Chapitre 25 : La prophétie

Avertissement, ce chapitre contient une ou plusieurs scènes choquantes pouvant heurter la sensibilité.

Au crépuscule du vingtième siècle et ce après la chute des tours d'occident ;

Deux entités en tous points opposés, par deux naissances, à leurs apogées arrivants.

Deux âmes, s'affrontant siècles après siècles & ennemies de naissance,

Toutes deux représentantes de leurs espèces se battront avec une égale puissance.


L'une, rusée, brave & droite, digne héritière du flambeau familiale ;

L'autre, tranchante & meurtrie, descendante directe d'une lignée magique ancestrale.

Nos deux protagonistes voient leurs destins par leurs origines scellées,

Dont la conclusion fatale & finale reste pourtant à déterminer.


Leurs choix, ainsi que leurs amours définiront finalement l'issus,

De ce combat, qui fut depuis la nuit des temps tant attendus.

L'une sera prise aux proies d'un amour pour un être défendu;

L'autre, dont par trois hommes d'espèces différentes le cœur sera ému.


Qui que ce soit qui l'emporte, cet affrontement épique transformera le monde secret à jamais.

Que ce soit celle dont le devoir sacré est d'éradiquer ceux qu'elle a autrefois, aimés ;

Ou celle dont la magie & la force n'auront d'égale que sa beauté & sa détermination,

Ces temps sombres & belliqueux arrivent ; nous en faisons l'annonciation.

Ces mots ne cessaient de résonner dans l'esprit de Lorelaï. Tourbillonnant dans sa tête encore et encore. Les mots porteurs de sinistres promesses, dansaient sans relâche dans sa cervelle. Leurs sombres valses incessantes se heurtant aux parois de sa pensée et envahissant tout son être dans un tumulte perpétuel. Une migraine lancinante s'était emparée d'elle, la serrant de ses griffes invisibles, comprimant chaque parcelle de son crâne dans cette douloureuse étreinte. Se massant les tempes d'une main tremblante, elle tentait de soulager l'oppression grandissante qui pesait sur elle. 

Elle n'avait pas dormi de la nuit tant les vers annonciateurs de malheurs à venir semblaient inéluctables. Les traits de son doux visage étaient tirés par l'inquiétude et sous ses yeux cristallins des cernes violacées témoignaient, silencieuses, de la lassitude grandissante de la jeune femme. Elle avait l'impression que chaque syllabe était une énigme insoluble qu'elle devait résoudre, un puzzle complexe qu'elle ne pouvait pas assembler. 

Certaines des rimes lui paraissaient pourtant évidentes à comprendre. D'autres, cependant, demeuraient beaucoup plus insaisissables. Elle avait déjà trié ce qui la concernait elle et ce qui décrivait Keiko. 

La digne héritière du flambeau familiale ou encore celle prise aux proies d'un amour défendu ; cela concernait sans nul doute son amie. Elle qui, comble de l'ironie, était amoureuse d'un vampire et descendait des membres fondateurs de l'inquisition. Ce qui laissait à Lorelaï la magie ancestrale et le cœur ému par trois hommes d'espèces différentes. Magnifique, pensa-t-elle, non seulement elle avait hérité des meurtrissures de l'âme mais elle avait aussi complexifié le concept du triangle amoureux. Cela ne lui semblait pas être des plus engageant. Sentant sa migraine s'intensifier encore, elle soupira éreintée avant de rattraper le fil ténu de son affligeante réflexion. 

Elle ne comprenait pas vraiment comment leurs deux âmes à elle et à Keiko pouvaient s'affronter depuis des siècles. Elles n'avaient toutes deux que dix-sept ans... C'étaient tout bonnement impossible.

Cependant, une révélation soudaine la frappa avec une force inattendue, comme un éclair dans l'obscurité. Les yeux de la sorcière s'écarquillèrent sous la réalisation. Elle, qui n'était il n'y a pas si longtemps encore qu'une néophyte dans le domaine du monde occulte pouvait se targuer désormais d'avoir une bonne connaissance de celui-ci. Une seule et unique chose pouvait expliquer ce vers sibyllin : la réincarnation.

