CHAPITRE 2

Le soleil frappe sur la cabane de bois à l'entrée de la plage, Victor, plus loin, replace les canoës et les planches de surf sur l'échafaudage prévu à cette effet. Le soleil commence à peine à décliner en cette fin de mois de juillet, mais son labeur n'est pas fini.

Le chargement –de canoës et planches de surf- déposé au Centre ainsi que l'argent collecté sur place, Victor peut enfin rentrer chez lui.

« - Bon boulot aujourd'hui Victor, très bon roulement et excellente organisation ! le félicite Liam.

- Merci beaucoup Oncle Liam, euh Liam, je fais de mon mieux pour faciliter les retours du Centre à la plage - et que ce soit rapide. Matthieu fait tellement d'aller-retour pour ramener les clients que je me retrouve seul pour ranger le matériel et faire patienter les clients : mais je gère, ça m'occupe, répond Victor épuisé, courbaturé mais toujours souriant.

- C'est fou... Tu as le même sourire franc, commercial et sincère que lui... réplique le roux pour lui-même tandis Victor rejoint son vélo. »

« - Je suis désolé mon cœur, je ne choisis pas mes horaires et de toute façon j'ai vraiment besoin de ce job, explique Victor à travers le combiné.

- Tu ne peux pas me le reprocher... temporise-t-il.

- S'il te plaît... Arrête... quémande-t-il gentiment et doucement.

- Tu réagit vraiment comme une gamine ! s'emporte Victor.

- Oui, tu m'as bien compris ! Une gamine pourrit gâter, s'enfonce-t-il. »

Elle raccrocha avant qu'il n'ait le temps de le faire.

Après un mois de travail, Victor s'est permis de demander sa soirée du vendredi soir, trois jours après sa dispute : un bouquet exotique, une chemise bleu pâle -qui « s'accorde parfaitement avec tes yeux océan » d'après sa mère, - il est venu chercher Maëlle sur son vieux vélo noir. Victor l'a conduit à Le Bidule un bar où ils servent des cocktails sans alcool incomparable avec des fruits plus exotiques les uns des autres et une présentation raffinée.

« Ne crois pas qu'un succulent cocktail, un effort vestimentaire et ta jolie petite gueule bien coiffé vont me passer l'envie de te frapper avec mes mains manucurées de... ''gamine pourrit gâter'' ? Oui, c'est bien comme ça que tu m'as défini » lui avait-elle dit blessé, s'abreuvant du liquide épais et fruité.

Victor, pour toute réponse, a esquissé un sourire, fin et délicat, le regard pétillant et franchement amoureux. Il connait bien sa petite amie : elle a besoin de se sentir supérieur, importante, forte. Elle ne supporte pas le fait de pouvoir être atteinte ou blessée : « La vulnérabilité c'est la transparence. La transparence est faiblesse. » lui avait-elle confié un jour avec conviction.

De plus, l'univers mondain dans lequel elle est plongé depuis sa naissance lui a enseigné à se protéger, à se cacher derrière de faux-semblant afin de plaire et de séduire, une mascarade bien rodée qui lui permet d'avoir des contacts, des alliés avec qui son père peut faire affaire. Elle est l'outil parfait : intelligente et observatrice, Maëlle peut séduire et embobiner n'importe qui, il suffit de bien connaître son sujet.

Victor n'a jamais compris pourquoi elle faisait toutes ses « choses » : séduire, mentir, manipuler. « Pour que mon père ait une plus grande emprise, encore, sur le marché politique et parce que je lui dois bien. » lui avait-elle répondu quand il lui avait demandé ; « Les soirées mondaines sont de vraie mine d'information ! » avait-elle rajouté en riant.

Victor n'est pas dupe, il se doute bien que ce n'est pas tout mais il s'est bien gardé de demandé, ce sont des affaires de famille.

