Chapitre 2

3 novembre 2021

Il regardait par la vitre où Annie discutait avec un médecin. Le regard brumeux, rempli par des larmes qui refusaient de couler, Armin baissa ses yeux vers ses mains. Il savait que la cause de l'accident avait été fatal et qu'Annie avait très peu de chance de se réveiller un jour. Cependant, si elle y parvenait, les séquelles allaient être importantes et la perte de mémoire totale, figurait sur la liste. Il n'était pas préparé à cela. L'homme qui avait percuté sa femme, lui avait tout pris. Plongée durant deux années dans un coma après de multiples opérations au crâne afin de reconstruire la boite crânienne qui avait explosé durant l'impact, Annie était devenue une inconnue pour elle-même. Le conducteur qui l'avait percuté, lui avait pris ses souvenirs, sa vie, tout. 

Cet homme n'avait jamais été retrouvé.

Prenant son visage entre ses mains, il éclata en sanglots dans le couloir, sous le regard interrogateur des passants. Pourquoi elle ? Elle n'avait rien fait de mal. C'était la femme la plus tendre et la plus gentille. Appréciée de tous, elle n'avait aucun ennemi et était admirée par de nombreuses personnes. Ce jour-là, elle rentrait tranquillement à la maison quand une voiture avait percuté la sienne. La carrosserie avait littéralement explosé et il ne restait rien quand il avait découvert l'état du véhicule. C'était une carcasse de ferrailles où le sang de sa femme, tapissait le volant et l'airbag. Quand il était arrivé à l'hôpital, Annie était déjà au bloc. Lorsqu'elle était sortie, on lui avait annoncé la triste nouvelle.

- Je suis désolée M.Arlert. Les chances de vie sont très minces et ce serait un miracle que votre femme s'en sorte. Nous avons réussi à reconstruire la boîte crânienne qui a été sévèrement abîmée et arrêté l'hémorragie interne. Cependant, nous avons été obligés de la plonger dans un coma pour qu'elle ne souffre pas trop. Il y a très peu de chance qu'elle se réveille un jour.

Il s'était effondré devant le médecin. Lorsqu'il était entré dans la chambre, on lui avait rasé le crâne afin de faciliter l'opération. Ses lèvres étaient abîmées et elle avait un bandage qui entourait tout le haut de sa tête. Ses bras étaient bandés où des tubes ressortaient afin de rejoindre les multiples machines qui bipaient dans la pièce.

- M.Arlert ?

Armin sortit de ses pensées et regarda le Dr.Zoe qui ferma la porte de la chambre.

- Votre femme a perdu 80 % de sa mémoire. Elle se rappelle de l'accident ce qui est surprenant mais rien d'autre. J'en suis navré. Comme je vous l'ai expliqué, l'accident a endommagé son cerveau dont les hippocampes qui gèrent la mémoire à court terme. Ce qui veut dire que lorsque votre femme va recevoir une information, elle risque de l'oublier dans la minute qui suive. Mais la mémoire à long terme a aussi été touchée, ce qui veut dire qu'elle ne se souvient pas d'évènements passés ou même de ses proches. Cependant, il est possible qu'elle la retrouve mais cela risque de prendre du temps.

Le blond ne répondit pas et avait reporté son attention sur Annie qui était restée allongée, le regard tourné vers la fenêtre.

- Je peux la voir ? marmonna-t-il en ravalant ses sanglots.

- Oui mais pas longtemps. Elle se réveille dans un monde inconnu. Elle doit retrouver ses marques. Nous allons rapidement commencer les séances de kiné et d'ergothérapie dès que le feu vert sera donné.

Il hocha la tête et entra dans la chambre où il croisa rapidement le regard d'Annie. Elle semblait s'être clamée après la crise de panique qu'elle avait faite. Si elle l'avait reconnu, il se serait jeté sur elle pour la couvrir de baisers mais il s'assît à côté et n'osa même pas la toucher. Il avait peur d'un rejet. Elle ne le connaissait pas. Il n'était rien pour elle. Il n'était plus cet homme qui avait partagé neuf ans de sa vie. Il était un parfait étranger.