Un sentiment ambigu mêlé d'autant de compréhension que d'étonnement de n'y avoir songé plus tôt l'envahit. Les pièces du casse-tête semblaient s'assembler avec une perfection terrifiante. Les âmes de Lorelaï et de Keiko, liées par-delà les époques, s'étaient retrouvées à nouveau dans cette existence, porteuses de leur passé et de leur destinée entrelacés. La perspective offerte par une telle vérité, fascinait Lorelaï aussi intensément que cela lui glaçait le sang. Elle se sentait écrasée sous le poids d'un destin dont elle ne contrôlait plus rien.

La jeune femme inspira profondément pour reprendre contenance, refusant une fois encore de se laisser happer par les ténèbres constituant sa vie. Elle tenait enfin la solution et se devait de porter toute son attention dessus. Sa grand-mère au cours de leurs leçons particulières lui en avait parlé et lui avait expliqué qu'il était très fréquent que certaines âmes soient tellement liées qu'elles se croisent sans cesse au cours de leurs diverses vies. Elle lui avait également apprit qu'il était possible pour une sorcière de voir ces dites vies. Cela constituait en un rituel plutôt simple qui lui permettrait d'accéder aux divers plans astraux. 

Peut-être que le fait de le réaliser lui permettrait d'obtenir quelques réponses supplémentaires sur cette prophétie, pensa Lorelaï. Un autre avantage non négligeable serait de trouver un moyen d'aider Keiko face au lien qu'elles possédaient toutes deux.

Elle n'avait pas totalement exclu la possibilité que Timothy ait pu mentir concernant la dangerosité d'une telle connexion entre elles pour Keiko. Cependant s'il y avait la moindre chance que ce soit vrai, elle ne pouvait pas l'ignorer. C'était son amie la plus proche. Cette même amie, qui allait peut-être un jour prochain la tuer ou inversement. Elle réfréna ces larmes à ces funestes réflexions et secoua sa tête comme elle en avait pris l'habitude quand elle voulait chasser, même momentanément, une pensée sinistre de celle-ci.

On dit que le savoir c'est le pouvoir, pensa-t-elle résolue. Sa décision était prise, elle allait effectuer le rituel.

Elle décida que la planque qu'elle et son groupe possédaient, pour ne pas dire squattaient, serait parfaite pour pratiquer sa magie. Elle prit donc tout le nécessaire à la réalisation du fameux rite et se rendit directement à l'endroit choisit. Quand elle arriva, elle fut agréablement surprise de trouver le lieu désert. Après tout, elle n'était pas particulièrement pressée de devoir expliquer son absence ces derniers jours avec qui que ce soit. 

Il faut aussi avouer que Lorelaï était quelqu'un de particulièrement obstinée et que la patience n'était pas la plus grande de ses vertus. Pour l'heure, une seule et unique chose accaparait son esprit ; la réussite de l'incantation.

Elle mit rapidement tout en place et une fois prête, la sorcière commença à psalmodier avec ferveur. Le chant magique s'échappant de ses lèvres emplissait l'air, vibrant dans la pièce sombre en une mélodie enchanteresse. 

Alors qu'elle récitait les vers sacrés, une énergie mystique monta en elle, parcourant son être comme un courant électrique. Chaque syllabe prononcée était comme une impulsion qui vibrait à travers ses veines, faisant frémir ses nerfs et éveillant tous ses sens. Les herbes choisies pour le rituel se consumaient lentement, emplissant l'atmosphère d'un arôme envoûtant. Les volutes de fumée virevoltaient autour d'elle, titillant ses narines. La lueur des bougies s'agitant effleurait sa peau, répandant une douce chaleur apaisante. 

Le rituel se poursuivit, emportant Lorelaï dans un état d'extase envoûtante. Elle était à la fois témoin et actrice de cette danse entre les mondes, reliant le présent au passé, le tangible à l'invisible.

Dans cette union entre le sacré et le profane, elle se sentait à la fois puissante et vulnérable, consciente des forces qui étaient en jeu. Les émotions se mêlaient en une symphonie tumultueuse : l'excitation, la crainte, l'émerveillement, et une détermination farouche à percer les mystères les plus profonds de l'univers.

