Chapitre 3
LILY
Chace m'a posé un tas de questions. Il a voulu connaitre mes souvenirs dans les moindres détails ainsi que tout ce qu'il m'est arrivé depuis mon réveil. Alors je lui ai tout raconté, il a grimacé quand je lui ai mentionné tous les actes sauvages que j'avais commis et subis. Il m'a ensuite demandé d'identifier des objets que j'ai été incapable de nommer, à part pour le drone et le talkie-walkie. Je ne connais pas Chace mais il s'est montré gentil et agréable, il souriait beaucoup et riait de temps à autres. Je me sens étrangement détendue, hors de danger, et j'espère que ce n'est pas une illusion.
Nous empruntons différents couloirs, Chace tente de m'expliquer à quoi chaque porte mène, mais je ne retiens rien, c'est beaucoup trop d'informations. Nous marchons jusqu'à un cul-de-sac au bout duquel se trouve une porte qu'il pousse, nous nous trouvons dans un vestiaire dans laquelle je peux compter une dizaine de douches. Les cabines sont protégées par un rideau en tissu jaune. Chace s'en va vers le fond de la pièce, il fouille dans une armoire et me tend une serviette rouge.
— Je reviens dans dix minutes, me dit-il.
Après un sourire bref, il s'en va, me laissant seule et totalement libre dans cette pièce. Je pourrais faire n'importe quoi, même m'enfuir, mais je n'en ai pas envie, je me sens en sécurité ici. Je me dirige vers l'une des cabines et pose la serviette sur la tringle à rideau. J'enlève mes vêtements et les pose à côté. Lorsque l'eau tiède coule sur ma peau, c'est une sensation indescriptible qui s'empare de moi. Il y a des produits d'hygiène en tous genres dans la douche, je les utilise et n'oublie pas de me laver les cheveux. L'eau crasseuse coule à mes pieds, elle est marron avec des morceaux de sang séché.
Je sors de la douche enroulée de la serviette, je tombe sur Riley, planté en plein milieu de la pièce, qui me regarde comme s'il avait vu un revenant. Je suis assez gênée, étriquée dans ma serviette qui m'arrive juste en dessous des fesses, on discerne parfaitement la naissance de ma poitrine. Mes cheveux mouillés et particulièrement emmêlés tombent dans mon dos. Riley continue de me fixer, un malaise s'installe.
— Salut, je lui dis.
— Salut, répond-il finalement. Wow, tu es... tu es propre.
Est-ce que j'ai bien entendu ? Je suis partagée entre une envie d'éclater de rire et une envie de m'enfuir de là tout de suite. Je ne sais pas ce qui lui arrive mais il a l'air de débloquer.
— Merci, je suppose ? je réponds.
— Désolé c'était bizarre, je ne sais pas pourquoi j'ai dit ça.
— Tu ferais mieux d'aller te laver, parce que je ne peux pas en dire autant.
Je lui adresse un sourire pour détendre l'atmosphère. Il rit nerveusement et disparait dans l'une des cabines. Chace arrive au même moment, il me tend une brosse à dents et du dentifrice. Je le remercie et après m'être brossée les dents, il me donne aussi une paire de sandales blanches, il dit que c'est en attendant que l'on me trouve de nouvelles chaussures, les miennes sont pleines de boue et de crasse. Il m'entraine dans le couloir.
— Je vais te donner de quoi t'habiller et ensuite tu iras à la visite médicale.
Nous entrons dans une petite pièce qui fait une dizaine de mètres carrés. Il y a deux lits à l'intérieur, deux armoires et une lampe suspendue au plafond. Chace me dit qu'il me laisse choisir des vêtements et m'habiller, qu'il m'attend à l'extérieur de la pièce. L'armoire est remplie de vêtements en tous genres, j'ai été très heureuse d'en trouver à mon goût et à ma taille. En refermant la porte de l'armoire, je remarque qu'elle est dotée d'un miroir en pied à l'intérieur de la porte. Je me regarde, pour la première fois depuis longtemps : ma tenue me va plutôt bien, je parviens à me trouver jolie dedans. Quant à mon visage, il parait fatigué et j'ai une égratignure sur le nez, une autre sur le menton, je ne saurais pas dire à quoi elles sont dues. Je coiffe mes cheveux grossièrement avec mes doigts, je les attache en une queue de cheval avec un élastique que j'ai trouvé dans l'armoire. Je suis surprise de découvrir Riley derrière moi après avoir fermé la porte de l'armoire.
— Qu'est-ce que tu fais là ? je lui demande nerveuse.
— Jared m'a emmené ici pour que je m'habille.
Maintenant qu'il en parle, je me rends compte qu'il est uniquement vêtu d'une serviette enroulée autour de sa taille, je me prends à balader mes yeux sur son corps musclé, sans aucune discrétion. Je détourne aussitôt le regard en me maudissant d'être si peu discrète et surtout, d'avoir autant envie de le détailler.
— Toi aussi, t'es...propre, je lui dis.
