Chapitre XIII : Fuite et Massacre
Le soldat doit avoir assaut de lévrier, fuite de loup, défense de sanglier.
Les larmes brouillaient sa vision. Cela faisait des heures qu'elle était sur la route. Aucune pause n'avait été effectuée, même pas pour les chevaux, qui semblaient comprendre la situation. Et elle la comprenait également.
Son cheval courait à tout allure depuis des heures, pour la protéger. Au fond d'elle, elle savait évidemment que c'était la meilleure chose à faire, mais son cœur lui disait qu'elle aurait dû se battre pour sa nation, pour son père et son époux. Voilà qu'il allait mourir à l'âge de 16 ans, sans avoir demandé ce destin funeste. Et son père... S'il venait à perdre la vie, que deviendrait-elle ?
Elle n'arrivait pas à dire le terme, cela la terrifiait, tout comme la guerre qui menaçait son monde.
Qu'avaient-ils fait pour mériter cela ? Cela faisait des années qu'ils étaient en paix avec la moitié du monde, ils avaient même réussi à faire des alliances inédites comme celle établie avec la Norvège. Mais malgré cela, ils étaient attaqués. Des innocents allaient encore périr.
« Annie-sama ! » Cria Mikasa, arrivant à sa gauche. « Nous arrivons dans quelques minutes. Nous irons directement nous recueillir dans la petite chaumière qui nous est réservée. »
Pour seule réponse, elle hocha la tête, signe qu'elle avait saisi l'information. Ils continuèrent de galoper pendant quelques instants, avant de ralentir pour finalement s'arrêter définitivement. Elle fut contrainte de descendre le plus vite possible de son cheval qui fut embarqué dans les écuries.
Mikasa l'attrapa par la main et elles se précipitèrent vers la petite maison. Une vieille femme les accueilli, les invitant à s'asseoir à table. Elles obéirent, en silence. Annie était incapable de dire quoique ce soit.
« Mangez, Votre Altesse. Il vous faut prendre des forces, vous devez être épuisé après ces longues heures de voyage. »
La vieille femme avait raison, mais Annie n'avait pas du tout faim. Elle se faisait trop de souci pour avoir le cœur à manger, malgré le fait que la nourriture devant elle devait être excellente. Elle se força tout de même à entamer son repas, voulant faire plaisir. Elle ne put cependant pas finir son plat.
Lorsqu'elles furent autorisées à sortir de table, Mikasa et Annie se rendirent dehors. La Princesse avait besoin de se poser quelques minutes pour faire le point de la situation, et trouver une solution pour se rendre utile.
Installée sur un banc, elle passa une main dans ses cheveux, dépitée. Elle qui voulait se rendre utile, voilà qu'elle devait fuir comme une petite fille en détresse. Alors que ce n'était pas ce qu'elle était. Elle était ce genre de princesse qui voulait se battre pour son royaume, pas la princesse faible qui fuit.
Mikasa semblait presque lire dans ses pensées, puisqu'elle mit une main sur l'épaule de son ami, avant de commencer à parler.
« Nous allons nous en sortir, ne t'en fais pas. L'empereur va tout faire pour nous protéger. Et il y a aussi le roi de Norvège et ton époux. Ils ne nous laisseront pas mourir, je te le promets. »
« Que va-t'il se passer s'il leur arrivait quelque chose ? Et si je me retrouvais seule ? »
« Je serais là, moi. Et les daymos également. »
Sûrement. Mais elle n'avait pratiquement pas appris à gouverner. Elle avait pris connaissance des bases de la politique et les bases pour devenir souverain, mais elle savait pertinemment que ce n'était pas assez pour devenir un bon souverain. Et c'était ce qu'elle voulait, être un bon souverain. Le problème étant qu'elle n'avait aucune idée par où commencer.
« Pourquoi devons-nous fuir ? Pourquoi ne pouvons-nous pas les aider ? »
« Tu es une princesse, Annie-sama. Tu n'es pas n'importe qui. Tu es la future Impératrice de ce pays, tu dois vivre. »
« Et mon père ? Le roi et le prince ? N'ont-ils pas d'importance ? »
« Ce sont des hommes... Tu sais ce que ça veut dire. »
« Et je déteste ça. Je prouverais un jour qu'une femme peut se battre au même titre que des hommes. »
« Ils s'en sortiront, Annie-sama. Tu n'as pas de craintes... »
« En es-tu vraiment certaine ? » Coupa la princesse. « Es-tu vraiment certaine que mon père va survivre ? Es-tu vraiment certaine que le roi de Norvège va survivre ? Es-tu vraiment certaine que mon mari survivra ? »
« Tu ne dois pas douter d'eux. Ton père est un combattant redoutable. Et les vikings sont connus pour leur puissance au combat. Nous sommes en sécurité. Ce n'est plus qu'une question de temps avant qu'ils ne reviennent. »
« De temps ? » Ricana Annie. « Une question de temps, tu dis ? Puisqu'ils sont si forts que tu le dis, comment dois-je réagir si dans trois jours, aucun n'est revenu ? Devrais-je comprendre que je serais une impératrice veuve sans héritier ? Je serais la pire souveraine de l'histoire. Je ne crée que problème et souffrance depuis ma naissance. »
« Annie... »
« Mes pauvres frères et sœurs qui auraient dû venir au monde après moi. Ma pauvre mère morte. Mon pauvre père déçu de sa fille unique. Mon pauvre époux à qui je fais vivre l'enfer pour absolument aucune raison valable. Ma pauvre amie qui doit m'écouter me plaindre chaque jour de cette minable vie ! » Cracha Annie, les yeux remplis de larmes.
