Chapitre 45 : Entre feu & glace
Lorelaï ferma lentement ses paupières, son soupir se mêlant à la lassitude qui pesait sur ses épaules. Les événements se succédaient, apportant leur lot de désillusions, et elle commençait à ressentir le poids de cette série de revers. La voix qu'elle avait cru être une illusion d'antan, une écho d'une époque depuis longtemps révolue, s'était révélée être bien réelle, un présage sinistre annonciateur de mauvaises augures.
La sorcière porta instinctivement sa main à son visage, ses doigts frôlant doucement l'arête de son nez. C'était un geste à la fois d'apaisement et de préparation, comme si elle puisait dans cette caresse fugace le courage nécessaire pour affronter les ombres du passé qui semblaient revenir à la vie. La sensation de ses propres doigts contre sa peau lui procurait un ancrage tangible, une amarre dans le tourbillon d'émotions qui menaçait de l'emporter. Elle prit une profonde inspiration, sentant l'air remplir ses poumons d'une énergie résolue, avant de se tourner pour affronter la présence inopportune de son aînée.
Un sourire aux contours malveillants étirait les lèvres de Philae, ajoutant une nuance sombre à son visage familier. La rencontre des regards entre les deux sœurs était électrique, un échange silencieux chargé de souvenirs, de rancœurs et d'une étrange résurgence émotionnelle. Chacune portait en elle les cicatrices de leur histoire partagée, et cet instant était comme une parenthèse où le temps s'était figé, un interlude dans laquelle le présent et le passé fusionnaient. Les limites entre ce qui était réel ici et maintenant et ce qui appartenait à la mémoire semblaient s'estomper, créant une atmosphère presque onirique où les enjeux étaient aussi profonds que les abysses de leur relation complexe.
Au cœur d'une divergence fondamentale, les deux sœurs se révélaient comme des images inversées l'une de l'autre, arborant des subtilités inattendues tout en personnifiant des contradictions saisissantes. Tel un brasier inextinguible, Lorelaï irradiant d'une passion dévorante, incendiait chaque recoin de son être, portant en elle cette chaleur vivifiante qui, tout à la fois, donnait la vie et réduisait tout en cendres. Elle était le mouvement insatiable des flammes, l'incarnation même de la détermination ardente.
D'un autre côté, Philae se tenait comme la glace éternelle, dégageant une sérénité glaciale qui dissimulait adroitement le blizzard impétueux faisant rage en elle. Ses traits étaient ciselés dans un calme imperturbable, tout comme un paysage hivernal figé dans le temps. Chacun de ses mouvements était calculé, empreint d'une grâce contenue, semblable à la surface polie d'un lac gelé, immobile et placide.
Si Lorelaï était le soleil radieux et réconfortant, alors Philae était la lune cruelle et austère, souveraine incontestée de la nuit. La cadette représentait l'aube vibrante, annonciatrice de nouvelles possibilités et de joie à venir, tandis que l'aînée était le crépuscule mystérieux, précédant l'obscurité. Dans leur dualité, elles étaient un oxymore vivant, le parfait équilibre entre la lumière et l'ombre, la tempête et le calme, l'impétuosité et la retenue, un kaléidoscope riche et complexe de contrastes et de complémentarités.
Leurs animosités mutuelles semblaient être alimentées par ce qu'elles représentaient. Chacune voyait en l'autre une réflexion déformée d'elle-même, une voie alternative de ce qu'elles auraient pues être. Chaque regard teinté d'amertume et chaque échange acerbe découlaient de ce que l'autre symbolisait, une hostilité ancrée dans les reflets de leurs existences respectives. Philae n'était pas simplement le témoin du passé révolu de Lorelaï, mais aussi une projection possible de son propre avenir si elle venait à céder aux ténèbres qui la guettaient. Elles étaient chacune la promesse et l'avertissement de l'autre, des échos d'un destin en constante évolution, des reflets changeants dans un miroir d'incertitudes.
