I'm not sick but still so far away from sane - 1/3


I'm not sick but still so far away from sane


⚠️Warning :

- Ne cherchez aucune logique, aucun sens profond, explication spéciale ou réel sens à tout ça. C'est une histoire sombre, glauque, étrange. Et c'est surtout, un exutoire pour l'auteur.

- C'est loin d'être une histoire tout public et même si vous êtes assez âgé, il faut avoir le cœur bien accroché. (Violence - Sang - Déviance - Abus sur enfants - Meurtres - Torture - 🔞) Les personnages sont complétement bousillés et leur histoire n'aura rien de romantique.

🔸️Pour les passages de Ren, j'utilise volontairement "lui" et "elle" et parfois je n'accorde pas au féminin malgré le "elle" avant, vous comprendrez pourquoi en lisant.

🔸️Vous devez la scène de Yoongi et "Ron" et "Ne jamais prendre de décision sous morphine" à l'excellente série "Mr Robot". La citation de Ren et la dernière du chapitre sont extraites de la perfection incarnée par la série "Sense8".

🔸️Un énorme merci à Eunkyung_art grâce à qui cette histoire a enfin une cover. Une cover magnifique de surcroît 💜


"I'm not sick but still so far away from sane.
Nightmares, but I haven't slept in ages.

The battles won, but there's still poison in our veins.
I hope I can sleep straight through the madness.
But I can't even tell when I'm sleeping anymore.

We've lost control, anything but gently down the stream.
Hold me close, hold me tell me life is but a dream.

Let the darkness come for me, let it try to steal my soul.
As if I had a soul to steal.
Let the darkness come for me, let it try to steal my soul.
As if I had a soul to steal."



- Parfois, je voudrais être une goutte d'eau... Murmura Ren, le regard perdu dans le vide.

Jung kook ne répondit rien. Habitué aux remarques de la jeune femme, il laissa le silence uniquement troublé par la pluie frappant sur les carreaux reprendre ses droits.

L'autre n'attendant pas réellement de réponse ne fut pas surprise d'être ignorée, mais elle soupira pour la forme, ses yeux se promenant sur le bar désert qu'elle connaissait pourtant déjà par cœur.

Le comptoir usé mais étrangement brillant, les sièges affaissés, les tables marquées par les traces de verre, de nourriture et les dessins incrustés au couteau.

Le jukebox cassé, mais que personne ne songeait à réparer, le sol hideux qu'il était devenu impossible de réellement nettoyer, le billard inutilisable, la décoration fatiguée, les ampoules presque toutes explosées, le miroir cassé près des toilettes et les graffitis aux murs.

Cette odeur forte d'alcool, de tabac, de sueur et de désespoir qui flottait dans l'air.

- Ce lieu est vraiment comme nous... Souffla-t-elle à nouveau en dessinant du bout des doigts sur son poignet.

Son partenaire leva enfin les yeux de son livre, regardant autour de lui, s'attendant presque à avoir une illumination soudaine.

Mais rien.

Juste comme on leur avait si souvent craché à la figure, un bar délabré, un « trans », une pédale et un monstre.

Le dernier adjectif censé le définir était idiot.
Il n'était pas le seul, les deux autres aussi étaient des monstres !

Instinctivement, son regard glissa vers le plus dangereux, tranquillement allongé sur une vielle table bancale comme si c'était un matelas moelleux et confortable.

Pieds nus, un vieux jean gris ouvert, un pull marine, remonté jusqu'au-dessus du ventre, une main gantée pendant dans le vide et l'autre reposant sur sa poitrine.

On aurait pu croire qu'il dormait vraiment.

Mais avait-il seulement besoin de sommeil ?

Jung Kook fronça les sourcils, cherchant dans sa mémoire.

Non, il ne l'avait jamais vu dormir.

Quelques mèches blondes, étrangement dorées glissèrent sur les yeux du jeune homme allongé et le brun fut une fois de plus frappé par son apparence inoffensive.

Les gens l'évitaient toujours, effrayés par son visage fermé et ses yeux sombres alors qu'ils n'imaginaient pas une seconde devoir se méfier de son partenaire.

Un petit rictus déforma ses lèvres.

Même lui pourtant le craignait.

« L'endormi » se tourna sur le côté, ses genoux remontés contre son ventre et le tout sans le moindre bruit, pas même celui du froissement des vêtements ou de la table bancale cognant contre le sol usé.

Jung Kook frissonna, ses dents perçant brusquement sa lèvre inférieure au moment où le troisième monstre de la famille ouvrait les yeux.

Le brun n'aimait pas ça, il n'aimait pas être aspiré par ce regard sombre, par ces pupilles hypnotiques qui semblaient pouvoir donner vie à ses pires cauchemars.

Vraiment, les gens avaient tort de croire en son innocence, il n'en restait pas la moindre trace chez Yoongi.

Y-en avait-il seulement eu un jour ?

Avant peut-être.

Il secoua imperceptiblement la tête.

Non, « avant » ça n'existait pas.

Ren s'était tendu, sa main tremblante saisissant son verre de vodka, ses bagues tapant contre la surface ébréchée.

Elle but le tout cul-sec, ignorant le liquide se perdant sur son menton et vers son cou pâle.

- Je ne veux pas le faire ! Gémit-elle. JE NE VEUX PAS !

Elle se leva brusquement, plantant ses grands yeux mouillés, cernés de noir dans ceux de Yoongi calmement appuyé contre la table bancale sur laquelle il s'était reposé.

- C'est effrayant et ça fait mal ! Ajouta-t-elle. Pourquoi devrait-on se souvenir ? Pourquoi on ne pourrait pas oublier à la place ?!

Jung Kook la comprenait parfaitement.

Lui non plus n'avait pas le courage d'affronter le passé, de fouiller dans sa mémoire pour se souvenir dans les moindres détails de leurs souffrances.

Pourquoi vouloir à ce point retrouver ces quelques mots datant d'une vingtaine d'années ?
Pourquoi cette obsession pour cet instant précis ?

- Je vais le faire seul. Rétorqua calmement le blond.
- Yoongi... Tenta la jeune femme.
- Vous ne m'êtes d'aucune utilité. L'interrompit-il. Vous craignez tellement ce que pourriez voir que vous bloquez la moindre image.

La blonde baissa la tête.

Elle n'aimait pas l'idée que Yoongi soit le seul à essayer, qu'il soit le seul à s'infliger toute cette douleur et elle se détestait d'être aussi lâche.

C'était encore pire en sachant que l'autre ne lui en voulait pas.

Il pouvait bien les terroriser parfois, avoir des mots horribles et des regards glaçants, au final, c'était toujours lui qui faisait le plus difficile.

Toujours lui qui s'occupait de ce qu'elle et Jung Kook n'avaient pas le courage d'affronter.

Et c'est encore une fois ce qu'il allait faire.

Elle se rassit, l'observant se détacher souplement de la table et retirer son gant pour s'entailler sans la moindre hésitation la paume de la main, son regard suivant les gouttes de sang s'échouant sur le sol.

- Allons-y... Souffla-t-il d'une voix décidée.

D'abord Ren et Jung Kook, puis les tables, le vieux billard, le comptoir et enfin les murs.

Tout s'effaça peu à peu, amorçant un changement de décor complet.

Il n'était plus dans le bar, mais dans une petite chambre humide et plutôt sombre, éclairée seulement par la lune pleine et une bougie à moitié consumée.

Le cliché de la scène le faisait toujours autant tiquer, mais il ignora cette impression et se focalisa, comme à son habitude, sur ce qu'il avait sous les yeux.

Peut-être que cette fois, il arriverait jusqu'au bout, jusqu'à ces mots qui l'obsédaient.

Un enfant beaucoup trop maigre, aux joues creusées et au regard vide était assis par terre, le dos collé à la tapisserie décrépie.

C'était son anniversaire, il fêtait ses cinq ans.

Mais à ce moment précis, il ne s'en souvenait plus, ayant depuis longtemps perdu la notion du temps.

Et puis pourquoi se réjouir pour une date ?

Pour lui, c'était une journée comme une autre.

Pas de gâteau, de bougie, de musique, d'amis, de cadeaux ou de parents fiers.

Non, juste une main immense et froide glissée sous son pull, la sienne enroulée autour d'un sexe dur, pulsant sous les sensations que ses petits doigts maigres lui procuraient.

Juste enfoncée dans sa bouche, une langue épaisse avalant la sienne, aspirant son dégoût et sa douleur dans une danse écœurante et vulgaire.

Seulement cette odeur horrible de transpiration mêlée à une vielle eau de Cologne bon marché, ce corps lourd, massif, imposant, pressé contre le sien à deux doigts de se briser.

Il ne pleurait pas, ne se débattait pas, aucun son ne lui échappait.

Il se pliait docilement aux désirs de l'adulte, répondant mécaniquement à chaque demande, au moindre geste, moindre mot.

Certains aimaient lorsqu'il souffrait, lorsqu'il manifestait sa terreur et son dégoût.

Lorsqu'il pleurait, suppliait et tentait de fuir.

D'autres s'en fichaient totalement, peu intéressés par ses réactions ou ses émotions.

Et il y avait ceux que ça contrariait et qui n'hésitaient pas à lui faire savoir.

Étonnamment, ça n'étaient pas les plus difficiles à gérer.

Cela faisait longtemps qu'il ne ressentait plus rien, comme détaché de son propre corps.

Il ne ressentait plus la peur, la douleur, l'effroi, la honte ou le désespoir.

Il n'espérait plus que les choses s'arrangent, ne rêvait plus d'une vie meilleure ou d'un héros venant le sauver.

Alors, le plus dur était de pleurer, de crier, de supplier et de faire semblant de se battre, faire semblant d'avoir encore une quelconque étincelle en lui.

Oui, les plus épuisants étaient ceux qui avaient besoin de croire qu'ils le brisaient, qu'ils violaient aussi bien son corps que son âme.

Car en réalité, il n'y avait plus rien à prendre, plus rien à salir et détruire.

Juste une petite tâche dans un océan de vide.

Une minuscule tâche nommée colère dont il n'avait même pas conscience et qui avait besoin d'être stimulée.

Encouragée.

Son éducateur n'exigeait rien, il se servait seulement et c'était reposant dans un sens.

Il n'eut donc aucune réaction lorsque son sous-vêtement glissa le long de ses jambes contre sa peau gelée pour finir au sol, même pas un léger sursaut ou un petit tressaillement.

Yoongi non plus.

Il suivait la scène avec attention, mais sans la moindre émotion.

Son visage et son regard n'exprimaient rien, il était totalement détaché de ce qui se passait sous ses yeux, comme si la pièce était vide.

Qu'aucun enfant n'était en train de se faire abuser pour la énième fois par un adulte chargé de prendre soin de lui.

Comme si l'enfant en question n'était pas lui.

Vide.

Juste du vide.

Il se rapprocha, toujours aussi concentré, s'accroupissant à leur hauteur.

- Tu sais que tu es vraiment un gentil garçon Yoongi... Souffla-t-il. C'est pour ça que tu es mon préféré.

L'éducateur écarta les jambes, pressant l'épaule de l'enfant pour l'attirer vers lui, amenant son visage juste au-dessus de son sexe humide et dressé.

- Tu sais que tu es vraiment un gentil garçon Yoongi... Récita-t-il, suivant à la virgule près les mots prononcé par le blond. C'est pour ça que tu es mon préféré.

Le petit s'agenouilla docilement, les doigts de l'adulte s'accrochant à quelques-unes de ses mèches de cheveux pour l'encourager.

Et Yoongi, toujours aussi impassible, continua de regarder. Passant de la petite bouche violée, de sa bouche, à l'expression presque extatique de l'homme chargé de prendre soin de lui.

Mais rien.

Encore et toujours le même vide.

Quelques instants passèrent, le silence troublé uniquement par les bruits de salive, de déglutition et les encouragements étouffés entre deux gémissements de l'éducateur.

