C h a p i t r e 1 0
Drago
Mon nom était synonyme de parfait petit gosse de riche, pourri gâté, élevé dans la richesse et l'abondance. Tout le monde croyait en cette image. Rien ne pouvait m'atteindre. J'ai été élevé dans cette optique. Je devais projeter cet état d'esprit et les gens devaient y croire. J'étais un Malefoy, on devait me respecter, même me craindre. Mais était-ce réellement ce que je voulais?
Après réflexion la réponse était non. J'aurais voulu avoir des amis, de vrais amis. Ceux sur qui l'ont peut compter, ceux qui vous aiment vraiment pour qui l'on est et non pour notre rang ou notre fortune. J'aimerais pour une fois être entouré de gens sincères se préoccupant de moi, qui sauraient quand je ne vais pas bien. Mais je n'étais pas doué en relation humaine, je ne faisais que les repousser.
Mon père Lucius et ma tante Bellatrix se sont occupés de mon éducation. Ma mère a dû assister à ça, impuissante. Elle a essayé de s'opposer une fois et elle avait passé près d'y laisser sa vie. Entre les séances quotidiennes de Doloris ou de Sectumsempra, j'avais des leçons particulières de magie noire. Si je ne les assimilais pas assez vite, ils me torturaient à tour de rôle. Mais la pire des souffrances n'était pas due à la douleur physique, c'était de savoir que mon père ne tenait pas à moi, qu'il ne m'aimait pas. Il me formait pour être un bon soldat pour le Seigneur des Ténèbres, rien de plus, rien de moins. Et cela... c'était pire que tout.
Étant le fils et le neveu de Mangemorts proche de « Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom », mon destin était d'en devenir un à mon tour. Je m'y étais opposé violemment. Ce jour-là, j'avais passé à un cheveu de mourir. Que je ne veuille pas devenir un fidèle du Seigneur des Ténèbres était considéré comme une terrible trahison et a mis ma tante dans une fureur indescriptible. J'étais devenu la honte de la famille. Elle m'a jeté des sortilège du Doloris sans arrêt, jusqu'à ce que je n'arrive plus à bouger, ni à parler. Je n'avais plus conscience de rien, j'ai cru devenir fou. Puis, ils en ont profité pour m'apposer la marque sur mon avant-bras gauche. À l'aide du feu, ils ont gravé le symbole des Mangemorts sur ma peau. La douleur était si vive à mon réveil, j'ai eu envie de mourir. J'ai tenté de l'enlever à l'aide d'un couteau, de me suicider. Mais rien à faire. Même ça, je n'y arrivais pas. J'étais vraiment devenu un bon à rien. Une véritable honte.
Ils m'ont donné une mission pour prouver ma loyauté, sans quoi ils tueraient la personne qui comptait le plus pour moi, ma mère. Je devais faire entrer des Mangemorts dans Poudlard et tuer Dumbledore, le directeur de l'école. J'ai pu avertir ce dernier, étant trop lâche pour faire ce que l'on attendait de moi. Je n'étais pas un tueur. Conscient que je venais de condamner ma mère à une mort certaine, le directeur m'a fait rejoindre l'Ordre du Phénix à titre d'espion de la partie adverse. Seulement deux autres personnes étaient au courant de mon implication dans l'organisation : mon parrain, le professeur Rogue et le professeur McGonagall, l'actuelle directrice. J'avais donc choisi de trahir mon camp et de ne pas suivre les traces de mon père.
Dumbledore a tout de même été tué par le professeur Rogue. Ma mère l'avait forcé à faire un serment inviolable. Il devait me protéger et accomplir ma mission à ma place. Son fils n'était pas un tueur et elle le savait. Tout avait été organisé entre les deux hommes, mais encore aujourd'hui les gens m'en tiennent pour responsable, j'aurais lancé le sortilège impardonnable d'après certains. Je ne l'avais que désarmé pas tué. La guerre a commencé à cet instant. Beaucoup y ont perdu la vie. Puis, le Seigneur des Ténèbres a été terrassé comme le trois quart de ses fidèles. Quant à mon père, il a été arrêté puis emprisonné à Azkaban pour haute trahison. J'en étais presque soulagé.