« Philae, quelle charmante surprise ! » Les mots s'échappèrent des lèvres de Lorelaï avec une nuance de faux enthousiasme, créant une dissonance évidente entre ses paroles et la tension qui serrait son visage. Ses yeux, étincelants d'une lueur de méfiance, se fixaient la vampire, la dévisageant avec un mélange de dédain et d'appréhension. Cette mosaïque d'émotions, ce clair-obscur dans l'expression de Lorelaï révélait les strates complexes de leur relation, mêlant l'amertume d'hier et la méfiance d'aujourd'hui. « Il ne manquait plus que la visite de ma sociopathe de sœur pour parfaire cette journée déjà ô combien agréable ! » La dérision transperçait ses paroles, fusionnant en une réplique chargée de ressentiment. « Tuer des innocents ne te suffisait plus, tu te devais d'ajouter voyeurisme à ton palmarès ? »
La voix de Lorelaï trancha l'air, imprégnée d'une pointe de sarcasme qui ne parvenait pas à masquer la défiance dans ses yeux. Chaque mot était teinté d'un mélange subtil d'ironie et de colère contenue.
Les mots cinglants de sa cadette suscitèrent chez Philae un amusement cruel, qui se traduisit par un rire glacé et sardonique, s'élevant des profondeurs de sa gorge.
« Oh, je dérange peut-être ? » Lança la vampire d'un ton feint d'innocence, tandis que ses prunelles scintillaient d'une malice sournoise. Une étincelle de malveillance dansa dans son regard. « Oups ! Tu m'en vois profondément désolée ! » Ajouta-t-elle, en une ultime moquerie, faussement contrite de la présente situation tout en ramenant sa main devant ses lèvres pour accentuer l'effet.
« Je n'en doute pas. Sinon tu n'as pas un massacre à aller commettre ? Des humains à torturer ? Des bébés chiens à noyer ? Ou tout autre "passe-temps" que la grande prédatrice que tu es affectionne particulièrement et que moi, simple humaine, ne peux en apprécier les subtilités... »
Philae éclata d'un rire cinglant vibrant dans l'air, une bise frigide s'infiltrant dans les pores de la peaux de sa cadette, lui glaçant le sang. Le rictus aux contours goguenards de la vampire étira ses lèvres d'une manière presque cruelle, tandis que ses prunelles d'algide étincelaient d'une lueur mordante, comme des éclats de gel reflétant un monde aussi froid et impitoyable que son propre regard.
« Ne joue pas les parangons de vertu avec moi petite sœur ! » Lâcha-t-elle d'un ton incisif, laissant poindre une touche de mépris dans sa voix d'éther désincarnée. Elle prenait un malin plaisir à cette joute verbale tendue, dégustant chaque mot, maniant chaque syllabe comme une arme acérée. « Tu peux bien jouer les cyniques désabusées autant que tu veux, mais laisse-moi te dire que, d'après ce que j'ai entendu, toi et moi ne sommes pas si différentes... »
Sur cette dernière déclaration de la vampire, Lorelaï leva les yeux au ciel, ne pouvant accepté une quelconque similarité entre elle et son aîné.
« Pourquoi les morts ne le restent-ils pas ? » Demanda la sorcière à n'importe quelle entité supérieure apte à lui apporter une réponse.
Face à l'absence de réponse céleste, elle ramena son attention à Philae, plongeant son regard empli de méfiance dans celui de son aînée. Elle crut y distinguer une lueur fugace de haine, comme si elle était d'une manière ou d'une autre tenue responsable du destin tragique de sa sœur. Mais cette émotion fugace disparu rapidement des prunelles de Philae, remplacée par une totale apathie.
« Bon, je suppose que ta présence ici n'est pas due à une simple visite de courtoisie, je me trompe ? » Lorelaï interrogea sèchement son interlocutrice, laissant transparaître son agacement à peine contenu.
« Oh, ma chère Lorelaï, tu as toujours été douée pour les déductions éclairées... » Répondit Philae avec un sourire faussement admiratif, accentuant chaque mot comme pour en souligner la fausseté. Ses yeux étincelaient d'un éclat moqueur, dévoilant un mélange subtil de mépris et de provocation. « Non, je t'en prie, continue à jouer aux devinettes, c'est très distrayant. Peut-être finiras-tu par découvrir que j'ai fait le déplacement jusqu'à ce charmant petit patelin pour faire des cookies, ou que l'on se fasse des tresses... Et qui sait ! Peut-être même une soirée pyjama entre sœurs. »
Un bref silence s'installa, pendant lequel l'expression de Philae se mua subtilement. Les étincelles moqueuses dans ses yeux s'estompèrent, laissant place à une émotion sincère. Ses prunelles s'embrumèrent, tandis que sa voix se fissurait légèrement, trahissant une vulnérabilité inattendue.
