaient, trop rapides, trop inquiètes. Alexia n'avait pas eu d'autre choix que de tout révéler sur sa maladie, elle ne pouvait plus la cacher, ça ne servait à rien. Elle tenta de minimaliser et même de leur montrer ses analyses pour qu'elles comprennent, mais Marlène se mit à pleurer immédiatement, vite suivit par Alice qui s'en alla en claquant la porte, bouleversée.
Sa première réaction fut alors de lui emboîter le pas pour aller trouver Remus, lui hurler dessus. Il n'avait pas le droit de faire ça et de gâcher sa vie. Mais très vite elle se ravisa, tout simplement car elle n'en avait aucun droit. Elle aurait dû avouer la vérité depuis longtemps, c'était de sa faute à elle et à personne d'autre. Les filles restèrent à parler toute la nuit, les lumières jetant des ombres inquiétantes sur leur visage pâle.
**
*
Le lendemain matin, Alexia eu l'impression que tout le monde la suivait des yeux, comme s'ils étaient tous au courant pour sa maladie. Son pire cauchemar semblait se réaliser. Marlène dû remarquer son trouble car elle se pencha vers elle par-dessus la table.
- Ne t'inquiète pas, personne ne sait...
- Mais...
- Sirius est peut-être en colère mais je doute qu'il ait crié ton secret sur tous les toits tu sais, rassura-t-elle.
- Hum...
- Tiens, en parlant de lui...
Alexia sentit son corps se crisper alors que les Maraudeurs entraient dans la Grande Salle. Elle suivit Sirius du regard, le souffle coupé comme si elle venait de se prendre un coup en plein ventre, mais il l'ignora. Malgré tout, elle remarqua qu'il avait les traits tirés et elle supposa donc qu'il n'avait pas dû beaucoup dormir cette nuit.
Les garçons semblèrent hésiter une seconde à les rejoindre, puis finalement allèrent s'assoir à l'autre bout. Un lourd silence flotta dans la groupe. Le sentiment de tension qui pesait entre eux semblait d'autant plus incongru que les élèves autour discutaient et riaient joyeusement, comme en décalage complet.
Même James avait l'air d'être dépassé par la situation. Malgré tout, James étant James, il tenta de lancer la conversation sur un ton léger.
- Quelqu'un veut du jus de citrouille ?
- Ouais, merci, répondit Peter en s'engouffrant dans la brèche.
Remus haussa un sourcil à leur tentative misérable mais continua à manger son muffin au chocolat sans rien dire.
- Il n'y a même plus de tarte au citron ! C'est un scandale !
- James...
- Quoi ? Je propose qu'on commence une révolution !
- McGonagall t'a déjà fait remarquer qu'elle te collerait si tu revenais la voir pour les tartes au citron.
- Et depuis quand on respecte les règles ? Répliqua-t-il. T'es pas d'accord Patmol ?
Pas de réponse.
- Patmol ?
- Je ne suis pas vraiment d'humeur, James.
Chose rare pour une fois, le jeune homme n'insista pas même si Remus ne doutait pas qu'il reviendrait à la charge pour sortir son meilleur ami de son mutisme plus tard.
- Qu'est-ce qu'on fait aujourd'hui ? Demanda Peter.
- On révise ?
- Hilarant, Lunard, vraiment !
- Mais...
- Je propose une balade dans le parc, on pourra aller voler un peu au terrain de Quidditch !
Evidemment, comme d'habitude, c'est l'idée de James qui fut adoptée et ils continuèrent à manger en parlant de tout et de rien.
Sirius gardait les yeux obstinément fixés sur son bol de céréales, comme si ça pouvait l'empêcher de tourner la tête vers Alexia. Il tentait de se réciter toutes les formules qu'il connaissait, mais peine perdue : ses pensées revenaient sans cesse vers elle. Il se souvenait de la scène d'hier quand il était parti avec tant de colère en la laissant en larmes dans sa chambre. Il s'était demandé toute la nuit s'il n'aurait pas dû rester pour qu'elle puisse s'expliquer, qu'ils parlent ensemble, surtout qu'il avait tellement de question au sujet de sa maladie.
Pourtant, le visage de Remus quand il lui avait tout avoué le bloquait. Remus qui était son meilleur ami et s'en voulait tellement. Le lycanthrope avait souvent trop tendance à considérer qu'il ne méritait ni l'amour ni l'amitié à cause de sa condition. Avec James et Peter, il se battait depuis des années pour le rassurer, alors ça le mettait hors de lui que quelqu'un puisse se servir de son secret comme chantage. Particulièrement quand ce quelqu'un se trouvait être Alexia. Sa meilleure amie, la fille qu'il aimait.
Cette situation était un cauchemar. Mais il ne mentait pas hier en disant à Alexia qu'il choisirait toujours ses amis plutôt qu'une fille, tout simplement parce que les Maraudeurs étaient sa famille. Ils lui avaient montré qu'il pouvait être autre chose qu'un Black. Bon sang, James l'avait carrément accueilli chez lui ! Malgré tout, ça ne rendait pas les mensonges et la trahison d'Alexia moins douloureux. Le sommeil l'avait fui toute la nuit et une fanfare semblait avoir élu domicile dans son crâne, tambour et trompettes compris !
- On y va ? Personne n'a l'air de vouloir terminer le petit déj'... dit Peter.
- En même temps sans tarte au citron...
- James !
- D'accord j'arrête...
Cela eu le mérite d'arracher un sourire à Sirius.
Ils se levèrent tous dans un même mouvement, pile au moment où les filles faisaient pareil également. Il y eu un moment de flottement puis les deux groupes se dirigèrent vers les portes de la Grande Salle en silence. Alors qu'ils allaient se séparer au niveau des sabliers, Alexia prit son courage à deux mains et se retourna.
- Sirius...
Il se figea.
- Est-ce qu'on peut... ?
- Non, coupa-t-il.
- Mais...
- Non princesse.
Le surnom si familier avait franchi ses lèvres avant qu'il puisse l'arrêter et il se donna une claque mentale pour ça. Brusquement, il se tourna vers James.
- Tu sais quoi ? Allez-y sans moi. Je retourne au dortoir !
- Patmol !
Son meilleur ami ne parut même pas l'entendre et continua de monter les escaliers quatre à quatre sous les yeux de tout le monde. Alexia avait l'air prête à fondre en larme.
- Je...je...bégaya-t-elle.
- Alex, commença Marlène.
- Je vais à la bibliothèque. A tout à l'heure.
Elle se sauva à son tour sans laisser le temps aux autres de réagir.
Leur petit groupe resta planté dans le hall, perplexe. Lily se rapprocha de James en secouant la tête comme si elle ne comprenait pas bien la scène qui venait de se jouer devant eux si vite.
- Il faut qu'on trouve une solution, dit-elle. Ils ne peuvent pas s'éviter indéfiniment !
- Ca ne fait qu'une journée, Evans. Laisse-leur le temps.
- Tu connais Black mieux que moi, on sait bien tous les deux qu'il n'ira pas lui parler si on ne l'y oblige pas.
- Je sais...je sais...
Ils soupirèrent. Apparemment, leur guerre avait été mise de côté le temps d'aider leur ami respectif.
Lucinda, qui s'était jointe à eux sans que personne ne la remarque, se plaça à côté de Dorcas. Elle avait l'air fascinée par la tragédie qui se jouait ici.
- C'est pour ça que je sors avec une fille, c'est moins compliqué.
- Oh attends de voir le caractère de Dorcas, plaisanta Alice. On verra si c'est « moins compliqué ».
Ils éclatèrent de rire.
- Il faut vraiment qu'on trouve une solution...reprit Frank sérieusement.
- Ma stratégie de les droguer, de les kidnapper pour les mettre dans une pièce et les forcer à discuter pourrait...
- James, coupa Remus. Non.
Lily eut un petit sourire en coin en voyant Potter obtempérer sans protester.
- De toute façon c'est ma faute...
- Quoi ?
- Ne dis pas ça, Lunard ! Protesta Peter avec ferveur.
- Mais c'est vrai. C'est moi qui ait révélé la maladie d'Alex à Sirius...Je n'aurais pas dû...
- Il fallait bien qu'il l'apprenne un jour.
- D'elle, pas de moi. Ça ne me regardait pas.
Peter posa une main réconfortante sur son épaule et sourit. Une fois de plus, Lily fut fasciné de le voir si ouvert, presque débrouillard (chose qu'elle ne pensait pas pouvoir dire un jour à propos de Pettigrow) et complètement intégré dans le groupe.
- Tu connais Alex et Sirius, ils auraient bien fini par s'engueuler à un moment sans que t'es besoin d'intervenir, plaisanta-t-il.
- Pas faux...
- Franchement ce n'est pas de ta faute, je t'assure. Et même si ça l'était, tu as l'air tellement pathétique en ce moment à te morfondre en culpabilité qu'on te pardonner tous !
- Peter ?
- Hum ?
- Arrête d'essayer de me remonter le moral.
Peter haussa les épaules mais il ne manqua pas le léger sourire sur le visage de Remus ainsi que la tension qui quittait son corps comme par magie. Discrètement, James lui adressa un clin d'œil et souffla « bien jouer », ce qui le fit rayonner.
**
*
Une semaine après cet incident, Alexia et Sirius ne s'étaient toujours pas parlés, au grand damne de leurs amis. Ils s'évitaient mutuellement, même s'il y avait eu plusieurs tentatives de la part de la jeune fille. Il faut dire que Sirius semblait posséder un certain talent pour se cacher dans les recoins du château ou feindre d'aller bien en société. Il avait des années de pratique. Mais James voyait clair dans son petit jeu, pourtant pour une fois il avait décidé de lui laisser un peu de temps et de faire preuve de tact, comme lui avait si sagement conseillé Remus. D'ailleurs ce dernier culpabilisait toujours un peu malgré les mille affirmations de Sirius lui disant que ce n'était pas de sa faute.
Cependant, une journée fut différente des autres. Le 27 mars, soit l'anniversaire de James Potter en personne. Autant dire que Poudlard pouvait trembler. Dès qu'il posa un pied dans la Grande Salle le matin, son équipe de Quidditch au complet lui tomba dessus littéralement. Les élèves sursautèrent en voyant une dizaine de personne affalé par terre tandis que Tiberius Ackerley se tenait à côté d'eux et hurlait à s'en briser la voix :
- Joyeux anniversaire ! Joyeux anniversaire !
A la table des professeurs, Dumbledore souriait, amusé, sans faire un geste pour rétablir l'ordre. De toute façon il aurait bien eu du mal s'il avait tenté car deux secondes plus tard Sirius attrapa James avec l'aide des autres et ils le hissèrent sur leur épaule.
- Dans le lac ! Hurla Alexia depuis sa place.
- Merlin, murmura Dorcas.
Le groupe suivit la suggestion d'Alexia avec bonheur et sortit de la salle sous les cris d'encouragements des élèves.
- Ils ne vont pas...
- Oh si Lily, je pense qu'ils vont le faire.
- Il va se faire dévorer par le calmar géant !
- Arrête de raconter n'importe quoi, dit Alice.
- Mais...Remus ! Fais quelque chose !
Remus tourna la tête vers la préfète. Il riait lui aussi, les mains dans les poches en secouant la tête.
- C'est son anniversaire, répliqua-t-il penaud.
- Et on ne va pas rester ici, je veux voir son plongeon dans le lac ! S'exclama Marlène. Allez !
Les filles suivirent l'équipe, vite imités par Remus et plusieurs élèves. Le trajet prit plus de temps que prévu, simplement parce qu'ils manquèrent de faire tomber James une bonne dizaine de fois à cause du sol glissant.
- On ne pourra jamais lui donner nos cadeaux s'il meurt au fond du lac...marmonna Lily.
Dorcas manqua de trébucher à cette phrase et seule la main de Lucinda sur son bras lui permit de rester debout. Elles échangèrent un bref regard en souriant mais se séparèrent vite pour éviter que quelqu'un ne les remarque.
- Tu veux dire que tu as un cadeau pour James ?
- Quoi ? Non...pas vraiment...
- Comment ça « pas vraiment » ?
- Juste un petit truc, rien de...
- Merlin, je ne pensais pas voir ce jour-là arriver !
Lily se contenta de rougir et continua à avancer, tête haute.
Devant, l'équipe était enfin arrivée devant le lac. La foule se mit à hurler autour d'eux pour les encourager et Sirius leva la main pour faire le décompte avec ses doigts.
- Attention...Trois...deux...un...
- A l'eau ! Hurlèrent les élèves.
Et comme les ordres du peuple font loi, ils jetèrent James dans le lac. Il n'eut même pas le temps de crier avant de tomber dans l'eau, assez froide pour cette fin mars. Il resta un instant immerger puis donna un coup de pied et creva la surface avec joie. Sur la berge, il distinguait vaguement les autres qui hurlaient et riaient à la fois. Heureusement quelqu'un avait pensé à lui retirer ses lunettes.
Tandis que James revenait doucement à la nage, Peter se pencha vers Sirius.
- Il me fait penser à quelqu'un
- Qui ?
- Flipper le dauphin, dit-il.
- Qui ça ?
Lily éclata de rire. Encore une référence moldu perdu pour Sirius Black...
Au moment où James sortait du lac, complètement trempé et les cheveux lui retombant sur le front, le professeur McGonagall arriva d'un pas vif dans le cercle d'élève rassemblé. Sous leur regard ébahit, elle lui jeta une serviette. Grâce à ses réflexes d'attrapeur, James s'en saisit et haussa un sourcil.
- Vous feriez mieux de ne pas tomber malade, il y a une interrogation demain et je vous veux à l'heure devant la salle, c'est clair ?
- Parfaitement !
Elle parut vouloir ajouter quelque chose, les lèvres pincées, mais renonça finalement et se contenta de tourner les talons.
- Je crois que c'était sa façon de te souhaiter ton anniversaire, dit Remus.
- De ne pas me coller pour avoir été balancé dans le lac ?
- Ouais !
James s'estimait heureux dans ce cas. Alors qu'il commençait à se sécher en frissonnant, la petite foule se dispersa. Ses coéquipiers lui tapèrent dans le dos et lui adressèrent un sourire puis les filles se rapprochèrent.
- Je n'arrive pas à croire que tu ais osé faire ça, dit Marlène.
- Je n'ai pas eu le choix !
- Et avec tout ça, tu veux toujours tes cadeaux ou pas ? Lança Alexia.
- Oui !
Ses amis rirent tandis que James se mettait à sautiller comme un gamin de cinq ans. Il avait déjà eu son cadeau des Maraudeurs ce matin, à savoir du matériel de Quidditch, et maintenant c'était au tour d'Alexia de lui offrir le sien.
- Joyeux anniversaire !
Elle lui tendit...une feuille de papier pliée. Surpris, James s'en saisit puis éclata de rire en le dépliant. Il s'agissait d'un planning magique pour la garde de Sirius qu'elle avait fait avant leur dispute mais elle avait malgré tout décidé de lui donner, faute de mieux.
James la prit dans ses bras, la faisant décoller du sol.
- Merci Alex !
- C'est un plaisir, capitaine !
Il la reposa avec douceur, sa serviette toujours autour de ses épaules. Les épis de ses cheveux commençaient à revenir à mesure qu'il séchait.
- Lily aussi a quelque chose, lança Dorcas.
- Non ! Enfin... mais...
- Tu m'as acheté un cadeau Evans ? Dit-il, incrédule.
Rouge pivoine, Lily fouilla dans ses poches et en sortit un petit paquet soigneusement emballé. Elle ne savait pas trop quand ni ce qu'il lui avait pris, sûrement après sa blessure à la jambe quand elle s'inquiétait pour lui. Ses possibilités avaient été limité étant donné qu'elle ne pouvait pas aller à Pré-au-Lard et finalement elle avait réussi à trouver sans sortir du château, chose dont elle était plutôt fière.
La main tremblante, elle lui tendit et fixa obstinément ses pieds comme s'ils étaient devenus un monument historique fascinant.
- Allez, ouvre-le, encouragea Peter.
James regarda longuement le visage de la rousse, un sourire en coin jouant sur ses lèvres. Quand il révéla le cadeau, il resta bouche-bée.
- Tu...tu m'as offert...une tarte au citron ?
- Ouais.... Je t'ai entendu de plaindre dix fois au moins qu'il n'y en avait plus alors...je suis allée voir les elfes et....
Elle ne put terminer sa phrase car James la prit dans ses bras, comme il l'avait fait avec Alexia il y a quelques minutes. Par réflexe, elle s'accrocha à lui aussi pour éviter de perdre l'équilibre. Elle oubliait à quel point il pouvait être tactile parfois.
- Merci, murmura-t-il contre son cou.
- Ce n'est qu'un tarte...
- Juste merci.
- De rien, Potter, de rien...et joyeux anniversaire.
Chapitre XXXIII : Tension entre amis, partie 2
Marlène marchait dans les couloirs, le cœur lourd. La Gazette était arrivée ce matin et la mort de plusieurs nés-moldus faisaient encore les gros titres. Les gens commençaient à prendre conscience de l'ampleur de la situation avec les décès et les disparitions qui s'enchaînaient au fil des mois. La journée d'hier, l'anniversaire de James, lui avait fait presque oublié les horreurs qui se déroulaient en dehors des murs du château. Même si le Ministère assurait que tout allait s'arranger, que tout était sous contrôle, Voldemort continuait à gagner du pouvoir de jour en jour. Il n'était plus seulement une ombre mais un nom craint dans toute la Grande-Bretagne et une véritable menace. Les Aurors eux-mêmes semblaient ne pas savoir quoi faire et elle savait que James envoyait régulièrement des lettres à son père pour s'assurer qu'il allait bien. Marlène revenait d'ailleurs de la volière. Les dernières informations l'avaient un peu secouées et elle avait eu besoin de prendre des nouvelles de sa famille.
- Tu vas bien McKinnon ? T'as une tête à faire peur...
La voix sur sa gauche la sortit de ses pensées et elle se retourna pour voir Regulus qui arrivait à sa hauteur. Surprise, elle jeta un coup d'œil au couloir vide. Apparemment, il avait décidé qu'il pouvait lui parler si personne ne se trouvait dans les parages.
- Je ne suis pas d'humeur, Reg'....
Il ne la corrigea même pas sur son surnom.
- Marlène ? Qu'est-ce qui se passe ?
- Rien...
- Marlène McKinnon ! Dit-il d'un ton ferme. Regarde-moi.
Elle hésita une seconde mais obtempéra finalement. Quand elle se tourna vers lui, Regulus se rendit compte qu'elle avait les yeux rouges et le teint pâle, et même ses mèches de cheveux blonds n'arrivaient pas à le cacher. Il se rapprocha d'elle immédiatement.
- Qu'est-ce que...
- Ne me demande pas ce qui se passe je t'en prie ! Ne me dis pas que tu es insensible à ce point !
-Marlène...
Honnêtement il ne comprenait plus rien, chose assez rare car il pensait être assez intelligent d'ordinaire. Il venait de débarquer il y a deux minutes et elle était déjà à moitié en pleur, tremblante de colère.
- J'avoue que je ne te suis plus là...
- Et ça ? Tu ne l'as pas vu ce matin ? Cria-t-elle brusquement en sortant un exemplaire de la Gazette et en lui balançant presque au visage.
Il n'eut pas besoin de baisser les yeux pour savoir ce qui s'y trouvait. Voldemort avait encore ajouté de nombreuses victimes à sa liste.
- Ok, c'est affreux mais...
- Mais quoi ? J'ai l'impression que les gens s'y sont presque habitués ! Que c'est devenu presque normal que des pauvres personnes meurent ou disparaissent ! Le gouvernement ne fait rien, ma famille est dehors et il pourrait leur arriver n'importe quoi !
- Marlène...
-... Portman continu à nous hurler « les mioches » à chaque séance et je n'arrive toujours pas à transplaner, Alexia est une épave et je ne peux rien faire pour l'aider parce que ton frère est le mec le plus buté que j'ai rencontré ! Il n'y a même plus de tarte au citron le matin, mon chat n'arrête pas de sortir du dortoir, j'ai eu un D en histoire de la magie, et...
- Et tu as passé une mauvaise semaine, coupa-t-il, très bien. Respire juste s'il te plait.
Marlène resta planté là, la respiration haletante et se mit à rougir sous son regard d'un gris profond. Elle devait avoir l'air d'une pauvre folle.
- Je...Merci de m'avoir laissé passer mes nerfs sur toi.
- Toujours un plaisir, McKinnon.
Un petit sourire franchit ses lèvres et elle rigola doucement. Il sentit un pincement de culpabilité en voyant qu'elle s'inquiétait autant pour le problème de Voldemort alors que lui-même réfléchissait toujours à la proposition que Rosier lui avait faite il y a plusieurs semaines.
- Je suis sûr que ta famille va bien, vous êtes sangs-purs...
- Peut-être bien mais ce n'est pas le cas de tout le monde. La famille de Lily, d'Alex...
- Hum...marmonna-t-il dédaigneusement.
- Tu n'as pas intérêt à dire quoique ce soit de désobligeant sur le statut du sang, Black !
C'était rare qu'elle l'appelle par nom de famille, aussi il comprit qu'elle était parfaitement sérieuse. De toute façon, ils avaient toujours pris soin d'éviter cette question entre eux et ils n'allaient pas changer ça aujourd'hui. Inutile de parler de quelque chose dont ils savaient pertinemment qu'ils n'étaient pas d'accord.
