Chapitre 13 : Le lien
Un silence lourd suivit la déclaration de Lorelaï. Keiko semblait abasourdit par cette nouvelle tout à fait surréaliste et peu crédible. Cependant Lorelaï était on ne peut plus sérieuse. Keiko ne savait plus quoi penser et cela n'allait pas aller en s'arrangeant car ce fut au tour de Caleb, qui avait laissé la colère l'envahir, de prendre la parole.
« Parce que toi tu as été à cent pour cent honnête avec nous dès le départ ? »
Lorelaï se tut, il avait raison, elle ne leurs avait pas tout dit elle non plus. Mais comment aurait-elle pu le faire ? Salut, je m'appelle Lorelaï je suis une sorcière ! Il l'aurait prise pour une folle.
« Exactement, c'est le même problème pour nous ! » Avait repris Caleb avec conviction.
« Je ne comprends plus rien là ! » Déclara la pauvre Keiko.
Lorelaï fut choquée de le voir ainsi confirmer ses spéculations. Les vampires étaient donc bel et bien télépathes. Ce constat déclencha sa fureur, pensant qu'il avait pu espionner toutes ses pensées les plus intimes et inavouables. Elle se sentait nauséeuse.
Après avoir vu son corps abusé sans son consentement il y a à peine quelques heures, c'était maintenant son esprit qu'on envahissait sans son accord.
Voyant Amadeo et Caleb se regarder tristement avant de baisser une nouvelle fois la tête honteux, la jeune femme comprit qu'une nouvelle fois ils avaient eu accès à ses pensées, elle était furibonde.
« Ce n'est pas gentil de lire dans les pensées des autres sans leurs autorisations ! Donc à l'avenir je vous prie de bien vouloir dégager de ma tête. Et pour ta gouverne Caleb La nuance entre mon secret et le vôtre, c'est que dans mon cas ce n'est pas un danger direct pour vous. Moi je n'ai pas pour sale habitude de manger tes congénères ! C'était quoi l'idée ? Vous vous mettiez en appétit en jouant avec nous ? Ta mère ne t'as jamais dit qu'il ne fallait pas jouer avec la bouffe ? »
« Tu es injuste avec nous Lorelaï... Nous n'avons jamais eu l'intention de vous faire du mal ! »
Cette fois-ci ce fut Amadeo qui avait pris la parole, blessé par les paroles dures de la jeune femme.
Pendant quelques secondes ils turent tous. Cependant Lorelaï remarquant la conversation silencieuse entre les deux vampires cria folle de rage :
« À voix hautes, c'est trop vous demander ? Et puis merde ! Je ne sais même pas pourquoi je m'évertue à parler avec vous, c'est une perte de temps ! »
Elle commença à se diriger vers la sortie, mais Caleb s'interposa entre la jeune femme et la porte, il devait la raisonner. Il savait qu'elle souffrait énormément et ce qu'elle venait d'apprendre, elle le vivait comme une trahison. Il lui dit donc calmement :
« Écoute moi, Rory, je t'en prie. Oui nous ne vous avons pas tout dit. Mais crois-moi, j'en avais envie. Je me suis sincèrement attaché à toi, tout comme Amadeo à Keiko. Vous n'étiez aucunement une distraction. Je sais que tu es perdue et déroutée. Je sais que tu te sens trahie en cet instant. Mais je t'en supplie laisse-nous vous expliquez. Laisse-moi te parler. Je sais que tu as eu une... » S'arrêtant dans son plaidoyer quelques instants, pour chercher un mot approprié pour qualifier les évènements de la veille. « Horrible soirée mais ce n'est pas de notre fait ! »
À ces mots, elle sentit une nouvelle vague de colère l'envahir, celle-ci bien plus dévastatrice que toutes celles qui avaient précédés. Ce n'était certes pas de son fait mais il avait sa part de responsabilité.
Il l'avait laissé seule à cause de sa capacité de télépathie et de sa jalousie pour quelque chose dont elle n'était aucunement responsable, on lui avait reproché ses fréquentations. On l'avait jeté une fois qu'ils en eurent finis avec elle devant chez LUI. Elle ne voulait qu'une seule chose en cet instant qu'il souffre comme elle avait souffert, qu'il ressente toute l'impuissance et l'horreur qu'elle avait elle-même ressenties, qu'il partage une infime partie du calvaire qu'elle avait subi.
« Pas de votre fait, hein ? Lis donc ça ! » Lui avait-elle lancé avec hargne.
Elle se concentra de toutes ces forces pour faire défiler les souvenirs de l'enfer qu'elle avait traversé ces dernières heures, elle ne lui épargnait rien, ni ses viols, ni les tortures, rien...
