Chapitre 46


- Êtes-vous bien Ariane Dubois ?

- Oui madame.

- Suivez-moi.

Jamais Ariane n'avait vu cette femme. Son long manteau de soie et de fourrure lui annonça immédiatement qu'il s'agissait d'une noble. L'adolescente la suivit sans faire trop d'histoire. Elles étaient seules dans les couloirs. La femme l'avait trouvé à la sortie de la chambre de la reine, là où Ariane passait ses matinées à nettoyer.

Elles arrivaient dans un couloir totalement inconnu de la petite blonde. Elle luttait afin de suivre la femme sans avoir à courir derrière elle. Elle était bien plus grande qu'Ariane. Elle se posait mille et une question. Où pouvait-elle bien l'emmener ?

La femme ouvrit une porte en bois rustre. Immédiatement, une odeur de menthe très forte s'échappa. La femme n'attendit pas plus avant de s'engouffrer dans la pièce. Ariane y découvrit une salle circulaire avec plusieurs autres portes. Sur la droite figuraient quelques lits aux draps maculés. Sur la gauche, il y avait de nombreux pots en cristal. Tous renfermaient d'étranges choses aux différentes formes. Il y avait entre chaque pot des plantes de toutes sortes. Du matériel de chimiste était disposé sur une table ainsi qu'une pile de livres très épais. Ariane n'avait jamais rien vu de tel.

La jeune femme ouvrit une des portes. Elle lui fit signe de la suivre à l'aide de sa main. Timidement, Ariane s'avança. Elle vit la femme soulever un lourd rideau, le soleil les aveugla. La petite blonde vit un vieil homme de dos préparant une drôle de mixture dans un bol en terre cuite et quelqu'un d'autre juste derrière.

- Katarina ?!

Ladite se retourna difficilement vers son amie. Un petit sourire en coin se dessina sur son visage.

- Bonjour,

- Eh bien, ma mission est remplie. Je vous laisse. Allons-y Cassius.

Le vieillard hocha la tête tout en déposant son bol sur la table de chevet. Il sourit aux deux jeunes filles et quitta la pièce à son tour.

Ariane ne perdit pas un instant. Elle alla se placer devant son amie. Doucement, elle la prit dans ses bras.

- Je m'inquiétais tellement.

- Je vais bien, ne t'en fais plus. Le maître Cassius prend bien soin de moi.

- Comment va ton dos ?

- Il cicatrise.

- On ne dirait pas. Tu saignes.

- Ça, c'est à cause de ma petite virée de la veille. Je suis allée marcher et... Je suis tombée.

- Quelle idée ! Tu dois rester au repos !

- J'en avais assez de me reposer. C'est trop long. Voilà des jours que je n'avais pas quitté cet endroit.

- Tu n'as pas de compagnie ?

- Si, il y a le maître, mais aussi Alazaïs. Et Margueritte vient me voir tous les jours. Le prince aussi vient parfois.

- Vraiment ? Attends voire, Alazaïs ? Comment ?

- C'est elle qui a informé le prince de mon châtiment. Sans elle, j'ignore ce qui me serait arrivé.

- Mais pourquoi ?

- Disons que nous nous sommes revus récemment et nous avons discuté. A ma plus grande surprise, elle tient toujours à moi. Savoir que je suis une domestique l'a attristé, mais elle tient toujours à être mon amie.

- Tu en as de la chance.

- Nous avons grandi dans le même couvant. Nous étions un peu comme des sœurs.

- Et dis-moi, qui était cette femme qui m'a amené ici ?

- Il s'agit de Margueritte, la sœur du prince.

- Quoi ?! Je ne l'imaginais pas comme ça...

- Oui, moi non plus. Elle est très gentille ! Elle est drôle et très douce. C'est elle qui a eu l'idée de te trouver. Elle voulait que j'ai quelqu'un avec qui je suis proche à mes côtés. Elle se soucie beaucoup de moi. Je pense que c'est quelqu'un qui se soucie beaucoup des autres. Elle est incroyable !

- Je vois. Tu l'aimes beaucoup. Katarina hocha la tête vigoureusement. Raconte-moi ce qui s'est passé ces derniers jours !

- Eh bien, le prince m'a sauvé.

- Oh faite ! La dernière chose que je savais a votre sujet, c'est que vous vous étiez parlé au lac.

- Oh...

- Comment se fait-il que vous sembliez si proche. J'ignore des choses n'est-ce pas ?

Katarina se mordit la lèvre tout en hochant la tête lentement.

- Oui, il s'est passé pas mal de chose. Il y a eu la fois dans les écuries. C'est là que nous nous sommes véritablement présentés. Puis une nouvelle fois dans les écuries, il m'a sauvé des griffes de Nathan.

- Nathan, qu'est-ce qu'il te voulait ?

- Rien de bien. Il a tenté de... De... profiter de moi...

- Mon dieu !

- Mais François est arrivé à temps.

- François ? Murmura la blonde.

- Oui... Dit Katarina en rougissant.

- Tu l'appelles par son prénom ?

- Il me l'a demandé.

- Vraiment ?! Extraordinaire... Continue !

