25. Bain

«Don't make war sound like
An exciting and thrilling
Game»

Dans les cieux encore limpides, la lune s'imposait de son éclat argenté pour quelques instants encore, avant que le soleil n'éclaire la terre, dissimulant sous son éclat l'astre d'argent qui continuerait sa route. Suivant les ténèbres de la nuit comme son ombre protectrice de cette lumière révélatrice qui aujourd'hui offrait du réconfort à nos cœurs.

Les larmes silencieuses n'avaient cessé de couler sur les visages jusqu'à ce que le campement ne se révèle. Une à une, elles sortirent de leurs tentes et à la pâleur de nos visages, elles appréhendaient l'annonce. Je laissai Skotia révéler cette perte avec l'ordre de dissimuler toute méfiance envers une attaque désirée.

Je n'entendis par leurs sanglots, leur rage, ni même l'écorce qui se détachait des troncs sous les coups enragés de certaines. La vue embrumée par mes pensées égarées, je laissai mon corps conduire mon esprit jusqu'à ma tente, laissant les pans choir derrière moi comme un linceul. Les premiers rayons du soleil baignèrent dans l'eau encore argentée du bassin. Mes doigts saisirent les pans de ma tunique qui tomba à terre avec délicatesse.

Mes orteils frôlèrent la surface, faisant frissonner ma peau tremblante avant que je ne pose mes pieds sur la première marche. Avançant avec précaution, je laissai la source entourer mon corps, l'enveloppant de ses bras apaisants. Elle engloutit mon être tout entier dans cette bulle purificatrice aussi paisible que le chant de la nature en ses beaux temps.

Je me recroquevillai dans un coin et laissai ma tête se reposer contre le mur de pierre que je caressai de mes doigts. La paroi d'un gris brillant était étrangement lisse, parsemée d'éclats de cristal qui imitaient la voûte céleste de la nuit claire. Les vagues qui se formaient à ma respiration se détruisaient contre le rebord, laissant quelques gouttes arroser l'herbe douce qui recouvrait le sol.

Une couche dans un coin faite de paille, un coffre et mes armes à ses côtés. La moitié de l'espace était occupé par cette source aussi fraîche que la brise en été, mais pas suffisante pour calmer la douleur brûlante qui martelait mon crâne. Des coups de hache incessants en écho aux démons de mes ténèbres.

Elle avait commencé, la troisième phase de cette guerre que je craignais tant. Je n'avais pas cru mon père lorsqu'il m'avait prévenu il y a cinq années, mais désormais, tout était différent. Il n'y avait plus de retour en arrière possible pour l'empêcher, si ce n'était la combattre en face. Et j'étais prête à saisir mes flèches d'or, qu'importait s'ils avaient déjà creusé ma tombe. Et Hippolyte m'enseignerait l'art de la guerre mortelle, si je ne devenais pas humaine en chemin.

Les attaques au nord, les jeunes filles, puis Hypatia. La manière dont elles avaient été assassinées n'était pas anodine, elles étaient semblables. Œuvre d'une bête sauvage aux origines surnaturelles. Une méthode de meurtre utilisé et enseigné à ses sbires par une seule et même personne. Lycaon. Il était revenu, pour la dernière fois, pour le dernier combat. Je survivrais, ou mourrais.

Je l'avais cru vaincu, disparu, j'étais dans mon tort. Dans l'ombre, il avait grandi pour frapper lorsque nul ne s'y attendait, ni même l'Olympe qui avait laissé passer. Lui qui avait permis au tyran le plus criminel, un roi sanguinaire qui sacrifiait des hommes, et cannibale, de s'échapper et de reformer une armée, et surtout, qui était à l'origine de cette malédiction devenue bénédiction.

Une race née d'un sang maudit tout comme les sorts des sorcières sur de pauvres âmes. Un poison devenu un cadeau, qui bien qu'empoisonné, offrait la puissance animale différente du sud de la mer du nord, ou des plaines de la grande île à l'ouest sans oublier l'Orient ou la Thrace.