Puis Yoongi tourna la tête vers la porte juste avant qu'elle ne s'ouvre, laissant apparaître un homme d'une trentaine d'années.

Ce dernier ne parut pas surpris de la scène qui se déroulait dans la chambre, même plutôt désolé de déranger.

- On a un problème au deuxième étage ! Lâcha-t-il.

L'autre grogna, appuyant sur la tête de l'enfant pour qu'il accélère, l'étouffant presque.

Les gestes furent plus brusques, plus rapides, une main fermement pressée contre la petite nuque fragile, si facile à briser.

Il gémit plus fort, des mots que personne ne comprit et dont tout le monde se foutait, avant de tirer brutalement sur les cheveux sales pour se libérer, jouissant sur le visage qui lui faisait face.

Tout était tellement silencieux, tellement calme.

Seule la respiration saccadée de l'éducateur reprenant son souffle se faisait entendre. Son petit rire satisfait, le bruit de sa fermeture éclair, de sa ceinture et le frottement de son pantalon contre le sol lorsqu'il se releva.

Juste ça.

- Je vais revenir très vite et on pourra continuer à s'amuser. Souffla Yoongi.

Et encore une fois, l'éducateur répéta les mêmes mots en ébouriffant les mèches dorées, comme il aurait pu le faire avec un chiot obéissant.

Il rejoignit son collègue qui l'attendait patiemment sur le pas de la porte et après un dernier regard, disparut dans le couloir sombre en refermant derrière lui.

Yoongi s'assit alors près du petit qui s'essuyait avec son pull, attendant la suite.

Maintenant, ils arrivaient enfin à la partie qui l'intéressait.
Il se rapprochait enfin de ces mots qu'il devait absolument entendre.

Il se fixa avec attention, nullement perturbé de faire face à cette petite et vielle version de lui, attendant un instant bien précis qui ne tarda pas à venir.

L'enfant fronça les sourcils, intrigué par ce son étrange qui résonnait dans sa tête.

Il regarda autour de lui, se demandant d'où venait cette musique entêtante, mais ne vit absolument rien.

La même chambre, le même vide, la même solitude.

Alors quelle était cette chose qui brisait le silence ?

- Moi ! S'exclama joyeusement une voix.

Et même si c'était surprenant, il ne sursauta pas.

En était-il seulement encore capable ?

Doucement, sous son regard impassible, se dessina une silhouette vaporeuse qui finit par apparaître clairement sous des traits identiques aux siens.

Un véritable frère jumeau, ou reflet parfait.

Un autre Yoongi de cinq ans, assis juste en face de lui, un petit sourire étrange aux lèvres.

C'était une copie conforme, mais il semblait pourtant bien différent de l'original.

Plus vivant, plus déterminé.

Plus dangereux.

Le blond observa ses deux minis-lui, se faire face, attentif au moindre détail bien qu'il connaisse la scène par cœur.

Rien ne devait lui échapper.

- On m'a nommé Exitium, mais tu peux m'appeler Wrath.

Il n'y avait aucun rapport entre les deux noms, mais l'enfant ne s'en préoccupa pas, hochant simplement la tête, comme si tout cela avait un sens.

- Je suis souvent en colère, il paraît, d'où ce surnom très théâtral. Continua sa copie conforme, toujours aussi souriante.

Ses lèvres ne bougeaient pas, il ne prononçait pas le moindre mot et pourtant Yoongi l'entendait parfaitement.

Aussi bien le gamin de cinq ans que la version adulte assise près d'eux.

- Je ne suis pas spécialement fan de tout ce côté classique et cliché, mais tout contrat exige une sorte de baptême alors...

Il secoua les mains, ses bracelets étranges s'entrechoquant tandis que sa bouche restait scellée malgré ses mots qui résonnaient clairement.

- Le tien, si tu le veux bien, sera Angélus, je pense.

Il rit.

- J'aime la symbolique !

L'enfant ne broncha toujours pas et Yoongi souffla les mots qui s'élevaient dans leurs esprits.

- Hey Yoon, ça te dirait de quitter cet endroit ? De détruire cet éducateur et les autres ? De pouvoir punir tous les adultes qui déçoivent et trahissent les petits bouts comme toi ?

L'autre se contenta de regarder Wrath avec le même air détaché, le même vide dans le regard et ce dernier sourit en se relevant.

- Tu vas me donner une réponse dans quelques secondes. Murmura-t-il en se tournant vers la porte qui s'ouvrait, laissant apparaître l'éducateur pressé de reprendre ses jeux.

Il se dirigea rapidement vers son docile jouet et celui-ci se laissa basculer sur le matelas, le regardant retirer fébrilement son pantalon.

Derrière, l'adulte qu'il deviendrait plus tard et cette étrange copie conforme observait la scène sans bouger.

L'un toujours aussi détaché et attentif, tandis que l'autre ne pouvait se défaire de son rictus amusé.

L'éducateur remonta ses jambes, les appuyant contre son torse avant de glisser son sexe lubrifié entre ses cuisses maigres pour se masturber doucement, les mains accrochées à ses fesses.

Le rythme était assez lent, parfaitement maîtrisé, presque synchronisé et chaque mouvement accentuait la grimace de plaisir qui se dessinait sur son visage écœurant, son regard lubrique ancré sur le corps de sa victime.

Yoongi porta une main à sa poitrine, réflexe qu'il ne pouvait combattre et l'enfant fit de même, sentant quelque chose le titiller parmi le vide immense qui l'habitait.

Comme une petite écorchure qui démange, une sensation agaçante qui attire l'attention et dont on veut se débarrasser au plus vite.

Il enfonça ses ongles dans sa chair, le tiraillement prenant de l'ampleur à chaque mouvement de bassin de l'éducateur.

Chaque grimace, soupir, grognement, gémissement semblait faire grandir quelque chose en lui, quelque chose d'enfoui profondément dans son obscurité.

Ça grandissait.
Ça brûlait.

Et d'un coup, quelque chose explosa.

À l'instant même où l'adulte se répandait entre ses cuisses et sur son ventre, il se souleva pour atteindre le stylo accroché à la poche de sa chemise et le planter dans sa carotide.

Est-ce que c'était normal qu'une plume pénètre aussi bien ?
Sans même se casser ?

Les questions s'effacèrent à peine arrivées.

L'adulte avait basculé vers l'arrière, tombant sur le sol en criant et il s'était jeté sur lui, pris d'une énergie nouvelle.

D'une folie inconnue jusque-là.

Assis sur son bassin, couvert de son sperme et à présent de son sang, il continuait de planter encore et encore son étrange arme dans le corps de l'éducateur.

Dix.
Quinze.
Trente.

Cinquante ?

Il ne savait plus.
Il ne comptait pas, laissant cette tâche en lui grandir, s'épanouir et s'enraciner profondément dans la moindre parcelle de son corps.

Il n'avait jamais connu ça encore.

C'était frénétique, extatique, jouissif.

Ce plaisir malsain, qui pulsait à chaque coup, à chaque éclaboussure de sang, lui donnait enfin la sensation d'être vivant.

Alors il continua encore.

Soixante.
Quatre-vingts.

Cent ?

Cent-onze pour être exact, le Yoongi adulte avait compté.

Mais qu'importe, ça n'était pas le plus important.

L'enfant, à bout de forces, finit par s'arrêter, lâchant le stylo en se laissant retomber sur le cadavre, baignant dans ce liquide vermeil si chaud et réconfortant.

Loin d'être dégoûté par la sensation poisseuse, il soupira de bien-être en fermant les yeux.

Il aurait presque pu s'endormir.

Le rire de Wrath le sortit de sa douce torpeur.

Celui-ci tapait des mains en sautillant, apparemment très excité.

- Tu sais, ils ont toujours tous utilisé mon pouvoir pour ce genre de chose, mais toi... Toi...

Il rit encore, les yeux brillants d'une lueur folle.

- Je savais que ma trouvaille serait la meilleure. Ajouta-t-il. Je savais que tu serais parfait !

Il se penchant vers l'enfant, le soulevant d'une seule main pour l'aider à se relever.

- Tu sais Yoongi, si tu pars d'ici avec moi, tous les autres, tout cet endroit va être réduit en cendres. Tu comprends ?

L'autre n'eut aucune réaction.

Pourquoi leur sort l'inquiéterait ?

Il était seul depuis toujours et ne devait se préoccuper que de deux choses maintenant.

Lui et tous ceux qu'il allait détruire.

- Je ne sais pas ce que les deux autres ont trouvé, mais aucun ne t'arrive à la cheville, j'en suis sûr ! S'exclama Wrath, visiblement satisfait.

Il recoiffa assez tendrement les cheveux de l'enfant, glissant un doigt contre son visage éclaboussé de sang avant de le porter à ses lèvres.

Yoongi se rapprocha, les collant presque, attendant enfin d'avoir accès à cette partie de l'histoire qui lui manquait toujours.

- D'accord, je t'aiderai... Souffla Wrath. Jusqu'à ce que tu te sois vengé, tu seras puissant, invincible même. Mais...

Il se pencha à l'oreille du petit et la version adulte de ce dernier fit de même.

Ça y est, le moment était venu, il allait enfin savoir.

Mais une fois de plus, le souvenir se brouilla, le décor devint flou, comme tordu par endroits et rapidement, il se retrouva à l'extérieur, observant l'orphelinat ravagé par les flammes, les cris d'agonies des autres résidents résonnant dans la nuit.

Le petit était là avec sa copie conforme, ainsi que les enfants qu'avaient été un jour Jung Kook et Ren, tous les deux accompagnés de leurs propres « sauveurs ».

Mais cette scène-là, il s'en souvenait parfaitement.

Ce n'était pas ça qu'il voulait revoir !

Il tapa violemment l'arbre près de lui avec la paume de sa main en criant et un rire sadique s'éleva tout autour de lui, tandis que les contours du bar réapparaissaient doucement.

- POURQUOI NE ME LAISSES-TU JAMAIS ME SOUVENIR ? Hurla-t-il en balançant une vieille chaise contre les bouteilles alignées derrière le comptoir.

Ses partenaires comprirent, qu'une fois de plus, l'essai était un échec et que les fameux mots qui semblaient être la clé de leur existence, leur avaient encore échappés.

Le rire se fit davantage moqueur et Jung Kook tressaillit, toujours aussi mal à l'aise quand l'autre exprimait aussi clairement sa présence.

- La ferme ! Gronda Yoongi en remettant son gant. Rends toi utile plutôt et allons bosser !

"I've been thinking about my life and all of the mistakes that I've made. The ones that stay with me, the ones I regret are the ones that I made because of fear.
For a long time, I was afraid to be who I am, because I was taught by my parents that there's something wrong with someone like me. Something offensive, something you would avoid, maybe even pity. Something that you could never love.
My mom, she's a fan of St Thomas Aquinas, and of all the venal and mortal sins, St Thomas saw Pride as the Queen of the Seven Deadlies.
He saw it as the ultimate gateway sin, that would turn you quickly into a sinnerholic.
But hating isn't a sin on that list.
Neither is shame. »

Ren inspira, caressant machinalement le cuir de son pantalon qui la moulait comme une seconde peau, son piercing au nombril mis en valeur par les paillettes parsemées sur son ventre nue.

Elle sortit son gloss, passant un doigt rosé sur ses lèvres pour les faire briller, avant de tapoter le reste sur ses joues pâles pour se donner meilleure mine.

Elle était grande, très mince, blonde et facile à aborder.

Le genre de femmes dont la plupart des hommes rêvent, surtout dans ce type de bar.

Seulement, parmi tous ces mâles, très peu savaient que malgré son allure de femme fatale, elle cachait les mêmes attributs qu'eux.

Une blonde avec "une queue entre les jambes" ?

C'était pour beaucoup déjà bien moins séduisant.

Elle aurait pu simplement faire disparaître ce « détail » et devenir comme elle l'avait tant de fois entendu « une femme à part entière » mais elle n'en avait jamais eu l'envie.

