Ne mangez pas ces fruits !
Je suis une jeune fille amnésique coincée dans une chambre. Qui suis-je ? D'où suis-je ? Pourquoi suis-je ici ? Que de questions sans réponses. Ce jeune homme semble être ma porte de sortie, mais il ne maîtrise pas la magie, c'est embêtant. La mienne fait imploser des objets inertes, mais je ne sais pas comment je l'ai obtenu. Savoir que je ne peux compter que sur cet abruti pour m'échapper m'irrite au plus haut degré. Tout cela m'agace, rester dans la même pièce à longueur de journée tape sur les nerfs. Ah, je sens une vibration, il arrive ! Enfin !
- Hein ? Quoi ? Je suis de retour dans cette maudite chambre ?!
- Bonjour, lui dit-je.
- Ah ! Encore toi ! Ce rêve est persistant !
Je lui explose la tronche de mon poing, ça lui apprendra.
- Mais, ça ne va toujours pas mieux ?!
- Bah non, si je suis encore ici !
- Il te faut un autre passage, c'est ça ?! Mon monde ne te convient pas ?
- Ce n'est certainement pas le mien, alors non, il ne me va pas.
- Alors débrouille-toi ! Moi, je me casse par la trappe.
- Non.
- Et pourquoi ?
- Elle a disparu.
- De quoi ?!
Il vérifie, puis panique.
- Je vais être bloqué à mon tour ! Et avec toi !
- Moi non plus, je n'en ai pas envie. Alors trouve le nouveau passage !
Il se calma par paliers. Ensuite il se mit à réfléchir. Je me surprends à le détailler, il est plutôt petit, il a des cheveux mi-longs et châtains, il est trapu, porte chemise et pantalon, gants de cuir, pieds nus en sandales, et il a l'air d'avoir une idée :
- Eh bien, peut être derrière un des posters ?
Il arracha sans remords les affiches. Une fenêtre se dissimulait sous la dernière. Elle était ouverte sur une spirale qui nous aspira en un instant, sensation de déjà vu. Le garçon n'a pas l'air habitué, lui. Il vomit juste après avoir dit "C'est quoi ce truc ?!". La téléportation serait-elle répandue dans mon univers ? Nous arrivons en pleine forêt. Une fois « posé », il rend une seconde fois tout ce qu'il avait mangé. Après un bref coup d'œil, je constate que nous avons atterri dans une forêt équatoriale.
- J'entends des bruits de combat. Et il y a un campement là-bas, lui dis-je.
- Tu te familiarises vite, trop vite, je n'ai pas ta capacité d'adaptation. Si tout cela est réel, je me vois mal survivre en pleine jungle. Retournons à la chambre !
- Le portail a disparu, il va falloir improviser.
- Pourquoi moiiiiiii ?
On nous interpelle :
- Vous, que faites vous ainsi ? On est sur un champ de bataille, allez vous mettre en tenue !
- Un militaire ! s'écrit celui sensé être le Passeur...
- On est sur le front, il n'y a plus de civils par ici, donc oui je suis militaire. Et vous aussi !
- On ne s'est jamais battus, lui dit-il, au bord de la crise de nerfs.
Qu'il est sensible ! Et je vais devoir me le coltiner...
- Soit vous combattez, soit vous êtes nos ennemis ! nous hurle-t-il.
- On ne voudrais pas vous frustrer, dis-je vous calmer la situation. Où sont les vestiaires ?
- Ils ont sauté, voici vos tenues ! Allez vous changez dans la jungle !
Le soldat fait deux mètres pour 150 kilos de muscles. Je crois qu'il vaut mieux ne pas le contredire. J'enfile en catimini l'uniforme qu'il m'a donné, pendant que mon « partenaire » essaye de trouver l'entrée du pantalon. Mon Dieu... Mais bon, nous voilà finalement parés. Je lui communique le plan suivant : dès qu'on est hors de vue du géant, on file.
Ce dernier s'approche de nous et nous tend à chacun une sacoche.
- Voici vos armes : d'offensive pour le jeune homme et de soutien pour la jeune fille.
On ouvre, curieux, les sacs pour voir des... fruits ?! Sérieusement ?
- Je vous explique leur utilisation, continue-t-il. Pour toi, petit homme, tu as des cerises, des noix de coco, des ananas et des grenades. Pour les cerises, c'est simple : tu en chope une grosse poignée, tu leur manges la chair et tu recraches les noyaux, attention, c'est mortel ! Les noix de coco, il suffit de les lancer, ça vous brise un crâne comme une brindille. Enfin les ananas et les grenades, ça explose, faites les chauffer avec un briquet (il est dans une poche) et une fois qu'ils sont murs, bombardez ! Qu'y a-t-il de drôle minus ?
