Chap 8
Un jeune garçon aux pupilles fendues, huma l'air frais des alentours et pressentit en voyant les flocons gelés s'écraser avec vitesse sur le sol, la Tempête qui n'allait pas tarder à venir. Un petit miaulement craintif s'échappa de la fourrure blanche posée sur les épaules du jeune. Elle se mit à bouger et deux petites oreilles apparurent, à l'écoute, avant de disparaître dans l'épaisse écharpe noire qui protégeait le cou de l'inconnu.
- Tu les sens toi aussi ? Il faudrait mieux qu'on profite des derniers rayons de soleil. Les journées risquent d'être longues....
Il se mit en marche, ses bottes noires, lacées jusqu'aux chevilles, ne laissaient aucunes traces dans la neige poudreuse. Il ne dispensait aucune ombre sur le sol, il avait l'air inexistant...
Il portait un pantalon noir, son corps drapé d'un long manteau de la même couleur, parfaitement à ses mesures. Il était torse-nu, ne laissant voir qu'une fine musculature ornée de nombreuses cicatrices blanchâtres. Le décalage entre la température extérieure et sa semi-nudité était saisissant. Ses yeux d'une couleur ambrée, étaient soulignés d'un trait noir, sur le haut de ses pommettes. Il avait des cheveux d'un blond presque blanc, dont les mèches se soulevaient sous la force du vent, comme la boucle étrange qui pendait à son oreille gauche, une étoile qui transperçait sa chair d'argent.
Il se laissait guider par ses pas, il connaissait les environs par cœur. L'inconnu affectionnait particulièrement la neige. C'était l'une des plus belles choses qu'il avait vues en arrivant ici. Les montagnes se chevauchaient à l'horizon, les bords escarpés, les pics taillés dans la glace. Le spectacle quelle que soit l'heure de la journée était à couper le souffle. Il ne fallait craindre, en ce monde, que les Tempêtes. La petite boule de poils se releva d'un coup, ses petits yeux sombres perçant l'horizon, les oreilles à l'affût. Le jeune homme n'eut pas le temps de tourner la tête qu'une déflagration tonna dans le ciel, suivit d'un bruit de choc épouvantable, dans l'écho des montagnes, tout proche de lui. Il n'eut le temps d'apercevoir que quelques secondes, la déchirure qui s'était formée dans le ciel, avant de comprendre, que quelque chose clochait.
Le petit renard sauta d'un bond dans la neige et se mit à courir gracieusement, sans vérifier que l'inconnu le suivait. Sans se poser de questions, il suivit l'animal, en proie au même instinct que lui. Quelqu'un était en danger.
Il suivit à grands pas, silencieux dans le froid, la petite bête en qui il avait confiance depuis des années. Se protégeant d'un bras contre les rafales de vents qui le menaçait de tomber, il se rapprocha de la montagne, sur le chemin étroit et glissant de verglas, il s'avança à pas lent sur les derniers mètres, avant de parvenir à une fosse, dont la roche était couverts de traces de brûlures et de cendres, la neige avait empli la fosse d'une épaisse couche, mais il parvenait à voir les ailes d'un immense Dragon, aux écailles blanches et rosées, qui semblait être mal en point avec les déchirures sur la membrane de celles-ci, et les traces de sang qui ornait son dos et sa tête. Il semblait dormir paisiblement. Ce spectacle était effrayant et magnifique à la fois, pensa le jeune homme. Un petit grognement retentit dans la neige, et il aperçut la petite bête qui l'avait devancée, fouillant la neige de son museau, à la recherche de quelque chose qu'il avait senti.
En descendant, dans la fosse, les vents se firent plus calme, ne laissant qu'une fine pluie de neige retomber sur le corps inanimé de l'énorme animal, comme si la nature ne le voyait pas, et voulait le faire disparaître à la vue du monde. Il s'avança à grands pas vers le Dragon. Et tracer un cercle de ses mains, il les rapprocha l'une à côté de l'autre pour concentrer son énergie sur ses deux mains, créant des étincelles d'un rose -violet, et caressa les écailles du dragon, l'éclat de magie recouvrit le corps entièrement, ses pupilles se dilatèrent jusqu'à prendre entièrement la surface de son œil, les rendant aussi noirs que la nuit. Une vive lumière s'échappa du dragon, à ses mots :
- Yui anagan tori memno da !
