Chapitre 30.

Alors que j'attends devant le parking de l'université, j'essaie d'ignorer mon estomac qui se noue douloureusement à chaque fois que je vais voir Evan. Je suis tellement pressée et en même temps, j'appréhende un peu -comme toujours. D'une part parce qu'il m'a manquée et l'incident de Stiles le contrarie énormément alors je tiens à être là pour lui. Mais d'autre part, j'appréhende car il y a toujours cette partie de moi -celle qui est morte quand il m'a quittée, qui se manifeste pour me prévenir que ce n'est plus comme avant, et que peut-être qu'un jour, on retrouvera notre routine et nos problèmes aussi. Je décide de refouler cette partie pessimiste parce que je ne suis tout simplement pas prête à me disputer avec lui.

Quand sa voiture arrive sur le parking, je ne peux m'empêcher de sourire en voyant Stiles à l'arrière, la tête dépassant de la vitre abaissée. Je me doutais qu'il le prendrait avec lui. Evan se gare alors je me dirige vers lui puis il sort de la voiture.

Et là, immanquablement, je me tords de rire. Ce fou a été mettre un bandana rouge dans ses cheveux en mode survivor. J'avoue que ça lui donne un style mais le fou rire l'emporte sur la beauté là.

Evan semble s'y attendre puisqu'il lève les yeux au ciel. À présent, il n'est qu'à quelques mètres de moi.

_C'est quoi de cette... Chose ?, je m'esclaffe.

_J'ai vu des mecs le faire et je trouvais ça bien moi. Pourquoi t'aimes pas ? Je suis moche ?

_Non non, c'est pas ça. C'est... Putain on dirait que tu viens de finir Koh Lanta là, je pleure de rire me ressuyant les yeux.

J'imagine Evan sur une île déserte, avec d'autres personnes, en train d'essayer d'allumer le feu. Ou même de construire une maison. Ou encore de chercher le collier d'immunité. Il ne saurait même pas retrouver ses baskets. Oh Mon Dieu, cette coiffure m'a achevée.

_Au moins tu es assorti à Stiles, je ris de plus belle.

_Hum. Ouais.

Son regard se pose sur le mur beige derrière moi. Moh, Monsieur est vexé. Je souris bêtement en prenant son visage entre mes mains.

_Mais tu es très beau. Ça te va bien, c'est juste que je n'avais jamais vu ce genre de coiffure auparavant.

Il baisse les yeux sur moi, esquissant un fin sourire.

_Tu aimes bien ?

_Mais oui bien sûr. Quoique tu fasses tu seras toujours beau.

_Hum.

_Arrête de faire ton malheureux, Caliméro, je souris.

Il fronce les sourcils -confus.

_Caliméro ? Nan, moi c'est Evan.

Mais qu'il est con... Qui ne connaît pas Caliméro ?

_Bon... Je vais t'expliquer... Caliméro est un canard issue d'un dessin animé. Il est timide et il a comme l'impression d'être ignoré par le monde qui l'entoure. Alors il se plaint toujours des choses qui lui arrive et dit toujours "C'est vraiment trop inzuste". Quand on dit à quelqu'un qu'il fait son Caliméro c'est parce qu'il fait le malheureux, jamais satisfait de rien en gros.

Il plisse les yeux comme s'il comprenait mon explication.

_Ah... Mais je suis satisfait d'être avec toi, moi.

Qu'il est mignon... Je glisse mes mains dans son cou puis l'embrasse tendrement. Il répond à mon baiser en mouvant ses lèvres aux miennes. Il me saisit par la taille tout en insinuant sa langue entre mes lèvres. Je peux sentir la pression qu'il évacue en m'embrassant et je suis prise d'une joie déplacée parce qu'il me laisse le voir si mal. Dès qu'il sépare nos lèvres, je fixe quelques secondes les siennes légèrement rougies.

_Comment va Stiles ?

Il hoche faiblement la tête.

_Ça va. Je le choie comme jamais sauf qu'il en profite et ne bouge plus de mon lit. Je l'ai pris parce qu'il doit marcher un peu quand même sinon il peut avoir d'autres problèmes après.

_D'accord. Tu veux que j'aille chercher des sandwichs à la cafétéria et qu'on mange dans la voiture ?

_Je vais t'accompagner avec Stiles pour qu'il marche.

_D'accord.