Elle se forçait à revivre une nouvelle fois ses tourments dans le seul but de le blesser lui.
Au fur et à mesure que les images défilaient dans son esprit, elle vit Amadeo reculer de plusieurs pas pour prend appuie sur le mur. Quant à Caleb il s'effondra à genoux, mettant sa main sur son cœur tant celui-ci était douloureux. Quand elle eut fini, elle fut ravie de voir qu'ils avaient tous deux les larmes aux yeux. Leurs regards étaient affolés et leurs respirations semblaient douloureuses. Elle voulait lui faire mal et elle avait réussi.
« Alors tu penses toujours que tu n'y es pour rien ? Tu penses toujours que n'as aucune responsabilité dans mon horrible soirée comme tu l'as si gentiment appelée ? » Vociféra-t-elle, la voix déformée par la colère.
L'impact des mots acerbes de la jeune femme, étaient comme des aiguilles chauffées à blanc enfoncés dans le cœur de Caleb. Elle n'avait aucune idée qu'il se reprochait d'ores et déjà tout ce qu'il avait pût lui arriver même s'il ne connaissait pas alors l'étendue des supplices subis par la jeune femme, ignorant à ce moment-là à quel point il était loin de l'indicible vérité. Elle n'imaginait pas la douleur qu'il avait ressenti ou la souffrance qui l'avait accablé en la soignant plus tôt. Quand il avait aperçu le sang sur ses cuisses, quand il avait compris... Quand il a su... C'était comme si une partie de lui-même venait de lui être arrachée.
« Lorelaï ça suffit ! tu n'as pas idée de... » Commença Amadeo qui avait entendu la détresse de son ami.
« AMADEO NON ! » le coupa net Caleb.
Si Lorelaï avait besoin d'un coupable, il le lui donnerait. Si cela pouvait soulager même une infime partie de sa détresse qu'il en soit ainsi. Il n'avait pas été là pour la protéger mais ça il pouvait le faire et cela lui importait peu si ce sacrifice était une torture. Il y consentait pleinement.
« Caleb... » Lança Amadeo tristement.
« Je suis tellement désolé... » Dit Caleb à Lorelaï en baissant la tête, les yeux emplis de larmes.
« Garde tes excuses pour quelqu'un que cela intéresse ! » Répondit-elle froidement.
Elle alla prendre le téléphone fixe et appela un taxi, puis elle alla chercher Castiel. Une fois dans le hall d'entrée, ils sortirent avec Keiko pour attendre dans la rue. Caleb tenta une dernière fois de la convaincre de rester pour discuter, ne pouvant se résoudre à laisser leurs rapports rester ainsi. Avant qu'il ne puisse articuler le moindre mot, Lorelaï reprit une dernière fois la parole réduisant à néant l'espoir et le cœur du vampire.
« Je ne veux plus jamais te revoir... Est-ce que c'est clair ? »
Quand Caleb vit le taxi s'éloigner, il se mit à pleurer.
Une fois qu'elle eut déposé Castiel chez lui, Lorelaï et Keiko s'étaient rendues sur la plage. Bien qu'il soit très tard, Lorelaï avait proposé de s'y rendre. Elle ne se sentait pas encore la force d'affronter la réalité. L'air frais marin et le bruit des vagues apaisaient la jeune femme. Elles avaient allumé un feu sur le sable. Lorelaï ne pouvait se résoudre à rentrer pour l'instant. Elle ne voulait pas rester seule avec ses pensées qui la hantait. Keiko hésitait à poser la question qui lui brulait les lèvres, Lorelaï avait compris ce qui la tracassait et elle lui sourit faiblement et lui dit :
« Demande-moi ce que tu veux... »
« Si tu ne souhaites pas répondre je comprendrais. » Précisa-t-elle avant toute chose. « Je me demandais à quel secret Caleb faisait référence quand il disait que toi non plus tu n'avais pas été honnête. »
À ces mots Keiko baissa sa tête, honteuse de sa curiosité.
« Je me doutais que c'était ça. » Elle lui souriait une nouvelle fois, voulant la rassurer sur la légitimité de sa question. « Je sais que tu as déjà beaucoup à digérer et je m'excuse par avance de devoir en rajouter encore. Je voulais t'en parler mais ma vie est devenue tellement compliqué que je ne voulais pas t'entraîner avec moi dans tout ce chaos. Mais si y a bien une chose que j'ai compris ce soir c'est que ce n'est pas parce qu'on ignore quelque chose que l'on est protégé des impacts néfastes de celle-ci. » Elle soupira lourdement. « Pour être honnête je suis... Comment dire cela sans que cela paraisse ridicule ? Bon tant pis je me lance... Je suis une sorcière. »
La mâchoire de Keiko se décrocha sous le choc.