Le Dragon disparut brusquement et l'éclat s'échappa des doigts du jeune garçon, comme si, rien ne s'était produit. Ses yeux avaient repris leur forme initiale lorsqu'il se retourna pour observer son ami. Il s'approcha du petit renard, en réfléchissant à ce qui avait bien pu amener ce Dragon à s'échouer ici. La petite bête se tourna vers le garçon, avant de caresser doucement de son nez quelque chose qui transparaissait sous la neige. Le jeune homme comprit en une fraction de seconde, et en voyant les doigts que caressait le renard, il se jeta à genoux et se mit à creuser, rapidement :
- Miya aide moi à sortir le corps de là ! Il est peut-être encore en vie !
Un éclat orangé s'échappa des yeux du renard, englobant l'entièreté de son corps dans une vague qui s'amplifia jusqu'à ce qu'un tigre au pelage couleur de neige, rayée de noir apparaisse. De ses grosses pattes, il se joignit à l'effort du garçon, pour déterrer le malheureux qui se trouvait sous la neige épaisse qui l'avait rapidement recouvert. Ils virent rapidement son visage, ses longs cheveux bruns qui couvraient son corps uniquement vêtu d'une chemise, ses cils étaient glacés et ses lèvres bleues. L'inconnu souleva la fille, la prenant sous les épaules et la tira de toutes ses forces pour la sortir de la neige. Elle avait les joues froides, son corps inerte, avait l'air endormie dans le profond sommeil que la mort donnait. En proie à la panique, il posa sa joue contre les lèvres gercées de celle qu'il avait déterré, et sentait un faible souffle, presque insoupçonnable parcourir sa joue. Elle était en vie. Mais s'ils ne faisaient rien, elle mourrait probablement dans les prochaines minutes. Il avait mis du temps avant d'arriver depuis le bruit qui avait retenti, mais il ne se doutait pas que la neige avait si vite englouti le Dragon et maîtresse. C'était sûrement des voyageurs, qui avaient dû faire une mauvaise chute en traversant les dimensions. Brusquement, le tigre lâcha un grognement et creusa brusquement dans la neige non loin du Dragon. Le jeune garçon leva les yeux vers son ami, et comprit que la fille qu'il tenait entre ses mains n'était pas la seule à être enseveli sous la neige. Il laissa La créature s'occuper du deuxième voyageur, et posant ses mains sur les joues glacées de la jeune fille, il inspira profondément, laissant la magie couler dans ses veines jusqu'à l'extrémité de ses doigts, faisant transparaître une lumière violette qui rapidement recouvra délicatement le corps d'une fine pellicule de magie, presque invisible, empêchant le froid extérieur d'approcher du corps inerte, s'immisçant dans les veines de la fille aux oreilles pointues, afin de le faire circuler plus vite pour réchauffer son corps gelé. Il prit la fille dans ses bras, passant un bras sous ses épaules et sous ses genoux et se rapprocha du Tigre qui avait découvert un petit garçon aux cheveux blancs, qui tenait fermement sa sacoche entre ses bras. Il respirait normalement, contrairement à la fille, son souffle lâchait des volutes d'air chaud, comme s'il faisait une sieste, sans se soucier du froid. Intrigué, d'un mouvement de bras, il déposa le corps qu'il tenait dans la neige et approcha sa main du front du petit garçon. Celui-ci était d'une température parfaitement normale, il ne souffrait pas du froid. Il attrapa le sac qu'il tenait, le mit sur son épaule et fit un mouvement de tête en direction du jeune garçon. Le tigre comprit le message, et s'abaissa, de manière à ce que le corps du petit garçon soit sur son dos. Toujours endormi, celui ci se retourna et attrapa la fourrure du tigre, sans pour autant se réveiller.
Le jeune homme accompagné du tigre reprit le chemin vers le cœur de la montagne, où se trouvait la caverne où ils avaient élus domicile. Les nuages grondaient furieusement et n'allaient pas tarder à venir se frotter à eux. Ils marchaient vite dans la pénombre qui commençait à descendre. Ils arrivèrent près de leur refuge, une grande crevasse qui faisait office d'ouverture, apparut bientôt dans leurs champs de vision. Ils rentrèrent rapidement et marchèrent une centaine de mètre dans l'obscurité de celle-ci. Les parois rocheuses étaient sèches, seul le sol était couvert des restes de neige provenant de l'extérieur. Le vent ne les attaquait plus, et dans le silence, on entendait que le bruit des chutes d'eau vrombissantes. Ils s'arrêtèrent face au rideau d'eau qui leur faisaient face et le traversèrent, arrivant enfin, chez eux.
