17h45

Il était à présent, 17h45. Une heure et quinze minutes, cela faisait une heure et quart que j'attendais Lucas et Maman. Toujours aucune nouvelle d'eux, j'avais appelé au moins 5 fois sur le téléphone de ma mère, je tombais toujours sur la messagerie, il devait être au fond de son sac, éteint comme d'habitude ou peut-être même quelque part dans l'appartement. J'ai aussi tenté d'appeler le collège mais on me mettait toujours sur attente.

La pluie avait pratiquement cessée, mais j'entendais toujours les gouttes qui avaient trempé le toit, tomber une à une dans la gouttière. Comment j'avais pu rester plus d'une heure assise au milieu de ma chambre à attendre ? Eh bien, je ne savais pas, mais je l'avais fait quand même, je crois que c'est parce que je n'avais envie de ne rien faire d'autre. J'aurais pu lire, dessiner, mais je n'en avais pas envie, je le faisais tellement souvent, et même si j'adorais lire, j'avais déjà lu tous les bouquins de cette maison, Maman devait d'ailleurs passer m'en chercher trois nouveaux à la bibliothèque. Mais maintenant, j'en avais assez d'attendre, à ne rien faire, il fallait que je m'occupe au lieu de m'imaginer des scénarios catastrophe. J'attrapais alors le carnet de feuilles posé sur le coin de mon bureau et un crayon à papier, juste en tendant la main. Je me mis à dessiner : au départ c'était juste des coups de crayon puis ces coups de cayons se transformèrent en un visage puis en une personne entière. À force de dessiner tous les jours, j'avais acquis une assez bonne technique et j'étais de plus en plus fière de ce que je traçais sur le papier. Soudain, l'interphone retentit. Sur le coup j'ai pensé que ce pouvaient être Maman et Lucas et je me suis souvenu qu'ils avaient forcément un jeu de clé avec eux. Qui cela pouvait bien être ? De toute manière, à quoi bon se poser la question, je ne saurais probablement jamais, puisque que je ne pouvais pas descendre les escaliers qui menaient à l'entrée pour lui ouvrir : j'étais coincée sur un fauteuil, sans mes parents je ne pouvais pas descendre des escaliers sans ascenseur. Ils avaient proposé qu'on déménage dans un appartement ou une maison plus pratique pour moi, quand les médecins m'ont mise sur un fauteuil, il y a 4 mois de cela, mais j'ai refusé, je ne voulais pas changer de logement, j'aimais trop celui-ci dans lequel j'étais depuis toujours, en face de mon école, à proximité de tout, même si depuis que ma maladie avait empiré tout me paraissait très loin maintenant. Voilà pourquoi je ne sors presque pas, que je ne vais pas au lycée, que je reste enfermée dans cette chambre à lire et à dessiner, je suis malade, depuis mes 10 ans, et cela n'a fait qu'empirer avec le temps. Mes parents et mon frère me répètent toujours que je vais guérir mais moi je sais bien que je suis perdue, les médecins m'ont d'ailleurs dit au dernier rendez-vous que je ne guérirais jamais et que c'était trop tard maintenant. J'ai alors compris, j'ai compris que je devrais partir bientôt mais je ne l'ai pas dit à ma famille, je ne voulais pas qu'ils souffrent en me voyant, qu'ils aient peur chaque matin quand je me réveillais que ce soit la dernière fois qu'ils me disent bonjour, qu'ils me serrent dans leurs bars, je ne voulais pas que ma vie change, que tout le monde me regardent avec plus de pitié encore qu'à présent. Pour moi, ce n'était pas un problème de devoir partir, je m'étais faite à cette idée, je ne m'accrocherai pas à la vie quand ce sera le moment, seulement je serai triste, triste de devoir dire adieu à ma mère, à mon père, à Lucas que je ne verrais jamais grandir, ou du moins pas sur Terre, et cela me fendait le coeur de savoir que je les rendrai tristes en partant, mais je n'y pouvais rien, c'était ainsi.

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