- Allez, viens, dit Regulus en lui tendant la main. On y va.
Mécaniquement, elle glissa sa main dans la sienne et se laissa entrainer dans son sillage. Ils avaient besoin de traverser tout le château pour rejoindre « leur repère secret » et ni l'un ni l'autre n'en avait l'énergie, du coup ils se contentèrent de marcher au hasard des couloirs.
Au bout d'un moment, ils s'arrêtèrent, fatigués.
- Ça va mieux ? Demanda-t-il.
- Ouais...merci.
Le fait de marcher en silence, juste comme ça, semblait l'avoir apaisé plus qu'elle ne l'aurait cru.
Il se tenait devant elle, son sac sur l'épaule. Elle prit conscience qu'il avait dû avoir de choses à faire cette après-midi, des gens à retrouver, peut-être Livia ou Dolohov, et qu'il avait tout laissé tomber pour elle en voyant qu'elle n'était pas bien. Ce constat provoqua une boule de chaleur dans sa poitrine. Ça faisait longtemps qu'elle s'était rendu compte que Regulus était bien plus que l'arrogant personnage froid qu'il prétendait être mais en avoir une preuve de plus était toujours agréable.
- Pourquoi est-ce que tu me regardes comme ça ?
- Je te regarde normalement, répliqua-t-elle.
- C'est faux...t'es sûre que tu vas bien ? On peut continuer à marcher si tu veux...
- Non...non je ne veux pas marcher, murmura Marlène la gorge sèche.
Regulus fronça les sourcils et se rapprocha d'elle, levant distraitement la main pour écarter une mèche blonde de son visage et pouvoir observer son expression. Il déglutit difficilement.
- Alors qu'est-ce que tu veux ?
- Tu veux vraiment le savoir ?
- Evidemment...
Elle inspira un grand coup.
- Toi.
Rien qu'en prononçant ce mot, Marlène savait qu'elle devait avoir l'air ridicule mais il était sorti naturellement, sans qu'elle réfléchisse. Et elle ne dû pas réfléchir davantage quand elle se hissa sur la pointe des pieds, sa détermination craquant comme une brindille. Elle en avait marre de se retenir et attira ses lèvres contre les siennes, les yeux fermés.
Regulus se figea sans faire un geste et elle brisa le baiser instantanément, engourdie. Par Merlin, qu'est-ce qu'elle venait de faire ?
- Je...je suis désolé...je me suis trompée...
Les larmes aux yeux et aussi pâle qu'un fantôme, elle ne lui laissa pas le temps de dire quoique ce soit et s'enfuit à toutes jambes.
**
*
Regulus avait passé une bonne heure à la chercher maintenant, sans succès. Il avait presque pensé à aller voir ses amies au cas où elle était retournée dans son dortoir, ce qui était fort probable, mais abandonna vite l'idée. Il voyait déjà la tête d'Evans ou Cassidy s'il débarquait pour voir Marlène.
Finalement, il se décida à se rendre à leur salle de classe vide en dernier recours. Il évitait l'endroit depuis tout à l'heure, peut-être parce qu'il savait qu'il avait de grandes chances de la trouver là-bas et évidemment ça ne manqua pas. Dès qu'il ouvrit la porte, son regard tomba sur elle.
Elle était recroquevillée dans le vieux canapé vert déglingué, les genoux repliés contre la poitrine et il devina qu'elle pleurait. Son cœur se serra dans sa poitrine. C'était de sa faute après tout... Il traversa la pièce en quelques enjambées et vint s'agenouiller en face d'elle.
- McKinnon ?
Marlène releva la tête, des traces de larmes sur les joues. Elle renifla piteusement puis remit ses cheveux blonds derrière son oreille, gênée.
- Je suis désolé, souffla-t-elle. Tu vas me laisser ?
- Quoi ?
Il haussa un sourcil.
- Te laisser ?
- Ouais... J'avais pensé...
- Pourquoi voudrais-tu que je te laisse ?
- Parce que j'ai tout gâché ! Dit-elle.
Elle enfouit son visage entre ses mains et se laissa basculer contre les coussins du canapé, mortifiée.
- Tu n'as pas...enfin je veux dire...
Regulus soupira, levant les yeux au plafond.
- Merlin, je suis nul pour ça !
Elle rouvrit les yeux lentement, toujours aussi pâle. Regulus semblait chercher ses mots pour la rassurer mais ne trouvait rien à dire qui traduise son état d'esprit. Il voulait la revoir sourire. Sans réfléchir, il se leva et lui tendit la main.
- Viens avec moi.
- Où ça ?
- Je veux te montrer quelque chose. S'il te plait.
Ses yeux la supplièrent de lui faire confiance. Il détestait la voir hésiter ainsi. Finalement, Marlène hocha la tête lentement.
- Ok...
Elle se leva et le suivit sans un mot. Elle avait cru qu'ils allaient sortir de la pièce mais Regulus se contenta de la traverser pour venir se planter devant le vieux tableau noir. Avec précaution, il ouvrit les deux battants, ce qui révéla les dessins qu'elle avait tracé à la craie il y a un mois. Ils n'avaient pas bougé, ne s'étaient même pas effacés, et on pouvait encore voir la tablette de chocolat, un chat blanc et le canapé aux ressort apparents qui retraçaient leur histoire ensemble.
Marlène ne se contenta de rester devant le tableau, les bras ballants. Il se plaça juste derrière elle.
- Reg'...
- Regarde, dit-il. C'est notre amitié.
- Je ne comprends pas...
- Qui aurait parié sur nous deux ? Hein ?
- Personne, répondit-elle honnêtement.
- Exact, personne. On était différent, Serpentard et Gryffondor. Je ne t'aurais jamais parlé si tu ne m'avais pas forcé.
- Tu me fais passer pour une psychopathe harceleuse...
Regulus sourit.
- Ce que tu es, plaisanta-t-il.
- Espèce de sang-pur sans cœur.
- Quel beau compliment...
- Reg' !
- Très bien, très bien, dit-il. Tu vois ces dessins donc ? Notre amitié. Je ne pensais pas qu'elle soit possible, je n'y aurais pas cru une seconde et pourtant tu m'as fait y croire, Marlène. Et je sais que d'après ce qui s'est passé tu voudrais plus...
- Je...
- Laisse-moi finir. Je sais que tu voudrais plus mais c'est impossible.
Marlène sentit tous ses derniers espoirs voler en éclat et elle ne put retenir un soupir de déception qui ne lui échappa pas.
- Non McKinnon, ce n'est pas...C'est impossible parce que ça ne marcherait pas. Je le voudrais...je le veux aussi, vraiment... Mais je ne peux pas. Il y a ma famille, Livia, Rosier, une guerre dehors qui se prépare. Je sais que tu fais semblant de ne pas le savoir sauf que j'ai un rôle à jouer dans tout ça, et je refuse de t'y impliquer.
- Je m'en fiche ! Ça m'est égal...
- Pas moi, dit-il.
- Je...je suis sang-pur et...
Marlène n'aurait jamais cru abattre cette carte comme argument. Elle se détestait même pour l'utiliser mais après tout c'était la vérité. Malgré tout, elle resta face au tableau sans oser se retourner, incapable de soutenir son regard qu'elle sentait posé sur sa nuque.
- On sait tous les deux que ça ne change rien... Ne crois pas un instant que tu n'es pas assez bien, Marlène c'est clair ? Ça n'a strictement rien à voir avec toi.
- Hum...
- Je te le jure. Et je ne veux pas que tout ça remette en question notre amitié. Je veux pouvoir te retrouver ici après les cours, réviser avec toi, manger du chocolat et te dire que tu m'as manqué pendant les vacances... Je ne veux pas que ça s'arrête.
Marlène retint à grande peine ses larmes. Jamais elle n'aurait pensé qu'il puisse lui avouer ça un jour, elle savait que ça lui coutait et qu'il était reconnaissant envers elle pour rester dos à lui, sinon il n'aurait jamais pu parler si librement. Ça allait à l'encontre de toute sa personnalité et ça montrait à quel point il avait aussi peur qu'elle de la perde. Cette prise de conscience dénoua un peu la boule qui le nouait la gorge.
- Alors on ne va pas arrêter, promit-elle avec un léger sourire.
Elle le sentit se détendre imperceptiblement.
- Je veux que tu me promettes une chose en échange aussi...
- Je t'écoute.
Rassemblant son courage de Gryffondor, elle se retourna. Ses joues s'enflammèrent aussitôt mais elle ne baissa pas les yeux. Evidemment, son visage à lui resta inexpressif. Il avait toujours su parfaitement le faire.
- Promets-moi que tu ne rejoindras pas les mangemorts.
- McKinnon...
- Je t'en prie !
- Livia m'a déjà...
Marlène essaya de refouler la vague de jalousie qui la traversa à la mention de l'autre fille. Elle avait souvent pensé à la relation qu'elle avait avec Regulus, le total contraire de la leur à vrai dire. Livia était blonde aussi, mais elle était à Serpentard, une sang-pur riche et respectée, intelligente, sa meilleure amie qui avait le droit de lui parler en public sans qu'il y ait de conséquence. Elle était parfaite pour lui et Marlène savait qu'il le savait également.
Il dû voir l'expression sur son visage car il se coupa lui-même.
- Il n'y a rien entre Livia et moi, dit-il d'un ton ferme.
- Mais ça pourrait...
Regulus refusa de lui mentir.
- Oui, peut-être. J'avoue que ce n'est pas ma priorité en ce moment, je suis plutôt focalisé sur une autre blonde, mais elle est dure à convaincre.
Cela arriva au moins à arracher un sourire à Marlène.
- Pour en revenir à ma promesse...
- Oui, oui ! Je sais...mais je ne peux pas te le jurer...
- Reg' !
Il soupira. Merlin ce que c'était dur de lui refuser quelque chose quand elle lui jetait ce regard. Avec douceur, il lui prit la main et la serra dans la sienne. Elle rougit, ce qui l'amusa avant qu'il se rappelle qu'il n'avait pas le droit de lui faire ça alors qu'il venait de lui dire que c'était impossible entre eux. Malgré tout, il ne lâcha pas pour autant.
- Très bien...je te le promet, Marlène McKinnon.
- Merci...
Sans réfléchir, elle le prit dans ses bras et il enroula ses bras autour de sa taille. Oh oui cette fille était fantastique.
Chapitre XXXIV : Attaque à Pré-au-Lard
Rosier se tenait devant tout le monde, adossé contre le mur. Comme d'habitude, ses cheveux blonds étaient impeccablement coiffés et ses yeux noirs encre parcouraient le petit groupe face à lui. Dans un coin se trouvait Avery, qui semblait bien seul depuis l'exclusion de Mulciber. Juste à côté, Elizabeth Yaxley était assise, sa chevelure blonde retombant dans son dos comme si elle avait voulu montrer qu'elle était parfaitement assortie capillairement avec son fiancé et Walden Mcnair finissait son devoir de métamorphose en retard.
Personne ne savait vraiment comment tout le monde avait été convoqué ici en même temps mais Rosier n'en était pas à son premier tour dans ce genre-là pour prouver son omniprésence au sein de sa maison. D'ailleurs, dès qu'il se redressa, un lourd silence tomba sur les personnes présentes. Regulus songea que Livia, si elle avait été là, aurait sûrement fait une remarque sarcastique sur son « autorité suprême et naturelle ».
- Bon alors qu'est-ce qu'on fait là ?
- Ouais, ça fait une heure qu'on attend !
- On a un entrainement avant le déjeuner, ajouta un Poufsouffle geignard.
Rosier le fusilla du regard et il se tassa sur sa chaise.
- Il est temps de faire vos preuves, se contenta-t-il de dire froidement.
Il y eut un grand silence. En une phrase, Regulus sut que tout allait se jouer aujourd'hui.
**
*
La sortie à Pré-au-Lard prévu aujourd'hui agitait tout le château puisque c'était l'avant dernière de l'année. En effet, on était déjà fin avril, ce qui faisait qu'après la période de révisions et d'examens allaient commencer. Comme chaque année, une dernière serait organisé deux jours avant les grandes vacances mais avant cela il fallait rester enfermé pendant deux mois pour apprendre par cœur le programme scolaire et prier pour réussir les examens.
Tout cela faisait que le hall d'entrée bourdonnait presque d'énergie. Et évidemment, James semblait être le pire de tous. Remus le regardait depuis tout à l'heure et il sautillait presque d'excitation, incapable d'attendre tranquillement.
- James, calme-toi.
- Mais ils sont en retard ! On devrait être en route depuis dix minutes.
- Ce n'est pas un drame...
- Au contraire, je vais porter plainte !
- Je croyais que tu voulais déjà porter plainte pour les tartes au citron ?
James haussa les épaules.
- Je peux faire les deux.
- Tu es impossible...
Il eut l'air de prendre ça pour un compliment puis tourna brusquement la tête vers la droite, se passant une main dans les cheveux. Remus n'eut pas besoin de se retourner pour savoir que les filles venaient d'arriver et donc Lily. Il n'y avait qu'en sa présence que James perdait ses moyens après tout.
Elles arrivèrent à leur hauteur, Alexia légèrement en retrait comme si elle ne voulait pas brusquer Sirius qui s'était tendu en la voyant.
- Salut ! Lança Alice avec enthousiasme. Vous avez vu Frank ?
- Là-bas, indiqua Peter.
La jeune fille sourit et tourna les talons sans un mot, ce qui fit lever les yeux au ciel à Dorcas.
- Ridicule...
- Ah oui ? Tiens regarde Lucinda !
Dorcas se retourna mécaniquement, le regard brillant. Les autres éclatèrent de rire.
- Vraiment très drôle...bougonna-t-elle.
- Ce n'est pas de notre faute si l'amour rend idiot !
- Oh oui et tu en sais quelque chose, n'est-ce pas James ? Peut-être que tu devrais te repasser une main dans les cheveux, ils ne sont pas assez ébouriffés et Lily est juste là.
James ouvrit la bouche plusieurs fois sans répondre tandis que Remus pouffait de rire et que Lily piquait un fard. Heureusement, Rusard arriva à ce moment-là.
- Très bien ! Je veux toutes vos autorisations, sinon pas de sortie à Pré-au-Lard !
Aussitôt, les élèves formèrent une ligne devant les portes. Il leur fallut encore dix minutes avant de pouvoir sortir, le concierge vérifiant avec encore plus d'attention les autorisations des Maraudeurs comme s'ils avaient fabriqué des contrefaçons.
Le chemin fut étrangement silencieux, principalement à cause du fait qu'Alexia et Sirius s'ignoraient et ne s'adressaient pas la parole et leur malaise s'étendit à tout le groupe.
Pourtant, dès qu'ils arrivèrent à Pré-au-Lard, la tension s'envola comme par magie. Il faut dire que le village sorcier, même après toutes ses années, avait encore cet effet sur les gens. La route principale, bordée de maisons biscornues et de magasins, s'étendait devant eux et débouchait sur la place centrale où se trouvait une petite fontaine. Partout, plein d'élèves se promenaient, les bras déjà chargés d'achats. C'était toujours une journée très attendue par les commerçants.
- Qu'est-ce qu'on fait ? Demanda Peter. On reste ensemble ou on se sépare ?
- On se sépare, lança Sirius.
Alexia sentit son souffle se bloquer dans sa gorge. Pas d'hésitation, rien. Juste l'envie de fuir le plus loin possible de toute évidence. Dorcas dû remarquer son expression blessée car elle décocha une œillade assassine à Sirius.
- On va aller au Trois Balais, dit finalement Marlène. On se retrouve plus tard ?
- Parfait, je devais aller me racheter une plume et des parchemins de toute façon. Vous m'accompagnez ?
Les garçons acquiescèrent et Remus songea qu'ils n'avaient pas trop le choix puisque c'était à cause d'eux que sa dernière plume avait brûlé « accidentellement ».
- Je vous rejoindrais après, intervint Lily. J'ai promis à mon père de lui envoyer des chocogrenouilles d'Honeydukes.
- Je t'accompagne ! Lança James sur un coup de tête.
Aucun d'entre eux ne put retenir en sourire à cela, surtout quand Lily se mit à rougir en plus mais ne l'envoya pas balader pour une fois.
Après avoir déterminé un point de rendez-vous pour 17h, ils se dispersèrent tous.
**
*
Lily et James marchaient le long de la rue en direction de chez Honeydukes dans un silence gêné. Il ne savait pas trop ce qu'il lui avait pris de proposer de l'accompagner, à vrai dire il était persuadé qu'elle allait lui dire non et ça l'avait donc autant surpris que les autres.
Chaque moment de paix avec Lily lui semblait de toute façon surréaliste mais renforçait toujours plus son amour pour elle. Il l'observait du coin de l'œil, notant des détails qu'il connaissait par cœur, comme les tâches de rousseurs qui parsemaient son visage, sa manie de se mordre la lèvre quand elle était nerveuse ou encore la façon dont ses cheveux auburn accrochait le soleil. La dernière fois qu'ils étaient venus à Pré-au-Lard il y avait encore de la neige et sa peau était rouge sous la morsure du froid alors qu'aujourd'hui elle avait retrouvé sa pâleur naturelle.
Il l'avait trouvé belle depuis leur première rencontre, même si Sirius se moquait souvent de lui en disant que cette fille n'avait rien d'extraordinaire. C'était vrai, il y avait des filles beaucoup plus jolies qui feraient n'importe quoi pour sortir avec lui mais James ne leur avait jamais trouvé le même charme qu'il voyait en Lily. Elle n'était pas parfaite et c'est ce qui faisait qu'elle l'était paradoxalement.
- Comment va ta jambe ? Demanda-t-elle brusquement, le sortant de ses pensées.
- Ma jambe ?
- Oui...tu sais la blessure...
Elle avait baissé le volume de sa voix pour ne pas être entendu et James fut touchée par le fait qu'elle prenait le secret de Remus avec autant de sérieux. Pas qu'il s'attendait à autre chose de sa part mais quand même...
- Oh ça va très bien, complètement disparue ! Il faut dire que j'ai eu une infirmière incroyable !
Lily rougit.
- J'aurais dû te laisser perdre ta jambe...
- Tu ne l'aurais jamais fait !
- Comment est-ce que tu peux en être aussi sûr ?
- Parce que je te connais...
Cette affirmation la fit encore plus rougir. James éclata de rire.
- Tu m'énerves Potter.
Lily poussa la porte de chez Honeydukes sans lui laisser le temps de répondre et s'engouffra dans le magasin. Une forte odeur de sucre l'assaillit immédiatement. D'innombrables étagères débordaient des plus succulentes friandises et le son des noises tombant dans la caisse emplissait la pièce. Des nougats moelleux, des cubes de glace à la noix de coco, des caramels dorés et des centaines de chocolats différents étaient disposés en rangées nettes. Un peu plus loin, il y avait des tonneaux remplis de Dragées surprises de Bertie Crochue et de Fizwizbiz. Les bonbons à "Effets spéciaux" occupaient un pan de mur entier tandis que juste à côté on pouvait lire une pancarte indiquant les "Goûts bizarres".
- A ton avis, ça a quel goût des sucettes au miel et aux asticots ?
- Berk !
- Allons Evans, tu n'as même pas essayé !
- Et je ne le ferais pas... Par contre si tu veux tu as des tartelettes au citron là-bas.
James pivota immédiatement sur lui-même.
- Où ça ?
Lily sourit alors qu'il s'éloignait pour aller chercher ses tartes. Elle avait beau parfois (souvent) trouver le garçon agaçant, ça l'amusait toujours de voir à quel point il avait cette capacité de s'émerveiller comme un enfant. C'était un paradoxe qui la troublait depuis qu'elle le connaissait. Potter pouvait paraître immature et enfantin une seconde mais être également d'un sérieux mortel quand des choses importantes touchaient à ses amis, comme la lycanthropie de Remus ou les problèmes familiaux de Sirius.
Elle n'était pas idiote, et comme tout le monde elle avait entendu les rumeurs qui couraient dans le château. Le départ de l'héritier des Black avait fait beaucoup de bruit, Alexia s'était inquiété un moment. Pourtant ça n'avait surpris personne d'apprendre que Sirius habitait désormais chez James, comme si c'était la chose la plus normale et logique au monde.
- Evans ?
- Hein ?
- Je disais, tu achètes tes chocogrenouilles ou non ?
- Oh oui désolé, j'arrive.
Elle s'empressa de faire ses achats puis ils ressortirent de la boutique. Lily resserra son écharpe pour lutter contre le vent écossais, certes moins glacial qu'en hiver mais tout de même. Sans se concerter, ils restèrent en face de la devanture de Honeydukes, aucun des deux n'ayant envie de rejoindre les autres tout de suite.
- Potter ? Je peux te poser une question ?
- Tu viens de le faire...
Elle décida de l'ignorer.
- Pourquoi est-ce que tu aimes autant les tartes au citron ?
James se passa une main dans les cheveux, un sourire en coin accroché aux lèvres et elle se demanda une seconde ce qu'elle avait bien pu dire de drôle avant de réaliser qu'il avait juste l'air...timide. Or, c'était bien la première fois qu'elle voyait James Potter timide.
- Ma mère m'en faisait souvent quand j'étais petit, répondit-il finalement. C'est idiot mais...
- Non, ça ne l'est pas.
- Ouais et...oh ! Les trois D ! J'y ai encore pensé ce matin !