« Peut-être... Peut-être que cela me manque, tu sais ? Notre famille. Peut-être que j'aimerais que nous puissions enfin laisser le passé derrière nous et avoir l'opportunité de tisser une véritable relation. Toi et moi. » Murmura-t-elle, sa voix frôlant presque le chuchotement.
Pourtant, malgré cette remarquable interprétation de la fragilité émotionnelle, une dissonance subtile persistait, un écho factice dans cette symphonie de sentiments. La sorcière pouvait la sentir, cette discordance qui se mêlait à l'harmonie fragile de l'instant. C'était comme si une fausse note s'était glissée dans une mélodie autrement parfaite, tel un grincement désagréable, crispant la jeune femme aussi intensément que des ongles courant sur une surface de craie.
« Tu m'en diras tant ! Et sinon, quelle est la vraie raison ? » Demanda Lorelaï en haussant un sourcil, tout son scepticisme transparaissant à travers ce simple mouvement. Les faux-semblants de son aîné ne la trompaient guère, les plis d'agacement se formant légèrement sur son front, comme les vagues d'une mer agitée sous une brise contrariante.
Telle une petite fille prise en faute, la vampire arbora une moue boudeuse, son visage dévoilant une expression à mi-chemin entre l'innocence feinte et l'irritation calculée. Ses lèvres se pincèrent légèrement tandis qu'elle laissait échapper un soupir théâtral, empreint d'ennui et d'une pointe de résignation.
« Moi qui pensais pourtant avoir été convaincante... » Déclara Philae d'un ton faussement blessé, la déception teintant légèrement sa voix alors qu'elle feignait une surprise déçue d'avoir été démasquée aussi rapidement par sa cadette. Ses prunelles, d'un bleu pâle, étincelèrent d'une lueur maligne, comme si elle trouvait un certain plaisir dans ce petit jeu de dupes.
Un sourire sardonique se dessina sur les lèvres de Lorelaï, son amusement non dissimulé se reflétant dans ses yeux pétillants.
« Niveau émotion humaine, excuse-moi de te le dire, mais tu manques cruellement d'entraînement. Ah, mais oui, j'oubliais, tu n'es pas humaine ! » Lâcha-t-elle d'un ton faussement compatissant, son sarcasme s'entremêlant avec une pointe de dérision.
Un rire léger s'échappa des lèvres de Philae, une musicalité cristalline qui semblait avoir échappé à sa bouche sans qu'elle puisse la retenir.
« Mais c'est qu'elle est marrante la petite Rory ! Mais dis moi si je me trompe, toi non plus ! » Riposta la vampire d'une voix mordante, son ton acéré comme la plus tranchante des lames. Un sourire malicieux ourlait ses mots, une lueur espiègle dans ses prunelles sombres soulignant l'ironie de la situation avec une subtile inflexion.
« Tu compte me donner la vraie raison de ta présence ou continuer inutilement à brasser de l'air pendant des heures ? » Conclut Lorelaï d'un ton légèrement exaspéré, ses sourcils se fronçant légèrement comme si elle avait atteint le bout de sa patience. Un soupçon de méfiance persistait dans son regard, comme une ombre furtive qui refusait de se dissiper totalement.
« Entre les deux mon cœur balance... » Répondit simplement Philae à l'agacement de sa cadette, levant les yeux au ciel avec une lenteur calculée, son index effleurant délicatement son menton dans une mimique pensivement théâtrale. Ses mouvements étaient empreints d'une grâce et d'une lenteur calculée, comme si chaque geste était minutieusement réfléchi pour maximiser son impact.
