24 | L'envers du décor
La crevette et sa bouche framboise venaient de se dissoudre avec la consistance d'un rêve, emportant avec elle mon souffle et toutes mes certitudes.
Dans la pénombre, je reste sidéré par ce qui vient de se passer. C'était pourtant prévisible. Quand on provoque le désir, il faut assumer d'en récolter les péchés. Je lui ai envoyé des signes, elle y est allée à sa manière. Sans nuances.
Habité d'une impulsivité que je ne me connaissais pas, j'ai répondu à sa folie. C'est un risque qu'aucun homme normal n'aurait pris, en tout cas pas quelqu'un qui tient à la vie. Il faut croire qu'en sa présence je ne suis plus ni l'un ni l'autre.
Je jette un œil aux alentours, personne ne semble nous avoir aperçus. Je n'ai rien à redouter de quiconque, mais ça m'aurait attiré des problèmes, et j'en ai déjà suffisamment.
Quelque chose m'a plu chez Kristina qui n'aurait pas dû me plaire. Je me croyais trop préoccupé, trop abîmé, pour pouvoir ressentir ce genre de passion. Ses étincelles ont réveiller en moi un feu que je pensais éteint et des émotions que je n'imaginais plus possibles.
Elle est dangereusement attirante, si magnétique qu'elle suscite des envies de mordre et de caresser à la fois. Et quand on y goûte, on sait qu'on va souffrir, longtemps; car faire fondre sa glace est une chose, mais rien ne garantie que son cœur se dégèle.
Bien que sa façon de m'embrasser soit un aveu, il est probable qu'elle ne l'admette jamais et que tout soit à recommencer. J'ignore si elle va assumer, ou si c'est juste un égarement provisoire par goût du risque, pour se donner l'illusion qu'elle contrôle encore sa vie en jouant avec l'interdit.
Ce que je sais, c'est que j'ai complètement perdu la tête, ou alors elle m'a ensorcelée. Dans tous les cas, je déconne un max. Elle est non seulement la belle-fille de César, mais aussi la fille de l'homme qui a peut-être enlevé ma sœur. Rien que ça aurait dû suffire à ériger un blocus infranchissable.
Et pourtant...
Il faut que je me rende à l'évidence : je ne peux plus me passer d'elle.
Mon cœur commence à battre moins fort, moins en désordre. Je sors mon briquet et allume une cigarette pour cesser de donner du sens à ce qui n'en a pas. J'aspire une bouffée, fais quelques pas en direction du registre posé sur la table et essaye de me recentrer sur la raison de ma venue : trouver l'écriture qui correspond à celle du photographe.
Mon regard est attiré par la fête derrière la baie vitrée. Toute cette petite musique sirupeuse ne réussit pas à masquer leur sournoise cruauté dissimulée sous de grands sourires qui se reflètent dans les coupes de champagne.
Au milieu de cette laideur, Sacha danse avec Kristina. On dirait un ver de terre accroché à une étoile. Je sens l'amertume me grignoter l'âme et tire un peu plus fort sur la nicotine.
Ni raisonnable, ni docile, la crevette n'en demeure pas moins terriblement loyale. Même si elle gueule et se rebelle, elle reste formatée à leur vision du sacrifice. Elle le démentirait, sauf que ça crève les yeux.
Soudain, mon téléphone vibre dans ma poche. C'est le Commandant qui m'envoie le dossier sur Novak. Je n'ai pas le temps de l'ouvrir car l'atmosphère change instantanément. La musique s'arrête, des cris résonnent et tout le monde semble paniquer.
Les muscles tendus, mon esprit se met aussitôt en alerte. Kenan déboule sur la terrasse, sa férocité habituelle a cédé la place à une inquiétude inhabituelle.
— Le toubib, viens vite on a besoin de toi ! me hèle-t-il de loin.
Je jette mon mégot sans hésiter, et me précipite à l'intérieur. Un épais silence enveloppe la salle. Fendant la foule d'invités agglutinés, je me fraye un passage en suivant César des yeux. Il ne tarde pas à me voir. Normal, je dépasse tout le monde d'une tête.