Pour ce qui est de ma tante Bellatrix, personne n'avait pu mettre la main dessus. Elle s'était cachée et maintenant, elle avait établi résidence dans notre manoir. Elle y semait la terreur. Tout était devenue une occasion pour me torturer. Je ne lui répondais pas assez vite, je respirais, je n'aurais pas dû naître, je n'étais qu'une erreur de la nature... Vous voyez le genre. Elle avait honte d'avoir un neveu comme moi. C'était pire que tout. Je ne dormais plus et j'avais beaucoup maigri. Je vivais dans une peur constante.
Personne ne s'en était rendu compte, parce que personne ne se préoccupait assez de moi pour cela. Sauf peut-être Blaise, mais il avait assez de soucis avec sa propre mère. Elle était mourante. Je ne pouvais pas lui en vouloir si son esprit était concentré sur autre chose. J'aurais aimé pouvoir faire quelque chose pour lui.
Puis, la veille de Noël, j'ai pris une décision, je devais fuir. Pour ma survie. J'avais tout préparé, ma malle était rétrécie dans mes poches. Et en pleine séance de torture, je me suis retrouvé chez les Granger. Je n'avais pas choisi mon lieu à l'avance. J'avais simplement demandé un endroit sûr où je serais en sécurité.
Au début, j'étais assez incertain de l'endroit choisi. Mais à ma plus grande surprise, j'avais passé une bonne semaine dans sa famille. Même avec elle, c'était moins compliqué. J'apprenais à connaitre une toute autre jeune femme et ce n'était pas sans me déplaire. Ses parents ne savaient rien de notre petite guerre personnelle et j'en avais été stupéfait. Ils m'ont traité comme si je faisais partie de la famille, me couvrant de petites attentions. Ça eut le don de me décontenancer, je n'étais pas vraiment habitué à ce genre de traitement. On m'avait quand même élevé à coup de Doloris.
Et Granger venait de comprendre. Elle venait de voir tout ce que je m'efforçais de cacher au monde. C'était la seule qui pouvait comprendre, qui pouvait m'aider. Elle ne me jugerait pas et ne penserait pas que j'étais faible.
Nous ne sommes pas encore des amis, mais nous sommes liés. Notre souffrance intérieure ne fait qu'une et nous poursuivions le même but : anéantir Bellatrix Lestrange, même si nous devions y laisser la vie.
Elle était là devant moi, totalement dévastée par mes souvenirs. Je me suis jeté à genoux à ses côtés et je l'ai serré contre moi. Je m'en voulais de lui faire vivre cela, mais elle voulait et devait savoir. Je l'ai sentie trembler contre moi, elle n'arrêtait pas de s'excuser. Je ne savais d'ailleurs pas la raison. Elle n'avait jamais levé sa baguette sur moi. Elle n'était pas responsable de mes malheurs. Je n'avais aucune raison de lui en vouloir.
Je lui avais tout révélé sans retenue, sans censure. Même s'il était difficile pour moi d'en parler. Elle m'avait écouté, les yeux brillants de larme. Il n'y régnait aucun signe de pitié, mais je pouvais y déceler de la compréhension et de la compassion. Elle a compris. Nous étions dans la même galère, tous deux victimes de la folie de Bellatrix Lestrange. Deux enfants brisés par la magie noire.
Elle a fini par se calmer. Elle a levé son regard vers moi. Ses yeux marrons étaient rougis et gonflés. Mon coeur s'est brisé encore un peu plus et elle m'a dit :
— Je veux le faire.