Progressivement, une énergie mystique se manifesta, enveloppant Lorelaï d'une lueur iridescente. Son âme, prête à se libérer des entraves de son corps, commença à se détacher lentement. Une sensation étrange et à la fois libératrice la submergea, comme si elle flottait dans un état d'apesanteur. Son corps semblait devenir insensible, tandis que son esprit s'élevait, transcendant les limites du monde matériel.

Dans cet instant de séparation, une sensation éthérée la traversa, comme une brise délicate caressant chaque parcelle de son être. Ses sens s'aiguisèrent, percevant des nuances subtiles de réalité qui échappaient habituellement à son existence terrestre. Elle se sentait connectée à une énergie cosmique, à un savoir ancestral qui se dévoilait progressivement devant elle.

Son corps, inerte derrière elle, demeurait comme une coquille abandonnée. Seul son esprit transcendait les limites de la réalité, se libérant des contraintes de la matière.

Une fois sous sa forme immatérielle, Lorelaï se rendit dans un premier temps sur le plan dit de la vérité. En ce lieu où les voiles du passé se déchiraient sans réserve, une sorcière pouvait contempler tout ce qui c'était déjà produit, que cela la concerne directement ou non, pourvu qu'elle sache ce qu'elle cherchait. Si elle l'avait désiré, la jeune femme aurait très bien pu connaître la vérité sur la mort de Kennedy, la zone 51 ou tout autre mystère de son choix...

Cependant, la sorcière ne pouvait se permettre de flâner en cet endroit, l'urgence de la situation ne le lui permettant pas. Elle choisit donc de remonter le fil du temps, suivant la lignée de la famille de Keiko jusqu'à l'origine de toute cette folie. Ce qu'elle découvrit alors l'horrifia. Bien qu'aucun élément ne lui permette de connaître l'année dans laquelle elle se trouvait, Lorelaï estima que celle-ci devait être antérieur à toutes civilisations. Elle vit un homme d'origine asiatique aux traits sévères qui semblait avoir asservi un vampire. Le visage émacié, le teint blême et moribond, ce dernier semblait dépérir sous le joug de son impitoyable maitre. L'ancêtre des Hantã, quant à lui, se nourrissait du sang du noctambule avec délectation. De cette relation perverse et contre nature naissait leur supériorité physique, leurs corps s'appropriant certaines capacités vampiriques. Ce fait monstrueux expliquait comment Timothy, qui devait lui aussi être une descendant des chasseurs, arrivait à tenir en échec des êtres surnaturels avec tant de facilité. Telle était en réalité la source de leurs puissances. 

Une vague d'indignation et de dégoût submergea Lorelaï devant cette vision. Ils traitaient ce qu'ils considéraient être le mal par le mal. Lorelaï était révulsée par cet acte empreint d'une ignoble hypocrisie de la part des ces êtres paradant comme des parangons de vertu. Elle sentait son corps éthéré frémir de rage tant l'injustice dont son monde était victime la révolta. L'un des plus éminents membres de l'inquisition qui moleste une sorcière et des chasseurs qui boivent du sang de vampire ; c'était tout bonnement inconcevable. Au plus profond d'elle-même, Lorelaï savait qu'il fallait y remédier, mettre un terme à ces abus. Malheureusement elle ne pouvait rien faire à ce sujet pour l'heure et le temps pressait. C'est pourquoi elle se rendit finalement, non sans regret, sur le plan où lui serait possible de connaitre ses vies précédentes.

Lorelaï se retrouva enveloppée dans un amas de brumes, donnant l'impression grisante qu'elle flottait au milieu des nuages. Elle se surprit à penser que c'était ainsi qu'elle aurait imaginé le paradis si elle y avait cru. Elle fut sorti de sa réflexion par l'apparition d'une femme. Un sourire se dessina sur le visage de celle-ci, et Lorelaï lui rendit de tout cœur avec sincérité.

« Je te l'avais dit que nous serions sûrement amenées à nous revoir... » Déclara affectueusement Catleen Boleign, son arrière-grand-mère.

