Chapitre 29 /

PDV Julia

Son regard gris croise le mien avec tellement de force et de brillance que mes jambes se mettent à flageoler. Je suis sous son emprise totale, enfermée dans cette suavité si effrayante que je me sens désemparer d'une quelconque forme de débridement.

— Ryan...

Ma bouche se ferme aussitôt lorsque je me rends compte que je viens de l'appeler par son prénom. Cela forme un déclic en moi qui m'aide à me libérer de son emprise si tentatrice. Je me rends compte de la position dans laquelle nous sommes, et de mes principes qui s'émiettent de plus en plus à chaque seconde à ses côtés.

— Euh... je veux dire, Monsieur Alvarez. Laissez-moi, lui demandai-je en essayant de m'échapper de lui.

L'espace entre nous se fait de plus en plus maigre tant il s'approche de moi. Brutalement, il attrape chacune de mes mains et les plaque au-dessus de ma tête avec une telle force que je sursaute. Ma respiration se fait courte, mon souffle haletant, ma peau froide. Mon esprit est brouillé, et je me remémore encore et encore ces souvenirs sans une once de maîtrise. Je ne suis pas en danger, je le sais, je le sens, mais je ne veux pas l'embrasser maintenant. Et le fait que nos envies soient contradictoires entraîne mon cœur dans une série de battements affolés l'amenant tout droit dans le gouffre obscure de mes souvenirs. Mais malheureusement pour moi, mes signaux d'effarements ne sont pas compris de la bonne manière du côté de Ryan qui se colle de plus en plus à moi.

— Arrête de m'appeler "Alvarez". C'est stupide, Julia...

Je fronce les sourcils, et déglutis avec difficulté. Je veux qu'il s'écarte, bien que mon corps le désire toujours au fond. Mais là, je ne le veux pas, pas maintenant, pas après tout ce qui s'est passé.

— Lâchez-moi ! répétai-je en détournant le regard.

— Arrête de me vouvoyer.

— Si ça te fait plaisir ! Mais lâche-moi maintenant ! m'exclamai-je en le fixant droit dans les yeux pour le fusiller du regard.

Je me mets alors à me débattre, mais à ma plus grande surprise, il ne me lâche toujours pas. Une vague de panique me prend, et mes souvenirs se font de plus en plus vivaces, trop même.

Je ne veux pas que ça recommence.

Flashback...


Il me plaque brutalement au mur, comme si je n'étais qu'une simple petite marionnette. Je suis sous sa mainmise la plus totale. Il est le dominant, je suis la dominée. Le choc est si abrupt et féroce qu'une douloureuse brûlure pétrifie l'arrière de mon crâne.

— Aaah... non stop. Je t'en prie.

Ma voix est faible, pathétique. J'ai envie de me cracher dessus, de me piétiner jusqu'à la mort pour être cette crasseuse et écœurante ordure que je suis. Étonnement, sa main aussi glacée que son regard vient effleurer avec une gentillesse sans nom mon avant-bras. Elle remonte, enveloppée d'une douceur qui n'est pas sienne, le long de ma poitrine, arrive vers mon cou, et se pose délicatement sur ma joue avant de la caresser tendrement...

... mon souffle est haletant,

je prends des inspirations courtes,

et rejette des expirations longues,

je n'ai plus d'air dans mes poumons,

je suffoque,

et je ne sais surtout pas comment réagir.

Cette tendresse n'est pas habituelle, il ne compte pas me frapper aujourd'hui ?

Alors qu'une vague de soulagement et de joie me prend, sa main se lève avec une vitesse effrayante et angoissante au-dessus de ma tête, avant de venir d'écraser d'une force inhumaine sur ma joue. Je tombe à la renverse, m'écroule, et dépéris sur ses pieds qui m'éjectent d'un féroce coup. Je lâche des cris plaintifs qui se transforment en des hurlements quand il enchaîne les coups de pieds sur ce corps qui n'est plus qu'une horrible carcasse ne m'appartenant pas.

Il me frappe,
encore,
et encore,
et encore.

