Pour toi !
Isaac
Mes yeux transpercent ceux d'Harlow après toutes ses révélations. Elle vient, enfin, de me confesser la raison pour laquelle elle a disparu précipitamment, et moi je me retrouve comme un con, à garder le silence, à culpabiliser, à maudire ma mère et... Non, je ne peux rien lui dire, pas encore. je joue avec le feu, parce que je sais que quand elle apprendra la vérité, et elle le saura forcément, je vais définitivement couper ce lien qui résiste toujours entre nous. Sinon pour quelle autre raison elle m'aurait avoué ce que je lui ai demandé ?
Peut-être parce qu'elle n'en a plus rien à faire de toi justement.
— Je suis désolé Harlow...
— C'est un peu tard tu ne trouves pas ? Et puis cela n'a plus d'importance Isaac.
Elle ment.
Ses magnifiques yeux n'ont jamais su mentir. Harlow m'en veut toujours.
Je frotte mon visage, attrape une clope dans mon paquet, en propose une à Harlow qui l'accepte, puis à l'aide mon briquet tempête, j'embrase le bout de chacune d'elles. Nous recrachons la fumée dans un silence de cathédrale, sans se quitter du regard.
A cet instant, Harlow me paraît plus belle que jamais.
Troublée.
Forte.
Attirante.
— Je vais y aller, dit-elle en se reprenant et me sortant de ma contemplation.
— Reste.
Mon ton est presque une supplique.
Elle hausse un sourcil.
— Je t'ai raconté ce que tu voulais savoir Isaac, et tu n'as pas l'air disposé à faire de même, donc je ne vois pas l'intérêt de m'attarder plus longtemps. Il est tard et...
— Ken le surfeur t'attend, oui je sais.
Je sors la carte du connard, ça m'évite de réagir à sa provocation. Harlow l'a compris et je la vois qui se retient d'écraser sa cigarette contre mon torse.
— Peu importe la raison pour laquelle je dois rentrer Isaac. Il y a bien longtemps que je n'ai plus de compte à te rendre... si toutefois j'en ai eu un jour, m'apostrophe-t-elle en écrasant sa cigarette dans le cendrier.
J'en fait de même avant de m'approcher, si bien que nos souffles se mélangent. Harlow recule, la chance est avec moi, car le mur bloque sa tentative d'évasion.
— S'il te plait Perséphone.
S'il te plaît reste ou s'il te plaît accorde moi de nouveau ta confiance ?
Elle inspire, ce qui fait remonter sa poitrine, cachée par ce sweat de son ancienne université, mais je n'ai pas de mal à imaginer ses deux seins galbés à l'arrondi parfait effectuer le mouvement. Et à cette pensée, il y a chez moi une partie qui elle aussi est bien tendue.
— Donne moi une bonne raison Hadès.
Je souris au surnom, encore une fois elle entre dans mon jeu.
Des excuses, j'en ai à la pelle. Mais celles qui me traversent l'esprit sont loin d'être catholiques.
— Pour rattraper le temps perdu...
Je me mettrais des baffes, si Harlow ne le fait pas avant. Mon sous-entendu est tellement évident que je m'attends à m'en prendre une.
— Tu es irrécupérable.
Harlow me pousse d'une main contre mon torse, mais j'emprisonne ses doigts dans les miens. Un frisson passe à travers nos peau qui se touchent. Ses prunelles percent les miennes et je n'ai qu'une putain d'envie c'est de prendre cette bouche qui m'a tant manqué.
Mais si je cède à mon désir, à ma pulsion, c'est la perdre à coup sûr. Je dois être plus malin que ça. Harlow n'est pas une pétasse au hasard que j'aurais levée dans un bar pour la mettre à l'horizontale.
— Excuse moi. Tu veux boire un truc, fais-je en me reculant.
— Isaac...
Son exaspération est flagrante, mais j'insiste.
— Un Bubble Tea ?
— Tu as ça chez toi ?
Si l'atmosphère n'était pas si tendue je rigolerais de son expression.
— Depuis que tu es revenue, oui.
Elle fronce les sourcils attendant que je développe.
— Disons que... j'avais bon espoir que tu te pointes ici un jour au l'autre.
— Tu sais que je n'ai plus dix-huit ans, Isaac.
Oh ça ! je l'ai remarqué oui. Même si Harlow était déjà magnifique avec un corps de déesse sculpté par le sport.
— Mes goûts ont changé.
— On parle toujours de boissons ? la provoqué-je.
Pathétique.
— Qui sait !
Harlow hausse les épaules, mais finit par répondre à ma question initiale.
— Je n'en bois plus.
