#5 - Chatons

"Driiiiiiiiiiiiiiing
- Bruno, ton téléphone !
- Oui, oui j'arrive p*tain c'est pas possible d'être tranquille trois secondes !
- Ah, et en plus c'est la direction !
- Je ne t'ai jamais demandé de regarder qui m'appelait, c'est un viol de mon intimité ! Tu ferais mieux de retourner à ta caméra, car la prochaine fois je t'en colle une.
- Cette menace souvent utilisée n'a... n'a jamais été mise à exécution..."

*regard noir de Bruno, accentué par ses larges cernes.*

"Tu aimerais peut-être essayer tout de suite ?"

*Bruno admire son poing tout en contractant son avant-bras bossué de muscles. Le caméraman déglutit et répond d'une voix fébrile :*

"Non, je... Oh et puis ce téléphone qui n'arrête pas de sonner.
- Tu as de la chance que je doive répondre."

*Bruno décroche avec son éternelle violence, et surtout avec un respect des plus naturels.*

"Quoi p*tain, qu'est-ce que vous me voulez la dir' "
- Remettre les pendules à l'heure Bruno ! Il va falloir se montrer un peu plus courtois envers les invités, et la production ! Car les audiences, Bruno les audiences ! Vous les avez faites chuter de trois-quarts en un mois. Mais quel pitoyable présentateur vous faites. Le brevet vous ne l'avez pas eu, le baccalauréat vous ne l'avez pas obtenu. 0 études supérieures. 0 0 0, 0 pointé et maintenant presque 0 audiences. Souhaitez-vous vraiment tout rater dans votre vie ? Car vous savez, la violence n'est pas un remède. Sauf que, qui est-ce qui détient le pouvoir ici ? Eh bien c'est nous, c'est la direction. Alors au moindre rappel à l'ordre Bruno, c'est dehors."

*La direction raccroche au nez et Bruno, livide, repose le téléphone. Pour la première fois de sa carrière, des tremblements de peur le secouent.*

"Ça démarre Bruno !"

*Ce dernier se racle la gorge et présente une voix chantante et un sourire très élargi. Mais ses yeux reflètent encore l'appel désarmant qu'il vient de recevoir.*

"Bonjour et bienvenue à tous sur le plateau d'Artbook ! J'espère vraiment que vous vous portez bien, et que tout se passe bien dans votre famille, et votre travail, et vos projets, et votre vie. Si vous êtes heureux, je le serai en retour et aimons-nous tous, et soyons gentils ! Aujourd'hui nous accueillons un nouvel invité ! Vous savez qu'ils sont rois ici, alors, de l'autre côté de votre téléviseur, je vous demande un orage d'applaudissements pour Chatons !"

*L'invité fait son entrée sous les applaudissements médiatisés. Ses multiples tiges s'agitent dans tous les sens. La tige centrale prononce :*

"Bien le bonjour !
- Et non ! Dans notre cas c'est bonsoir ! rectifie la tige n°2.
- Peut on vraiment qualifier cette heure-ci de soir ? s'incruste la tige n°3.
- Honnêtement je ne suis pas certain...
- Bienvenue parmi nous ! Je suis le présentateur Bruno, à votre entière disposition ! Nous allons un peu parler de vous aujourd'hui. D'ailleurs, nous avons un thé, mais alors, sublime !
- ...Tu vois, je pense que c'est vraiment les saisons qui déterminent si on peut dire que c'est le soir ou pas, continue la tige n°16. Cela dépend de s'il fait nuit ou non !
- Non je pense qu'il faudrait être plus général, et établir un statut précis.
- Mais non tu dis n'importe quoi, je pense que c'est mieux si on varie. L'été on a qu'à dire que..."

*Bruno commence à bouillir intérieurement. Personne ne l'écoute. Ils lui foutent la honte ! Et s'il y a bien quelque chose qu'il déteste, c'est qu'on lui foute la honte. Mais il pense à l'avertissement téléphonique et préfère garder son sang froid devant ces querelles stupides en attendant qu'elles se dissipent.
Le problème, c'est qu'au bout de quelques minutes, le ton n'a pas baissé d'un chouilla. En réalité, il a même augmenté. Bruno, de plus en plus irrité, sent le feu jaillir en lui, mais se retient : de là dépend sa carrière, et donc sa vie. Malheureusement, il ne parvint à se contenir, et explose, hors de contrôle :*

"VOUS ALLEZ LA BOUCLER LES TÊTES DE PLUMASSES OUI !?
- Pardonnez-nous, qu'avez vous maugéré ? Un tel comportement nous est totalement inacceptable."

*Les chatons quittent le plateau, tiges levées bien haut, en prenant tout leur temps. Bruno est au bord des larmes, larmes de fureur, et de désespoir. Il reprend d'une voix chevrotante qu'il ne contrôle même pas, et la figure toute rouge*

"Alors, chers téléspectateurs, un léger incident est survenu. Je vais néanmoins vous présenter la photo avant que nous ne nous quittons. La voici :

Voilà, j'espère que cet épisode vous aura plu et que vous aurez appris beaucoup d'informations sur les chatons. Quant-à-moi, je vous laisse et vous dit à la semaine prochaine, ou à... à jamais, qui sait."

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