Perplexe, Lily cligna des yeux, pas sûre de très bien suivre la conversation. Elle comprit brusquement quand Portman, leur professeur de transplanage, passa près d'eux, l'air suspicieux.
- Euh...oui, les trois D...je...
- Je vous surveille, la Citrouille et le Binoclard ! Lança-t-il en s'éloignant.
Il leur jeta un regard pseudo-menaçant, marchant à reculons jusqu'à ce qu'il disparaisse dans une ruelle adjacente. James et Lily partirent dans un fou rire, incapables de se contenir.
- T'aurais dû voir ta tête !
- Je ne sais pas improviser ! Répliqua-t-elle. Qu'est-ce que tu voulais que je dise ?
- Aucune idée ! Que tu allais bientôt te marier avec ton cerceau jaune !
Lily secoua la tête, amusée. Alors qu'elle ouvrait la bouche pour répondre un cri déchira l'air à quelques mètres d'eux. Ils sursautèrent et firent volte-face en direction du hurlement.
- Qu'est-ce que...
- Des mangemorts !
Soudain, la vitrine de Honeydukes explosa dans leur dos. Lily cria en sentant des éclats de verres la frôler et elle se jeta à terre en même temps que James. Pendant une seconde, elle eut l'impression d'être plongée sous l'eau, de ne plus rien entendre puis la réalité lui revint en pleine face.
Des gens hurlaient et couraient dans la rue, elle vit des enfants sortir du magasin de bonbons complètement paniqués. C'est alors qu'elle les repéra. Les mangemorts. Il y en avait trois au bout de la rue, baguette en main. Leur visage était masqué et ils portaient de longues capes noires qui tourbillonnaient à chacun de leur mouvement quand ils jetaient des sortilèges. Ils ne semblaient même pas viser quelque chose en particulier, juste provoquer le maximum de chaos dans leur sillage. Une autre vitrine vola en éclats un peu plus loin.
- Il faut bouger...
- Quoi ?
- Evans, il faut qu'on bouge !
Lily resta immobile, les membres figés. Ses jambes semblaient avoir été transformés en coton et ses bras tremblaient tellement fort qu'elle n'était même pas sûre de pouvoir tenir sa baguette. Les yeux écarquillés, elle fixa James un long moment sans savoir quoi dire et il lui attrapa vivement la main pour la remettre sur ses pieds.
- Ecoute-moi, dit-il sérieusement. Je veux que tu cours comme jamais tu n'as couru, tu m'entends ? On ne peut pas rester là Evans !
- James...
- Je sais. J'ai peur aussi. Mais les autres sont toujours quelque part, il faut qu'on les retrouve !
L'inquiétude pour ses amis se lisait sur ses traits et c'est ce qui sortit soudain Lily de sa torpeur. Il avait raison, bien sûr.
- Ouais...d'accord...
- T'as ta baguette ?
Elle plongea la main dans sa poche et s'en empara, les doigts crispés sur le bout de bois comme si sa vie en dépendait, ce qui était aujourd'hui le cas.
- Très bien. On y va. Si on est séparé, on se retrouve au Trois Balais, d'accord ?
- Oui...mais...
- Mais quoi Evans ?
- Ne me lâche pas...murmura-t-elle.
James sentit son estomac se retourner en la voyant trembler. Lily lui avait toujours parut si forte, si sûre d'elle, et elle semblait complètement dépasser par les évènements. Lui-même n'en menait pas large non à vrai dire. Il songea à son père qui en tant qu'Auror se battait tous les jours contre les mangemorts. Cette réalité lui paraissait lointaine derrière les murs de Poudlard mais aujourd'hui il ne pouvait pas faire marche arrière ni abandonner. Pour l'instant, Lily avait besoin de lui et il devait la mettre en sécurité.
Un sort passa juste au-dessus leur tête. Ce fut le déclic.
- Cours !
Lily sursauta mais obéit. Sa main agrippée fermement à la sienne, elle se mit à courir et le bruit de ses pas contre le bitume n'arrivaient pas à couvrir celui de son cœur qui résonnait dans ses oreilles. Elle manqua de rentrer dans plusieurs personnes, dont une petite fille en larmes. Lily ralentit, incapable de passer son chemin.
- Evans, bon sang, qu'est-ce que...
- On ne peut pas la laisser !
James suivit son regard et il vacilla sur ses jambes en voyant l'enfant. Alors qu'il faisait un pas en avant, une femme arriva et pris la petite dans ses bras avant de fuir aussi vite qu'elle était arrivée.
- Allez ! Hurla-t-il.
Ils se remirent à courir. Les Trois Balais n'était plus très loin, encore quelques mètres à remonter. James ne savait pas si seule la grande rue était touchée pour le moment, ni où étaient les Maraudeurs. Il y avait des tas de magasins qui vendaient des plumes et du parchemin, ils pouvaient être n'importe où...
- Ils vont bien !
- Quoi ?
- Potter, je suis sûre qu'ils vont bien !
- Mais...mais s'ils sont blessés ou... ?
- N'y pense pas, ça va aller. Cours !
James regarda son expression déterminée et obtempéra. Il y penserait plus tard, quand Lily serait en sécurité. Il ne pouvait pas se laisser distraire maintenant.
Brusquement, il vit la jeune fille lever sa baguette.
- Stupefix !
La mangemort qui arrivait sur leur gauche fut projeté en arrière et James lui adressa un regard de remerciement. Elle avait de l'air de se ressaisir de minute en minute, sur ses gardes.
Avec soulagement, ils virent enfin les Trois Balais devant eux. Quand ils franchirent la porte, ils manquèrent de renverser Marlène et Alice.
- Oh mon dieu ! Vous allez bien !
- On n'a rien, ça va... Et vous ?
- On est toutes là, rassura Alice. Frank aussi. On s'est réfugié ici au début de l'attaque.
Lily tourna la tête pour voir Dorcas, Alexia et Frank arriver vers eux. Plusieurs clients étaient cachés sous les tables ou derrière le bar, Rosmerta essayant d'apaiser tout le monde d'un ton calme même si on pouvait voir qu'elle était paniquée aussi.
- Et les autres ? Demanda James avec urgence.
- Ils sont partit chez Scribenpenne il y a une demi-heure, juste avant l'arrivée des mangemorts...
- Qu'est-ce qui se passe dehors ?
- C'est la panique, il y a des mangemorts un peu partout....
- Combien ?
- J'en ai vu quatre au moins, répondit Lily, mais il y en a sûrement plus.
Par la fenêtre, on put soudain voir une colonne de fumée s'élever un peu plus loin comme si quelqu'un venait de mettre le feu à un bâtiment.
- Merlin, vous avez vu ça ?!
- Non je regardais de l'autre côté ! Rétorqua Dorcas sarcastiquement. Evidemment qu'on l'a vu !
Rosmerta s'approcha, bienveillante.
- Allez les enfants, ça va aller. Les Aurors vont arriver bientôt.
- Je ne peux pas rester là...
- Pardon ?
- Il faut que j'aille retrouver les autres !
- James ! Non ! Cria Marlène.
Il tenta de la contourner mais elle lui barra le passage avec force. Lily se précipita aussitôt à ses côtés.
- Potter !
- Laisse-moi passer, Evans !
- Ça ne sert à rien, tu vas te faire tuer dehors ! Ils sont en sécurités !
- Comment est-ce que tu peux le savoir ?!
Lily resta sans voix devant sa détresse. Il se passa une main dans les cheveux, nerveux.
- Sirius...Remus....Peter, ils sont là-bas. Je vais juste les rejoindre, je te promets que tout ira bien.
- Mais...
- Je vais avec lui, déclara soudain Alexia.
- Quoi ? Certainement pas ! Tu restes là !
- Je vais rejoindre Sirius.
James vit la détermination d'Alexia et il sut qu'il ne pourrait pas la faire changer d'avis, surtout qu'il manquait de temps. Chaque seconde comptait et il n'allait pas rester ici pour essayer de la dissuader. Il fit un signe discret à Frank qui parut comprendre car il hocha la tête en accord. Alors qu'il posait la main sur la poignée, Lily le retint par le bras. Elle le serra contre elle de toutes ses forces.
- Fais attention, souffla-t-elle.
- Tu me connais...
Il recula à contre cœur et sortit sans se retourner.
Alexia amorça un geste pour le suivre mais Frank arriva derrière elle, la ceinturant par la taille. Paniquée, elle se mit à se débattre.
- Frank, laisse-moi partir !
- Je suis désolé...
- Lâche-moi ! Frank ! Lâche-moi !
- Désolé...
- Non !
**
*
Remus jeta un coup d'œil prudent dehors par la vitrine. La rue était déserte et on aurait presque pu oublier qu'il y a dix minutes à peine, une dizaine de mangemort avait transplané ici. Ils étaient tous à l'intérieur du magasin quand s'était arrivé, heureusement. C'était les cris des passants qui les avaient d'abord alertés puis ils avaient remarqué les sortilèges qui volaient partout, brisant les vitrines une par une. Celle de Scribenpenne était miraculeusement intacte. Plusieurs personnes étaient venues se réfugier et le gérant les avait cachés dans la cave ou dans l'arrière-boutique. Stupéfait, Remus avait vu Anaïs rentrer, aussi pâle qu'un fantôme. Il avait juste eu le temps de la retenir par les épaules avant qu'elle ne s'effondre contre lui, en larmes. Elle venait de se prendre un sort à la cheville et n'arrivait plus à poser le pied par terre. Le temps qu'avec l'aide de Peter il la porte jusqu'à une chaise pour l'examiner, Sirius était partit. Remus n'avait même pas eu le temps de se retourner avant d'entendre la cloche de la porte et de constater que son meilleur ami venait de ressortir dehors sans raison.
Il ne savait pas non plus où était James, ni les filles. L'inquiétude semblait lui ronger le ventre à l'heure actuelle et Peter semblait être dans un état similaire.
La boutique n'était pas grande, on s'y sentait vite à l'étroit. Remus avait sillonné la pièce de long en large au moins cinq fois, parcourant les nombreuses plumes exposées du regard. Il n'arrivait pas à croire que tout leur groupe s'était séparé à cause d'une simple plume. Il avait beau se dire que c'était à cause du fait que Sirius et Alexia s'étaient disputés, il n'en restait pas moins que cela aussi c'était sa faute. En fait, de n'importe quel point de vue, le problème était toujours de sa faute.
- Arrête, dit soudain Anaïs d'une voix sourdre.
- Arrête quoi ?
- Déjà de tourner en rond comme ça, tu me donnes le vertige. Et ensuite, arrête de te blâmer comme ça.
- Je ne me...
- Si, tu t'en veux. Ça se voit sur ton visage, Remus.
- Elle a raison, intervint Peter, les yeux dans le vague. On ne peut rien faire pour l'instant.
Remus soupira. Lentement, il vint les rejoindre dans le coin et s'assit par terre entre eux. Anaïs lui sourit avec douceur.
- Comment va ta cheville ?
- Un peu mal mais ça va. Pomfresh m'arrangera ça en deux minutes.
- J'aurais dû être avec toi...marmonna-t-il. On devait aller à Pré-au-Lard ensemble.
- Merci de me rappeler dans ce moment de désespoir que tu as refusé ma demande...
Son faux ton dramatique eut le mérite de le faire rire.
- Mais sérieusement Remus, ce n'est pas de ta faute. Le monde ne tourne pas autour de toi, ne sois pas égocentrique.
C'était bien la première fois qu'on lui sortait ça, surtout avec un sourire taquin et un visage d'ange en prime. Il regarda Anaïs un moment. Il aurait très bien pu faire quelque chose qu'il aurait regretté ensuite si la porte ne s'était pas ouverte brusquement, le bruit de la cloche brisant leur bulle magique instantanément.
- James ! S'écria Peter en bondissant sur ses pieds.
- Oh Merlin vous allez bien !
James traversa la boutique et les écrasa dans une étreinte tous les deux avant de faire de même avec Anaïs comme si c'était la chose la plus normale au monde. Elle lui rendit maladroitement, surprise.
- Qu'est-ce que tu fais là ? Je croyais que tu étais avec Lily !
- Elle va bien, je l'ai laissé au Trois Balais avec les filles. Il fallait que je vienne vous retrouver.
- Elles t'ont laissé partir ? Demanda Remus, sceptique.
- Bah... Ça n'a pas été facile, Frank a dû retenir Alex de me suivre mais oui, on va dire que oui.
Soudain, son sourire s'évanouit et il parcourut la pièce du regard. Une vague d'angoisse la submergea.
- Où...où est Sirius ?
- James...
- Où est Sirius ?!
- Dehors, répondit Remus.
- Quoi ?
- Je te jure qu'on n'a rien vu. Il était là une seconde et puis celle d'après il était ressortit. Je ne sais pas pourquoi...
- Combien de temps ? Ça fait combien de temps, Lunard ?
- Je ne sais pas, vingt minutes peut-être. On ne pouvait pas laisser Anaïs ici toute seule.
- On ne sait même pas par où il est parti, renchérit Peter.
James se passa une main dans les cheveux une énième fois aujourd'hui. Ses yeux firent des allers retours entre ses amis et la porte, hésitants. Remus parut comprendre car il le saisit par le bras.
- Tu restes là. Il est hors de question que je te laisse y retourner encore une fois, tu as de la chance de ne pas être tombé sur un mangemort !
- Je...J'en ai déjà croisé deux. Lily a stupéfixié le premier et j'ai réussi à me débarrasser de celui que j'ai croisé en chemin.
- Justement, tu n'es pas intouchable James ! Donc tu t'assois et on attend les Aurors.
- Mais Sirius...
- Sirius peut se débrouiller. Je ne vais pas te laisser risquer ta vie aussi !
- Tu es train de dire que tu es prêt à le laisser dehors à la merci des mangemorts ? S'indigna-t-il.
- Bien sûr que non !
Remus avait envie de donner un coup de poing dans le mur, juste histoire de se défouler. Ses idées s'emmêlaient dans son esprit et il était incapable de décider quoi faire. Il n'avait qu'une envie, sortir pour aller chercher Sirius, mais d'un autre côté il ne voulait pas laisser James ou Peter prendre des risques.
Son trouble devait se lire sur son visage car James posa une main sur son épaule.
- Je te promets que je reviens dès que je l'ai retrouvé.
- James ! Non ! Reviens !
Trop tard. La porte claqua une fois de plus dans son dos.
- Mais c'est pas vrai ! Cria-t-il. J'ai des suicidaires comme amis !
- Qu'est-ce qu'on fait ? Demanda Peter. On ne peut pas les laisser.
- Evidemment. Allez prends ta baguette, on y va.
Peter acquiesça et se précipita vers son sac. Anxieux, Remus fit volte-face vers Anaïs, toujours assise sur sa chaise, la cheville entourée de bandage de fortune. Ses cheveux blonds lui retombaient devant le visage mais pas assez pour cacher les larmes sur ses joues.
- Hé Anaïs, écoute-moi, souffla-t-il. Je veux que tu ailles dans la réserve avec les autres. Tu te caches et tu attends que les Aurors arrivent, d'accord ?
- Et si tu ne reviens pas ?
- Je vais revenir, juste le temps de ramener ces deux imbéciles sains et saufs. En plus je te dois toujours un rendez-vous, pas vrai ?
- Ouais, dit-elle en riant à moitié. Allez dépêche-toi !
Il déposa un baiser sur joue sur un coup de tête puis emboîta le pas à Peter.
**
*
Sirius se plaqua contre un mur, la respiration haletante. Un mangemort passa près de lui sans le voir et il soupira de soulagement. Sa baguette calée fermement dans sa main, il sortit de sa cachette sans faire de bruit avant de continuer son chemin.
Il aurait pu retourner chez Scribenpenne maintenant mais il n'arrivait pas à se résoudre à faire demi-tour. L'image de son frère tout à l'heure lui restait gravé en tête. Il était juste en train de surveiller la rue quand il l'avait aperçu au travers de la vitrine. Regulus était au milieu de la route, habillé entièrement en noir. Quelques mètres plus loin se trouvait Evan Rosier qui s'amusait à jeter des sortilèges pour briser des lampadaires, répandant une traînée d'éclats de verre dans son sillage. Il avait fallu une seconde à Sirius pour comprendre la situation. Si des mangemorts attaquaient Pré-au-Lard le jour même de la sortie de Poudlard, ce n'était pas un hasard ni une coïncidence. Rosier mettait ses troupes à contribution avant que les Aurors ne débarquent, mettant sûrement à l'épreuve les potentiels recrus du Seigneur des Ténèbres. Et Regulus en faisait partie.
Il n'avait même pas réfléchi. Sans prendre le temps de prévenir ses amis, il était ressorti pour suivre son petit frère. Malheureusement, Rosier l'avait entraîné plus loin dans le village et Sirius avait perdu leur trace il y a quelques minutes. Depuis, il tentait d'éviter les mangemort du mieux qu'il pouvait. Ces derniers n'étaient plus très nombreux, ils avaient dû recevoir comme ordre de partir avant l'arrivée des Aurors mais il restait malgré tout sur ses gardes.
Brusquement, une personne surgit en courant au coin de la rue. Sirius recula instinctivement, restant dans l'ombre, avant de reconnaître James avec stupeur. Merlin, maudit-il mentalement, qu'est-ce qu'il faisait là ? Il était censé protéger Lily ! Il pensa directement à Alexia et espéra qu'elle était en sécurité cachée quelque part.
James tourna sur lui-même, comme s'il cherchait quelque chose, et Sirius comprit avec un temps de retard que ça devait être lui.
- James, chuchota-t-il. James ! Pst ! Cornedrue, par ici !
Son meilleur ami se tourna dans sa direction. Son visage s'éclaira et il courut vers lui.
- Bon sang Sirius ! Je t'ai cherché partout !
- Qu'est-ce que tu fais là ?
- Pardon ? Toi qu'est-ce que tu fais là ? T'es inconscient ?
- Non je...plus tard. On parlera plus tard. Allez viens.
James hocha la tête et alors qu'ils allaient tourner les talons, une silhouette s'interposa pour leur barrer le passage. C'était un homme visiblement mais Sirius n'aurait pas pu en dire plus étant donné qu'il avait le visage masqué.
- Tiens, tiens qu'avons-nous là ? Alors les enfants, on se promène ? Dit-il d'une voix glaciale.
- Laissez-nous, ordonna James.
Il leva sa baguette, la pointant sur l'homme avec détermination mais l'autre continua à avancer.
- Vous croyez pouvoir m'intimider ?
- Reculez !
- Stupéfix !
L'homme dévia le sort de Sirius avec une facilité presque insultante.
- Mais dites-moi... Toi là, tu ne serais pas le fils de Fleamont Potter ?
- Et alors ?
Bien que James n'est pas clairement répondu à la question, la fierté dans sa voix suffit à le trahir.
- Oh je pense que le maître sera ravi en sachant que j'ai réussi à avoir le fils du chef des Aurors...
- Laissez-le tranquille !
- Ne t'inquiète pas, je ne t'ai pas oublié non plus, gamin. Je t'ai reconnu aussi. Le fils Black, n'est-ce pas ? Ton départ était assez...bruyant.
- Je m'en fiche !
- Vraiment ? Ta mère attend que tu rentres à la maison, tu sais.
Sirius crispa sa main sur sa baguette et l'homme sous le masque eu un rire froid.
- Qu'est-ce que vous préférez ? Un imperium ou être ligoté par magie ? Je me trouve assez généreux de vous laisser le choix.
- Les Aurors vont arriver...
- N'espère pas que ton père vienne te sauver, gamin. Il n'y a personne ici et vous commencez à me faire perdre mon temps !
En voyant le mangemort perdre son calme, James fit un pas en avant pour essayer de le désarmer. Malheureusement il ne fut pas assez rapide et le sortilège fusa dans sa direction, trop vite pour qu'il ait la possibilité de jeter un protego. Il ferma les yeux par réflexe mais soudain on le percuta sur le côté. James eu le souffle coupé en touchant le sol tandis que la souffrance irradiait dans le bras sur lequel il était tombé.
- James ! Sirius !
Il releva la tête pour voir Remus et Peter se précipiter vers eux puis il y eu un crac sonore, signe que quelqu'un venait de transplaner. Effectivement, le mangemort avait dû abandonner en voyant des renforts arriver.
James ignora la douleur de son épaule et se retourna. Son cœur s'arrêta une seconde. Littéralement.
- Sirius...croassa-t-il. Sirius !
Il sa laissa tomber à genoux à côté de son meilleur ami, étendu inconscient sur le sol. Il tenta de le secouer pour le réveiller.
- Sirius ! Patmol ! Allez, c'est pas drôle !
- James...
La voix de Remus peina à traverser le brouillard qui l'enveloppait.
- Le sort était pour moi...Il...Il m'a écarté...je...
- Ce n'est rien, James, on sait...
Mais James secoua la tête, la gorge serrée. Il ne savait pas combien de temps ils restèrent tous les trois dans cette ruelle à veiller sur Sirius mais à un moment d'autres voix s'ajoutèrent au tableau. Il crut en reconnaitre plusieurs, notamment des professeurs, et une autre encore plus familière, seulement il se sentait incapable de se concentrer sur ce qui se passait autour de lui.
- James... James, c'est Remus. Tu m'entends ? Les médecins sont là, il faut qu'ils emmènent Sirius.
