Chapitre 22. Meurtre Familial
Chapitre 22. Meurtre Familial
Eythan
J'aurais aimé enfoncer la porte d'un grand coup de pied. Quelle classe ça aurait été ! Un peu comme dans un blockbuster américain, où un agent de la C.I.A fracasse des crânes comme s'ils étaient en gélatine. Mais trop tard, la porte est grande ouverte devant moi. Je n'allais pas la refermer pour la rouvrir juste pour le plaisir. Il n'y a écrit ni « Hélène » ni « Chronos* » sur mon front. Je n'ai ni la folie de cette fille, ni le temps de cette entité. Eh merde.
« Je m'en doutais que cette fille ne pouvait pas avoir agi seule ! Baisse ton arme, c'est fini. »
Ce connard d'intrus se cache derrière la documentaliste. L'unique point faible de cette position réside dans un bout de son crâne dépassant de celui de madame Das. Autrement dit, je ne peux pas lui tirer dessus sans prendre de risque. Mais si pour sauver tous les autres je dois la descendre, alors je le ferais. Et ma décision sera encore plus simple à prendre si elle est consentante.
« Madame ? Ça vous dérange si je sacrifie votre vie pour en–
– Fils ? Qu'est-ce que tu fais là ?! »
C'est bien ce que je me disais. Mon père, s'il était au collège, serait forcément ici. Tout le personnel du collège est regroupé dans cette pièce, et il ne risquait pas de passer pour un sixième. Physiquement, mais aussi mentalement. La réaction d'un enfant sous la contrainte est prévisible, pas celle de mon père.
Je sais que je ne suis pas du genre commun. Mais comparé à mon géniteur, je suis d'une impressionnante banalité. Il peut être résumé en un mot : imprévisible. Il est capable de tout et de rien, il est capable du meilleur comme du pire. Par la plus grande des chances ou des corruptions, personne n'a songé à lui retirer ma garde. J'apprécie le toit qu'il me prête alors ce n'est pas pour me déplaire. Mais je connais sa vraie nature. C'est comme si ses paroles et actes étaient choisies par le plus pur des hasards. Mon père est une machine à sous, c'est assez incroyable.
J'ai vécu seize années à ses côtés, et c'est bien la première fois qu'il m'appelle ainsi ! Même les meilleurs « spécialistes de l'esprit » ont abandonné l'idée de réussir à le cerner. Moi-même, j'ai arrêté de chercher une logique à ses actes depuis qu'ils n'en n'ont plus, c'est-à-dire peu après la mort de ma mère.
Sa réaction ne m'étonne même pas. Par contre, elle me déplaît un peu trop à mon goût. Je vois déjà la scène : l'intrus abandonne la documentaliste pour mon père, le menace et me contraint à déposer les armes. Je suis autant attaché à mon père qu'à madame Das. À vrai dire, je préférerai le voir mort à mes pieds plutôt que céder au chantage. Je me moque d'envoyer dans l'autre monde une personne qui m'a fait venir dans celui-ci. Malheureusement, le monde n'a pas ma vision.
Idéologiquement – et ce, même si je sauve des centaines de vies – j'aurais perdu. Trop de personnes ont changé la face du monde mais sont uniquement connues pour avoir assassiné un membre de leur famille. Je ne m'appelle pas Brutus. En clair, je suis dans la merde jusqu'au cou.
Bling.
C'est moi ou la pièce vient seulement de retomber ? Connaissant mon ouïe, elle a sûrement déjà retouché le sol. Des hallucinations se sont probablement incrustées au bordel intérieur organisé par l'adrénaline. Peu importe, ce bruit arrive pile au bon moment. Et même si ça va en attrister certains, je vais calmer ladite fête.
Je n'ai ni le temps, ni le besoin de me demander si je vais, oui ou non, commettre un parricide*. Oui c'était divertissant d'imaginer un scénario catastrophe. Oui un meurtre familial renferme des conséquences à la complexité rare. Oui résoudre cette prise d'otage est bien trop simple à certains égards. Tellement simple que ce ne peut être une coïncidence.
Mais ce parricide n'est pas vraiment utile. Évidemment que l'intrus trouve plus pertinent de prendre en otage mon géniteur plutôt qu'une femme que je connais à peine. Néanmoins, aucun être humain ne sait encore se téléporter, et il ne fait pas exception à la règle.
J'abats ce criminel alors qu'il court vers mon père, le corps à découvert. Je souffle sur le canon qui s'échauffe alors qu'un cylindre froid fige l'activité de son cerveau.
Une chose reste fâcheuse... Au lieu d'essayer d'atteindre mon géniteur en restant derrière cette forte dame, il l'a balancée contre le tableau et a couru pour se glisser derrière mon père. Il s'est pensé plus rapide que mon temps de réaction. Il m'a même imaginé assez stupide pour détacher mon attention de lui.
Se faire sous-estimer à ce point, c'est pire qu'insultant. Au moins, en Enfer, il ne pourra plus sous-estimer personne. J'ai comme une sensation de déjà-vu. Malheureusement, mon temps est en rupture de stock.
« Partez. Vite ! »
Je n'y crois pas ! Pour nous chopper à bavarder en cours et connaître toutes les rumeurs, ce sont les meilleurs. Mais là, j'ai l'impression de parler à des manchots sourds et aveugles. Incapables d'utiliser leur force pour se relever, incapables de remarquer mon exaspération et incapables de comprendre mes ordres.
L'envie de leur hurler dessus est presque aussi grosse que mes yeux. Tant pis pour eux, je n'ai plus le temps de les sauver. Chaque seconde perdue ici est une chance de moins pour la survie d'Hélène. Si je ne suis pas aussi furieux que pendant sa disparition, la retrouver morte éteindrait définitivement la seule braise d'amour que mon frère a mis quinze ans à allumer.
***
Chronos, père de Zeus, est un titan personnifiant le temps.
Un parricide est le meurtre d'un père par son enfant.
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