Chapitre 50
La région des Pics était sujette à de nombreuses averses aussi soudaines que violentes et la pluie, à force de tomber, avait creusé au fil des ans un petit lac en plein cœur des massifs. En été, la végétation y était verdoyante et l'écosystème plus riche que nulle part ailleurs.
Émilia et Rayn étaient tombés sur ce petit coin de paradis complètement au hasard, au détour de l'une de leurs randonnées quotidiennes. Ni l'un ni l'autre ne parvenait à rester enfermé trop longtemps dans la petite maisonnée malgré toutes les bonnes intentions de Sophie à leur égard. Alors ils sortaient explorer leur nouvel environnement, à la recherche d'un coin à eux.
Cela faisait maintenant plusieurs fois qu'ils revenaient au bord de ce lac. Installés sur d'épaisses couvertures afin de se protéger de la neige, ils observaient de longs moments l'eau miroiter à la lumière du soleil.
— Tu as des idées ? demanda Rayn, accoudé sur la couverture, les yeux rivés vers sa compagne toute en rondeurs.
Le temps passant, Émilia avait fini par se faire à l'idée de devenir maman. Le petit être qui grandissait dans son ventre ne la rebutait plus et elle commençait même à se montrer impatiente de faire sa connaissance. Elle avait surtout hâte de ne plus avoir mal aux reins au moindre mouvement.
Depuis qu'elle l'avait accepté, son ventre avait grossi de manière constante et il lui était maintenant impossible de le dissimuler sous ses chemises. Elle était revenue à des habits plus masculins, obligée de porter de larges pantalons et une imposante ceinture abdominale pour protéger le bébé du froid hivernal qui régnait à présent sur les terres.
— À la base, je comptais gouverner seule et mourir sans descendance. Je n'y ai donc jamais vraiment réfléchi.
Un regard pensif posé sur son ventre, elle passait ses mains dessus dans des gestes circulaires, protectrice.
— Si c'est un garçon, j'aimerais l'appeler Daryon.
— Pourquoi ? s'étonna-t-elle.
Elle se tourna vers Rayn qui affichait son sourire carnassier qui l'avait immédiatement chamboulée lorsqu'elle l'avait rencontré. Il savourait la vue qu'elle lui offrait, espérant chaque jour qu'il n'était pas en train d'imaginer cette vie simple et libre de toute contrainte.
— C'était le nom de mon grand-père. C'est avec lui que j'ai appris l'art de l'épée.
— Je n'aime pas cette coutume de donner le nom d'un mort à un nouveau-né. Sinon, je l'aurais appelé Daraen. C'est tellement plus beau.
Dans sa voix, le soldat décela une pointe d'ironie et il répondit sur un ton pince-sans-rire.
— Si tu n'as pas d'idée alors ne vient pas critiquer celle des autres.
Les deux s'observèrent un instant en silence, échangeant sans avoir besoin du moindre mot. Rayn finit par se redresser, l'attrapa par les épaules et l'attira contre lui. Elle se blottit un peu plus dans ses bras, sentant déjà sa chaleur la réchauffer.
— Et si c'est une fille ? demanda-t-elle soudain en levant les yeux vers lui. Tu voudrais l'appeler comment ?
— Il n'y a pas à réfléchir. Ce sera un garçon.
— Comment peux-tu en être aussi sûr ?
Un léger rire secoua les épaules du jeune homme, faisant agréablement vibrer le dos de la reine. Elle pouvait entendre leurs cœurs cogner au même rythme et la mélodie résonnait à ses oreilles comme une douce berceuse capable d'apaiser tous ses maux.
— Dans notre famille, le premier né a toujours été un garçon. Et puis, regarde-moi... Comment pourrais-je donner naissance à une pisseuse ?
— Prétentieux.
Il arqua un sourcil et sourit de plus belle. Elle répondit à son sourire et il dévora ses lèvres avec une indicible douceur.
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