« Vous m'en voyez sincèrement ravie ! Vous connaissez certainement d'ors et déjà la raison de ma présence ici. »

« En effet... La décision t'appartient, mais sache cependant que la voie que tu as choisie est certes honorable et tu es ici pour des raisons plus que louable pourtant elle est également extrêmement douloureuse et difficile... Es-tu sûre de vouloir l'emprunter mon enfant ? » Demanda la matriarche la mine grave.

Lorelaï ne prit pas les avertissements de son interlocutrice à la légère. Bien qu'elle n'eût pas forcément envie de s'y plonger, il le fallait pourtant. Son avenir et celui de son amie en dépendait. Elle prit une profonde inspiration et hocha fermement la tête en guise de réponse.

« Qu'il en soit ainsi... » Déclara son ancêtre en posant deux doigts pile entre les yeux de la jeune femme.

Avant même qu'elle puisse prononcer un mot, Lorelaï se retrouva plongée dans un tout autre monde. Le décor éthéré disparu sous ses yeux pour laisser place à une somptueuse demeure, typiquement italienne du XIVe siècle. Les hauts plafonds voûtés, les fresques murales délicatement peintes, les meubles en bois richement sculptés et les tapisseries raffinées créaient une ambiance d'opulence et de sophistication. Lorelaï, quant à elle, se trouvait dans le corps d'une aristocrate de la renaissance, immergée dans une vie où chaque détail respirait la grandeur et le luxe.

Elle avait pensé être une simple témoin de ses vies passées, comme elle l'avait expérimenté précédemment sur le plan de la vérité. Elle s'était lourdement trompée. Elle ne se contentait pas de voir le passé à travers les yeux de ses diverses incarnations, cela allait bien au delà. Elle revivait véritablement cette existence, ressentant intensément chaque sensation qui traversait son corps nouvellement habité. 

Le soleil filtrant à travers les fenêtres à vitraux caressait sa peau délicate, réchauffant agréablement ses joues. Le corset, rigide et contraignant, lui comprimait douloureusement la poitrine et l'obligeant à adopter une posture hautaine. Chaque pas qu'elle faisait sur le sol en marbre poli lui procurait une sensation de stabilité et de grâce. Les parfums d'encens et de fleurs flottaient dans l'air, emplissant ses narines d'une fragrance envoûtante. Les sentiments de la jeune femme dont elle avait envahit le corps, la traversaient comme des vagues. La joie, l'excitation, mais aussi les inquiétudes et les frustrations s'entremêlaient dans un tourbillon intense d'émotions.

Dans ce décor somptueux et riche en détails, Lorelaï se retrouvait prisonnière des sensations de cette vie passée, impuissante à en changer le cours. La jeune femme réalisa à quel point cette expérience était à la fois troublante et captivante. Elle était complètement immergée dans cette réalité révolue, telle une marionnette contrôlée par les fils du passé. Elle comprenait désormais pleinement l'avertissement de son ancêtre.

Elle fut tirée de sa torpeur par le bruit insistant de quelqu'un frappant à la porte. Sans qu'elle en ait la volonté, les mots s'échappèrent de ses lèvres.

« Entrez ! » Avait-elle dit avec autorité.

L'homme passant le pas de la porte n'était autre qu'une incarnation précédente de Timothy. Elle constata que lorsqu'elle rencontrait une âme qu'elle connaissait d'ores et déjà dans sa vie actuelle, la personne apparaissait sous les mêmes traits qu'à son époque. Elle fut sidérée de voir qu'elle avait déjà rencontré au préalable cet homme qui ne lui faisait ressentir que répulsion et dégout. Encore une fois, sans pouvoir réprimer ses paroles, sa voix s'éleva.

« Ah cher duc... Que me vaut le plaisir ? »

Elle sembla attendre qu'il eût fermé la porte avant de reprendre avec un ton plein de fougue.

« Tu as été si long... Je me languissais de toi mon amour ! »

Elle était abasourdie que dans une de ses vies ces mots-là ai eu pu avoir comme destinataire cet être abjecte. Elle n'était pourtant pas au bout de ces peines, puisqu'à peine ceux-ci avaient-ils eut franchis le seuil de ses lèvres, qu'ils se mirent à s'embrasser dans une passion dévorant. Elle sentit les lèvres de Timothy sur les siennes, les mains de l'homme sur ses courbes. Le corps de son incarnation passée appréciait cette intimité, mais Lorelaï, elle, avait la nausée. Elle ressentait chaque mouvement, chaque contact avec une répugnance profonde. Le moindre soupir arraché par cet homme à son corps tremblant était une torture à l'état pur. Chaque instant de cette expérience était un véritable supplice, tandis qu'elle se trouvait en totale opposition avec les sentiments et les désirs de cette vie passée.

