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Ce premier chapitre présente les six différents personnages principaux à des époques et dans des endroits très différents. Cette brève introduction a pour but de permettre aux lecteurs de se plonger dans la psyché de chaque personnage avant d'explorer l'intrigue principale. 

Chacune des parties de ce chapitre est indépendante l'une de l'autre. Par conséquent, les lecteurs pourront remarquer une différence de ton et d'intensité dans la narration.

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PROFESSEUR AKHEELI

** Togo (Afrique), 2080 **

« Compte rendu 1. Gaëlle nous a fait une frayeur hier soir, mais elle va bien maintenant, » dit une voix masculine en anglais. L'homme d'une quarantaine d'année parle d'un ton saccadé et haletant. « Je dois tenir ceci dans un journal, car il s'agit probablement du début d'une grande aventure pour la science, » ajoute-t-il avec un sourire en coin. 

Le quarantenaire pose tranquillement l'enregistreuse sur son bureau pour s'adosser lourdement sur le dossier de son siège. Puis, il se retourne vers son écran l'air pensif, son sourire en coin toujours suspendu aux lèvres. Enfin, il inspire profondément avant d'ouvrir sa boîte e-mail.

Le premier est de Mme MacIntosh. Il secoue doucement la tête en levant les yeux au plafond avec dédain avant de cliquer sur le suivant.

Mme Ho lui a répondu. Il ouvre le message et se penche en avant avec grand intérêt sur son écran. Mme Ho habite en Corée du sud ; célibataire ; 32 ans ; architecte ; elle veut un garçon qui soit plus grand que son père ou qui ne connaitra jamais la douleur quotidienne des personnes atteintes de la drépanocytose. Elle porte le gène de Babel par l'intermédiaire de sa mère, une noire américaine.

Le généticien s'arrête un instant pour réfléchir quoi lui répondre. Il a déjà une réponse, c'est forcément oui, mais tout l'art ne consiste pas juste d'accepter. Il s'agit plutôt de la manière de le faire. Le plus désespérée la cliente, le mieux c'est, car elle ne refusera rien et payera plus. Il avait justement en tête d'essayer un nouveau médicament pour pallier à la réaction du gène de Babel lorsqu'on tentait de modifier un gène proche. 

Malheureusement pour cette cliente, le gène responsable de la drépanocytose se situe juste à côté de ce dernier. Parfait ! Il va pouvoir s'amuser un peu avec ce cas-là. Peut-être même qu'il pourra lui proposer une naissance artificielle plutôt que naturelle malgré son jeune âge. L'homme respire profondément avant de taper sa réponse. Envoyer. Il passe au suivant.

Mme Moreau. Le message est écrit en français. Il saisit le verre d'eau sur le bureau et prend une gorgée tout en gardant son regard viré sur son écran. Il clique sur sa souris de sa main libre avant de reposer sa boisson. Mme Moreau habite au Vietnam ; mariée ; 21 ans.

Le quarantenaire fronce les sourcils. « Quelle femme assez stupide à notre époque se marie à cet âge-là ? Elle ne doit pas avoir grand-chose dans la tête celle-là, » pense-t-il en pinçant les lèvres.

Elle a épousé à un militaire ; Ils viennent tous les deux du Luxembourg. Ni l'un ni l'autre ne portent le gène de Babel, mais ils sont tous les deux fertiles. L'homme sourit anticipant leur requête : leur trouver un donneur au teint le plus clair possible qui serait néanmoins porteur du gène. 

Dénicher de bons donneurs dans une population majoritairement infertile coûte très cher, mais lorsqu'ils doivent en plus ressembler à des Caucasiens et porteurs du gène, cela ajoute des frais supplémentaires. Il faudra aussi les avertir des risques éventuels que l'enfant puisse aller chercher d'autres attributs indésirables propres aux gens porteurs du gène de Babel. 

En payant un peu plus, il pourrait s'assurer que cela n'arriverait pas à leur progéniture. Ce dernier serait aussi blanc qu'à l'image de ses parents biologique ; à moitié.

Le scientifique lève les yeux au plafond comme pour y chercher des idées. Puis soudain, il se replonge sur son clavier pour taper passionnément dessus comme s'il jouait du piano. Prodigieux ! Un véritable virtuose ! 

Il s'arrête net quelques secondes pour contempler son chef d'œuvre. Ses doigts suspendus dans les airs au-dessus de son clavier. Il agrippe sa souris. Envoyer. Il continue ; la communication suivante vient d'une madame Uta.

Mme Uta lui écrit en allemand, mais elle a des origines japonaise, chinoise, perse et irlandaise aussi ; 48 ans. « Parfait ! » Souffle-t-il en souriant. Plus ses clientes sont âgées, plus elles sont susceptibles de pouvoir payer les frais exorbitants de la naissance artificielle en plus de la manipulation génétique de leur futur enfant. 

Étant donné qu'elles ne peuvent plus partager naturellement leurs propres patrimoines génétiques avec eux de toute façon, proposer les deux services vont de soi.

« Alors, dites-moi Mme Uta, comment puis-je vous aider ? » murmure le généticien à soi-même en se penchant sur son écran le sourire aux lèvres. Avant qu'il ne continue de lire, son téléphone au poignet se met soudain à vibrer. Wendy Lianolovic apparaît. Il prend immédiatement l'appel.

« Mme Lianolovic, comment allez-vous ? » fait-il avec un large sourire.

« Professeur Akheeli ! Le bébé est prêt, tous les résultats sont sortis positifs, » enchaîne la voix féminine surexcitée. « Vous pouvez venir quand pour la naissance ? » demande-t-elle d'un seul trait.

« J'arriverai à la date qu'on avait fixée ensemble, » répond calmement le professeur. Il ouvre son calendrier sur son ordinateur.

« J'ai le 10 juillet, soit dans deux semaines, » dit-il d'un ton posé.

« Ça ne va pas être trop long ? » rétorque la femme inquiète.

« Bien sûr que non, ils se sentent toujours très bien dans leur tube, » s'exclame-t-il en rigolant.

Ne vous attendez à rien basé sur les histoires de science fiction que vous connaissez Laissez-vous plutôt aller et continuez de lire l'esprit ouvert et curieux...