Il saisit mon sac à dos pour le mettre sur son épaule. Je le remercie en lui adressant un fin sourire. Doucement, il enlace nos doigts jusqu'à ce qu'il ouvre la portière arrière. Stiles en profite pour descendre et me sauter dessus. Ah il est clair que pour des câlins et nous faire la fête, il va très bien. Je m'accroupis, posant ses pattes avant au sol par la même occasion. Il s'empresse de s'asseoir tandis que je lui fais un gros câlin et des caresses.

_Alors mon bébé, tu t'es fais mal ? Fais moi voir ça.

Mes yeux s'écarquillent quand il me tend réellement l'une de ses pattes avec sa bottine bleue -comme s'il m'avait compris. Je me demande bien ce que ce chien ne sait pas faire. Je prends sa patte et le félicite pour me l'avoir tendue. J'aime tellement Stiles... Si seulement j'avais pu avoir un chien comme lui. Non, si seulement il avait pu m'appartenir. Quand on le connaît, on ne veut personne d'autre que lui. Pas d'autres chiens, juste celui-là tellement il est parfait. Un peu comme Evan en fait.

Je me lève et il s'allonge sur le dos devant Evan, les pattes en l'air. Son maître attrape son harnais et sa laisse sans daigner à le caresser.

_Pourquoi tu l'ignores ?

_Parce qu'il attend que je le porte. Et qu'il doit marcher, et il le sait. Assis, Stiles.

Le visé ne bouge pas, ce qui agace Evan. Il s'énerve vraiment pour rien. D'accord, je comprends que c'est pour le bien de Stiles qu'il fait ça, mais il n'a pas à être aussi autoritaire. Il devrait s'estimer heureux d'avoir un chien aussi adorable. Flemmard, mais adorable quand même. Evan grogne en s'agenouillant pour enfiler son harnais. Il lui met sa laisse puis claque des doigts de sorte que Stiles se lève.

Quand on commence à marcher, un rire s'échappe d'entre mes lèvres face à la manière dont il se déplace. Il tend une patte à la fois droit devant lui, il me fait penser à un cheval faisant du pas espagnol. En moins gracieux bien sûr.

La cafétéria est à cinq minutes à pied à peine. Des étudiants n'ont pas pu se retenir de rire face à Stiles et ses bottines. Déjà que c'est une race de chien peu commune, en plus de ça, il fait le clown. Une fois devant la cafétéria, Evan lâche ma main et me tend la laisse de Stiles.

_Reste ici avec lui. Je vais aller chercher le déjeuner. Des sandwichs au filet américain ça te va ?

_Oui pas de soucis.

_D'accord. À tout de suite.

Il m'embrasse rapidement puis entre à l'intérieur. Je baisse alors les yeux vers Stiles qui bat l'air à l'aide de sa queue. Je cherche un endroit où nous pourrions nous asseoir. Il me semble qu'il y a des bancs sur un terrain d'herbe juste à côté. Stiles pousse un grognement ressemblant fort à un soupir avant de s'allonger et de poser sa tête entre ses pattes. La cours de l'université est complètement déserte excepté trois étudiantes qui sortent de la bibliothèque. Quand Evan sort, je lui souris et Stiles se redresse vivement.

_On peut aller déjeuner plus loin, si tu veux, je propose. Il y a un endroit où l'on peut s'asseoir.

_Allons-y.

Nous marchons jusqu'à un banc puis nous nous y installons. Après de longues minutes d'hésitation, Evan finit par lâcher Stiles pour que celui-ci puisse marcher un peu près de nous. Mais le chien ne semble pas être du même avis puisqu'il s'allonge à nos pieds après avoir fait le tour du banc. Je remercie Evan qui me donne un sandwich et j'attends qu'il ait déballé le sien pour commencer à manger.

_Alors ça a été ta matinée ?, me demande-t'il.

_Oui super. Avec Matt, on avait fait ma dissertation et j'ai eu la meilleure note de la classe, c'est à dire 17.

_C'est bien alors. Tu lui as dit pour ta note ?

_Non pas encore. Je lui dirai quand il rentrera ce soir. Et toi, tu as vu Hugo ?

_Pas du tout, je me suis réveillé à 10 heures, j'ai dû forcer Stiles à sortir dans le jardin pour qu'il fasse ce qu'il avait à faire -n'importe où sauf dans ma maison...

_Eurk, je grimace.

_Ouais. Il sait être répugnant quand il faut.

_C'est parce qu'il a mal quand il marche sûrement.