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Il était minuit lorsque nous nous sommes installés. Le couvre-feu était passé alors nous étions sûrs de ne pas être dérangés. Nous étions assis l'un en face de l'autre sur le plancher de notre salle commune. Nous avions réuni tout ce dont nous avions besoin pour mettre à exécution le sort. J'ai levé les yeux vers elle, elle était impassible. Je ne saurais dire si elle était apeurée ou détendue. Rien ne laissait présager un quelconque sentiment sur son visage.
— As-tu peur?
Elle a secoué la tête négativement pour toute réponse. Je l'ai connu beaucoup plus bavarde. Ses petits yeux marrons me fixaient. Je me suis concentré sur les écrits du livre tentant d'ignorer son regard. J'ai disposé le nouveau collier d'Hermione et ma chevalière avec une pierre d'hématite noire sur le dessus entre nous. Elle s'est occupée d'allumer quatre chandelles noires et les a disposées autour de nous.
Je n'étais pas nerveux, elle me rendait étrangement calme. Je me devais d'être concentré. Mon père m'avait enseigné une chose avec l'utilisation de la magie noire; la moindre petite erreur pouvait tout faire rater. Étant donné la complexité du sortilège, nous devions être très prudents, sinon cela pourrait déchirer notre âme au lieu de les fusionner et mourir. Rien de moins.
— À part mourir, nous pourrions ressentir d'autres effets secondaires, lui ai-je rappelé. Changer la couleur de nos cheveux, avoir plus d'excès de colère et de folie, peut nous rendre suicidaire. Ça peut accentuer notre côté obscure.
Elle a hoché la tête, elle comprenait bien les risques.
— Nous pourrons entrer dans la tête l'un de l'autre, communiquer par télépathie, nous pourrons également loger dans le même corps si nous sommes obligés, le plus fort de nous deux contrôlera, lui ai-je expliqué. Par contre, si l'un de nous est blessé, l'autre le sera également. Mais nous pourrons unir notre énergie pour guérir plus vite. Toujours partante? Tu sais, tu peux changer d'idée n'importe quand. Tu n'es surtout pas obligée. Je ne t'en voudrais pas, lui ai-je assuré.
— Je ne me défilerai pas. Nous serons plus puissants ensemble que séparés. J'ai besoin de toi comme tu as besoin de moi.
Je lui ai fait un mince sourire. Confiant, j'ai pris le poignard dans ma main et je l'ai glissé dans la paume de ma main gauche. J'ai ressenti une vive douleur me traverser le bras. Une sensation de brûlure m'a fait fermer les yeux un instant. J'ai tendu le couteau à la brune et elle a répété le même geste. Elle a grimacé de douleur avant de me donner sa main, pressant l'une contre l'autre nos plaies.
Un vent frais nous a entouré, faisant vaciller les flammes de nos chandelles. Nous avons récité la formule en faisant couler notre sang mélangé sur l'hématite noire de nos bijoux tout en nous regardant dans les yeux. Ce contact visuel était important pour la réussite du sortilège. La pierre a tout absorbé sans laisser tomber une goutte.
Le vent s'est mis à tourner de plus en plus vite autour de nous, soulevant les cheveux de ma partenaire. J'ai resserré ma prise sur la main de la jeune femme, une sensation de vertige m'a pris soudainement. Notre respiration s'est accélérée et sa tête s'est enfouie dans le creux de mon épaule. J'ai lutté pour ne pas perdre connaissance. Il m'était difficile de rester concentré, mais je le devais.
Brusquement, le vent est retombé et les chandelles se sont éteintes. J'ai fermé les yeux et j'ai bercé son corps, pendant une minute peut-être deux, avant de rompre notre étreinte.
Encore déboussolé par les événements, j'ai pris sa main blessée. Elle était douce et chaude. Je l'ai portée à ma bouche et j'y ai déposé délicatement mes lèvres. Un frisson agréable a parcouru mon corps quand je l'ai embrassé doucement.
Avions-nous réussi?
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Merci à britemy pour son aide précieuse.
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