Ne pouvait-elle pas simplement être un peu des deux ?

Homme.
Femme.

Elle n'était ni l'un ni l'autre.

Pas pleinement, pas entièrement.

Est-ce que c'était si mal que ça ?
Si monstrueux ?

Les gens avaient toujours besoin d'une case où ranger les autres, effrayés par tout ce qu'ils n'arrivaient pas à étiqueter et classer, alors elle avait toujours été considérée comme une anomalie.

Le petit grain de poussière gênant qui menace la mécanique d'un portait de famille parfait.

Elle avait toujours été en trop, toujours gêné son entourage.

Juste parce qu'elle était une petite fille avec un pénis.
Juste parce qu'il était un petit garçon qui voulait être une princesse.

Il y avait les hommes, il y avait les femmes.

Il y avait même ceux qui changeaient, conscient que la nature s'était trompé.

Puis il y avait Ren.

Lui, elle ?

Est-ce qu'il ne pouvait pas simplement être considéré comme un être humain ?

À l'orphelinat, pour le plaisir des « invités », on l'avait toujours appelé « elle » et considéré comme une fille, alors l'habitude était restée.

Seul Yoongi utilisait le pronom « il », rejetant comme toujours ce qui pouvait venir de cette époque.

Ren s'en fichait.

Puisque rien n'existait pour les créatures comme lui, elle acceptait les deux sans problème.

La seule chose que la jolie blonde cherchait, la seule chose qu'elle espérait, c'était l'amour.

Elle voulait être aimée à tout prix.

C'était une obsession, un besoin douloureux de combler le vide sans fin de son cœur et son âme.

Seulement, comme Jung Kook et Yoongi, elle n'avait aucune notion, même vague, de ce que l'amour pouvait être.

Ce sentiment, qui la faisait tant rêver, n'était qu'une sorte de fantasme, une illusion idéalisée et inaccessible.

La tendresse, l'affection, la confiance, le désir, la passion.

Ce n'étaient que des mots vides de sens.

Les premiers émois, les frémissements, l'attente, la crainte, la délivrance, le manque.

Qu'est-ce que c'était l'amour ?
Ça s'apprenait l'amour ?

Les seules attentions qu'on lui avait offertes, étaient physiques et c'était pour Ren le seul moyen d'être aimé.

S'il était « gentil », s'il continuait de se donner comme lorsqu'il était enfant, alors il recevrait de l'amour, il aurait de quoi remplir l'espace creusé en lui.

Le sexe, c'était tout ce qu'il connaissait.

Pas même le plaisir, juste un abandon.

Un sacrifice.

Un moment désagréable à supporter pour accéder à sa récompense.

Pour être aimé.

Ren ne disait jamais non.

Elle ne savait même pas qu'elle pouvait dire « non ».

Parce qu'on ne lui avait jamais demandé son avis et que même vingt-ans plus tard, elle était incapable de comprendre que rien de ce qu'elle avait pu vivre n'était « naturel ».

Se laisser toucher.
Allonger.
Fermer les yeux.
Dire oui.
Attendre que ça passe.

C'était comme ça que les choses se passaient, non ?
C'était pareil pour tout le monde ?

Et si, jusque-là, personne n'était resté, si personne ne l'avait aimé, c'était de sa faute, non ?

Parce qu'elle n'était pas assez bien ?
Pas assez gentille ?

Alors elle essayait toujours plus.

Elle travaillait dur pour être à la hauteur, pour enfin être aimé.

Plus mince.
Plus jolie.
Plus accessible.
Plus manipulable.

Plus. Plus. Plus !

Elle avait même parfois songé à faire disparaître cette partie de son corps que certains de ses partenaires avaient jugée inutile ou immonde.

Songé à renier ce qu'elle était pour devenir entièrement cette « femme » que les autres voulaient tant.

Oui, elle était prête à tout pour qu'on lui offre cet amour dont elle rêvait.

Seulement, Vitium ne l'avait pas laissé faire.

Il ne lui laissait jamais se faire de mal.

C'était d'ailleurs étrange qu'une créature aussi froide, se soucie de son bien-être.

Même s'il ne le montrait pas, même s'il cachait son inquiétude derrière un silence glacial, elle savait que rien ne pourrait lui arriver tant qu'ils étaient liés.

C'était le contrat après tout.

Vitium, alias Shemar, était très différent de Wrath.

Même s'il était physiquement bien plus impressionnant et que son aura démoniaque était indéniable, Ren le trouvait beaucoup moins effrayant que la chose sadique liée à Yoongi.

Mais au final, est-ce que la vision qu'ils avaient d'eux, était réelle ?

À ses yeux, « son » démon était une montagne de muscles, virile, à la peau noire et au regard vert glacial, mais est-ce qu'il ressemblait vraiment à ça ?

Ils avaient grandi ainsi, sans se poser de question sur l'existence de telles créatures, sans se demander d'où elles venaient et quand, ou comment leurs histoires se termineraient.

Pourquoi ?
Pourquoi moi ?

C'est comme s'ils avaient déjà toutes les réponses, mais ne s'en souvenaient plus.
Comme si ça n'avait aucune importance.

Seul Yoongi cherchait encore, seul lui gardait l'obsédant besoin de se remémorer la raison même de la présence de ces trois « monstres » à leurs côtés.

Ren se contentait de suivre, comme toujours.

Occupé par sa quête de l'amour, il se laissait vivre, habitué à cette puissante présence, devenue rassurante, au fil des années.

C'est parce que Vitium était là, qu'elle pouvait continuer à être une anomalie.

Parce qu'il était son ombre, qu'un grain de sable comme lui, pouvait tenter de se faire aimer par tous ces hommes, sans craindre leur éventuelle violence, lorsqu'ils découvraient, en la déshabillant, ce qu'elle cachait.

Peut-être qu'au final, les monstres, qu'ils soient humains ou non, étaient faits pour s'entendre.
Peut-être que sa quête de l'amour, passait par la soif de sang de Vitium.

Peut-être que c'est pour ça, qu'il l'avait choisi cette nuit-là.

Parce qu'elle ne rentrait dans aucune case, qu'elle resterait, à jamais, cette donnée effrayante car impossible à classer.

Parce qu'elle était prête à tout pour un peu d'amour, même aux pires horreurs.

Sa marque, tatouée sur la hanche, la sortie de ses pensées et elle caressa la peau devenue brûlante en fronçant les sourcils.

Est-ce que Shemar était agité ?

Son regard glissa sur la salle, tandis qu'elle se nourrissait de ceux qui la déshabillaient et un homme, en particulier, attira tout de suite son attention.

Il était pourtant au bout du bar, coupé des autres, fermé sur lui-même et complètement perdu dans ses pensées.

C'était le genre d'homme qu'elle n'abordait jamais, mais cette fois-ci, une force invisible semblait la pousser jusqu'à lui et elle ne tenta pas de résister.

Elle traversa la foule avec assurance, comme aurait pu le faire un mannequin sur un podium, se dirigeant droit sur sa cible.

Jeong Han eut pitié tout de suite.

Il avait vu de loin la jeune femme se diriger vers le solitaire qui se noyait dans son whisky et savait pertinemment qu'elle se ferait ignorer.

Comme le reste de l'humanité.

Il le savait, car l'homme en question s'appelait Kim Namjoon et que c'était son partenaire.

Le flic le plus étrange au monde, d'après lui.

Comme prévu, la jolie blonde, moulée dans du cuir, se fit ignorer, le brun accoudé au comptoir ne lui accordant même pas un mot pour la rejeter.

Le silence.

C'était ainsi que « communiquait » Namjoon.

Ils travaillaient ensemble depuis un an et Jeong Han n'avait eu le droit qu'à quelques mots et sons étranges, accompagnés de mouvements secs de la tête.

Évidement, ses collègues le haïssaient.

Il était doué pour son job, plutôt sexy, donc populaire auprès des femmes et il les ignorait depuis ses débuts au commissariat.

Namjoon n'avait pas d'amis, c'était évident.

Un type comme lui ne pouvait pas créer de lien, ça sautait aux yeux.

Pas besoin d'être flic ou psy pour le comprendre.

Pourtant, Jeong Han était content d'être son partenaire.

À la base, ils s'étaient retrouvés en duo, car personne ne voulait d'eux.

Le brun parce qu'il était... Namjoon et lui, à cause de son physique.

Un jeune androgyne flic ?

Il ne comptait plus les remarques déplacées, les blagues de mauvais goûts, les insultes ou les tentatives d'intimidations.

Le brun ne disait rien et c'est ce que Jeong Han appréciait.

Il ne l'avait jamais défendu non plus et il l'aimait encore plus pour ça.

Il n'avait pas besoin qu'on vienne à son secours, comme s'il était une demoiselle en détresse, il voulait simplement être traité comme n'importe quel autre flic.

N'importe quel autre être humain.

Et même si c'était en l'ignorant complètement les trois-quarts du temps, c'est ce que Namjoon faisait.

De son côté, il respectait totalement l'indifférence et le caractère particulier de son partenaire.

Il ne cherchait pas à communiquer, à créer une quelconque connexion ou à le bousculer.

Il ne faisait aucune remarque sur ses méthodes étranges, son haleine chargée d'alcool, ou la peine qui voilait son regard.

C'est comme ça que leur drôle de duo fonctionnait.

Chacun de son côté et dans le respect des bizarreries de l'autre.

En fait, la seule chose que ne pouvait s'empêcher de faire Jeong Han, c'était d'observer Namjoon, d'essayer de le comprendre, de le décrypter.

Et au bout d'un peu plus d'un an, il se retrouvait, au final, avec beaucoup plus de questions que de réponses.

Il était même incapable de dire ce qu'il ressentait vraiment pour son collègue.

De l'admiration ?
Du désir ?
De l'amour ?

Il n'en avait aucune idée et savait qu'au fond, la réponse n'importait pas.

Peu importe les sentiments qu'il éprouvait pour son partenaire, ce dernier continuerait de le voir comme un petit point parmi tous les autres, dont il ne pouvait même pas retenir le prénom.

Inconscient du regard de son partenaire, le brun attrapa sa bouteille, traversant la salle jusqu'à la porte arrière en ignorant ceux de ses « collègues », peu intéressé par la haine et les rancœurs qu'ils nourrissaient tous à son égard.

Leur existence même n'avait pas le moindre intérêt pour lui.

Le froid mordant le frappa immédiatement et il le laissa faire, sa respiration se bloquant quelques secondes, avant qu'un soupir profond lui échappe.

Il fit quelques pas, s'enfonçant dans la ruelle sombre pour s'éloigner de la lumière de l'enseigne à moitié défoncée, avant de s'appuyer contre le mur.

Combien de temps, encore, allait-il devoir s'infliger ça ?

« L'enfer c'est les autres »

Il n'y avait aucune citation au monde qui exprimait aussi clairement ce qu'il ressentait à chaque instant de son existence.

À moins que l'enfer, ce soit de devoir vivre avec lui-même.

Parfois, il ne savait plus ce qui était réellement le pire.

Le monde était tellement bruyant et éclatant.

Il se sentait en permanence agressé par tout ce que le reste de ses « semblables » dégageaient.

Leurs mots, leurs émotions, leurs mensonges, même leur silence.

Pour lui, tout avait un son, tout était fort, assourdissant.

Il n'avait jamais un seul instant de paix, pas une seule seconde de calme ou d'apaisement.

Juste une migraine sans fin, une symphonie démoniaque, sans la moindre harmonie, l'agressant en permanence, jusqu'à le rendre fou.

Les autres.
LES autres.
LES AUTRES !

Si seulement il avait le pouvoir de tous les faire disparaître.

Il n'avait rien en commun avec eux.

Rien !

Aucun lien ne le reliait à personne.

Aucune raison d'avancer. Aucun but.

Amour, argent, désir, sexe ?

Il avait beau chercher, il ne trouvait pas.

Vingt-ans qu'il tentait, en vain.