Son dégoût finit par atteindre son paroxysme quand leurs caresses s'intensifièrent et qu'elle se retrouva plongée dans un moment de volupté avec ce même homme qui allait l'agresser des siècles plus tard. Le pire étant qu'elle ressentait également ce sentiment d'amour qu'éprouvait cette femme à l'égard de son bourreau. C'était un mélange tourmenté de répulsion et de désir, une symphonie discordante d'émotions contradictoires qui la déchirait de part en part.  Les sensations physiques de plaisir se heurtaient à l'horreur de la situation, créant une dualité insoutenable. 

Chaque frisson parcourant son être était un rappel cruel de la réalité ineffable qui était la sienne. Chaque coup de rein du futur inquisiteur devenait pour Lorelaï un coup de poignard dans l'âme. La plénitude physique de son ancienne incarnation se confondant avec la douleur émotionnelle de la sorcière, l'amenait au bord de la folie. Elle était emprisonnée dans un instant de plaisir empoisonné, incapable de se libérer de ce tourment intérieur qui la consumait peu à peu.

Dans cette étreinte charnelle, l'amour et la haine se mêlaient de manière insoutenable. Le plaisir corporel se transformait en supplice mental, empoisonnant chaque fibre de son être. Elle était tiraillée entre sa vie passé et son présent, entre l'amour envers cet homme qui émanait du corps qu'elle habitait en cet instant et la répulsion indicible qu'il lui inspirait. C'était une danse morbide, un ballet tragique où le désir et la répulsion s'entrelaçaient dans une spirale infernale devenant tout deux indissociables.

Quand son calvaire s'arrêta enfin et qu'ils eurent finis leur ouvrage, il dit tendrement à l'oreille de son amante.

« Je t'aime Amelia Boleign. »

Il avait un sourire radieux pendu à ses lèvres. Amelia le regarda tout aussi amoureusement, une lueur d'adoration brillant dans ses pupilles.

« Je t'aime plus encore Thomas. » Déclara l'aristocrate.

Les traits du visage de son interlocuteur se remplirent soudain d'amertume avant que celui-ci ne reprenne la parole.

« Même si mon père vous haïs toi et ta famille, je t'aime. Quelques soient les raisons qui le font détester la personne que je chérie le plus en ce monde, cela m'est égale. J'aurais vingt ans dans une semaine et juste après qu'on ait célébré mon anniversaire, je viendrais te trouver. On s'enfuira loin de toute cette folie, loin de tout ça. On se mariera et on fondera notre propre famille. »

À ces mots Lorelaï fit un bond dans le temps. Elle se retrouva cette fois-ci face à l'incarnation de Keiko.

« Et voilà, demain soir Thomas et moi seront enfin ensemble. Nous pourrons enfin laisser notre amour s'exprimer aux vues et aux sus de tous. Plus personne ne sera là pour entraver nos sentiments ! » Avait dit Amelia sur le ton de la confidence.

« C'est tellement romanesque ! » Déclara l'interlocutrice de l'aristocrate.

« Surtout pas un mot Kyra ! Je sais que vos pères sont très liés et font des affaires ensemble, mais le père de Thomas ne doit absolument pas l'apprendre... »

« Ne t'inquiète pas, mes lèvres sont scellées ! » Affirma l'ancienne incarnation de Keiko avec un éclat d'impatience dans les yeux.

« Tu me manqueras ma très chère Kyra... Tu es comme une sœur pour moi ! » Lui dit Amelia en lui caressant la main tendrement.

Lorelaï fit un nouveau bond dans le temps, elle se trouvait désormais dans un vestibule, en train de faire les cents pas, une valise à ces pieds. Au bout de quelques minutes, qui semblèrent interminables, quelqu'un frappa à la porte. Elle accouru vers celle-ci, impatiente.