Je m'approche et mon cœur se serre fort :
Kristina est étendue sur le sol, inerte.
En la voyant ainsi, j'ai une brusque accélération cardiaque. Son corps semble sans vie. Inquiet, je me penche vers elle et lui secoue un peu les épaules. Aucun signe, pas le moindre frémissement.
Aussitôt, je bascule délicatement sa tête en arrière d'une main tandis que de l'autre je prends son pouls. Son souffle chaud caresse ma joue et apaise mes craintes. Elle respire. Ses veines chaudes pulsent entre mes doigts. Son cœur bat.
Mes yeux se lèvent vers César. Mâchoire serrées, sa détestation des imprévus lui dessine un air furieux. Je l'interroge du regard pour savoir ce qu'il s'est passé. En guise de réponse il jette un oeil mauvais à Sacha. Lui, d'ordinaire prétentieux et imbu, semble embarrassé; comme s'il craignait quelque chose. Je l'ai senti mal barré avant même qu'il n'ouvre la bouche.
- Elle... Elle s'est évanouie, d'un coup, je.... je ne comprends pas, articule-t-il maladroitement.
L'Empereur lève une main pour qu'il se taise. Tanya, à ses côtés, pousse un lourd soupir traduisant que tout ça l'agace profondément.
Je passe une main sous la tête de Kristina à la recherche d'une éventuelle blessure. Rien. Elle n'est pas pâle et ses lèvres n'ont pas perdu leur couleur.
- Ça va aller, murmurai-je pour calmer les esprits.
Un soupir de soulagement parcourt l'assistance. Les invités se dispersent, rassurés de voir l'incident sous contrôle. Sauf César qui maintient son regard appuyé. Il exige des réponses. Je hoche la tête pour lui indiquer que je gère et qu'il a tort de s'inquiéter.
- Où puis-je l'allonger ? lui demandé-je.
Avec cette autorité tranquille de ceux qui ont l'habitude de l'exercer, il claque des doigts et deux types se rapprochent pour me montrer la voie. Alors, je glisse un bras sous la nuque de Kristina, l'autre sous ses genoux et la soulève.
A chaque pas que je fais, ses bras qui pendent dans le vide, font tinter ses bracelets. La chaleur de son corps niché contre le mien et sa fragilité me rongent le cœur. Il ne reste rien de celle qui ne se laisse ni faire ni approcher. Pour une fois, notre proximité est facile. Trop facile. Presque injuste.
A la recherche de la moindre réaction, je ne lâche pas son visage des yeux. Calmes et paisibles, ses traits restent fermés. Pourtant, par moments, ses joues se crispent. Signe qu'elle n'est plus évanouie.
J'ignore à quoi elle joue, ni pourquoi elle le fait, mais je suis prêt à jouer le jeu. L'important c'est qu'elle aille bien. Et si pour cela il faut l'éloigner de tout, je la porterai où elle le voudra.
Autour de moi, les gardes me guident dans un couloir du premier étage. Devant une porte ouverte par l'un des hommes, je dépose Kristina sur un lit.
- Apportez de l'eau froide et une serviette, ordonné-je en enlevant mon manteau.
L'homme s'exécute et referme la porte derrière lui. Le silence s'installe. Au bout d'un moment, comme elle ne bouge toujours pas, je lui dis que nous sommes seuls et qu'elle peut arrêter de faire semblant.
Elle a fait un petit sourire du coin des lèvres, puis m'a braqué son regard en pleine figure.
- C'est la première fois qu'on me porte comme une princesse, lâche-t-elle avec un rire bref en s'asseyant au bord du lit.
Adossé au mur, je croise les bras et lui réponds :
- C'est rassurant. Ça veut dire que tu ne t'es jamais évanouie avant.
Elle esquisse un sourire qui m'a paru triste, quand un coup retentit à la porte. Avant que je n'aie le temps de répondre, un type entre. Sans aucune subtilité, Kristina s'écroule à la renverse sur le lit comme un opossum feignant sa propre mort. Pour l'Oscar de la meilleure actrice c'est loin d'être gagné.