Rappelés à l'ordre, il se relève. Les fruits sont létaux ici... eh bien ma vieille... Mieux faut ne pas combattre dans un verger.
- Toi, jeune fille, tu as des bananes, des pêches, des poires et des pommes ! Les bananes, vous les mangez pour avoir la pêche, et les pêches, c'est pour avoir la banane ! Ah oui, la peau du long fruit glisse terriblement ! Pour les poires, il faut les couper en deux près des ennemis, et ils se la fendent. Crise de rire garantie ! Pour les pommes, vous les lancer dans leurs pommes, ils tomberont dedans immédiatement, et ne les garder pas pour la vôtre ! Maintenant, au front !
Nous partons en quatrième vitesse. Le crétin de service n'arrête pas de pouffer, ça va être très vite énervant.
- Des fruits tueurs ? C'est le monde à l'envers, rit-il.
- Chut, il y a des personnes là-bas.
- Oui, attention, on va se prendre des myrtilles sur la tronche. Hihihi !
- Quel rire pourri... Tiens, c'est quoi ce truc ?
Une papaye vole vers nous et s'écrase sur le sol, provoquant une rafale qui nous renverse au sol.
- Bordel ! Mais c'est qu'il n'était pas fou, l'autre vétéran ! constate-t-il.
- Eh non. La deuxième vague arrive !
C'est au tour de trois noisettes de tomber à nos pieds. Au contact avec le sol, des trous se forment, de tailles conséquentes.
- Il faut répliquer ! Chauffe un ananas !
Il rigole moins, tant mieux pour sa vie. Je lance une poire coupée dans la direction de nos opposants, le temps qu'il s'exécute. J'entends leurs rires, ça a marché ! Ils sont trois, désavantage numérique, crotte. Cette situation me semble familière, étrange. Mon « partenaire » finit par balancer un des explosifs fruités, tuant un belligérant sur le coup. Serait-il doué au lancer ?
- Ouah, le coup de chance ! crie-t-il.
Je retire ce que j'ai dit.
Un de nos ennemis prépare quelque chose, une pomme le calmera. Je vise et tire. Dans sa tête! J'ai un bon poignet. Le dernier sort de son sac une fraise...
- Ne le laisse pas la lancer ! me hurle le Passeur.
Avant que je puisse réagir, la fraise est sur nous. Elle reste un instant dans les airs avant d'échanger sa place avec le dernier combattant. De la téléportation ?
- Il a ramené sa fraise !
Il va surtout engager le combat au corps à corps !
Le garçon avait prévu le coup, heureusement. Il crache en un éclair ses noyaux de cerise sur le guerrier téléporté, lui trouant littéralement la peau. Il a deux meurtres à son actif, certains en sortent traumatisés...
- Comment je suis trop fort ! T'as vu ce « Double Kill » ?
Pas lui...
Je chope le survivant au col (celui qui était tombé dans les pommes). Il se réveille. Je le questionne :
- Où est-on ?
- Pas chez vous, sales envahisseurs !
Et il disparut. Une autre fraise. Caca !
- C'est bien de survivre, dit le Voyageur en me rejoignant, mais comment partir ? Ca n'a pas l'air d'être l'endroit que tu cherches, toi aussi tu as été surpris en voyant la puissance de simples fruits.
- C'est qu'il aurait un cerveau, le mioche.
- Qu'est-ce que tu as dit, la princesse ?
- Je n'ai pas de temps à perdre ici, cherchons un portail.
- C'est normal pour toi, hein, la téléportation ou les autres trucs comme la magie ?
- Il faut croire.
- Bon, j'ai lu beaucoup d'histoires du même genre qu'il nous arrive. Généralement, le but est de trouver la base de l'ennemi.
- Et comment veux-tu faire ?
- On fouille ceux que j'ai descendu, crétine.
Mon poing le rappelle à l'ordre. Cependant, rien n'a d'intérêt pour nous sur les cadavres. C'est mon constat, lui, il a tourné de l'œil dès qu'il s'en est approché. Il s'est vraiment évanoui, l'autre crétin ! Alors que je vérifie s'il n'a pas été blessé, au cas où, il disparaît. Je me retrouve seule. Je me lève et observe les alentours quand une pomme arrive dans mon champ de vision.
Ma chambre, je suis de retour. Le Passeur n'est pas là. Je n'ai plus qu'à attendre.
Au moins, j'ai gagné un uniforme de soldat et des fruits létaux, ça pourra toujours servir...
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top