Son premier de réflexe fut de défendre son meilleur ami, que personne ne l'approche, puis les paroles de Remus semblèrent prendre un sens lentement.
- Je...je vais avec lui.
- Je ne suis pas sûr....
- Je vais avec lui ! Répéta-t-il d'une voix ferme.
- Très bien, allez lève toi.
Les jambes tremblantes, James se remit debout et suivit les médecins dans un état second.
Chapitre XXXV : Les survivants
Il n'y avait pas eu énormément de blessé durant l'attaque au final. Une dizaine d'élève, dont Lily, avait juste quelques coupures superficielles provoquées par les éclats de verre des vitrines et Madame Pomfresh arrangea ça facilement. Parmi les blessés plus graves, on comptait Sirius et une fille de Serdaigle. Ils restaient pour l'instant tous les deux à l'infirmerie, inconscients. Tiberius Ackerley, le commentateur, et Lucinda avaient quant à eux été transportés à St-Mangouste pour deux jours par mesure de sécurité étant donné la nature plus sérieuse de leur blessure.
L'attaque s'était déroulée en trente minutes. Trente minutes de pure terreur pour tout le monde. Il était presque 18h désormais et l'agitation était légèrement retombée dans le château. Les Maraudeurs étaient encore à l'infirmerie malgré le fait que Pomfresh soit déjà venu au moins trois fois leur dire que les heures de visites étaient bientôt finies. A vrai dire, James refusait obstinément de bouger et Remus avait l'impression qu'il n'entendait même pas quand on lui parlait.
Au bout d'un moment, la porte en bois s'ouvrit en grinçant et les filles entrèrent. Elles étaient restées pendant près d'une heure avec les professeurs pour qu'ils recueillent leurs témoignages et s'assurent qu'elles allaient bien, mais dès qu'elles avaient été libres de partir elles s'étaient précipitées ici.
Le regard de Lily tomba sur les garçons immédiatement. Remus était assis à côté du lit, la tête dans les mains, et il se tourna vers elles en les voyant arriver. Perché sur le rebord de la fenêtre, Peter semblait regarder le parc d'un air vide. Quant à James... Son cœur se serra dans sa poitrine. Il était lui aussi assis près du lit, l'air hagard et très pâle. Il ne lâchait pas Sirius des yeux, ne paraissant même pas les avoir entendu entrer.
- Salut, chuchota Marlène. Ça va ?
- On est tous un peu fatigué mais oui...
- Et...pour Sirius ?
Remus haussa les épaules.
- Il est inconscient pour l'instant, l'infirmière a dit qu'il se réveillerait quand son corps aura suffisamment récupéré. Ça peut prendre une ou plusieurs journées.
Un lourd silence pesa quelques secondes.
- Qu'est-ce...qu'est-ce qui s'est vraiment passé ? Demanda finalement Alexia.
Elle tremblait sans pouvoir s'en empêcher. Elle n'avait jamais vu Sirius comme ça, aussi pâle et immobile. Paradoxalement, il avait aussi l'air paisible pour une fois, mais son sentiment de malaise ne disparut pas. Si elle avait pu elle aurait étranglé James d'avoir demandé à Frank de la forcer à rester au Trois Balais alors qu'elle aurait pu venir avec lui mais il avait l'air trop abattu pour qu'elle puisse s'y résoudre.
Remus mit du temps à répondre puis inspira.
- Je... Je ne sais pas trop. On était tous dans le magasin quand l'attaque a commencé, plusieurs personnes blessées sont arrivées pour se cacher. Sirius faisait le guet près de la vitrine. Avec Peter, je m'occupais de la cheville d'Anaïs et puis d'un coup il était partit. Je ne sais pas pourquoi. Un peu après, James a débarqué. Quand il a vu que Sirius n'était pas là, il est ressorti pour le chercher. Ils sont tombés sur un mangemort...On les a rejoints juste après la blessure de Sirius. Ensuite les médecins et les Aurors sont arrivés. Il y avait Mr Potter aussi mais il a dû repartir gérer ses équipes... C'est McGonagall qui nous a ramener au château. Sirius a été pris en charge tout de suite mais pas de changement depuis...
Alexia haleta en s'imaginant la scène, les larmes aux yeux.
- Il...
- C'est ma faute.
Tout le monde se tourna vers James, surpris. Il était tellement silencieux depuis tout à l'heure qu'ils l'avaient presque oublié, ce qui était très inhabituel. Pourtant James semblait toujours occulter les autres autour de lui et gardait son attention fixée sur son meilleur ami.
- C'est ma faute, répéta-t-il d'une voix atone. Le sort était pour moi, il m'a écarté à temps...je...
- James, ça suffit ! Dit Remus. Tu n'es pas responsable !
Cette inversion des rôles entre eux était étrange pour Remus. D'habitude, c'était James qui tentait de le convaincre que le poids de l'univers n'était pas sur ses épaules.
- Ah oui ? Alors pourquoi est-ce que ce n'est pas moi qui suis allongé dans ce lit ? J'aurais dû...j'aurais pu...
- James, vous étiez face à un mangemort.
- Et j'ai été complètement inutile...
- C'est faux !
Lily regarda longuement le jeune homme puis s'avança vers lui. Perplexe, il releva la tête en la voyant se mettre à sa hauteur et prendre sa main dans le sienne. Il remarqua qu'elle avait encore quelques coupures sur le visage à cause des éclats de verre de la vitrine.
- Tu n'as pas été inutile, souffla-t-elle avec ferveur.
- Mais...
La lueur de pure détermination dans ses yeux vert émeraude le fit taire.
- J'étais morte de peur là-bas. Je n'arrivais même plus à bouger ! Tu m'as pris la main, exactement comme ça, dit-elle en resserrant sa prise, et tu m'as dit de courir. Tu t'inquiétais pour tes amis mais pourtant tu as pris le temps d'aller me mettre en sécurité, tu m'as défendu contre les mangemorts...
- C'est toi qui en stupefixié un, coupa James.
- Laisse-moi finir, Potter. Peut-être que c'est moi qui a lancé le stupefix mais je n'en aurais jamais été capable si tu n'avais pas été avec moi. Sans toi, je pourrais moi aussi être dans ce lit en ce moment ou même à St-Mangouste.
- Ne dis pas ça...
- C'est la vérité. Tu m'as fait revenir à moi et sans toi je ne sais pas si je m'en serais sorti. C'est facile d'apprendre des sortilèges en cours, de réussir des tests. Toi, tu as fait plus. Tu es un grand sorcier.
- Mais Sirius...
Il s'étrangla sur le prénom, son regard déviant une seconde sur le lit. Lily secoua la tête.
- Sirius a fait son choix. Il ne l'aurait pas fait s'il ne tenait pas à toi.
Remus observa la scène, sidéré. Il le savait bien sûr. Lily avait toujours les bons mots, la douceur qu'il fallait. Il l'avait découvert quand elle avait appris sa lycanthropie. Elle pouvait remonter le moral d'une personne avec un sourire et lui montrer le meilleur en elle. C'était un don qui le fascinait.
Les autres devaient partager son sentiment car ils regardaient la jeune fille, émerveillés. Peter avait carrément l'air sur le point d'applaudir ou de faire une standing ovation à lui tout seul. Mais le plus touché était sûrement James qui fixait Lily avec admiration, un petit sourire aux lèvres.
**
*
Le lendemain matin, dès 9h, ils étaient tous de retour à l'infirmerie au chevet de Sirius. Madame Pomfresh n'avait même pas paru surprise de les voir et s'était contenté d'apporter des chaises supplémentaires. Malgré le fait qu'on soit lundi, les cours avaient été exceptionnellement annulés. Les Aurors étaient toujours à Poudlard et interrogeaient plusieurs témoins de l'attaque. Ce matin, la rumeur avait couru dans les couloirs que certains élèves seraient d'ailleurs impliqués. Cela faisait tellement échos aux agressions de ses derniers mois qu'un vent de panique et d'excitation se répandait parmi les personnes.
A ce moment même, une réunion se tenait entre les Aurors et les professeurs, attisant la curiosité. James n'avait pas eu de nouvelle de son père, probablement de retour à Londres, mais il lui avait envoyé une lettre tard hier soir et ne doutait pas de recevoir une réponse dans la journée, comme d'habitude.
- Dorcas ? Est-ce que tu as des nouvelles de Lucinda ? Demanda Marlène.
Elle culpabilisait un peu de ne pas avoir posé la question avant puisque leur inquiétude s'était un peu cristallisée sur Sirius. Adossée contre le mur, Dorcas parut blêmir.
- Non... Je...On m'a dit qu'elle avait transféré à St-Mangouste avec Tiberius Ackerley mais rien d'autre. Je suppose qu'elle ne va pas tarder à revenir...
- Je suis sûre que oui, rassura Alexia. Elle va traumatiser les infirmières avec son insolence et revenir en un clin d'œil.
- Ouais, c'est bien son genre...
- Et puis pareil pour Tiberius, je ne veux pas assister à un seul match sans ses commentaires ! Je m'ennuierai trop !
- Je croyais que tu venais aux matchs pour voir mon talent époustouflant, lança James.
- Même pas en rêve Potter !
Les petites disputes entre James et Lily semblaient avoir repris, ce qui fit lever les yeux au ciel à Remus. Ils étaient impossibles !
- Chut ! Vous allez réveiller Sirius...
- Trop tard mon pote, vous faites autant de bruit qu'un troupeau de centaure en colère.
Ils manquèrent tous de tomber de leur chaise et Dorcas trébucha sur ses pieds en sursautant. Peter émit même un couinement de surprise, ce qui fit rire Sirius.
- Vous devriez voir vos têtes !
- Sirius ! Hurla James. Bon sang ! Tu vas bien ? Tu veux un oreiller ? De l'eau ? Tu dois avoir faim...Tu veux que j'aille te chercher à manger en cuisine ? Du chocolat ? Ou alors...
- James, James !
- Quoi ? Tu as mal quelque part ?
- James, je vais bien.
Cette phrase parut faire s'arrêter James d'un coup.
- Tu...tu vas bien ?
- J'ai des courbatures et je suis un peu fatigué, c'est tout. Rien de grave. Pomfresh a bien fait son boulot.
- Oh merci Merlin alors, tes cheveux n'ont rien, lança Dorcas avec sarcasme. Je m'inquiétais pour ta coiffure parfaite, tu comprends.
- Ta sollicitude me touche, Meadowes.
Elle lui adressa un petit signe de tête. Ils éclatèrent tous de rire.
Pourtant, les deux plus bouleversés étaient sans nul doute James et Alexia. Ils le regardaient comme s'ils avaient peur qu'il retombe inconscient d'une seconde à l'autre. La jeune fille avait juste envie de se précipiter vers lui, de le serrer contre elle pour sentir son corps s'ajuster au sien comme avant et de l'embrasser à en perdre le souffle. Il y a encore une semaine, elle aurait sûrement agi comme ça mais aujourd'hui c'était impossible et elle en aurait crié de rage.
James n'eut pas sa retenu évidemment. Il se précipita vers son meilleur ami et l'engloutit dans une étreinte toute masculine dont seuls les garçons avaient le secret, nota Lily mentalement. Le temps qu'elle cligne des yeux, les Maraudeurs s'étaient joint à eux en riant.
- Tu es un inconscient, Patmol ! Cria Remus de sa plus belle voix de préfet. Qu'est-ce qui t'as pris de ressortir dehors ?
- Tu me connais...j'ai pas réfléchit...
Remus plissa les yeux. Il savait que Sirius ne lui disait pas la vérité sur les raisons qui l'avaient poussé à retourner à l'extérieur mais il n'insista pas.
- Vous êtes là depuis longtemps ?
- Depuis une heure à peu près...Les cours ont été annulé pour la journée.
- Sérieux ?
- Le monde s'arrête de tourner quand tu n'es pas là, Black, dit Dorcas.
- C'est une évidence !
- Ton ego, Sirius, rappela Remus.
- Il va très bien, merci !
- Tu aurais dû rester inconscient, tiens, ça nous aurait fait des vacances, se moqua Alice.
Ils continuèrent à discuter de banalité pendant une dizaine de minute avant que le sujet inévitable ne revienne dans la conversation.
- Sinon, vous avez eu des infos sur ce qui s'est passé à Pré-au-Lard ?
- Pas beaucoup non. On sait que ce sont des mangemorts qui ont attaqué, une dizaine apparemment. L'un deux a mis le feu à la poste mais des habitants ont réussi à l'éteindre. Les Aurors sont encore ici.
- Vraiment ?
- Ouais, ils sont en réunion avec Dumbledore. Il était furieux quand il a appris pour l'attaque !
- Ca ne m'étonne pas...Ton père est là aussi ?
- Non, répondit James, il est rentré à Londres. Je ne l'ai même pas vu. Mais je lui ai envoyé une lettre, peut-être qu'il m'a répondu. Je vais aller voir et je reviens après, d'accord ? Tu veux quelque chose de la cuisine ?
Lily faillit lui faire remarquer que c'était interdit avant de se raviser. Ce n'était pas le moment de leur faire la morale, elle reprendrait son rôle de préfète plus tard.
- Tout est mieux que le pudding à la fraise de l'infirmerie, dit Sirius.
- C'est sûr...je te ramène un pain au chocolat, promis !
- J'y vais aussi, intervint Marlène. J'ai un truc à faire.
Ils attrapèrent leurs affaires tous les deux avant de quitter la salle.
**
*
- Où est-ce que tu étais ?
Regulus se figea. La voix venait de claquer dans son dos et il savait qu'il ne pourrait pas y échapper.
- Livia...
- Non. Je ne veux pas t'entendre dire que tu as autre chose à faire. Tu restes là et tu me réponds, Regulus Black. Où est-ce que tu étais ?
Soupirant, il se retourna lentement. Livia était à quelques mètres de lui, les bras croisés sur la poitrine. Les cheveux tirés en arrière, ses yeux verts eau semblaient lui manger le visage. Elle avait l'air mortellement sérieuse en cet instant.
- Où est-ce que j'étais quand ?
- Ne fais pas l'imbécile, ça ne te va pas, dit-elle. Pendant l'attaque. Où est-ce que tu étais pendant l'attaque ?
- J'étais avec les jumelles...
Livia émit un rire sec qui ne lui allait pas du tout.
- Arrête.
- Quoi ?
- Arrête de me mentir comme ça. Tu n'étais pas avec les jumelles !
- Bien sûr que si...
- Alors explique-moi au nom de Merlin pourquoi est-ce que je ne t'ai pas vu étant donné que moi j'étais avec elles !
La puissance de sa voix résonna contre les murs et Regulus ferma brièvement les yeux.
- Livia...
- Je vais te tuer. Non en fait je vais d'abord tuer Rosier et ensuite toi !
- Tu ne sais même pas...
- Oh j'en sais assez ! Tu me crois idiote ? Tu crois que je n'ai pas compris ? Ce matin, il n'y avait personne du club de Rosier et comme par hasard tu n'étais pas là non plus. Tu étais avec eux, pas vrai ? Tu étais aussi avec eux pendant l'attaque, à faire exploser des vitrines pour terroriser des pauvres gens dans un village sorcier ?
Elle accentua le dernier mot, ce qui n'échappa pas à Regulus. Le message était clair.
- Tu ne comprends rien !
- Ne me sors pas cette excuse à la con !
Voilà. Là c'était mauvais signe. Livia n'était jamais vulgaire, si elle l'était maintenant c'est qu'elle devait être sacrément en colère et malheureusement c'était contre lui que sa colère était dirigée.
- Ne me sors pas cette excuse, répéta-t-elle. Ça marche peut-être avec McKinnon mais pas avec moi.
Long silence.
- Quoi ? Comment... ? Tu...
- Tu croyais vraiment que ça aussi je ne m'en rendrais pas compte ? Tes petites escapades avec une Gryffondor ? Réfléchis un peu Reg', on a les jumelles Zabini comme amies.
- Mais...
- Mais rien du tout. Si tu crois que je ne comprends pas alors tu te trompes sur toute la ligne. J'ai eu la même éducation que toi, j'ai entendu les mêmes discours sur les sangs-pur et leur suprématie. Sauf que contrairement à toi je ne compte pas me cacher derrière un mage noir ni des attaques pour me faire entendre. Tu es un lâche !
- Un lâche ? C'est ce que tu penses ? C'est toi qui est lâche à ne rien faire, à seulement débiter de grands discours. Ça ne fait pas bouger les choses !
- Et alors ? Je préfère être une lâche qu'un tueur dans ce cas.
- C'est n'importe quoi...
- Tu as tort. Merlin Regulus, comment est-ce que tu peux ne pas le voir ? Des gens ont été blessés ! Lucinda Talkabot, Serpentard et sang-pur je précise, est à l'hôpital. Ton propre frère est à l'infirmerie en ce moment même !
- Ce n'était pas nous, les mangemorts...
- Vous serez bientôt dans leurs rangs, ça ne fait aucune différence !
Il la regarda, la respiration haletante. Cependant, Livia n'avait pas l'air prête à abandonner.
- Tu te rends compte que ça devrait être toi auprès de ton frère, pas Potter ?
- On ne va pas aller sur ce terrain-là, Liv'.
- Pourquoi pas hein ? Potter a...
- Je me fiche de James Potter !
Elle plissa les yeux, consciente d'avoir trouvé un point sensible.
- On sait tous les deux que c'est faux.
- Arrête.
- Pourquoi est-ce que tu le déteste autant ?
- Il m'a volé mon frère ! Cria-t-il brusquement.
Livia resta sans voix face à la colère soudaine de Regulus. L'expression de douleur sur son visage contrastait tellement avec son masque de froideur habituelle qu'elle mit quelques secondes à reprendre, hésitante.
- Comment...comment ça ?
- Tu crois qu'avec mon frère on s'est toujours détesté ? C'est faux. Il fut un temps où il était mon grand frère, mon héros, où on partageait nos jeux d'enfants. Il me protégeait contre la colère de nos parents quand j'avais fait une bêtise. Et puis il a été à Poudlard. Je pensais le revoir pour noël mais ma mère était tellement en colère qu'il ait été réparti à Gryffondor qu'elle lui a interdit de remettre les pieds à la maison. Quand je l'ai enfin revu plusieurs mois plus tard, ce n'était plus le Sirius que je connaissais. Il avait changé. Il n'arrêtait pas de parler de James Potter, Potter par-ci, Potter par là. Tu aurais dû entendre l'admiration dans sa voix. Il rejetait toutes les valeurs de notre famille en bloc, moi y compris. La rupture a été définitive quand j'ai rejoint Serpentard.
Livia retint un frisson en entendant l'amertume dans la voix de Regulus. Ce dernier détourna les yeux, soudain conscient d'en avoir trop dit avant d'ajouter si doucement qu'elle faillit ne pas entendre
- Il s'était trouvé un autre frère tout simplement.
- Reg'...
- Quoi ? Tu veux encore me faire la morale ? Parce que franchement je ne suis pas d'humeur. C'est ma vie Livia. Je fais ce que je veux, tu n'as pas à me dire ce qui est juste ou non parce que non tu ne comprends dans quelle situation je me trouve. Tu es ma meilleure amie et ça ne changera pas mais seulement si tu acceptes ça, d'accord ?
Il n'attendit même pas la réponse et claqua la porte dans son dos, tremblant. Il avait l'impression d'être vidé de son énergie. Sans réfléchir, il se précipita en direction du troisième étage en courant. Il savait qu'elle serait là car ils s'étaient fixés rendez-vous et qu'elle viendrait malgré l'annulation des cours ainsi que tout ce qui s'était passé hier.
A vrai dire, il aurait dû se douter que Livia lui tomberait dessus comme ça, c'était à prévoir. Par contre, ce qu'il n'avait pas vu venir fut ce qu'il trouva en poussant la porte de la salle de classe vide.
Marlène était là, bien sûr. Néanmoins elle l'accueillit froidement.
- Désolé pour le retard, je...
- Tu y étais, n'est-ce pas ? Coupa-t-elle
- Pardon ?
- Tu étais à Pré-au-Lard avec les mangemorts.
- Bon sang, je ne vais pas ravoir cette conversation !
- Tu y étais ou non ? Répéta-t-elle.
- Non !
Ce mot parut la faire exploser.
- N'essaye pas de me mentir ! Je t'ai vu dans cette ruelle parler avec Rosier avant le début de l'attaque !
- Marlène...
- Je te faisais confiance. Tu m'avais promis que tu ne les rejoindrais pas !
- Tu ne comprends pas, ce sont des idéologies qui te dépassent, McKinnon.
Elle renifla dédaigneusement, les yeux embués de larmes.
- Peut-être que je ne suis pas issu d'une famille riche ou que mon père ne connait pas le ministre en personne, Regulus, mais je sais encore ce qui est bien ou mal. Il y a eu des blessés, des gens sont presque mort !
- C'est une guerre Marlène ! Hurla-t-il. Il n'y a pas de méchant ni de gentil, ce n'est pas blanc ou noir ! Je me bats pour ce que je crois juste !
- Te battre ? Te battre ? Tu te caches derrière un sorcier dont on ne connait pas le vrai nom, entouré de partisans aux visages masqués. C'est ce que j'appelle de la lâcheté.
Ces mots ressemblaient tellement à ceux de Livia que Regulus en resta sans voix un instant.
- Par Merlin, Regulus ! S'exclama-t-elle avec hargne. Tu vaux mieux que ça !
