PDV Aria

               Après un réveil difficile à cause de la soirée d'hier, j'ai du me lever pour aller au secrétariat du campus. Il étais dix heures et je suis prête pour onze heures. Amber est déjà partie. Elle m'a laissé un mot pour me dire qu'elle était en cours. On doit se retrouver à quatorze heures en sciences sociales pour deux heures. J'ai essayé de ne pas penser à Evan mais c'était trop dur. Mes pensées ne tergiversent que vers lui durant le trajet jusqu'au foyer étudiant. Peut-être que je devrais le laisser me montrer qu'il a changé... Pour ma part, je ne suis pas prête pour tout ça mais quand il m'a embrassé hier, un poids s'est retiré de mes épaules. Comme si je l'avais pardonné. Si c'est le cas, il lui faudra encore faire beaucoup de chemins pour regagner ma confiance. Je cesse de songer à lui en rentrant dans le foyer. Le secrétariat est au bout du couloir. J'entends une vois qui m'appelle alors je me retourne vers celle-ci et souris en voyant Thomas arriver.

_Heye ! Qu'est-ce que tu fais là ?, je le questionne.

_Je viens de la bibliothèque. Il fallait que j'imprime des fiches et toi ?

_Je vais au secrétariat tu viens avec moi ?

_D'accord.

On traverse le couloir et je rentre dans la pièce. Il n'y a pas de porte c'est simplement une salle avec un long bureau à l'autre bout de la pièce. J'avance vers une vieille dame qui relève la tête pour me demander si j'ai besoin de renseignements. Je lui demande alors si ce n'est pas trop tard pour s'inscrire à une option sport et elle me répond que beaucoup sont déjà complètes. J'insiste pour savoir s'il reste des places quelque part. Elle me propose le handball mais je devrais faire des sortes de compétition etc... Je laisse tomber car, premièrement je suis nulle à ça et deuxièmement, je déteste les compétitions en club de sport. 

On se dirige vers la sortie mais je suis stoppée par un torse. Je reconnais Evan instantanément. Qu'est-ce qu'il fait là lui ? Mon estomac se noue alors que je lève lentement la tête vers son visage. Les traits de son visage sont crispés et il a des cernes énormes sous les yeux. Il me fixe quelques secondes puis dévisage Thomas.

_T'es qui toi ?, crache t-il.

Le pauvre... Il n'a rien demandé.

_C'est Thomas, un ami, je réponds à sa place.

_Et lui, c'est qui ?, me demande Thomas.

_Personne. C'est personne, répondis-je d'une voix trop faible à mon goût.

Je le contourne pour tracer ma route mais il m'attrape fermement le bras.

_Lâche-moi, j'ordonne.

_Tu ferais mieux de la lâcher, mon gars, lui conseille Thomas.

_Je t'ai pas parlé à toi.

Il reporte son regard noir vers moi. 

_Fais attention à ce que tu dis, Aya, grogne t-il.

Il détend sa prise et je me dégage pour passer à côté de lui suivie de Thomas. Une fois assez éloigné, Thomas se poste devant moi.

_C'était quoi ça ? Et c'est qui ce mec ?

_C'est compliqué... En gros, il s'est servie de moi pour se venger de mon copain.

_T'as raison ça a l'air trop compliqué pour moi, rit-il.

_Si tu savais.

L'atmosphère est plus sereine maintenant que nous sommes loin d'Evan. Je reste le midi avec Thomas puis je rejoins Amber devant notre salle. Il nous reste quelques minutes avant que le cours ne commence. On se prend dans les bras l'une de l'autre et nous faisons toute une scène de retrouvaille comme si on ne s'était pas vu depuis trois ans. Je lui raconte la scène de tout à l'heure et elle m'écoute attentivement.

_Tu devrais parler avec Evan, me sort-elle.

_J'ai parlé avec lui hier soir et ça ne s'est pas très bien terminé au cas où tu l'aurais oublié.

Elle soupire bruyamment.

_Je lui ai aussi parlé.

_Quoi ?!

Elle se met à tout m'expliquer. Elle me raconte qu'elle y est allée pour l'engueuler puis s'est parti en leçon de vie, sur ma vie. Je ne sais pas vraiment quoi penser de tout ça. Je n'ai jamais douté de son sérieux, au contraire c'est ce qui m'effraie en partie. Parce que je ne veux plus de quelque chose de sérieux, moi. S'il veut se faire pardonner, très bien mais je ne pourrais pas lui offrir plus. Non pas que je n'en ai pas envie. Amber a sans doute raison, je dois éclaircir les choses avec lui. Le prof arrive alors je laisse mes contrariétés de côté et me concentre sur le cours.

Deux de sciences sociales, c'est affreux. Mes poignets me font mal et j'ai une migraine incroyable. Avec ma meilleure amie, nous discernons le prix du pire cours de la semaine à celui-ci. 