La princesse finit par exploser en sanglot, s'écroulant au sol. Elle n'avait plus aucune force, plus aucun courage, plus aucune envie de continuer à faire semblant.
Elle entendit des pas arriver, avec le bruit des armures de samouraïs qui semblaient courir vers elles. Avant qu'ils n'aient pu dire quoi que ce soit, elle hurla de plus belle.
« LAISSE-NOUS ! C'EST UN ORDRE ! »
« La princesse a besoin d'être seule un moment. » Commença Mikasa en s'approchant des gardes. « Nous sommes tous bouleversés par ce que nous traversons. Allez donc vous reposer, vous en avez besoin. »
Alors, Annie entendit les bruits de pas et d'armures s'éloigner pour finalement ne plus les entendre du tout. Elle continua de pleurer, plus silencieusement cette fois. Mikasa devait sans doute la regarder, attendant qu'elle se calme.
Soudain, quelques gouttes de pluie s'écrasèrent sur ses cheveux blonds. Il y eut un énorme coup de tonnerre, avant que de nouvelles gouttes, bien plus grosses cette fois, ne s'abattent sur elle. Plusieurs coups de tonnerre se suivirent, alors que l'eau continuait de lui tomber dessus.
Armin lui avait expliqué ce qu'il pensait des orages. Pour lui, c'était simplement Thor, le Dieu de la foudre, qui exprimait son mécontentement. Il lui avait expliqué que cela arrivait souvent en mer. Ainsi, si le dieu trouvait que l'expédition allait tourner au fiasco, il créait des tempêtes pour que les vikings soient contraints de rentrer. Cela pouvait également arriver après un évènement dur.
Pour Annie, c'était simplement Susanoo et Amaterasu qui se disputaient pour des choses futiles. Mais là, son cœur lui intima de croire en les croyances de son époux. Pour la première fois, elle croyait à ce qu'Armin lui avait dit sur ses croyances. Pour la simple et bonne raison que, pour elle, l'orage n'arrivait pas là par hasard : il y avait une guerre à plusieurs kilomètres qu'où elle se trouvait. Cet orage venait la prévenir de quelque chose.
« Toi ! Dans le ciel ! » Cria-t-elle, le visage vers les nuages noirs. « Es-tu ici pour me prévenir de quelque chose ! Qui es-tu ? Es-tu Susanoo, le Dieu des tempêtes ? Ou es-tu Thor, le Dieu du tonnerre ? Réponds-moi ! »
Cela pouvait s'apparenter à un acte désespéré de sa part. Mais un violent coup de tonnerre résonna dans l'air, et un éclair s'abattit dans la forêt non loin d'elle.
« Annie-sama ! Ne restons pas là ! Nous devons partir ! » Lança Mikasa, s'approchant rapidement.
« Est-ce que l'un de tes enfants est mort ?! » Continua la Princesse, hurlant toujours vers le ciel.
A nouveau, un coup de tonnerre. Deux coups de tonnerre, cela sonnait comme des réponses à ses questions. Les dieux l'écoutaient.
« Qui est cet enfant ? Est-ce l'empereur du Japon ? Est-ce le roi de Norvège ? Est-ce le prince de Norvège ! »
A peine avait-elle fini que la foudre s'abattit sur un arbre, le faisant s'écrouler dans la forêt. Annie se sentit tirer à l'intérieur de la chaumière, tandis que le ciel grondait. Pour Annie, ce grondement ressemblait à de la colère et à de la terreur. Les dieux étaient inquiets.
Mais cependant, elle ne savait pas pour qui ce coup de tonnerre était. Mais elle était sûre d'une chose : Un des trois hommes avait péri au combat. Cependant, lequel était-ce ?
*
Toute révolution a pour corollaire le massacre des innocents.
Derrière un arbre, Armin était assis, essoufflé. Il n'en pouvait plus, il était épuisé de cette situation. Il ne tenait plus. Il n'avait qu'une envie : que tout s'arrête. Il ne pouvait plus voir tous ces hommes.