« Ah ! Enfin... Thomas, je commençais à m'inquiéter ! » Déclara Amélia, visiblement soulagés.

Mais quand qu'elle ouvrit la porte, ce n'était pas Thomas, qui lui faisait face. Un homme au trait sévère, se tenait devant elle la fusillant du regard.

« Il ne viendra pas. » Dit l'homme, la voix grave et le ton méprisant.

« Je ne vois pas de quoi vous voulez parler monsieur. » Répondit Amelia avec impertinence en relevant le menton en signe de défi.

« Ne vous faites pas plus sotte que vous ne l'êtes ! Vous et vos semblables avaient bien des défauts, je vous le concède ; mais la stupidité n'en fait malheureusement pas partie ! » Face au silence éloquent de son interlocutrice, il reprit : « Je vous parle de mon candide de fils, mademoiselle Boleign. Cet homme qui fut assez faible pour succomber à vos charmes, connait désormais votre véritable nature ainsi que celle de tout ceux de votre engeance ! »

« De quoi diable parlez-vous ? » Demanda-t-elle, sidérée d'entendre de tel propos.

« Diable ? C'est en effet le terme qui semble convenir ! Vous êtes des suppôts du démon, des satanées sorcières ! J'avais bien vu que vous et mon fils, vous rapprochiez ; cependant il me fallait attendre l'aube de sa vingt-et-unième année pour qu'il nous rejoigne enfin et que je sois en mesure de lui révéler la vérité vous concernant ! C'est désormais chose faite !»

À ces mots, il explosa d'un rire gras et empreint de sadisme, se délectant de l'émoi évident de la jeune femme face à lui. Amelia était effectivement une sorcière, mais n'avait jamais fait le moindre mal à âme qui vive. Au contraire elle avait toujours utilisé ses dons dans le but de venir en aide à autrui. Elle était totalement innocente des accusations, que lançait cet homme aussi intolérable qu'intolérant, qui l'accusait en cet instant. Elle resta bouche bée quelques secondes, puis reprit la parole, les yeux au bord des larmes.

« Vous mentez ! Il... Il m'aime ! » Déclara Amélia, incapable de concevoir que de tel propos puissent être vrai.

« Vous aimez ? Il ne peut aimer une chose aussi répugnante que vous en toute connaissance de cause... Encore moins s'enfuir avec vous ou vous épouser ! » Ravis du regard surprit de son interlocutrice, qui suivit sa dernière réplique, il continua. « Et oui, j'ai eu vent de votre petit projet... Il vous l'aurait bien annoncé lui-même, mais il est en pleine initiation et qui plus est, il avait trop honte, il ne pouvait pas poser les yeux sur vous sans avoir la nausée à l'idée de s'être abandonné à un être vil et répugnant tel que vous ! Donc...»

« JE SUIS UN ÊTRE HUMAIN ! » Elle hurlait à présent, le coupant dans son réquisitoire, sans ménagement. « Je ne vous crois pas ! Je ne crois pas un traître mot qui franchit votre bouche de vipère ! »

« Encore besoin d'être convaincue ? S'il ne m'avait pas dit tout cela, vous seriez morte à l'heure qu'il est ! Il m'a supplié de vous épargner la vie par respect de ce que vous avez pu être ! Mais comprenez-moi bien, s'il vous revoit un jour ; il vous tuera de ses propres mains !»

Le père de Thomas lui tendit un parchemin, qu'elle lut fébrile, sur celui-ci seul quelques mots d'une écriture familière étaient inscrits « Oublie-moi, quitte cette ville et ne reviens jamais ! ». Les larmes coulaient désormais à flot des yeux d'Amelia. Elle aurait tant aimé les retenir et priver son interlocuteur de ce plaisir, mais elle avait appris le matin même qu'elle attendait un enfant ; l'émotion l'avait submergé. Elle prit sa valise et s'enfuit sur ces derniers mots, accompagné du rire triomphal du père de Thomas.

« Adieu Mademoiselle Boleign ! »

Ils se lancèrent un dernier regard emplit d'une haine mutuelle, puis Amelia esseulée disparue dans la nuit noire.

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