Le transformer en lycanthrope, le premier, était aux yeux de mon père la meilleure solution après ce banquet auquel je n'avais pas assisté, encore enfant. Celui d'un âge révolu. Dans le grand roi des dieux qu'il était, même une gamine aurait su qu'accorder autant de pouvoirs n'était pas la meilleure des idées. La vengeance ne serait que plus délicieuse.

Il avait trouvé le moyen d'agrandir sa meute bestiale, celle d'un rituel qui consistait à transformer les hommes en leur faisant manger de la chair humaine. La magie obscure, presque noire, condamnatoire d'âme qui répondait son fléau créateur à travers les terres. Mon père avait découvert sa mascarade et l'avait banni à jamais, laissant le continent, déjà ravagé, s'occuper de cette affaire. Une guerre civile devenue proie de leurs canines.

Les dieux perdus après leur victoire, Lycaon avait profité pour imposer sa tyrannie. Le peuple avait cru que la guerre des forêts, la première phase, était la pire, mais la deuxième fut le cauchemar de l'enfer. Il avait été entouré des meilleurs guerriers, certains entraînés depuis l'enfance, ôtés de villages qu'il avait massacrés. Tous lui étaient loyaux, il avait su jouer avec leur conscience et son intelligence nous avais étonné, tous.

Il avait fini par s'en prendre à la Grèce, envoyant les meilleurs en Crête et la manière avec laquelle ils y sont arrivés est encore inconnue. L'Afrique ? La grande Grèce ? Le Proche-Orient, qui pourtant chacun de ses peuples nombreux étaient nos alliés et dont une autre communauté de lycanthropes pacifiques s'y trouvait ?

La question ne pouvait pas être comment, mais plutôt qui les y avait aidé. Cela restait sans importance. L'erreur fatale avait été de les avoir envoyés tous, ses plus fidèles et puissants guerriers ainsi que son bras droit. Je les avais vaincus sans encombre, il ne restait plus que les faibles qui avaient détalé.

J'avais cru la guerre finie le jour où le loquet s'était scellé dans les prisons de Chios, enfermant à jamais nos ennemis. Pourtant, me voici cinq années plus tard avec une guerre qui avait grandi dans l'ombre et qui me susurrait ses avertissements menaçants. Lycaon s'était reformé, il avait des alliés encore plus puissants qu'auparavant, mais en cinq années, je doutais qu'ils soient aussi fidèles que les précédents dont les nouvelles absentes annonçaient le mieux.

L'un de mes doigts s'enroula autour d'une mèche que j'observai avec attention. Ils étaient devenus plus foncés, du moins le bout mouillé, mais la partie aussi sèche que le désert d'Assyrie était d'un brun simple et si légèrement bouclé qu'elle ne permettait pas qu'ils soient qualifiés de lisse, juste plus volumineux sans être aussi ondulés comme mon frère et encore moins frisés. La pointe presque noire vint dessiner des arabesques sur mes bras, traçant inconsciemment les contours de la Grèce.

Un soupir s'échappa à mesure que mes réflexions revenaient m'assaillir. Le loup du nord n'était pas seul, c'était une certitude. Ils voulaient atteindre le sud en toute discrétion, mais pas suffisante pour s'empêcher de tuer à leur passage. Ils laissaient des messages clairs à l'odeur métallique qui empreignait les narines de leur terreur, enfermant les innocents dans leur maison, en attente que la guerre défile sous leurs yeux impuissants.

L'Olympe n'avait toujours pas sonné l'alerte, et cette simple constatation accentuait mon combat intérieur qui fracassait ses coups sur la surface de ma tête. Je n'en oubliai pas non plus Athènes et ses secrets, mais Athéna s'en chargeait. Mais si elle apprenait pour Hippolyte... Cela était inconcevable.