Je me demande ce qu'est la vie sans douleur.

Je me demande s'il serait possible de prendre plaisir à cet incongru cataclysme qui me suit avec démence.

Juste pour mieux l'accepter, mieux l'adhérer.

Alors j'encaisse,

il aime,

je crie,

encore,

que cela cesse,

à l'aide.

Le sang coule à flot et se mêle à mes larmes pour former un magnifique désastre à l'image de ma vie.

Je suis un désastre.

Je cris, je pleure et hurle, mais personne ne m'entend. Mon cauchemar est éternel, ne s'arrêtera jamais malgré mes infinies supplications.

Je n'ai même plus la force d'appuyer sur ma douleur, je n'y arrive pas. J'ai mal partout, et dans des endroits humainement inatteignables. Mes deux frêles mains ne suffiront jamais, j'ai besoin de l'univers tout entier pour panser les blessures et hématomes de mon âme. Il s'abaisse à ma hauteur, et me caresse la hanche en me regardant tendrement...

... pourquoi fait-il ça ?
... pourquoi moi ?

... parce que tu es une erreur.

— Parce que je t'aime Julia... me murmure-t-il comme s'il lisait en moi. Plus que ma propre vie. Mais encore une fois, tu ne me laisses pas le choix, tu me pousses à bout, et fais ressortir le plus mauvais de moi. Je te déteste et t'aime en même temps, tout comme toi. Nous sommes un fusionnel et magnifique désastre, unis par le sang et la mort. Nous sommes pareils. Donc s'il te plaît, ne t'étonnes pas... ne t'étonnes plus.

Son doigt trempe mon sang, et dessine sur ma peau le chemin de ma mort. Son regard se fait soudainement plus froid, plus malsain.

Comment as-tu pu devenir ainsi ?

Il retire sa ceinture dont le bruit berce mes rêves...

... mes cauchemars.

Il y a bien longtemps que je ne fais plus de rêves.

Je pleure, m'accablant sur ce sort qui m'est destiné depuis toujours.

— Non ! Non ! Je t'en prie ! Je ne le referais plus ! le suppliai-je en sanglotant abondamment.

Je lui secoue le poignet pour essayer de le réveiller, mais c'est sans succès. Il est dans sa transe, comme envahi par cet accru démon qu'il est.

Il ne m'entend pas,
ne m'entend plus,
ne m'entendra plus jamais.

— NON JE T'EN PRIE STOP !

De retour à Ryan et Julia...


— Julia, arrête de m'ignorer et-

— Je t'ai dit de me LÂCHER !! hurlai-je en me débattant avec violence.

Surpris par le ton de ma voix, il me lâche brutalement. Mes mains tremblent, envahies par cette frénésie sans nom, et viennent d'écraser sur sa joue pour se décharger. La claque émet un assourdissant bruit qui nous fige tous les deux. Je reprends mes esprits bien que ma respiration soit haletante, et Ryan ouvre la bouche par le choc. C'est fini, il n'est pas lui, je ne suis plus la même. Je décide finalement d'attraper mon sac, et m'enfuie avec précipitation de cette pièce maudite. Je m'enfonce dans l'ascenseur comme s'il s'agissait de mon cocon, et sens les nerfs éclater dans mon crâne.

Pour qui se prend-t-il, bordel ?! Il pense qu'en étant le patron, il peut tout se permettre avec moi ?!

Je prends l'ascenseur pour descendre, mes nerfs ne tenant qu'à un fil... Mais pour qui il se prend ?! Il croit qu'en étant mon patron, il peut tout se permettre ?!

"Non ! Non ! Je t'en prie ! Je ne le referais plus !"

Je secoue ma tête, et la prends entre mes mains tant les voix sont douloureuses et instoppables. Qu'elles cessent... TAISEZ-VOUS ! Arrêtez de me hanter, je n'en peux plus !

Les portes de l'ascenseur s'ouvrent, et j'en sors comme une furie, bouleversée et énervée. En marchant droit comme un pique, je fonce sur quelqu'un qui renverse toutes ses affaires au sol. Sans le regarder, je l'aide à ramasser rapidement, et m'en vais sans demander mon reste.