« Tu es sérieuse ? »
« Malheureusement oui... »
Jusqu'à l'épisode de la veille, Lorelaï avait toujours pensé que le fait atypique d'être une sorcière était un atout. Elle qui avait comme souhait le plus cher d'être en mesure de protéger les personnes qu'elle aimait, avait finalement la capacité de le faire. Cependant elle avait appris de la pire des manières, que tout ceci était accompagné d'un lourd tribut. Elle avait idéalisé sa nature, pensant, candidement, qu'elle représenterait son salut. La vérité était bien plus nuancée et pour l'heure sa magie avait des allures de malédiction.
Réalisant l'ampleur des mots de son amie, Keiko explosa de rire, pas de ceux qui se voulait moqueur, mais plutôt un empreint de nervosité.
« Attends que je résume, mon petit-ami est un vampire et ma meilleure amie est une sorcière. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes ! Rien de plus normal en sommes... »
Lorelaï se joint au rire sans joie de son amie face à l'absurdité de la situation. Elles ne purent s'arrêter pendant plusieurs minutes ce qui fit un bien fou à Lorelaï. Quand elles réussirent à se calmer, Keiko s'essuya ses larmes et dit :
« Plus sérieusement, comment as-tu su ? Pour Caleb et Amadeo je veux dire... » Demanda la jeune femme de manière vague, ne pouvant se résoudre à préciser une nouvelle fois la nature fantasque des deux hommes.
Lorelaï, y voyant une opportunité de récupérer un semblant de contrôle sur sa vie et également donner à son amie la possibilité d'assimiler avec plus de sérénité les rebondissements de ces dernières heures, su exactement ce qu'il convenait de faire.
« Tu veux que je te montre ? » Proposa Lorelaï avec espièglerie.
« Comment ça ? » Demanda Keiko, ne comprenant pas ce qu'impliquait la jeune femme face à elle.
« Je suis une sorcière rappelles-toi. Je n'ai pas encore de pouvoirs individuels qui se sont manifestés, mais j'ai quand même la capacité de lancer certain sort... » Devant le regard sceptique de son amie, Lorelaï rajouta : « Écoute, il existe un rituel pour lier deux âmes ensembles, je te promets que c'est indolore et tout ce qu'il y a d'inoffensif ! » La rassura-t-elle, ayant aperçu une lueur panique dans les yeux de la jeune femme. « Cela a aussi certains avantages... Tel que la possibilité pour nous de fermer nos esprits dorénavant à toutes intrusions extérieures et nous serions nous aussi capable de nous parler mentalement ce qui peut s'avérer très utile. Sans oublier que ce sera un bon moyen également de te prouver que tout ceci est bien réel ! »
Bien qu'elle ne soit que très moyennement rassurée face à une telle éventualité, elle avait totalement confiance en Lorelaï. Elle était également un peu curieuse, il fallait bien l'admettre. Elle accepta donc. Il leurs fallut plus d'une heure pour mener à bien le rituel. Bien que Keiko ne soit pas dotée de pouvoir magique, il lui suffisait de participer au bon déroulement de celui-ci, comme signe d'acceptation de leurs liens. Quand ce fut enfin finit, Keiko demanda à Lorelaï :
« Ça a marché ? »
« Il n'y a qu'un seul moyen de s'en assurer ! »
Elle se concentra et pensa à l'adresse de sa comparse Tu m'entends ? Keiko fit un bond à côté d'elle. Cela ne pouvait signifier qu'une chose. Le sort avait parfaitement fonctionné.
« Comment tu as fait ça ? » Demanda Keiko, interloquée.
« Concentre-toi sur moi et pense à quelque chose que tu aimerais me dire. »
« Ok je vais essayer... » Affirma la jeune femme, sans aucune conviction de parvenir à l'effet escompté.
Malgré les incertitudes de Keiko, il ne fallut que quelques secondes pour que Lorelaï entende dans son esprit la voix de son amie dire :
-Un, deux, test... Allo y a quelqu'un ?
Ces quelques mots suffirent à provoquer l'hilarité de la jeune femme.
« Tu sais que ce n'est pas un micro ! » Lui dit-elle en la taquinant gentiment.
« Heu oui... » Répondit faiblement Keiko rougissant, honteuse.
