12. Le château... d'Henry ?!


Quelques jours plus tard...

L'auberge était accueillante, aucun doute. Mais la tension encore plus palpable qu'aux alentours de Londres. Les armes posées en évidence, les clients se dévisageaient avec une telle hargne que Nicolas recula précipitamment. L'aubergiste lui-même semblait hésiter entre deux sentiments ; la joie de gagner de l'argent avec ces trois nouveaux venus, la méfiance devant de potentiels zombies.

— Nicolas, je pense qu'il est plus prudent que vous vous retiriez dehors, murmura Darcy.

Lizzie hocha la tête et Nicolas baissa les yeux, blessé au cœur.

— Mais si on leur explique la situation... Ne pourraient-ils pas faire une exception ?

— Je doute qu'ils comprennent, intervint Elizabeth. Et ce serait attirer l'attention sur notre équipage ; nous devons rester discrets.

Nicolas haussa les épaules et sortit, malheureux comme les pierres. Darcy lui-même le regarda partir, un étrange sentiment inscrit sur le visage.

— Miss Bennet ! Quelle surprise !

La voix d'Henry Greenwell claqua et Lizzie sursauta. Il était bien là, face à elle, souriant et détendu, manifestement étonné tout de même.

— Je suis positivement ravi de vous retrouver ici. Mais... Ne deviez-vous pas rendre visite au colonel Darcy chez lui ?

— Je suis là, marmonna l'intéressé.

— Oui... chez lui, répéta Henry, déstabilisé.

— Nous... Nous visitons la région, balbutia Lizzie.

Darcy leva les yeux au ciel ; cette excuse était-elle réellement de nature à rassurer un fiancé découvrant sa promise avec un autre ?

— Oh je vois, déclara Henry, placide.

Manifestement oui, songea le colonel en soufflant, exaspéré. Si l'infernale demoiselle avait été sa fiancée, il ne l'aurait certainement jamais laissée partir avec un autre.
Jamais.

— Je suppose donc que l'homme dehors est votre valet ? Suggéra Henry en écarquillant les yeux pour mieux voir à travers la vitre sale.

— Absolument ! S'écria Lizzie. Mais vous-même, cher Henry, que faites-vous donc dans ce coin perdu de l'Angleterre ?

Le tavernier la fusilla du regard et Henry esquissa un sourire heureux.

— Ne le saviez-vous donc pas, très chère Elizabeth ? Mon château est à quelques minutes d'ici.

Darcy écarquilla les yeux, stupéfait et Lizzie hoqueta. Voilà qui compliquait la tâche, sacrebleu.

— Vous n'étiez donc pas au courant chère Lizzie ? Répéta Henry en voyant sa pâleur.

Le cerveau de Darcy chauffait ; éloigner ce Greenwell et l'empêcher d'accaparer Elizabeth, voilà une tâche compliquée. Séparer deux amants, rien que ça. La reine ne se doutait sûrement pas de tout ce que cette fichue mission impliquait.

— Euh... eh bien... balbutia Lizzie, pour une fois privée de sa verve mordante.

Et Darcy, une fois n'est pas coutume, la regrettait. Il aurait apprécié une pique de la demoiselle, qu'on en finisse. Si Nicolas rentrait et qu'Henry découvrait sa véritable nature, il le tuerait.

— Eh bien je le savais, Mère m'en avait parlé, reprit Lizzie, son regard perdu ayant croisé celui d'acier de son compagnon de route.

A l'évocation de sa future belle-mère, Henry grimaça. Le dragon, comme l'appelait Darcy, avait au moins le mérite de faire peur à cet importun.

— Mais cette information m'était complètement sortie de l'esprit. Après tout, je ne vous épouse pas pour vos richesses, conclut gracieusement Lizzie.

Pourquoi l'épousait-elle d'ailleurs ? Songea brièvement le colonel tandis que Greenwell saisissait la main de sa fiancée, heureux comme un roi. Pour son titre ? Pour assurer des jours heureux à ses parents ? Parce qu'elle l'aimait... pour de bon ?

— Eh bien venez le visiter, je vous en prie ma chère Lizzie. Vous en êtes la future maîtresse de maison, je veux vous montrer ce qui sera votre palais. Après tout, ne sera-t-il pas prochainement l'écrin du plus beau bijou d'Angleterre ? S'écria Henry, légèrement emphatique.