C'est alors que je sens une main s'enrouler autour de mon poignet. Je me retire avec force de cette emprise, comme dictée par mon instinct, et me retourne dans l'idée de voir le visage de Ryan. Mais à ma plus grande surprise, je croise le regard inquiet d'Austin qui me jauge.

— Hey... ça va princesse ? me demande Austin en posant une main gentille sur mon épaule.

Ma respiration est courte, essoufflée.

— Pourquoi tu dis ça ? lui demandai-je en reprenant mon souffle.

— Tu as l'air contrarié et... perdue.

Je déglutis, et me détourne de son regard inquisiteur.

— Je... je suis juste un peu fatiguée.

Il comprends que je ne souhaite pas davantage parler de ça, et rigole en me lâchant. Nous plongeons dans un silence gênant, et j'essaye à tout prix de briser la glace.

— Quand comptes-tu aller à la salle ? lui demandai-je subitement en le regardant.

— Ce soir, m'annonce-t-il en passant sa main dans ses cheveux fraîchement rasés. Ça fait longtemps que je ne t'y ai pas vue d'ailleurs, tu sèches ?

Je rigole doucement en passant une de mes mèches derrière mon oreille. En soit, un peu de sport ne me fera pas de mal, ça m'aidera à décompresser.

— C'est vrai ça, je devrais m'y remettre. Avec ce nouveau poste, j'ai tellement de choses à faire que j'ai complètement oublié... mais je pourrai venir avec toi, ce soir, non ?

— Oh, bah bien sûr princesse !

— Ok... cool !

J'évite son regard, et me tortille les doigts. J'ai besoin d'air.

— Tu es sûre que ça va, Julia ? répète-t-il en s'approchant.

Je recule en lui souriant. À bat les hommes, laissez-moi tranquille !

— Oui oui bien sûr, à toute !

Sur ce, je m'en vais à la vitesse de la lumière.

* * *

Je décide de courir pour aller à la salle après m'être rapidement changée chez moi, pour d'ores et déjà me chauffer. Entre-temps, j'ai demandé à Lydia si elle souhaitait venir avec moi pour nous entraîner étant donné qu'elle pratique également de la boxe. En arrivant à la salle, je croise Austin qui entraîne des jeunes au loin, et il me salue vigoureusement. Il est d'une énergie si intense que c'est dur de le suivre quelques fois. Je dépose mes affaire à côté d'un sac de frappes lorsque je sens des mains se poser sur mes yeux. Je me retourne et aperçois Lydia, toute souriante.

— Coucou Jul' ! me salue-t-elle en me prenant dans ses bras.

— Salut Ly' !

— J'étais assez surprise lorsque j'ai lu ton message, j'ai l'impression que nous avons complètement mis la boxe de côté ! Mais bon, il faut savoir bouger son p'tit cul qui commence à prendre de la cellulite !

Je rigole, et sors de mon sac mes gants. Je lui indique le sac derrière moi.

— Je vais commencer avec ce punching-ball, commences à t'échauffer toi aussi. Ensuite, on pourra se faire un petit combat ! lui proposai-je, toute excitée.

Elle acquiesce, rigole et s'en va. Je respire un bon coup et me place devant le sac de frappe pour me concentrer. Je forme ma petite bulle, et place un gros coup en plein milieu du sac. Putain, j'avais oublié ces sensations libératrice.

C'est alors que le visage de Ryan se forme, en se mêlant avec la colère et la joie. Celui que j'aime, et celui que je déteste. Mon poing s'écrase sur la sac, juste à l'endroit où j'imaginai son visage.

Boum.

Cette fois-ci, je repense à mes parents, à leur mort. Je n'en parle pas souvent, mais cet abandon m'a extrêmement touché, même au jour d'aujourd'hui. S'ils n'étaient pas partis, Théo et moi n'aurions jamais tourné ainsi. Mon poing claque, et je souffle avec force, comme si je rejetai tout.

Boum.