Les cris des enfants commençaient à le hanter. Ces pauvres enfants qui s'étaient fait massacrés par les Mongols pour instaurer la peur dans leur rang. Et ils avaient parfaitement réussi leur coup.
Armin s'était battu, il avait tué plusieurs soldats Mongoles, mais les forces commençaient à l'abandonner. Il était blessé au bras droit et dans le dos. S'il continuait de se mettre en danger, il mourrait, comme ses amis.
Lorsqu'il s'était approché de la colonie établie, il était déjà trop tard. Il y avait quelques Mongols morts sur le sol. Mais beaucoup de civils japonais et norvégiens avaient péris. Lorsqu'ils avaient reconnu Ymir et Eren, son cœur avait loupé un battement. Ses meilleurs amis d'enfance, ceux avec qui il avait partagé tant de choses, étaient morts. Il avait eu mal, tellement mal.
Il était entré dans une rage folle, et avait fait le grand ménage parmi les Mongoles présents. Mais il restait un homme avant tout, il avait fini par s'épuiser. Il avait dû être contraint de se cacher afin de reprendre un peu de force.
Maintenant, il devait retourner se battre. Et c'est ce qu'il fit.
Il s'éloigna alors de l'arbre et retourna sur le champ de bataille. Des centaines et des centaines de cadavres inondés de sang les terres. Ces terres qu'ils avaient cultivées.
Du coin de l'œil, Armin vit deux soldats mongols arriver à sa droite et un arrivait à sa gauche. Il fallait agir vite avant qu'ils ne le tuent. Alors, le jeune homme laissa l'homme à sa gauche tenter de le frapper avec son épée, mais il esquiva avant que la lame ne puisse le toucher. En retour, Armin frappa l'homme à l'arrière de la tête avec sa hache. Le Mongol s'écroula au sol, se vidant de son sang.
Les deux autres Mongols le regardèrent, tandis qu'Armin se mettait en face d'eux. Il était vidé de ses forces, mais il devait se défendre. Il n'avait pas le droit de mourir maintenant. Son père lui avait ordonné de vivre. Et lui aussi, s'était ordonné de vivre pour Annie.
Il lança sa hache vers l'un des deux hommes qui la reçut en plein dans la poitrine. Il s'écroula en hurlant de douleur avant de s'éteindre quelques secondes après. Le problème maintenant, c'était qu'il n'avait plus d'armes.
Le Mongol et le Viking s'observèrent sans rien dire, avant qu'Armin ne décide de courir pour aller chercher une autre arme. Mais un problème en suit un autre : il trébucha sur des corps de soldats quelques mètres derrière lui. Il n'eut pas le temps de se lever que le soldat Mongol était déjà là. Il avait un sourire mauvais au visage, comme s'il était heureux de pouvoir venger ses hommes. Armin savait qu'il ne l'achèverait pas directement et qu'il allait s'amuser avec lui.
L'homme se mit sur lui pour l'immobiliser, mais Armin ne bougea pas. Il sentit une lame de couteau ouvrir la peau de son ventre. Il grimaça de douleur. Le regard du soldat au-dessus de lui était perturbant : il était euphorique à l'idée de lui faire du mal.
Le Mongol arrêta de couper le prince puisque ce dernier ne sentait plus sa peau s'ouvrir. Il put voir la lame de couteau recouverte de son sang au-dessus de son visage. Des gouttes de son sang coulaient sur son front. Il fut contraint de fermer les yeux, ne voulant pas avoir du sang dans les yeux.
Mais l'homme en avait décidé le contraire. Il força Armin à ouvrir les yeux, recevant ainsi du liquide rouge dedans. La sensation était assez désagréable. Sa vue devient trouble, avec des tâches noires et rouges partout.
Le Mongol se mit à hurler comme un fou, avant de planter son couteau dans l'œil gauche du jeune homme. Armin hurla de douleur, se débattant comme il le pouvait. Il devait trouver un plan, sinon, il allait lui crever les deux yeux. Si cela venait à arriver, il savait ce qui allait se passer : il deviendrait aveugle, et pour le ridiculiser, les Mongols le laisseraient s'en aller. Mais étant aveugle et blessé, il n'allait pas survivre longtemps seul.
Lorsqu'il sentit le couteau être retiré de son œil, Armin poussa violemment l'homme qui tomba à la renverse. Malgré que sa vue était trouble, il remarqua un sabre à la gauche du soldat. Il le prit alors et frappa le Mongol au niveau du coup. Il mit tellement de force dedans qu'il parvient à couper la tête de l'homme.
Armin lâcha l'arme, essoufflé. Il avait terriblement mal à l'œil que cela lui donnait de violents maux de tête. Tout de même, il se releva.
« ARMIN ! » Hurla Torstein.