Peut-être n'était-il simplement pas humain ?

Contrairement à ce que tous pensaient, il ne se sentait pas supérieur, juste différent.

Bien sûr, des gens différents, il y en avait beaucoup sur terre. Seulement, chacun semblait trouver quelqu'un d'à peu près semblable, quelqu'un partageant la même « tare ».

Tout le monde, sauf lui.

Les autres n'étaient que des nuisances, des agressions bruyantes et douloureuses.

Des bourreaux.

Comment pouvait-il créer le moindre lien, dans de telles conditions ?

Il ne faisait que se fuir dans l'alcool, se torturant en se forçant à rester en vie.

Oui, il se punissait en s'interdisant de mettre fin à ses jours.

L'enfer sur terre, c'était sa façon de payer pour ce qu'il avait fait.

Ou plutôt, pour ce qu'il n'avait pas eu le courage de faire.

Sa main libre glissa dans son blouson à la recherche de son paquet de cigarettes, pendant que l'autre amenait sa bouteille à ses lèvres, l'alcool fort lui brûlant la gorge.

Que feraient ses supérieurs s'ils connaissaient la vérité ?

S'ils savaient que l'excellent flic qu'il était, se foutait totalement des victimes et de leurs souffrances ?

Que ce qu'il cherchait, ce qu'il espérait trouver parmi toutes ces enquêtes tordues qu'il bouclait, parmi tous ces psychopathes dangereux qu'il arrêtait, c'était un monstre comme lui ?

Que feraient-ils, s'ils apprenaient que les pires scènes de crime au monde, celles que faisaient vomir même les flics les plus chevronnés, le fascinaient totalement ?

Qu'il les collectionnait avec dévotion ?

Il rit, recrachant son whisky sur son pull, sans s'en soucier, alors que le dernier regard que lui avait lancé sa sœur, des années plus tôt, lui revenait en mémoire.

Il s'en souvenait comme si c'était hier.

Comment oublier ce qui vous a condamné à l'enfer ? Oublier l'instant où il était devenu un monstre ?

Les seules choses qui lui échappaient, étaient les mots qu'elle lui avait lancés, mais le reste était aussi clair et limpide que le dégoût profond qu'il ressentait pour lui-même.

Elle devait tellement le haïr et le maudire.

Presque autant qu'il se haïssait lui-même.

Il cligna des yeux, ceux de sa sœur toujours ancrés dans son esprit.

Il se souvenait de la douleur, puis de l'espoir qui les avait traversés la première fois.

La toute première fois qu'il était tombé sur ce qu'il avait ensuite fait semblant d'ignorer.

Quel genre d'être humain faisait ça ?
Quel genre de frère faisait ça ?

Lui.

Lui, l'inspecteur décoré.

Lui, que les autres prenaient pour un loup solitaire, traqueur de monstres.

Il était ce genre de personne.

Le genre à laisser son père se glisser toutes les nuits dans le lit de sa grande sœur.

Le genre à détourner le regard pour éviter celui désespéré de celle qu'il avait abandonnée.

Ça avait duré une année environ.

Un an à déserter la maison le plus possible, à fuir sa sœur et renier la réalité.

Un an, à tenter d'oublier l'expression de son aînée et sa culpabilité grandissante.

Jusqu'à ce qu'un matin, son père décide soudain de se débarrasser d'elle.

Était-il lassé ?
Avait-il peur qu'elle parle ?

Même aujourd'hui, il n'avait pas la réponse.

Il l'avait simplement internée, décrétant qu'elle était fragile, folle, dangereuse pour elle-même et les autres.

Namjoon avait toujours pensé que ça n'arrivait que dans les films, mais des hommes étaient réellement venus la chercher pour l'emmener de force.

C'est à ce moment précis que son monde était devenu horriblement bruyant.

Il se souvenait de son aînée hurlant, pleurant, accusant la terre entière, tandis qu'elle était traînée de force hors de la maison. Des larmes de sa mère, cachée derrière son époux, qui répétait que c'était pour son bien et puis soudain, du regard empli de haine de sa sœur, qui avait figé l'instant.

Elle lui avait craché quelque chose à la figure, quelque chose d'important sans doute, mais l'espace de cette seconde, il était devenu sourd, incapable de saisir le sens de ces mots hurlés avec tant de force.

Puis très vite, le son était revenu, soudain plus fort, plus violent.

Et absolument tout était devenu une agression pour Namjoon.

Les sanglots de sa mère, les mensonges de son père, les silences, les non-dits, les secrets à peine cachés, sa lâcheté.

Tout.

La simple présence des autres devenait douloureuse, jusqu'à ce que leur existence même, devienne une torture.

Il n'avait jamais revu sa sœur.

Elle était passée de l'hôpital à un établissement pour les « cas difficiles » et il n'était jamais allé la voir.

Pour lui dire quoi ?

« Désolé d'avoir laissé notre père te violer puis se débarrasser de toi comme un déchet ? »

Sa mère lui rendait visite au début, revenant toujours en larmes, répétant que son bébé était devenu une adoratrice de Satan.

Puis son père avait fini par lui interdire et le sujet était devenu tabou.

Il était devenu fils unique.

Un charmant fils qui allait encore tous les dimanches déjeuner chez ses parents.

Oui, il était de ce genre-là.

Yoongi observa l'homme qui entrait tranquillement dans le café, s'installant à une table, comme n'importe quel client.

Immédiatement, une employée quitta le comptoir pour lui apporter un gobelet plein, nettoyant, au passage, sa table pourtant bien propre, le tout avec un sourire éclatant.

L'autre hocha la tête en remerciement et le blond le regarda encore quelques secondes, le laissant sortir sa tablette avant de finalement s'approcher de sa table.

Le client releva la tête assez vite, se demandant pourquoi ce gamin s'arrêtait à quelques pas de sa table. Yoongi ne s'en formalisa pas. Il déposa au sol l'énorme sac qu'il avait dans le dos, tira la chaise en face de l'homme d'origine indienne et s'installa tranquillement, comme s'il était attendu.

Le brun le détaillait, cherchant à comprendre.

Yoongi garda encore quelques secondes le silence, retirant tranquillement sa capuche.

- Vous êtes Ron ! Lâcha-t-il finalement, pointant du doigt l'inscription « Ron's café » au mur à sa droite.

L'autre ne dit rien, son visage exprimant un certain agacement, mais aussi une forme de curiosité.

Il ne pouvait pas être impoli avec un client.

Surtout en public.

- Mais votre vrai nom est Rohit Mehta. Vous l'avez changé pour Ron il y a six ans, quand vous avez ouvert votre premier « Ron's café ». Reprit le blond. Maintenant, vous en avez dix-sept et huit qui vont bientôt ouvrir.

L'homme était surpris, il était calme, mais son corps, sa posture, exprimaient sa stupeur.

- Puis-je vous aider ? Questionna-t-il, s'avançant légèrement vers le plus jeune.

C'était un réflexe inconscient pour l'intimider, une manière d'accentuer leur différence de carrure, d'âge et de statut.

Le blond n'y prêta aucune attention, mais sa main gantée le démangea.

Wrath n'aimait pas qu'on puisse imaginer les dominer.

- J'aime venir ici parce que le wifi est rapide. Rétorqua calmement Yoongi. Je veux dire, vous êtes l'un des rares spots à avoir la fibre avec la vitesse gigabit.

Sa voix était calme, presque monotone.

- C'est bien. Tellement bien. Continua-t-il. Ça a rayé cette partie de mon esprit, cette partie qui n'a pas lieu d'être sans condition, donc j'ai commencé à intercepter tout le trafic sur votre réseau. C'est à ce moment-là que j'ai remarqué un truc étrange. C'est là que j'ai décidé de vous hacker.

La mâchoire de Ron se contracta légèrement.

Encore un geste inconscient.

Yoongi se recula un peu, appuyant son dos contre le dossier de la chaise, lui laissant l'illusion qu'il avait le dessus.

- Hack... Tenta le brun. Hacker ?
- Je sais que vous êtes sur un site appelé « plato's boys » L'interrompit-il, toujours aussi calmement.
- Pardon ?

Cette fois-ci, la voix du charmant patron était clairement teintée d'angoisse.

- Vous utilisez Tor pour garder les serveurs anonymes. Vous avez fait ça tellement bien, pour que personne ne puisse le voir, mais je l'ai vu.

Wrath commençait à s'amuser, excité par la panique qui embaumait peu à peu l'air.

Yoongi, lui, était toujours aussi inexpressif, continuant son explication comme si de rien n'était.

- Le protocole de routage oignon, il n'est pas aussi anonyme que vous le pensez. Celui qui est dans le contrôle des nœuds de sortie, est également dans le contrôle du trafic ce qui fait que... Je suis le seul en contrôle.

Ron qui avait regardé partout, autour de lui, cherchant nerveusement à savoir si quelqu'un les écoutait, ou si la police était là, se redressa légèrement, les sourcils froncés.

- Je vais vous demander de partir ! Lâcha-t-il, les dents serrées.
- J'ai tout. Répondit simplement Yoongi, déposant un dossier sur la table. Tous vos e-mails, tous vos dossiers. Toutes vos... photos.

Le brun souleva délicatement les rebords des documents, comme s'ils pouvaient à tout moment lui exploser à la figure, regardant du coin de l'œil le contenu.

Il prit une posture plus agressive, le visage, un peu, déformé par la colère.

- Sortez d'ici maintenant où je vais appeler...
- La police ? L'interrompit calmement le plus jeune. Vous voulez qu'ils apprennent pour les cent téraoctets de photos et vidéos d'enfants que vous donnez à vos quatre-cent mille utilisateurs ?

Les mains de Ron tremblotaient, malgré sa tentative de paraître calme.

Wrath jubilait.

- Personnellement, je pensais tomber sur du bondage et du sadomasochisme hard. Commenta Yoongi. Vous réalisez à quel point ça aurait été plus simple ?

Les yeux grands ouverts, humides, la lèvre inférieure qui tressautait nerveusement, les mains en l'air, juste au-dessus de la table, comme incapable de se décider sur un mouvement à faire, Ron semblait clairement inquiet.

Il ne cherchait plus du tout à le cacher.

- Je ne fais de mal à personne. Répondit-il presque timidement. Ça n'est jamais arrivé.

Il toucha le dossier, les yeux plongés dans ceux de son vis-à-vis qui n'exprimaient toujours aucune émotion.

- C'est...ma vie personnelle. Reprit-il difficilement, sa voix peinant à sortir.

Le blond se pencha un peu vers lui.

- Je comprends ce que c'est d'être différent. Souffla-t-il. Je suis aussi très différent.

Il secoua un peu la tête, donnant presque l'impression de minauder.

- Je veux dire, je ne me masturbe pas sur des images de gamins mais... je ne sais pas comment parler aux gens. Mon père était le seul à qui je pouvais parler.

Il se redressa à nouveau, le regard déviant une seconde vers l'extérieur.

- Mais il est mort.

Ron le regarda quelques secondes et il sut exactement ce que ce dernier se disait.

Évidement, il pensait qu'il était étrange, fou, bon à enfermer, mais là, à cet instant précis, il se disait surtout qu'il avait une chance de pouvoir récupérer ses données, sans finir sa vie en prison.

Le brun tenta donc de calmer les tremblements dans sa voix.

- Je suis désolé d'entendre ça.

Si Yoongi avait su sourire, il l'aurait sans aucun doute fait.

Pas grave, Wrath le faisait pour deux.

- Que s'est-il passé, sans indiscrétion ? Continua le patron du café.
- Leucémie. Lâcha le blond.

Ce n'était pas complètement un mensonge.

Il avait, il y a peu de temps, retrouvé son géniteur et ils avaient eu l'occasion de discuter avant le décès de ce dernier.

Le fait qu'ils aient papoté pendant une longue et éprouvante séance de torture, qui s'était conclue par lui, tranchant la tête de son paternel, n'était qu'un détail.

