Chapitre 14
En effet, Eugène m'avait dit qu'ils avaient récupéré des vivres. Ce qu'il avait omis de me dire, c'est qu'il n'y avait pas que de la nourriture dans ces bocaux ! Il y avait là une multitude d'insectes divers et variés ! Des libellules jusqu'aux criquets les plus gros que je n'avais jamais vus, tout cela me semblait irréaliste ! Comment avaient-ils pu réussir à attraper autant de petites bêtes sans que je ne le remarque ? Il est vrai que je ne les voyais plus beaucoup depuis que j'étais devenu le protégé de Callum, mais de là à ne pas voir que mes amis me préparaient une telle surprise !
Nous nous promîmes alors de relâcher toutes ces charmantes bestioles lorsque nous quitterions le village. Car oui, chacun avait des projets pour plus tard et aucun ne prévoyait de rester dans ce hameau. Surtout pas les faux jumeaux qui prévoyaient déjà de fuguer de chez eux depuis un bon moment...Lisette voulait devenir infirmière et moi...pourquoi pas écrivain ? Mais pour faire des études, il fallait aller à la ville. Monsieur Thomas nous l'avait bien fait comprendre.
Aussi jeunes que nous étions, nous avions parfaitement compris qu'il nous faudrait quitter cet endroit tôt ou tard. Ainsi lorsque je rentrai le soir à la ferme, j'avais la tête pleine d'idées moroses. Il me faudrait laisser ici ma mère, mes grands-parents, la ferme tout entière en fait. Et même Callum si on y réfléchissait bien. A neuf ans, je me rendais bien compte que ça ne serait pas facile du tout...
« Que se passe-t-il, mon chéri ?m'interrogea soudainement ma mère pendant le repas. »
Jouant avec ma cuillère dans mon assiette de soupe, je relevai les yeux vers elle.
« Maman, comment je vais faire pour partir d'ici ?demandais-je d'une voix sourde en sentant un nœud me serrer la gorge, comment je vais faire ?
-Viens là, m'appela-t-elle aussitôt en ouvrant ses bras. »
Je bondis de ma chaise pour venir me blottir dans ses bras en pleurant à chaudes larmes. Elle me serra contre elle sans poser de questions et m'embrassa doucement dans les cheveux. Papi et mamie restaient silencieux.
« Dis moi tout, mon petit chéri, murmura ma mère tandis que je relevais des yeux brillants d'émotion vers elle, mm ? Qu'est-ce qu'il t'arrive ?
-Si...Si je veux faire des études, hoquetais-je piteusement, il faut que...que je partes d'ici...Pas vrai ?
-Alors ça, grommela grand père dans sa barbe, c'est pas encore fait.
-Papa, s'il te plaît, gronda maman en le fusillant sûrement du regard, n'en rajoute pas.
-Enfin pour ce que j'en penses, se reprit aussitôt papi, t'inquiète pas gamin. C'est pas pour tout de suite !
-Exactement !enchaîna mamie d'une voix gaillarde. Tu as encore du temps avant de penser à tout ça, Émile.
-Et puis, tu pourras toujours venir nous voir, sourit ma mère en prenant mon visage entre ses mains, même une fois installé en ville. D'accord ? »
J'eus un moment d'hésitation et reniflai piteusement.
« D'accord, soufflais-je en osant un sourire timide. »
Ma mère me fit un grand sourire rassurant et m'embrassa délicatement le front. Rassuré, je finis le repas dans un meilleur état d'esprit que je ne l'avais commencé. Je m'endormis d'ailleurs sans aucun soucis.
Quelques jours passèrent après cet incident. Je l'avais déjà oublié. Nous étions dimanche aujourd'hui. Mamie m'avait appelé dans le jardin. Je la rejoignis donc en trottinant et attendis. Elle était agenouillée et en train de planter des carottes. Ses gestes étaient précis et on sentait qu'elle avait beaucoup pratiqué. Le potager était tout simplement magnifique et parfaitement entretenu grâce à elle !
« Hé bien mon petit, sourit-elle en terminant sa rangée de carottes, on va aller chercher les fruits que les oiseaux auront bien voulu nous laisser ! Qu'en dis-tu ?
-Oh oui super !acquiesçais-je avec enthousiasme, et on va faire des tartes ensuite ?
-Des confitures, mon p'tit !rit-elle devant ma joie débordante, des confitures. Tu veux bien m'aider à me relever ? Que la terre est basse pour une vieille comme moi ! »
Tandis qu'elle riait, elle s'appuya sur moi et se releva lentement. Après m'avoir remercié, elle entreprit de marcher en direction du verger. Là, une multitude d'arbres fruitiers nous attendaient. Il y avait aussi des mûriers et des framboisiers. Mais ce qui nous intéressait particulièrement aujourd'hui était les cerises ! Les arbres en étaient remplis ! Il nous faudrait au moins des tonneaux pour tout contenir !
Nous passâmes donc toute la matinée à ramasser les cerises. Pour la plupart, elles étaient déjà tombées au sol. Mais pour celles qui n'y étaient pas, il fallait grimper à l'arbre. Après être allé chercher l'échelle, je l'appuyai contre le tronc le plus proche.
« Fais attention mon petit, s'inquiéta aussitôt mamie en me regardant commencer à escalader l'échelle, je ne voudrais pas que tu te fasses mal !
-T'inquiète pas mamie !la rassurais-je en souriant joyeusement, je gère ! »
Et j'arrivai en effet sans aucun problème dans l'arbre. Mon panier en osier en bandoulière, j'entrepris de récupérer un maximum de cerises avant de redescendre. Je répétai l'opération plusieurs fois avant de considérer que l'arbre ne contenait plus de fruits mûrs. Il nous fallut plusieurs cagettes entières pour réussir à amasser tous les fruits que nous avions récoltés.
Le midi vint bientôt et je remarquai que mamie avait profité que je me trouvais dans les arbres pour aller chercher un petit panier. Lorsqu'elle releva le tissu qui cachait le contenu de ce dernier, je vis apparaître un pique-nique somptueux. En tout cas, j'étais suffisamment affamé pour le trouver ainsi. Je dévorai mon sandwich avec appétit sous les yeux amusés de ma grand-mère et mangeai mon petit pain au chocolat avec le même entrain.
Une fois notre repas englouti, nous nous remîmes à la cueillette des fruits. Cela nous prit encore toute l'après-midi. Mamie me fit même rire en me disant que nous allions nous retrouver à faire les confitures de nuit. Je lui fis remarquer en rigolant que je devais ramener les vaches du champ avant qu'il ne fasse nuit. Aussi je dus m'éclipser en fin de journée pour partir au champ récupérer les bestiaux.
Le soir, lorsque j'allai me coucher, j'étais tout simplement épuisé, mais heureux.
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