« La mutation en vampire rend immature en plus d'insensible et sadique ou bien c'est de nature te concernant ? » Répliqua Lorelaï à la provocation de sa sœur aînée, sa question chargée d'une acrimonie palpable, comme si elle cherchait à piquer là où ça faisait mal. Ses iris luisaient d'un mélange complexe de colère et de mépris, une tempête émotionnelle retenue à grand-peine.
« Puisque tu tiens tant à le savoir, je suis ici sur ordre de papa ! » Avoua finalement la vampire en ignorant sciemment la question offensante de sa cadette. Sa réponse était sèche, presque tranchante, une déclaration qui avait le goût amer de la vérité.
« Pourquoi notre père t'enverrait-il ? » Demanda Lorelaï, la voix tendue par la nouvelle des plus inattendues de sa sœur.
Philae, observatrice aiguisée, capta aisément le changement d'attitude de sa cadette. Lorelaï sembla se raidir légèrement, une lueur d'appréhension voilant brièvement ses prunelles. Elle avait beau essayer de cacher ses émotions derrière un masque d'indifférence, il y avait quelque chose dans sa posture qui trahissait son inquiétude, un frémissement presque imperceptible dans ses doigts crispés.
La vampire arqua un sourcil, ses yeux se faisant plus perçants alors qu'elle décrivait un cercle autour de Lorelaï, telle une prédatrice savourant chaque instant de sa danse avec sa proie. Un sourire malveillant flottait sur ses lèvres, dévoilant une pointe de satisfaction à la vue de cette faille béante dans laquelle elle comptait bien se plonger avec délectation. Chaque détail de la posture tendue de la sorcière était pris en compte, analysé, exploitant le moindre signe de vulnérabilité.
« Cela semble t'inquiéter sœurette ! » Lâcha-t-elle d'un ton faussement innocent, laissant planer une ambiance à la fois moqueuse et provocatrice, comme si elle se repaissait de la tension grandissante entre elles.
Bien qu'elle se refusait à l'admettre, c'était effectivement le cas. Elle n'eut aucun besoin de confirmer les supputations de son aîné pour que celle-ci comprenne aisément la vérité derrière le silence des plus éloquent de la sorcière.
« Rassure-toi. » Reprit la vampire. « Son intention n'est pas de te nuire, bien que je trouve l'idée distrayante pour ma part ! » Un léger rire vibra dans sa voix, un éclat machiavélique dans ses yeux, soulignant le sadisme de sa déclaration.
« Je n'en doute pas une seconde ! Parler avec toi est toujours un réel plaisir, tu es d'une telle sympathie ! » Ironisa la sorcière, ses mots chargés d'une acrimonie à peine voilée. Sa voix cinglante était une réponse en soi, une estocade lancée dans cette escarmouche entre sœurs.
« Je n'entendais pas l'être. » Répliqua la vampire avec verve, abandonnant momentanément son masque d'insouciance. Cette fois, l'échange prenait une teinte plus sombre, une pointe d'agressivité s'insinuant dans leurs paroles. La tension dans l'air semblait palpable, comme une charge électrique crépitant entre elles.
« Oh crois-moi, je le sais ! » Lâcha la sorcière avec verve, chaque syllabe portant le poids de son mépris envers son aînée. Ses prunelles brillaient d'une lueur féroce, reflétant toute la rancœur qu'elle ressentait. Chaque échange de mots semblait ajouter une nouvelle couche à l'antagonisme qui bouillonnait entre elles, comme un brasier prêt à flamber à la moindre étincelle.
En cet instant Lorelaï pouvait distinguer parfaitement la rancune pétiller dans les yeux de sa sœur, celle-la même qui la hantait d'ors et déjà petite fille. Cependant, avec le temps, cette animosité semblait avoir muée en quelque chose de plus sombre, plus profond. C'était de la haine pure qui dansait dorénavant dans les iris la scrutant en cet instant. L'enfant qu'elle était, le spectre de son innocence perdue, ne pouvait s'empêcher de se demander : pourquoi ? Qu'avait-elle donc fait pour inspirer autant d'aversion à son propre sang ? Quel était ce crime impardonnable qu'elle avait bien pu commettre pour que celle qui l'avait vu naître et grandir l'exècre de la sorte ? Pendant un instant, si fugace qu'on pourrait douter qu'il eut même exister, Lorelaï redevînt cette fille de sept ans. Ce joyau d'innocence qui avait subit ses premières fêlures suite aux rejets impitoyables et constants de la femme qui se tenait face à elle en cet instant.