Harlow n'argumente pas, mais je devine que cela a un rapport avec la soirée de notre premier rencard, c'était sa boisson favorite et je lui avais promis de l'emmener dans le meilleur café qui les prépare, qui n'a jamais eu lieu à cause de... mon manque de couilles.
— Très bien, que veux-tu boire alors ? capitulé-je.
— De l'eau s'il te plait.
— Waouh ! tu aimes les risques dis moi.
— Je tente de me remettre de la cuite d'hier soir, et j'ai déjà bu deux verres tout à l'heure.
— Ken avait-il des intentions lubriques ?
Si elle me rétorque que ça ne me regarde pas, ou que c'était le cas, je vais aller lui défoncer sa gueule de beatnik.
— Pas que je sache, non.
Bien.
— Tous les mecs n'ont pas qu'une idée en tête quand ils proposent de boire un verre avec une femme.
Je mords ma langue très fort pour éviter de la traiter de naïve.
Quel homme en âge de baiser, ou plus d'ailleurs, n'aurait pas envie de mettre Harlow dans son lit ? à part être gay ou moine, je ne vois pas.
Je passe dans le coin cuisine pour choper deux verres, un que je remplis d'eau pétillante et l'autre d'un liquide ambré qui va me donner le courage d'affronter Harlow sans lui sauter dessus.
Putain, nous sommes comme deux écoliers à leur première sortie au cinéma, quand je lui tends son verre. Ni elle, ni moi, ne bougeons, fixant nos verres comme s'ils avaient la solution à notre comportement.
Bouge toi Isaac.
— Tu as fait du très bon travail Harlow.
Son air étonné me sonde, et moi je me demande si j'ai tous mes neurones en place.
— Merci.
— Je l'ai fait pour toi princesse.
Maintenant, elle me regarde comme si j'avais une double personnalité. En même temps, il faut me suivre.
— Ne pas venir le soir de notre premier rendez-vous... c'était pour te protéger.
Harlow respire fort, pose son verre vide sur le passe plat un peu brusquement.
— D'accord, fait-elle, en se saisissant de son sac et de la pochette où sont rangés les devis signés.
— Tu vas où ?
— Chez moi, je te l'ai dit Isaac, je suis fatiguée, et je n'ai pas l'énergie nécessaire pour jouer aux devinettes.
Je contourne le meuble afin de me placer face à elle.
— Je ne cherche pas à te faire deviner quoi que ce soit... je t'avoue simplement que ce soir-là, je n'ai pas pu faire autrement.
Harlow rit.
— Tu m'étonnes !
— Comment ça, je t'étonne ?
— C'est sur que planter la pétasse qui était avec toi dans ta chambre n'était pas convenable, hein Isaac ?
Je serre les poings, mes ongles s'incrustant dans la peau, mais c'est mieux que de balancer tout ce qui se trouve sur le plan de travail et l'effrayer.
— Il valait mieux humilier la pauvre idiote d'Harlow, vierge, et fille de l'ennemie numéro un de ta famille.
Elle se fourvoie sur toute la ligne, et pourtant je ne vais rien lui dire.
— Tu n'y es pas du tout Harlow.
— Ah bon ! Alors vas-y Isaac, hurle-t-elle, donne moi la vraie raison de ton humiliation envers moi. Et je ne parle pas de celle que j'ai ressentie quand j'ai sonné chez tes parents et que Kim a ouvert.
Harlow est en train de tracer des tranchées dans mon plancher en faisant des allers retours.
— Et le pire dans tout ça... elle secoue la tête, c'est que cette nuit là Isaac, j'étais prête à tout te donner de moi. Qu'elle idiote j'ai été, dit-elle plus pour elle-même qu'à mon intention.
Je baisse le visage, conscient de ce que cela a dû être pour Harlow de venir jusqu'à chez moi et se retrouver en face de celle qui la hait plus que tout. Surtout que ma mère s'est fait un plaisir de tout me relater après son entrevue avec la fille Jenkins, comme elle la nomme, et devant la connasse qui lui sert de complice. Je n'ai jamais frappé de femmes, mais honnêtement ce soir-là, mes mains me démangeaient.
D'un seul coup je relève la tête, ma poitrine se comprime comme si on l'écrasait à main nue.
Wait ! on rembobine.
— Attends... tu insinues quoi Harlow ?
Ça ne peut pas être ce que je devine. Non pas ça !
— Oublie, de toute façon, c'est du passé... et c'est trop tard surtout.
Je me retiens encore de tout envoyer valser dans mon appartement.
— Quel est le connard qui...
— Cela ne te regarde pas Isaac, m'interrompt-elle. Tu n'as aucune légitimité à t'énerver. Je ne te demande pas avec qui tu as couché durant toutes ses années.
Tu peux mais ça va prendre des plombes. Je me tais, inutile de lancer la grenade déjà dégoupillée.