_Il fait semblant ouais. Enfin, je ne dis pas qu'il joue la comédie mais regarde tout à l'heure quand il t'a vue, étrangement, il allait très bien tout d'un coup. Mais quand il a fallu marcher, il s'est allongé pour que je le porte. Ce chien est un vrai fainéant. Et le pire dans tout ça, c'est qu'il est assez intelligent pour trouver des stratégies aussi dingues.

_Tel maître tel chien, je le charrie en réduisant le papier qui recouvrait mon sandwich en une boule chiffonnée.

_Moi je suis fainéant ?!, s'offusque-t'il en apportant sa main à sa poitrine. Bon ok... Peut être un peu mais juste quand je sais que Stiles peut me ramener les bières sans que je ne me lève.

_T'es grave, je soupire.

_Je sais. Mais bon, ça n'a pas l'air de le déranger lui, au contraire.

_Moui.

Je croque dans mon sandwich alors qu'Evan semble penser à autre chose. Je fronce les sourcils et m'apprête à lui demande ce qu'il y a mais il me devance.

_Et hum... Aria ?

Il se gratte nerveusement la nuque. Il se comporte toujours comme ça quand il s'apprête à m'avouer quelque chose.

_Oui ?

_J'ai... Ce matin... Je me suis aussi rendu chez le médecin avant de venir. Et... Il m'a dit qu'il était presque improbable que je sois précoce, du moins pas aussi subitement sans signe avant coureur. Alors... Je tenais à m'excuser pour mon comportement dimanche matin. Je n'aurais pas dû m'énerver comme ça après que tu m'aies sucé. Excuse-moi.

Je suis surprise de constater qu'il me parle de cela et qu'en plus, il reconnaisse ses fautes. Personnellement, je me doutais qu'il ne pouvait pas être précoce mais c'était juste impensable de le lui faire comprendre dimanche matin. Je suis tellement heureuse et fière qu'il me parle si facilement. Je ne demande que ça; qu'il se confie à moi. C'est tellement plus simple quand on arrive à établir une communication comme la nôtre actuellement.

_Ce n'est rien. Tu sais... Je trouvais ça sexy moi de te voir être consumé par le plaisir. Je ne comprenais pas pourquoi ça t'énervait.

_J'avais pensé que j'aurais tenu plus longtemps mais non. C'était parfait, tu as été parfaite Aya mais c'était gênant d'avoir craqué aussi vite.

_Je ne suis pas d'accord avec toi. Ce n'était pas gênant du tout. Je peux comprendre que tu aies été agacé et contrarié mais si je t'assure que tu n'as pas à l'être, crois-moi.

_Oui...

Il ne semble pas très convaincu. Je préfère changer de sujet et lui dire ce que moi j'ai sur le coeur.

_Et puis, je souris doucement, je suis vraiment fière de toi, Evan. J'aime quand tu t'ouvres à moi. Ça me prouve que j'ai ta confiance et puis, avant, tu ne me parlais de rien tant que je ne te forçais pas. C'est beaucoup mieux quand c'est toi qui te confie par toi-même, naturellement.

_C'est le psychologue qui m'a fait réaliser l'importance de la communication dans une relation. Je ne dis pas que j'accepte de parler de tous les sujets, mais j'essaie de faire un effort pour que tu saches ce qui me passe par la tête. Je t'ai cachée beaucoup trop de choses pendant trop longtemps.

Mon regard admire cet homme merveilleux qui se tient à mes côtés. Dire que je suis fière de la personne qu'il est devenu est un euphémisme. J'aimerais tellement qu'il arrête d'être rongé par tous ses remords. J'ai le sentiment qu'il est plus sensible qu'avant. Mais ça ne me dérange pas, je serai là pour l'aider à rester à la surface. Il ne doit surtout pas replonger dans les sombres profondeurs de son passé. Rien qu'à travers ses iris, je peux discerner de la douleur et de la tristesse sous cette couche de perfection. Doucement, je m'avance afin de déposer mes lèvres au coin des siennes avec insistance.

_Je t'aime.

Il me rend un demi sourire avant de reposer le regard devant lui.

_Je t'aime aussi.

Je tourne la tête vers Stiles à deux pas de nous et souris en le voyant se lever et se remettre à marcher bizarrement. Je ris en calant ma tête contre l'épaule d'Evan qui en profite pour glisser son bras autour de ma taille.

_Qu'est ce que tu vas faire cet après-midi ?, je demande.