Je réfrène un rire qui menace de m'échapper tandis que le type, qui attend une consigne, me lance un regard perplexe.
- Merci, vous pouvez disposer, le congédiai-je.
Il sort sans poser de questions. Je pose la serviette et la carafe d'eau sur la table de chevet, puis enfonce les mains dans mes poches et l'observe en m'interrogeant sur les raisons de ce numéro.
Je savais qu'elle ne faisait pas ça pour attirer l'attention ou susciter l'inquiétude; j'étais donc tenté de penser que c'était plutôt pour mettre un terme à la soirée, ou un prétexte pour régler des comptes dont j'ignore tout.
- J'aimerais vraiment comprendre d'où te viens ce genre idée, m'amusé-je en souriant.
- Pour abréger la torture ! lâche-t-elle avec l'air d'un chat en colère prêt à sortir ses griffes.
Etonné par cette soudaine colère, je penche la tête sur le côté en sondant ses yeux orageux.
- La fête allait se terminer. Tu aurais pu att...
- Non ! Je ne pouvais pas attendre ! Se redresse-t-elle brusquement.
Ses traits se durcirent et une fureur incontrôlable s'empara d'elle. Marchant de long en large, elle parlait a mi-voix plus pour elle-même que pour moi :
« Me faire ça,... Non mais j'hallucine,... Ah ! Le salaud, il va me le payer... »
Certes, elle est très douée pour refouler ce qu'elle ressent, mais quand il s'agit de colère, elle s'exprime sans difficulté. Les injures s'enchaînent sans suite : « Putain de... Espèce de... Fils de...».
Au bout d'un moment, tout a coup, elle s'assoit en prenant sa tête entre ses mains. Comme elle reste muette, les prunelles noyées sur la moquette, je m'inquiète et lui demande qu'est-ce qu'il y a.
Elle relève le front en me fixant avec sa tête de guerrière et me dit la voix nette et sans détour :
- Je vais le tuer.
Je n'ai aucun mal à la croire tant sa détermination saute aux yeux. Elle saisit un escarpin à talons aiguille et se rue sur la poignée prête à jaillir dehors. D'un geste rapide je fonce sur elle, attrape son bras d'une main et pose l'autre à plat contre la porte pour l'en empêcher.
Kristina, prise de court, en eut le souffle coupé. Rage au cœur et amertume aux lèvres, elle lève les yeux en fronçant méchamment les sourcils.
- Quoi, tu comptes me refaire le coup de la « manière forte » Cardini ? s'agace-t-elle.
Implicitement, la situation venait réveiller une page du passé. Il y a des choses qui décidément ne changent jamais, ris-je intérieurement.
- Pourquoi tu es revenue ? demandé-je dans l'espoir de dévier son attention.
- Parce que c'était l'anniversaire de l'abruti qui me sert de mari ! râle-t-elle les dents serrées.
Ce prétexte n'est pas crédible. Sacha n'est qu'un symptôme du mal qui la ronge, et c'est insupportable de la regarder se diriger droit dans le mur sans rien pouvoir faire d'autre que de la regarder faire.
- Ah bon, tu es revenue pour lui, vraiment ?! pouffé-je malgré-moi.
Ma réflexion trop piquante, ne fait qu'attiser sa rage. Son corps se tend entre mes doigts et le voile d'amertume qu'elle porte sur son visage devient de plus en plus opaque.
- C'est pas toi qui disais qu'il ne faut pas refouler ce qu'on ressens ? retorque-t-elle en éludant la question, faisant jouer ses lèvres sournoises et tentatrices plus près des miennes.
Derrière sa douce séduction, brille une lueur de folie dans ses yeux, comme si elle mesurait la taille du cercueil qui m'accueillera si je persiste à entraver ses plans.
C'est le souci, avec cette fille : je ne sais jamais si elle veut me tuer ou m'embrasser.