L'avoir pris sous mon aile me brûlait la gorge, et je m'accrochais à cette sensation que je ressentais à sa vue pour nous lier, plutôt que nourrir la haine, car il pourrait me sortir du chaos pour que j'affronte mes ennemis. Et si je refusais, je trahirais celle que j'étais, et l'Olympe me condamnerais.

Je poussai un autre long soupir qui franchit la barrière de mes lèvres, se répondant dans l'air du matin dans une forme ombrageuse, disgracieuse et éphémère, mais aberrante. Reflet de mon esprit actuel. Je devais mettre mes idées en place, pensai-je tout en massant mes tempes.

Lycaon était revenu, s'en prenant directement à moi par le nord, s'attaquant à celles que je protégeais puis à une chasseresse. Mise à part le fait que j'avais détruit ses envies dominatrices, je ne voyais pas pourquoi il s'attaquait à moi. Je n'avais fait qu'effectuer le vœu des Olympiens.

Il voulait me prendre pour femme, si j'écoutais les murmures passés. Mais ce n'était que des mauvaises langues. Quelles en étaient les raisons ? Cette guerre était la mienne et les enjeux m'échappaient, coulant le long de mes doigts, s'entortillant comme les serpents marins dans un orage maudit.

– Puis venait cette présence, murmurai-je lasse.

Je l'avais sentie en Crête, puis ici depuis quelques jours déjà. Et ce loup dans les environs. La même bête ? J'en doutais un peu. L'une se cachait tandis que l'autre apparaissait brièvement. Dans une guerre, je ne devais refermer aucune porte ni celle de leur lien avec Lycaon.

Venait ensuite Hippolyte. Je ne savais par quel miracle aucune des bêtes n'avait eu raison de lui, et ses yeux le trahissaient. Il semblait savoir certains secrets, mais refusait de me les dire, et je ne pouvais pas l'y forcer. Notre nouveau pacte s'y basait, tout comme moi qui ne lui avouais pas réellement les raisons que son cœur n'ait encore été arraché, jouant une comédie qui calmait mes ardeurs. Je me sentais perdue dans un ouragan qui chamboulait toute pensée cohérente, m'empêchant d'y voir un sens à ce qui se trouvait face à moi.

Ce n'était qu'un tas de cordes mélangées sans pitié, me mettant à l'épreuve de les délier pour obtenir les réponses. Je refusais d'être l'une des principales concernées et rester dans l'ignorance absolue.

Un soupir s'approchant du grognement s'envola dans les airs, tentant de me détendre. Mes muscles qui s'étaient tendus furent douloureux, mais d'un plaisir malsain, tandis que je m'imprégnais de cette ambiance qu'offrait la source relaxante. L'éclipse n'était que passagère et un jour ou l'autre, la lumière éclairait à nouveau. Je fus rassurée.

Les mortels seraient encore une fois victimes du jeu des dieux aussi malsain que le venin serpentin qui s'enroulait autour du monde, le protégeant et le condamnant à la fois. Un venin qui sauvait, mais dans ce cas détruisait. Les victimes innocentes de la guerre et les coupables qui observaient depuis leur trône.

Il était pourtant vrai que les dieux se battaient, la guerre des titans plus si proche le prouvait de ses bâtiments qui tombaient en poussière. Particulièrement en Crête qui prierait encore ces anciens immortels, et un Zeus enfant perché sur un coque, mais cette guerre s'en prenait aux mortels pour toucher les divinités. Ce jeu excitant traçait les contours de son rouge sanguin l'Histoire du monde brisé par les lames, souillant les terres autrefois gorgées de paix.

Tout comme Hébé, les déesses mineures qui restaient sur l'Olympe ne s'occupaient pas des affaires des grands, et exécutaient leurs ordres. J'en faisais partie autrefois, et je n'avais pas eu la possibilité de suivre la guerre. Désormais, j'y étais plongée jusqu'au cou, et aveuglée par le brouillard de mes questions. Après chaque guerre, il était dit que la lumière revenait.