Et là, c'est son visage qui fait surface dans mon esprit. Je repense à son regard tendre et glacial, qui me toisait d'une manière à la fois tendre et cruelle. Je repense à ses coups, je repense au désastre que j'étais, à ce que je suis devenue. Et je place un coup, deux, trois... je les enchaîne tant ma haine est grande, tant elle coule dans mes veines comme du poison. Je vis avec ce poison depuis toujours, quelle plaie.

Boum boum.

Tout mes problèmes passent par des coups. Tout. Mes angoisses, mes peurs, ma colère, ma tristesse. Tout. Mes coups se font de plus en plus forts tant les souvenirs sont vivaces et profonds, et ma respiration de plus en plus courte et bruyante.

Je ne suis plus qu'une putain de machine, incontrôlable et domptée par la colère et la tristesse.

"Non ! Non ! Je t'en prie ! Je ne le referais plus !"

Boum boum boum.

Soudain, une main se pose sur mon épaule. Instinctivement, j'ai un mouvement de recul en montant ma garde, et je fais face aux yeux de Lydia.

— Wooh Jul' ! s'écrie Lydia en levant les mains en l'air.

J'enlève mes écouteurs, et souffle en prenant une gorgée d'eau de ma gourde.

— On va sur le ring maintenant ? me demande-t-elle en essuyant sa sueur. Ça fait trente minutes qu'on est sur des sacs de frappes, je n'en peux plus...

Une demi-heure ?! Je la dévisage, ne la croyant pas. Je n'ai pas vu le temps passer, c'est incroyable. Je finis par accepter sa proposition, et nous nous dirigeons sur le ring en discutant. Bien que j'essaye de me concentrer sur notre conversation, j'admets toujours être coincée dans cette bulle où mes pensées se charcutent les unes les autres. J'ai envie de tout casser, ça me brûle aux doigts. Une fois montées sur le ring, Lydia se poste face à moi et se place en garde.

— Voyons voir si tu es toujours aussi douée...

J'entends autour de nous des gens nous encourager, heureux de voir un combat de filles. Mais leurs voix se font de plus en plus basses, jusqu'à complètement disparaître dans mon esprit. Je suis dans ma bulle, montée à bloc. J'ai besoin de décompresser, j'ai trop encaissé ces derniers temps. Je me place à mon tour en garde, et Lydia fonce sur moi. Nous commençons doucement, mais plus les secondes passent, plus je me laisse emporter par mes émotions. Elles me contrôlent avec bouillonnement, et j'ai l'impression de n'avoir jamais été capable de contrôler ma propre personne. J'ai toujours été dominée, c'est humiliant et ça m'agace. J'imagine que c'est cette soumission qui me donne des coups, alors j'en redonne, j'esquive et bloque... en vain.

J'essaye de me défendre de quelque chose qui m'est collé à la peau.

La colère monte en moi, et c'est à la limite si je ne vois plus rien. Je suis un désastre. J'ai des problème dans la tête, je ne vois pas comment je pourrais l'expliquer autrement. Sans même m'en rendre compte, j'éjecte Lydia au sol qui reste sonnée quelques secondes, et fonds sur elle. Je lui envoie mon poing en pleine face, et elle grommelle des injures. Je n'arrive plus à réfléchir, et n'arrive pas à me détacher de ce regard glacé qui me fixe et me scanne de la tête aux pieds.

Pourquoi revient-il me hanter de la sorte ?

"Je te déteste et t'aime en même temps, tout comme toi. Nous sommes un fusionnel et magnifique désastre, unis par le sang et la mort. Nous sommes pareils."

Non, non, non, non... c'est faux. Nous ne sommes pas les mêmes.

"Nous sommes pareils".

NON ! NON ! NON ! Je ne veux pas être comme lui, je ne veux pas être un monstre.

Mais lorsque je vois le visage affolé de Lydia sous mes jambes, je me revois moi. Je suis sur elle, je l'ai frappée.

Je suis comme lui.

Non, non, non, non...

Pris par un énorme élan de colère, je ne me contrôle plus et relève mon poing bien que Lydia m'a bien fait comprendre qu'elle déclarait forfait.