Ça ou un cancer.

- Ça vient sûrement de toutes les radiations choppées à son boulot, mais il n'y a aucun moyen que je puisse le prouver. Continua-t-il, ignorant les rires de Wrath. Maintenant, il est mort. Mais la société va bien, cependant.

Il hocha la tête, sentant le mot « monstre » clignoter dans l'esprit et le regard de Ron, qui tentait d'avoir l'air concerné et compatissant, espérant sans doute l'amadouer ainsi.

Il baissa les yeux vers la table, les deux mains jointes, quelques sanglots lui échappant.

- Chuuuut... Souffla Yoongi. C'est ok, Rohit. Tu n'as plus besoin de t'inquiéter maintenant.

Le brun releva immédiatement la tête vers lui, plus en colère qu'a deux doigts de pleurer, étonnamment.

- Je ne comprends pas. Êtes-vous en train de me menacer ?

Il serra les poings et le blond ne dit rien.

- Alors c'est ça la raison, l'argent ? Continua-t-il. C'est ce que vous voulez, hein ?

Il secoua la tête vivement.

- Non. Claqua-t-il. Si je vous paye maintenant, vous en voudrez toujours plus. Et peu importe combien je donne, vous informerez la police, au final.

Son regard balaya à nouveau nerveusement la salle, avant de revenir sur son interlocuteur.

- Je ne vais pas vous payer. Siffla-t-il. Je veux dire, vous avez aussi enfreint la loi.

Yoongi hocha la tête, acquiesçant.

Enfreint la loi ?

S'il devait un jour se soucier d'une quelconque arrestation, le hacking serait vraiment le moindre de ses soucis.

Le rire de Wrath éclata à nouveau.

Le blond était le seul à l'entendre, mais tout le café frissonna pourtant.

- Vous avez raison. Rétorqua-t-il. En partie.

Ron eut l'air perdu.

- Vous voyez, je fais habituellement ce genre de truc via mon ordinateur, mais cette fois, je l'ai fait loin de mon clavier. En personne.

Il marqua une pause, observant quelques secondes la foule autour de lui.

- En essayant de travailler sur mon anxiété sociale. Expliqua-t-il. Mais il y a toujours le risque que vous preniez la fuite après que je vous ai prévenu. Vous pourriez dire à celui qui gère les serveurs d'éteindre les vôtres et de supprimer toutes les données. Donc, je me suis assuré d'inclure l'heure exacte et l'emplacement lors de mon appel anonyme.

Il avait fini son explication en ramassant ses affaires, se levant pour remettre son sac à dos à l'épaule et Ron comprit tout de suite que la situation était très grave.

Il se leva aussi, l'air suppliant.

- Attendez, je vais vous donner de l'argent. Lança-t-il. Je vais vous payer. Combien voulez-vous ?

Les sirènes des voitures de police se garant juste devant le café résonnèrent et Yoongi se dirigea vers la porte tranquillement.

- C'est la partie où vous avez fait erreur, Rohit. Répondit-il calmement. Je n'en ai rien à foutre, de l'argent.

Et quelques secondes suffirent pour qu'il remette sa capuche et se glisse à l'extérieur de l'établissement, croisant au passage les agents venus arrêter ce charmant Ron.

Tu es sûr que c'est une bonne idée de le laisser nous échapper ?

Caché dans l'obscurité, appuyé contre un mur, Yoongi regardait Ron se faire pousser à l'arrière d'une des voitures de police.

- Tu sais ce qu'on fait aux types comme lui en prison ? Rétorqua-t-il calmement.

Il se lécha les lèvres, son ventre se contractant agréablement.

- Puis, s'il est encore en vie une fois que ses nouveaux compagnons en auront fini avec lui, nous irons lui rendre une petite visite. Après tout, les amis sont là pour ça, non ?

Wrath laissa son rire sadique s'élever à nouveau.

Il était vraiment tombé sur la perle rare.

Les sirènes s'éloignèrent, se perdant dans la circulation et Yoongi s'enfonça en sens inverse, vers les rues plus calmes, car « malfamées ».

Le genre de rues où les enfants comme lui ne devaient surtout pas traîner.

C'est ce qu'on lui répétait toujours.

Il faisait très jeune et encore aujourd'hui, on le prenait pour un adolescent.

On lui demandait tout le temps sa carte d'identité, on l'appelait « gamin » et lui répétait sans arrêt qu'il y avait un couvre-feu pour les mineurs.

Était-ce dû à sa croissance avortée ?
À son lien avec Wrath ?
Au deux ?

Peu importe, c'était assez utile vu le genre de monstres qu'il traquait.

Tous ces gens, n'étaient-ils pas adorables de s'inquiéter pour lui ?
De se soucier de sa sécurité et de son bien-être ?

N'était-il pas chanceux d'avoir tant de monde concerné par son innocence ?

Maintenant, qu'il n'avait absolument plus rien à perdre.
Maintenant, qu'il était grand, fort et capable de se protéger seul.

Où étaient-ils tous, lorsqu'il avait vraiment eu besoin d'eux ?

Toutes ces personnes si promptes aux conseils et aux leçons de moral, que faisaient-elles, lorsqu'il était livré à lui-même ?

Lorsqu'il était encore capable de ressentir, désirer et espérer ?

Et si là, tout de suite, il se faisait agresser, est-ce qu'un seul d'entre eux lui viendrait en aide ?

Ou bien, fermeraient-ils simplement les yeux, comme le monde l'avait fait pour l'orphelinat isolé dans les montagnes, où il avait perdu son âme ?

Yoongi connaissait bien évidemment la réponse et ça ne faisait qu'accentuer la haine et la colère de Wrath.

Tue-les !
Tue-les tous !

Tous ces hypocrites et leurs mensonges, ces nuisibles bruyants et sans intérêt.

Tous ces êtres humains !

ÉLIMINE-LES !

Pourquoi t'infliger leur présence ?

- Commençons déjà par retrouver toutes les pourritures qui faisaient leur marché à l'orphelinat. Murmura Yoongi. Je n'aurai de toute façon certainement plus l'occasion de voir un être vivant après ça.

Jung Kook aimait la nuit et avait peur du noir.

Marcher seul dans des ruelles sombres, il adorait, mais être enfermé dans une pièce sans lumière, ça le terrorisait.

Voilà pourquoi il se promenait jusque très tard, voire très tôt, avant de rentrer s'endormir, sa veilleuse allumée.

Marcher l'empêchait de trop penser, de trop se focaliser sur certaines idées, certaines envies.

Même si risquer de croiser du monde était dangereux.

Il évitait toujours les lieux fréquentés et s'enfonçait dans des zones sinistres que la plupart des gens évitaient, mais parfois, ça ne suffisait pas.

Comme ce soir.

Il était passé, sans y prêter attention, non loin d'un bar gay et voilà qu'il se retrouvait suivi par une bande d'abrutis, sans doute de sortie pour « casser du pd ».

Il avait accéléré le pas, déjà bien assez tendu par tout le désir, la luxure et le sexe qui transpiraient de l'établissement, mais les autres n'avaient pas abandonné et il se retrouvait intoxiqué par leur haine et leur envie de violence.

Son sang bouillonnait.

Il serra les poings et ferma les yeux, avant de courir, tentant de mettre le plus de distance possible entre lui et ceux qui nourrissaient son dégoût.

Excitaient son appétit.

Est-ce qu'il avait vraiment envie de les épargner ?

Alors pourquoi l'avaient-ils rattrapé ?

Il aurait facilement pu les distancer et pourtant, cette main posée sur son épaule était bien celle du prétendu chef de la petite bande d'inconscients.

Ce simple contact suffit.

Une fraction de seconde et la folie prenait le dessus.

Jung Kook ne supportait pas qu'on le touche, le moindre contact était pour lui une agression.

Ren et Yoongi avaient vécu la même chose que lui, mais chacun réagissait différemment.

La blonde se laissait toucher sans retenu, malgré le dégoût éprouvé à chaque caresse, persuadée qu'ainsi, elle serait aimée.

Yoongi utilisait son corps et le sexe pour atteindre ses objectifs, capable, comme pour tout le reste, de se détacher complètement de toute émotion et sensation.

Il était même, le seul à pouvoir réellement ressentir du désir et du plaisir.

Certes, dans des conditions que beaucoup jugeraient étranges, voire malsaines, mais au moins, il pouvait.

Alors que lui, la simple idée d'un contact, même involontaire, provoqué par un mouvement de foule, le rendait malade.

Il devait à chaque fois lutter pour ne pas laisser la bête en lui prendre le dessus.

Alors, le sexe ?
Le désir ?
L'envie ?

Il ne comprenait pas que des horreurs pareilles puissent exister. Que la plupart des gens puissent les apprécier, les rechercher même.

Devoir vivre dans ce monde infecté par des animaux en rut, guidés aveuglement par leurs libidos, était pour lui, la pire des choses.

Il avait quitté l'orphelinat, mais s'était retrouvé dans un univers tout aussi inquiétant, écœurant et dangereux.

Le même genre de monstres, mais cent fois, mille fois, dix mille fois, plus nombreux !

Des millions de prédateurs, avec la terre entière pour terrain de chasse.

Pourquoi ne pas simplement tout détruire ?
Pourquoi perdre leur temps à faire au cas par cas ?

Tout le monde était de toute façon coupable de quelque chose et ils n'étaient pas des héros en quête de justice.

Aucun humain ne méritait de vivre.

Il soupira.

Et voilà, tous ses efforts étaient ruinés maintenant !

C'est pour ça qu'il sortait marcher.
Pour faire taire ces voix.

Et ces abrutis, avaient tout gâché !

Jung Kook se stoppa net, la main de l'inconnu encore sur son épaule.

Il leva alors son bras sans se retourner, appuyant la paume de la sienne sur la nuque de l'imprudent qui osait le toucher, puis il serra fort, lui arrachant un puissant cri.

Sans le moindre effort, il le souleva ainsi, faisant basculer son corps par-dessus le sien, pour le jeter au sol, juste à ses pieds.

Son regard, si particulier, se planta dans celui de sa victime, qui suffoqua, la terreur s'emparant de tout son être, puis il appuya la semelle de ses bottes de motard sur sa gorge.

Le reste de la bande réagit enfin.

Un grand blond s'élança, cognant de toutes ses forces son crâne avec une batte de baseball.

Il ne broncha pas, son pied s'enfonçant simplement plus profondément dans la trachée de sa proie.

Doucement, il tourna la tête vers son agresseur, le sang de sa plaie coulant sur son œil, donnant l'impression qu'il pleurait des larmes vermeilles.

Le blond était pétrifié, son arme brisée entre ses mains tremblantes, il regardait le sourire amusé de Jung Kook, qui se léchait les lèvres.

Il allait mourir.
IL ALLAIT MOURIR !

C'était comme si une voix hurlait dans son esprit que peu importe ce qu'il ferait, il allait mourir ici.

L'un de ses amis, un grand roux costaud, s'avança avec un couteau, arme volée à son père qui était boucher et un autre plus petit, mais trapu, enfila son poing américain.

Toujours aussi calme et presque immobile, Jung Kook contra les deux attaques. Clairement excité par la situation, il saisit le poignet où brillait la lame et emprisonna le poing dans la paume de son autre main, malgré la violence du coup.

Chacun des deux agresseurs tenta de se dégager, mais aucun ne réussit.

Le brun observa de longues secondes le roux, jusqu'à ce qu'il sente la terreur suinter par chacun de ses pores, puis il le tira vers lui, dirigeant volontairement le couteau vers son propre torse.

L'autre écarquilla les yeux, hypnotisé par la lame s'enfonçant dans la poitrine qu'il n'avait pas réussi à atteindre.

Est-ce que cet homme était vraiment en train de se poignarder en utilisant son arme ?

Ses partenaires semblaient se poser la même question, leurs expressions oscillant entre horreur et stupeur.

Jung Kook continua simplement de glisser la lame et quand elle fut presque entièrement en place, il attira le roux contre lui, comme pour l'enlacer.