Un jour ou l'autre elle prendrait une fin bien qu'elle était encore à l'aurore de son commencement. J'étais Artemis, je combattrais seule, sans l'Olympe, et gagnerais par le goût du sang s'il le fallait. Je n'abandonnerais pas, je ne l'avais jamais fait, qu'importait ce qui m'arriverait.

– Artemis ? Les chasseresses ne sont pas certaines si elles peuvent me laisser la tente de la chasseresse partie et..., trébucha une voix lorsqu'elle ouvrit les rideaux qui laissèrent pénétrer les rayons du soleil, me tirant de mes profondes pensées.

Mes paupières closes s'ouvrirent et clignèrent à maintes reprises pour dégager le soleil qui m'aveuglait. Mes pupilles se posèrent sur Hippolyte qui m'observait, la bouche entrouverte, restée sur sa phrase en suspens. Ses joues devenues légèrement vermeilles teintèrent les miennes lorsque je réalisais que j'étais nue. Mes mains entourèrent ma poitrine. Un silence s'imposa tandis que nous nous dévisagions, perdus.

L'Orient n'était pas très pudique, au contraire, le corps nu traçait ses arts, mais le fait qu'un homme me voit ainsi, un homme qui ne faisait pas partie de ma famille et qui en particulier ne respectait pas les règles et mes idéaux... Cela était inacceptable.

Je pris pleinement conscience de la situation. Il venait de me surprendre, dans mon bain. Il détourna les yeux de mon corps qui s'était enflammé sous ses regards qui me fuyaient, mais qui à chaque endroit où ils se posaient allant de mes yeux, à mes mains, ou encore à un point derrière moi étaient des flammes qui brûlaient.

– Je suis désolé, je ne savais pas que tu, tenta-t-il d'une voix gênée.

Je me sentis entrer dans une rage folle provoquée par la honte et sans réfléchir, me redressai, lui montrant mon corps dans sa totalité, dégoulinant d'eau. Je ne le vis jeter qu'un coup d'œil furtif, le même regard que la veille lorsqu'il m'avait retenu contre l'arbre pour dévoiler mes secrets les plus obscurs dans l'espoir de me tendre la main.

– Ne t'a-t-on jamais dit qu'il fallait questionner avant d'entrer chez qui que ce soit ? lui criai-je, tout en saisissant le premier objet qui se trouvait à ma portée.

Cela s'avérait être une brosse. Je la lui lançai. Hippolyte l'évita de justesse en mouvant son haut du corps, mais elle effleura son épaule avant d'atterrir dehors.

– Sors d'ici ! continuai-je sur le même ton rageur tout en lui jetant de l'eau. Chacal du désert ! Fils de Cronos ! Fervent des temples d'Aphrodite !

Il disparut rapidement sans demander son reste, et l'eau restante retomba dans le bassin encore secoué par des remous et dans la limite avait baissé. Une tempête qui se calmait à peine, plus douce que la mer salée, mais bien plus ardue.

Jurant encore entre mes dents, les joues cramoisies, je me saisis d'un pot empli de graisse et de cendres que j'étalai sur mon corps avant de frotter vigoureusement et de me rincer. Le bassin se remplissait déjà et l'ancienne eau disparaissait dans les entrailles de la Terre.

Je jetai un regard à travers les pans du rideau pour m'assurer que nul n'entrerait à nouveau avant de m'extirper de mon bain. Je me saisis d'un tissu qui essuya mon corps et enfilai un simple péplos. Un peigne d'ivoire entreprit la lourde tâche de démêler mes cheveux. Démunie de toute délicatesse dans mes gestes, des gémissements de douleur s'échappaient, redoublant ma colère qui amplifia les coups brusques.