Pourquoi moi, je n'ai pas eu le droit de déclarer forfait ?

C'est alors que je sens deux bras entourer ma taille pour me porter. J'ai l'impression que ce contact m'a fait revenir à la réalité, et je reprends mes esprits. Ma vision se fait plus claire, et je constate que tout le monde me regarde. Tout le monde. Et lorsque je croise le regard de mon amie qui est aidée par un homme, je n'y lis que... peur ?

Non, non, non, non... je n'arrive pas à y croire.

Pendant ne serait-ce que quelques secondes, je me suis transformée en lui.

Les larmes perlent dans le coin de mon œil, mais je les chasse rapidement. C'est faux, ce n'était qu'un moment d'égarement. Je suis Julia Jones, une femme forte qui est passée derrière tout ça.

C'est fini.

La personne qui me porte me ramène un peu plus loin avant de me lâcher en grognant. Je me retourne alors, et aperçois avec surprise le regard à la fois joyeux et dérouté de Nate.

— Nate ?...

— Salut ma belle, me salue-t-il en souriant. Allez, affronte quelqu'un de ton niveau, tu veux ?

Sans me laisser le temps de répliquer, il fonce sur moi. Je me place en garde, et me défends du mieux que je peux. Là encore, mes souvenirs refont surface en braillant encore et encore dans mon esprit. J'essaye de les chasser en me demandant ce que diable il m'arrive, mais ça ne marche pas. J'ai l'impression d'être en transe, c'est juste horrible.

"Je lui secoue le poignet pour essayer de le réveiller, mais c'est sans succès. Il est dans sa transe, comme envahi par cet accru démon qu'il est."

Non, je ne suis pas pareille. Il faut que j'arrête de me comparer à lui.

Que j'arrête de penser à lui.

"Nous sommes pareils. Donc s'il te plaît, ne t'étonnes pas... ne t'étonnes plus."

Ta gueule, ta gueule, ta gueule...

Boum boum boum.

— Hey Julia ! s'affole Nate, ce que je ne comprends pas. Calme-toi !

Je ne sais pas pourquoi il dit ça. J'en ai marre d'être un désastre.

"NON JE T'EN PRIE STOP !"

Sans que je ne puisse le contrôler, je sens des larmes couler sur mes joues. Je me rends enfin compte des coups que je suis entrain de lui asséner, et pleure encore plus. Je suis soumise à tout, je n'ai aucun contrôle sur ma vie malgré ce que j'essaye de me convaincre. Mes poings se font de plus en plus faibles sur son torse, et il les enroule de ses grandes mains pour me rapprocher de lui.

— Julia, respire ! Calme-toi, tout va bien ! C'est moi Nate.

J'éclate en sanglot, et Nate est obligé de m'enlacer pour étouffer ma voix.

— Que se passe-t-il Julia ? Tu as mal quelque part ? Julia ?! s'affole-t-il en posant ses mains sur mes joues.

Oui, dans mon cœur.

Mais ça, personne ne pourra jamais le comprendre.

Alors je ne lui réponds pas, et continue de pleurer sans pouvoir le contrôler. Ma respiration est haletante, bruyante, frénétique. On dirait une musique que je ne connais que trop bien. Ce rythme berce les battements de mon coeur qui se font de plus en plus rapide, trop rapides. Des sueurs froides entaillent chaque fraction de ma peau, et...

... je n'arrive plus à respirer.

— Julia ?! Tu es toute pâle, qu'est-ce que tu as ?!

Je fais une putain de crise d'angoisse.

Je n'arrive pas à rassembler mes esprit, j'ai l'impression de le revoir en face de moi, se marrer de me voir si faible.

Tellement faible.

Tellement vulnérable.

Une jeune et innocente fille sans défenses.

Une proie facile.

Je sens que Nate me porte pour m'emmener je ne sais où.

Pourquoi personne ne m'a-t-il sauvée ?

Généralement, lorsqu'on est jeune, on rêve d'ascension sociale, de réussite et d'amour.

