Chapitre 39

Nalphas n'était pas encore revenu, mais Babylas et Stanislav devaient commencer la réunion.

Babylas posa sur la table une clé. L'objet ne se liait à aucune serrure physique, et pourtant elle ouvrait bien une porte.

— Un passe-passage, l'appela-t-elle vulgairement.

Stanislav s'était bien caché de discuter de ça avec Whil. Ou plutôt, il avait tut le sujet et n'avait jamais réellement trouver l'occasion pour l'aborder de nouveau.

Pour quitter les Téras et rejoindre le monde des Hommes, ces passes demeuraient le plus sûr des moyens. Les Lilithus possédaient cette clé, mais toutes créatures ne pouvaient pas s'en vanter.

— Nous nous préparerons pour la guerre ici. J'ai un contact qui règlera notre passe-passage pour directement nous rendre au sein du palais de ces sangsus de Saeva, cracha-t-elle son venin.

Bien sûr que Babylas souhaiterait commencer par ceux ayant pris la couronne à sa sœur et son fils. Avec ce pouvoir en main, Stanislav saurait anéantir la Ronde sans plus de cérémonie, épaulé du peuple vampirique. Cela n'incluait pas que les vampires, mais une multitude de créatures. Les Lilithus, pour commencer, mais également les Kérès. Il en connaissait au moins une. Jeanne de Leau, surnommée le Papillon écarlate. Il avait de son côté Peter, beau-frère de cette dernière. Elle le suivrait, il en était persuadé. Il lui suffirait de bien s'y prendre. Tout était politique et diplomatie.

— Tu devrais cacher cette clé, décida-t-il alors.

— Stanislav ?

— Whil voudra s'en servir.

— Oh, tu veux dire que la Carmagnole se battra à nos côtés ? C'est effectivement plus judicieux puisqu'elle...

— Non, je veux qu'elle reste ici.

— Que dis-tu ?

Il était tout juste parvenu à lui faire intégrer que les créatures du Téras ne se composaient pas de monstres mais d'individus doués de conscience et de libre-arbitre. Il n'était pas question qu'elle retourne tout de suite sur la terre des Hommes.

— La Ronde pourrait encore l'avoir sous son influence.

Il était certain que Babylas ne partageait pas sa pensée.

Le père de Whil était un détraqué capable de retourner le cerveau des créatures aux psychés les plus solides. Alors récupérer la Carmagnole à ses côtés pour lui faire de nouveau croire que le Téras était l'ennemi...

— Attendons le retour de Nalphas, décida Babylas en croisant les bras autour de sa poitrine.

Mais bien vite, les deux furent interrompus.

Quelque chose n'allait pas. Babylas et Stanislav se regardèrent, mettant fin au début de cette réunion à laquelle les rejoindrait bientôt Nalphas. On entendait de l'agitation dans les couloirs. Que se passait-il ?

— Va voir, ordonna Babylas.

Il n'eut pas besoin d'aller voir, quelqu'un entra. Il chercha et posa ses yeux sur lui :

— Stanislav, viens nous aider, le dérangea le mâle inquiet.

Il sortit tout aussi vite. Pour aucune raison, l'impression que le problème soit lié à Whil l'envahissait.

— Athiny a joué à la conne, la Carmagnole essaie de la tuer. Nalphas la combat en ce moment.

Il ne lui en fallut pas davantage pour courir. Même sans l'aide des siens, il trouverait vite sa compagne.

Athiny était à demi une Furie. En théorie, leurs yeux entrainaient à la folie, influençaient le contrôle du corps. Mais Whil n'était pas une simple hybride. En plus d'être une Amazone, son apprentissage comme guerrière de la Ronde l'entrainait à des combats contre le Téras. Sa folie pourrait bien être génocidaire.

Il y avait peu de chance qu'elle parvienne à tuer le clan, encore moins sans sa capacité d'analyse. Mais que Nalphas soit obligé de l'abattre pour protéger la fille de son lilītu...

Finalement, ses pas l'emmenèrent jusqu'au jardin de Lilith. Le fracas de deux lames résonna en écho.

Nalphas résistait de sa longue expérience mais Whil n'en démordait pas. Un regard froid, la fatigue inexistante, la jeune femme n'attaquait pas réellement le démon. Athiny, au sol et terrifiée, ciblée par la créature imperturbable, comprenait son tort que trop bien.

Whil avait été attaquée, elle ne s'en prendrait qu'à son attaquant bien imprudent.

Puis il l'entendit, tout comme Nalphas, c'était certain. La lame du démon s'effritait. Il ne tiendrait pas longtemps. Et appréhendant déjà, Nalphas laissa sa peau se griser, prêt à se transformer.

Il était temps pour Stanislav d'intervenir :

— Whil !


***


Ses paupières battirent frénétiquement tandis que Whil reprenait conscience.