D'habitude, je suis confiant, mais là, seul quelqu'un muni d'un fusil à pompe calibre 12 et d'une demi-douzaine de balles aurait pu la stopper. Je vais pas m'y risquer. D'une, car l'expérience dans ma cuisine m'a appris que sa hargne n'est pas facile à canaliser. Et de deux, si on nous surprend, je finirai troué comme une passoire.
Certes, je ne suis pas un saint, mais je ne suis pas non plus complètement suicidaire.
De plus en plus déboussolée par son corps à quelque centimètres à peine du mien, je m'efforce tant bien que mal de demeurer impassible en cherchant des mots qui la convaincront.
- Écoutes, prononcé-je calmement. Si tu le tues, tu seras obligée de te cacher, et tu ne pourras plus sortir d'Istok. Mais si c'est ce que tu veux...
En signe d'armistice, mes doigts libèrent son bras tandis que ma paume glisse de la porte en reculant d'un pas. Je n'avais pas mieux pour maîtriser son caractère de feu qui menace de déborder; elle est la première étonnée.
Comme elle reste stupéfaite, je rajoute :
- Essaye quand même d'attendre 5 minutes, ce sera plus crédible, et ça laissera le temps aux invités de partir.
Hésitante, elle soutient mon regard en se mordant la lèvre inférieure. Je l'ai déjà vue faire plusieurs fois lorsqu'elle se bat contre ses demons. Sans la lâcher des yeux, je la surveille pour anticipe ses pensées. Finalement, elle ravale un cri de rage et abdique.
Si ça ne tenait qu'a moi, je l'aurais laissée jouer les justicière. Je l'aurais même volontiers fait à sa place. Car je ne doute absolument pas que l'ampoule grillée qui lui sert de mari a fait une immense connerie. Mais pas ici, pas maintenant. Ça aurait compliqué les choses, alors qu'elles ne sont déjà pas simples.
Du dressing, elle sort un épais gilet beige en mohair dont elle se recouvre avant de s'appuyer au rebord d'une fenêtre qu'elle ouvre. On aurait dit une bohémienne avec sa longue jupe et sa chevelure opulente piquée d'une fleur. Je ne peux m'empêcher de la trouver sublime.
L'air frais de la nuit s'infiltre, charriant avec lui le bruit des moteurs des invités qui partent. Mes pas se rapprochent. De la poche de mon pantalon, je sors un paquet de cigarettes, en allume une et lui tends, dans l'espoir que ça l'apaise.
Elle l'accepte en silence, la saisissant entre deux doigts, la main tremblante de tension refoulée. Le soupir qui s'échappe de sa bouche est aussi profond que l'impuissance que je ressens.
Une vibration, provenant de mon manteau resté sur le lit, me fait revenir en arrière. Je prends mon téléphone et décroche en voyant le prénom de Michel s'afficher. Missionné depuis trois jours pour trouver la planque de Charly, il semblerait que le sdf ait enfin du concret.
« Il vient de rentrer dans l'immeuble », dit-il à l'autre bout de la ligne.
« Très bien, j'y serai dans une demi-heure, attends-moi là-bas », répondis-je.
C'était à mon tour d'avoir de violentes envies de justice, car j'allais enfin pouvoir serrer le cou du cafard entre mes mains.
En raccrochant, mon regard croise celui de Kristina, qui s'était retournée intriguée par cette conversation. Nous nous regardions en silence, quelque part entre « reste encore un peu » et « je dois partir ».
- Je vais devoir y aller, déclaré-je en remettant mon manteau. A ces mots, ses yeux me fuient. Si tu veux je te dépose, rajouté-je vite.
Elle n'eut pas le temps de répondre qu'on toque de nouveau à la porte. C'est Axsel qui me ramène le registre. Je le remercie d'un signe de la tête, sors les clefs de la Jeep de ma poche et les lance dans sa direction.
- Mets-le sur le siège passager, et laisse tourner le moteur.
Il obtempère sans un mot. Je me tourne de nouveau vers Kristina, toujours à la fenêtre, bras croisés, immobile comme une statue.