Ma remarque lui arrache un rire et je dois dire que c'est un exploit. Ses cheveux sont mouillés et ébouriffés, on dirait qu'il vient de sortir du lit et ça lui va super bien. Je pense que ça m'arracherait la bouche de le lui avouer, mais Riley commence à vraiment me faire de l'effet.
— Je dois m'habiller..., commence-t-il.
— Oui, je réponds bêtement, immobile et tourmentée par la chaleur qu'il me provoque.
Il attrape le nœud de sa serviette, je jurerais qu'elle est descendue de quelques centimètres et que je suis à deux doigts de voir une toute autre partie de son corps. Et je reste figée là, mes neurones ont grillé.
— Tu veux m'aider ? demande-t-il d'une voix grave et chaude.
Je lève les yeux vers son visage. Quoi ? Non ! Il sourit de façon insolente, trop content de m'avoir eue à ce jeu-là.
— Je dois y aller, je réponds.
Je sors aussitôt de la pièce, honteuse de mon comportement. Mais qu'est-ce qu'il se passe ? C'est Riley pourquoi je me mets à être aussi stupide, d'un seul coup ? Juste parce qu'il était à moitié nu ? C'est ridicule. Ça a dû l'amuser, j'espère qu'il ne va pas m'en reparler.
— Prête ? me demande Chace.
Je l'avais oublié, celui-là, il me fait sursauter. Je hoche la tête et le suis. Nous traversons plusieurs couloirs en marchant tranquillement. Pendant ce temps, nous croisons des gens mais ils ne font pas vraiment attention à nous, on dirait qu'ils ont eu pour ordre de nous ignorer totalement. Nous passons une porte et pénétrons dans une pièce qui contrairement à tout le reste ici, irradie par sa clarté. Elle est blanche des murs au plafond, en passant par le sol. Nous sommes dans une petite salle où il y a un fauteuil allongé, quelques meubles de rangement et un bureau. Il n'y a personne ici.
— Tu peux t'asseoir, je vais chercher Gabriella.
Chace s'en va, je m'assieds sur le fauteuil. J'attends pendant quelques minutes en détaillant la salle qui est vierge de toute décoration. Cet endroit me fait penser à mon ancien appartement : blanc immaculé et impersonnel. Au bout de quelques minutes, une fille arrive. Je dois dire qu'elle est vraiment jolie, ça saute aux yeux, c'est la première chose que je remarque. Avec ses longs cheveux châtains qui sont aussi lisses que soyeux et ses yeux verts qui se remarquent à l'autre bout de la pièce, elle ne passe pas inaperçue. Sa peau est légèrement bronzée, ce qui contraste parfaitement avec son regard. Elle m'adresse un sourire qui me semble un peu faux mais peu importe, je le lui rends.
— Lily, c'est ça ? me demande-t-elle.
Je hoche la tête.
— Enchantée, je m'appelle Gabriella. Je vais t'ausculter pour voir si tu es en bonne santé, étant donné tes conditions de vie de ces derniers temps.
Elle s'active dans la pièce et sort du matériel. Elle enfonce un appareil dans mes oreilles, et l'en ressort quand il émet un bip. Elle regarde l'intérieur de ma bouche, passe une lampe devant mes yeux et m'enfile un brassard supposé prendre ma tension. Ensuite, elle me pèse et me mesure, j'ai l'impression d'être passée au crible. Elle sort finalement une seringue et la prépare : elle va me piquer.
— Tu ignores probablement ce que c'est, commence-t-elle, mais ne t'inquiète pas, je vais simplement te prélever un peu de sang pour regarder si tout va bien.
— Je sais ce que c'est.
— C'est impossible, me répond-elle d'un air certain.
— Jordan m'a pris mon sang plusieurs fois.
Elle me fixe et plisse les yeux. Ah, tu ne t'y attendais pas à celle-là, hein ? J'ai envie de lui dire ça pour qu'elle arrête de prendre cet air hautain avec moi mais je me résigne à ne rien dire, je m'en fiche en réalité.
— Pourquoi Jordan t'a pris ton sang ?
— Pour faire des tests, il m'a pris quatre tubes au total. Ils ont aussi pris celui de Riley.
— Quatre tubes ? répète-t-elle hébétée.
Elle a l'air choquée que Jordan ait pris mon sang, d'ailleurs je ne sais toujours pas ce qu'il comptait faire avec.
— Pourquoi quatre ? insiste-t-elle.
— Aucune idée. Au début, il m'en a pris trois pour son chef et ensuite, il m'en a pris un autre pour lui-même, je n'ai aucune idée du genre d'expérimentation qu'il voulait faire avec. De toute façon, il est mort.
— Jordan est mort ?
Gabriella a l'air particulièrement retournée par cette conversation et bien que je ne saisisse pas son intérêt pour Jordan et cette histoire, je m'inquiète pour elle. Elle est sous le choc, à quel point se connaissaient-ils ? Est-ce qu'ils sortaient ensemble, ou quelque chose du genre ? Elle finit par secouer la tête et prépare la seringue. Elle me la plante dans le creux de mon bras, un peu trop fort à mon goût. Si j'avais su qu'elle avait des sentiments un peu trop forts à l'égard de Jordan, j'aurais attendu qu'elle me pique pour lui annoncer la mort de ce dernier.