- Ce n'est pas vrai. Toute ma vie, depuis ma naissance, Marlène, j'ai été élevée comme ça. Si tes parents t'apprenaient à respecter les autres, les miens me disaient que les sorciers étaient supérieurs aux moldus. Je n'ai pas d'autres voies. Je ne peux pas aller à l'encontre de siècle de tradition
- Bien sûr que si... Sirius l'a bien fait.
Un éclat de colère s'alluma dans les yeux gris du jeune homme.
- On y revient toujours hein ? Sirius le courageux, Sirius le provocateur, celui qui a réussi à braver les convenances. Personne n'a jamais pensé que c'était moi qui avais eu le courage de rester ? Réfléchis-y McKinnon. J'ai vu mon frère claquer la porte sans se retourner et j'aurais pu le suivre mais je ne l'ai pas fait ? Tu sais pourquoi ? Parce que je tiens encore à ma famille. Ils ne sont pas parfaits, seulement ça reste la mienne. Il n'y a rien de plus précieux que les liens du sang. Il fallait un héritier, quelqu'un qui endosse le rôle que ma mère avait voulu et j'étais là. J'aime mes parents malgré tous leurs torts. Sirius n'a fait que se sauver, fuir, moi je suis resté. Alors Marlène ? Qui a été le plus courageux de nous deux au final ?
Il y eu un très grand moment de flottement. Puis Marlène traversa la pièce en deux enjambées et jeta ses bras autour de son cou, la tête contre son épaule. Mécaniquement il referma ses bras sur elle alors qu'elle commençait à pleurer.
- J'ai eu peur, avoua-t-elle doucement. J'ai eu peur qu'il te soit arrivé quelque chose.
- Marlène...
- Ne te pas fait pas d'illusions, je suis toujours en colère contre toi, Regulus Black ! Et ça risque de durer un moment, je te préviens.
- Mais...
- Non, ne dit rien. Tiens moi juste fort.
Regulus obéit sans discuter, épuisé. Ces deux filles allaient l'achever.
Après quelques minutes, Marlène se dégagea lentement et sans un regard, elle sortit de la salle, la porte se refermant sinistrement derrière elle. Il sut à cet instant qu'il venait de changer les choses entre eux de manière irrévocable.
**
*
James referma la porte dans son dos et s'avança dans le couloir, puis se sépara de Marlène qui partit dans une autre direction. La volière n'était pas très loin, à peine dix minutes. Les mains dans les poches, il repensa à la journée d'hier qui était assez flou dans son esprit. L'attaque lui avait semblé à la fois rapide et incroyablement longue, comme si le temps s'était dérèglé pendant trente minutes. Cette nuit, après avoir été jeté dehors par Madame Pomfresh, il avait à peine fermé l'œil. La voix glaciale et moqueuse du mangemort lui restait en tête malgré ses tentatives pour l'oublier. Pourtant, le fait que Sirius se soit réveillé l'apaisait un peu.
Dès qu'il entra dans la volière, il repéra sa chouette qui l'accueillit en lui mordillant affectueusement le doigt. Aucune lettre n'était attachée à sa patte et James supposa que son père n'avait pas encore eu le temps de lui répondre avec tout le travail supplémentaire à cause de l'attaque.
Ensuite, il fit un crochet par la cuisine. Les elfes se précipitèrent vers lui immédiatement. James crut un instant qu'il allait ressortir avec assez de nourriture pour nourrir tous les animaux de la Forêt Interdite pendant au moins un an. Heureusement, il réussit à négocier de ne prendre qu'un pain au chocolat et une pomme, ce qui serait toujours mieux que le pudding à la fraise.
- Hé ! Héla une voix.
James mit une seconde à comprendre que c'était lui qu'on appelait.
- Hé toi ! Attends !
Surpris, il se retourna. Une jeune femme arrivait vers lui à grands pas. Elle n'était pas de Poudlard, ça il en était sûr car il ne l'avait jamais vu et elle n'avait pas d'uniforme, et pour cause elle devait avoir vingt-cinq ans à peu près. Elle portait une robe de sorcière noire toute simple, sa baguette à portée de main contre sa hanche. Ses cheveux bruns, coupés courts en dégradé, entouraient son visage couvert de tâches de rousseurs avec un nez retroussé qui lui donnait un air rieur. Elle était jolie, comme un mélange de femme assurée et d'enfant espiègle. Etrangement, elle lui rappelait quelqu'un mais il n'aurait pas su dire qui.
- Excuse-moi de te déranger, je vois que tu as à manger avec toi. Tu sais où je peux en trouver aussi ?
- Euh...aux cuisines.
- Sans blague ?
Elle rigola.
- J'ai beau avoir passé sept ans dans ce château, je n'ai jamais su où étaient les cuisines.
- Juste un peu plus loin, indiqua-t-il, il suffit de chatouiller la poire du tableau accroché là-bas. Tu n'as qu'à demander aux elfes.
- Génial, merci ! Je meurs de faim !
- Tu n'as pas pris de petit-déjeuner ?
James réalisa que cette question était un peu étrange en face d'une inconnue mais qu'importe.
- Non, je n'ai pas eu le temps, répondit-elle, je devais aller à la réunion.
Cette phrase le fit dresser l'oreille. Il la regarda plus attentivement, curieux. C'est alors qu'il remarqua l'insigne violette épinglée sur le devant de sa robe.
- Tu es une Auror !
- Apprentie Auror, corrigea-t-elle. C'est Alastor Maugrey qui m'a amené aujourd'hui pour que je vois ce qu'est vraiment le terrain.
Elle avait l'air assez enthousiaste à cette idée, même si elle conservait une certaine retenue. James lui en fut reconnaissant. L'attaque n'était pas quelque chose dont on pouvait se réjouir et elle semblait parfaitement le comprendre.
- Et les Aurors ne te nourrissent pas ? Plaisanta-t-il.
- Oh si, Dumbledore m'a gavé de bonbon au citron pendant la réunion. Tu crois que c'est ça sa stratégie face au mangemorts ? Les bombardés de sucreries jusqu'à ce qu'ils meurent de carries ?
James éclata de rire.
- Il en serait capable...
- Ouais. En fait, je m'appelle Gemma Ackerley, dit-elle en lui serrant la main.
- Ackerley ? Comme...comme Tiberius ?
- C'est mon petit frère.
Son sourire vacilla.
- Je...Je sais qu'il a été blessé hier et qu'on l'a transféré à St-Mangouste. Avec tous les trucs des Aurors, je n'ai pas eu le temps d'appeler mes parents pour prendre des nouvelles. Tu...tu sais quelque chose ?
- Non désolé. Mais je connais Tiberius, il est génial.
- Tu dis ça parce que tu n'as jamais eu à vivre sous le même toit que lui, répliqua Gemma en riant. Il n'arrête pas de commenter tous mes faits et gestes quand je rentre à la maison, soi-disant pour s'entraîner pour ses matchs.
- C'est bien un truc qui lui ressemble ! Oh et je suis James, James Potter.
Elle haussa un sourcil.
- Potter hein ? Un lien avec mon patron ?
- C'est mon père, avoua-t-il.
- Je me disais aussi... Tu lui diras que je suis une employée géniale, pas vrai ?
- Je lui dirais surtout que ces stagiaires meurent de faim.
- Si tu arrives à m'obtenir une machine à café, je te béni !
James ria. Cette fille lui plaisait beaucoup, au moins elle avait le sens de l'humour de son frère.
- Bon, je dois y aller. Si je veux avoir le temps d'aller manger avant que la réunion ne reprenne, je dois me dépêcher.
- Pas de problème.
- Ça a été un plaisir, James.
- Au revoir Gemma.
Chapitre XXXVI : Les Aurors s'en mêlent
James patientait dans le bureau depuis maintenant une bonne demi-heure et il devait avouer qu'il n'avait pas l'habitude de rester immobile aussi longtemps. De toute façon il n'avait pas le choix. Les Aurors continuaient leurs interrogatoires des témoins de l'attaque de Pré-au-Lard et c'était à son tour. Sirius aurait dû lui aussi être interrogé mais sa sortie de l'infirmerie avait été décalé pour s'assurer qu'il soit complètement guéri. Au moins il aurait de la compagnie car Lucinda et Tiberius étaient de retour de St-Mangouste depuis ce matin. L'hôpital les avait laissé sortir, bien qu'ils ne soient pas encore tout à fait rétablis, d'où leur séjour à l'infirmerie. James se demandait qui de Madame Pomfresh ou des élèves allaient ressortir traumatisé de cette cohabitation.
Il se demanda un instant quel Auror allait bien pouvoir l'interroger. Il en connaissait quelques-uns, grâce au travail de son père notamment. Peut-être que ça serait Gemma Ackerley mais il doutait qu'on laisse cette tâche à une simple stagiaire. Du moment que ce n'était pas Alastor Maugrey tout lui allait. Il se souvenait encore de sa rencontre avec l'Auror de légende quand il avait huit ans lors d'une fête organisée chez lui. Il avait été terrifié par l'homme à l'œil magique et au visage couturé de cicatrice et avait refusé de descendre au salon pendant toute la soirée.
Alors que l'attente commençait à être longue, il pianota du bout des doigts sur le bord de sa chaise. Il allait appeler Sirius avec le miroir à double sens quand la porte s'ouvrit brusquement. Pas trop tôt.
James se retourna et se figea en reconnaissant l'homme qui venait d'entrer, une pile de dossier sous le bras.
- Papa ?
- James...
- Qu'est-ce que...qu'est-ce que tu fais là ?
- Je suis revenu une journée pour avoir une discussion avec Dumbledore sur les nouvelles mesures de protections de l'école. Quand j'ai appris qu'on t'interrogeait, je me suis dit que j'allais le faire moi-même.
James sourit.
- Je ne pensais pas te voir...
- J'étais là pourtant juste après l'attaque.
- Ouais... Je ne me souviens plus trop...
- Je m'en doute, tu n'avais pas l'air bien. Comment va Sirius ?
- Mieux, il s'est réveillé hier.
- Tant mieux, ta mère et moi on s'inquiétait pour lui, avoua-t-il.
James regarda plus attentivement le visage de son père. Il approchait de la soixantaine et ses cheveux commençaient à être plus gris que noirs désormais mais James ne l'avait jamais considéré comme vieux. C'était encore un homme vigoureux, en bonne santé. Il avait cette lueur malicieuse dans le regard, la même que son fils, et un air chaleureux en toute circonstance. Pourtant, toute cette affaire, la blessure de Sirius incluse, semblait l'avoir fatigué car son visage était marqué par le manque de sommeil et l'inquiétude.
- Papa...qu'est-ce que tu veux dire par « de nouvelles mesures de protections » ?
- Hum... Disons que certains Aurors vont rester encore un peu dans le château ; tu sais, pour votre sécurité.
- Oh... Dumbledore est d'accord ?
- Il n'a pas aimé l'idée tout de suite mais finalement il a reconnu que c'était dans l'intérêt des élèves. Tous tes amis vont bien ?
- A part Sirius ? Oui ça va. Un peu secoué. Notre présentateur de Quidditch est à St-Mangouste...
Mr Potter hocha la tête.
- Le jeune Ackerley ? J'en ai entendu parler, sa sœur fait partie de nos équipes.
- Gemma ? Ouais, je l'ai croisé hier. Elle réclame une machine à café pour les stagiaires.
Cela fit éclater de rire Mr Potter et James sourit, heureux d'avoir réussi à le dérider un peu. Il avait toujours eu une relation spéciale avec son père, qui était son héros depuis tout petit. Il savait qu'il pouvait tout lui confier et qu'il serait toujours là pour lui.
- Donc je dois faire quoi ? Demanda-t-il soudain. Une déposition ou un truc comme ça ?
Mr Potter sourit.
- Non, contente-toi juste de ma dire ce que tu as vu c'est tout.
- Pas grand-chose, c'est un peu flou...
- Essaye toujours, l'encouragea-t-il.
James se cala contre le dossier de sa chaise et repensa à la sortie d'il y a deux jours. La première chose qui lui vint à l'esprit fut le corps de Sirius, immobile sur le sol, mais il se força à se concentrer sur le début.
- J'étais devant chez Honeydukes quand l'attaque a commencé, raconta-t-il doucement. Il n'y avait rien d'anormal, je discutais juste avec Evans quand...
- Lily Evans ?
- Ouais...
- On a recueilli son témoignage hier, dit Mr Potter en fouillant dans sa pile de dossiers. Ce n'était pas la fille pour qui tu avais le béguin dont Peter nous a parlé à noël ?
- Papa !
- D'accord, continu.
James tenta d'ignorer l'air moqueur de son père et reprit :
- Je discutais juste avec Evans quand la vitrine a explosé. On s'est jeté à terre et c'est là que je les ai vu. Il y avait trois mangemorts au bout de la rue, le visage masqué. Ils jetaient des sorts un peu au hasard. Les gens se sont mis à courir et à crier, c'était la panique partout. Evans et moi, on s'est dirigé vers les Trois Balais...
- Pourquoi ne pas être rentré chez Honeydukes pour vous mettre à l'abris ?
- Nos amis étaient là-bas, on voulait s'assurer qu'ils allaient bien.
- James...
- Je sais, ce n'était pas prudent.
Mr Potter renonça à lui faire la morale, sachant que ça ne servirait à rien. Il connaissait son fils. D'un signe de tête, il lui indiqua de poursuivre.
- Un mangemort a essayé de nous jeter un sort sur le chemin mais Evans a réussi à le stupéfixier. Quand on est arrivé, j'ai vu que Sirius, Remus et Peter n'étaient pas là alors je suis repartie. Il y avait de la fumée un peu plus loin, je ne sais pas...
- On soupçonne Rabastan Lestrange d'avoir mis le feu à la poste, expliqua son père. Malheureusement, nous n'avons pas assez de preuves.
- Evidemment, marmonna James. Bref, je suis allé jusqu'à Scribenpenne et j'ai croisé un mangemort. Il ne m'a pas vu arriver, du coup j'ai pu lui lancer un stupéfix. Quand je suis arrivé au magasin, Sirius n'était pas là donc je suis retourné le chercher. Je l'avais trouvé mais un mangemort nous est tombé dessus. Il... Il nous connaissait.
- Comment ça ?
- Il savait que j'étais ton fils et que Sirius était l'héritier des Black. Il avait l'air de...s'amuser.
James cracha le dernier mot, tremblant de colère. Il déglutit et fit une pause, le temps de se ressaisir, reconnaissant que son père ne l'interrompe pas.
- Ensuite, il a paru perdre patience. Il m'a jeté un sortilège informulé mais...mais Sirius m'a poussé. Je n'ai pas compris sur le coup. Quand je me suis relevé, Remus et Peter arrivaient vers nous et Sirius était blessé. Le mangemort a juste transplané. Dix minutes plus tard, les médecins sont arrivés. Tu étais là.
- Oui, j'étais là. Tu ne m'as vraiment pas vu, n'est-ce pas ?
- Je...non.
- Très bien... Je pense que j'ai tout.
- Je peux y aller alors ? J'ai promis à Sirius de repasser à l'infirmerie avant le déjeuner.
- Tu ne dois pas retourner en cours ?
Le petit sourire faussement innocent de son fils donna une réponse à Mr Potter qui se contenta de secouer la tête en ramassant ses dossiers.
- On va faire comme si je n'avais rien dit, d'accord ? Ta mère ne doit rien savoir.
James éclata de rire puis se leva d'un bond. Alors qu'il allait s'en aller, son père le rappela une dernière fois.
- Et James ?
- Hum ?
- Ce n'était pas ta faute.
Il se figea, la main sur le chambranle de la porte.
- Merci...
**
*
Avec un dérapage plus ou moins contrôlé, Dorcas tourna à l'angle et accéléra. Elle sentait un poing de côté qui commençait à se former mais elle l'ignora. Elle avait appris il y a dix minutes que les blessés de St-Mangouste avaient été rapatrié à l'infirmerie de Poudlard maintenant qu'ils allaient mieux. Or, cela signifiait que Lucinda était de retour. Dès qu'elle avait entendu la nouvelle, Dorcas avait décollé de la salle commune sans prendre le temps de rassembler ses affaires, laissant à ses amies le soin de s'en occuper. La simple perspective de revoir sa petite amie lui donnait une boule à l'estomac. Elle refusait de l'admettre devant les autres mais elle s'était inquiétée horriblement pendant ces trois derniers jours.
Alors qu'elle dévalait les marches, Dorcas heurta quelqu'un au passage.
- Fais attention Meadowes ! Grommela Kevin Mells.
- La ferme ! Répliqua-t-elle sans s'arrêter.
Elle ne se retourna pas pour voir son expression indignée et continua sa course, ses pieds frappant le sol de pierre avec force. Dès qu'elle arriva dans le couloir de l'infirmerie, le nœud dans son ventre sembla se resserrer.
Devant la porte, un Auror d'une trentaine d'année montait la garde. Il n'était pas rare d'en croiser un depuis l'attaque puisqu'ils avaient investi le château afin de protéger l'école et les élèves. Celui-là se redressa en voyant la jeune fille s'avancer vers lui et il se redressa maladroitement. Dorcas était sûre que si elle était arrivée une demi-heure plus tard il aurait été endormi ou mort d'ennui, au choix.
- Bonjour, dit-il.
- Bonjour, je viens voir Lucinda Talkalot. Est-ce que je peux entrer ?
Il lui adressa un sourire d'excuse et secoua la tête.
- C'est réservé à la famille mademoiselle, désolé.
- Je suis sa sœur ! Mentit Dorcas.
Elle ne savait pas trop d'où ce mensonge venait, il lui était venu spontanément faute de trouver mieux.
L'Auror haussa d'ailleurs un sourcil, comparant sûrement les yeux bleus et les cheveux blonds de la Serpentard aux siens, sombres comme de l'encre.
- Vraiment ? dit-il sceptique.
- Vous n'avez jamais entendu parler de l'adoption ? Répliqua-t-elle d'une voix cassante.
Le pauvre homme parut mal à l'aise, semblant hésiter un instant mais finalement il secoua la tête à nouveau.
- Désolé mademoiselle, ce sont les ordres.
- De qui ?
- Le professeur Dumbledore, Alastor Maugrey et Fleamont Potter.
Dorcas ravala un commentaire acerbe, consciente que ça ne l'aiderait pas d'insulter le directeur ni un des Aurors les plus puissants et encore moins le chef du bureau des Aurors, qui était aussi accessoirement le père de James.
- Merci quand même, marmonna-t-elle sèchement.
Son sac accroché à son épaule, elle tourna les talons, frustrée.
**
*
Le lendemain matin, Alexia beurrait sa tartine, encore à moitié endormie. Après leur week-end prolongé à cause de l'attaque et de l'annulation des cours, le réveil de ce matin avait été particulièrement difficile. A vrai dire, ces trois derniers jours avaient été très étrange. La fin de journée et la soirée de dimanche, après le retour de Pré-au-Lard, était passé dans une sorte de brouillard. Elle ne retenait que les murmures effrayés des autres ainsi que son inquiétude qui l'avait empêché de dormir toute la nuit. Le lundi, l'ambiance dans le château avait été un peu différente, surtout à cause de l'arrivée des Aurors. Les professeurs semblaient courir un peu partout pour assister à des réunions et les premières rumeurs avaient commencé à circuler sur les mangemorts ou les élèves soupçonnés d'avoir pris part à tout ça. Personnellement, Alexia retenait surtout les longues heures d'attente à l'infirmerie après son interrogatoire, assez inutile puisqu'elle s'était réfugiée aux Trois Blais pendant l'attaque. Le plus angoissant avait été de ne pas savoir si Sirius allait se réveiller. Le visage sans expression de James restait surtout gravé dans sa tête.
- Tu me passes la confiture ?
- Hein ?
- Je disais, répéta Dorcas avec impatience, tu me passes la confiture.
Lily soupira en voyant qu'Alexia ne réagissait pas et se pencha pour attraper elle-même le pot elle-même.
- Tu n'as pas besoin d'être désagréable non plus tu sais ?
- Je suis comme d'habitude...
- Non, tu es comme avant, corrigea Marlène.
- Avant ?
- Avant Lucinda, précisa Alice. Je suis sûre qu'elle va bien alors arrête d'être de mauvaise humeur. Et toi Alex, essaye de suivre nos conversations, vous avez l'air de zombies les filles !
Dorcas plongea violemment sa cuillère dans la confiture comme si cette dernière était responsable de ses malheurs.
- J'aimerai t'y voir si c'était Frank...Aïe !
Elle se courba en avant pour frotter son tibia douloureux après le coup de pied « subtil » de Lily sous la table.
Alexia tourna la tête, se désintéressant de la conversation. Le long des murs, trois Aurors se tenaient alignés, le dos droit et l'air sérieux. Ils semblaient prêts à réagir à la première menace qui franchirait les portes de la Grande Salle, comme si Voldemort avait monté une ruse pour déjouer la sécurité et allait soudain surgir dans un uniforme d'écolier en prétextant rendre son devoir de métamorphose en retard. A vrai dire, le seul véritable danger aurait pu être les mauvais tours de Peeves.
- Alex...
- Quoi ?
- Regarde !
Elle se retourna sur son banc pour voir ce que Marlène lui montrait avec fébrilité. Son souffle se bloqua et elle se figea. Sirius, Lucinda et Tiberius venaient d'arriver tout simplement. Ils avaient tous meilleures mines et à part un pansement sur la pommette de la Serpentard, personne n'aurait pu deviner qu'ils avaient été cloués au lit depuis trois jours.