Ils se trouvaient dans une immense caverne, dont les parois avaient été polies par le temps. De grands coussins noirs et épais servaient de lit, cousu dans un tissu à base de poudre de baziel, une pierre avec la particularité d'être aussi douce qu'une plume. Le sol et les cousins étaient recouverts de peau de mouton laineux et de fourrures disséminées à certains endroits. Des étagères étaient creusées à même la roche, et des cartes célestes recouvraient les murs. On voyait dans un coin de la pièce, posés sur un repli de la grotte, un certains nombre de pierres noires ou était posés des récipients. La lumière provenait du sol, d'une couleur cristalline, il laissait voir des bulles de laves orangées et lumineuses, qui se regroupaient avant de se séparer, éclatante de lumière. Le jeune garçon déposa la fille sur les grands cousins puis entreprit de récupérer le corps du petit garçon et de le déposer à ses côtés. Le tigre s'enveloppa d'un éclat bleuâtre avant de reprendre la forme d'un renard et de bondir sur le lit, aux côtés des deux voyageurs. L'inconnu déposa sa veste, son écharpe et la sacoche sur une chaise et s'affairant dans une armoire, cisaillée dans la pierre, il chercha de quoi panser les quelques plaies superficielles, de la jeune fille, et un baume à base de fleurs cristallines qu'on ne trouvait que sur les sommets des plus hautes montagnes, pour faire disparaître ses bleus. Le jeune garçon, lui, étrangement n'avait aucune séquelle. Il enleva les chaussures de ses deux protégés qui étaient gorgées d'eau, et entreprit d'enlever le pantalon et le haut du garçon, essuyant son corps rapidement dans un tissu de laine douce pour sécher son corps et lui mit un de ses vieux pyjama, bien trop grand pour lui, mais qui pourrait le tenir au chaud. La jeune fille, elle ne portait qu'une maigre chemise sur elle, trempée, aussi, il hésita quelques instants avant de l'enlever et de frictionner délicatement son corps également. L'heure n'était pas à la pudeur. Il ne pouvait pas la laisser dans des vêtements mouillés. Il enleva doucement le bout de linge qui soutenait sa poitrine et sa nudité, et les joues rosie, entreprit de finir au plus vite. Il lui donna un pull et un bas épais, assez lâche, pour qu'il soit à sa taille et pas trop gênant. Il désinfecta ses quelques plaies et appliqua de la crème sur les bleus. Il avait au préalable pris une éponge mouillée pour nettoyer le visage des deux adolescents couverts de saleté et de poussière. Il passa très rapidement ses doigts dans les cheveux de la jeune fille pour dénouer un peu les nœuds qu'elle avait et sortir la broche qui y était coincée. Il replia la couverture sur eux. Il se chauffa une tasse de breuvage d'une couleur âcre la posant sur une des pierres plate et noire, qui au contact de l'objet dégagea de la chaleur. Il s'assit sur le sol, dans une fourrure rousse, appuyé contre la paroi, épuisé. Le petit renard, qui avait regardé patiemment les gestes de son maître sur le lit, le rejoignit et se posa sur ses genoux, attendant que celui-ci le caresse. Il s'arrêta brusquement et fut traversé par la même image que son maître. Le Dragon se mourait, il n'avait plus de source de magie pour pouvoir se guérir seul. L'inconnu soupira longuement et bus plusieurs gorgées en caressant distraitement l'animal. Il en aurait pour toute la nuit. Il soupira et se frotta les yeux de fatigue. Il tapota le petit renard pour qu'il se décale et se leva en direction de la sortie :
- Miya, surveille nos deux voyageurs, vient me chercher s'il y a le moindre souci, je reviens, lança-t-il en traversant le rideau.
Il s'arrêta et ferma les yeux, concentré sur ses pensées. Il posa ses mains sur ses yeux, puis les descendit sur ses joues délicatement avant de les positionner face à lui. Il ouvrit alors brusquement ses yeux, dont les pupilles s'étaient arrondies et un éclat irisé s'échappa de ses iris et du centre de ses paumes, la magie se déversa en lui comme une vague déferlante, ses yeux picotaient de manière agréable, c'était la sensation qui évoquait que la magie opérait. Il projeta alors face à lui une énorme bulle rose dans laquelle sommeillait profondément le dragon. Enroulé sur lui-même, il respirait lentement, et se nourrissait de la magie dans laquelle il était enfermé. L'inconnu avait reconnu le Dragon, c'était un Hek et ses écailles sentaient les vestiges d'une version de Nindia qu'il n'avait jamais connu. Il avait concentré là une source de maie qui ne provenait que du cœur de ce monde et qui saurait le guérir partiellement. Le jeune homme abaissa ses mains, en proie à une fatigue incroyable. Il ne sentait presque plus ses muscles. Il trébucha légèrement et prit de vertiges il manqua de tomber lorsque Miya surgit sous la forme d'un tigre, traversant le rideau d'eau et se positionnant de manière à ce que son maître puisse s'accrocher.