- Alors... Il paraît qu'on se connaît ? Demanda-t-elle en reportant son attention sur lui.

- Oui, sourit difficilement le blond d'un haussement des épaules.

- Raconte-moi.

Il releva la tête.

- Comment nous nous sommes rencontrés ?

Le blond sourit.

- Durant nos études. Tu te rappelles de tes études ?

Annie baissa les yeux et fronça des sourcils.

- Des études de droit ?

- C'est ça, s'exclama doucement le blond en s'apprêtant à prendre sa main avant de se figer. Oui... Tu étais en licence de droit à l'Université Rose à Paris. J'étais en licence de lettres.

Il reposa sa main sur sa cuisse, triste.

- Je vivais à la     Baule mais j'étais parti faire mes études à Paris. Toi, tu     vivais déjà là-bas. Je t'avais remarqué à la bibliothèque.     Tu es une femme magnifique qui tapait dans l'œil à de nombreux     étudiants. Un jour, Je travaillais et tu t'étais installée à     mes côtés, faute de place. Tu avais posé ta gourde près de mon     ordinateur et sans faire exprès, tu y avais donné un coup de coude     quand tu t'étais penchée pour ramasser un crayon. L'eau     s'était déversée partout sur mon clavier et mes notes.

Armin s'arrêta, le sourire aux lèvres en se remémorant ce souvenir si précieux à ses yeux même s'il avait perdu un ordinateur ce jour-là. Il avait trouvé l'amour.

- Tu étais si     confuse que tu étais prête à me repayer un ordinateur. Après,     nous nous étions revus et un jour, lors de mon anniversaire     surprise organisé par mon meilleur ami, tu m'avais offert un     nouvel ordinateur.

Annie sourit en apercevant l'émerveillement dans le regard d'Armin. Cette rencontre semblait être unique à ses yeux.

- Et puis, cinq ans après, je t'ai demandé de m'épouser. J'avais vingt-cinq ans et toi vingt-six. C'était peu de temps avant... Ton accident. 

Elle ne répondit pas et se contenta de hocher la tête.

- J'étais comment ?

- Je n'utiliserai pas l'imparfait, répondit Armin en plantant ses yeux bleus dans les siens. Car tout simplement, tu es la même à mes yeux. Tu es une femme brillante et extraordinaire. La plus belle femme que je n'ai jamais rencontrée. Encore aujourd'hui, je me demande comment tu as pu faire pour tomber amoureux de moi, ricana-t-il. Tu es une femme forte qui ne se laisse jamais marcher sur les pieds. Déterminée, séduisante, douce même si tu as parfois un côté froid, solitaire et apathique avec les gens extérieurs. Cependant, avec moi, tu es une autre personne.

- Je comprends pourquoi elle est tombée amoureuse, répondit Annie, fatiguée.

Armin passa sa main dans sa nuque.

- Que fais-tu dans la vie ?

- Je suis auteur et toi avocate.

Elle haussa des sourcils.

- Avocate ? Répéta-t-elle.

- Oui. Une avocate très talentueuse qui écrase tous ses concurrents. Tu as presque remporté haut la main la plupart de tes affaires.

- M.Arlert ? Je vous demanderai de sortir afin que votre femme puisse se reposer.

- D'accord... marmonna le blond, le cœur déchiré d'être séparé à nouveau de sa femme alors que cela faisait deux ans qu'il attendait ce moment.

Il se tourna à nouveau vers Annie.

- Je... Je reviendrai demain. Promis.

Annie regarda ce parfait inconnu et se contenta de hocher la tête en silence. Il murmura un « Je t'aime », sans réponse. Brisé, Armin sortit de l'hôpital où il fut accueilli par une pluie battante. L'eau s'infiltrait dans ses cheveux blonds qui lui collaient le front. Elle se mélangeait à ses larmes. A ses larmes qui ne cessèrent de couler.

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