« J'aimerais comprendre une chose... » Reprit la sorcière, sa voix teintée de perplexité, comme si elle cherchait désespérément à démêler les fils complexes de leur histoire. Ses sourcils se froncèrent légèrement, comme pour mieux saisir les nuances cachées derrière le ressentiment de sa sœur. « Tu as sauvé notre père d'une mort certaine, signe évident que, malgré ce que tu es devenue, tu te soucie bel et bien de notre famille. Pourquoi me hais-tu à ce point dans ce cas ? Qu'ai-je donc fait de mal ? »
Le silence s'étira, épais et chargé d'une tension palpable, tandis que les paroles de Lorelaï flottaient dans l'air, suspendues entre elles. Les prunelles de Philae, d'ordinaire si impénétrables, trahirent une lueur sombre, une émotion complexe qui s'agitait dans ses yeux dorénavant noirs comme une ombre en mouvement. Une fraction de seconde, son visage sembla se crisper, une imperceptible réaction avant de reprendre un masque d'imperturbabilité, dissimulant à nouveau ses pensées derrière un voile d'opacité.
« Qu'as-tu fait ? Tu l'ignores donc réellement ? La réponse est pourtant évidente ! Tu es venue au monde. » Déclara la vampire d'un ton sec. À nouveau, le silence. Un mutisme assourdissant enveloppa l'espace, un silence épais, un brouillard oppressant, rendant l'air, déjà bien trop lourd, difficile à respirer. Les secondes s'étiraient dans cet intervalle figé, entre culpabilité et reproches, comme si le temps lui-même hésitait à poursuivre sa course. « Tu es la maladie qui ronge notre foyer. Le cancer qui nous dévore. Tu es notre perte, le fléau qui à terme décimera notre famille entière... » Sa voix était basse, empreinte d'une amertume profonde, une mélodie lugubre jouée dans l'obscurité de leur histoire tourmentée, un refrain lancinant qui hantait les recoins les plus sombres de leur lien sororal.
« Tu as raison. » Admis Lorelaï à mis-mot, la voix chargée d'une acceptation résignée.
Les épaules de la jeune femme s'affaissant sous le poids des mots, aux allures de vérité accablante, prononcés par sa sœur. Les propos qu'elle avait entendu résonnait dans son esprit comme le glas sinistre d'une réalité dont elle avait depuis déjà bien trop longtemps conscience. Une sentence lourde de sens, une vérité brutale qui frappait, tel un coup de poignard dans l'âme en pièce de la sorcière.
« Si tu savais... Si tu avais la moindre... » Les paroles moururent dans la gorge de Lorelaï, le poids de la responsabilité étouffant chaque syllabe avant même qu'elle ne puisse les prononcer clairement. Une émotion complexe tourbillonnait dans ses yeux, un mélange de douleur et de désir ardent de rédemption. « Je suis désolée. » Ces trois petits mots glissèrent hors de ses lèvres comme une supplication, porteurs du poids de ses regrets et du chagrin qui la noyaient sous des flots de tristesse.
Malgré la détresse et la sincérité évidente de sa cadette, cela ne contenta pas Philae mais l'apaisa suffisamment pour clore le sujet et reprendre le cours de sa mission.
La conversation sur ce sujet épineux prenait fin, mais les cicatrices laissées par leurs échanges restaient, invisibles mais profondes, tissant les fils d'une relation complexe et trouble entre les deux sœurs.
« Je devrais m'en contenter pour le moment. » Répondit la vampire, impassible. « De toute manière mon avis importe peu, on ne m'a pas vraiment laisser le choix d'être là ! Père ne partage pas mon avis sur la question et m'a envoyer te prêter main forte. » La frustration grondait sous ses paroles, comme une bête sauvage furieuse en cage qui cherchait à s'échapper, griffant contre les barreaux de l'obligation. Un soupir d'exaspération s'échappa de ses lèvres et elle leva les yeux au ciel, un geste chargé de lassitude et de désintérêt.
