Heureux


Ca ne va pas. Rien ne va ; rien ne va plus. Tout allait si bien, pourtant. Tout était beau ; tout était baigné dans un soleil qui caressait nos peaux, nos corps, de ses rayons, bonheur. Tout était plein de joie, d'éclats de rires, de soupires animés par des rêves d'idéaux. Tout était troublant, aussi. Troublant de réalité, de spontanéité, de légèreté, d'amour. L'amour... Ah, cette chose est bien étrange, tu sais. Tant que tout va, tout va, n'est-ce pas ? Mais désormais, alors que rien ne va plus, tout semble loin, bien trop loin pour être proche. Je me perds dans les limbes de moi-même. Dans mon esprit, chagrin, qui se bat comme il peut pour se maintenir à flots, la tête à la surface de l'eau, les narines juste au-dessus de sa peau, les poumons pleins d'un vide déchiré, déchirant, amer et sanglant. Alors résonnent les mots dans mon esprit. Ils se heurtent aux parois de mon crâne, tambourinent à la porte, se frappent les uns les autres jusqu'à se faire du bien. Parce que seuls, eux non-plus, ne sont rien. Ils se querellent sans cesse pour se donner du sens ; ils s'entraident, parfois, pour se hisser un peu plus haut les uns les autres et devenir puissance. Pour garder en grandeur, pour gagner en splendeur. Car malgré tout, malgré tout ça, ils sont sublimes et nous subliment.

Rien ne va, rien ne va plus, tu sais ? Mon corps fatigue d'être fatigué. Je ne sais plus aimer. Je ne sais plus chérir ces petits moments de bonheur et ces instants de tendresse que je devrais pourtant cueillir avec délicatesse. J'aimerais pouvoir le faire. J'aimerais pouvoir le dire : je t'aime. J'aime le monde, j'aime la vie, j'aime le vent qui frôle mon visage et la morsure du froid. J'aime les couleurs de la nature, ce camaïeu de plaisirs indécis, cette ferveur des éléments qui assiègent mon esprit. J'aime aimer, avant tout, mais désormais, je n'aime plus. Je n'aime plus que des choses qui, au fond, me blessent. Je n'aime plus que des personnes, qui, je le sais, ne m'aiment plus pour ce que je suis mais pour ce que j'étais et je ne serais plus.

Tout allait si bien, pourtant. Tant que le masque était présent, du moins. Tant qu'il recouvrait ma vie de sa présence facile, docile, de son image parfaite. Parfaite. Je ne le suis pas, je ne le serais plus. Je n'en ai plus besoin, je crois ? Je voudrais être moi. Moi, seulement moi, sans toutes ces ficelles qui tirent sur mes bras et me font avancer dans une direction qui, au fond, n'est pas la mienne. Je rêve de partir, de voguer, de voler, de hurler, un peu, aussi. De me faire force et courage, de prendre en main ces mirages. D'être celle qui décidera du beau temps, celle qui fleurira au printemps. Je veux être l'horizon sous tes yeux, que tu restes accroché à mes regards brumeux ; que de mon plaisir, enfin, tu sois heureux.

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