Moi, je rêvais seulement d'être sauvée, de ne plus être prisonnière de ce cercle infini de douleur.

— Respire Julia... respire, me murmure Nate.

Je pose ma tête sur son torse musclé, essayant de calmer ma respiration à l'aide du rythme de son cœur.

Tadam, tadam, tadam, tadam.

Quelle douce musique, je rêverai d'avoir un esprit si apaisant. Ce serait reposant.

Je me rends alors compte que je suis en sécurité dans ses bras, que jamais personne ne viendra me refaire du mal. C'est terminé.

Peu à peu, je commence à me sentir mieux et retrouve mes esprits. Nate entre dans des vestiaires, et m'assied sur un banc. Il se place accroupi en face de moi, et pose ses mains sur mes cuisses.

— Ça va mieux ? me demande-t-il doucement en me passant de l'eau.

J'hoche la tête et prends une gorgée d'eau. Ma peau est à la fois froide et chaude. J'en ai marre de ces contradictions, elles harmonisent ma vie d'une manière un peu trop désastreuse à mon goût.

— Dis-moi si je me trompe, mais... tu faisais une crise d'angoisse ?

Nous plongeons dans un long silence où je ne sais quoi lui répondre.

— Oui, je crois.

Il fronce les sourcils, et pose une main sur ma joue. Comme moi il y a une minute, il semble déconcerté par ma chaleur glacée. Je sens le rouge me monter aux joues à son contact, ce qui est bon signe car ça signifie que je redeviens moi-même.

— Tu n'es pas bien en se moment ? me demande-t-il d'un air inquiet. Tu as l'air si perturbée. Et puis, tu t'es déchaînée d'une manière avec l'autre brune et moi, et les pleurs, la crise...

— Attends, elle est où cette "autre brune" ? lui demandai-je soudainement.

— Elle vient de s'en aller, je crois. Tu lui as fait un gros cocard.

— Putain...

Je me prends la tête entre les mains, et je devine facilement qu'il me dévisage.

— Bah quoi ?

— Cette "autre brune", comme tu le dis, est ma meilleure amie...

Il reste figé quelques secondes avant d'éclater de rire.

— Eh bah putain... vous vous étiez disputées ?

— Non non, je me suis juste un peu... emportée.

Encore une fois, son regard se fait plus profond. Ses yeux se plissent alors qu'il essaye de lire en moi.

— Qu'est-ce qui a pu te mettre dans de tels états ? me demande-t-il en attrapant mes mains.

Ryan, Ryan, Ryan,
mes parents,
lui, lui, lui...

... ma vie de merde.

Mais bien sûr, je ne dis rien.

— Je vois, tu ne veux pas en parler, suppose Nate en souriant. Je te laisse tranquille.

Je lui souris, heureuse qu'il comprenne. C'est si facile d'être avec lui, de discuter avec lui. Il lit en moi comme dans un livre grand ouvert, je n'ai même pas besoin de lui faire comprendre mes besoins. Doucement, comme s'il avait peur de me brusquer, sa main se pose sur ma joue et la caresse lentement du pouce.

— Alors, fais plus attention à toi la prochaine fois.

Il se lève et m'embrasse la joue avant de s'en aller. Je reste assise sur le banc, pantelante et les joues rouge de gêne. Après quelques minutes d'égarement, je me décide de sortir du vestiaire pour prendre mes affaires. En arrivant à hauteur de mon sac, je constate qu'une feuille de papier est posée dessus :

"Coucou Jul', c'est Lydia.
Ne te sens pas mal pour le combat de tout à l'heure, on fait de la boxe donc c'est tout à fait normal de s'emporter quelques fois. Par contre, tu me dois un nouvel anti-cerne pour mon cocard !
Allez, à ce soir Jul' !
P.S.: Si tu as besoin de parler, on est là, ne l'oublies pas.
Lydia"

Un maigre sourire fend mes lèvres, et je fourre le papier que j'ai plié dans mon sac. Après m'être rapidement douchée et habillée, je pars sans même prendre la peine de saluer Austin. Je suis encore un peu perturbée par tout ce qui vient de se passer aujourd'hui. En ce moment, j'ai l'impression que mes pensées prennent le contrôle sur ma conscience, et passent en revue toutes les choses que je ne veux pas voir. C'est tellement horrible que je pars dans d'affreux excès qui ne me ressemblent pas. Je devrais arrêter d'y penser, c'est mieux pour tout le monde.