Le jeune homme se releva et vit son père non loin de lui. Comme il le put, il s'approcha de son père. Ce dernier était assis contre un arbre, grièvement blessé à la jambe. Le prince avait peur pour la survie de son père. C'est pour cela qu'il déchira un bout de son pantalon pour essayer de bander la plaie de son père.
« Inutile, mon garçon. »
« Laisse-moi te sauver... »
« Je vais me rendre. Cela te laissera du temps pour retrouver ta femme et préparer un plan d'attaque. »
Armin le regarda, presque effrayé par ce que son père était en train de lui dire. Il le vit faire un petit sourire, avant de poser sa main sur la joue ronde de son fils.
« Je me souviens encore de quand tu étais enfant. Tu étais un enfant surprenant. Bien différent de tes frères. Eux, ils étaient plutôt violents, à toujours prouver qu'ils sont forts. Mais toi... toi Armin, tu étais le garçon le plus gentil. Toujours à aider les autres, à les valoriser. »
« Père arrête... arrête... » Supplia Armin, continuant de bander la jambe de son père, les mains tremblantes.
« Ta mère et moi sommes tellement fiers de toi, tu sais ? Tu es celui en qui nous avons le plus d'espoir. Tu changeras le monde, mon garçon. »
« La douleur te fais dire n'importe quoi. Il ne me reste pas longtemps à vivre, de toute manière. Tu dois partir. »
Aucun des deux ne parla, laissa Armin se concentrer pour soigner le Roi. Ce dernier devait survivre par tous les moyens. Il devait survivre pour la Norvège. Il devait survivre, car c'était un grand roi. Sieg n'était pas prêt à être roi, Armin le savait.
« Va retrouver la princesse du Japon, Armin. Retrouve-la, et préparez ensemble un plan d'attaque. Vous y arriverez ensemble. »
« Non... Non... »
« Vous n'êtes pas n'importe qui. Elle est la princesse du Japon et la princesse de Norvège par alliance. Tu es prince de Norvège et prince du Japon. Tu es le futur empereur, tu n'es pas n'importe qui. Tout ce que tu entreprendras, tu y arriveras. »
Le jeune homme souffla un coup, avant de laisser sortir un sanglot. Il refusait cet épilogue. Celui dans lequel il devenait Empereur à seize ans. Celui dans lequel son père mourrait. Il était persuadé qu'il allait se réveiller d'une minute à l'autre.
« Part, mon fils. »
« Je ne peux pas te laisser là... » Murmura-t-il, la voix tremblante de peur et d'angoisse.
« Ne te préoccupe pas de moi. Je fais partie de l'ancien temps. La nouvelle génération, c'est toi, Armin. Parmi tous les fils que j'ai eu, tu es de loin celui que je préfère. Je suis tellement fier que Falco ait décidé de suivre tes pas. Soit fier d'être un modèle pour ton petit frère. »
Armin sourit, pensant à son petit frère qu'il avait dû laisser seul en Norvège.
« Bien sûr, ne le dit jamais à tes autres frères, ils vont être vexés. »
Le blond ricana légèrement : bien sûr qu'ils allaient être vexés. Ses ricanements finirent pas rapidement s'estomper lorsque son père reprit la parole.
« Aller, mon fils. Le temps est venu pour nous de nous dire adieu. »
« Père, non ! Je refuse ! »
« Ne fais pas l'enfant, Armin. Pars. »
« Mais... »
« C'est un ordre de ton Roi. Et de ton père... »
Dans un geste désespéré, il se colla à son père pour une dernière étreinte. Son père allait mourir, il ne pourra pas le sauver. Tout comme Eren et Ymir. Malheureusement, il était encore trop faible pour sauver les gens qu'il aimait.
« Tu ressembles à Odin... Avec ton œil gauche... » Finit par dire Torstein, passant sa main dans les cheveux blond de son fils.
« Je lui ferai honneur... » Lâcha Armin, pleurant à chaudes larmes. « Tu seras fier de dire aux Dieux que je suis ton fils. Je ne te décevrai pas, papa. »
Sans un dernier mot échangé, il se recula et plongea son regard dans celui de son père. Une dernière fois. Il se mit dos à son père et marcha sur le champ de bataille, esquivant les corps pour ne pas marcher dessus.
Face à lui, il put voir l'empereur être entouré par plusieurs Mongols. Il se battait comme un dieu. On aurait dit qu'il avait la force et l'expérience d'une trentaine de samouraïs. Mais malheureusement, lui aussi était épuisé par la bataille.
Armin réussit à croiser son regard, et ce dernier comprit immédiatement. Alors, il courut le plus vite possible en dehors du champ de bataille. Lorsqu'il entendit un bruit sourd. Il s'arrêta, se cachant dans un buisson.
L'empereur était mort.
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