L'inconnu se raccrocha à son pelage et lâcha un soupir. Il avait utilisé une grosse dose de magie en peu de temps. Les forces lui manquaient. L'immersion de chaleur qu'il avait créé autour du corps de la jeune fille et la bulle D'Orgozon lui avait pompé les dernières forces de la journée.
Projeter ses pensées était un travail pénible, que peu de créatures de son espèce parvenait à faire. Accrochés d'une main au tigre, ils rentrèrent dans leur demeure. Le dragon ne risquait rien, s'il y avait un danger, il le saurait bien assez vite avant qu'il ne pénètre dans les environs de la caverne.
Il se reposa sur le canapé, épuisé et tournant la tête vers la sacoche, il fronça les sourcils, se demandant qui pouvait bien être ces deux voyageurs. En proie à la curiosité, il lança un coup d'œil a Miya, transformée à présent en belette blanche, qui accourut et se posa sur ses épaules. Il tendit le bras et attrapa la sacoche, déversant son contenu. Il s'arrêta sur le vieux livre et fut étonné de n'en voir que des pages vierges. Il lança un coup d'œil au garçon qui dormait paisiblement dans le lit et se demanda qui pouvait-il bien être. Il réfléchit quelques instants face aux pages et eut tout à coup un pressentiment. Une aura puissante se dégageait du livre, comme un aimant qui attirait les magies environnantes. De plus en plus intrigué, il passa ses doigts sur les pages pour vérifier ce qui lui avait traversé à l'esprit, laissant une faible étincelle orangée, clignoter sur son index. À son contact, les pages se couvrirent de mots incompréhensibles pour lui. Des pages entières de caractères, il s'arrêta brusquement sur une page qui brillait d'un éclat bleuté, et à l'instant où il voulut faire apparaître ce qui devait y être marqué celle-ci projeta une étincelle rouge, créant une sensation de brûlure sur toute sa main l'espace de quelques secondes. Il n'en revenait pas. Ce livre était inestimable. D'où venaient ces voyageurs ? Qui étaient-ils ? Que venaient-ils faire à Nindia
Il s'endormit sur ses pensées, emporté dans son monde.
***
Le jeune garçon aux yeux orangés se réveilla difficilement, le visage barbouillé, il passa une main sur son visage, laissant les souvenirs de la veille revenir. Son regard se posa sur les deux convalescents, et dans un soupir, il se leva et mit à chauffer de l'eau. Il remplit un bol en terre cuite de diverses fleurs colorées aux pétales délicates, qu'on pouvait voir dans les bocaux de son étagère et y versa un liquide blanchâtre. Il posa les récipients sur la table et, attrapa une laine blanche pour la mettre sur ses épaules. Les matinées étaient fraîches à Nindia, et il s'était endormi à moitié nu. Il resta un moment face au reflet que dispensait le rideau liquide qui cachait les cavernes creusées dans la roche, comme dans la plupart des habitations aux alentours du temple. On ne lui donnait pas de nom, c'était comme la lave, une eau naturelle des montagnes de Nindia, brûlante et cristalline. Seulement ce qui l'avait le plus troublé, c'était sa capacité à répondre à sa propre magie. Ce rideau était comme un miroir.
Il passa ses doigts dans la douceur du rideau, laissant des images de montagnes escarpées, couvertes d'une neige brillante sous les rayons de l'aube apparaître dans son esprit. Lorsqu'il ouvrit les yeux, le rideau dans un éclat bleuté, reproduisait parfaitement les images qui l'avait traversé. C'était ça. Le miroir de ses pensées. Il sourit face à la magnifique vue et chercha son breuvage et son bol afin de les déguster , installé confortablement dans un grand coussin noir et spacieux, plus petit que celui qui lui servait de lit. Miya au son des pas de son maître, ouvrit sa gueule de renard en émettant un grognement, laissant apercevoir ses crocs. Elle cligna ses grands yeux noirs et s'approcha de son ami. Léo leva un sourcil et posant ses affaires partit chercher des bouts de viande séchée pour la petite boule de poils. À l'instant où il attrapa le bocal, la jeune fille allongée dans le lit se mit à parler :
- Arkayn, je n'y arrive pas. Où es-tu ?
Le son de ses mots marmonnés avait attiré l'attention de Léo qui en tournant la tête dans sa direction constata qu'elle était toujours profondément endormie.
Il fut surpris de comprendre ce qu'elle disait, pas parce qu'elle ne provenait pas de Nindia, mais parce qu'elle parlait dans sa langue natale, une vieille langue usité uniquement par les Passeurs.
La Langue des Tisseurs de Rêves.
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