- Bah alors ? Lança Sirius, amusé. On n'a pas le droit à un retour digne de ce nom ?
A peine eu-t-il finit sa phrase que James bondit sur ses pieds, vite suivit de Remus et Peter. Ils traversèrent la Grande Salle et se jetèrent sur leur meilleur ami, l'engloutissant dans une étreinte avec des éclats de rire. A la table de Serdaigle, plusieurs personnes se levèrent pour aller rejoindre Tiberius en criant de joie. Même Gemma Ackerley, postée près d'une porte dérobée derrière les professeurs, abandonna sa tâche pour venir serrer son petit frère contre elle. Un de ses collègue parut vouloir l'arrêter mais renonça une seconde plus tard, l'air attendrit.
Alexia resta assise à sa place, incapable de bouger. Elle entendit un bruit sourd et elle vit soudain Dorcas passer devant elle en courant. Elle n'eut pas le temps de comprendre ce qui se passait avant que la brune ne dépasse Sirius et Tiberius sans un regard, ce qui aurait été comique dans une autre situation, et ne se plante devant Lucinda. La Serpentard ouvrit la bouche mais n'eut pas le temps de dire quoique ce soit. Dorcas venait de la saisir par la taille et plaqua ses lèvres sur les siennes.
Un grand silence s'abattit sur la salle tandis que tous les regards se tournaient vers les deux filles. Lucinda parut ne pas savoir comment réagir pendant une seconde avant de lui rendre son baiser, sa main s'accrochant derrière son cou pour les rapprocher.
- Pourquoi je ne suis jamais préparé pour ce genre de scènes ? Murmura Marlène, les yeux écarquillés.
- On t'enverra une lettre avec deux semaines d'avance la prochaine fois, promit Lily.
Alexia sourit. Les deux jeunes filles semblaient perdues dans leur propre monde sans se soucier des murmures des élèves dans la salle qui commentaient la scène. Puis, sans se préoccuper d'avantage des autres, elles sortirent, main dans la main et Alexia était sûre qu'on ne les reverrait pas jusqu'au début des cours. Elles avaient du temps à rattraper après tout.
Alors que les garçons venaient se rassoir à la table, elle eut la surprise de voir Sirius s'approcher d'elle. Figée de stupeur, elle le regarda en clignant des yeux.
- Hé...
- Salut, souffla-t-elle. Tu...tu vas bien ?
Il haussa les épaules, les mains dans les poches.
- J'ai réussi à échapper à Pomfresh alors oui, plaisanta-t-il.
- Je suis contente...tu nous as fait peur.
- Ouais... Euh...Ecoute, Alex, est-ce qu'on pourrait parler ?
Alexia resta sans une voix une seconde. Il lui demandait si elle voulait lui parler ? Sérieusement ? Elle lui en aurait filé une claque tellement la question sonnait stupide. Ça allait faire une dizaine de jour qu'elle voulait s'expliquer auprès de lui tandis qu'il l'évitait avec soin et il osait lui demander si elle était d'accord. Les garçons...
- Evidemment, répondit-elle précipitamment. On peut...
Elle commença à se lever mais Sirius l'arrêta.
- Pas maintenant, j'ai un truc à faire. Mais ce soir, après les cours ?
- Oui, d'accord !
Il parut soulagé et hocha la tête avant de se diriger vers James pour lui glisser quelque chose qu'elle n'arriva pas à entendre. James fronça les sourcils mais Sirius était déjà repartit en direction des portes et elle le perdu de vu quand il passa dans le hall.
- James !
- Ouais ?
- Où va Sirius ?
- Oh...il avait un truc à faire.
Alexia haussa un sourcil devant cette réponse évasive. Alors qu'elle allait insister, curieuse, Lily lui tapa le bras et lui désigna la table des professeurs d'un coup de menton. Alastor Maugrey, le célèbre Auror, venait de monter sur la petite estrade pour s'entretenir avec Dumbledore. Maugrey était facilement reconnaissable et sa présence dans le château avait suscité beaucoup d'intérêt. Il fallait dire que son apparence ne passait pas inaperçu avec son œil bleu magique qui semblait voir tout, partout et tout le temps, ainsi que son visage couturé de cicatrice. D'ailleurs quand il s'avança vers les élèves, le silence tomba encore plus rapidement que d'habitude.
- Silence, aboya-t-il pour faire taire les dernières conversations. Je pense que ce n'est un secret pour personne qu'il y avait des soupçons de participations d'élève de cette école lors de l'attaque de Pré-au-Lard. Après divers interrogatoires et témoignages, plusieurs suspects se sont détachés du lot. Nous allons devoir leur parler plus amplement...
La légère menace derrière ces mots n'échappa à personne et un frisson parcourut la salle. Dumbledore parut le remarquer car il se leva à son tour, sa silhouette forte mais toujours bienveillante se dressant comme un mur protecteur.
- S'il vous plait, gardez votre calme. N'oubliez pas que l'union est la plus puissante arme que vous ayez face aux ténèbres.
Alexia, habituée aux discours du même genre de la part du directeur sur l'amour, attendit la suite. Maugrey commença à énumérer des noms. Les murmures reprirent à mesure que les personnes étaient dévoilées et quittaient la salle accompagnées d'un professeur et d'un Auror. La plupart était des Serpentard, particulièrement du groupe de Rosier, même si ce dernier ne fut pas appelé, sans grande surprise. Les élèves avaient dû avoir peur de le dénoncer durant les interrogatoires. Rosier regardait ses alliés se faire démasquer un à un, impassible.
Marlène poussa un soupir de soulagement en constatant que Regulus n'était pas appelé. Il n'avait participé qu'à l'attaque, pas aux agressions des nés-moldu au cours de l'année, et cela avait sans doute contribué au fait qu'il soit passé entre les mailles du filet. Elle ne lui avait pas reparlé depuis leur confrontation le lendemain de l'attaque et à vrai dire elle n'en avait pas envie. Certes, sur le coup elle l'avait pris dans ses bras, soulagé qu'il soit indemne, mais ça n'empêchait pas qu'elle restait en colère contre lui pour avoir trahit sa confiance.
Dans le lot finalement, il y avait quand même deux Poufsouffle et trois Serdaigle, mais aucun Gryffondor. James jura à voix haute.
- Je vous jure que quand j'attraperai le traître...grommela-t-il.
- Les Aurors vont s'en charger, tenta de l'apaiser Remus.
- Mais on est si proche de l'avoir, les indices...
- Quels indices ? Intervint Lily.
James se tourna vers elle. Visiblement il avait oublié sa présence à ses côtés et ça montrait bien à quel point cette affaire le perturbait.
- On a ressemblé plusieurs choses qui pourraient nous mener au traître de Gryffondor.
- Vraiment ?
- Ouais !
- Et vous avez évidemment respectez le règlement pendant toute votre enquête ?
James se passa une main dans les cheveux en souriant, penaud.
- Plus ou moins...
Lily secoua la tête mais sourit également. Le fait que les élèves responsables de l'attaque se soient fait « arrêtés » l'avait mis trop de bonne humeur pour qu'elle se lance dans un laïus moralisateur contre Potter.
Soudain, la cloche sonna. Avec la scène qui s'était jouée ce matin, personne n'avait vu les minutes passées et les cours n'allaient pas tarder à commencer. Lily sauta sur ses pieds et attrapa son sac, délaissant ses tartines. Elle avait son option de runes dont la salle se trouvait à l'autre bout du château et il fallait qu'elle se dépêche. En voyant que Remus trainait à se séparer de ses amis, elle se décida à partir toute seule. Il la retrouverait de toute façon devant la salle dans une dizaine de minute.
Lily monta les escaliers quatre à quatre. Par une fenêtre en alcôve qui donnait sur le parc et elle repéra Dorcas et Lucinda qui se baladaient ensemble en riant. Quelque chose lui disait que les deux filles ne seraient sûrement pas présentes pour leur premier cours.
- Evans ?
Elle se retourna en sursautant, la main sur la poitrine.
- Oh par Merlin tu m'as fait peur !
Kevin Mells, le batteur de l'équipe de Quidditch, s'avança vers elle.
- Je peux t'aider ?
- Je pense...
- Pas de problème mais fais vite, je dois aller en cours sinon je vais être en retard.
Elle piétina sur place, impatiente. Ça ne la dérangeait pas d'aider ses camarades mais elle ne connaissait pas vraiment le cinquième année et elle devait avouer qu'elle était plutôt pressée.
- Je t'ai entendu parler avec Potter juste avant la sonnerie, dit-il. Tu sais quelque chose ?
- Quoi ? Sur le supposé traître de notre maison ? Non rien...pourquoi ?
- Qu'est-ce que Potter sait alors ? Je l'ai entendu en parler !
Il paraissait agité, presque nerveux, et elle comprit trop tard. Kevin sembla remarquer la lueur de reconnaissance dans son regard.
- Je suis désolé Evans.
Lily se figea. Son cerveau sembla se bloquer une seconde puis il leva sa baguette vers elle, l'air déterminé.
- Avance, ordonna-t-il. Et ne fait pas un bruit.
Chapitre XXXVII : Au secours de Lily
Heureusement qu'ils n'avaient pas cours l'après-midi parce que l'ambiance de la matinée était déjà à elle seule suffisamment tendue. Alexia récapitula la situation dans sa tête encore une fois. De toute façon, Binns déblatérait toujours sur la fameuse guerre de Gobelins -ou du moins l'une d'entre elles puisqu'il y en avait eu une bonne dizaine dans l'histoire et un peu toujours pour les mêmes raisons- et donc elle ne culpabilisait pas vraiment de ne pas écouter.
Depuis la fin de leur petit déjeunée et le retour des élèves blessés, Sirius n'était pas revenu de son escapade et avait déjà loupé les trois premières heures. Ce n'était pas comme s'il ne séchait jamais mais, cette fois-ci, même James semblait nerveux, trépignant d'impatience sur sa chaise. Il jetait des coups d'œil à l'horloge sans arrêt et Alexia savait que si Lily avait été là elle en aurait été exaspérée. Car oui justement Lily aussi était aux abonnés absents ! Et si on pouvait encore trouver des excuses pour Sirius en invoquant la force de l'habitude, c'était plus surprenant pour Lily Evans.
Remus était revenu du cours de runes en disant que Lily n'y était pas non plus à la première heure, elle avait également loupé le double cours de métamorphose et personne ne semblait l'avoir vu depuis qu'elle avait quitté le petit déjeuner vers 8h30. Les filles avaient supposé qu'elle était malade, sûrement à l'infirmerie, même si Alexia trouvait ça un peu étrange étant donné qu'elle allait très bien ce matin.
En résumé, Sirius et Lily s'étaient volatilisés, ce qui était un mystère pour tous. Finalement, à midi pile, la sonnerie retentit et les élèves bondirent sur leurs pieds. Certains étaient encore à moitié endormie que James était déjà à la porte, marchant à toute allure comme s'il était monté sur ressort.
- Remus ! Appela Alexia. Où est-ce que...
- On va chercher Sirius, je pense qu'il s'est passé quelque chose, répondit-il précipitamment, à moitié hors de la salle de classe. Je te tiens au courant.
- Mais...
Trop tard. Les Maraudeurs venaient de s'enfuir à toute jambes tandis que Binns donnait les devoirs pour la semaine prochaine sans que personne n'y prête attention.
- Alex ? Tu viens ? Appela Alice. On doit aller voir si Lily est à l'infirmerie.
- J'arrive !
Alexia attrapa son sac et emboîta le pas à ses amies. Dorcas et Marlène étaient devant, en train de débattre pour savoir ce qui avait bien pu arriver à Lily.
- Elle avait peut-être une réunion des préfets ?
- En plein milieu des cours ? Alors que Remus n'était pas courant ?
- Oui bon d'accord, concéda Marlène. Peut-être qu'elle est juste malade alors !
- Elle était en pleine forme ce matin !
- Je ne suis pas devin, Dorcas... Elle est peut-être en train de rédiger un devoir dans notre chambre et elle était tellement absorbé par la potion qu'elle a oublié qu'on avait cours...
- Ça serait tellement lyliesque, commenta Alice en reprenant l'adjectif de James.
Alexia sourit, même si elle avait des doutes sur cette dernière hypothèse un peu loufoque. Au prochain tournant, elles se séparèrent. Alice et Marlène se dirigèrent vers l'infirmerie pour vérifier au cas où tandis qu'elle allait à leur dortoir avec Dorcas. C'étaient les deux lieux les plus probables pour trouver Lily.
Il leur fallait une petite dizaine de minute pour rejoindre la tour de Gryffondor, aussi Dorcas engagea elle-même la conversation en voyant qu'Alexia semblait ailleurs.
- Tu n'as toujours pas parlé à Sirius ?
- Quoi ? Oh non...enfin pas encore, il a dit qu'on aurait une conversation ce soir mais comme il a aussi disparu j'ai des doutes...
- En même temps il a le droit d'être fâché.
Alexia manqua d'en trébucher, surprise.
- Qu'est-ce que tu veux dire ?
- Je veux dire que tu devais bien te douter que cette histoire de secret allait t'exploser à la figure un jour ou l'autre.
- Ce n'est pas...enfin...
- Ne cherche pas à te justifier, je n'en ai pas besoin...
Le ton froid de Dorcas, celui qu'elle utilisait les rares fois où elle était vraiment contrariée, fit comprendre à Alexia qu'elle marchait sur des œufs pour ce début de conversation.
- Dorcas...
- Allez, dépêche-toi, il faut qu'on trouve Lily !
- Mais...
- Sérieux Alex, c'est bon. Je faisais juste une remarque.
- Tu ne fais jamais « juste une remarque », répliqua-t-elle. Si tu as quelque chose à me dire...
Dorcas soupira.
- Je ne veux pas rentrer là-dedans et toi non plus, crois-moi.
- Si justement. Je préfère que tu me dises ce que tu as à me dire plutôt de rester en colère contre moi dans mon dos.
C'était le problème entre elles. Si Alice était douce, Marlène timide et Lily raisonnée, Dorcas et Alexia avaient toujours été les explosives du groupe à leur manière. Dorcas pouvait être de mauvaise humeur, sarcastique, comportement qu'elle avait hérité de son éducation, tandis qu'Alexia avait plus tendance à être butée, incapable de reculer même quand elle le devrait.
- Très bien, tu l'auras voulu. Je n'ai rien dit avant parce que ce n'était pas le moment, Sirius se chargeait parfaitement de t'accabler et en bonne amie j'ai pris ton parti. Mais franchement Alex, c'était stupide !
- Stupide ?
- Evidemment ! Qu'est-ce que tu croyais ? Qu'on n'apprendrait jamais rien ?
- C'était le but oui !
- Ne sois pas idiote, dit Dorcas. Tu savais que ça arriverait et tu n'as pas eu le cran de l'anticiper. Bel exemple de courage pour une Gryffondor.
Le visage d'Alexia se vida de ses couleurs.
- Tu ne comprends pas...
- Ouais, c'est ce que tu n'arrêtes pas de nous répéter. Ça ne t'a jamais effleuré l'esprit que je pouvais comprendre justement ?
- Comment ça ?
- Merlin Alex ! J'étais terrifié de vous avouer la vérité sur Lucinda et moi ! J'ai attendu d'être sûre, soit deux semaines et pas des années, et j'ai tout dit de mon plein gré sans attendre que vous le découvriez par hasard. Et t'as remarqué ? Ça s'est beaucoup mieux passé que pour toi.
Les mots de Dorcas lui firent l'effet d'une gifle doublé d'un coup de poing en plein ventre. Elle ne savait pas si elle avait envie d'en pleurer ou d'en rire. Sa vie était un chaos complet. Incapable de se retenir, Alexia se mit à rire.
- Tu compares nos situations ? S'étrangla-t-elle. Sérieusement ?
- Pas besoin d'être hautaine.
- Dorcas, bon sang ! Tu es tombée amoureuse d'une fille et je vais mourir ! Y'a quand même un léger décalage !
- Je n'ai jamais prétendu le contraire, rétorqua-t-elle sans se départir de son calme froid. Ça ne change pas le fait que tu as tort.
- Tu ne le sais pas. Tu n'as jamais eu à voir le regard des gens quand ils savent.
- Quand ils savent ? Le problème c'était justement qu'on ne le savait pas !
- Mes parents savent ! Mon frère et ma sœur savent ! Ils...ils me regardent comme si j'allais mourir sous leurs yeux sans prévenir.
Dorcas secoua la tête.
- Et tu ne vois pas à quel point c'est une chance ?
- Une chance ?!
- Je doute que les miens remarqueraient même si je faisais un arrêt cardiaque devant eux, Alex. Le simple fait qu'ils s'inquiètent montre qu'ils se soucient de toi. Tu crois que Sirius est tellement bouleversé parce qu'il pense que tu as changé, que tu n'es plus la même ?
- Je...je...
- Il est en colère parce qu'il t'aime, dit Dorcas avec douceur.
Alexia baissa les yeux sur ses chaussures, le rouge aux joues. Elle n'avait jamais pris la peine de se mettre à la place des autres. Une vague de culpabilité la parcourut. Dorcas dû s'apercevoir qu'elle y avait été un peu fort car elle s'approcha.
- Désolé, je n'aurais peut-être pas dû le dire comme ça...
- Non, c'est bon, tu as eu raison. Merci.
Les deux filles se tombèrent dans les bras. Alexia s'accrocha à son amie, la boule dans sa gorge présente depuis un moment diminuant enfin. Elle avait eu besoin de cette conversation, d'être secouée ainsi, et seule Dorcas était capable de cela.
Finalement, elles reprirent leur route sans un mot, plus légères.
Aucune trace de Lily dans la salle commune quand elles arrivèrent, ni dans leur dortoir, ce qui était un peu inquiétant, mais elles attendirent le retour des deux autres avant de paniquer. Après tout la préfète pouvait très bien être à l'infirmerie ou avoir un rendez-vous improvisé avec un professeur. Ce n'était pas rare que McGonagall vienne lui parler pour les rondes ou encore que Slughorn la retienne en discutant du menu du prochain « club de Slug » comme l'avait surnommé les élèves.
D'ailleurs, la porte de la chambre s'ouvrit et Marlène entra avec Alice, l'air sombre.
- Alors ?
- Elle n'est pas à l'infirmerie. Aucune trace d'elle, personne ne l'a vu depuis le petit-déjeuner ce matin.
- Là ça devient bizarre...
- On a même été à la volière, renchérit Alice, juste au cas où elle aurait reçu une lettre de sa sœur et que ça se soit mal passé mais rien. Elle s'est juste envolée.
- C'est ridicule, protesta Doras. On est dans une école ici, il y a des Aurors à chaque coin de couloir !
Marlène sursauta.
- Vous croyez qu'elle aurait pu...se faire agresser ?
- Ne dis pas n'importe quoi, murmura Alexia.
- Elle est née-moldu, Rosier la déjà menacé !
- C'était pour provoquer James...
- On n'en sait rien !
Un lourd silence tomba. Les filles restèrent à se dévisager, anxieuses. Aucune d'entre elles ne semblaient savoir quoi faire. Au bout de quelques minutes, Alexia se leva d'un bond.
- Je vais demander aux garçons.
- Pourquoi ?
- C'est les Maraudeurs, si quelqu'un peut nous aider à trouver Lily dans le château c'est bien eux. Surtout James.
- D'accord. Vas y et nous on continu à chercher, ok ?
Alexia hocha la tête et partit en courant. Elle monta les marches quatre à quatre, angoissée. Ce n'était pas le genre de Lily de disparaître comme ça sans prévenir. Ce n'était jamais arrivée, elle s'était toujours arrangée pour les prévenir si elle avait quelque chose à faire.
Arrivée devant la porte des sixièmes années, elle tambourina à plusieurs reprises jusqu'à ce que le battant s'ouvre brusquement. C'était Sirius en face d'elle et il avait l'air de mauvaise humeur. Derrière lui, ses amis étaient assis sur un lit avec morosité. Elle ne savait pas vraiment ce qu'elle venait d'interrompre mais ça avait l'air grave.
- Alex, je sais que j'avais dit qu'on parlerait mais ce n'est pas le moment, est-ce qu'on peut...
- Ce n'est pas pour ça que je suis là, coupa-t-elle. Lily a disparu.
Moment de flottement.
- Comment ça « Lily a disparu » ? Demanda James, perplexe.
- On ne l'a pas vu depuis ce matin, elle n'était pas en cours et impossible de savoir où elle pourrait être ! Les filles sont reparties faire un tour dans les couloirs mais on est inquiète. Je me suis dit que vous auriez peut-être une info...
- Non aucune idée, répondit Remus honnêtement. Mais attends, on va la trouver.
Il fit un signe de tête à James qui ne perdit pas une seconde et ouvrit le tiroir de sa table de chevet avec empressement. Il en sortit un simple parchemin, bien qu'Alexia l'avait déjà vu avec à de nombreuses reprises mais elle supposait que c'était un autre des secrets des Maraudeurs. James chuchota quelque chose qu'elle n'arriva pas à entendre puis parcourut le parchemin du regard. D'un coup, il releva la tête, pâle.
- Elle est en haut de la tour d'Astronomie.
- Hein ? Fit Peter.
- Elle n'est pas toute seule, il y a Kevin Mells avec elle.