Lorelaï ne comprenait que trop bien l'exaspération de son aîné et surtout pourquoi malgré sa réticence elle se tenait à présent devant elle. Déjà en tant qu'humain, le patriarche de la famille était intransigeant, presque tyrannique sur l'éducation de ses enfants. Bien qu'elle en comprenne dorénavant les raisons, la jeune femme, avait été terrifiée plus d'une fois à l'idée de décevoir ou désobéir à son père. La simple expectative de sa réaction suffisait à garder dans le rang la sorcière.
Cependant, un détail taraudait l'esprit de la sorcière. Comment, alors que leur père se trouvait à des centaines de kilomètres, aurait-il pu avoir connaissance de la situation de sa cadette ? Pourtant, son instinct lui soufflait que Philae ne mentait pas, qu'elle avait bien entrepris le voyage jusqu'à Hollow Creek sur l'ordre paternel. Cette situation défiait toute logique.
« Comment papa aurait-il pu savoir que j'avais besoin d'aide ? » Demanda Lorelaï, donnant une voix à ses réflexions intérieures.
« Je pensais que tes petits amis ne t'aurais tout dit sur le noctambulisme depuis le temps. Le vampirisme issus d'une mutation ou inné, octroie une connexion avec les personnes partageant le même sang. Le vampire est relié à son ascendance et descendance si celle-ci est encore vivante et qu'il partagent un affect avec celles-ci. Ce lien nous permet, et ce quelque soit la distance qui nous séparent des membres notre lignée, de ressentir les émotions les plus intenses : fureur, terreur, deuil... Père a ressenti ta détresse il y a quelques jours, il m'a donc envoyé en renfort. » Expliqua Philae avec un ton clinique, presque détaché.
« Comment m'as-tu trouvé ? » Questionna la sorcière, ses paupières se plissant, suspicieuse.
« Par ce même lien. Je sais en tout temps où chacun de vous se trouve. » Affirma Philae avec nonchalance calculée, comme si elle parlait d'un fait anodin.
« Je vois... » Déclara la cadette, sentant un frisson sinueux lui parcourir l'échine, une sensation comme le frôlement de doigts glacés contre sa peau.
Cette simple idée glaça le sang de la sorcière. Si son père décidait un jour de la transformer, comme il en avait exprimé le souhait, la fuite serait alors vaine. Lorsque Lorelaï secoua ses épaules et sa tête pour chasser les spasmes d'angoisse de son corps, le doute l'assaillit. Bien qu'elle avait senti la vérité dans la raison de sa présence ici, les motivations de la vampire, elles, demeuraient inquiétantes.
« Tu me semble sceptique, je me trompe ? » Demanda l'aînée en arquant un sourcil d'une manière presque théâtrale, ses traits exprimant une curiosité teintée d'amusement.
« Rien d'étonnant au vue de tes déclarations précédentes sur ton opinion me concernant... Comment pourrais-je croire que tu veuille réellement m'aider ? » Murmura Lorelaï. Sa voix résonnait comme un écho de ses doutes les plus profonds.
« T'aider ? Non, je n'ai aucune envie de te venir en aide ! » Répondit Philae avec une franchise à la fois glaciale et ardente. « Cependant, si tu es en danger, cela veut dire que le reste de notre famille l'est aussi ! Donc si en écartant la menace je protège les gens que j'aime, ainsi soit-il ! » Déclara Philae avec ferveur inattendue, son regard reflétant une détermination inébranlable.
La sincérité suintait des paroles tranchantes de la vampire. Bien que cela lui paraisse être une très mauvaise idée, Lorelaï ne pouvait se permettre de refuser une main tendue. Keiko venait de s'arroger un nouvel allié en la personne d'Ethan, toute aide était la bienvenue. Même si celle-ci venait de l'être le plus improbable et imprévisible qui soit. La jeune femme ferma les yeux en prenant sa décision, une prière silencieuse traversant son esprit inquiet. Que Dieu ait pitié de nos âmes, pensa-t-elle, en prenant une pieuse inspiration pour renforcer sa détermination..
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