Quand elle a terminé, elle me désinfecte et me colle un pansement.
— Tu as des blessures importantes ? demande-t-elle.
— À la cuisse. Coup de couteau.
— OK, enlève ton pantalon.
Je me lève du fauteuil pour me déshabiller, elle profite de cet instant pour appuyer ses deux mains sur le bureau et fermer les yeux, elle se met à respirer profondément, elle n'a pas l'air d'aller bien.
— Tu étais proche de Jordan ? je demande.
— Mêle-toi de tes affaires.
Clairement, elle sortait avec Jordan, j'en suis certaine. Ou alors c'était son frère. En tout cas ils étaient proches d'une façon ou d'une autre. Elle revient vers moi, retire mon bandage et arrache brutalement mon pansement. Elle imbibe une compresse d'un produit et nettoie grossièrement ma plaie, elle me fait mal. C'en est trop pour moi :
— Écoute, j'ai l'impression que tu étais proche de Jordan et que l'annonce de sa mort te fait quelque chose mais... ça n'est pas la peine de te venger sur moi.
— Qu'est-ce que tu racontes ?
— Tu es agressive. Fais attention. Tu es censée me soigner, pas me faire mal.
Elle me fusille du regard et ne répond rien, elle continue de me soigner et me fait un pansement tout neuf. Lorsque je sors de la salle, Chace m'attend devant, les bras croisés.
— Ça s'est bien passé ? me demande-t-il.
— Non, c'est quoi son problème ?
— Oh... est-ce que tu lui as dit pour...
— Pour Jordan ? Oui, je lui ai dit et puis ensuite, elle s'est comportée comme une garce.
— C'est Gabriella...
— Quoi, parce qu'elle est toujours comme ça ?
— Oui. Elle n'a pas un caractère facile. Ne fais pas attention à elle.
— Quel lien a-t-elle avec Jordan ?
Chace inspire un grand coup et finit par me répondre :
— C'est son ex.
— Sérieusement ? Comment elle a fait pour... Jordan est tellement... Je n'ai même pas les mots.
Chace rigole à ma remarque tandis que nous marchons.
— Ils sortaient ensemble, et puis Jordan et les autres sont partis. Elle a choisi de rester ici. Elle passait ses journées à l'insulter de tous les noms et à nous dire à quel point elle le détestait. Elle disait que si elle le retrouvait, elle lui ferait la peau. Il y a beaucoup de souffrance en elle et même avant ça, on ne peut pas dire qu'elle a eu la vie facile. Mais bon, ne t'occupe pas d'elle.
Le fait que Chace me raconte autant de choses me donne une impression de normalité, comme si ma place était ici et que tout allait bien se passer. Puis, la réalité me rattrape en plein fouet.
— Quand est-ce qu'on va répondre à nos questions ? je demande.
— Bientôt, ne t'en fais pas. Bon, je vais te présenter à quelques personnes si tu veux.
J'ai soudainement tout un tas de questions qui me viennent en tête :
— C'est toi qui nous as attachés dans la forêt ? C'était Jared et toi ?
— Oui, c'était nous.
— Et l'autre homme ? Celui qui criait.
— C'était Ramirez. Il s'appelle Matthew Ramirez mais on l'appelle par son nom. C'est le bras droit de Colton.
— Et ceux qui nous visaient dans la forêt ?
— Tu les verras plus tard.
— Pourquoi vous ne vivez pas dans l'Asile ?
Il marque un temps, réfléchissant à ce qu'il va me répondre.
— Je suis désolé mais je n'ai pas le droit de t'en parler, c'est Colton qui va le faire. Tu auras toutes les réponses que tu voudras, mais tu dois juste être patiente.
— J'aurais essayé...
Il rit à ma remarque et s'arrête de marcher quand nous nous trouvons dans une pièce dans laquelle il y a plusieurs canapés dépareillés et des tables entourées de chaises. Il avance mais je reste bloquée à regarder les personnes qui se trouvent dans cette pièce. Je suis anxieuse à l'idée de rencontrer autant de personnes à la fois.
— Tu viens ?
Je reviens à moi et le suis. Il s'arrête devant un des canapés où se trouvent deux garçons et une fille. Il les désigne tour à tour du doigt et dans l'ordre :
— Cody, Noah et Sydney.
Je les salue timidement et me présente, j'ai l'impression de faire tache. Ils me répondent à l'unisson et avec un sourire chaleureux. Le premier, Cody, a des cheveux blonds cendrés et des yeux gris, je dois dire qu'il est plutôt mignon. Noah est un brun aux yeux sombres et Sydney est une fille magnifique – à croire qu'il n'y a que ça ici –, elle coiffe ses cheveux blonds coupés en un carré long de ses doigts et me transperce de ses yeux bleus. Ils ont l'air gentils mais je ne les connais pas. J'ai envie de retrouver Riley, c'est un peu bizarre entre nous mais lui au moins, je le connais.
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