Alexia haussa un sourcil depuis le seuil de la porte.
- Mells ? Répéta-t-elle. Le nouveau batteur de l'équipe ?
- Ouais...
- Pourquoi est-ce que...
- Le traître, souffla James brusquement.
- Quoi ?
- C'est lui le traître !
Les autres parurent sceptique.
- Tu es sûr ?
Mais James ne répondit pas, les yeux dans le vague. Tout s'assembla dans sa tête comme un puzzle. Au début d'année, quand un cognard l'avait frappé à épaule et avait manqué de le blesser gravement à cause de la chute, c'était Kevin qui était le plus près. Il aurait dû pouvoir le détourner mais il ne l'avait pas fait, tout simplement car il était complice. Pandora Van Houten avait déclaré que l'élève de Gryffondor qui l'avait agressé était grand et baraqué, tout à fait la carrure d'un batteur. Il avait révélé juste avant match avoir été élevé par son oncle à la mort de sa mère et il était sang-mêlé, exactement comme l'indiquait les articles qu'ils avaient trouvé sur Griselda Lynch. Si la jeune femme était sa mère alors les raisons de sa haine envers les moldus ou les nés-moldus s'expliquait facilement. Ses souvenirs remontèrent à plus loin. Lors de la toute première attaque, celle de Bertha Jorkins, Kevin était revenu plus tard que les autres dans la salle commune, prétextant avoir été à l'infirmerie pour obtenir des informations. Sûrement un mensonge de plus. Et puis, quelques jours après l'agression de Cornelia Flint, quand ils avaient trouvé la bague, Rosier les avait accostés pour la récupérer. Encore une fois, tout s'accorda dans sa tête et il comprit que Rosier avait juste voulu récupérer une potentielle preuve accablante contre un membre de son petit groupe. Il y avait aussi les messages « les sangs-purs triompheront » qui avaient été peint dans les vestiaires et leur salle commune, deux endroits auxquels Kevin avait naturellement accès.
- James ?
- Je suis sûr que c'est lui. Et il a enlevé Lily ! On y va !
- Attends, apaisa Remus avec calme. On ne peut pas...
- On ne peut pas laisser Evans avec un psychopathe ? Oui tout à fait. Allez !
Remus soupira. Il savait déjà par expérience qu'il ne pourrait rien faire pour le retenir, d'ailleurs James était déjà dans le couloir et les autres le suivirent sans autre forme de procès. Le préfet jeta un dernier coup d'œil à la carte du Maraudeur, histoire d'être certain, mais la carte ne mentait jamais. Les deux points immobiles en haut de la tour d'Astronomie étaient sans équivoque. Sans attendre, Remus sortit à son tour.
Quand il les rattrapa, ce fut au pied de la tour qui menait au bureau du directeur. La gargouille en pierre gardait solennellement l'entrée.
- Lunard, le mot de passe, vite !
- Mais...
- Tu es préfet, tu le connais forcément, dit Alexia, frénétique.
Remus obtempéra.
- Tarte au citron, lâcha-t-il.
Le mot de passe eut le mérite de faire tiquer ses amis qui sourirent une seconde, amusés, avant de reprendre un air grave. Ils s'engagèrent tous dans l'escalier en colimaçon dès que le passage apparut et restèrent silencieux tout le long de la montée. A vrai dire, ils ne s'étaient même pas réellement concertés pour venir ici mais s'il y avait quelqu'un susceptible de sortir Lily de cette situation sans danger, c'était bien leur directeur.
Une fois là-haut, ils restèrent face à la lourde porte en bois de chêne, soigneusement polie, avec un marteau d'airain en forme de griffon. Finalement, James s'avança et toqua.
- Entrez !
Avec un dernier regard à ses amis, James ouvrit le battant. Le bureau circulaire n'avait pas changé depuis sa première année, toujours aussi majestueux et remplit d'objets étranges posés sur les nombreuses étagères.
Dumbledore se trouvait debout près de la fenêtre et il se tourna vers eux avec un sourire bienveillant en les voyant tous arriver. Sur sa droite, McGonagall, un homme brun qui portait l'insigne des Aurors, Alastor Maugrey et Gemma Ackerley stoppèrent leur conversation.
- Excusez-nous de vous déranger, commença Remus poliment.
- Ne vous inquiétez pas, monsieur Lupin, je me doute qu'il doit y avoir une raison importante à votre visite.
- Oui professeur... Euh...On pense, enfin on est sûr, que Kevin Mells a...enlevé Lily.
- Lily Evans ?
- Oui...
- Pardon ? S'exclama McGonagall. Mais enfin qu'est-ce que vous racontez ?
- Kevin Mells est l'agresseur de Gryffondor ! Il a enlevé Lily ce matin, personne ne l'a vu depuis et on sait où ils sont.
- Comment ?
Léger malaise. Les Maraudeurs gardèrent le silence, ne pouvant se résoudre à révéler la vérité sur la carte. Heureusement, Dumbledore vola à leur secours.
- Je ne doute pas de leur sincérité, Minerva, mais vous comprenez bien qu'il va nous falloir des preuves.
- On en a, assura Peter. Regardez !
Il plongea la main dans sa poche et s'avança vers les adultes. Au creux de sa paume se trouvait la bague de Griselda Lynch.
- Un bijou ? Grommela Maugrey, sceptique.
- Pas n'importe lequel, c'est celui retrouvé près de Cornelia Flint après son agression.
Les sourcils de McGonagall menacèrent de sortir de son front sous le coup de la surprise.
- Puis-je savoir au nom de Merlin pourquoi êtes-vous en possession de cela, monsieur Pettigrow ?
- Longue histoire, éluda-t-il, mais on a fait des recherches. On pense qu'elle appartient à la mère de Kevin. Si c'est elle alors tout concorde !
Ils se tournèrent tous vers Dumbledore, fébriles. Le vieux sorcier marcha lentement jusqu'à son bureau et parut réfléchir un instant avant de soupirer.
- La mère de monsieur Mells se prénommait Griselda Mells, née Lynch, dit-il solennellement. Elle avait fait ses études à Serdaigle et était une jeune femme brillante avec un réel talent pour les bouchons baveux. Elle s'est marié peu de temps après avoir quitté Poudlard. Elle et son mari, un moldu, ont eu un petit garçon. J'ai appris avec tristesse son décès quelques années plus tard.
- C'est elle, confirma James. Kevin a gardé la bague de sa mère en souvenir, c'est un objet de famille. Il a dû la perdre pendant l'attaque de Cornelia Flint. Il faut qu'on aille chercher Lily !
- Ça ne prouve rien, nuança Maugrey. Cette gamine est sûrement quelque part dans le château à sécher les cours.
Cette affirmation parut encore plus scandalisée le professeur McGonagall qui tourna si brusquement la tête vers l'Auror que son chapeau à motif écossais menaça de tomber.
- Je peux vous assurer, Alastor, que mes élèves sont des plus sérieux, en particulier Miss Evans ! Elle est préfète et n'agirait certainement pas de la sorte.
- Il n'empêche qu'on ne peut pas délaisser la sécurité de l'école pour une simple hypothèse, intervint l'Auror inconnu en prenant part à l'échange. Il faut d'abord songer à protéger les élèves. On ne peut pas ordonner à une dizaine d'Auror de laisser le château sans protection pour une seule personne. J'en suis navré mais Miss Evans n'est pas notre priorité.
- Mais elle est la mienne, rugit James.
Dumbledore contourna à nouveau son bureau pour venir se tenir entre eux au milieu de la pièce. Tout le monde se tut immédiatement.
- La sécurité de l'école est assurée par mes soins, je vous l'affirme. Il est hors de question de laisser Miss Evans dans un danger potentiel. Minerva, allez tout de suite chercher les autres directeurs de maisons et dites-leur de me retrouver à la Tour d'Astronomie. Alastor, Gemma et Mike, vous venez avec moi. Quant à vous, termina-t-il en se tournant vers leur groupe, veuillez retourner à votre salle commune.
- Quoi ? Mais...
- Monsieur Potter, je vous promets que nous allons gérer ce problème et, que nous le prenons très au sérieux. S'il vous plait, vous et vos amis serez plus en sécurité là-bas.
James voulut protester, dire qu'il pouvait être utile, mais une main se posa sur son épaule. Remus secoua lentement la tête. Sans faire de vague, ils ressortirent tous du bureau, hébétés et reprirent le chemin de la tour de Gryffondor. Alors qu'ils allaient s'engager dans un couloir du troisième étage, James se figea.
- James ? Appela Sirius.
- Faut que j'y aille.
- Tu es entendu Dumbledore, dit Peter. Ils vont aller la chercher.
- Et s'il était trop tard quand ils arrivent ?
- Ne dis pas ça ! Protesta Alexia.
- J'y vais.
- Non ! James !
- James, bon sang reviens !
**
*
Lily frissonna quand un nouveau coup de vent vint balayer ses cheveux roux et s'engouffra sous sa veste. Elle ne portait que son uniforme en dessous, car elle partait pour les cours avant que tout cette affaire ne commence. A vrai dire, elle ne savait plus trop quelle heure il était. Il lui semblait que ça faisait une éternité qu'elle était en haut de la tour d'Astronomie, assise contre la rambarde pendant que Kevin Mells piétinait devant elle, de plus en plus nerveux.
Le jeune garçon tenait fermement sa baguette dans une main et n'arrêtait pas de s'assurer que celle de Lily, qu'il lui avait prise tout à l'heure, était bien hors de sa portée, tout comme son sac. Bon ce dernier ne contenait que des plumes, des parchemins et des livres de cours mais l'Histoire de Poudlard pouvait vite se transformer en arme si on se le prenait sur la tête au vu de son poids.
- Mells...
- La ferme Evans !
- Mells, qu'est-ce que tu es en train de faire ?
- Je ne vais pas me mettre à parler avec toi.
- Je ne te demande pas de parler, je te demander d'arrêter ça. Tu n'es pas obligé de...
- Ne me sors pas ton baratin Evans ! Tu fais ça pour t'en sortir !
Lily se mordit la lèvre. Son cerveau tournait à plein régime. D'après ce qu'elle avait observé depuis trois ou quatre heures, Kevin était sur les nerfs et surtout un gamin apeuré. Cet élément pouvait jouer à son avantage.
- C'est faux, dit-elle avec douceur. Je vois bien que tu as peur mais tu n'es pas obligé d'aller plus loin. Si tu me laisses partir maintenant, personne n'aura été blessé, on pourra en discuter. Tu as juste besoin d'aide.
- Arrête ! Il y a eu des blessés !
- Tu veux parler des élèves agressés ? Tu n'étais pas seul Kevin, tu n'as pas à prendre la faute.
- Non, c'est trop tard. Je...je ne peux pas reculer maintenant.
- Pourquoi ?
- Parce que Potter et les autres sont déjà au courant ! Les professeurs vont le savoir aussi, je vais être renvoyé !
- Non, tu...
- Je vais devoir retourner chez les moldus !
Lily se figea.
- C'est...c'est ça qui te fait peur ? Kevin...
- Tu ne comprends pas ! Maintenant tais-toi !
Mais elle secoua la tête, incapable de se retenir.
- Tu déteste le monde moldu, dit-elle lentement, ça je l'ai compris. C'est pour ça que tu as participé aux agressions ?
- Evans...gronda-t-il.
- C'est Rosier qui t'a mis tout ça dans la tête ?
- Non ! Je n'ai pas besoin qu'on m'influence !
- Alors pourquoi... ?
- Parce que les moldus ne comprendront jamais les sorciers. Ils nous méprisent !
- C'est faux...
- Vraiment ? Répliqua-t-il. Pourtant ma mère est morte à cause d'un moldu. J'ai entendu des choses aussi, je suis assez doué pour être discret. Tes relations avec ta sœur on en parle ? Et celles de Cassidy avec son beau-père hein ?
Soudain, Lily eut la gorge sèche et déglutit. Il commença à s'agiter, faisant des allers-retours sur la plateforme de la tour.
- Comment... ?
- Je te l'ai dit, j'écoute les rumeurs. Ce ne sont pas des secrets d'états, il suffit de savoir demander aux bonnes personnes. Les sœurs Zabini sont une source incroyable d'information et Tessie Ryan est ravie de partager les ragots.
- Tu veux dire qu'elles sont aussi dans votre groupe ?
- Peut-être, peut-être pas. Je ne dirais rien Evans.
- Kevin... les Aurors sont dans le château, tu ne peux pas...
- Je ferais ce que je veux !
- Tu te berces d'illusion. Rosier ne viendra pas à ton secours, il te dénoncera à la première occasion, cria-t-elle.
- Tais-toi !
Kevin braqua sa baguette sans sa direction et elle se tassa sur elle-même, la respiration haletante. Elle avait l'impression que son cœur allait exploser. Si elle avait été paralysée de terreur pendant l'attaque de Pré-au-Lard, c'était tout le contraire aujourd'hui. Son corps était saturé d'adrénaline et elle se sentait presque fébrile tellement chacun de ses muscles étaient crispés.
Elle suivit Kevin du regard tandis qu'il allait s'appuyer sur la rambarde, les mains crispés sur la barre de sécurité. Il avait l'air au bord de la crise de nerfs. Lily avait vite compris que rien de tout ça n'avait été préparé, c'était trop chaotique, et que son camarade avait juste paniqué en entendant James dire au petit déjeuner de ce matin qu'il attraperait le traître bientôt grâce à ses indices.
Alors que Kevin était toujours occupé à essayer de recouvrer son calme, elle se décala doucement vers la droite. En constatant qu'il ne paraissait pas l'avoir vu, le souffle de Lily se bloqua dans sa gorge. Elle n'aurait peut-être pas d'autre occasion. Bien que le jeune homme lui fasse de la peine et qu'elle savait qu'il était juste effrayé, elle ne comptait pas rester plus longtemps à jouer les psychologues.
- Hé ! Qu'est-ce que tu fais, Evans ?!
Brusquement, Lily se jeta en avant. Ses mains se refermèrent sur la chose la plus proche d'elle, à savoir son encrier. Sans réfléchir, elle le lui jeta au visage.
Elle n'attendit pas de voir si son tir avait atteint sa cible mais au vu du cri que poussa Kevin elle avait dû réussir. Alors qu'elle dévalait les escaliers de la tour, elle se promit intérieurement de remercier Alexia pour lui avoir appris à tirer avec un souaffle quand elles s'étaient entraînées pour les essais de Quidditch de la brune en troisième année.
- Evans ! Hurla-t-il. Reviens ici !
Lily manqua de louper plusieurs marches à cause de ses jambes tremblantes et elle accéléra malgré tout en entendant les bruits de pas dans son dos qui se rapprochaient. Sans sa baguette, elle savait qu'elle ne pourrait rien faire face à lui. Même s'il était en cinquième année, et donc qu'il avait un an de moins, il faisait bien une bonne tête de plus qu'elle. De plus, avec sa carrure de batteur, elle ne voulait absolument pas avoir à l'affronter.
- Evans !
Lily poussa la porte du bas de la tour de toutes ses forces, le battant allant frapper le mur avec fracas. Une brève vague de soulagement l'inonda quand elle se mit à courir dans les couloirs familiers du château mais cela fut de courte durée. Le cœur au bord des lèvres, elle sentit la présence de Kevin toujours derrière elle. Il ne lui faudrait pas longtemps pour la rattraper. La peur lui tordait le ventre et Lily se demanda une seconde si elle n'allait pas s'écrouler sauf que sa foulée redoubla. Courir. Courir le plus vite possible. C'était la seule chose à laquelle elle pouvait penser.
Soudain, elle tourna à l'angle et manqua de rentrer dans quelqu'un. Un cri lui échappa.
- Evans ?
- Potter !
De toute sa vie, jamais Lily n'avait été aussi heureuse de voir James Potter !
- Qu'est-ce que tu fais là ? J'étais venu accomplir un sauvetage héroïque !
- Désolé, je me sauve toute seule, rétorqua-t-elle.
James la dévisagea, surpris, puis il la serra contre lui sans prévenir.
- Bon sang, j'ai cru...j'ai cru...
- Je viens bien, je vais bien, assura Lily, la voix étouffée par son pull. Kevin Mells ! C'est Kevin Mells ! Il...
Elle ne put terminer sa phrase car à ce moment-là, il y eut un grand bruit à quelques mètres d'eux. Lily sursauta. Une seconde après, une jeune femme tourna dans le couloir. Elle se figea en les voyant.
- Gemma ! S'exclama James. Qu'est-ce que...
- On vient d'avoir Mells. Il était juste en bas de la tour d'Astronomie quand on a débarqué, il n'a eu aucune chance. C'est toi Lily Evans ?
- Oui...
- Viens avec moi. Tu es blessée ?
Lily secoua la tête, toujours fermement accroché à James. Elle s'en rendit compte mais ne se dégagea pas de peur de s'effondrer si elle bougeait. Tout allait trop vite, tout s'enchaînait trop vite. Il parut s'en apercevoir.
- Je reste avec toi, Evans, chuchota-t-il. Je te le promets.
Chapitre XXXVIII : Le dénouement après la bataille
Lily gigota sur sa chaise inconfortable, fatiguée. Ça allait faire plus de deux heures qu'elle parlait avec les Aurors, faisant un récit détaillé de son enlèvement. Maugrey lui avait fait répéter les faits une bonne dizaine de fois et n'arrêtait pas de lui dire que désormais, par les temps qui courent, il fallait qu'elle applique une « vigilance constante » lors de tous ses déplacements, ce qui avait fait rouler des yeux à Gemma Ackerley. La sœur du présentateur avait une présence rassurante dans ce chaos ambiant.
Comme promis, James était resté avec elle tout le long. Il n'avait pas eu l'autorisation d'être dans la salle quand Maugrey lui avait fait subir son interrogatoire mais il avait patienté dans le couloir, implacable. Quand elle était enfin sortie, il l'avait accompagné au bureau de Dumbledore et était actuellement assis à côté d'elle, le regard tourné vers la fenêtre à observer le terrain de Quidditch en contre-bas.
Lily resserra sa prise sur la couverture enveloppée autour de ses épaules, grelottante. La sensation de froid ne la quittait plus depuis la tour d'Astronomie.
- Tu vas bien ? Chuchota James.
- Hum ? Ouais...
- Evans...
Il ne continua pas car la porte s'ouvrit, les faisant sursauter. Ils étaient tous les deux sur les nerfs au moindre bruit. Cependant, ce n'était que Dumbledore qui revenait avec deux tasses de chocolat chaud et un sourire aimable. Il vint s'assoir derrière son bureau.
- Désolé pour cette attente, je devais régler quelques affaire urgentes avec les Aurors.
- Ce n'est rien, assura Lily avec politesse.
- Buvez, miss Evans. Ça vous fera du bien.
- Je ne...
- Allez-y, le chocolat a des vertus apaisantes incroyables. Je pense que Mr Lupin pourra vous le confirmer.
James sourit. Il avait toujours trouvé sidérant le nombre de tablette de chocolat noisette que Remus pouvait engloutir après les pleines lunes.
Avec un semblant de sourire, Lily se saisit donc d'une tasse, les mains tremblantes. Elle enroula ses doigts autour et se détendit imperceptiblement grâce à la chaleur qui s'en dégageait. Elle n'arrivait pas à se détendre depuis tout à l'heure, entre les questions des Aurors, les regards inquiets de James, les tableaux des anciens directeurs qui chuchotaient aux murs... Pourtant, Dumbledore avait une présence apaisante.
- Je me doute bien que vous êtes extrêmement fatigué, miss Evans, mais j'aurais encore quelques questions à vous poser.
- J'ai déjà tout dit aux Aurors, souffla-t-elle.
- Je sais bien et si je pouvais faire autrement je le ferais, croyez-moi.
Lily hocha la tête.
- A vrai dire, ça ne sera pas long. Il n'y a qu'une seule chose qui me reste à éclaircir dans cette histoire : pourquoi vous miss Evans ?
- Comment ça ?
- Vous avez dit lors de votre témoignage que monsieur Mells avait pris peur en entendant monsieur Potter dire qu'il était proche de retrouver l'élève de Gryffondor impliqué dans les attaques, pourtant c'est vous qu'il a enlevé et à qui il a posé des questions alors que, si j'ai bien compris, vous n'étiez pas au courant de cette affaire...
James se crispa. Il s'était douté que Kevin l'avait entendu au petit déjeuner et il culpabilisait. S'il avait été plus prudent, rien de tout cela ne serait arrivé à Lily. Malgré tout, le directeur soulevait un point important. Alors qu'il attendait la jeune fille dans le couloir pendant son interrogatoire avec Maugrey, il s'était posé également la question. Ça aurait été plus logique que Kevin s'en prenne directement à lui ou aux Maraudeurs.
- Je ne sais pas vraiment, avoua lentement Lily, comme si elle essayait de se rappeler de sa matinée en haut de la tour d'Astronomie dans les moindres détails. Il...il était juste effrayé, il ne savait pas trop ce qu'il faisait. Je pense qu'il a cru que Potter m'avait révélé ce qu'il avait découvert puisqu'il en avait parlé à tout le monde au petit déjeuner. En plus, Black et les autres blessés venaient de revenir, peut-être qu'il s'est dit que l'un d'entre eux l'avait vu à Pré-au-Lard avec les mangemorts pendant l'attaque. Quand il est venu me parler avant les cours, il voulait juste des informations et c'est comme ça que j'ai compris. A partir de là, il ne pouvait pas me laisser repartir. Le fait que je sois née-moldu a dû jouer aussi...