— Si j'en ai une bordel !
Harlow voulait me donner sa première fois... parce qu'il s'agit bien de ça ? et moi comme le con que je suis, je me suis laissé emprisonné par culpabilité.
— Des l'instant où tu m'as éjectée de ta vie, reprend Harlow, sans tenir compte de mon intervention, j'ai fait la mienne. Et tu n'as toujours pas répondu à ma question.
— Je ne peux pas.
— Toujours et encore ce putain de mot, Isaac. J'en ai marre. On tourne en rond, et finalement rien n'a changé.
— Si tu savais comme je m'en veux princesse.
Son rire amer, me perfore le ventre.
— De quoi ? d'avoir rater l'occasion de déflorer Harlow Jenkins ? et de ne pas avoir pu...
— Arrête H. Ne va pas plus loin. Ce n'est pas toi ça, d'être mesquine. Tu sais très bien que jamais je n'aurais raconté notre première fois ensemble.
Harlow baisse son regard, mais ne confirme pas mes affirmations.
— Et m'envoyer un message, c'était trop compliqué ! Juste un mot de toi, et je serais rentrée et j'aurais peut-être compris.
Ca aussi je ne pouvais pas.
— Tu as lu le mien pourtant non ?
Oui, après que l'autre pétasse soit partie. Et j'ai cru crever. De me forcer à ne pas te répondre, de te savoir toute seule, de savoir que je ne viendrais pas te rejoindre. Que je perdais définitivement. Que je renonçais à toi, à nous.
— Isaac !
Harlow me ramène auprès d'elle.
— Excuse-moi. Mais comme je te l'ai affirmé, c'était uniquement pour te protéger, toi.
— Me protéger, encore, à croire que tu n'as que ce mot là à la bouche quand je suis concernée. Je t'ai déjà affirmé que je n'avais pas besoin de garde du corps.
— Et le pire dans tout ça, dis-je ignorant sa réponse, c'est que malgré toutes ses années, je ne peux toujours pas t'en donner la raison... du moins ce n'est pas à moi de le faire.
— De mieux en mieux, ricane-t-elle.
Je sens que sa jauge de patience atteint la limite alors je me rapproche encore un peu plus, pour lui dire une vérité.
— Crois moi ou pas princesse, mais cette nuit là, et les jours qui ont suivi, quand je suis venu sonner chez tes parents, j'ai cru crever, et encore plus, quand ton père m'a balancé que tu étais partie... que tu avais validé ton intégration à l'université de San Francisco, après m'avoir mis son poing dans ma gueule, mais bon c'était...
— Mon père t'a frappé ? s'indigne-t-elle en me coupant la parole.
La façon dont elle me regarde et se retient de passer ses doigts là où John à mis les siens, fait battre mon cœur plus rapidement. Dans un mouvement, inconsidéré, ou pas, nous avançons tous les deux d'un pas en même temps, si bien que l'on se retrouve à un souffle l'un de l'autre. Je m'empare de sa main, prend la décision pour elle. Je la dépose sur ma joue. J'inspire quand sa paume entre en contact avec ma peau, Harlow en fait de même en fermant les yeux.
— Ce n'est rien Harlow, je l'ai cent fois mérité.
— Certainement, mais il n'avait pas à te frapper.
Elle déglutit tout en continuant sa caresse. Ses doigts redessinent ma pommette.
Si elle continue comme ça, je ne réponds plus de rien.
— Princesse... si tu ne veux pas que...
Harlow comprend que ma volonté de résister de lui sauter dessus s'amenuise, à l'inverse de ses doigts qui s'enhardissent sur ma joue, alors elle enlève sa main comme si mes mots l'avait brûlée
— Je me suis laissée emporter Isaac, excuse moi.
— Et tu peux recommencer, même si mon self control en prend un sacré coup.
— Je... je vais y aller.
Cette fois-ci, je ne la retiens pas. parce que d'une, je suis capable d'envoyer ma conscience se faire foutre en embrassant Harlow, et de deux, je pense qu'elle, comme moi avons besoin de temps après avoir fait remonter la douleur qu'a été la nôtre à une époque.
— Je te tiens au courant pour le début des travaux.
Elle se saisit de ses affaires et s'engage dans le couloir qui même à la sortie.
— Harlow ?
Je l'interpelle mais elle a déjà franchi la porte et claque le battant.
Je passe mes mains dans mes cheveux en hurlant de rage.
Quand je suis calmé, je me ressers un verre de whisky en me promettant que toutes ces conneries ont assez duré. Les mots de mon père me reviennent dans la tronche et il n'avait peut-être pas tout à fait tort, quand il m'a affirmé que j'aimais toujours Harlow.
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