« - Maëlle Kepner, a-t-il dit soudain, brisant le silence qui s'était installé. Je t'aime. Je n'ai pas choisi, je n'ai pas compris, ça m'est tombé dessus sans que je n'y comprenne rien. Tu es toi, complexe, vivante, pétillante, extrêmement intelligente, très susceptible et provocatrice. »

Après un instant il reprit :

« - Je ne sais pas comment me tenir, me comporter avec toi, alors je ne dis rien. Je t'écoute, je t'observe et à chaque que je te vois me regarder de tes yeux pétillants... ça me rappelle combien je ne suis rien, combien je suis différent et misérable comparer à toi. Je ne me plains pas. Je t'explique. Je t'explique pourquoi j'ai dit que tu étais « une gamine pourrit gâter », parce que tu as tout. Tout pour plaire, tout pour réussir, tu possèdes une intelligence hors norme et une beauté sans pareil et... Je me sens minable à tes côtés. Ce n'est certainement pas une excuse mais... tout à une origine et voilà celle de ma remarque. »

Victor n'est pas du genre cœur ouvert et ne se confie pas aux autres mais il faut bien se lancer à l'eau, il tient à elle et à son couple.

« - Tu me fais chier. »

La phrase de Maëlle flotte dans l'aire, sa gorge est nouée et son visage impassible mais Victor voit le dur combat qu'elle mène, intérieurement.

« - Tu es... gentil. Bon. Quelqu'un de bien, de sincère, de franc mais de silencieux et solitaire. Certes, ça fait partie de ton charme et apporte une touche particulière à ton charisme mais... ça me perturbe et me déstabilise aussi. Je sais, oui je sais que je me montre forte, enjoué et impassible mais... Mais toute cette mascarade me rend dingue ! Je ne sais plus ni qui je suis ni- ni que... »

Les mots bloquent, elle ne sait pas, elle ne sait plus, elle craque au fur et à mesure que les mots franchissent douloureusement ses lèvres purpurines et rosés, son menton légèrement retroussé. Victor la voit pour la première fois Vulnérable.

Maëlle s'ouvre à lui.

« Pas ici, lui dit-il. »

Victor finit le fond de son cocktail d'une grande gorgée et incite la blonde à faire de même, le brun sort le compte - il n'a pas besoin de l'addition, il connait les prix par cœur, l'habitude – et, après avoir prévenu un serveur d'un geste de la main, il saisit la main de Maëlle.

Rapide voyage à vélo durant lequel Victor n'a pas cesser d'avoir une main sur sa copine, protecteur, sur sa hanche puis sur sa main posée sur son épaule, il ne la lâche pas.

Pas de coucher de soleil. Pas de magnifiques couleurs. Pas de câlin sur le sable ou dans l'eau salée, ballotés par les vagues.

Mais une forêt. Une immense et magnifique forêt de pins ancrée dans un sol sablonneux et jonché d'épines.

Le vélo délaissé là dans le sable, les deux adolescents l'un en face de l'autre, entourés de pins grands, fins et dégarnis avant leur sommet.

« - Je n'aime pas la politique, débute Maëlle. Mais c'est ce qui me fait vibrer... j'adore ça autant que je déteste.

- Je déteste me sentir bête, renchérit Victor.

- Je hais me sentir lié à toi au point de ne pouvoir jamais penser à autre chose, avoue-t-elle en baissant la tête.

- Je trouve nul et triste le fait que tu n'acceptes pas la vulnérabilité, dit le brun en plaçant sa main sur sa joue.

- J'ai peur de mes sentiments, réplique-t-elle en levant ses yeux vers lui. »

« J'ai peur de ce que je ressens. J'ai peur de me laisser gagner et de ne plus jamais pouvoir être à nouveau moi-même. Je ne sais même plus qui je suis... » Maëlle commence à être gagner par des sentiments forts et se sent de plus en plus mal, elle est tiraillée par une grande peine.

« - Tu t'appelles Maëlle Kepner, tu es la plus jolie des filles. La plus intelligente des blondes. La personne la plus rayonnante que je connaisse. La fille la plus sincère, sarcastique, cassante et sèche quand elle est en colère, ou blessée, mais la plus douce, calme, délicate, gentille et souriante quand elle est heureuse. Tu es la perle rare et merveilleuse de l'huitre, tu es l'authenticité dans la superficialité de ce monde mondain que tu côtois. Ne laisse pas ce monde de faux-semblant attaqué ta personnalité, je te répèterai ce que je t'ai dit autant de fois que tu en auras besoin lorsque tu seras perdu entre les deux. Je tiens à toi, tu tiens à moi et...

- Je crois que nous deux c'est fini. »

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top