Il m'avait vue nue, par toutes les divinités anciennes. Nue ! Dans mon bain. Nue ! Sans aucun vêtement pour me couvrir. Nue ! Par toutes les divinités, j'espérais que cela n'irait pas plus loin. Me voilà que je pensais à ces impuretés, mais la chaleur de sa peau était parvenue à me changer, et à m'ouvrir, me révélant. Et cela datait de la veille.

– Reine Artemis ? m'interpella une voix féminine.

– Entre Opis, lui répondis-je tout en espérant que mes joues étaient redescendues dans les teintes.

Elle entra, hésitante, sur ses gardes à l'intonation rêche de ma voix, et dans ses yeux, j'y lus une profonde crainte et préoccupation. Je fus soudain inquiète. La cicatrice qui barrait sa joue tressaillit.

– Assieds-toi.

– Artemis, allez-vous bien ? J'ai trouvé cette brosse et vos yeux sont, semblent humides, ainsi que vos joues qui...

– Je vais bien, merci, la coupai-je saisissant ma brosse que je lançai dans un coin. C'est juste le froid et de la cendre est entrée dans mes yeux. Que se passe-t-il ? Parle.

Mon ton trop ferme et sec la fit légèrement sursauter, mais elle se redressa sur son siège, toussota et reprit la parole.

– Skotia leur a dit et nous savons que c'est la bête. Ce n'est pas un mystère. Ce danger que nous parlions et dont je suis navrée de ne pas avoir partagé avec vous, mais nous avions peur que ce soit réellement lui. Cette bête au nord, le danger, c'est lui n'est-ce pas ?

– Oui, mais continue.

– Nous pensions que ce n'était qu'un loup, mais Hypatia a été tuée, lâcha-t-elle dans un sanglot refoulé. Nos doutes sont confirmés, c'est Lycaon. Et ce loup autour de notre campement, nous craignons qu'il soit l'un des siens, bien qu'il ne nous a fait aucun mal, pour l'instant, ragea-t-elle avec haine. Je sais qu'une guerre arrive, j'ai vécu les dernières, je sais reconnaître lorsqu'elle est derrière notre porte.

– Opis, tu es l'une des plus anciennes et je te demanderai de ne rien dire aux autres. Je ne veux pas les tracasser tant que rien n'est officiel, ordonnai-je, décroisant mes doigts à maintes reprises, nerveuse.

– Une dernière chose, ce loup semble déjà avoir été aperçu précédemment.

Je me raidis et mon visage se crispa. Un nœud enserra mon cœur et ma respiration se coupa un court instant.

– Déjà aperçu ? répétai-je d'une voix posée, croisant les bras.

– Oui, avoua-t-elle.

Ce loup n'était donc pas récent, contrairement à cette bête et le danger qui ne faisaient qu'un. Certaines s'étaient rendues compte du retour de Lycaon, mais nulle ne le partageait. Une profonde déception s'empara de mon cœur. Elles m'avaient dissimulé des secrets, à moi, leur reine qui les avait accueillis. Si nul ne faisait confiance aux autres en temps de guerre, nous perdions. Elles m'avaient pourtant suivi, elles me vouaient une confiance aveugle, je me devais de leur rendre l'autre face de leur lame.

– Il est donc là depuis bien longtemps et nul ne nous prévint.

– Exactement.

– Qu'importe, ils ne savent pas ce qu'une femme est capable lorsqu'elle est à la tête du pouvoir et possède un vaste royaume. Cette guerre aura lieu, et je me ferai un plaisir à marcher sur ses cadavres, et de lui montrer le cœur arraché de ma victoire, me surpris-je à dire tout en passant ma langue sur mes lèvres. Autre chose ?

– Hermès est passé durant votre courte absence.

– Que voulait-il ?

– Un message. Vous êtes convoquée à l'Olympe dans presque deux lunes, après les fêtes de Corinthe.