- Je vais dire à César que tu vas mieux et que tu vas rentrer te reposer, dis-je finalement, avant de quitter la chambre.
J'ouvre la porte et avance dans le couloir. Les bruits de la fête ont laissé place à un lourd silence, à peine troublé par le lointain bruit de vaisselle que les domestiques débarrassent.
En descendant l'escalier, mes pas rapides résonnent sur les marches en marbre. Personne au rez-de-chaussée. J'hésite un instant, puis pousse la porte d'entrée.
Falco est là, fidèle à son rôle de porte-clefs, sa cellule fait la taille d'un paillasson et son regard fixe surveille les allées et venues.
- Où est César ? lui demandé-je.
- Dans son bureau, répondit-il sans tourner la tête.
Je reviens sur mes pas et m'enfonce dans le couloir qui mène au bureau. De loin, mes tympans captent des bribes de disputes. Si les bruits parviennent jusqu'ici, c'est que quelqu'un passe un mauvais quart d'heure.
Mes déductions se confirment lorsque je m'approche. La porte entrebâillée du bureau laisse filtrer une faible lumière et des grands éclats de voix. Je ne résiste pas à la curiosité et tends l'oreille.
La voix grave et énergique de César domine les bafouillages pitoyables de Sacha, qui, visiblement, fait un stage intensif en enfer.
« Tu as eu tort, petite merde, de profiter de la situation ! » vitupère méchamment l'Empereur. Le condamné couinait, multipliant les justifications incohérentes « Mais papa... je ne voulais pas... je pensais que... ».
César lève la main d'un geste sec. Le silence retombe aussitôt. Direct, ça le calme. « Ferme-la », rugit-il. La mandale qu'il reçoit en pleine figure stoppe net ses velléités et le plaque contre le mur. « Tu crois que je vais gober tes salades ? Tu me prends pour un lapin de six semaines ? » asséna César à grand renfort de baffes.
Je jette un coup d'œil rapide à l'intérieur par l'ouverture de la porte. Il dégustait cher. Le spectacle n'était pas beau à voir. César corrigeait son fils et n'était pas regardant sur la méthode employée.
Sacha ne disait plus rien, son père parlait pour deux, gueulant qu'il ne pouvait pas laisser passer certaines choses, que c'était pour lui une question d'honneur et qu'il ne permettrait pas qu'on abîme ainsi sa confiance.
Recroquevillé à terre, le pénitent tentait de protéger son visage tout en plaidant sa cause « Je ne recommencerai pas. Je te le promets... ». Il avait beau faire sa voix la plus chagrinée, rien n'y faisait, son père ne décollerait pas !
« Ne t'approches plus d'elle ! Ne la regarde pas ! Et ne t'avises plus jamais de toucher ma nièce ! » hurla César en balançant une chaise qui se fracassa contre un mur.
Les syllabes s'insinuent dans mes veines pour me glacer le sang. Nièce. De qui parle-t-il ? Kristina ? Je reste interdit. Comment est-ce possible, après tout ce que j'ai appris au sujet de Toma?
L'ombre des mensonges s'épaissit et les points ont du mal à se relier. A contrario, je compris aussitôt quel feu intérieur rongeait la crevette : ce cloporte a profité de la situation pour poser les mains sur elle.
J'ai la furieuse envie d'aller lui "toucher" la nuque à 180 degrés pour la briser. Un mélange de dégoût et de colère réveillait en moi des désirs rouge-sang. Dans mon cerveau, Sacha venait d'enclencher son propre compte à rebours.
Enragé par les scènes qui me traversent l'esprit, mon coeur fait un bruit saccadé qui finit par boucher tout le silence. Je n'entends pas les pas qui arrivent derrière moi.
- Tu comptes rester planté là longtemps ? me demande Tanya.
Sa voix grinçante me fait légèrement sursauter. Je me retourne, croise son regard hautain et fronce les sourcils en me redressant. Il ne manquait plus que cette mygale pour noircir un peu plus le tableau.