- Je vois, murmura Dumbledore.
Il avait les mains croisées sous son menton, l'air concentré. Lily se doutait qu'il en savait plus qu'il ne voulait bien l'avouer mais elle ne chercha pas à demander. A vrai dire, elle avait l'impression d'être déconnectée des évènements depuis ce matin. Le directeur parut s'en apercevoir car il lui adressa un sourire bienveillant.
- Je ne vais pas vous retenir plus longtemps, miss Evans. Allez donc retrouver vos amis.
Lily se leva aussitôt de sa chaise au cas où quelqu'un aurait encore la bonne idée de lui poser plus de question. Immédiatement, James l'imita et ils sortirent tous les deux du bureau après avoir souhaité une bonne soirée à Dumbledore. Ils restèrent une seconde devant la porte close, comme s'ils n'arrivaient pas à réaliser qu'ils pouvaient enfin retourner à la salle commune.
- On y va ?
- Je...oui...
Lily tenta de se reconnecter un peu à la réalité. Elle devait avoir l'air idiote depuis tout à l'heure. Pourtant, James ne fit aucune remarque et se contenta d'ouvrir la voie en silence. Le voir si silencieux, si calme, la perturba presque plus que les souvenirs qui lui tournaient dans la tête de sa mésaventure avec Kevin. Alors qu'elle marchait à ses côtés en essayant d'occulter les chuchotements des tableaux sur leur passage, elle se sentit soudain obligé de dire quelque chose.
- T'avais raison...
James haussa un sourcil, surpris par cette entrée en matière pour le moins inédite.
- A propos de quoi ?
- De Maugrey. Il fait vraiment peur, surtout quand tu te retrouves seule avec lui dans une pièce.
- Je te l'avais dit ! Sirius se moque de moi depuis des années mais imagine le rencontrer à huit ans, y'a de quoi être traumatisé !
Voilà, la tendance à exagéré de James semblait être de retour. Lily sourit.
- Je te l'accorde, dit-elle.
- Evans...
- Ouais ?
Il se tourna vers elle complètement.
- Je suis désolé...
- Désolé ? Répéta-t-elle. De quoi ?
- De tout ça, répondit James comme si c'était évident. L'histoire avec Kevin...
- Mais...
- Les autres m'avaient dit de laisser les professeurs faire leur boulot mais j'ai quand même voulu mener mon enquête...c'était idiot, tu as failli être blessée à cause de ça et...
- Potter ! Coupa Lily.
Il leva les yeux, perplexe.
- Tu n'as rien à te reprocher, assura-t-elle.
- Tu dis ça pour ne pas que je me sente coupable...
- Parce que je le pense, Potter. Kevin était juste effrayé, il aurait forcément craqué à un moment sous la pression.
- Mais à cause de moi c'est toi qui a été...
- Ce n'est pas...je veux dire...je préfère que ça soit moi plutôt quelqu'un d'autre. Et puis je vais bien, promis.
James la regarda un instant, un petit sourire jouant sur ses lèvres. Il secoua la tête.
- Lily Evans, toujours courageuse et optimiste hein ? Déclara-t-il avec fierté.
- J'essaye, répondit-elle, les joues rouges.
Il parut aller un peu mieux alors qu'ils reprirent leur route vers la tour de Gryffondor. La Grosse Dame hoqueta en les voyant arriver et s'empressa de leur demander si tout allait bien, même si Lily se doutait que c'était plus pour pouvoir avoir des ragots à raconter que par véritable inquiétude.
En tout cas, dès que la porte du passage se referma dans leur dos, ils eurent à peine le temps de faire un pas dans la pièce avant que tous les autres ne leurs tombent dessus.
Lily eut l'impression d'être prise dans un tourbillon, passant de personne en personne sans vraiment comprendre. On lui demandait comment elle se sentait, ce qui s'était passé, où est-ce qu'était Kevin ? Elle perdu James de vue au bout d'un moment puis brusquement elle sentit une main se poser sur son bras pour la sortir de la foule. Elle trébucha sur ses pieds avant que James ne la tire derrière lui pour échapper à leurs camardes.
- Merlin...
- Je t'avais dit que je serais ton chevalier servant un jour !
- Potter, souffla-t-elle, les yeux au ciel.
Il rit.
- Pardon, c'était plus fort que moi. Les filles t'attendent là-haut, vas-y.
- Et toi ?
- Je vais retrouver les Maraudeurs, ils doivent s'inquiéter. Je suis un peu parti précipitamment.
Lily baissa la tête.
- Merci, dit-elle. Pour être venu pour moi je veux dire.
- Ah Evans ! Je viendrais toujours pour toi.
C'était le genre de phrase idiote qu'il lui sortait tout le temps et pour lesquelles elle avait l'habitude de lui répliquer « la ferme, Potter » automatiquement mais juste pour cette fois elle laissa passer sans savoir pourquoi.
**
*
Alexia tenta tant bien que mal de ne pas détourner le regard ni de rougir quand Sirius arriva au point de rendez-vous qu'ils s'étaient donné mais elle échoua lamentablement. Lui, évidemment, avait l'air tout à fait serein, les mains dans les poches et une mèche de cheveux noirs lui barrait le visage avec grâce. Malgré tout, Alexia le connaissait trop bien. Il avait les épaules tendues ainsi qu'une moue contrariée aux lèvres, comme toujours quand il était anxieux. Elle savait que ça lui avait demandé beaucoup d'effort pour venir lui parler, lui donner une chance de s'expliquer, et qu'elle ne le méritait probablement pas mais elle n'allait pas laisser tomber. Elle était déterminée à réparer les choses entre eux.
Il arriva finalement à sa hauteur.
- Hé, souffla-t-elle. Merci d'être venu.
- Tu en doutais ?
- Non mais comme tu avais disparu ce matin...
Elle laissa sa phrase en suspens. Avec la disparition de Lily, elle n'avait même plus repensé à la volatilisation de Sirius dans la matinée. A vrai dire, elle avait juste eu le temps de s'assurer que la rousse allait bien et de lui faire promettre de tout lui raconter plus tard avant de partir en courant du dortoir pour venir ici.
- Ouais, désolé, dit-il. J'avais...un truc à faire.
Alexia n'insista pas. Il lui avouerait quand ils auraient parlé, quand tous les non-dits entre eux seraient résolus.
- Comment va James ?
- Bien, il est revenu tout à l'heure. Apparemment, les Aurors ont prévu de garder Kevin encore un moment. Et Evans ?
- Elle avait l'air secoué mais je n'ai pas eu le temps de lui parler.
Sirius hocha la tête. Il se sentait juste épuisé après cette journée complètement dingue et il se laissa glisser contre le mur, histoire de s'assoir un peu. Alexia l'imita, épaule contre épaule. Elle se mordit la lèvres, incertaine de la façon dont commencer cette conversation. C'était étrange puisqu'elle n'arrêtait pas d'y penser depuis plusieurs semaines mais maintenant qu'ils étaient là, tous les deux, son esprit tournait à deux à l'heure.
Finalement, ce fut lui qui reprit d'une voix neutre.
- Alors ?
- Alors quoi ? Répéta-t-elle.
- Explique. Je t'écoute...
Alexia détourna les yeux, le cœur battant. C'était le moment ou jamais.
- Je ne sais même pas par où commencer...
- Le début ? Suggéra-t-il, sarcastique.
- Ouais... Hum...J'avais treize ans quand on a diagnostiqué la maladie...
- Quelle maladie ? Coupa Sirius, la voix tremblante.
Elle n'osa pas tourner la tête pour voir son expression mais elle le vit serrer les poings.
- Un nom étrange que j'arrive à peine à prononcer, répondit-elle honnêtement. C'est d'origine sorcière et peu de personne en souffre, elle est très rare, surtout chez les enfants ou les adolescents. Elle affecte les poumons principalement. Je...J'ai dû arrêter le Quidditch parce que je ne peux pas pratiquer d'activité physique. J'ai aussi des maux de têtes et des crises de fatigue, même si les fioles de potion que je prends aident contre ça.
- Tu veux dire que la grippe que tu as eue il y a plusieurs mois...
- Ce n'était pas la grippe non. Je me suis évanoui à cause d'une crise. La première fois que ça m'est arrivé, c'était pendant les vacances de noël de notre troisième année. Ma mère m'a emmené à l'hôpital mais les moldus n'ont rien trouvé donc on a été à St-Mangouste. Après plusieurs consultations et une batterie de test, on m'a annoncé que je souffrais d'une maladie incurable. Elle ne peut pas se soigner, seulement être ralentie. Les fioles de potions limitent les effets. Ça s'est dégradé depuis quelques mois...
Sirius soupira, sa tête retombant en arrière contre le mur. Il se rendit compte qu'il ne se sentait pas mieux même après avoir appris toutes ses informations. La simple vision d'Alexia allongée sur un lit d'hôpital lui donnait la nausée.
- Je suis tellement désolé, souffla-t-elle doucement.
- Princesse...
L'entendre utiliser son surnom lui fit l'effet d'un coup de poing dans le ventre et elle se résolut à se tourner vers lui pour lui faire face.
- Je...je sais que ça n'excuse rien mais je suis vraiment désolé. Dorcas m'a fait comprendre que...qu'aucun de vous ne méritait ça, de découvrir la vérité de cette façon. J'ai été horrible avec Remus...
- Bon sang, qu'est-ce qui t'as pris de l'impliquer là-dedans ?
- Il voulait tout te dire et j'ai paniqué ! S'exclama-t-elle, les larmes aux yeux. Je...je n'aurais jamais parlé à Anaïs de sa lycanthropie, je le jure !
Sirius garda le silence un instant. Il savait qu'elle était sincère et même si ça ne suffisait pas, c'était déjà un début. Il plongea son regard dans le sien. Parfois, il oubliait à quel point ses yeux étaient bleus et combien elle était belle, même alors qu'elle venait de pleurer.
- Quoi ? Pourquoi tu me regardes comme ça ?
- Rien...dit-il lentement. Rien.
- D'accord... Euh... Qu'est-ce que tu veux encore savoir ? Demanda-t-elle, perdue.
- Est-ce que ça va aller ? Pour toi ?
Alexia eu un sourire désabusé.
- Je ne peux pas en être sûre mais je dois passer des examens bientôt et pour l'instant les fioles font effet. Donc oui, ça ira.
- Bien...Parce que je ne compte pas te perdre maintenant.
Il fallut une seconde à Alexia pour comprendre ce qu'il venait de dire et elle resta figée.
- Qu'est-ce que... ?
- Je ne dis pas que tu es totalement pardonné, tu as intérêt à aller voir Remus aussi, mais on a assez perdu de temps tous les deux.
- Vraiment ?
- Quoi, tu voulais que je te dise le contraire ?
- Non ! S'écria-t-elle immédiatement.
Sirius sourit, amusé, tandis qu'elle rougissait. Sans autre forme de procès, il ouvrit ses bras en signe d'invitation et elle se blottit contre lui sans attendre. Merlin ça lui avait manqué ! Elle pressa son corps un peu plus contre lui, ses émotions nouant son ventre. Elle n'avait plus envie de bouger à vrai dire, tellement elle se sentait bien, surtout quand il resserra sa prise autour d'elle. Presque inconsciemment, elle chercha sa main et il entremêla leurs doigts ensemble. Il l'embrassa sur le front.
- Donc on se jure de se dire la vérité maintenant ?
- Oui, promis, dit-elle, la voix étouffée contre son torse.
- Bien
Alexia releva la tête et sourit, les yeux brillants.
- Justement...autant commencer tout de suite. Tu te souviens de ton balai préféré en troisième année ?
Il fronça les sourcils, pas certain de savoir où est-ce qu'elle voulait en venir.
- Evidemment, je l'adorais !
- Bah...il se pourrait que ça ne soit pas vraiment le saule cogneur qui l'ai cassé...
- Quoi ?!
- Je suis désolé, je voulais juste l'essayer et j'ai perdu le contrôle...
Sirius secoua la tête, consterné, puis l'attira contre lui à nouveau.
- Heureusement que je t'aime, lâcha-t-il sans réfléchir.
Cette fois, Alexia se figea véritablement et son souffle se bloqua. Lui-même parut se rendre compte de ce qu'il venait de dire car elle le sentit se tendre. La gorge sèche, elle sentit son ventre se serrer encore plus. En fait, une myriade d'émotions tourbillonnait en elle.
- Je t'aime aussi, murmura-t-elle.
Sirius relâcha sa respiration, sans même s'être aperçu qu'il l'avait retenu jusqu'à ce qu'elle réponde.
Ils restèrent juste comme ça, dans les bras l'un de l'autre et assis par terre, pendant de longues minutes. Finalement, Alexia reprit, sa curiosité revenant au galop maintenant que la situation s'était arrangée entre eux.
- Sirius ? Où est-ce que tu étais ce matin ?
- Ce matin ?
- Ouais... On était tous occupé à chercher Lily et tu avais l'air contrarié quand je suis venue toquer à votre porte.
- Hum...
Son manque de réponse lui fit lever les yeux.
- Sirius...
- Ce n'est pas grand-chose, juste...juste une dispute avec mon frère.
Dire qu'elle ne s'attendait pas à ça était un euphémisme.
- Tu as été parlé avec ton frère ? Répéta-t-elle, surprise.
Sirius hocha la tête. Alors qu'il ouvrait la bouche pour commencer à lui raconter, les souvenirs lui revinrent à l'esprit.
« Sirius chuchota à James qu'il devait aller faire quelque chose puis tourna les talons sans attendre la réponse. Il ne prêta pas attention à Alexia qui le suivait des yeux et franchit la porte de Grande Salle au plus vite. Une fois dans le hall, il s'arrêta dans une alcôve pour regarder la carte du Maraudeur. La plupart des élèves étaient actuellement en train de prendre leur petit déjeuner, il repéra aussi Dorcas et Lucinda qui se baladaient dans le parc, visiblement très proches, mais il eut besoin de quelques secondes de plus pour trouver son frère qui était encore près des cachots. La ponctualité n'avait jamais été le fort de Regulus après tout et il se souvenait que leur père criait souvent quand son fils cadet arrivait en retard pour le dîner.
Chassant les souvenirs de Square Grimmaurd, Sirius s'engagea dans les escaliers. Il avait passé la nuit à se retourner dans son lit d'infirmerie pour savoir s'il devait aller parler à son frère et le confronter sur sa présence avec Rosier durant l'attaque. Il avait beau avoir martelé qu'il ne voulait plus rien avoir à faire avec les Black, il ne pouvait pas juste ignorer que Regulus risquait de s'engager chez les mangemorts.
A mesure qu'il avançait dans le couloir, il commença à stresser. Il n'avait plus adresser la parole à son frère depuis sa fugue et il n'avait aucune idée de ce qui allait se passer. Il n'avait pas dit aux autres ce qu'il avait l'intention de faire, même pas à James, tout simplement parce qu'il n'était pas sûr de lui.
Soudain, il vit une silhouette un peu plus loin.
- Regulus ! Appela-t-il sans réfléchir.
Son frère se retourna et il ne réussit pas à cacher sa surprise derrière son habituelle expression froide. Evidemment, son masque se remit en place une seconde plus tard mais quand même.
- Sirius... Qu'est-ce que tu fais là ?
- Je devais te voir.
- Oh quel changement, je pensais que m'ignorer était ton activité préférée.
- Ne commence pas, dit Sirius, agacé.
- Toi ne commence pas, répliqua-t-il. Qu'est-ce que tu veux ?
- Te parler de tes fréquentations.
Cela eu le mérite de faire rire Regulus, bien que ce dernier fût clairement ironique.
- Depuis quand est-ce que tu t'en soucie ?
- Depuis que tu fréquentes Rosier et des mangemorts !
- Ne parle pas de ce que tu ignores...
Sirius s'avança et serra les poings. Si son petit frère voulait jouer à ce jeu, il allait vite se rendre compte que lui aussi avait des années d'expérience concernant le fait de cacher des choses.
- J'en sais assez pour t'avoir vu en plein milieu de la rue avec Rosier en train de terroriser un village !
- Je n'ai rien fait, nia-t-il.
- Arrête de me prendre pour un imbécile, Reg' !
Regulus se demanda combien de fois il allait avoir cette conversation. Entre Livia, Marlène et Sirius, il avait envie de tous les envoyer balader. C'était sa vie, non ? Pourquoi personne ne voyait le poids qu'il avait sur les épaules ? On ne pouvait pas dire non éternellement au Seigneur des Ténèbres, surtout quand celui-ci s'intéressait de près à votre famille. Il ne prétendait pas être contre tous ses idéaux, comme Marlène, ni condamner l'usage de la violence, comme Livia, mais il se laissait plus porter par le cours des évènements qu'autre chose. Certains diraient que c'était de la facilité, lui y voyait plus de l'intelligence. Ça ne servait à rien de lutter contre l'inéluctable.
- Crois ce que tu veux Sirius, mais laisse-moi tranquille. On s'en portera mieux tous les deux.
Il ramassa son sac et amorça un geste pour s'éloigner, seulement son frère le saisit par le bras. Quand sa manche remonta, il vit clairement un éclair de soulagement passer sur son visage en constatant qu'il ne portait pas la marque...
- Je ne te laisserais pas gâcher ta vie sans rien faire, dit Sirius.
- Pourquoi ? Répliqua-t-il avec hargne. Ça n'a pas paru te déranger quand tu es parti !
- Qu'est-ce que je suis supposé comprendre ?
- Rien...
- Non, vas-y je t'écoute !
Regulus serra la mâchoire.
- Je trouve ton accès d'inquiétude assez hypocrite c'est tout...
- Ne te place pas en victime ! Personne ne t'a forcé à rejoindre Rosier !
- Et comment est-ce que tu pourrais le savoir ? Tu n'es plus à la maison et tu ne me regardes plus dans les yeux quand tu me croises dans un couloir !
- Je t'ai proposé de venir ce soir-là, souffla Sirius. Tu aurais pu me suivre.
Regulus écarta les bras tellement il trouva la réponse absurde.
- Pour aller où Sirius ? Chez James Potter ?
- Oui !
- Oh je vois ça d'ici, railla-t-il.
- Qu'est-ce que tu attendais de moi alors ?
- Que tu sois mon frère ! Que tu ne tournes pas vers le grand Potter en m'oubliant au passage !
Les yeux de Sirius lancèrent des éclairs.
- James est mon frère, plus que tu ne le seras jamais !
La phrase claqua plus forte que les autres, les mots semblant rebondir contre les murs comme un écho infini. Les deux frères se figèrent face à face, la respiration haletante, puis Regulus recula d'un pas.
- Je crois que tu as tout dit, Sirius.
- Mais...
- Pour quelqu'un qui prétend se soucier encore de moi tu as une drôle de façon de le montrer, ajouta-t-il cyniquement. Mais après tout, c'est toi le meilleur entre nous deux, pas vrai ?
- Reg'...
- Remballe tes leçons de moral de Gryffondor et va te regarder dans un miroir. Je ferais ce qu'il faut pour devenir l'héritier que tu n'as pas su être par lâcheté.
Sirius garda le silence tandis que son frère s'éloignait, sa cape battant derrière lui dans un mouvement sinistre. Il aurait pu le rattraper, le forcer à l'écouter, lui assener une multitude d'argument... Pourtant, il savait que ça ne servirait à rien. Si Regulus pouvait être détourner de la pente sur laquelle il s'était engagé, ce n'était certainement pas par lui. Ils avaient trop de rancœur entre eux et Sirius n'était pas prêt à faire marche arrière pour revenir vers sa famille, pas après s'être enfin échappé de l'enfer.
Finalement, il se remit en marche et retourna au dortoir. Il n'était pas d'humeur à aller en cours ».
Alexia se contenta de le fixer, les larmes aux yeux. Elle n'avait jamais voulu s'immiscer dans la relation conflictuelle qu'entretenait Sirius avec son frère, elle laissait ça à James. Cependant, si Sirius lui racontait cette dispute c'est qu'il avait assez confiance en elle sur ce sujet et elle en ressentit une certaine fierté.
- Tu vas bien ?
- Honnêtement ? Oui je pense... Je ne peux plus aider Regulus, plus maintenant.
- Il s'en rendra compte un jour, tu sais, dit-elle avec douceur. Il t'aime malgré tout...
Sirius haussa les épaules. A vrai dire, il ne voulait pas continuer à en parler. Sans lâcher la main de la jeune fille, il se remit debout et elle suivit le mouvement sans protester. L'heure tournait et ils devaient retourner à la salle commune, James et Lily avaient besoin d'eux ce soir après leur aventure éprouvante de la journée.
Cependant, il avait envie de faire quelque chose depuis la seconde où ils s'étaient réconciliés.
- Sirius tu viens... ?
Alexia ferma les yeux instantanément en sentant les lèvres de Sirius sur les siennes. C'était un baiser lent, un baiser doux, un baiser de retrouvaille et elle laissa échapper un soupir de bien-être à la sensation familière. Ses mains vinrent se perdre dans ses cheveux noirs tandis qu'il resserrait sa prise autour de sa taille. Il l'embrassa jusqu'à ne plus pouvoir respirer et elle éclata de rire quand ils se séparèrent.
- Merlin ce que ça m'avait manqué ! Dit-elle, heureuse.
- Moi aussi...
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