– Dans aussi longtemps ? m'écriai-je.

– Il a précisé que cela était extrêmement important, cela fait longtemps qu'ils abordent le sujet.

– A-t-il donné un propos ?

– Un lycanthrope. Il a ajouté de la part de votre frère, Athéna, Aphrodite et lui-même, qu'ils étaient désolés et que vous ne deviez pas vous inquiéter, compléta-t-elle, et mon sourcil se fronça à l'entente du nom de mon jumeau.

– Bien, tu peux continuer tes occupations. Rappels toi, pas un mot à qui que ce soit.

– Ne vous inquiétez pas, reine Artemis, je ne vous décevrai jamais et en cas de besoin, vous pouvez compter sur moi et me laisser en charge du campement. Je l'ai déjà fait, je remplis toujours ma mission.

– Merci, Opis, je t'en suis reconnaissante.

– Je ne fais que mon devoir, je ne fais que vous remercier. Une dernière chose, je n'ai aucune confiance en ce chasseur. Il ment, je le lis dans son regard. Il est dangereux d'accueillir un inconnu, il a une mauvaise influence. Vous devriez le renvoyer, finit-elle avant de sortir.

Je restai de longs instants assise, le regard perdu dans le vide trompeur. La méfiance dans sa voix possédait une part de raison, mais la confiance que j'accordais à cet homme m'empêchait de l'écouter, et je m'y accrochais pour la part humaine recelée. Et sa compagnie, je commençais à l'apprécier, ainsi que nos échanges provocants malgré le sarcasme qui s'y attachait, il n'y ajoutait qu'une touche artistique, et j'appréciais cela, me haïssant à la fois de le ressentir, mais je n'avais pas le choix. Ses yeux parcourant mon corps chauffèrent mes yeux et provoquèrent une grimace.

J'avais déjà des réponses, ce danger était Lycaon et la bête qui s'approchait n'était pas lui en personne. L'Olympe me convoquait, en avance, pour des raisons que j'ignorais, mais devinais avec aise. Je devais faire preuve de patience, qualité qui m'échappait.

Le plus énigmatique était ce loup qui rôdait auprès de nous. Il n'appartenait pas à Lycaon, il n'avait pas de malédiction, était puissant, mais un ancien sort l'en empêchait, d'après Skotia. Et si ce sort tombait, nous étions en danger.

Je me saisis d'une coupe emplie d'eau que je bus d'une traite pour dissiper la hardiesse dans mes veines. Cette guerre m'apetissait et l'odeur du sang m'attirait. Je me voyais déjà sentir la joie de mes victimes à mes pieds, les sentences de la mort que j'avais provoquée, le plaisir restant de ces vies ôtées.

Je n'étais pas une femme qui prendrait un plaisir de se vêtir de ses plus beaux vêtements pour susurrer à l'oreille de son ennemi sa victoire avant de l'achever. Je préférais me déchaîner sauvagement sur ces hommes qui n'étaient faits que de chair et de sang à mes yeux, démunis d'une âme humaine, et les envoyer tous, sans exception, dans les bras du ciel, les condamnant s'il le fallait à l'île des damnés.

Je ne laisserais personne détruire ce que j'avais construit de mes mains, mon empire de mes flèches meurtrières qui faisaient fléchir les plus puissants. Je voulais tout, ou rien, et nul n'était suffisamment audacieux pour s'interposer au risque de périr sous mes coups sanguinaires qui se mêleraient à la poussière noyée par la pluie des larmes de mes ennemis.

Un hoquet fit suite à ce souffle empli d'extase qui s'échappa. J'ouvris mes yeux et observai follement la pièce, balayant d'une main ces images horrifiques, enfouies au profond de moi. Ma respiration était devenue haletante et ces pensées semblaient presque annonciatrices, chuchotant à mes oreilles un futur que je pourrais embrasser. Qu'allaient-ils faire de moi ?

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