_Voir Hugo. Et toi ?

_Ah oui tu me l'as dit, c'est vrai. Moi je retourne en cours.

_Je pensais que tu ne bossais pas le mardi après-midi ?

_Tout dépend des jours. Mon prof a rajouté un cours cet après-midi pour finir une leçon. Et deux fois par mois j'ai un cours. C'est un peu comme au lycée, tu vois il y a les semaines A et B ? Donc ça change en fonction des semaines.

_C'est compliqué tout ça, rit'il.

Je hausse doucement les épaules.

_On s'y fait. Et puis, ce soir, je vais avec Corey chercher Amber à la gare. Ça te dit de venir ?

_Corey sera d'accord ?

_Bien sûr. Pourquoi pas ?

_Je ne sais pas. Je ne veux pas m'incruster.

_Mais tu ne t'incrustes pas. Viens, s'il te plait.

_Ton mec ne sera pas là je suppose.

_Non effectivement. Matthew ne sera pas là. Il rentre tard ce soir.

_Hum... D'accord. On se retrouve à la gare alors ?

_Oui.

_Okay pas de soucis.

Je saisis son poignet et découvre sa montre pour regarder l'heure. Je suis étonnée de constater qu'il porte le cadran sur la surface extérieure de son avant-bras alors qu'avant c'était à l'intérieur. Je le charriais beaucoup avec ça parce qu'il avait l'air gay et c'était marrant. Enfin, sa réaction était marrante. Il râlait toujours et la plupart du temps, il me montrait qu'il n'était clairement pas homo. Il faut croire qu'avec le temps, il a changé ses habitudes.

Il est déjà 13h15 et je reprends à 13h30.

_J'ai cours dans un quart d'heure.

_Déjà...?

_Ouais...

_Je vais t'accompagner jusqu'à l'entrée.

_D'accord.

Je me lève et attrape la laisse de Stiles pour le rattacher. Doucement, Evan m'attrape le bras et m'attire contre lui. Il loge sa tête contre mon cou et ses bras se referment dans mon dos. D'abord surprise, je me fige puis face à ce geste tellement mignon, je me laisse aller contre lui. Je ne sais pas ce qui lui prend mais s'il a besoin de moi, jamais je ne le repousserai. J'enroule mes bras autour de son cou avant de déposer mes lèvres sur sa joue.

_Qu'est-ce qu'il y a ?, je demande faiblement d'une voix douce pour ne pas le brusquer.

_J'ai besoin de toi, Aria.

_Pourquoi ? Ça ne va pas ?

_Non. J'ai... J'ai juste besoin de toi dans ma vie.

Soudainement, je ressens une forte pression dans ma poitrine. C'est à la limite de la douleur et du plaisir. Je ne m'attendais certainement pas à ça... Je suis consciente de l'importance du sens des mots qu'il vient de prononcer. Et je crois que c'est cette signification qui ébrèche mon coeur légèrement. Parce que je ne suis pas sûre d'être capable d'honorer son aveu. Peut-être qu'un jour, on devra se séparer. Je devrais le quitter. Aujourd'hui, cette idée m'est juste impensable mais je ne pourrais pas refouler éternellement l'évidence. Il faudra que je fasse un choix. Et après tout ce qu'Evan m'a fait vivre dans le passé, une infime partie de moi est effrayée à l'idée de revivre ça. Tandis qu'avec Matthew, je m'assure une protection irrévocable. Il est l'homme parfait. Trop parfait.

Alors, encore une fois, je fuis cette impasse dans laquelle je suis coincée depuis que j'ai laissé Evan rentrer dans ma vie, et je ressers mon étreinte sur sa nuque.

_Je suis là.

Pour l'instant.

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Hey ! Alors, j'ai été confrontée à un ultimatum. Soit je laissais la vraie taille de ce chapitre -c'est-à-dire presque 6000 mots au lieu de 2600 actuellement, ou je le divisais en deux. J'ai choisi la deuxième option car sinon, cela aurait été VRAIMENT trop long, et puis... La deuxième partie est tellement... Intéressante... :3 Prévoyez les mouchoirs ! Pour le meilleur ou pour le pire !

Sachant que j'enchaîne directement avec un autre chapitre, vous pouvez me donner votre avis sur ce chapitre tout de même ou alors dans le suivant, peu importe :)

J'essaie de publier le plus rapidement que possible ( le temps que j'ai du Wifi en fait xD ) ! A tout de suite !

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