Il y avait certaines situations où les contacts ne le dérangeaient absolument pas.

L'autre hoqueta.

Il sentait le sang poisseux glisser entre ses doigts, pourtant le brun était bel et bien debout, lui tapotant le dos comme il aurait pu le faire avec un enfant, tandis que sa main libre emprisonnait toujours le poing de son ami, qui ne tentait même pas de bouger.

Jung Kook lui caressa les cheveux, dégageant sa nuque, avant de soudain planter ses dents dans la peau de son cou.

Le roux hurla, sentant sa chair se faire déchiqueter, puis complètement arracher, tentant de se débattre, tandis que son agresseur affamé, donnait l'impression de vouloir le dévorer.

Son ami bougea enfin, criant à son tour, se débattant pour libérer son poing et fuir le plus loin possible, mais il n'eut le temps de rien.

Tout fut trop rapide.

Jung Kook laissa retomber son « encas » au sol, retira d'un geste vif l'arme enfoncée près de son cœur et avant que l'autre puisse se réjouir d'avoir récupéré sa main, il la lui trancha, d'un coup sec.

Aucun cri, pas le temps pour ça.

La seconde main disparue et enfin la tête.

Il rit.

C'était tellement « cool » de pouvoir faire de telles choses avec un simple couteau.

À ses pieds, il remarqua enfin que le chef était déjà mort et il grimaça, déçu.

Seul, restait le blond, toujours figé au milieu des corps sans vie de ses amis, sanglotant, sans pour autant chercher à fuir, son corps refusant de lui obéir.

Jung Kook lâcha le couteau pour se tourner doucement vers lui, la bouche barbouillée par le sang du roux, les mains et le front pleins du sien, son regard étincelant d'une lueur folle.

Il souriait et l'autre ferma les yeux, soulagé, d'une certaine manière, d'être au moins capable de ça.

Il ne vit donc pas sa batte brisée reprendre sa forme initiale lorsqu'elle lui fut ôtée des mains, pourtant un frisson plus puissant lui échappa, comme s'il avait senti que quelque chose qui l'aurait davantage terrifié, venait de se passer.

Le brun inspira profondément, ouvrant grand les bras, le regard fixé vers le ciel sans étoile.

Il avait juste besoin de se détendre un peu.

D'abord les genoux qui cédèrent, faisant tomber le blond au sol.

Puis l'estomac et le dos, lorsque sa victime se courba vers l'avant et ensuite, le vide.

Il ne réfléchit plus, son regard couvert d'un voile pourpre, tandis que le sang du jeune homme lui explosait presque à la figure, sous la violence de ses coups.

Il frappa fort, longtemps et avec appétence, jusqu'à ce que lui et sa bête soient repus.

Jusqu'à ce que les voix ne soient plus.

Il rit encore.

C'était beaucoup mieux que de marcher.

Doucement, son regard balaya la petite impasse.

- Il manque quelque chose. Souffla-t-il finalement.

Il sentit la présence de Taehyung à quelques pas derrière lui et quelques secondes après, la pluie fit son entrée.

Il ferma les yeux, un sourire apaisé aux lèvres.

Son démon faisait vraiment de lui un gosse capricieux.

- Oui, comme ça, c'est parfait.

La pluie accentuait l'odeur du sang, offrant, d'après lui, un aspect plus sauvage, plus animal.

Tout était sans doute dans sa tête, mais ça n'avait pas d'importance.

Pour lui, aucun parfum n'était plus doux que celui qui chatouillait ses narines dans ces moments magiques, où cette eau tombée du ciel, censée, pour certains, laver tous les péchés, se mêlait au liquide vermeille, né de l'horreur de ses crimes.

Il rit de plus en plus fort, ravi de sentir ses vêtements trempés lui coller à la peau.

À genoux dans une flaque rouge claire qui grossissait doucement, il caressa le sol, appuyant pour laisser l'empreinte de ses mains dans la boue colorée.

Il se sentait mieux. Tellement mieux.

Maintenant, il pouvait rentrer et dormir.

Un cri d'horreur fit éclater sa bulle.

Au bout de la ruelle, à quelques pas de lui et des cadavres, une jeune femme hurlait, terrifiée par cette vision d'horreur.

Elle fit tomber son parapluie, trébucha et fuit en courant, abandonnant l'une de ses chaussures au passage.

Après ça, le silence revint et Jung Kook attendit quelques secondes, avant de finalement réagir.

Il soupira doucement.

- Yoon va être très en colère. Murmura-t-il d'une voix enfantine.

La phrase en elle-même était étrange.

Le blond n'allait pas hurler, briser des choses ou laisser une quelconque émotion transparaître, le terme « en colère » pouvait donc paraître ridicule, mais ça n'empêchait pas Jung Kook d'être réellement inquiet.

Taehyung s'avança jusqu'à lui, s'accroupissant à ses côtés, leurs épaules se touchant et il ne bougea pas.

L'autre pouvait le toucher, ça ne l'avait jamais énervé ou dégoûté.

Il ne pouvait pas dire qu'il appréciait, mais aucune voix ou désir de destruction ne l'envahissait lorsque c'était son démon qui amorçait un contact.

Parce qu'ils étaient liés ?
Parce qu'il n'était pas humain ?
Parce qu'une créature aussi puissante ne ressentirait jamais le moindre désir ou sentiment dangereux pour le monstre pathétique qu'il était ?

Jung Kook tourna légèrement la tête, observant le profil de son « partenaire ».

Il ne comprenait pas.

Bien qu'il se contente de copier l'apparence de Yoongi, Wrath était effrayant.

Shemar et son physique d'Apollon bodybuildé, était aussi très impressionnant.

Mais Taehyung.

Taehyung avait l'air d'une gravure de mode.

Et pas le genre de gravure avec un côté démoniaque qui invite au massacre.

Le genre avec un sourire éclatant et des mimiques et grimaces d'enfant adorable à qui personne ne résiste.

Il avait l'air inoffensif, fragile même.

Un espèce de poète rêveur, de Peter Pan coincé en enfer, dont il fallait prendre soin.

Est-ce que c'était normal pour un être démoniaque, d'avoir un sourire aussi innocent ?

Pourquoi est-ce qu'il avait l'impression que c'était à lui de protéger le démon et non l'inverse ?

Apparemment, « on » l'avait appelé Rage, surnom aussi ridicule que Wrath.

Au début, il avait ri, amusé qu'une apparence aussi douce, puisse porter un tel nom.

Puis ensuite, il avait compris.

Taehyung était comme lui, il avait un interrupteur.

Un bouton invisible qui lui permettait de passer d'un être effacé, à une créature sans pitié, assoiffée de violence.

Seulement lui, il était effrayant même en mode « off », même lorsqu'il tentait de se fondre dans le décor.

Tout chez lui rappelait qu'il était un monstre.

Alors pourquoi est-ce qu'un démon comme Rage, avait une apparence aussi douce ?

Était-ce réellement son corps ?
Ou l'avait-il choisi pour tromper les humains et pouvoir, comme Yoongi, endormir leur méfiance ?

Taehyung était toujours tellement gentil avec lui.

Cédant à toutes ses envies, lui passant le moindre caprice, restant près de lui la nuit, apaisant ses angoisses, effaçant ses cauchemars.

Pourquoi ?

Il n'y a que lorsqu'il tuait, que lorsque le sang coulait, qu'il ressentait pleinement le sadisme, la haine et le désir de destruction de Rage.

Il n'y a que dans ces moments-là qu'il se souvenait qu'il était un monstre, lié à lui dans un but précis et que leur relation avait une date de péremption.

Est-ce que c'est pour ça qu'il ne voulait pas se souvenir de ces mots qui obsédaient tant Yoongi ?
Est-ce qu'il ne voulait pas devoir dire au revoir à Taehyung ?

Avait-il fini par réussir l'exploit de s'attacher, ou avait-il seulement peur de perdre la puissance et l'enivrante folie du démon ?

Cela faisait bien dix ans qu'il se posait ce genre de questions, sans qu'aucune réponse ne lui vienne.

Il avait décidé de « faire avec », mais parfois, lorsque Taehyung était aussi près, lorsqu'il se sentait étrangement réconforté par sa présence, les questions revenaient le perturber.

L'objet de son tourment se releva et Jung Kook prit enfin conscience du vide qui se trouvait devant lui.

Les cadavres et le sang avaient disparu.

Wrath saurait évidemment, mais Yoongi ne serait pas contrarié.

Qu'il tue ou non, le blond s'en fichait, il fallait juste ne pas se faire remarquer.

Taehyung s'était éclipsé et le brun sourit avant de se décider à rentrer.

Il s'enfonça dans la ruelle, cherchant toujours des coins déserts, jugeant qu'il s'était assez « détendu » pour cette nuit.

Au bout d'une dizaine de minutes, alors qu'il s'apprêtait à tourner à droite, pour prendre un raccourci vers le bar, il se figea, sentant une force l'attirer vers la gauche.

Il fronça les sourcils, mais obéit, comme toujours, à son instinct, accélérant même le pas, pressé de voir quelle était et d'où venait cette chose qui l'appelait.

Plus il avançait, plus il se sentait fébrile, sa faim, qu'il pensait comblée, lui tordant à nouveau doucement le ventre.

L'enseigne à moitié cassée fut la première chose qu'il vit et ensuite, il sentit une présence familière.

Ren était dans ce pub.

Mais ce n'était définitivement pas ce qui l'amenait ici.

Il n'avait pas pour habitude de se faire du souci pour la blonde, cela reviendrait à s'inquiéter pour Shemar.

Qui serait assez stupide pour s'inquiéter de la sécurité d'un démon sanguinaire ?

Certainement pas lui.

Alors que faisait-il ici ?

Soudain, une silhouette se détacha d'un mur et quelque chose en lui gronda.

L'homme, car il était sûr que ça en était un, avançait vers lui d'un pas lent, mais assuré et étrangement, Jung Kook ralentit, comme pour faire durer le moment.

Ils allaient sans doute se frôler.

Sa marque à la poitrine le brûla et il y porta machinalement la main.

Son démon était vraiment contrarié, tout à coup.

Est-ce qu'il devait tuer cet homme ?

Pourquoi est-ce que ce qu'il ressentait n'était pas plus clair ?

Tout son être semblait haïr l'homme qui n'était plus qu'à quelques pas de lui, alors pourquoi est-ce que les choses restaient aussi maîtrisées ?

Jung Kook cessa presque de respirer, complètement sur le qui-vive, à l'affût du moindre signe, mais l'inconnu passa rapidement près de lui, sans le toucher, sans même lui jeter un regard.

Il n'était pas sûr que l'autre l'avait remarqué en fait.

Il sentait l'alcool, la colère, l'amertume, les regrets, la honte et une lassitude écrasante.

Non, il n'allait pas le tuer.

Instinctivement, le brun se retourna, observant la mystérieuse silhouette s'éloigner dans la nuit, toujours aussi perdue dans son monde.

- Je n'aime vraiment pas les flics. Souffla-t-il finalement, la tension dans sa poitrine apaisée.

Namjoon ferma la porte de son appartement, soulagé d'être enfin « chez lui ».

Juste une pièce et une minuscule salle de bain.

Pas de cuisine, de meubles ou d'objets personnels.

Un matelas au sol, un ordinateur et des centaines de dossiers empilés, éparpillés dans tous les coins de la pièce.

Puis évidemment, ses photos.

Des dizaines et des dizaines de clichés tapissaient tout « l'appartement », le moindre recoin, le moindre petit bout de mur.

Des scènes de crimes.

Les plus horribles, violentes, obscènes, immondes, douloureuses et cruelles.

Sa collection pour monstre.

Personne ne savait qu'il avait toutes ces copies et personne ne saurait jamais.

Il retira rapidement son blouson, allumant la petite ampoule grésillante, avant de saisir un pack de bières.