Pour rentrer, je décide de prendre un taxi, bien trop fatiguée pour rentrer à pied. Une fois installée, je sens mon téléphone vibrer dans ma poche et le prends pour regarder ce que je viens de recevoir.

user562J32A : Les larmes sèchent, mais la douleur reste. On n'oublie jamais vraiment. On fait juste semblant. Et ça, c'est scandaleusement douloureux...

Mon sang ne fait qu'un tour dans mes veines, et j'ai la brûlante envie de détruire mon téléphone entre mes doigts. Ces messages commencent franchement à devenir agaçants, et je ne suis pas d'humeur, donc je tape une réponse à la vitesse de l'éclair :

Julia : Je te l'ai déjà demandé, mais t'as réponse n'était pas très cohérente... Alors je vais te le redemander, QUI es-tu ?

* * *

Je suis prête pour la soirée de ce soir, parée de mon meilleur pyjama en laine et de mon mythique chignon crotte. Une musique de fond se joue dans l'appartement, et j'ai préparé toute une sorte de malbouffe ornant soigneusement la table basse d mon salon. Théo n'est pas ici, et m'a prévenu qu'il est entrain d'aménager son appartement avec un ami de longue date. Tout est parfait, et c'est à ce moment là que quelqu'un toque à la porte. Timing parfait ! Je me presse d'aller ouvrir, et-

Oh merde.

Lydia se tient devant moi, et je remarque un énorme cocard sur son oeil.

— Oh Lydia-

— Ne t'excuse surtout pas ! s'écrie-t-elle en constatant mon regard culpabilisé. Tu as lu mon mot, non ? Donc tu sais que je ne t'en veux absolument pas.

— Oui mais-

— Oui mais non ! me coupe-t-elle en plaçant sa main sur ma bouche. Pas de "mais" qui tiennent, on en reparlera lorsque Vic arrivera. Je vais me changer pour être plus à l'aise, et ensuite, que la fête com-

Elle devient soudainement plus pâle, et se coupe dans sa phrase en fixant quelque chose derrière moi. Je la dévisage, et lorsque je me retourne-

Oh le connard.

— Salut Julia ! me salue mon frère en s'approchant de nous.

Une fois à notre hauteur, il se met à fixer intensément Lydia qui peine à se ressaisir. Elle finit par détourner ses yeux pour me fusiller du regard. Je te jure que je ne savais pas qu'il était là ! essayai-je de lui faire comprendre par notre échange visuel. Elle lève les yeux au ciel, et finit par lentement rediriger son regard vers mon frère qui la jauge de toute sa hauteur. Elle déglutit lentement, et croise ses bras sous sa poitrine en essayant de lui tenir tête.

— Et... salut, Lydia.

— Hum... oui. Salut, Théo.

Ils prononcent tous les deux le prénom de l'autre avec froideur, et se lancent des éclairs avec leurs yeux. Je reste figée devant les deux "ex", ne sachant pas quoi faire.

Aidez-moi...

4477 mots / Relu et corrigé

* * *

Heyy ! 🐙💗

Attends attends... VOUS AVEZ VU LA VITESSE À LAQUELLE J'AI POSTÉE?!

J'ai beaucoup plus de temps devant moi, et beaucoup plus d'idée alors je peux poster plus souvent! Youpi!

Moi qui comptais poster ce chapitre samedi... MDR...

Bref bref bref... Avez-vous aimé ce chapitre?

-Lydia/Théo?

-Un nouveau souvenir?!-Renaissance de ce cher inconnu?

Dites moi tout !

Bye mes bébés poulpes ! 🐙💗


de HamidaSwan qui vous kiff, Teehee.

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