Après le cours, il est seize heures donc on va à la cafétéria pour prendre nos fameux cookies. Il n'y a pas beaucoup de personnes à l'intérieur. Ils sont tous installés sur les tables dehors au soleil alors que nous sommes collés au ventilateur. Pour une fois, j'ai pris un cookie aux fruits rouges. Ils sont délicieux. Mon Dieu ces cookies c'est comme de la drogue. Notre drogue à Amber et moi.

_Demain matin tu vas déjeuner avec Evan.

_Non.

_Quoi ? Pourquoi !?

_Ça va trop vite.

_Aya, c'est juste un déjeuner. Ça n'a encore tué personne de déjeuner avec quelqu'un à ce que je sache.

_Ouais... Et je le préviens comment ?

_Tu vas aller lui dire.

_Tu cherches ma mort, pas vrai ?

_Mais non roohh. Arrête de toujours tout dramatiser.

_Avec une meilleure amie comme toi, il y a de quoi dramatiser à chaque instant.

_Bien sur, bien sur. Dis moi juste merci et je te laisse tranquille.

_De rien.

Elle rit en croquant dans son cookie et je fais de même.

Une fois qu'on arrive à notre apart', Amber m'ordonne d'aller sonner chez nos voisins pour parler à Evan. Même si je lui laisse penser que je suis réticente pour ce déjeuner, je suis super contente de pouvoir passer un moment avec lui. J'espère juste que ça se passera bien. Et puis il faut déjà qu'il accepte. Je monte les escaliers qui mène à chez lui et toque doucement. C'est Corey qui m'ouvre. En me reconnaissant, un rictus se forme au coin de ses lèvres. Il est vraiment canon.

_Tiens, tiens... Ma jolie voisine. Tu n'es pas en T-shirt aujourd'hui ?

Je rougis en me rappelant que la seule fois qu'il m'a vu, c'était dans un simple T-shirt.

_T'as vu ça, je lui réponds en souriant. Euh... Evan n'est pas là ?

_Si dans sa chambre.

Il ouvre la porte en grand pour me laisser entrer.

_Evan, ramène ton cul ! Notre belle voisine est venue te faire un p'tit coucou.

Ce gars me tue. Je ne le connais pas, mais il me tue quand même. J'entends une porte s'ouvrir et quelqu'un râler. Evan. Il ne me remarque pas tout de suite.

_Amber si tu viens pour...

Lorsqu'il réalise que c'est moi, il est surpris. Ça en est presque comique.

_ Aya ? Qu'est-ce que tu fais là ?

_Mais enfin, Evan, voyons. Ce n'est pas une manière de parler à une jolie demoiselle, le sermonne Corey.

Je suis vraiment mal à l'aise, là. Je me tape la honte. C'était une mauvaise idée de venir.

_La ferme, Corey.

_Hum... C'est pas grave, je repasserai une autre fois.

Je recule pour sortir mais Evan fait un pas rapide vers moi.

_Non, reste. Qu'est-ce qui se passe? Tu as un problème ou tu as besoin de quelque chose ?

Oui, de toi. 

_Non. Je... Hum...

Je n'arrive pas à trouver mes mots et me dandine d'un pied sur l'autre. Je dois avoir l'air d'une vraie mongole.

_Elle est trop chou, me charrie Corey.

Evan lui lance un regard noir et le concerné lève les mains en signe de paix.

_C'est bon je vous laisse. À bientôt, Aya.

_Salut Corey.

Evan me fixe toujours en attendant que je parle alors je prends une grande inspiration pour le moment le plus humiliant de ma vie.

_Veux tu déjeuner avec moi demain matin ?

Je n'ai jamais demandé à un mec de sortir avec moi alors c'est une première et je ne pense pas que je l'oublierai un jour vu la tête qu'il fait. Il est littéralement décontenancé. Comme il ne me répond pas je prends ça pour un refus.

_C'est ridicule... C'est Amber qui m'a dit de venir, je savais que c'était une mauvaise idée.

Je me tourne et ouvre la porte que Corey avait fermé en sortant. Sa main vient recouvrir la mienne sur la poignée et je frisonne.

_Oui, murmure t-il.

_C'est vrai ?, j'insiste en lui faisant face.

_Bien sur. Si tu ne l'avais pas fait c'est moi qui t'aurais proposé, rit-il en se passant la main dans ses beaux cheveux bruns.

_À quelle heure ? Je commence les cours à dix heures.

_Pareil. Attends moi devant chez toi à 8 heures 30, ça te va ?

_Oui.

C'est seulement quand je n'ai plus rien à lui dire que je me réalise de la proximité de nos visages. Son souffle s'abat sur mon visage créant un vent chaud et mentholé. À la manière dont il me regarde, il pense à la même chose que moi. Il se penche lentement vers moi -mais là se trouve la différence entre lui et moi, je prends mon temps quand c'est nécessaire. Je tourne alors la tête et il embrasse ma joue. Son sourire contre ma peau me chatouille et je ne peux que sourire aussi. J'ouvre définitivement la porte et sors.

_À  demain matin.

_À demain Aya.

Je descends les escaliers en affichant l'un de mes sourires les plus sincères depuis longtemps. Mais ce qui est plus incroyable encore c'est qu'il est créé grâce à lui.