Lizzie haussa un sourcil, perdue. Darcy étouffa un ricanement fort impoli et Henry toussota, soudainement gêné.

— Je veux dire... Votre beauté s'accordera à merveille avec ce château.

— C'est très agréable... et nous aimerions accepter...mais... hésita Lizzie.

— Ne refusez pas, je vous en prie Elizabeth, implora Henry. Et puis... nous avons plusieurs garde-robes au château. Votre tenue nécessiterait... certains soins.

Lizzie baissa les yeux et constata, atterrée, que son costume si élégant n'était plus qu'un souvenir. La terre, la boue, les ronces... la nature et les péripéties avaient irrémédiablement abîmé ses vêtements.

— J'en ai d'autres chez moi, ne vous lamentez pas sur cet inconvénient, intervint Henry. Mais acceptez mon invitation, je vous prie. Je donne justement un bal ce soir, je serais enchanté de vous avoir pour cavalière.

Que faire ? Lizzie ne pouvait qu'accepter. Elle jeta un regard impuissant à Darcy qui, étrangement, hocha vigoureusement la tête et s'interposa.

— Nous acceptons avec empressement, Monsieur Greenwell.

Ce dernier le regarda avec surprise. Son invitation était manifestement sélective et Darcy avait plutôt été invité à rester dehors. Mais face à sa fiancée qui semblait apprécier si fort le colonel anglais, il n'osa rien refuser et hocha la tête avec un sourire poli.

— Nous emmènerons notre valet, poursuivit Darcy en se tournant vers la porte, et serons chez vous d'ici une heure, le temps de faire la route. Nos chevaux sont fatigués.

— Je vous en fournirai d'autres, proposa Henry en s'inclinant vers Elizabeth, une lueur passionnée dans le regard. Ma chère Lizzie, ne m'oubliez pas durant ce voyage et à bientôt.

Le jeune homme sortit et Darcy leva les yeux au ciel. Le bruit des sabots heurtant la terre retentit puis décrut et l'on put enfin parler tranquillement.

— Je n'ai jamais vu un homme aussi ampoulé, déclara tranquillement Darcy.

— Allons donc, il est simplement intimidé, le reprit Lizzie en le suivant à l'extérieur de l'auberge. Et puis, pourquoi accepter ? N'avons-nous pas une mission à accomplir ?

— Que vouliez-vous faire ? Répliqua froidement Darcy. Refuser cette invitation et continuer notre route ? Il est votre fiancé, nous aurions provoqué des soupçons.

— Vous avez raison. Mais ce bal est une perte de temps néfaste.

— Peut-être pas... Son château se trouve étonnamment près du volcan, Nicolas m'a confirmé hier que nous n'en étions plus très loin.

— Vraiment ?! Nicolas aurait pu me prévenir !

— Je suis le chef de mission.

— Nous sommes une équipe.

— Peu importe Miss Bennet, insista le jeune homme, le regard lourd. Qu'il soit aussi près du volcan, même si ce dernier est invisible, doit avoir des répercussions sur l'activité de ses métayers. Imaginez, des zombies vivant à côté des humains.

— Voulez-vous dire qu'en fouillant les affaires d'Henry, nous pourrions avoir des indices sur l'emplacement exact ? Mais à quoi bon, nous avons Nicolas...

— Je veux également tirer cette affaire au clair, grommela Darcy. Un château aussi proche de Margaret a dû éveiller sa soif de puissance. Je dois surveiller les nobles alentours, Margaret serait bien capable de vouloir les contrôler.

Lizzie acquiesça et chercha Nicolas du regard. Le jeune zombie accourut, jamais loin d'elle.

— Nous allons chez Monsieur Greenwell, annonça-t-elle posément. Je tâcherai de l'occuper tandis que vous et Monsieur Darcy veillerez à trouver tous les indices utiles.

— Entendu Miss ! Comptez sur moi.

Darcy leva de nouveau les yeux au ciel, mais Nicolas aurait juré voir une pointe d'amusement dans ses prunelles toujours froides. Le colonel commençait-il à apprécier son équipe incongrue...?

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top