« Bon maintenant je peux répondre à ta question. Tu es prête ? »
« Pas vraiment, mais bon quand faut y aller... »
Lorelaï lui sourit et se concentra une nouvelle fois sur sa soirée, en commençant par les évènements du pub pour finir à la conversation chez Caleb. Cette fois-ci elle filtra les détails trop douloureux, elle ne voulait pas accabler son amie inutilement.
Malgré tout et sans qu'elle eût un total contrôle de ses souvenirs Keiko avait pu avoir un aperçu suffisant des déboires de Lorelaï. Quand elle eut fini Keiko tremblait.
« Je suis vraiment désolé que tu ais dû endurer tout cela... » Dit-elle, le regard brillant d'émotion face à la détresse qu'elle avait ressentie dans les souvenirs de son amie.
« Merci mais n'en parlons plus si tu le veux bien. »
« Pas de soucis je comprends parfaitement. »
Elles regardèrent le feu quelques minutes en silence. C'est alors que deux hommes s'approchèrent d'elles. Quand ils furent assez proche pour que les filles puissent discerner leurs traits, elles les reconnurent. C'était les deux autres hommes qui étaient assis à la table d'Amadeo et Caleb le soir de leurs rencontres. Il était aisé de supposer, qu'à l'instar de Caleb et Amadeo, ces deux hommes soient eux aussi des vampires. Ce simple fait, accumulé à la douleur ressentie à cause de sa dispute avec Caleb plus tôt, suffit à exacerber la colère de Lorelaï.
« D'autres vampires, chouette ! » Déclara Lorelaï ironiquement.
« On vient en amis. » Dit l'un des deux hommes, levant les mains en signe d'apaisement. « Je m'appelle Samuel et voici mon frère Liam. » Ajouta-t-il, en désignant l'homme à ses côtés. « On ne mord pas... » Conclut-il, confirmant à Lorelaï ses suppositions concernant leurs natures à tous deux.
Le double sens de cette dernière déclaration se voulait rassurante mais eut l'effet inverse et irrita d'autant plus Lorelaï.
« Parle pour toi petit frère... » Avait dit Liam avec malice.
« Voyez-vous ça ! Un comique ! Cette soirée est de mieux en mieux... » Lança Lorelaï, sarcastique.
Liam tourna autours de Lorelaï, tel un prédateur et dit :
« C'est donc toi l'amuse-bouche du noble Caleb... » La détaillant avec attention. « Je dois avouer que t'es appétissante quoi qu'un peu esquintée malheureusement. J'en ai presque l'eau à la bouche. »
« Donne-moi rien qu'une raison de massacrer ta petite face de prétentieux... Ce sera avec plaisir ! » Dit-elle avec dédain.
« Mais c'est qu'elle a du répondant la petite, j'adore ! » Commenta Liam en riant.
« Liam ça suffit maintenant ! Excusez-le, il a encore un peu de mal à se tenir correctement en société... Bref nous sommes venus pour vous prévenir que tant que celui qui t'as agressée ne serait pas hors d'état de nuire, on gardera un œil sur vous au cas où... » Intervînt Samuel.
« Merci mais non merci. On n'est pas deux petites choses sans défense... Et sans vouloir t'offenser, en ce qui me concerne, moins je côtoie les vampires mieux je me porte. »
« Ah par ce que t'as cru, qu'on te demandait ton avis sur la question ? Qu'elle est mignonne ! » Il la scruta une nouvelle fois et ajouta. « Et puis sans vouloir te vexer aux vues des résultats précédents il semblerait que tu ne sois pas aussi capable de te protéger que tu sembles le croire. Je dois te dire jolie le style hématome sur patte ! » Dit-il en ricanant.
« Va chier ! tu n'as personne d'autre à emmerder sérieux ? »
« Non chérie, tu es la seule et l'unique. » Clama-t-il un sourire narquois sur les lèvres.
« Chérie ? Qui est-ce qu'il appelle chérie là ? » Demanda Lorelaï furibonde.
Liam se gaussait grassement. Voyant que cela pouvait dégénérer Samuel lui mit une claque derrière la tête et dit :
« On va vous laisser, maintenant que vous êtes au courant on peut partir... Au revoir »
« À très bientôt... » Dit Liam à l'adresse de Lorelaï.
« Compte dessus ! » Lui répondit-elle agressivement.
« Bon ben apparemment on est loin d'en avoir finis avec les vampires... » Déclara Keiko, une fois les deux frères partis.
Lorelaï ne répondit pas. En regardant les premiers rayons du soleil pointer à l'horizon, elle se dit que son amie avait raison. C'était loin d'être terminé.
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