- Puis... Euh... Il y a eu la fois où je me suis évanoui dans un couloir quand j'ai vu le cadavre de l'enfant assassiné. Il m'a conduite avec le seigneur de Sedan loin de la foule du palais. Il m'avait laissé me reposer pendant des heures dans une chambre absolument magnifique. Puis il a eu la fois où nous avons parlé sur les chemins de ronde. Et enfin les trois fois où il est venu me voir après ma punition. Il m'a aussi aidé à revenir ici hier. Nous nous étions croisés...

Katarina était bien consciente qu'elle mentait à son amie, mais il était hors de question de la mêler à cette affaire. Déjà trop de personne étaient inclus. Ariane n'avait pas besoin de ça. Elle avait une famille qui comptait sur elle à Bordeaux.

- Tu veux mon avis ?

- Oui...

- Ça fait beaucoup d'interactions en si peu de temps. Les gens pensent qu'il se passe quelque chose entre vous...

- Vraiment ?

- Oui, et après ce que tu viens de me dire, c'est peut-être le cas ?

- Ariane !

- Je ne dis pas que quelque chose d'indécent s'est produit ! Juste que peut-être, il s'intéresse à toi ?

- Ne sois pas ridicule !

- Et tu trouves ça normal toi qu'il te sauve et prenne autant soin de toi ?

- Il est juste bon.

- Pas à moi Katarina ! Aucun homme n'y encore souverain n'agirait de la sorte juste par simple bonté.

- Et que veux-tu qu'il y ait ? Je suis une servante. Les choses s'arrêtent là.

- Et de ton côté, n'y a-t-il rien ?

- Que veux-tu dire ?

- Tu vois ce dont je veux parler, ne fais pas semblant.

- Eh bien, il est vrai qu'il est charmant...

- Mais encore ?

- Mais rien ! Arrête !

- Il est beau, il te sauve, il prend soin de toi... Un véritable prince charmant !

- Je te dis d'arrêter !

Derrière la porte, François venait d'arriver. Il était à la fois flatté et agacé. Un sourire avait gagné ses lèvres. Il n'avait jamais entendu Katarina parler aussi librement. Elle se chamaillait avec son amie... Il était attendri. Pourtant, une pique dans son cœur le faisait souffrir. Il avait beau être attendri, elles avaient raison. Katarina semblait un peu retissant à son sujet.

- Certes, il me met parfois mal à l'aise, mais ce que j'apprécie c'est la façon dont il me regarde.

- Comment ?

- Je ne sais pas. Il ne me regarde pas comme les autres. Tu sais, ils affichent toujours ce regard qui me fait peur, mais pas François. Je vois beaucoup de choses dans son regard. Les gens disent qu'il est froid. Ils se méprennent. Il s'exprime beaucoup, mais simplement à travers ses yeux. Ça, ses proches le savent. C'est Margueritte qui me l'a dit, même si je le savais déjà.

François ne sût quoi faire, il voulait partir mais les dernières paroles de la jolie brune l'en empêchaient. Quelque chose de puissant s'était produit dans son esprit à l'entente de ses mots. Elle l'avait cerné. Elle était la première personne en dehors de sa famille ou de ceux qui le connaissaient depuis tout petit à comprendre comment il fonctionnait. Les gens se méprenaient souvent à son sujet, oui. Il n'était ni mauvais ni méchant. Il ne savait juste pas comment exprimer ses sentiments. Il paraissait toujours froid. On lui avait toujours dit que cela était une force. Un futur Roi ne devait pas être facile à cerner. Pourtant, parfois, il voulait qu'on le comprenne sans qu'il ait à s'expliquer.

- J'aime quand il est avec moi. Je me sens calme, sereine. Comme si plus rien ne pouvait plus m'atteindre.

- Vraiment ? Ça doit être agréable...

- Ça l'est.

François se retourna vers la porte, surprit. C'était ce qu'elle ressentait ? C'était agréable à savoir.

- C'est étrange, mais plus il m'arrive de choses, plus je sais que je ne suis pas en danger. Je sais qu'il viendra pour moi. Je le sens, au fond de moi. Tu vas me prendre pour une folle, mais je sens comme un lien entre nous.

Il fut choqué par les mots de la jeune fille. Un lien ? Ressentait-il la même chose ? Il y avait bien ce sentiment indescriptible en lui à l'égard de la domestique, mais de là à le qualifier de lien ?

- Serais-tu pas amoureuse ?

- Non, c'est impossible.

- Pourquoi pas ?

- Parce que ce n'est pas ce que je ressens ! Je ne me le permettrais jamais. Je ne pourrais même pas l'imaginer. Il est le futur roi de France, je ne suis qu'une pauvre orpheline.

À  nouveau, le pincement au cœur. Elle avait entièrement raison. Heureusement, elle l'avait réalisé. Il n'avait pas à le lui faire comprendre cela.

Ce que François ignorait, c'étaient les joues pourpres de la jeune fille et la tristesse dans son regard. Elle s'en voulait de réagir ainsi. Elle ne comprenait pas sa réaction. Pourquoi son esprit était-il embrumé par de tels sentiments ? 

-------------------------------------------------------------------------------


Salut tout le monde, J'espère que tout le monde va bien ! 

La suite sera posté ce weekend probablement ;)

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top