Une canette à la main, il s'avança vers son matelas, montant dessus pour se rapprocher du mur contre lequel il était appuyé, ou plutôt, des clichés qui y étaient affichés.

Ceux-là étaient particuliers.

Précieux.

À chaque fois que son regard se posait sur l'un d'eux, son corps entier réagissait.

C'était doux et violent à la fois.

Des sensations qu'il ne pouvait même pas nommer le traversaient, l'amenant même parfois au bord du plaisir.

C'était malsain. C'était sale.
Et c'était absolument jouissif.

Il avait sous les yeux des cadavres, des corps torturés, meurtris, humiliés et pourtant, tout lui semblait si vivant, si passionné, qu'il perdait toute notion du temps, lorsqu'il regardait ces photos.

S'il n'avait pas eu ce « léger » souci avec l'un de ses collègues, il aurait pu être consultant sur l'affaire et vivre en direct la découverte des cadavres, mais évidemment, son problème de « communication » avait retardé ses plans.

Mais ce n'était pas grave, il savait que bientôt, ses supérieurs lui demanderaient de jeter un coup d'œil aux dossiers et l'inviteraient à enquêter sur ces cas.

Après tout, c'était lui qui avait permis à tous ces idiots de comprendre que des centaines de cas similaires, étendus sur plusieurs années, étaient liés au premier cadavre découvert dans leur juridiction, il y a six mois.

Ils étaient plusieurs, c'était certain et il était le seul à avoir trouvé un lien entre ces crimes, aux modes opératoires différents.

Certains le pensaient fou, mais il savait que sa théorie était la bonne.

Ils étaient trois.
Ils formaient une bande de tueurs.
Et chacun avait sa façon de faire.

Mais Namjoon n'était réellement intéressé que par « l'artiste » du groupe.

C'était lui qu'il rêvait d'arrêter, lui dont les œuvres peuplaient ses rêves et ses pensées.

Mais est-ce qu'il pourrait le faire ?
En était-il capable ?

Cette fois-ci, sa proie était très spéciale, très précieuse.

Elle était même célèbre, recherchée de par le monde.

Alors que lui, il était banal.

Juste un anonyme de plus.

Même dans sa différence, il était insipide.

Tellement vide et tellement seul.

Il caressa à nouveau les clichés, puis se laissa glisser doucement. Sentant ses larmes lui échapper, il s'assit contre le mur, les genoux ramenés contre sa poitrine.

Il détestait lorsqu'il était incapable de supporter sa solitude.

Il pleurait trop souvent en ce moment, toutes les deux semaines exactement et il ne savait pas comment gérer ça.

Que faisaient les personnes normales, lorsqu'elles étaient tristes ?

Il supposait qu'elles se tournaient vers leur famille et leurs amis.

Pour lui, ce n'était pas une option.

Mais il avait la morphine.

La clé pour en prendre sans se transformer en junkie, était de se limiter à trente milligrammes par jour.

Recroquevillé sur son matelas, il ferma les yeux, les images de sa précieuse collection dansant sous ses paupières, l'emportant loin de son appartement vide et pourtant si bruyant.

Il planait.

Se sentant au-dessus de tout.

Et c'est pour ça que lorsque sa mère appela pour lui demander un service, il oublia une règle fondamentale.

« Ne jamais prendre de décision sous morphine »

Ren et Jung Kook regardaient l'androgyne installé en face d'eux, peinant à croire qu'il était réellement flic.

Ce dernier parlait d'une voix douce, leur expliquant que si la « victime » ne portait pas plainte, alors, une fois leur caution payée, ils pourraient partir.

La blonde frissonna, tirant sur les manches de son pull en cachemire et son partenaire sut ce qui lui faisait peur.

C'est Yoongi qui devait venir les chercher.

Le blond était responsable d'eux.

C'était le seul qui comprenait le monde autour d'eux, qui arrivait à entretenir l'illusion.

Eux étaient perdus, totalement incapables de se débrouiller seuls.

Ils ne savaient même pas pourquoi quelqu'un devait venir, alors qu'ils étaient majeurs, ni pourquoi ils avaient le droit de sortir si on payait pour eux.

Rien n'avait de sens.

Ils n'étaient même pas capables de dire si les choses se passaient comme ça pour tout le monde, ou si leurs démons y étaient pour quelque chose.

Après tout, c'était de leur faute s'ils se retrouvaient dans ce commissariat.

Jung Kook fronça les sourcils, cherchant encore à se souvenir de ce qui s'était passé.

Tout était flou.

Il se voyait au volant d'une voiture qui n'était évidemment pas la sienne, Ren à côté de lui, ses longs cheveux blonds flottant par la fenêtre grande ouverte et derrière eux, le propriétaire de l'auto qui courait, dans l'espoir ridicule de les rattraper.

Le brun n'avait jamais conduit de voiture, pourtant, il avait roulé sans problème jusqu'au poste de police où lui et la blonde s'étaient apparemment rendus.

À quoi jouaient Shemar et Taehyung ?

Sur ce coup-là, Wrath ne pouvait pas les tenir pour responsable, ils avaient été manipulés par leurs démons.

Jeong Han soupira.

Les deux suspects n'avaient pas dit un seul mot et semblaient aussi surpris qu'eux de leur virée en voiture.

Le seul moment où ils avaient réagi, c'était à l'arrivée de Namjoon, qui s'était, comme toujours, effondré à son bureau, pour se plonger dans ses dossiers.

Un nouveau corps avait été découvert, et même si le brun n'était pas encore officiellement sollicité sur l'affaire, tout le monde savait que de son côté, il travaillait déjà dessus.

Et personne ne disait rien, car il était évident qu'on finirait par faire appel à lui.

Ren s'était tendu en reconnaissant l'homme qui l'avait ignoré il y a quelques jours au bar, la plongeant dans une horrible bulle sombre.

Elle n'avait rien avalé, cherchant même à vomir les quelques verres de tequila perdus au fond de son estomac vide.

Le premier homme venu n'avait pas été suffisant pour combler le manque, mais elle ne se souvenait même plus de combien ils étaient.

Trois ?
Cinq ?

Qu'importe.

Comme toujours, elle avait été docile et obéissante.

Elle avait fermé les yeux et fait de son mieux.

Mendiant pour un compliment, un geste, un regard, une marque quelconque d'intérêt.

Et lorsqu'ils avaient quitté la chambre miteuse, louée à l'heure, la laissant seule au milieu des draps sales, elle avait, une fois de plus, eu l'impression de ne pas être assez bien.

Pourquoi n'y arrivait-elle pas ?
Qu'est-ce qui était aussi écœurant et indigne d'être aimé chez lui ?

Nu, elle avait observé un long moment son corps dans le miroir.

Griffant ses longues jambes fines à ses yeux difformes, frappant son ventre plat qu'elle jugeait trop gras, ses bras fermes qui, d'après elle, pendouillaient et ses joues creusées, qu'elle trouvait bouffies.

Son absence de poitrine l'avait laissée indécise, partagée entre l'envie d'un bonnet profond et celle de muscles mieux dessinés.

Pourquoi n'avait-elle pas plus de fesses ?
Plus de hanches et de courbes féminines ?

Pourquoi manquait-elle de virilité et de charisme ?
Pourquoi avait-elle l'air si faible et banale ?

Tout et son contraire.

Pas assez femme.
Pas assez homme.

Trop grosse.
Trop mince.

Pas assez délicate.
Trop fragile.

Comment pouvait-elle s'aimer dans ce genre de condition ?

Comment atteindre une perfection qu'elle était incapable de définir ?

Elle détestait haïr l'homme et la femme en elle. Lorsque les deux lui étaient insupportables et que l'idée d'être une anomalie devenait insoutenable.

Qu'on l'insulte pour ce qu'elle était, ne la gênait pas, mais être ignorée, lui faisait complètement perdre le fil.

Dans ces moments-là, il ne savait plus du tout qui « elle était ».

Et cet homme qui lui avait fait tant de mal, sans prononcer le moindre mot, sans même lui accorder un regard, se trouvait juste là, alors qu'elle se remettait à peine du chaos qu'il avait provoqué.

Elle frotta nerveusement la marque sur sa hanche, les ongles de son autre main enfoncés dans sa cuisse.

Jeong Han lui offrit un regard compatissant, qu'elle ne vit pas.

Le jeune inspecteur se souvenait d'elle et du comportement de son partenaire et il sentait sans mal que la jolie blonde n'était pas réellement une femme fatale, à qui personne ne résiste.

Ce n'était pas son orgueil qui avait été blessé, c'était bien plus profond et sombre que ça.

"I Know girls who are trying to fit into the social norm, like squeezing into last year's prom dress.
I know girls who are low rise, mac eye shadow, and binge drinking.
I know girls that wonder if they're disaster and sexy enough to fit in.
I know girls who are fleeing bombs from the mosques of their skin, playing Russian roulette with death.
The funny thing is women like us don't shoot.
We swallow pills, still wanting to be beautiful at the morgue.
Still proceeding to put on make-up, still hoping that the mortician finds us fuckable and attractive. Our bodies deserve more than to be war-torn and collateral.
Offering this fuckdom as a pathetic means to say,"I only know how to exist when I am wanted."
Girls like us are hardly ever wanted, you know. We're used up and we're sad and drunk and perpetually waiting by the phone for someone to pick up and tell us that we did good.
Well, you did good."

Jung Kook aussi, avait reconnu Namjoon, ou plutôt, reconnu ce "truc" que l'homme dégageait.

C'était lui qu'il avait croisé dans cette ruelle, lui qui avait excité brièvement son appétit et éveillé la face sombre de Taehyung.

Est-ce que c'était pour lui qu'ils étaient là ?

Ses questions se dissipèrent à l'instant où il sentit la présence de Yoongi.

Parfaitement synchronisés, Ren et lui se tournèrent vers le fond, pour tomber sur la silhouette particulière du blond, non loin de la porte.

Un homme en uniforme lui parlait, mais il était concentré sur eux et la blonde expira en se tortillant sur son siège.

Finalement, l'officier s'avança rapidement vers le bureau de Jeong Han, se penchant pour lui expliquer des choses qu'ils n'entendirent pas, trop absorbés par le visage impassible de leur « ami ».

- C'est excellent, la victime ne porte pas plainte !

L'androgyne semblait vraiment heureux pour eux.

Quel drôle de flic.

Jung Kook n'était pas surpris.

Si Yoongi lui avait parlé, alors forcément, il n'allait pas porter plainte.

Personne ne disait non au jeune homme.

Wrath ne supportait pas les refus.

Lorsque le blond les rejoignit enfin, Jeong Han ne put cacher sa surprise et Ren sourit, presque malgré elle.

Oui, un « responsable » avec une telle allure, ça surprenait toujours.

- Il a vingt-cinq ans. Précisa son collègue en uniforme, comme s'il lisait dans ses pensées.

L'androgyne se reprit.

- Oh, bien !

Il sourit, gêné.

- Puisque la caution est payée, tout est en règle. Ajouta-t-il.

Yoongi hocha simplement la tête et les deux autres se levèrent en même temps, prêts à partir.

Mais l'immense tableau blanc, couvert de photos, attira soudain l'attention du blond, qui sentit Wrath jubiler.

Doucement, le regard fixé sur les images que la plupart des gens fuyaient, il se rapprocha.

Des scènes de crimes sanglantes.
Des corps mutilés.
Des mises en scène morbides.

Et toujours le même message.

- Sois un gentil garçon... Murmura-t-il.

Jeong Han sursauta, se précipitant pour tourner le tableau.

- Ah désolé ! S'exclama-t-il. Je n'arrête pas de répéter qu'il faut cach...

La main de Namjoon l'interrompit.

L'androgyne secoua un peu la tête, comme s'il allait sortir d'un rêve.

Le brun l'avait empêché de couvrir les photos, le regard fixé sur Yoongi, toujours perdu dans sa contemplation.

- Un gentil garçon... Répéta ce dernier.