Je l'avise être venu informer César que Kristina va mieux, qu'elle peut rentrer et que je vais également partir. Tanya eu un mince sourire, presque insignifiant, assez pour traduire un mépris sans borne.
— Dites-lui qu'elle aille où elle voudra, a-t-elle rétorqué d'un ton sec. Nous avons suffisamment subi ses frasques et sa présence pour ce soir.
Sa langue est particulièrement urticante. Je sais que, si j'ouvre la bouche, ce ne sont pas des phrases diplomatiques qui en sortiront ; alors je n'ai rien répondu. Je me suis contenté d'un bref hochement de tête et suis reparti.
Au fond, j'en avais rien à foutre de Sacha, de César, et des liens familiaux qui la lient à la crevette. Tout ce que je voulais c'est qu'elle puisse se barrer de cette maison. L'emmener le plus loin possible avant qu'il ne nous prenne mutuellement l'envie de commettre un massacre.
Mais, de retour à l'étage, la chambre est vide.
Kristina a disparu sans rien laisser derrière elle. Rien que sa serviette rose au pied du lit, et un peu de son parfum aux nuances d'épices qui fait penser au soleil du sud.
Bêtement, je parcours la pièce du regard, comme si elle pouvait être cachée dans un recoin. Et remarque soudain que c'est la chambre d'une adolescente. Sûrement la sienne, si j'en juge aux nombreuses babioles et aux grands cartons à dessins, identiques à ceux dans son ancienne maison.
Je ne savais pas qu'elle avait vécu ici, chez son oncle. L'immensité de tout ce que j'ignore à son sujet m'obstrue la gorge. L'idée me fait un mal de chien ; pourtant, je dois bien admettre que je ne sais presque rien d'elle. Plus nous étions proches et plus le mystère qui l'entoure devenait confus.
Les sourcils froncés, je me demande où elle a filé. Pourquoi elle est partie sans rien dire ? J'avais cette étrange sensation qu'elle courait sans cesse à sa perte et je ne savais pas si je devais m'inquiéter.
Une part de moi se disait qu'elle avait simplement décidé de rentrer à pieds, puisque sa maison est à trois rues de là. L'autre craignait qu'elle soit allée au devant des ennuis. Avec la crevette tout est possible, et rien ne laisse présager que ce soit pour le meilleur. Une étrange lassitude s'empara de moi.
C'était tellement typique d'elle. Agir impulsivement, toujours dans la fuite en avant. Qu'espérais-je ? Qu'elle reste sagement assise à attendre l'autorisation de partir ? Un rire nerveux m'échappa.
Lorsque je quitte la chambre, l'écho de mes pas semblait remplir le vide qu'elle avait laissé derrière elle. Sur le perron, je salue Falco et Axsel d'un mouvement de la tête, sans un mot et sans ralentir. Pour eux la soirée est terminée, pour moi elle ne fait que de commencer et je n'ai pas une minute à perdre.
Regagnant mon véhicule, je m'éloigne des spirales tentaculaires de cette maison en espérant ne jamais y revenir. Le registre, posé sur le siège à ma droite, ne m'intéresse plus.
Tout ce que je ressens, c'est l'urgence d'arriver dans le 18em arrondissement de Paris. Cette fois, Charly ne m'échappera pas. Et, quand j'aurais mis la main sur lui, je lui ferais cracher tout ce qu'il sait a propos d'Ambra.
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BONNE ANNÉE !!!
Savourons la raclée que s'est prise Sacha
&
💥 let's the chaos rise 💥
Quelles seront les conséquences de cette soirée sur Sacha ? César ?
Cardini mettra-t-il enfin la main sur le cafard ?
Lui livrera-t-il ses secrets ?
Qu'a-t-il appris au sujet de Toma que nous ignorons ? Vous le saurez en même temps que Kristina au chapitre suivant, et je peux vous dire que ça va foutre un bordel : MONS-TRU-EUX !
D'ailleurs, où est-elle ?! 🤔
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