La Furie à moitié succube, à terre, suppliait de peur, les larmes aux yeux. Une lame venait de faire obstacle à Whil. Celle de Nalphas. Au loin, Stanislav avait hurlé son prénom, arrivant en volant jusqu'à eux. Elle ne se trouvait plus dans les couloirs du palais mais en extérieur, dans une cour ouverte sur un ciel de jour au jardin étrangement verdoyant, rempli d'arbres à fruits et de fleurs.

— Est-ce que tu reviens à toi ? questionna Nalphas.

Elle opina de la tête, ne comprenant pas la situation, mais ayant tout de même sa petite idée.

— Que m'est-il arrivé ?

— Athiny, soupira le démon en rangeant son épée. Elle a voulu t'hypnotiser.

— Je... Je voulais juste...

Mais la fureur dans le regard noir de Nalphas retint la Furie d'en dire davantage.

— Tu t'attendais à quoi, Athiny ?

— Elle est une hamadryade, je voulais juste lui prendre son sang pour te le donner, pleura-t-elle à la manière d'une enfant.

La technique fonctionna, Nalphas s'attendrit et l'aida à se lever. Elle tremblait de tout son corps. Mais cela ne répondait pas à la question de Whil.

— Je ne comprends pas, continua Athiny. Pourquoi je n'ai pas réussi ?

— Tu as réussi, intervint alors Stanislav.

Il enveloppa Whil par derrière, posa son menton sur son épaule pour laisser la caresse lui brûler la peau. A ses côtés, y avait-il un moyen pour elle de ne pas se rapprocher d'un état de chaleur ?

— Mais Athiny, ma Whil est une guerrière ayant étudié le Téras bien plus que toi en bien moins de temps. Ses instincts sont puissants et sa volonté très grande.

Pourquoi susurrait-il ces mots aussi près de son oreille ? Pourquoi sa main effleurait ses hanches avec tant de lenteur ? Pourquoi son corps réagissait-il aussi vite ?

Puis, lentement, l'étreinte devint tel une prison, l'empêchant de se désunir de la fusion évidente.

Elle inspira profondément, cherchant à se calmer.

— Je suis désolée, Athiny. Je ne voulais pas...

Les yeux d'Athiny se posèrent de nouveau sur elle. Stanislav fut réactif, lui cachant la vision de la Furie qui n'apprenait pas de ses erreurs.

— Athiny, la prochaine fois je n'interviens pas et je la laisse t'arracher la tête avec celle de Nalphas, menaça-t-il la jeune femme.

Soulevée du sol, Whil hoqueta de surprise, s'agrippant aux épaules du démon.

— Qu'est-ce que tu fais ?

— J'aime bien t'avoir dans mes bras.

— Ce serait handicapant pour toi comme pour moi si tu deviens incapable de me laisser marcher seule.

Mais ce dernier se refusa à la lâcher, retournant à l'intérieur pour les ramener dans la chambre. Il les y enferma, acceptant enfin de la libérer.

Il était encore inquiet. Elle l'avait poussé à une telle crainte, à une méfiance aussi grande. Pour autant, le fait d'avoir réagit à sa voix, d'être sortie de la puissante hypnose d'une Furie simplement en l'appelant aurait pu le rassurer. Ils étaient liés. Et elle l'avait accepté. Pourquoi fuirait-elle leur lien ?

— Stanislav, je ne vais aller nulle part.

— Et si quelqu'un t'enlevait à moi ?

La discussion devenait sérieuse. Le problème était-il plus complexe qu'elle ne l'avait pensé ?

Bien loin d'être une chaudasse, une femelle capable de rassurer son compagnon de langoureux baisers et d'un déhanché aguicheur, elle décida de faire les choses à sa manière. Prenant le visage de son amant, elle plongea son regard dans le sien, un sourire naturel sur le visage. Elle ne ressentait aucun besoin de se forcer une telle expression, parce qu'elle était heureuse comme jamais elle ne l'avait été auparavant.

— Si quelqu'un m'enlève, ne viendras-tu pas pour moi ?

Il l'embrassa, sans aucune hésitation.

Whil avait grandi en entendant des féministes s'offusquer de ce genre de choses dont le Téras se fichait bien puisque les règles y étaient bien différentes. Pourtant, être embrassée ainsi... Comment s'en plaindre ? Elle aimait ça.

Stanislav et elle, ce lien entre eux, les accordaient sur les mêmes passions, en un rythme n'appartenant qu'à eux seuls.

Une seule chose frustrait l'hybride : elle ne connaissait rien des démons Lilithus. Et ça, ce n'était pas normal. Être en couple avec une telle créature et être incapable de comprendre ses instincts ? Il lui fallait y remédier, et très vite.

Mais pas tout de suite, Stanislav semblait avoir faim de son contact. A moins qu'il n'ait s'agit de son désir à elle alors que ses propres mains tiraient le pantalon de son mâle pour le coller l'un à l'autre. Devenait-elle plus lubrique qu'un bestial démon de la luxure ?

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