Aucune émotion ne transparaissait, mais Namjoon frissonna, le laissant toucher les photos du bout des doigts, comme lui-même avait l'habitude de le faire.

Il se mordit la lèvre.

C'était comme observer quelqu'un se caresser, avec comme support, une partie de vous.

Fascinant.
Hypnotique.

Et très excitant.

- NAMJOON ! Cria Jeong Han.

Il grimaça.

Comme si ce n'était pas assez bruyant.

L'intervention de l'androgyne ne sembla pas vraiment gêner Yoongi qui tourna simplement la tête sur le côté, sentant sa marque à la main le démanger.

Lorsque leurs regards se croisèrent, tout disparut autour d'eux.

Mais ça n'avait rien de romantique.

Pas de coup de foudre, de papillons dans le ventre, de violons ou de frissons incontrôlables.

Pour Namjoon, c'était bien mieux que ça.

Le silence. Le silence absolu.

Toute la pression, les douleurs et le stress que son monde si bruyant lui procurait, venaient de s'envoler, comme par magie.

Laissant place à un calme parfait.

Une plénitude totale.

Lui qui évitait les autres, qui craignait leur regard où se jouaient des mélodies agressives et douloureuses, il se noyait sans retenu dans celui de Yoongi.

Vide.

Il n'avait jamais rien vu d'aussi vide.

Il n'aurait même jamais cru que des yeux pareils puissent exister.

Et le plus incroyable, c'est que malgré tout, ils n'étaient pas inexpressifs.

Ce n'était pas un regard morne ou insipide et pourtant, il n'y lisait absolument rien.

Et c'était reposant pour lui.

Magique.

Comme s'il venait enfin de trouver une force capable de faire taire le monde entier.

De faire disparaître les autres.

Tous ces autres qu'il avait si souvent souhaité pouvoir exterminer.

Yoongi sentit que c'était enfin le moment.

Il ne savait pas encore ce que ça voulait dire, ni ce que cette impression annonçait, mais il était persuadé que maintenant, le temps était compté.

Il avait presque entendu un « tic-tac » susurré à son oreille.

Wrath était étrangement silencieux, alors qu'il sentait son excitation prête à exploser.

Sa marque le brûlait, sa main à deux doigts de s'enflammer pour se libérer du gant en cuir devenu gênant.

Ces mots qu'il désirait tant, ces quelques mots dont il voulait tellement se souvenir.

Ils étaient là.

Sur le bout de ses lèvres ou de celles de l'homme en face de lui, mais juste là.

À sa portée.

Sa mâchoire se crispa et il fronça les sourcils.

Il allait se souvenir. Il devait se souvenir !

"Bientôt. Mais pas tout de suite."

Et cette phrase, susurrée par Wrath, suffit à ramener Yoongi sur terre.

Il brisa le contact visuel, s'éloignant rapidement, en offrant un rapide « bonne journée » à Jeong Han, qui ne réagit même pas, concentré uniquement sur son partenaire, au comportement si inhabituel.

Namjoon crispa ses mains sur son crâne, tirant sur ses cheveux en grimaçant, agressé par le retour violent du reste du monde.

Sa bulle magique et silencieuse avait disparu en un éclair et le retour à la réalité était aussi brutal que douloureux.

- Est-ce que ça va ? Lui demanda son collègue, inquiet.

Il l'ignora, comme toujours, tirant rapidement le tiroir de son bureau pour y sortir sa bouteille de bourbon.

Son monde était bien plus horrible maintenant qu'il avait eu un aperçu de ce que le paradis était.

Oui, l'enfer, c'était vraiment les autres.

"Oh my, look at those eyes, look at the trouble that they hide inside.
I see the flicker of the pain on the rise.
Oh my, look at those eyes. But maybe they're like mine, things I wish I did not see.
I push away all the dirt and debris but what'll be left of me...?"

L'homme se laissa entraver, les deux mains attachées dans le dos, à l'aide de sa cravate.

Il ne comprenait pas comment ni pourquoi il s'était retrouvé chez lui, appuyé contre l'une des tables du salon, avec une érection monstrueuse, au lieu d'être, comme prévu, dans son jet, en direction du Japon.

Pourquoi se sentait-il si excité par la situation ?
Par ce corps d'homme pressé contre lui ?

Il avait toujours aimé contrôler les choses et surtout, il avait toujours été attiré par les filles.

Les très jeunes filles, même.

Alors pourquoi bandait-il pour un garçon ?

Le blond était certes très séduisant, mais il restait un homme.

Sans compter qu'il était loin d'être une petite chose docile et soumise, prête à répondre au moindre de ses désirs.

Il s'était même fait attacher, bordel !

Qu'est-ce qui n'allait pas avec lui ?

Yoongi sentait son trouble, se délectant du combat que menait sa raison contre son désir.

Ils n'étaient jamais d'accord ces deux-là, de toute façon.

Un rire cristallin lui échappa.

Effrayant de par son « innocence ».

Il mordilla l'oreille de son partenaire pour calmer ses craintes, ses doigts glissant à l'intérieur de son pantalon de costume hors de prix.

L'autre soupira, s'asseyant sur le rebord de la table et le blond dégaina sa première lame, l'enfonçant d'un geste sec dans la cuisse de sa victime.

Évidemment, l'homme hurla, son cri résonnant dans le manoir familial désert.

Il voulut bouger, mais la poigne du « gamin » était étrangement puissante, son corps bloquant totalement le sien contre le meuble.

Ses lèvres bougèrent, prêtes à s'exprimer, mais celle du plus jeune l'en empêchèrent, sa langue s'aventurant à la recherche de la sienne.

Il ne comprenait plus rien.

Est-ce que ce gamin qui venait de le poignarder, l'embrassait ?
Et lui, pourquoi répondait-il au baiser ?

Pendant l'échange assez brutal, il sentit une autre lame, plus fine et plus longue faire sauter un à un les boutons de sa chemise, le faisant tressaillir.

Puis le bout aiguisé glissa délicatement sur sa peau dénudée et il réagit enfin, mordant la langue de Yoongi, avant de lui donner un coup de tête.

La bouche en sang, l'autre explosa de rire, sautillant comme un sportif s'échauffant.

Et c'est là, qu'il le vit.

Le jeune homme avait un double.

Mais ce dernier venait d'apparaître comme par magie, de se matérialiser sous ses yeux.

Il secoua la tête.

L'avait-il drogué ?

Wrath continua de rire, amusé par le trouble de son « hôte ».

- À quoi tu joues ? Questionna le « vrai » Yoongi.

Regarder son démon prendre son apparence pour jouer avec sa proie ne l'amusait pas vraiment.

- Rien ne t'amuse ! Rétorqua Exitium qui venait de mettre leur victime au sol.

Il observa quelques secondes l'homme qui saignait, gémir, roulé en boule au sol, avant de finalement reporter son attention sur son protégé.

- Tu ne peux pas le tuer maintenant.

Yoongi ne comprenait pas, mais il ne chercha pas à le faire. Depuis le début, il sentait que ce cas-là n'était pas habituel.

Des clés glissées dans la serrure de l'entrée attirèrent son attention et Wrath choisit ce moment pour disparaître, le laissant seul avec l'homme qui se mit à hurler.

- À l'aide ! AU SECOURS !

Et comme à son habitude, il n'eut aucune réaction.

Ni panique, ni surprise ou crainte.

Il ne tenta même pas de le faire taire.

- Papa ? Entendit-il en réponse.
- Namjoon ? Namjoon, c'est toi ? Cria sa proie. Ici !! Je suis dans le salon !

Ne jamais prendre de décision sous morphine.

Comment avait-il pu oublier cette règle ?

Sa mère lui avait assuré qu'il n'y aurait personne au manoir, surtout pas son père.

Il s'avança rapidement, bien que sans enthousiasme, même pas alarmé par les cris de son géniteur, son mal de crâne devenu soudain insoutenable.

La scène sur laquelle il tomba, le laissa sans voix.

Son père, attaché, saignant sur le parquet si précieux du manoir, avec non loin de la baie vitrée, le jeune homme qu'il avait rencontré la veille, au commissariat.

Il avait prévu de retrouver au plus vite sa bulle silencieuse, mais certainement pas dans ces conditions.

Et alors que son géniteur gémissait à ses pieds, c'est vers le blond que son regard était tourné.

Ce dernier était toujours aussi impassible, nullement inquiet qu'un inspecteur de police l'ait surpris en train de torturer son père.

- Détache-moi et sors ton arme ! Son frère est quelque part dans la maison !

Namjoon soupira en se rapprochant du blessé, s'accroupissant à sa hauteur.

- Sors ton arme et tue-moi ce putain de malade ! Hurla celui-ci.

Le brun releva la tête vers Yoongi, qui observait toujours la scène comme s'il n'était pas concerné, puis il saisit le couteau près de son père pour le libérer.

L'homme grimaçant de douleur, se retourna sur le dos.

- Ap...Appelle tes collègues... Haleta-t-il. Ils ont...voulu me tuer !

Namjoon regarda autour de lui, avant de revenir sur son géniteur, puis sur Yoongi, appréciant le cocon silencieux qui se recréait autour de lui.

Il ferma les yeux quelques secondes, comme pour être sûr que même ainsi, la magie ne serait pas brisée et un sourire fleurit sur ses lèvres lorsqu'il en eut la confirmation.

Est-ce que ce jeune homme avait vraiment les clés de son paradis ?

Il sortit son arme, l'air serein et Yoongi continua de l'observer calmement, son regard accrochant à l'embout du silencieux.

Le blessé grogna, exigeant que son fils se bouge enfin et l'aide à se relever.

Et lorsque le rire sadique de Wrath résonna, Namjoon enfonça enfin le couteau dans la poitrine de son père.

Le premier coup fut léger, mais très vite, la haine, la colère, le dégoût et les regrets, prirent le dessus.

Il frappa encore et encore.
De plus en plus fort.

Perdant toute notion de temps ou de lieu, tentant seulement de se libérer de tout ce qu'il avait gardé si longtemps en lui.

Le regard de sa sœur en mémoire, nourrissant sa rancœur, attisant sa rage et son désir de sang.

Yoongi observait la scène, complètement fasciné.

Son expression impassible effacée pour la première fois en plus de vingt-ans.

Il avait l'impression de se revoir enfant.

La lumière de la lune baignant la pièce et Namjoon au milieu, laissant enfin sa nature s'exprimer.

Avait-il déjà vu quelque chose d'aussi beau ?

Cinquante ?
Quatre-vingts ?
Cent ?

Cent-onze, il en était persuadé.

La rage du brun ne semblait pas vouloir se calmer, son visage éclaboussé par le sang exprimant pleinement le plaisir qu'il ressentait.

Yoongi sentit son estomac se contracter et son bas-ventre s'enflammer.

Il gémit, ses jambes cédant sous le poids des sensations intenses qui le submergeaient et Namjoon, à bout de souffle, se tourna vers lui.

Ils se regardèrent un instant, quelque chose d'électrique traversant la pièce.

Le brun lâcha enfin son couteau, observant avec fascination ses mains ensanglantées, un sourire extatique aux lèvres.

Puis il se releva doucement en ramassant son arme à feu.

Le blond ne le quittait pas des yeux, le regardant s'avancer vers lui avec impatience, son excitation montant d'un cran à chaque pas qui réduisait la distance entre eux.

Il resta à genoux, sachant que ce n'était en rien une position de faiblesse et un autre gémissement d'envie lui échappa lorsque Namjoon s'arrêta juste devant lui, le canon de son arme pointé à quelques millimètres de son visage.

"I used to be like you.
Like an exposed nerve of a broken tooth.
I used anything I could to insulate.
Music, books, booze. Anything I could to keep myself separate from the rest of the world. Eventually I felt protected, you know, I... I felt safe. But also... I never felt so... completely alone.
Then one day a friend, she gave me a gift.
She took away my armor. She tore down my walls. Her gift... it reminded me what it felt like... to be alive."


Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top